Compte rendu

Commission
des affaires sociales

–  Projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) (seconde partie) :

 Audition de M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, de Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées, et de Mme Charlotte Caubel, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargée de l’enfance              2

 Examen et vote sur les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances (Mme Christine Le Nabour, rapporteure pour avis)              25

– Présences en réunion.................................34

 

 

 

 

 


Mardi
18 octobre 2022

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n° 11

session de 2022-2023

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
Présidente
 

 


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La réunion commence à dix-sept heures quinze.

 

La commission auditionne M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées, et Mme Charlotte Caubel, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargée de l’enfance.

 

 

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous engageons nos travaux sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 en commençant par l’examen des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, inscrits à l’ordre du jour de la séance du jeudi 3 novembre. La réunion se déroulera selon les modalités définies par le bureau le 5 octobre dernier.

M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées. Je suis heureux de vous retrouver pour ce premier examen pour avis des crédits d’une mission d’une importance singulière puisqu’elle englobe la lutte contre la pauvreté, la réduction des inégalités et la protection des personnes vulnérables, toutes politiques à l’impact direct sur la vie quotidienne de millions de Français et sur lesquelles les parlementaires exercent une attention particulière. Si les lois de finances sont sans doute la meilleure incarnation de l’action et de l’initiative gouvernementales, elles rappellent aussi l’importance de la mission parlementaire de vote et de contrôle. Le budget de l’État est un tout ; il demande à chacun cohérence et responsabilité. Il est donc nécessaire de rappeler le contexte dans lequel le projet de budget que nous vous présentons a été élaboré : une forte inflation et des mesures puissantes prises par le Gouvernement pour protéger les Français les plus vulnérables de ses effets. C’est aussi un contexte de transition, avec une stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté qui doit trouver un nouvel élan. C’est encore un contexte de transformation profonde liée au vieillissement de la population, qui nous oblige plus que jamais à anticiper et à nous adapter.

Étant donné cet arrière-plan, on saluera la hausse prévue pour 2023 des crédits de cette mission. Ils augmentent de 7,8 %, si bien que plus de 2 milliards d’euros supplémentaires seront consacrés aux politiques que j’évoquais il y a un instant. C’est le cas, en particulier, pour le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes, dont les crédits augmentent de près de 1,2 milliard d’euros à périmètre constant, avec certaines évolutions saillantes. C’est d’abord la montée en puissance de la prime d’activité et d’autres prestations, avec la revalorisation de 4 % anticipée au 1er août dernier pour tenir compte du contexte inflationniste. C’est aussi le lancement du fonds des nouvelles solidarités alimentaires, doté de 60 millions d’euros. Nous voulons ainsi améliorer la qualité de l’offre d’aide alimentaire et réduire l’impact environnemental du dispositif actuel, conformément à la démarche globale du Gouvernement, qui vise à faire de l’aide alimentaire un outil central de l’accès des plus fragiles à une alimentation durable et de qualité et en faveur de la lutte résolue contre la précarité alimentaire dont souffrent encore 7 à 8 millions de personnes dans notre pays.

J’insiste à ce sujet sur l’abondement de 7 millions d’euros de crédits supplémentaires pour permettre aux communes de poursuivre la tarification à 1 euro dans les cantines. Alors que les élèves issus de familles modestes déjeunant à la cantine sont deux fois moins nombreux que les élèves issus des familles favorisées et que cette inégalité sociale se double d’une inégalité territoriale, ce dispositif garantit l’accès à un repas équilibré à tous les enfants et protège le pouvoir d’achat des familles. Plus de 100 000 enfants ont bénéficié de repas à 1 euro maximum pendant l’année scolaire 2021-2022, soit quatre fois plus que l’année scolaire précédente. Nous devons bien sûr poursuivre cet effort et les parlementaires ont un rôle à jouer à ce sujet, en allant à la rencontre des maires des communes éligibles à cette mesure – celles qui comptent moins de 10 000 habitants – pour les encourager à adhérer à ce dispositif central de notre lutte contre les inégalités de destin.

Dans le prolongement des actions conduites en 2022, des crédits seront mobilisés en 2023 pour soutenir l’accompagnement global de l’enfant dans les 1 000 premiers jours de sa vie. Les mesures issues du rapport Cyrulnik, pour une grande part mises en œuvre par mon prédécesseur, Adrien Taquet, continueront ainsi d’être financées.

Les crédits de ce budget servent à protéger des enfants mais aussi des adultes. Ainsi, le dispositif de protection juridique des majeurs vise à garantir aux adultes vulnérables la protection de leurs droits. Quelque 900 000 personnes en bénéficient aujourd’hui et, étant donné le vieillissement de la population, ce dispositif pourrait concerner jusqu’à 2 millions de personnes en 2040. Aussi le Gouvernement a-t-il fait de cette protection une de ses priorités, ce que traduit le projet de budget pour 2023 avec une hausse de 9 % des crédits. Ils serviront à des mesures salariales destinées à restaurer l’attractivité du métier de mandataire à la protection juridique des majeurs ; à permettre des recrutements supplémentaires au sein des services mandataires, indispensables pour améliorer la qualité de l’accompagnement ; à financer l’information et le soutien des tuteurs familiaux.

Enfin, ces politiques publiques demandent des équipes spécifiquement formées et en nombre suffisant. C’est pourquoi, pour la troisième année consécutive, le schéma d’emploi du ministère est positif, avec une augmentation nette de 58 équivalents temps plein travaillé (ETPT) prévue en 2023. Ils contribueront en majeure partie au renforcement pérenne des services, certains recrutements étant aussi prévus pour l’organisation des Jeux olympiques. En outre, le plafond d’emplois intègre de manière pérenne 50 ETPT auparavant employés en renfort temporaire pendant la crise sanitaire. Le ministère capitalisera ainsi les compétences alors acquises en matière de pilotage et de gestion de crise.

Au-delà du seul ministère, le programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales finance également les subventions pour charges de service public versées aux dix-huit agences régionales de santé (ARS). Sont ainsi pérennisés les 120 ETPT annoncés, destinés à renforcer les missions d’inspection et de contrôle des Ehpad.

Telles sont les grandes lignes des crédits prévus pour la mission Solidarité, insertion et égalité des chances.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, chargée des personnes handicapées. La prise en charge du handicap est une politique prioritaire du Gouvernement. La Première ministre l’a affirmé avec force dès son discours de politique générale du 6 juillet et l’a redit lors du comité interministériel du handicap qui s’est tenu il y a deux semaines. Lors de cette réunion, Mme Borne a fixé un cap, une méthode et des priorités à notre action. Notre conviction s’exprime simplement : les personnes en situation de handicap doivent être systématiquement prises en compte dans toutes les politiques publiques dès le moment de leur définition. Cela figure dans la feuille de route de chacun des ministères. Le caractère prioritaire de cette politique se traduit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) avec une hausse inédite de 230 millions d’euros des dépenses affectées au volet « personnes en situation de handicap », et dans le PLF 2023 avec une augmentation de 6,4 %, soit 845 millions d’euros supplémentaires, pour le programme 157 Handicap et dépendance. Nous poursuivons ainsi les engagements pris lors de la Conférence nationale du handicap de 2020, et préparons activement la prochaine conférence, qui aura lieu l’année prochaine.

Au nombre des dépenses financées sur le programme 157, il y a évidemment l’allocation aux adultes handicapés (AAH) pour 12,5 milliards d’euros, soit une hausse de 750 millions d’euros qui tient compte de l’évolution tendancielle de cette allocation mais aussi des deux mesures que vous avez votées dans la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat : la revalorisation de 4 % pour tenir compte de l’inflation et la déconjugalisation de l’allocation.

Le deuxième axe de ce budget est la garantie de rémunération des travailleurs handicapés en établissement et service d’aide par le travail (Esat). 1,5 milliard d’euros sont consacrés à cette action, et nous menons une réforme structurelle visant à fluidifier les parcours professionnels des personnes concernées en ouvrant la possibilité aux travailleurs handicapés d’avoir une double activité en Esat et en milieu de travail ordinaire et en créant un droit de retour en Esat lorsqu’ils sortent du milieu ordinaire. C’est une dépense de 5 millions d’euros supplémentaires en 2023 au titre de la garantie de ressources des travailleurs handicapés et de 9 millions au titre de l’AAH.

Le programme 157 finance également l’emploi accompagné, à hauteur de 22,4 millions d’euros ; ce dispositif permet d’insérer et de maintenir en emploi des personnes en situation de handicap. Enfin, il permettra de cofinancer avec le ministère de la culture la création d’un portail national de l’édition accessible visant à simplifier l’accès aux livres et revues adaptées et à augmenter significativement l’offre de contenus ; ce service sera accessible aux usagers en 2025.

Ce budget résolument ambitieux pour les personnes en situation de handicap s’inscrit dans le cycle long de la concertation qui préside depuis longtemps à la construction de notre politique. Il prépare le terrain pour faire de la prochaine conférence nationale du handicap un tremplin pour la suite de notre action.

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d’État auprès de la Première ministre, chargée de l’enfance. Je prends la parole devant vous dans un contexte particulier. La diffusion d’un reportage télévisé dont il a été question cet après‑midi en séance publique dit l’urgence à intervenir. Les situations révélées ne décrivent évidemment pas l’action de toute la protection de l’enfance, mais elles suscitent l’effroi et exigent que nous agissions tous ensemble. Les agissements décrits imposent des réponses fermes par le Gouvernement et des réponses dans le cadre du PLF, et j’ai sollicité le renforcement des équipes pour intensifier les contrôles dans les établissements et les services.

Mais je tiens également à saluer l’action des départements, des associations et des professionnels qui travaillent tous les jours à la protection de l’enfance et qui font un travail extraordinaire au bénéfice des plus fragiles. Au-delà de ce reportage, les chiffres sont particulièrement inquiétants : il y a toujours un enfant qui meurt tous les cinq jours des conséquences de violences commises dans le cadre familial, et à cela s’ajoute le constat effrayant de la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions, selon laquelle 160 000 enfants au moins sont victimes de violences sexuelles. De plus, de très nombreuses personnes sans domicile fixe sont d’anciens enfants placés. Cette réalité inacceptable explique la feuille de route qui m’a été confiée par la Première ministre et qui définit trois priorités : mettre en œuvre les avancées du précédent quinquennat, notamment la loi relative à la protection des enfants du 7 février dernier ; agir pour l’égalité des chances et la protection des enfants sur tout le territoire, en lien avec mes collègues du Gouvernement – il y a beaucoup d’acteurs, beaucoup de moyens sont mobilisés et beaucoup de bonne volonté, mais une meilleure coordination est indispensable ; enfin, accompagner les professionnels de la protection de l’enfance. Ce secteur connaît une crise ; nous sommes mobilisés pour apporter des solutions et renforcer l’attractivité de ce métier.

Le PLF 2023 maintient les crédits de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance du précédent Gouvernement ; ils incluent le renforcement de la prise en charge des jeunes majeurs, pour 190 millions d’euros. L’objectif est de poursuivre les actions engagées mais aussi d’évaluer ce qui a été fait et, probablement, de renforcer la contractualisation en associant aux départements et aux ARS la justice et l’éducation nationale. Est prévue l’augmentation des emplois sur le terrain pour les contrôles et le pilotage de cette action aux côtés des départements. Ceux-ci sont bien sûr les chefs de file de la protection de l’enfance mais l’État doit procéder aux contrôles nécessaires, que les établissements soient habilités judiciairement ou autorisés par les départements. 51 ETPT ont été sollicités : 31 pour les directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités, 20 pour les services de la protection judiciaire de la jeunesse et les contrôles au titre de l’habilitation judiciaire. En outre, le Gouvernement portera un amendement visant à la création d’un « jaune » budgétaire sur l’enfance, indispensable pour disposer d’une vision complète des financements servant à accompagner et protéger les enfants les plus vulnérables. Les départements consacrent plus de 8 milliards d’euros à la protection de l’enfance, mais l’État se mobilise aussi fortement par le biais de crédits alloués à différentes missions, des moyens affectés à la justice des mineurs, à l’éducation nationale, à la santé et à la prise en charge du handicap. Il importe que ces financements soient plus visibles.

Mme Christine Le Nabour, rapporteure pour avis. Je suis heureuse de vous présenter, au nom de la commission des affaires sociales et pour la deuxième année consécutive, mon avis sur la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. Depuis cinq ans, la majorité œuvre avec ambition à lutter contre la pauvreté et à la prévenir. La mission comprend les crédits du budget de l’État destinés à la mise en œuvre des politiques de lutte contre la pauvreté́, de réduction des inégalités, de protection des personnes vulnérables et de promotion de l’égalité́ entre les femmes et les hommes. Le PLF 2023 traduit une nouvelle fois cette priorité gouvernementale : les crédits de la mission s’élèvent à 29,8 milliards d’euros, en augmentation de 6,6 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2022.

Outre une partie de la revalorisation anticipée de 4 % des prestations sociales, notamment de la prime d’activité qui avait déjà connu une augmentation significative en 2019, le PLF 2023 prévoit la budgétisation de la déconjugalisation de l’AAH. Cette mesure bénéficiera à 160 000 de nos concitoyens en situation de handicap pour un gain moyen de 300 euros mensuels. Un dispositif transitoire permettra d’accompagner les perdants de cette réforme en maintenant le mode de calcul actuel lorsqu’il leur est plus favorable. Un effort considérable est accompli en faveur de pouvoir d’achat et de l’autonomie des personnes en situation de handicap : depuis 2017, les crédits consacrés à l’AAH ont progressé de 38 %, soit 3,5 milliards d’euros supplémentaires par an.

Fidèle à ses principes, la majorité favorise leur accès à l’emploi en pérennisant, à hauteur de 22,4 millions d’euros, l’effort budgétaire consacré à l’emploi accompagné dans le plan de relance. Vous savez mon combat pour l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap ; je souhaite que vous confirmiez les mesures que le Gouvernement entend prendre pour assurer le gain monétaire au travail et l’incitation à l’activité de nos concitoyens en situation de handicap.

La mission comporte aussi des mesures structurantes : le doublement des crédits alloués à l’aide alimentaire par la création d’un fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires ; l’augmentation de 15 % du budget consacré à la culture de l’égalité entre les femmes et les hommes ; le soutien aux centres d’information sur le droit des femmes et des familles, à la mixité professionnelle, à l’entrepreneuriat des femmes et à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.

Les crédits consacrés à la protection des enfants et des familles vulnérables augmentent de près de 27 %. 50 millions d’euros seront notamment alloués à l’accompagnement des départements pour prévenir la sortie « sèche » des jeunes majeurs de l’aide sociale à l’enfance (ASE), en application de la loi « Taquet » relative à la protection des enfants.

Après une forte mobilisation entre 2019 et 2022, l’année 2023 sera également une année de transition dans la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté, avec le bilan de sa mise en œuvre. J’appelle l’attention des ministres sur l’importance de cette évaluation, pour ce qui concerne en particulier le déploiement territorial de cette stratégie. Je fais miennes les conclusions du comité d’évaluation présidé par Louis Schweitzer invitant à renforcer nos capacités d’évaluation des politiques de prévention et de lutte contre la pauvreté.

Dans l’attente de ce bilan et dans la perspective de l’intégration du volet « insertion » de la stratégie au sein de France Travail, je me réjouis de constater que le PLF 2023 permet de poursuivre les actions en faveur de l’insertion et de l’accès aux droits. Je pense notamment à la montée en charge de la tarification sociale des cantines, avec 7 millions d’euros supplémentaires, et à l’expérimentation de territoires « 100 % accès aux droits », dotée de 2 millions d’euros.

Parce que l’accès aux droits me tient particulièrement à cœur, j’ai choisi de consacrer la seconde partie de mon avis budgétaire à la modernisation de notre système de protection sociale dans la perspective de la mise en place de la solidarité à la source.

En août 2018, pour donner suite à la mission que nous avait confiée le Premier ministre de l’époque, Edouard Philippe, j’ai remis un rapport co‑écrit avec Julien Damon sur « la juste prestation » – une prestation efficiente, instruite, contrôlée et liquidée plus efficacement. La juste prestation ne réduit pas les droits mais les erreurs autour des droits et s’ajuste au mieux à la situation réelle des bénéficiaires. La juste prestation est donc d’abord une prestation ajustée : il faut payer la bonne prestation, au bon moment, à la bonne personne.

Ces réflexions ont guidé les discussions menées pour construire la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté lancée par le Président de la République en septembre 2018. Elles ont irrigué la concertation préalable à la création du revenu universel d’activité, dont le rapport de préfiguration, bien que remis à l’ancien Premier ministre Jean Castex l’année dernière, n’est toujours pas rendu public ; pouvez-vous vous engager à le publier dans les meilleurs délais ?

Le constat est connu : la complexité de notre système alimente le non-recours aux droits, favorise les erreurs de gestion et diminue l’efficacité du dispositif. Une enquête de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques parue en février 2022 montre ainsi que « un tiers des foyers éligibles ne recourent pas au RSA en moyenne chaque trimestre, et un cinquième de façon durable ». Ce sont autant d’obstacles à une juste prestation. Il nous faut donc rebâtir les fondations du système de solidarité sur deux piliers : la solidarité à la source et la réforme de l’accompagnement des bénéficiaires.

Engagement présidentiel, la solidarité à la source dépend des deux éléments indissociables que sont la simplification du cadre juridique et l’automatisation des prestations. Pour l’automatisation, des avancées notables ont eu lieu grâce à l’évolution des systèmes d’information et des données sociales ; je pense en particulier à l’octroi automatique d’une couverture complémentaire santé aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et à la « contemporanéisation » des aides au logement, qui permet d’ajuster en temps réel le montant des aides personnalisées au logement. Ces innovations ont notamment pu s’appuyer sur un amendement que j’avais proposé lors de l’examen du PLFSS 2021 et qui visait à améliorer les échanges de données entre organismes sociaux. L’interopérabilité des systèmes d’information doit d’ailleurs être renforcée, comme doit l’être encore l’automatisation, sans précipitation mais avec détermination. Un consensus ressort des auditions que nous avons menées : notre système de solidarité doit préserver le choix des personnes. Il ne convient pas de supprimer le principe de quérabilité des aides mais de proposer aux personnes éligibles d’ouvrir leurs droits tout en conservant la possibilité de les refuser. C’est un chantier de longue haleine et semé d’embûches et je salue l’engagement du Gouvernement à ce sujet : l’automatisation du calcul des droits au RSA, à la prime d’activité et aux aides au logement permettra, à moyen terme, d’alléger considérablement les obligations déclaratives.

Pour faciliter l’automatisation, il nous faut en parallèle simplifier le cadre juridique de notre système de solidarité en harmonisant les modalités de prise en compte des ressources des bénéficiaires de prestations sociales. Je suis favorable à l’instauration d’un revenu social de référence, pendant du revenu fiscal de référence pour les prestations sociales.

Mais la modernisation des prestations sociales doit s’assortir d’une révolution de l’accompagnement, seule à même d’assurer l’insertion durable pour nos concitoyens dont la situation est la plus précaire. Il est essentiel d’aller vers les personnes pour les informer sur leur éligibilité aux prestations. Toute personne se trouvant soudainement dans une situation précaire en raison d’une rupture professionnelle ou personnelle doit savoir à quelle porte frapper et qui peut l’orienter et l’accompagner si nécessaire.

Pour le repérage et l’ouverture des droits, des expérimentations récentes montrent la voie à suivre. Je pense notamment au data mining, c’est-à-dire l’exploitation des données sociales dans un but d’accès aux droits. Les « Rendez-vous des droits » organisés par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), inspirés des « Rendez-vous des prestations » organisés par la Mutualité sociale agricole depuis 2007, ont permis à un tiers des personnes accompagnées d’ouvrir de nouveaux droits.

Je me réjouis de l’expérimentation, dès 2023, de « territoires 100 % accès aux droits », issue d’un amendement que j’avais porté lors de l’examen du projet de loi « 3DS ». Elle permettra d’enrichir notre arsenal de lutte contre le nonrecours et de déterminer de bonnes pratiques à généraliser. Mais pour tirer l’entier bénéfice de ces expérimentations, j’appelle l’attention des ministres sur l’impérieuse nécessité de consolider la formation des travailleurs sociaux ; quelles mesures le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre à cette fin ?

Enfin et surtout, il nous faut procéder à un « Grenelle de l’accompagnement ». Les prestations sociales sont un filet de sécurité, mais seul un accompagnement socio-professionnel soutenu et personnalisé peut permettre de sortir durablement de la pauvreté. C’est tout l’enjeu de la mise en place de France Travail, qui aura la lourde tâche de décloisonner emploi et insertion, notamment par le renforcement des parcours d’orientation socio-professionnelle des bénéficiaires du RSA, en lien avec les territoires.

La modernisation des prestations sociales, défi qui relève davantage du marathon ou du saut d’obstacles que du sprint, nous oblige collectivement. Seuls le volontarisme et la persévérance nous permettront de le relever pour adapter l’État‑providence aux enjeux de la société contemporaine.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous en venons aux orateurs des groupes.

Mme Michèle Peyron (RE). Les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances s’élèvent à 29,8 milliards d’euros. Peu importe ce que certains en disent : cette augmentation de 6,56 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2022 participe de la revalorisation continue de ces crédits depuis 2017, pour un montant de 12,1 milliards d’euros. Conformément à ses engagements, la majorité œuvre depuis cinq ans avec détermination et conviction à la lutte contre la pauvreté, à la réduction des inégalités et à la protection des personnes les plus vulnérables de notre société.

Pour 2023, la hausse des crédits de la mission est principalement allouée à des mesures en faveur de la protection du pouvoir d’achat, avec la revalorisation de 4 % des prestations sociales et la déconjugalisation de l’AAH. D’autres mesures primordiales doivent être soulignées : l’augmentation de 15 % du budget consacré à l’égalité femmes-hommes et à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, et la revalorisation de 106 % par rapport à la loi de finances initiale pour l’année 2022 des crédits affectés à l’aide alimentaire, soit 117 millions d’euros.

La stratégie de prévention et de protection de l’enfance bénéficiera de 190 millions d’euros ; on note en particulier la hausse significative des crédits alloués à la protection et à l’accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables. Comme nous l’a rappelé le reportage diffusé par M6, certains enfants confiés à l’ASE connaissent des situations inacceptables, d’une extrême gravité, et nous ne pouvons détourner le regard. Nous avons agi par le biais de la loi « Taquet » mais nous devons faire plus pour les enfants placés. L’année 2023 doit être véritablement une année de transition et de renouvellement de la stratégie de protection de l’enfance, notamment par la création du futur groupement d’intérêt public (GIP) France Enfance protégée et par l’obligation de prise en charge par les conseils départementaux des jeunes majeurs de l’ASE non autonomes jusqu’à l’âge de 21 ans. Le PLF 2023 permet‑il d’assurer la contractualisation de prévention et de protection de l’enfance mise en œuvre depuis 2020 entre les départements et l’État ? De manière générale, permettra-t-il d’accompagner le secteur de l’enfance vers les changements qu’il connaîtra l’année prochaine ?

Mme Laure Lavalette (RN). Face à la hausse des prix, le recours aux banques alimentaires est en constante augmentation. Si les étudiants sont parmi les plus concernés par la précarité alimentaire, plus de 11 % des adultes connaissent une situation d’insécurité alimentaire. Selon une enquête réalisée sous l’égide de la Fédération française des banques alimentaires en 2020, l’alimentation est, après le loyer et les factures d’eau et d’énergie, le troisième poste de dépenses pour les personnes accueillies dans le réseau des banques alimentaires. Ce poste de dépenses est aussi, bien souvent, celui de l’ajustement des dépenses et, face à l’augmentation des dépenses contraintes, les Français en viennent massivement à une alimentation de mauvaise qualité.

Le montant de 117 millions d’euros consacré à l’aide alimentaire est en forte augmentation et nous nous en réjouissons, mais nous nous interrogeons sur l’usage qui en sera fait. L’aide alimentaire ne doit pas s’instituer, elle doit rester une réponse aux situations d’urgence. Pourtant, à défaut de répondre plus globalement aux enjeux de l’alimentation, vous semblez vouloir la pérenniser. La souveraineté alimentaire, la politique de lutte contre l’augmentation des prix ou l’égal accès à une alimentation variée de bonne qualité sur tout le territoire, voilà qui constitue une politique forte. Nous connaissons votre opinion sur notre proposition visant à supprimer la TVA sur un panier de cent produits de première nécessité, proposition qui nous paraissait pourtant pertinente car nous estimons que la précarité alimentaire pour être limitée grâce à un effort sur les prix. L’argent finançant votre politique d’aide alimentaire sera-t-il une béquille comme l’est le chèque alimentaire, sera-t-il dépensé au bénéfice de quelques-uns ou au bénéfice de tous ?

Mme Rachel Keke (LFI - NUPES). L’examen de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances intervient dans un contexte social extrêmement préoccupant, avec un taux de chômage en forte hausse, plus de 10 millions de personnes pauvres et un taux d’inflation de plus de 6 %. Les prix flambent et les pertes en pouvoir d’achat sont considérables pour une large majorité de la population. Pourtant, votre Gouvernement refuse de regarder cette réalité en face, refuse d’augmenter le Smic, de rétablir l’impôt sur la fortune, de taxer les superprofits. Vos mesures sont insuffisantes et vous ne lâchez que des miettes, au milieu d’une avalanche d’attaques comme celle contre les chômeurs ou la réforme des retraites qui s’annonce pour l’hiver prochain. Vous annoncez un budget en augmentation de 8,3 %, mais étant donné l’inflation, la hausse réelle n’est que de 4 %. Quant au budget de la stratégie interministérielle de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, il diminue de 23 %. Les attentes sont pourtant nombreuses et tout reste à faire pour réduire la pauvreté, répondre aux besoins de la population et définir un programme ambitieux à la hauteur des enjeux.

La rentrée scolaire, cette année, a été catastrophique pour un grand nombre d’enfants en situation de handicap, leurs familles et les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH). Votre Gouvernement déclare devant les caméras accorder toute son attention aux besoins des enfants handicapés et souligne une hausse des moyens mais, dans l’ombre, la souffrance demeure partout, et l’école que vous dites inclusive crée des exclusions multiples. C’est d’abord l’exclusion de l’école de plus de 330 000 enfants en situation de handicap dont les besoins sont souvent insuffisamment ou très mal pris en compte, ce qui peut entraîner un parcours scolaire décousu et très difficile. Ensuite, l’exclusion de nombreux parents contraints de renoncer à leur emploi pour scolariser leurs enfants à la maison, ce qui n’est pas sans conséquences sur les finances d’un foyer, notamment dans le contexte d’austérité d’inflation qui nous est imposé.

Les AESH sont aussi réduits à la précarité : ce métier très féminisé, non considéré, où l’on recourt souvent au temps partiel imposé, est mal payé en dépit de son importance essentielle. Quand les besoins des enfants en situation de handicap, de leurs familles et des AESH seront-ils placés au centre de la réflexion de votre Gouvernement ? Quand les besoins définiront-ils les moyens alloués et non l’inverse ? Quand inscrirez-vous ces besoins multiples dans les budgets annuels pour rendre leur dignité à toutes ces personnes et œuvrer en faveur d’une école réellement inclusive ? Quand entendrez-vous les revendications légitimes des AESH, qui demandent simplement les moyens de faire leur travail normalement ? Il faut créer un fonds de formation, supprimer les pôles inclusifs d’accompagnement localisé (Pial), en finir avec le temps partiel imposé injustifié. L’école de la République est une exigence sérieuse. Tous les enfants ont un droit fondamental à un enseignement de qualité et il revient à l’État de le mettre en œuvre. Nos enfants sont notre avenir ; en les méprisant, vous méprisez notre avenir à toutes et à tous.

M. Yannick Neuder (LR). Il est prévu dans le projet de budget pour 2023 d’augmenter le budget alloué à l’AAH. À ce sujet, je me dois de rappeler à Mme la ministre Darrieussecq que ce n’était pas une priorité du Gouvernement puisque la majorité a refusé la déconjugalisation de l’allocation plusieurs fois lors de la législature précédente ; c’est grâce au groupe Les Républicains que cette mesure a été adoptée. Rien n’est dit de la dépendance, et l’on ne trouve rien dans le PLFSS au sujet de la cinquième branche ; que prévoit le Gouvernement de plus ambitieux à ce sujet ?

Le budget de l’égalité femmes-hommes augmente certes de 14 % mais cette proportion ne représente que 57 millions d’euros du budget de l’État, alors que le Gouvernement affirme faire de cette question une cause nationale. Quel est donc le bilan de la majorité en la matière ? Les données chiffrées montrent que les inégalités ne se sont pas réduites, les associations en témoignent, et aucun programme ambitieux n’est présenté pour lutter contre la prostitution, les réseaux de clandestins, et mettre à l’abri des femmes violentées. Que pense faire le Gouvernement pour aller plus loin, alors même que le PLF 2023 prévoit une baisse des objectifs de traitement des appels au 3919, le numéro de téléphone gratuit de signalement des violences faites aux femmes ? L’objectif de 85 % de traitement en 2022 est de 75 % pour 2023 ; cela signifie que l’an prochain, une femme sur cinq en détresse appellera en vain. Quels moyens sont pris pour garantir le traitement de l’ensemble des appels ?

Le PLF 2023 affiche une augmentation notable du budget de la lutte contre la pauvreté, mais cette hausse est principalement due à la revalorisation de la prime d’activité qui touche seulement 200 000 des 4,5 millions de foyers bénéficiaires. L’augmentation de l’aide alimentaire consentie par le Gouvernement avait déjà été suggérée par le groupe Les Républicains ; elle arrive malheureusement un peu tardivement étant donné l’inflation et son cortège de hausse du coût des matières premières, de l’alimentation, de l’énergie, des carburants. Qu’a prévu le Gouvernement pour l’hiver rude qui s’annonce ? Après des années difficiles sur le plan économique, il est à craindre que la pauvreté augmente en 2023 ; le dernier congrès des centres communaux d’action sociale (CCAS) tire la sonnette d’alarme : l’augmentation du coût de la vie va rendre encore plus précaire la situation d’une population déjà fortement affaiblie. En résumé, que prévoit le Gouvernement pour lutter contre la pauvreté face à la hausse de l’inflation ?

Mme Maud Petit (Dem). L’examen des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances a une importance particulière dans un contexte de contraction du pouvoir d’achat lié à l’inflation. En 2023, ces crédits augmenteront de 8,3 %. Cela dénote la volonté du Gouvernement de poursuivre les actions décidées ces cinq dernières années pour les personnes vulnérables. La protection du pouvoir d’achat est au cœur du budget de la mission pour 2023, qui traduit la revalorisation anticipée de 4 % de l’AAH et de la prime d’activité votée l’été dernier. Ces deux postes de dépense représentent 90 % des crédits de la mission.

 

La déconjugalisation de l’AAH été votée dans la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. La représentation nationale s’est accordée sur la date limite du 1er octobre 2023 pour l’entrée en vigueur de cette réforme ; quel est l’état d’avancement des travaux à ce sujet ? Dans un autre domaine, la réforme des Esat entreprise lors de la précédente législature vise à renforcer les droits des usagers des Esat, à ouvrir des parcours mixtes permettant le cumul d’une activité en Esat et un contrat de travail en milieu ordinaire, et à investir dans la transformation de ces établissements. Comment progresse ce plan de transformation ? Qu’en est-il des travaux visant à faire évoluer le statut des travailleurs en Esat pour le rapprocher du statut de salarié et ainsi renforcer leurs droits ?

Alors qu’une délégation aux droits de l’enfant vient d’être créée à l’Assemblée nationale, je m’intéresse aussi, dans le programme 304, à l’action 17 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables. Les crédits consacrés à cette action seront en hausse de 27 % en 2023 ; quels sont les contours de cette augmentation, notamment pour l’appui aux départements, qui ont la charge de l’ASE ? Quels moyens sont fléchés vers les conseils départementaux, qui ont l’obligation de prendre en charge les jeunes majeurs à l’ASE ? Qu’en est‑il du plan de lutte contre les violences faites aux enfants et du déploiement des unités d’accueil pédiatrique des enfants en danger dans chaque département ? Envisage-t-on de telles structures sur l’ensemble du territoire, dont les outre-mer, l’année prochaine ? Des moyens supplémentaires sont-ils prévus pour que leur fonctionnement soit efficient ? Enfin, nous saluons l’augmentation des crédits consacrés à la prévention et à la lutte contre les violences faites aux femmes, en hausse de 17,5 %, ce qui représente 4,2 millions d’euros supplémentaires pour cette politique publique qui doit être soutenue sans relâche. Le soutien au dispositif d’accueil et d’aide à la mobilité pour mettre les victimes en sécurité est une des composantes majeures de ce programme ; quel est le maillage territorial de ces lieux ?

La mission porte des moyens budgétaires de politiques publiques essentielles pour de nombreux Français vulnérables. Le groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) soutient la politique du Gouvernement en la matière et votera donc ces crédits.

M. Elie Califer (SOC). De prime abord, la mission Solidarité, insertion et égalité des chances présente une évolution encourageante : par rapport à l’année 2022, autorisations d’engagement et crédits de paiement augmentent. Mais quand on creuse viennent les déceptions. Dans le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes, la progression des crédits destinés à l’aide alimentaire est notamment liée à l’application des dispositions de la loi « Egalim ». Mais on déplore la baisse de 23 % des crédits alloués à l’action Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, quand l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) indique que dans notre pays près de 3 millions d’enfants vivent sous le seuil de pauvreté – pire : en France, selon l’Unicef, 8 000 enfants vivent dans des bidonvilles ! La hausse de l’action Prime d’activité est spécieuse, car elle résulte majoritairement de l’évolution des barèmes du fait de l’inflation. Dans le programme 157 Handicap et dépendance, on observe à nouveau des hausses de crédits en trompe‑l’œil. Ainsi, pour l’action 12 qui porte sur les allocations et les aides en faveur des personnes handicapées, cette croissance, multifactorielle, s’explique par l’augmentation du nombre d’allocataires, la revalorisation de l’AAH du fait de l’inflation et surtout par la déconjugalisation enfin arrachée.

La mission ne répond que partiellement aux besoins majeurs qu’elle est censée couvrir, comme la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Alors que ces violences sont en hausse, le taux d’appels traités par le 3919 en 2021 n’était que de 21 % et, en 2023, une femme sur cinq restera abandonnée à son triste sort. On comprend mal que le Gouvernement sous‑finance dans de telles proportions sa « grande cause du quinquennat » ; comment pense‑t‑il faire mieux en 2023 en créant seulement 58 ETP supplémentaires ? Pour faire mieux, il faut aussi des personnes capables d’écouter, de guider et d’accompagner – là est le cœur de la solidarité. Or, depuis 2017, votre ministère a perdu plus de la moitié de ses effectifs.

On se satisfait de l’existence d’un ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, surtout s’il est dirigé par vous, monsieur le ministre, mais on ne peut se satisfaire de lire que 25 % des personnes sans domicile fixe sont issues de l’ASE, que 9,3 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté et qu’à compétences égales, l’écart de salaires constaté entre les femmes et les hommes soit de 23 %. Pensez-vous avoir les moyens d’agir sur ces tristes réalités, les moyens d’améliorer la situation des jeunes sortant de l’ASE, surtout outre-mer, et les moyens d’offrir aux AESH un véritable parcours professionnel ?

M. Paul Christophe (HOR). Le groupe Horizons et apparentés salue la hausse des moyens consacrés à la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. Ce projet de budget s’inscrit dans la digne trajectoire des investissements réalisés depuis 2017 en faveur de l’insertion, du handicap, de l’égalité des chances, de l’égalité femmes-hommes, de l’inclusion, de la dépendance, ainsi que de l’ensemble des politiques publique de solidarité. C’est une trajectoire de progrès et de justice social. Les crédits de la mission s’élèveront à 29,8 milliards d’euros en 2023, en augmentation de 6,56 %. Pour le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes, les autorisations d’engagement et les crédits de paiement augmenteront de 10 % en 2023 pour s’établir à 14,5 milliards d’euros, et il est prévu qu’ils se maintiennent à cette hauteur en 2024 et en 2025. L’augmentation des crédits de ce programme est à lier aux mesures exceptionnelles en faveur de la protection du pouvoir d’achat des Français. Ils renforceront le financement des engagements pris au sujet des revalorisations de prestations sociales – ainsi, le budget relatif à la prime d’activité augmente de 10 % par rapport à 2022 – mais aussi le soutien à la politique d’aide alimentaire, dont les crédits seront en hausse de 106 %, en raison, notamment, de la création d’un fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires qui vise à permettre l’accès à une alimentation de qualité dans le contexte d’inflation du prix des produits alimentaires qui touche les ménages, notamment les plus fragiles.

L’application des revalorisations décidées lors de la conférence des métiers en faveur des personnels de la protection juridique des majeurs et de la protection maternelle et infantile figure également dans ce programme. Elle se traduit par l’apport de plus de 62 millions d’euros et s’inscrit dans la continuité des mesures de revalorisation déjà portées par le Gouvernement dans le champ sanitaire, médico-social et social, d’abord dans le cadre des accords du Ségur de la santé de juillet 2020, puis avec l’extension des revalorisations au bénéfice du personnel soignant des établissements et services sociaux et médico-sociaux négociés dans les accords signés en mai 2021. Les métiers du social sont indispensables à l’accompagnement de nombre de nos concitoyens, et nous soutenons pleinement les revalorisations voulues par le Gouvernement que nous encourageons à poursuivre en direction des quelques oubliés de ces accords dans le secteur du médico-social.

L’année 2023 sera importante pour le programme 157 Handicap et dépendance, car elle marquera le début du financement de la déconjugalisation de l’AAH, le 1er octobre au plus tard. Un abondement de plus de 93 millions d’euros aura lieu en 2023 et la mesure représentera à terme un surcoût de 560 millions d’euros. Cette mesure de progrès que nous soutenons pleinement permettra aux personnes en situation de handicap d’être indépendantes financièrement. Elle s’inscrit dans la poursuite des réformes menées depuis plus de cinq ans par la majorité en faveur d’une société plus inclusive. En effet, la précédente législature a permis l’augmentation de l’AAH pour 1 200 000 personnes, l’instauration d’un droit à vie aux bénéficiaires de l’AAH dont le handicap n’est pas susceptible d’évolution et le renforcement de l’abattement sur les ressources du conjoint afin que les bénéficiaires de l’AAH dont le conjoint est rémunéré au Smic puissent conserver cette allocation à taux plein. Face aux postures et aux injonctions trop souvent entendues, nous préférons répondre par des faits. En cohérence avec les conclusions du dernier comité interministériel du handicap, l’activité en milieu ordinaire des usagers des Esat sera renforcée en 2023. L’emploi accompagné bénéficiera du maintien des crédits issus du plan de relance. Il était crucial de maintenir cette démarche innovante qui vise à garantir la sécurisation et l’individualisation des parcours.

Pour le programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes, 7,3 millions d’euros de crédits supplémentaires seront mobilisés en 2023. Nous saluons cette progression de plus de 95 %.

La stratégie nationale de lutte contre la pauvreté lancée en 2018 visait à enrayer la reproduction de la pauvreté sur plusieurs générations, à simplifier l’accès aux dispositifs de solidarité et à garantir un meilleur accompagnement des bénéficiaires du RSA. Vous avez annoncé vouloir évaluer cette stratégie, ce que le PLF 2023 financera à hauteur de 252 millions d’euros ; comment procéderez-vous et quelles suites seront potentiellement données à cette évaluation ?

Enfin, très attaché à la protection de l’enfance, j’aimerais connaître votre feuille de route relative à l’application de la loi « Taquet » et vos initiatives visant à renforcer la pédopsychiatrie, malheureusement en déshérence comme l’a montré un récent reportage.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo - NUPES). Je me dois, en commençant cette intervention faite au nom du groupe Écologiste - NUPES, de rappeler le contexte pour le moins désagréable dans lesquels ont lieu nos débats. M. Véran, porte-parole du Gouvernement, a regrettablement annoncé ce matin que le recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution serait probablement décidé demain. L’examen du PLF 2023 et du PLFSS a pourtant été un modèle de débat démocratique : les discussions ont été argumentées et disciplinées et plusieurs amendements ont été adoptés. Cette épée de Damoclès perturbe évidemment la sérénité et la sincérité des débats.

La dernière enquête sur l’ASE, diffusée dimanche 16 octobre dans l’émission télévisée « Zone interdite » faisait froid dans le dos. Le reportage présente une succession de situations dramatiques vécues par des jeunes gens et des adultes tous concernés par des services de la protection de l’enfance qui porte bien mal son nom. Prostitution dans les foyers, maltraitance en familles d’accueil, indifférence des services départementaux, tous les maux d’une politique publique qui concerne plus de 300 000 mineurs et 32 000 jeunes majeurs sont exposés à grands traits. C’est déjà à la suite de plusieurs enquêtes journalistiques que le secrétariat d’État chargé de la protection de l’enfance avait été créé en 2019 ; rien n’aurait donc changé depuis lors ? Madame la secrétaire d’État, vous qui avez travaillé à la protection judiciaire de la jeunesse, vous savez de quoi nous parlons. Un enfant meurt tous les cinq jours dans le cadre familial, et 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles tous les ans. Ce constat est alarmant mais nous ne voyons pas dans ce budget de modifications ou d’investissements massifs permettant une évolution positive. Vous évoquez des contrôles renforcés et davantage de formation, mais comment les finance-t-on et combien de postes supplémentaires vont être créés pour mener ces missions à bien ? Vous nous annoncez que le casier judiciaire des familles d’accueil sera bientôt systématiquement contrôlé – et l’on apprend ainsi avec surprise que ce n’était pas le cas jusqu’alors...

La Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles sur les enfants (Ciivise), installée par votre majorité, a remis en mars 2022 un rapport contenant plusieurs dizaines de recommandations. Pourquoi ne se traduisent-elles pas dans ce PLF ? Qu’en est-il par exemple de la formation au repérage systématique des violences sexuelles des professionnels en contact avec les enfants, les policiers et les gendarmes en particulier ? Qu’en est‑il de l’accès à des soins spécialisés en psycho-trauma pour ces enfants ? Nous déposerons des amendements en ce sens.

L’examen des crédits en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes montre que ce PLF revoit à la baisse les objectifs de qualité de service du 3919, la ligne d’écoute des femmes victimes de violences. Pourtant, 150 000 appels au secours ont été dénombrés en 2021 contre 97 000 en 2019 ; c’est dire que si le budget alloué au 3919 n’a pas formellement baissé, il sera insuffisant pour répondre à des appels en hausse constante parce que le curseur de l’acceptable s’est déplacé. La plateforme 3919 est un outil puissant pour accueillir la parole des femmes ; il est nécessaire de financer des embauches supplémentaires dans ce service, puisqu’en 2023, il faudra augmenter le nombre d’écoutantes et améliorer la qualité de service, notamment les week-ends et en soirée : on constate désormais 250 appels par jour le week‑end contre 150 en 2019. Il faudra aussi répondre à la question de ma collègue Karine Lebon portant sur les femmes des territoires d’outre-mer qui ne trouvent pas d’écoutants parlant les langues régionales lorsqu’elles appellent un service localisé, ce que l’on comprend, en métropole. Je rappelle qu’en 2021, 113 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint ; déjà, plus de cent femmes ont été assassinées depuis le 1er janvier 2022. La NUPES a fait campagne sur une proposition claire qui reprend la demande des associations en première ligne : 1 milliard d’euros pour protéger les femmes contre toutes les formes de violence. Nous avons aussi déposé des amendements en ce sens.

Enfin, le sujet du handicap me tient particulièrement à cœur. Nous avons déjà eu l’occasion d’interroger M. le ministre sur l’accompagnement des enfants en situation de handicap, le parcours du combattant que cela représente pour les parents, la précarisation des AESH. Sur l’aspect budgétaire de la question, je rappelle que le montant de l’AAH est aujourd’hui de 956 euros. En dépit des revalorisations récentes, cette allocation reste donc inférieure au seuil de pauvreté. Pourquoi ne pas, enfin, corréler le montant des minima sociaux à l’inflation ?

M. Pierre Dharréville (GDR - NUPES). Nous allons effectivement profiter de cet échange en commission car il n’est pas certain que nous en aurons le loisir en séance publique comme il serait légitime, puisque c’est au Parlement qu’il revient de décider ce que doit être le budget du pays. Les crédits que vous nous présentez sont un peu en hausse, mais cette augmentation est très faible face à l’océan des inégalités auxquelles il est question de s’attaquer. Un système produit des inégalités massives et quelques petits programmes tentent d’y faire face, modestement et avec beaucoup de difficultés ; il faudrait s’attaquer aux causes de ces inégalités galopantes, qui se trouvent évidemment dans le système économique capitaliste dans lequel nous vivons.

Le programme 304, notamment pour ce qui concerne la prime d’activité, paraît insuffisant et inadapté au regard d’une inflation record qui met à mal la vie quotidienne de nombreuses familles ; on se demande comment elles pourront faire face avec les mesures que vous prévoyez. Au passage, le fait que nous soyons obligés de maintenir ce niveau de prime d’activité en dit long sur la qualité de l’emploi, ce qui renvoie à un débat qui a eu lieu il y a quelques jours dans l’hémicycle. Je regrette aussi la baisse du budget relatif à la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté. Est-ce vraiment le moment ? Cela semble étonnant.

Je m’inquiète également pour le dispositif d’aide alimentaire qui, à mes yeux, appelle une grande réforme ; son organisation actuelle pose de nombreux problèmes. Il ne s’agit aucunement d’en réduire la portée, compte tenu de la gravité de la situation dans laquelle se trouvent de nombreuses familles, mais ses modalités doivent être revues. Des propositions ont été faites par les associations, qui visent à éviter que l’aide alimentaire ne se transforme en un marché de seconde zone pour les plus pauvres d’entre nous.

Je me fais l’écho des inquiétudes exprimées au sujet de la protection de l’enfance. Le reportage télévisé mentionné n’est pas un coup de tonnerre dans un ciel serein : ce n’est pas la première fois que nous nous interrogeons sur la capacité d’action de la puissance publique en matière de protection de l’enfance et nous mesurons l’ampleur de l’effort nécessaire.

Je m’étonne que les crédits du programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales permettant la création de places de formation aux métiers de la santé et du soin soient en baisse ; les besoins sont pourtant patents. J’approuve les propos de ma collègue Marie-Charlotte Garin au sujet du milliard d’euros nécessaire pour la lutte contre les violences faites aux femmes. Enfin, la précarité menstruelle concerne près de deux millions de femmes pour qui l’achat de protections hygiéniques est difficile ou impossible. De nombreuses associations exigent la gratuité de ces produits de première nécessité ; quelle est votre opinion à ce sujet ?

Je souligne à mon tour que le montant de l’AAH est encore loin du seuil de pauvreté et j’insiste sur la nécessité d’agir pour que les enfants handicapés aient un meilleur accompagnement à l’école ; ces sujets sont évoqués de manière récurrente et la puissance publique n’est pas au rendez-vous.

Pour finir, pouvez-vous faire le point sur le recours aux cabinets de conseil par vos différents ministères ?

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous en venons aux questions des députés.

M. Didier Le Gac (RE). Je salue l’augmentation des crédits de vos ministères et les nouvelles mesures prises au bénéfice des Français. On ne soulignera jamais assez la revalorisation salariale dont ont bénéficié les soignants grâce aux accords du Ségur de la santé qui se sont traduits par une augmentation mensuelle de 183 euros. Mais certaines catégories de personnel du secteur médico-social, pourtant mobilisées pendant la crise sanitaire, ont été oubliées. Je souhaite que cette omission soit réparée dans le PLF 2023.

M. Joël Aviragnet (SOC). Après des années de combat parlementaire, nous avons fini par obtenir cet été la déconjugalisation de l’AAH, ce dont je me réjouis à nouveau. Cette mesure et l’augmentation de la prime d’activité expliquent l’apparente hausse des autorisations d’engagement et des crédits de paiement de la mission. Mais c’est l’arbre qui cache la forêt et nous avons compris qu’après le « quoi qu’il en coûte » viendrait le « où est-ce qu’on coupe ? ». Qu’en est-il de la lutte contre les violences sexuelles et sexistes ? Qu’en est-il des conditions de travail de ceux qui font vivre la solidarité chaque jour ? Il leur reste des miettes. Alors que vous auriez pu profiter de ce PLF pour augmenter le salaire des AESH afin d’améliorer l’attractivité de cette profession essentielle, ils devront continuer de se contenter d’un salaire de misère et de temps partiel subi. Mais, sans eux, il n’y a pas d’inclusion possible des enfants en situation de handicap ; sans eux, des milliers d’enfants ne pourront pas suivre une scolarité ordinaire. Allez‑vous prendre des mesures propres à renforcer l’attractivité de ce métier ?

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). Selon l’Insee, l’outre-mer est dans une situation hors norme qui justifierait amplement une attention particulière. Lorsque nous vous avons auditionné, le 20 septembre dernier, monsieur le ministre, j’avais avancé l’idée, étant donné le vieillissement accéléré de la population à La Réunion, de créer un grand service public d’aide à la personne traitant des questions de statut, d’organisation, de revenus et des conditions de travail ; me direz-vous aujourd’hui ce que vous en pensez ? D’autre part, ne sont pas abordés le problème des enfants porteurs de handicap, le manque de familles d’accueil, le coût du transport, le manque d’AESH et les lacunes de la formation de ces personnes qui vivent dans une grande précarité sans guère d’espoir d’évolution. On touche là à la maltraitance institutionnelle des élèves et des équipes pédagogiques. Pour en finir avec l’illusion de l’inclusion, ne conviendrait-il pas de réaliser au plus vite l’état des lieux des Pial afin d’évaluer leur pertinence et leur efficacité ?

M. Arthur Delaporte (SOC). Je pourrais évoquer la nécessaire extension du bénéfice de la « prime Ségur » à l’ensemble de celles et ceux qui travaillent dans le secteur médico-social, question sur laquelle nous sommes en permanence sollicités, mais nous avons tous été heurtés par les failles de la protection de l’enfance. Comme de nombreux autres, ce secteur connaît de grandes difficultés, mais c’est particulièrement choquant quand cela touche l’enfance, qui devrait être sanctuarisée. Habitant le Calvados, je croise quotidiennement des travailleurs sociaux de la protection de l’enfance qui me font part de leur isolement, voire de leur abandon, et de leur impuissance devant l’ampleur des besoins – entre 200 et 300 mesures de placement ne sont pas exécutées faute de moyens. Telle est la réalité de la protection de l’enfance dans notre pays, où des mineurs isolés se retrouvent seuls à l’hôtel. Cette situation tragique conduit aussi à la privatisation de ce secteur ; étant donné la faiblesse des moyens dont elles disposent, les collectivités locales sont contraintes de réduire les coûts et vont toujours au mieux disant et donc au moins offrant, le secteur privé.

M. Philippe Vigier (Dem). Monsieur le ministre, avez-vous pu prendre attache avec les départements pour déterminer quels moyens supplémentaires seront alloués au contrôle des Ehpad ? Ce travail a été amorcé mais il faut aller plus loin. Dans un autre domaine, des efforts considérables et inédits sont faits dans le domaine du handicap, mais certaines catégories de personnels, notamment des personnels techniques et administratifs et des moniteurs n’ont pour l’instant pas obtenu la reconnaissance que d’autres ont eue aux termes des accords du Ségur de la santé. J’entends que l’on ne pouvait tout faire en même temps, mais est-ce programmé pour les prochaines années ?

Mme Servane Hugues (RE). Je salue l’augmentation du financement du programme 157, en hausse de 6,38 % par rapport à l’an dernier, au bénéfice des personnes en situation de handicap et des personnes âgées en perte d’autonomie. Ces crédits doivent permettre l’inclusion des personnes en situation de handicap dans le milieu de travail ordinaire, mais la clef de la réussite, c’est le parcours coordonné, avec l’aide d’une équipe plurielle. Comment envisagez-vous l’articulation entre les professionnels du secteur médico-social et les employeurs des personnes en situation de handicap ?

Mme Annie Vidal (RE). L’action 13 du programme 157 traite des crédits alloués au pilotage du programme et à l’animation des politiques inclusives. Des 42,5 millions d’euros prévus, 2,8 millions sont alloués à la prévention et à la lutte contre la maltraitance. Une commission ad hoc dont je fais partie s’est attelée depuis 2019 à lutter contre ce fléau mais les besoins sont encore très prégnants, tant pour les majeurs vulnérables que pour les mineurs, au point que certains éducateurs spécialisés nous disent être conscients de participer à un système de maltraitance institutionnelle. Aussi, quels moyens consacrerez-vous à l’élargissement des publics et au renforcement du traitement des signalements faits au 3977 ?

Mme Karen Erodi (LFI - NUPES). « Pour manger, je me suis inscrite à l’association d’aide alimentaire de mon village ; j’étais bénévole, je suis devenue bénéficiaire » dit Sarah. « On se serre vraiment la ceinture ; nous faisons 250 euros de courses alimentaires par mois et pour y arriver, on mange moins de viande, on ne sort jamais, sauf pour faire les courses » enchaînent Jean-Pierre et Anne-Marie, retraités. L’inflation alimentaire frappe durement nos concitoyens dont beaucoup ne parvenaient déjà pas à boucler les fins de mois. Mesdames et messieurs les membres du Gouvernement, vous conviendrez avec moi que cette situation est alarmante. Pourtant, vous refusez de bloquer les prix des produits de première nécessité, vous refusez d’augmenter le Smic, vous vous en prenez aux salariés qui font grève pour demander des augmentations de salaires dignes, vous vous placez toujours du côté des puissants et des profiteurs de crise. Après cinq années de refus, après cinq années où vous vous en êtes pris aux plus pauvres, comment comptez-vous enfin agir contre la précarité alimentaire qui touche nos concitoyens chaque jour un peu plus ?

M. Damien Maudet (LFI - NUPES). Contrairement à leurs collègues employés à l’hôpital, 3 000 travailleurs de la fonction publique hospitalière n’ont pas droit à la « prime Ségur » parce qu’ils travaillent dans des centres sociaux ou médico-sociaux. C’est le cas, par exemple, de Philippe qui, salarié depuis dix‑sept ans d’un centre départemental enfants et familles, touche à peine 1 600 euros par mois. Mis à contribution pendant la crise sanitaire, il a contracté le covid, a passé deux semaines en soins intensifs et des semaines sous oxygène et, un an et demi plus tard, souffre toujours des séquelles d’un covid long. Mais, pour lui, pas de prime, alors que 183 euros représenteraient pour lui une hausse de salaire considérable. Il y a là une véritable injustice qui crée des tensions dans les services. Sachant que l’on parle de 3 000 personnes en tout, quand songerez-vous à leur accorder la « prime Ségur » comme à leurs homologues de même statut ?

Mme Fanta Berete (RE). Selon l’Unicef et la Fédération des acteurs de la solidarité, plus de 42 000 enfants vivraient en France dans des hébergements d’urgence, des abris de fortune ou dans la rue, dans des conditions de vie dégradées, exposés à une cohabitation dans des espaces étroits et parfois insalubres, à l’instabilité matérielle, sociale, financière et administrative. À cela s’ajoutent l’isolement, la stigmatisation et les discriminations, qui ne sont pas sans conséquences sur leur santé mentale. À l’occasion de la journée mondiale de la santé mentale, le 10 octobre dernier, Unicef France, le Samu social de Paris et Santé publique France ont publié un rapport intitulé Grandir sans chez-soi : quand l’exclusion liée au logement met en péril la santé mentale des enfants. Ce document détaille les multiples conséquences de la précarité. Quelles actions comptez‑vous entreprendre en faveur des enfants en situation d’extrême fragilité, alors même que les places en hébergement d’urgence viennent à manquer, à Paris en particulier ?

M. Nicolas Turquois (Dem). J’ai récemment rendu visite à l’Institut départemental pour la protection de l’enfance et l’accompagnement des familles dans mon département, la Vienne. Des maîtresses de maison et des veilleurs de nuit y sont au contact quotidien des enfants et ce qu’ils font ressemble d’assez près à ce que font des personnes qui ont bénéficié de la revalorisation salariale, mais ils ne l’ont pas obtenue. Cela crée des tensions, comme partout en France. D’autre part, le département de la Vienne s’inquiète des 11,8 millions d’euros de dépenses supplémentaires décidées par l’État dans le champ social car ni la revalorisation du RSA ni le nouveau dispositif de prestation de compensation du handicap ni les mesures issues des accords du Ségur de la santé ne sont compensés. Une réponse est nécessaire.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). Je suis éducatrice spécialisée en protection de l’enfance et je tiens à vous dire qu’il serait bon de ne pas attendre les reportages sensationnels des chaînes de télévision pour se soucier de questions aussi graves. Ce que vivent les professionnels et les enfants dans les institutions date d’il y a bien longtemps et, malheureusement, nous n’avons vu aucune amélioration au cours des cinq dernières années. Les placements non exécutés, la perte de sens de notre travail et de nos métiers, le manque de perspectives pour les enfants, la mise en concurrence des structures, c’est la réalité quotidienne, de longue date. À cela s’ajoute que les enfants placés n’ont pas les mêmes chances de réussite selon les départements où ils sont nés ; c’est inacceptable. Des moyens sont effectivement nécessaires, mais il faut aussi recentraliser la protection de l’enfance pour redonner à tous les enfants concernés les mêmes chances de s’en sortir partout sur le territoire.

M. le ministre. J’observe en préambule que nous ne partageons pas la même vision de la situation. Les chiffres relatifs à la pauvreté dans notre pays en 2020 publiés vendredi dernier par l’Insee montrent d’abord que la pauvreté n’a pas augmenté en France, ce dont il faut se réjouir après deux ans d’une crise sanitaire d’une ampleur exceptionnelle. Ils montrent aussi que les inégalités se sont réduites parce que les mesures prises pendant cette crise ont été centrées sur les ménages les plus modestes. On ne peut évidemment se satisfaire de la situation actuelle ; toutefois, grâce aux mesures exceptionnelles prises pour soutenir et les ménages et l’activité économique, la France est l’un des seuls pays d’Europe et de l’Organisation de coopération et de développement économiques où la pauvreté n’a pas explosé.

Certes, des situations dramatiques demeurent et environ 9,3 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en France, mais il n’y a pas d’évolution massive à ce jour. Je suis en contact permanent avec les associations de solidarité, les départements et les CCAS. Ce que l’on observe, c’est la dégradation de la situation de certaines familles, notamment les plus modestes, en raison de l’impact de l’inflation sur les dépenses contraintes – alimentation, logement, énergie. S’il n’y a pas d’explosion de la pauvreté dans notre pays, c’est aussi parce que le Gouvernement a pris très tôt des mesures pour anticiper cette situation. Elles figurent dans le projet de loi de finances rectificative ; l’augmentation des minima sociaux, la poursuite du plafonnement des prix de l’énergie, les remises à la pompe sur les carburants, l’allocation exceptionnelle de solidarité versée à 12 millions de familles le 15 septembre dernier et qui sera complétée par d’autres mesures visant à protéger les foyers de l’augmentation du prix du gaz et du fioul cet hiver. Nous devons rester vigilants et nous le serons et nous adapterions notre politique au cours des mois à venir si la situation devait fortement empirer. Voilà pour les mesures d’urgence.

Pour le long terme, nous relançons la stratégie de lutte contre la pauvreté, sur la base de rapports de France Stratégie, de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de la délégation interministérielle à la lutte contre la pauvreté. La concertation reprend pour définir une nouvelle ambition volontariste, visant à faire reculer la pauvreté dans notre pays. En premier lieu, nous continuerons d’investir contre la reproduction sociale de la pauvreté, ce qui signifie que l’axe de l’enfance sera encore extrêmement fort au cours de cette législature. Aussi, dans le cadre de cette future stratégie, je souhaite conclure un pacte des solidarités dans l’investissement social entre l’État, les collectivités et les acteurs de la solidarité sur les territoires. Ma deuxième priorité est la lutte contre la grande pauvreté, sans laquelle on ne pourra pas faire reculer la pauvreté durablement et massivement ; c’est d’ailleurs, a souligné France Stratégie, une des faiblesses du plan en vigueur. Le troisième axe de notre action sera l’accompagnement de la transition écologique pour en faire une transition solidaire en faveur des ménages les plus précaires afin de réduire l’impact des dépenses contraintes. Notre ambition est donc de faire reculer la pauvreté dans les années qui viennent, malgré la conjoncture.

Des mesures d’urgence ont également été prises pour l’aide alimentaire. Le débat parlementaire, cet été, a permis de doubler les crédits alloués à cette aide, passés de 56 à 107 millions d’euros, dont 55 millions à dépenser d’ici à la fin de l’année et 15 millions pour les territoires ultramarins. Je précise que toutes ces stratégies seront adaptées aux spécificités des territoires d’outre-mer. Ainsi, les petits déjeuners à l’école ayant rencontré des succès divers selon les lieux, nous avons décidé de concentrer les crédits sur les territoires ultramarins, puisque c’est là où le besoin est le plus fort. J’aurai donc à cœur de faire que cette stratégie soit plus adaptée, et sans doute renforcée outre-mer.

Vous avez lié la hausse des crédits de l’aide alimentaire à l’inflation. J’observe que les mesures prises par le Gouvernement depuis la fin de l’année 2021 font que notre pays est celui des pays européens où l’inflation, qui s’établit à 6,2 %, est la moins forte ; elle est supérieure à 24 % dans d’autres pays. Il n’en reste pas moins qu’un tel taux d’inflation peut entraîner des conséquences graves pour les familles qui sont dans les situations les plus précaires. Pour cette raison, nous maintenons les crédits habituels de l’aide alimentaire pour soutenir les grands réseaux associatifs et dans le cadre des crédits délégués aux services de l’État dans les territoires. De plus, nous avons créé un fonds afin d’amorcer la transformation du dispositif d’aide alimentaire, avec un volet national. Cela répond à une demande des grands réseaux d’aide alimentaire, que je rencontre régulièrement. Ils souhaitent continuer de se moderniser et ils ont d’ailleurs bénéficié de crédits importants à cet effet dans le cadre du plan de relance.

Nous allons donc nous appuyer sur ces réseaux largement modernisés et faire en sorte qu’ils aient accès à des produits de meilleure qualité, qu’ils ne distribuent pas uniquement des produits de base mais aussi des produits frais, et proposent des repas équilibrés. Ces questions comportent aussi un volet territorial et nous souhaitons, avec le ministre de l’agriculture, créer des alliances rassemblant producteurs locaux, CCAS, associations de solidarité et services de l’État pour faire bénéficier les familles de produits locaux de qualité, bio là où ce sera possible. Nous répondrons ainsi à certaines des propositions de la convention citoyenne sur le climat. Il avait aussi été question des chèques alimentaires ; l’objectif existe toujours, et ces chèques pourraient répondre à certaines situations, mais ce n’est pas dans une telle mesure que nous investirons massivement si nous voulons réussir à favoriser l’accès à une alimentation saine et équilibrée, issue de nos territoires.

Les questions relatives aux budgets qui sont de la responsabilité de ma collègue Isabelle Rome, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, lui seront transmises. Cette question est une priorité pour le Gouvernement et ma collègue vous dira sa stratégie.

Nous avons lourdement investi dans la réduction de la précarité menstruelle ; les crédits ad hoc, qui s’élèvent à 4,7 millions d’euros depuis 2020, sont maintenus pour 2023. Nous examinerons cette question avec attention lors du renouvellement de la stratégie de lutte contre la pauvreté.

J’ai indiqué dans mon propos liminaire que la création des 120 postes annoncés par ma prédécesseure à la suite de la crise Orpea est sanctuarisée ; nous tiendrons notre engagement, qui est de contrôler les 7 500 Ehpad dans les deux ans qui viennent. D’autres mesures, visant à doter les inspecteurs de plus grands pouvoirs, seront inscrites dans le PLFSS ; je sais que certains amendements de votre commission tendent à les renforcer encore.

J’en viens aux inégalités qui ont pu découler des accords du Ségur. Nous pourrons rapidement en corriger certaines, en particulier au sein de la fonction publique hospitalière. En revanche, j’ai renvoyé aux opérateurs et aux départements le soin de gérer le problème des personnels administratifs et techniques qui perçoivent de très bas salaires. On ne peut pas se tourner vers l’État à chaque fois qu’il y a une difficulté dans un établissement. Les négociations sont ouvertes pour augmenter les salaires des personnels du secteur de la petite enfance. Nous voulons accélérer la signature d’une convention collective unique dans le secteur privé non lucratif. Verser 183 euros supplémentaires à tout le monde n’aurait pas de sens. Plutôt que de reporter le problème au risque de créer de nouvelles inégalités, nous devons engager des négociations salariales beaucoup plus larges entre les organisations syndicales, les employeurs et les financeurs.

Pour ce qui est des départements, je réunirai le comité des financeurs le 27 octobre. Nous ferons les comptes et nous verrons si chacun a respecté ses engagements. Nous devrons également harmoniser ces politiques, conduites dans un cadre très décentralisé. La Première ministre a renouvelé, devant l’Assemblée des départements de France, vendredi dernier, la volonté du Gouvernement de mener une nouvelle étape pour une vraie décentralisation.

Mme la ministre déléguée. L’inclusion des personnes en situation de handicap est au cœur de nos préoccupations. Le comité des droits des personnes handicapées de l’ONU défend le principe de la désinstitutionalisation. Nous n’y parviendrons pas totalement mais nous pouvons améliorer encore davantage l’inclusion en milieu scolaire, dans la formation professionnelle et dans l’emploi.

La loi de finances de 2022 a consacré 3,5 milliards d’euros à l’école inclusive pour scolariser 430 000 enfants et financer les postes de 130 000 AESH. Ces chiffres impressionnants témoignent de l’accélération de l’inclusion en milieu scolaire : nous comptons un AESH pour huit professeurs au sein de l’éducation nationale.

Tout n’est pas réglé pour autant. Nous avons ainsi rencontré des difficultés pour recruter des AESH à la rentrée car ces métiers ne sont pas les plus attractifs. Nous améliorons cependant leur formation pour créer les conditions de la meilleure inclusion possible. Ce travail demande du temps, nous ne pouvons pas transformer le système en une année, d’un simple claquement de doigts. Des conférences relatives à l’école inclusive se tiennent régulièrement pour évaluer les dispositifs et celle qui se réunira prochainement dressera le bilan de la rentrée.

 

Le regard que nous portons sur l’inclusion scolaire doit évoluer. Un enfant porteur d’un handicap peut avoir davantage besoin d’une pédagogie particulière ou d’un outil pédagogique particulier que d’un AESH. Il faudra former les enseignants à cet égard. Nous poursuivrons nos efforts pour offrir à chaque enfant l’instruction la plus adaptée possible. Ces enfants auront également leur place dans les lycées professionnels, dont nous avons engagé la transformation, et à l’université.

Les AESH ont un contrat de 24 heures par semaine, qui correspond au temps pédagogique en maternelle ou en élémentaire. Le Président de la République s’est engagé à déprécariser ces métiers pour proposer des contrats de 35 heures, comme des AESH peuvent en signer au lycée. Le ministre de l’éducation nationale y travaille avec les collectivités territoriales.

Les personnes en situation de handicap doivent accéder aux formations professionnelles et à l’emploi, quel qu’il soit, qu’il s’agisse d’emplois protégés, de postes dans des entreprises adaptées ou dans le milieu ordinaire. Je m’en occupe avec M. Olivier Dussopt.

Nous devons encourager la reprise d’une activité salariée en milieu ordinaire. Les bénéficiaires de l’AAH peuvent percevoir un revenu d’activité en cas de reprise d’emploi en milieu ordinaire. L’AAH est alors maintenue intégralement pendant six mois puis partiellement, en fonction de l’emploi, sans limite de temps.

Les travailleurs des Esat perçoivent l’AAH mais peuvent, depuis 2022, exercer une autre activité en milieu ordinaire. Cette mesure de double activité implique de prévoir un calcul spécifique de l’AAH pour que les ressources du bénéficiaire augmentent globalement. La personne en situation de handicap qui travaille davantage doit voir ses revenus augmenter.

Les mesures incitatives peuvent aussi prendre la forme d’une simplification des démarches et d’un accompagnement humain particulier. Celui-ci permet à plus de 6 500 personnes d’accéder à un emploi et de s’y maintenir. Les résultats sont très satisfaisants depuis trois ans et nous comptons évaluer le dispositif pour le pérenniser car il est particulièrement adapté aux personnes souffrant d’un handicap psychique ou d’un trouble du neurodéveloppement. Il pourrait même être utile aux personnes éloignées de l’emploi. L’emploi des personnes en situation de handicap sera à l’ordre du jour de la Conférence nationale du handicap qui se tiendra au début de l’année prochaine. Le statut du travailleur en Esat n’est pas satisfaisant et doit évoluer pour qu’il obtienne les mêmes droits que les autres. Nous nous y emploierons.

Le montant de l’AAH est inférieur au seuil de pauvreté. Il a été porté de 800 euros en 2017 à 956,50 euros aujourd’hui suite à la revalorisation de 4 % que vous avez votée cet été. Le bénéfice de l’AAH ouvre des droits, par exemple l’aide personnalisée au logement, dont la perception permet de relever les revenus au-dessus du seuil de pauvreté. Le projet de loi de finances prévoit 533 millions d’euros pour financer l’évolution tendancielle de l’AAH, 186 millions pour prendre en charge la revalorisation de 4 % et 93 millions pour tirer les conséquences de la déconjugalisation. À ce propos, un travail a été engagé avec l’ensemble des services pour que la mesure ne pénalise pas 45 000 couples. Le décret sera présenté pour avis au Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) en novembre avant d’être publié mi-décembre. De son côté, la Cnaf est chargée de refonder son système informatique. Nous prendrons le temps nécessaire pour réaliser ce travail complexe et technique afin de ne pas commettre d’erreur.

Enfin, la charge des prestations de compensation du handicap (PCH) versées cette année par les départements leur a été compensée par la loi de financement de la sécurité sociale. C’est le cas, en particulier, de la PCH « parentalité ». Le montant des nouvelles PCH qui seront versées à partir du 1er janvier 2023 pour prendre en compte les besoins des personnes sourdes et aveugles ou atteintes de handicap cognitif, mental ou psychique n’a pas été correctement évalué mais les mesures nécessaires seront prises dans un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

M. le ministre. S’agissant de la formation, les crédits de l’État baissent mais pas le niveau d’investissement puisque les régions prennent le relais : 16 000 places seront créées dont 6 600 au sein des instituts de formation en soins infirmiers. La formation reste notre priorité.

Mme la rapporteure a salué le grand chantier de la solidarité à la source qui tend à restaurer la confiance dans notre système de prestations sociales en le rendant plus lisible, en réduisant les non-recours, en renforçant l’accès au droit, en luttant contre la fraude et les indus. L’expérimentation « territoires zéro non-recours » sera lancée dans une dizaine de départements pour aller à la rencontre du public le plus éloigné du système. En 2024, les caisses d’allocations familiales enverront les premiers formulaires préremplis aux bénéficiaires. Enfin, en 2027, les bases ressources seront harmonisées.

Mme la secrétaire d’État. Je suis placée auprès de la Première ministre et, à ce titre, je prête une attention particulière à l’ensemble des dossiers relatifs à l’enfance. Un comité interministériel de l’enfance se tiendra en novembre. L’inclusion des enfants en situation de handicap est au cœur de nos préoccupations.

Le nombre de dossiers traités par les maisons départementales des personnes handicapées ne cesse d’augmenter. Les demandes d’AESH ou d’accueil dans un institut médico-éducatif ou un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique  ont fortement augmenté. Face à cette recrudescence des troubles du neurodéveloppement et du handicap, nous devrons réfléchir à l’accueil de ces enfants mais aussi à l’organisation du temps périscolaire et à l’accompagnement des parents. Les conséquences de la crise sanitaire sont indéniables. Les violences au sein de la famille se sont accrues, ce qui a pu altérer l’équilibre mental des enfants.

Le nombre de places proposées en hébergement d’urgence a augmenté durant le précédent quinquennat. Malgré les efforts, les établissements sont saturés, parce que les flux migratoires ont repris et que nombre d’hôtels ne veulent plus assurer l’hébergement d’urgence. Nous devrons trouver des solutions car il n’est pas acceptable que des enfants dorment dans la rue.

J’en viens au reportage réalisé par « Zone interdite » sur l’ASE, qui a choqué les téléspectateurs. Les élus et les membres du Gouvernement doivent savoir garder de la distance par rapport à des méthodes journalistiques comme l’infiltration ou la mise en parallèle de situations sans rapport les unes avec les autres. Le reportage a été tourné il y a plus de dix‑huit mois. Depuis, le Parlement a adopté, le 7 février 2022, la loi relative à la protection des enfants, qui interdit d’ici 2024 le placement à l’hôtel des mineurs et des jeunes majeurs confiés à l’ASE. Ma priorité est de faire appliquer ce texte et le PLF 2023 m’en fournit les moyens. L’État n’est pas seul puisque les départements sont en première ligne.

La loi de 2022 a renforcé la gouvernance de cette politique publique afin de mieux coordonner les acteurs. Je ne suis pas favorable à une recentralisation qui nous prendrait dix ou quinze ans. Pour avoir été directrice de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) au ministère de la justice, je sais très bien quelle administration aurait en charge cette responsabilité mais je ne crois pas que l’État soit le mieux placé pour l’assumer. En revanche, l’État doit renforcer sa présence dans les territoires pour remplir ses propres missions, en garantissant à nos concitoyens l’accès à la santé, à l’éducation et à la justice, en coordonnant l’action publique et en les contrôlant. De toute évidence, les dispositifs de la protection de l’enfance ne l’ont pas été suffisamment.

Il convient également d’améliorer l’attractivité des métiers dans les territoires. C’est vrai, nous avons besoin de dispositifs nationaux et je vous confirme, à cet égard, que les maîtresses de maison, les surveillants de nuit ainsi que les moniteurs-éducateurs bénéficieront des mesures de revalorisation salariale. Cela étant, rien n’empêche un employeur d’augmenter les rémunérations des personnels qui ne seraient pas visés par les accords du Ségur mais qui auraient participé aux efforts de lutte contre la pandémie ! Je l’ai fait lorsque j’étais à la tête de la PJJ. Quant à savoir qui paie, finalement, de l’État ou du département, c’est une autre question. Cette politique est décentralisée et relève donc de la responsabilité des départements.

La loi de 2022 a créé le GIP France Enfance protégée, qui regroupe l’État, les associations et les départements, ces derniers étant les chefs de file de cette politique publique décentralisée. Des dépenses de transition sont prévues mais le PLF 2023 permet de financer les missions assurées par les opérateurs qui rejoignent le GIP. Cette structure est appelée à jouer un rôle de plus en plus important car elle permettra de faire remonter les bonnes pratiques et les difficultés, d’améliorer la transmission des données relatives à la protection de l’enfance ou de faire émerger des idées peut‑être plus intelligentes que celles que le Gouvernement pourrait avoir ! Des décrets sont en cours de rédaction. La loi de finances avait alloué aux départements un montant de 50 millions d’euros pour accompagner les jeunes majeurs de moins de 21 ans. Le même montant est prévu dans le PLF 2023. D’autres mesures sont prises pour améliorer l’insertion professionnelle. Nous ne devons pas laisser les jeunes majeurs trois ans de plus, entre 18 et 21 ans, à l’ASE. Les dispositifs d’insertion et d’accompagnement doivent prendre le relais. Je m’y emploie avec Carole Grandjean et Olivier Dussopt.

Cette loi impose de contrôler systématiquement les antécédents judiciaires de tous les professionnels et bénévoles qui interviennent auprès des enfants dans des établissements pour mineurs. La consultation du fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles et violentes révèle les condamnations mais aussi les mises en examen. Un outil numérique sera mis à la disposition des employeurs pour faciliter le contrôle lors de l’embauche puis à intervalles réguliers.

Je suis saisie des conclusions de la Ciivise. Le garde des sceaux engagera une réflexion autour de l’autorité parentale. De mon côté, je m’occuperai des plateformes d’accompagnement des professionnels lors des signalements. Nous souhaitons lancer une campagne en mars 2023 pour prévenir les violences, en particulier sexuelles, au sein des familles.

Mme Peyron m’a interrogée sur la contractualisation de la prévention et de la protection de l’enfance entre les départements et l’État. À la fin du précédent quinquennat, elle était en cours. Lors de ma prise de fonctions, au début de l’été, les négociations avec la direction du budget étaient bien engagées. J’ai demandé le maintien de ce qui a été fait et l’ajout de ce qui était en cours. Seules douze collectivités locales ont refusé d’entamer une démarche de contractualisation, qui n’en est pas moins en cours d’élaboration, car l’objectif est d’aller au bout de cette démarche. Certains contrats conclus ont fait l’objet d’avenants.

La contractualisation entre l’État et les départements vit. Elle a une forme d’efficacité. Concentrée sur la protection maternelle et infantile, elle traite aussi du circuit du signalement et du renforcement des directions de la protection de l’enfance. Les départements y ont inclus de nombreux objectifs. Je souhaite qu’elle soit élargie à l’éducation nationale et à l’autorité judiciaire, sans lesquelles la politique de protection de l’enfance est bancale. Par ailleurs, j’ai promis au ministre chargé des comptes publics que nous l’évaluerons pour déterminer comment la faire évoluer en 2023, qui est une année de transition.

Chère Maud Petit, nous nous sommes engagés à ouvrir une unité d’accueil pédiatrique enfants en danger (UAPED) par département. Comme d’autres politiques, celle‑ci bénéficie non seulement de crédits de l’action 304, mais aussi des fonds d’intervention régionaux et des crédits mobilisés sur l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. L’augmentation du budget dédié aux UAPED vise à les déployer dans tous les départements et à renforcer les équipes en place. Par ailleurs, le ministère de la justice contribuera à l’équipement vidéo des salles d’audition. Comme l’a annoncé le ministre de la santé et de la prévention à Marseille, nous continuerons à développer les UAPED, avec l’objectif d’atteindre le niveau de la juridiction, dans le cadre d’un travail avec le ministère de l’intérieur, qui met en œuvre le dispositif complémentaire des salles Mélanie.

Dans le cadre du plan de lutte contre les violences faites aux enfants, des fonds sont alloués à la lutte contre la prostitution des mineurs. Nous avons lancé des appels à projets pour renforcer le numéro d’écoute ainsi que les maraudes visant à repérer les jeunes filles, et plus rarement les jeunes garçons, qui se prostituent.

Sur l’attractivité des métiers, la Première ministre a rappelé la nécessité d’une coordination des champs des métiers du social et de l’enfance, ainsi que des démarches entreprises par Sarah El Haïry sur les métiers de l’animation et de celles entreprises par le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées sur les autres. L’idée est d’avancer tous ensemble et de continuer sur la trajectoire du Ségur, tout en sortant de sa dynamique pour aller vers une augmentation des salaires et un accompagnement du recrutement.

Susciter des vocations s’impose d’autant plus que nos jeunes ne veulent plus s’occuper de nos enfants, alors même qu’il s’agit de l’un des plus beaux métiers du monde. Il faut renforcer les filières, dans les lycées professionnels et au niveau post-bac, et accompagner la formation continue. La contractualisation inclut des fonds dédiés à la formation. Je souhaite que toutes les écoles du champ de l’accompagnement des enfants élaborent ensemble un véritable plan de formation. Comme je l’ai dit dans l’hémicycle, nous renforçons la formation des contrôleurs. Nous pouvons aller plus loin pour partager une culture commune de l’accompagnement des enfants fragiles.

Sur la maltraitance que nous qualifierions d’institutionnelle, ce qui présente l’inconvénient d’en attribuer la responsabilité aux professionnels, je suis de près les deux missions confiées par Jean-Christophe Combe à l’IGAS, au Haut Conseil de la santé publique et à la Conférence nationale de santé sur les maltraitances, couvrant tout le champ des établissements médico-sociaux. Dans l’attente de leurs préconisations, je rappelle qu’il existe un dispositif d’écoute, le 119, qui est aussi destiné aux professionnels constatant des maltraitances dans leur service.

 

Par ailleurs, il faut aborder ce sujet de façon très particulière. Tous les publics protégés font l’objet d’une approche transversale, mais entendre un enfant suppose aussi une approche spécifique, dans le cadre des contrôles et des dispositions prévues par la loi du 7 février 2022.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Je remercie M. le ministre, Mme la ministre déléguée et Mme la secrétaire d’État pour leur disponibilité et leurs réponses.

 

 

 

 

La commission examine ensuite les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances (Mme Christine Le Nabour, rapporteure pour avis).

Article 27 et état B

Amendement AS6 de M. Elie Califer.

M. Elie Califer (SOC). Depuis le 1er septembre 2010, les jeunes âgés de 18 à 24 ans peuvent bénéficier du RSA jeune actif. Toutefois, il est plus difficile d’accès que le RSA classique. Il faut notamment avoir exercé une activité professionnelle pendant au moins deux ans à temps plein, sauf si l’on est parent isolé. Nous souhaitons améliorer l’accès au RSA jeune actif des jeunes majeurs, qui, comme tout un chacun, subissent les difficultés de l’époque que sont l’inflation et l’augmentation du coût de l’énergie. Il faut donner aux jeunes les moyens de vivre ailleurs que dans la rue.

Mme la rapporteure. L’amendement vise à mobiliser 13,2 milliards d’euros pour l’extension du RSA aux jeunes âgés de 18 à 24 ans. Il importe de préciser que le RSA jeune actif bénéficie aussi aux jeunes parents et à ceux qui sont en passe de l’être.

Chers collègues socialistes, vous et nous n’avons pas la même ambition pour notre jeunesse, ce qui n’est pas nouveau. Nous avons eu ce débat maintes fois au cours du dernier quinquennat. Nous avons adopté plusieurs dispositions visant à accompagner mieux et plus vite nos jeunes, à les qualifier et à les inciter à se former. Le plan « 1 jeune, 1 solution » a permis à 4 millions de jeunes de trouver une solution. La garantie jeunes, devenue le contrat d’engagement jeune au 1er mars dernier, a fait l’objet d’un premier bilan d’étape plutôt satisfaisant. Affaire à suivre !

Nous ne délaisserons pas notre jeunesse, dont vous et nous n’avons pas tout à fait la même vision. Avis défavorable.

M. Elie Califer (SOC). La succession des mesures prouve qu’elles ne fonctionnent pas. Nous devons stabiliser notre vision des jeunes en difficulté pour les faire entrer en formation, ce qui réduirait le nombre de jeunes bénéficiaires du RSA.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement AS67 de M. Damien Maudet.

M. Damien Maudet (LFI - NUPES). Nous devons donner à la jeunesse les moyens de son autonomie. En matière d’ambition pour la jeunesse, je me souviens qu’Emmanuel Macron a déclaré : « Nous n’avons pas de politique à avoir pour la jeunesse ». En effet !

Nous avons construit, pour nos aînés, un système fondé sur la solidarité nationale. Nous devons faire pareil avec les jeunes. Cessez de faire en sorte que les familles les prennent en charge, même quand ils sont adultes ! Ce système est inégalitaire. Afin de les confier à la solidarité nationale, notre amendement d’appel vise à créer une garantie autonomie pour les jeunes.

Mme la rapporteure. Monsieur Maudet, vous ne pouvez pas dire que nous nous désintéressons de notre jeunesse, notamment des étudiants en situation de précarité, pour lesquels le Gouvernement a multiplié les dispositifs de soutien, au premier rang desquels l’indexation des loyers des résidences universitaires, qui étaient gelés depuis 2019.

Les étudiants vivant en logement ordinaire bénéficient de la mesure générale d’encadrement de l’évolution des loyers adoptée l’été dernier. La prolongation du bouclier tarifaire a permis de limiter la hausse de la facture de chauffage des étudiants. S’agissant de l’alimentation, le repas à 1 euro a été reconduit pour l’année universitaire 2022-2023. Dès la rentrée 2022, les bourses sur critères sociaux ont été revalorisées de 4 %, soit une augmentation pouvant atteindre 228 euros par an pour les 59 000 boursiers échelon 7.

Au total, 2,5 milliards d’euros d’aides directes et 400 millions d’euros d’aides indirectes sont alloués aux étudiants, principalement dans le cadre de la mission Recherche et enseignement supérieur.

Avis défavorable.

M. Arthur Delaporte (SOC). Madame la rapporteure pour avis, nous n’avons, s’agissant de la jeunesse, ni la même vision, ni la même ambition. Nous dressons le constat du réel, à l’unisson des organisations syndicales étudiantes : l’augmentation du coût de la vie des étudiants de 5 %, voire de 7 %.

Les aides n’ont pas suivi, la revalorisation de certaines prestations sociales de 3,5 % étant inférieure à l’inflation. La revalorisation des aides personnelles au logement (APL) de 3,5 % est égale à l’augmentation des loyers. Dans le cas d’un loyer de 600 euros, cela correspond à une hausse de loyer de 21 euros, contre 7 euros pour les APL, soit une limitation de la hausse du loyer à 14 euros. Je ne peux pas vous laisser dire que vous agissez pour les étudiants. Il suffit d’aller à leur rencontre pour constater que la précarité s’étend, et avec elle le recours à l’aide alimentaire.

Cet amendement d’appel mérite mieux qu’un autosatisfecit au sujet des mesures prises par le Gouvernement. La situation n’est pas satisfaisante au regard des besoins. Nous proposons une solution clef en main. Vous pouvez la refuser par idéologie ou par manque de moyens, mais pas par autosatisfaction.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Chacun a conscience des difficultés que connaissent les étudiants, mais je vous trouve un peu pingres : vous proposez 10 millions d’euros, nous avons investi 7 milliards.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement AS86 de Mme Marianne Maximi.

 

Amendement AS79 de Mme Marianne Maximi.

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). Cet amendement d’appel prévoit le versement automatique du RSA pour éviter les situations de non-recours. Le taux de non‑recours aux aides sociales et aux minima sociaux est estimé à environ un tiers des bénéficiaires potentiels, soit autant de personnes en situation de précarité qui ne peuvent disposer de leurs droits, et connaissent donc une dégradation de leurs conditions de vie.

D’après Héléna Revil, chercheuse à l’université de Grenoble, ces non-recours s’expliquent notamment par la complexité du chemin à suivre pour demander les aides : « C’est un parcours du combattant : il faut d’abord s’adresser à la caisse d’assurance maladie, constituer un dossier, puis se tourner vers des organismes complémentaires... À chaque étape, il y a des incompréhensions qui font que le dossier ne va pas au bout. » Nous avons réalisé le prélèvement à la source pour les impôts ; il est nécessaire d’engager une automatisation du versement du RSA.

Mme la rapporteure. Monsieur Ratenon, je suis complètement d’accord avec vous, à tel point que j’évoque dans mon rapport cette promesse du Président de la République.

Certains bénéficiaires sont connus des services. Nous travaillons à l’harmonisation des bases ressources, dont les différences – versement mensuel, trimestriel ou annuel – provoquent des complications techniques. La promesse présidentielle est d’aller vers la solidarité à la source, sur le modèle du prélèvement de l’impôt à la source, grâce à une fusion du RSA, de la prime d’activité et des APL.

Par ailleurs, beaucoup reste à faire sur le repérage de ceux qui ne sont pas connus des organismes, et que nous devons aller chercher dans le cadre d’une politique de l’aller vers. Dès le mois de janvier, nous expérimenterons, dans dix territoires pilotes, des « territoires 100 % accès aux droits », selon une appellation plus positive que « territoires zéro non‑recours ». La question est de savoir comme faire confiance aux acteurs des territoires pour aller chercher ceux qui passent sous les radars et n’ont pas accès aux droits auxquels ils sont éligibles.

J’émets un avis défavorable à cet amendement, qui sera bientôt satisfait.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements AS19 de M. Elie Califer, AS105 de Mme Marie Pochon et AS41 de M. Elie Califer (discussion commune).

M. Elie Califer. Dans la crise que nous connaissons, certains sont exclus de l’égalité des chances figurant dans l’intitulé de la mission budgétaire que nous examinons. L’amendement AS19 vise à créer un soutien financier mensuel pour les achats alimentaires à destination des ménages en situation de précarité. Je n’ai pas besoin de rappeler l’évolution récente des prix des aliments de base. Il s’agit de doter chaque bénéficiaire des minima sociaux d’un montant mensuel de 50 euros pour s’alimenter correctement, dans le cadre d’une démarche de prévention pour une bonne santé.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo - NUPES). L’amendement AS105 vise à inscrire dans le PLF 2023 une ligne de crédit pour le chèque alimentaire, en vue de le pérenniser. Procéder par décret risque de créer une incertitude. Dès lors que 32 % des Français n’ont pas les moyens de s’acheter quotidiennement des fruits et légumes, qu’un Français sur cinq saute certains repas pour des raisons financières, et que cette proportion monte à 34 % parmi les moins de 35 ans, il est essentiel d’inscrire cette mesure dans la durée.

M. Jérôme Guedj (SOC). Je ne résiste pas à l’envie de participer à ce débat un peu lunaire. Nous débattons d’amendements dont nous savons pertinemment qu’ils ne seront pas débattus dans l’hémicycle. J’aurais préféré une discussion plus approfondie avec les membres du Gouvernement, d’autant que, hormis M. Combe, nous ne les avons pas encore auditionnés.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous les auditionnerons. Je m’y engage.

M. Jérôme Guedj. En attendant, posons les jalons des sujets qui nous intéressent.

La création de chèques alimentaires a été proposée à plusieurs reprises, notamment dans le cadre de la Convention citoyenne pour le climat. L’amendement AS41 prévoit une allocation financière, dont le coût est évalué à 400 000 euros pour deux cents familles, soit un total de 8 millions d’euros, intégrant les frais d’animation, de suivi et d’évaluation. Cette aide s’inscrit dans les dynamiques des plans alimentaires territoriaux. Nous proposons de mener cette expérimentation dans une vingtaine de territoires.

Mme la rapporteure. Tout en souscrivant aux objectifs visés par les amendements, j’émets un avis défavorable.

Le Gouvernement travaille sur le chèque alimentaire. De nombreux points techniques doivent faire l’objet d’une vigilance particulière, pour s’assurer que le dispositif bénéficie en priorité aux produits agricoles locaux et durables. Ce travail est mené en concertation avec le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Sans attendre de parvenir à une solution, le Gouvernement a adopté des mesures de soutien au pouvoir d’achat, notamment une aide exceptionnelle de solidarité, versée le 15 septembre dernier aux bénéficiaires de minima sociaux et des APL ainsi qu’aux étudiants boursiers, sous la forme d’une prime de 100 euros, augmentée de 50 euros par enfant à charge.

Par ailleurs, la revalorisation anticipée des prestations sociales de 4 %, applicable depuis le 1er juillet 2022, ainsi que le bouclier tarifaire et l’encadrement des loyers, permettent de réduire la part des dépenses contraintes dans le budget des ménages les plus modestes.

S’agissant de l’aide alimentaire, le PLF 2023 prévoit une augmentation exceptionnelle de l’aide alimentaire grâce au doublement des crédits qui lui sont consacrés, en vue de la mise en place d’un fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires. Ainsi, 60 millions d’euros supplémentaires seront alloués au renforcement de la qualité nutritionnelle de l’aide alimentaire, à l’émancipation et à l’autonomisation des bénéficiaires de l’aide alimentaire et à la poursuite d’une alimentation plus saine écologiquement.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements identiques AS20 de M. Elie Califer et AS107 de Mme Marie Pochon, amendements AS89 et AS90 de Mme Karen Erodi (discussion commune).

M. Elie Califer (SOC). Pour soulager les familles les plus touchées par l’inflation, nous proposons de créer un fonds de soutien aux initiatives de solidarité alimentaire territorialisée. Il s’agit de réduire les situations de précarité sous-jacente à l’insécurité alimentaire, sur le modèle du dispositif partenarial « Territoires à vivreS », pour assurer aux familles dignité et santé.

Mme Marie Pochon (Écolo - NUPES). Mon amendement vise à créer un fonds de soutien aux initiatives de solidarité et de citoyenneté alimentaire territorialisée, pour rendre l’alimentation durable et de qualité accessible et dépourvue de stigmatisation, en assurant aux personnes les moyens de rester actrices de leur alimentation.

L’inflation de cette année aggrave une situation déjà préoccupante. Selon les données publiées par l’Insee en août 2022, l’augmentation des prix alimentaires est de 7,9 % sur un an. La hausse est plus forte, de 8 % à 10 %, s’agissant des fruits frais et des produits d’origine animale que sont le lait, le fromage et les œufs. Les effets sur la santé d’un manque d’accès à une alimentation en quantité ou en qualité suffisante sont bien connus. Pour les ménages en situation de précarité, c’est la double peine.

Comme le démontre une étude récente de l’Insee, la décision de recourir à l’aide alimentaire est souvent difficile : 64 % des personnes interrogées déclarent en ressentir de la honte. L’enjeu est de rendre l’aide alimentaire plus acceptable socialement et de modifier nos modalités de réaction. Le fonds proposé vise à soutenir des dynamiques multi-partenariales.

Mme Karen Erodi (LFI - NUPES). De 8 à 10 millions : c’est le nombre de nos concitoyens ayant eu recours à l’aide alimentaire en 2021. 11 % à 12 % : c’est la part des ménages en situation de précarité alimentaire. 7,9 % : c’est l’augmentation moyenne du prix des produits alimentaires sur un an.

La situation est alarmante. C’est une triste réalité : les Français ont faim. Le système d’aide alimentaire classique est d’un grand secours, mais n’est qu’une béquille trop courte. Fondé sur l’écoulement des invendus de l’agro-industrie et de la grande distribution, il n’est pas durable et ne permet pas un accès digne à l’alimentation. L’évaluation de la loi « Garot » a démontré que les denrées distribuées sont de mauvaise qualité et leur diversité bien trop faible, ce qui ne permet pas de satisfaire les besoins nutritionnels des bénéficiaires.

Une solution existe. Expérimentée dans la métropole de Montpellier depuis mai 2021, elle repose sur des caisses alimentaires communes. Nous proposons de l’expérimenter dans dix territoires, dont deux d’outre-mer. Il s’agit de créer dix comités citoyens de l’alimentation, chargés de définir une liste des lieux de distribution conventionnés, en portant une attention particulière au monde agricole et paysan ainsi qu’aux enjeux de durabilité et de santé, en vue de l’ouverture, dans chaque territoire, d’une caisse qui distribuera pendant un an 100 euros par mois à cinq cents participants pour y faire des achats alimentaires.

Participation des personnes en situation de précarité alimentaire, donc disparition de tout sentiment de culpabilité ou de honte ; montée en compétences et en connaissances sur les questions agricoles, paysannes et sanitaires ; soutien aux acteurs locaux : il y a fort à parier que cette expérimentation nous amènera à réévaluer notre politique de lutte contre la précarité alimentaire.

Mme la rapporteure. Nous partageons complètement ces constats, comme l’a rappelé M. Combe. Je suggère le retrait des amendements et émets à défaut un avis défavorable.

Ceux qui visent à la création d’un fonds de soutien aux initiatives de solidarité alimentaire territorialisée sont satisfaits. Le PLF 2023 inclut un fonds pour les nouvelles solidarités alimentaires, doté de 60 millions d’euros, soit trois fois plus que ce que prévoient les amendements.

S’agissant de l’expérimentation de caisses alimentaires communes menée à Montpellier, elle est intéressante et le Gouvernement la suit. Nous l’évaluerons pour déterminer si elle mérite d’être poursuivie et élargie.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements AS8 de Mme Isabelle Santiago et AS7 de M. Elie Califer (discussion commune).

M. Arthur Delaporte (SOC). L’amendement AS8 vise à doter dignement la politique de protection de l’enfance pour lui donner les moyens de ses ambitions, en doublant le montant des autorisations d’engagement et des crédits de paiement de l’action 19. Le projet de budget du Gouvernement les réduit de 23 %, soit une diminution de 75 millions d’euros, alors même que le reportage diffusé sur M6 cette semaine démontre que les moyens manquent, et que chacun peut constater que les besoins augmentent. Quant à l’accompagnement des jeunes majeurs, il est laissé à la discrétion de la volonté politique des départements. En 2021 et en 2022, les budgets ont quasiment stagné, n’augmentant que de 1,2 %. Sur le terrain, les acteurs, des familles d’accueil aux maisons d’enfants à caractère social, demandent des moyens immobiliers et surtout humains.

Deux chiffres issus du dernier rapport de l’Igas mettent en lumière la nécessité d’améliorer la politique de protection de l’enfance : un quart des personnes sans abri nées en France sont d’anciens enfants placés auprès de la protection de l’enfance ; 7 400 jeunes relevant de l’ASE sont hébergés à l’hôtel.

Nous avons la conviction que 250 millions d’euros de dépenses supplémentaires sont nécessaires pour financer, dans toutes ses dimensions, la protection des jeunes relevant de l’ASE : protection des mineurs non accompagnés ; fonctionnement du nouveau groupement d’intérêt public enfance en danger (GIPED) ; plan national de lutte contre les violences faites aux enfants et aux jeunes.

M. Jérôme Guedj (SOC). Je défends l’amendement AS7.

J’aimerais que Mme la rapporteure pour avis nous aide à décrypter la baisse de 23 %, en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, des investissements dans le plan de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes. Même si ces crédits ne financent pas les dépenses de l’ASE, notamment leur volet immobilier, certaines structures relèvent de ce plan, mis en œuvre à l’échelon interministériel. En réduire les crédits tout en déplorant les difficultés de l’ASE, de la prévention auprès de la jeunesse et de la lutte contre la pauvreté en général, relève du paradoxe. Nous devons être rassurés sur ce point.

Mme la rapporteure. Les crédits consacrés à la protection de l’enfance ne diminuent pas. Le plan de prévention et de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes comporte cinq axes : l’égalité des chances dès les premiers pas, la garantie des droits fondamentaux des enfants, la formation des jeunes, leur accompagnement vers l’emploi et l’accès aux droits. Ce plan touche à son terme. Il fera l’objet d’une évaluation et sera remplacé, en 2023, par une nouvelle stratégie, dépourvue des axes relatifs à l’emploi et à l’insertion professionnelle, qui relèveront de la mission Travail et emploi.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements AS9 de Mme Isabelle Santiago, AS78 de Mme Marianne Maximi, AS42 et AS43 de Mme Isabelle Santiago et AS91 de M. William Martinet (discussion commune).

M. Arthur Delaporte (SOC). L’amendement AS9 vise à doter la nation des moyens suffisants pour prendre en charge les psycho-traumatismes subis par les enfants victimes de violences sexuelles ou de violences intrafamiliales, grâce à la création d’un fonds spécifique de prise en charge des psycho-traumatisme causés aux enfants.

Chaque année en France, au moins 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles. Face à ce phénomène qui brise des vies, la Ciivise a identifié quatre axes d’action : le repérage, le traitement judiciaire, la réparation par le soin et l’indemnisation, la prévention. Le fonds proposé par Mme Santiago pourrait financer des actions dans le cadre de ces quatre axes, notamment des premier et troisième, en organisant le repérage systématique des violences, en soutenant les professionnels de l’enfance, en dotant les services de police de moyens humains spécialisés dans la pédocriminalité et en garantissant des soins spécifiques pour les enfants victimes ainsi qu’un accompagnement psychiatrique à long terme.

Dans le projet de budget que nous examinons, nous ne voyons nulle ambition en matière d’amélioration de la prise en charge des enfants victimes de violences. Les chiffres sont pourtant alarmants. L’accès au service national téléphonique de l’enfance en danger (SNATED) est saturé ; seuls quinze appels sur cent acceptés par le pré-accueil sont traités par un écoutant. En outre, certaines préconisations du rapport d’étape du plan de lutte contre les violences faites aux enfants et aux jeunes n’ont toujours pas été suivies d’effet. Je salue l’excellent travail de la Ciivise, qui met en avant et traite la parole des victimes.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). L’amendement AS78 vise à augmenter les moyens dédiés à la protection de l’enfance.

Madame la rapporteure pour avis, vous dites que les moyens ne diminuent pas ; permettez-moi de vous parler des besoins qui augmentent et des moyens qui, souvent, ne suivent pas. Nous n’avons pas les moyens d’accueillir correctement les enfants victimes de violences. J’ai travaillé dans un centre enfance et famille, qui est une structure d’accueil d’urgence. Je peux témoigner que nous n’avons pas les moyens d’accueillir les enfants correctement. Il est urgent d’augmenter les budgets alloués à la protection de l’enfance.

Dans de nombreux départements, certaines décisions de placement prononcées par les magistrats ne sont pas exécutées, ce qui est particulièrement alarmant. Que des enfants soient laissés dans un environnement familial dangereux faute de place pour les accueillir est un scandale absolu. Dans le budget que nous examinons, je ne vois pas l’ébauche d’une solution. Il faut prendre ce problème au sérieux. Dans le Puy-de-Dôme, quatre-vingts placements sont en attente d’exécution, ce qui n’est jamais arrivé auparavant.

M. Arthur Delaporte (SOC). L’amendement AS42 vise à organiser le repérage systématique, par des professionnels, des violences sexuelles auprès de tous les enfants. Le nombre de plaintes démontre que les violences faites aux enfants font l’objet d’une sous‑révélation massive. Il faut, de toute urgence, aller chercher ces enfants pour les mettre en sécurité, les protéger, leur prodiguer des soins spécialisés et leur éviter d’endurer des souffrances somatiques et psycho-traumatiques leur vie durant,

Une attitude volontariste de chaque adulte et de l’institution s’impose pour permettre un repérage systématique des violences. Face à la stratégie de l’agresseur, la société doit avoir une stratégie de protection. Tandis que ce dernier impose le silence à l’enfant et lui interdit de parler, chaque professionnel doit, à la place qu’il occupe dans la chaîne de la protection et sans confusion des rôles, permettre la révélation des violences et amorcer la mise en sécurité de l’enfant. Cette stratégie de protection ambitieuse suppose le renforcement des moyens humains dans tous les espaces de vie fréquentés par les enfants : médecins et infirmiers scolaires pour les entretiens de dépistage, assistants sociaux, éducateurs.

M. Jérôme Guedj (SOC). L’amendement AS43 vise à dégager des moyens pour combler un manque en créant une cellule nationale de conseil et de soutien pour les professionnels destinataires de révélations de violences sexuelles de la part d’enfants. Si la mise en sécurité de l’enfant s’impose en urgence, les professionnels indiquent souvent qu’ils se sentent isolés et ne savent pas où trouver les conseils et les outils partagés, notamment s’ils sont confrontés à des situations d’inceste.

Il s’agit de compléter le SNATED par un dispositif permettant d’accompagner spécifiquement les professionnels, en sus des proches ou des enfants eux-mêmes. Il s’agit en somme de muscler le SNATED et de le faire savoir. Seuls 6 % des appels au SNATED émanent de professionnels.

Mme Marianne Maximi (LFI - NUPES). L’amendement AS91 vise à créer une cellule de soutien à destination des professionnels accueillant la parole des enfants victimes de violences sexuelles. Cette mesure, préconisée par un récent rapport de la Ciivise, coûterait, d’après son président, le juge Edouard Durand, environ 1 million d’euros. Il est urgent et nécessaire de la prendre.

Les parcours de formation des travailleurs sociaux négligent l’écoute et l’accueil d’une parole sur les violences intra-familiales, notamment d’ordre sexuel, et notamment s’il s’agit d’inceste. En pratique, les professionnels sont très peu formés à écouter et à accompagner correctement les victimes. Les familles d’accueil, qui accompagnent les enfants pendant longtemps et sont en première ligne pour recueillir leur parole, ne le sont pas davantage. Il faut allouer à ces personnes, exposées à la violence que leur livrent les enfants, des outils et des moyens.

Mme la rapporteure pour avis. On ne peut que partager les objectifs louables visés par les amendements. Mme la secrétaire d’État en charge de l’enfance a longuement répondu aux questions qui lui ont été adressées.

La stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance bénéficie d’une augmentation de crédits de 27 %, ce qui n’est pas rien. Le Gouvernement prévoit d’allouer 315 millions d’euros à la protection et à l’accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables dans le cadre du seul programme 304. Il faut y ajouter, s’agissant d’une politique transversale, les crédits alloués par les ministères de l’intérieur et de l’éducation nationale.

Dès le 1er janvier 2023, le GIPED, compétent en matière de protection de l’enfance, améliorera la coordination des services dédiés à la lutte contre les violences faites aux enfants. Il sera notamment chargé de la gestion du SNATED et de l’Observatoire national pour la protection de l’enfance. Cette évolution organisationnelle sera complétée par l’amélioration du maillage territorial des UAPED, qui sont des lieux uniques de prise en charge globale des enfants victimes par des professionnels, dans un lieu adapté et sécurisant, pour favoriser le recueil de leur parole et assurer leur protection judiciaire et médico-psychologique. 7,5 millions d’euros seront consacrés à la création de vingt-et-une unités, l’objectif étant d’en créer soixante‑trois d’ici 2025.

Le GIPED et les UAPED joueront un rôle clef dans le repérage des violences. Par ailleurs, 140 millions d’euros sont consacrés à la protection de l’enfance dans le cadre des contrats signés par le préfet, les ARS et les départements.

S’agissant du traitement judiciaire des violences commises dans le cadre familial, la Première ministre a confié à notre collègue Émilie Chandler et à la sénatrice Dominique Vérien une mission d’information dont les conclusions permettront d’alimenter la réflexion et d’améliorer les choses.

S’agissant de l’indispensable accompagnement des professionnels, il faut leur donner les informations utiles et pertinentes pour mettre l’enfant en sécurité le plus vite possible. Le 119 est ouvert non seulement aux victimes et à leurs proches, mais aussi à tout tiers témoin de violences. Des travaux sont en cours pour en améliorer l’organisation. Des efforts doivent être consentis pour mieux faire connaître ce numéro partout où des professionnels sont susceptibles de côtoyer des enfants. Ils seront réalisés dans le cadre du GIPED. Ajouter des structures à celles qui existent me semble moins pertinent que renforcer ces dernières.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Mme la présidente Fadila Khattabi. Nous poursuivrons l’examen des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances ce soir, après l’examen des crédits de la mission Santé.

 

 

 

La réunion s’achève à vingt heures dix.


Présences en réunion

 

Présents.  M. Éric Alauzet, Mme Farida Amrani, M. Joël Aviragnet, M. Christophe Bentz, Mme Fanta Berete, M. Elie Califer, M. Victor Catteau, M. Paul Christophe, Mme Laurence Cristol, M. Arthur Delaporte, M. Sébastien Delogu, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Karen Erodi, M. Olivier Falorni, M. Thierry Frappé, Mme Marie-Charlotte Garin, M. François Gernigon, M. Jean-Carles Grelier, M. Jérôme Guedj, Mme Servane Hugues, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Rachel Keke, Mme Fadila Khattabi, Mme Laure Lavalette, M. Didier Le Gac, Mme Christine Le Nabour, M. Matthieu Marchio, M. Didier Martin, M. Thomas Mesnier, M. Yannick Neuder, Mme Maud Petit, Mme Michèle Peyron, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Stéphanie Rist, M. Freddy Sertin, Mme Prisca Thevenot, M. Nicolas Turquois, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier

 

Excusés.  M. Thibault Bazin, M. Paul-André Colombani, Mme Caroline Fiat, M. Jean-Philippe Nilor, M. Adrien Quatennens, M. Olivier Serva

 

Assistaient également à la réunion.  M. Laurent Esquenet-Goxes, M. Damien Maudet, Mme Marianne Maximi, Mme Marie Pochon