Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

 

  Audition de Mme Carine Camby, présidente de la première chambre de la Cour des comptes, M. Christian Charpy, président de la quatrième chambre, Mme Catherine Périn, MM. Emmanuel Giannesini et Jean-Pierre Viola, présidents de section, sur les fiches thématiques de la Cour des comptes relatives à la revue des dépenses publiques              2

  présences en réunion...........................20

 


Mardi
18 juillet 2023

Séance de 18 heures 15

Compte rendu n° 108

session extraordinaire de 2022-2023

 

 

Présidence de

 

M. Éric Coquerel,

Président

 


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La commission entend Mme Carine Camby, présidente de la première chambre de la Cour des comptes, M. Christian Charpy, président de la quatrième chambre, Mme Catherine Périn, MM. Emmanuel Giannesini et Jean-Pierre Viola, présidents de section, sur les fiches thématiques de la Cour des comptes relatives à la revue des dépenses publiques.

M. le président Éric Coquerel. Mes chers collègues, Nous accueillons Mme Carine Camby, présidente de la première chambre, M. Christian Charpy, président de la quatrième chambre, Mme Catherine Perrin et MM. Emmanuel Giannesini et Jean-Pierre Viola, présidents de section, qui viennent nous présenter les travaux de la Cour des comptes concernant la revue des dépenses publiques et les fiches thématiques publiées au début du mois de juillet. Celles-ci prolongent et mettent en pratique la réflexion qui avait été engagée dans le chapitre IV du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques que M. le Premier président Pierre Moscovici était venu nous présenter à la fin du mois de juin.

Nos invités seront en mesure de répondre à nos interrogations sur les notes suivantes : « Piloter et évaluer les dépenses fiscales », « Garantir l’efficacité des aides de l’État aux entreprises pour faire face aux crises », « Apprécier la contribution de la dépense publique à la transition écologique » et « Les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales ».

Les champs couverts par ces revues des dépenses sont larges et touchent à l’ensemble des administrations publiques, et pas seulement la sphère étatique. C’est la logique même d’un tel exercice.

Mme Carine Camby, présidente de la première chambre de la Cour des comptes. Avant de commencer cette présentation qui, comme le président de la commission le rappelait, permet d’évoquer le chapitre IV du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, je rappelle la volonté de la Cour des comptes de participer à l’exercice des revues de dépenses qui a été lancé par le ministre de l’économie et des finances au printemps.

La dépense publique a pour la première fois dépassé 1 500 milliards d’euros en 2022, alors que les mesures de soutien et de relance prises pour faire face à la crise sanitaire avaient fortement reculé. Le déficit public s’établit à 4,7 points de PIB et devrait passer à 4,9 points de PIB en 2023 ; la dette atteint 111,8 points de PIB, soit 14,4 points de plus qu’en 2019. Or la France a présenté en avril un programme de stabilité qui prévoit de réduire le déficit public en 2027 à 2,7 points de PIB et d’inscrire la dette sur une trajectoire descendante.

Pour y parvenir, la progression en volume de la dépense doit être abaissée à 0,4 % par an en moyenne sur la période, ce qui représenterait 10 à 12 milliards d’euros d’économies par an. La France s’est trouvée ces dernières années à plusieurs reprises dans une situation d’augmentation par rebonds successifs de ses dépenses publiques, ce que nous qualifions d’effet de cliquet. Cela constitue une situation tout à fait singulière au sein de l’Union européenne et accroît notre divergence.

C’est pour cette raison que le chapitre IV du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques a été consacré cette année à une contribution méthodologique à la qualité de la dépense, accompagnée de neuf notes thématiques sur différents domaines de l’action publique.

Ce rapport défend la conviction que les revues de dépenses doivent concerner tous les acteurs et être très larges : en effet, le fonctionnement courant des administrations publiques représente une part relativement modeste de l’ensemble des dépenses – même si la qualité de ce type de dépense doit également être examinée.

La revue doit aussi concerner tous les acteurs. En effet, l’État a supporté ces dernières années l’essentiel du poids de la crise et a joué le rôle d’assureur en dernier ressort pour l’ensemble de la sphère publique.

Cette grille doit s’appliquer aussi bien aux dépenses d’intervention qu’aux dépenses de fonctionnement, aux dépenses d’investissement qu’aux dépenses fiscales. Il est de notre point de vue simpliste de considérer que seules les dépenses de fonctionnement, par opposition aux dépenses d’investissement, seraient mauvaises.

S’agissant de la qualité de la dépense, il est important de prendre en compte la satisfaction des usagers vis-à-vis des services publics. Si cette satisfaction est difficile à mesurer, il semble qu’elle ne soit pas au niveau consacré chaque année à ces dépenses : un écart se creuse entre la dépense et la satisfaction vis-à-vis du résultat.

En outre, nous souhaitons éviter une approche strictement budgétaire, qui consisterait à intervenir sur la qualité de la dépense par simples coups de rabot. Plus complexe, l’approche que nous préconisons prend en compte des dimensions multiples, comme la rapidité du déploiement des dispositifs, la publicité des données et des résultats ou la lutte contre la fraude.

Enfin, au delà des concepts d’efficacité et d’efficience qui sont au fondement de la performance au sens de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), des caractéristiques supplémentaires doivent être intégrées à la définition d’une bonne dépense. Nous avons donc établi une grille d’analyse articulée autour de trois grandes étapes : la conception de la dépense, sa mise en œuvre et enfin l’évaluation de ses résultats.

Concernant la première étape, premièrement, nous avons rappelé qu’il existe un certain nombre de méthodes utilisées, notamment au niveau de l’Union européenne, pour mesurer la valeur ajoutée d’une dépense nouvelle. Le plus important, selon la Cour, est que pour chaque dépense soient arrêtés des objectifs clairs, hiérarchisés et chiffrés, de façon à pouvoir ensuite évaluer le résultat de ces dépenses supplémentaires. Souvent, la question est moins celle de l’utilité ou de l’inutilité de la dépense que celle de son ciblage. Au moment de la crise sanitaire, des effets d’aubaine ont ainsi pu être constatés, sans même évoquer d’éventuelles fraudes : la question du ciblage de la dépense se pose avec beaucoup d’acuité dans un contexte où il faut maîtriser le plus possible la dépense publique.

Deuxièmement, il faut s’assurer de la cohérence avec les autres dispositifs qui existent. Cette recommandation paraît banale, mais elle n’est pas toujours appliquée. Elle ne concerne d’ailleurs pas seulement les dispositifs déployés par les collectivités locales, bien que la question se pose également dans ce cas : un chapitre du rapport public annuel (RPA) de 2023 de la Cour était consacré aux interventions économiques mises en œuvre à la fois par l’État et par les collectivités territoriales. On y constatait que 2 100 dispositifs différents, pour un montant 8,5 milliards d’euros, avaient été mis en œuvre par les collectivités territoriales sans véritable coordination avec les autres aides ou indicateurs pour en mesurer l’impact. Il est vrai que dans certains cas, des dispositifs de dépenses ont été mis en œuvre sans trouver leur public. Ainsi, le fonds France relance État-régions créé en 2021, dont BPIFrance était l’opérateur, a finalement engagé très peu de dépenses parce que d’autres dispositifs existants avaient déjà satisfait la demande des bénéficiaires potentiels.

Troisièmement, la dépense publique doit prendre en compte l’impératif climatique et environnemental. C’est désormais une dimension incontournable de la qualité de la dépense, même s’il est difficile de verdir la dépense publique et de renoncer à toute dépense antagoniste au climat de façon brutale. Certes, l’État a fait l’effort de mettre en place le budget vert, qui désigne le rapport sur l’impact environnemental du budget de l’État. Important et novateur, cet effort doit cependant être poursuivi. En effet, seules 10 % des dépenses sont cotées favorables, défavorables ou mixtes, tandis que 90 % des dépenses sont considérées comme neutres ou ne sont pas cotées du tout.

Quatrièmement, il est très important d’associer les parties prenantes à la conception des politiques publiques. Des procédures le permettent, comme les consultations citoyennes. Toutefois, la responsabilisation et l’information des parties prenantes deviennent une modalité fondamentale de l’acceptabilité des mesures. Dans certains pays, ces consultations sont plus systématiques et mieux développées.

Cinquièmement, il faut donner toute leur portée aux études d’impact. Elles sont aujourd’hui obligatoires pour les projets de loi, mais leur qualité est souvent assez décevante et elles ne s’appliquent pas à certaines décisions qui ont pourtant un impact très important sur la dépense publique. Nous pensons par exemple aux amendements déposés par le Gouvernement et citons l’exemple du plan France relance qui a été introduit par amendement dans le projet de loi de finances (PLF) 2022 pour un montant de 34 milliards d’euros. Or les premiers retours montrent qu’une étude d’impact aurait été utile. Par ailleurs, dans certains pays, il existe une contre-expertise des études d’impact, réalisée par des organismes indépendants et qui peut s’avérer très utile pour en garantir la qualité. Enfin, les études préalables réalisées en préparation des PLF ne sont obligatoires que pour certaines dispositions, notamment les articles de nature fiscale ; or la justification au premier euro des dépenses est très inégale d’un programme à l’autre.

J’en viens à la mise en œuvre de ces dépenses, qui, tout d’abord, doit gagner en efficacité et en efficience. La demande de nos concitoyens d’une plus grande simplicité et rapidité est incontestable : elle doit être entendue. Les aides d’urgence déployées lors de la crise sanitaire ont montré que l’administration était à même d’instaurer des dispositifs d’aide de façon massive et rapide. Cependant, ce gain d’efficacité et de rapidité ne doit pas se faire au détriment des contrôles.

Il existe encore trop peu de guichets uniques inter-administrations : certains opérateurs spécialisés se sont développés ces dernières années, comme l’Agence de services et de paiement, mais ce dispositif se résume pour l’heure aux paiements et non à la gestion de l’ensemble des dispositifs.

Nous regrettons aussi les difficultés de mise en œuvre de la territorialisation de la dépense, qui consiste à cibler les territoires qui nécessitent une intervention publique afin d’éviter de disperser les aides sur ceux qui en auraient moins besoin. La politique du logement, par exemple, qui s’exerce principalement à travers des dépenses fiscales, n’est pas territorialisée.

De surcroît, la dépense doit être justement allouée. Le rapport cite l’exemple du Système analytique de répartition des moyens (Sympa) qui permet de répartir les moyens des universités sur le territoire ; or, en reconduisant les dotations préalables, ce dispositif ne prend pas en compte les besoins réels d’une université pour l’obtention de soutiens plus importants dans certaines circonstances. Nous donnons également l’exemple de la répartition des moyens notamment humains entre les tribunaux, qui n’intègre pas la question des délais de traitement des dossiers. L’évaluation et la modernisation des systèmes d’allocation des moyens devraient, de notre point de vue, être un passage obligé des revues de dépenses et des lois de programmation sectorielles.

En outre, nous nous sommes penchés sur le contrôle de l’attribution à bon droit et sur la lutte contre la fraude. En effet, les dispositifs de contrôle sont très inégaux selon les dispositifs – et dans certains cas quasiment inexistants. Je pense notamment à l’allocation aux adultes handicapés (AAH), qui est d’autant plus complexe à contrôler que le payeur n’est pas le décideur, ce qui entraîne une augmentation rapide des dépenses et une mauvaise maîtrise de ces dernières.

On relève également beaucoup d’erreurs et d’indus : dans le rapport annuel sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, la Cour estimait le niveau d’indus et d’erreurs à 5,3 milliards d’euros en 2020 sur les prestations sociales servies par les caisses d’allocations familiales (CAF) – soit 7 % des dépenses. La même année, un euro sur cinq de RSA et un euro sur six de prime d’activité ont été versés à tort.

Pour que ces taux diminuent, il est important que les administrations se partagent mieux leurs données. Le dispositif de ressources mutualisées, mis en place dans les CAF, a ainsi nettement amélioré la situation.

Si la lutte contre la fraude doit être renforcée, notons surtout qu’il est difficile de l’évaluer. L’écart fiscal, qui mesure le non-recouvrement de recettes fiscales, n’est pas calculé. Des progrès importants pourraient être faits dans ce domaine.

J’en arrive à l’évaluation de la dépense publique. Premièrement, il faut adapter la logique de performance à l’ère de la donnée. Constitutive de la Lolf, la logique de performance est un acquis très important, mais cette démarche semble patiner depuis plusieurs années ; en effet, certains indicateurs manquent de pertinence ou de stabilité, ce qui ne permet pas de faire des comparaisons dans le temps. En outre, les rapports annuels de performances restent peu utilisables pour mesurer la performance réelle de la dépense. Si l’administration s’appuyait mieux sur toutes les possibilités de l’intelligence artificielle et du croisement de données et qu’elle mettait ces données à disposition des acteurs extérieurs à l’administration par l’open data – nous pensons à la société civile, aux médias, aux chercheurs et aux différents groupements qui s’intéressent à l’action publique –, nous aurions certainement de meilleures possibilités d’évaluation de la qualité de la dépense.

Deuxièmement, il faut mieux intégrer les évaluations indépendantes, qui ne sont pas réalisées directement par les administrations concernées. Dans ce cadre, il nous paraît important d’associer le monde académique, qui, dans certains pays, est très impliqué dans la dimension évaluative de la dépense publique.

Troisièmement, il convient de renforcer les dispositifs publics d’amélioration continue et de systématiser les clauses de réversibilité et de sortie. Nous constatons peu de retours sur les évaluations, qui sont rarement suivies de décisions. De même, la Cour publie chaque année un rapport annuel sur le suivi des recommandations qu’elle adresse aux administrations : nous regrettons qu’il soit peu utilisé. C’est également le cas d’autres types d’inspections ou d’autorités administratives indépendantes.

Enfin, il est crucial de limiter dans le temps les dispositifs de dépenses fiscales, de façon à instaurer une forme de clause de revoyure, permettant de lancer une évaluation afin de vérifier si la dépense a atteint son objectif. Pour cela, j’en reviens à la fixation claire d’objectifs hiérarchisés lors de la conception de la mesure ; sans cela, on ne sait pas ce qu’on évalue.

Ce chapitre IV propose donc d’instaurer une grille d’analyse de la dépense avec des critères auditables, qui soient adaptables à chaque dépense, afin de réaliser un véritable travail sur la qualité. Nous y voyons un moyen de répondre à l’exigence de nos concitoyens en matière de transparence et d’amélioration du service qui leur est rendu.

M. le président Éric Coquerel. Je suis très satisfait de l’attention que la Cour des comptes porte à la dépense fiscale, notamment sur les niches fiscales : j’y vois là un terrain d’économies, dont on parle généralement moins que la baisse de la dépense publique. Pourtant, il me paraît à la fois plus juste et susceptible de dégager des ressources importantes.

Dans la fiche thématique « Piloter et évaluer les dépenses fiscales », vous soulignez l’efficacité limitée du crédit d’impôt recherche (CIR). Des scénarios de réforme avaient déjà été présentés par le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) en 2020 pour renforcer le ciblage de ce dispositif sur les petites et moyennes entreprises (PME). Selon vous, quel scénario faudrait-il privilégier ?

De même, s’agissant de la fiche « Garantir l’efficacité des aides de l’État aux entreprises pour faire face aux crises », un rapport de Rexecode récemment publié évoque la multiplicité des dispositifs et leur complexité, qui handicape les petites entreprises ; il recommande un travail sur la question des aides. Celles qui ne sont pas conditionnées, notamment, me paraissent problématiques. Pourriez-vous revenir sur cette question ?

Vous soulignez que la prévision du coût de la dépense fiscale applicable aux entreprises de transport maritime a augmenté de 3,8 milliards d’euros en 2023, en raison de la plus forte profitabilité de ces entreprises. Ne serait-il pas envisageable de limiter cet avantage fiscal très favorable à ces entreprises et dont le coût est fortement volatile ?

S’agissant des dépenses fiscales défavorables à l’environnement, la Cour insiste sur les difficultés de cotation de ces dispositifs. Pour autant, les différents tarifs réduits sur les gazoles représentent à eux seuls un coût de 2,5 milliards d’euros. Pensez-vous qu’il faudrait accélérer la suppression de ces dispositifs ?

Alors que les transferts financiers de l’État représentent désormais la moitié des recettes des collectivités territoriales, le refus d’indexer ces transferts sur l’inflation, en particulier la dotation globale de fonctionnement (DGF), ne contribue-t-il pas à dégrader les finances des collectivités locales ?

Pour apprécier la contribution de la dépense publique à la transition écologique, vous indiquez que l’État se fixe des objectifs nombreux et ambitieux dans les différents domaines de la transition écologique et les stratégies nationales qui sont associées ; mais vous relevez aussi que « les engagements internationaux ambitieux de la France en matière de transition écologique ne font pas l’objet d’une programmation pluriannuelle des crédits nécessaires à leur mise en œuvre ». Selon vous, comment fixer secteur par secteur les moyens que l’État entend engager au service de la transition écologique pour atteindre ses objectifs ?

Enfin, vous indiquez que la pratique des budgets verts commence doucement à s’étendre aux collectivités territoriales. Selon vous, pour quelle raison la budgétisation verte constitue-t-elle un outil indispensable pour les collectivités territoriales ? Quel opérateur ou service de l’État pourrait être mobilisé pour accompagner le développement de ces pratiques et en harmoniser l’exercice entre les différentes collectivités territoriales ?

J’ai noté avec intérêt vos propos sur la question des études d’impact, et ne peux que les approuver, notamment sur le plan France relance. S’agissant de la contre-expertise que vous suggérez, ne pourrait-elle pas émaner du Parlement ? Bien entendu, cela ne se ferait pas à moyens constants.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre travail s’inscrit dans une volonté partagée par l’exécutif et le Parlement de maîtriser nos dépenses publiques. On retrouve dans ces neuf notes thématiques l’ambition de limiter dans le temps certaines dépenses et niches fiscales et de les évaluer systématiquement – c’est également l’esprit du Printemps de l’évaluation que nous menons depuis quelques années ou celui des Assises des finances publiques. Tous ces éléments doivent nous permettre de converger sur le diagnostic et d’émettre des propositions.

Je salue l’intérêt que vous portez au verdissement de la dépense publique – autant de mesures qu’il faut étudier avec le plus grand intérêt.

Je vois par ailleurs une vraie cohérence entre ce travail et les recommandations que la Cour émet sur le désendettement public.

Enfin, le Gouvernement a annoncé dans le tiré à part publié ce week-end une baisse de la dépense publique en valeur – une première depuis longtemps – qui intègre pour un certain nombre de ministères un effort de réduction des dépenses courantes sur leur périmètre.

L’un des points forts de vos travaux est de fournir d’emblée dans chaque note les chiffres clés du sujet traité. Pensez-vous possible d’accompagner à l’avenir ces constats d’objectifs quantifiés et raisonnables d’économies correspondant à vos préconisations afin de préciser les enjeux et d’aider à la réflexion du décideur public – de hiérarchiser, en quelque sorte, les efforts que nous devons faire ?

Vous exprimez plusieurs recommandations, dans différentes notes, sur le renforcement du lien entre le préfet et les élus locaux et sur la territorialisation de certains dispositifs. Les règles nationales prônent une uniformité du soutien – par exemple pour l’agriculture, en cas d’intempéries – le préfet n’a pas de marge de manœuvre. Pourtant, en raison de leur connaissance du territoire, le préfet et les élus locaux, conjointement, pourraient se voir allouer à leur main une petite fraction de la somme totale pour territorialiser la dépense publique.

Les collectivités territoriales sont mentionnées dans plusieurs de vos notes. Vous proposez de renforcer leur rôle, mais aussi de maîtriser les transferts de l’État vers les collectivités territoriales. Comment envisagez-vous la contribution des collectivités territoriales aux politiques nationales, dans le respect de leur libre administration ?

Mme Carine Camby. Le CIR représente la principale dépense fiscale, avec 7 milliards d’euros par an. En 2022, un rapport du CPO a exposé un certain nombre de pistes. D’abord, les bénéficiaires du CIR sont bien connus, grâce à une base de données tenue par le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. En 2018, les PME représentaient 83 % des bénéficiaires, mais seulement 28 % des sommes déduites. Les évaluations menées sur le CIR mettaient en lumière un effet de levier pour les PME – qui investissaient plus dans la recherche qu’elles ne l’auraient fait sans cela –, mais pas pour les grandes entreprises, qui défiscalisent ce qu’elles auraient dans tous les cas investi dans la recherche. Cette conclusion avait conduit le CPO à préconiser d’abaisser le plafonnement des dépenses – on peut actuellement déduire jusqu’à 100 millions d’euros – de manière à profiter réellement aux PME, et à supprimer le taux de 5 % qui s’applique au delà du plafond de 100 millions d’euros. L’économie générée par une telle réforme avait été chiffrée à 2 milliards d’euros.

Nous n’avons pas travaillé sur la taxation du tonnage maritime. Ce sujet avait été évoqué dans le rapport sur le budget de l’État que le Premier président vous avait présenté. Cette dépense fiscale est assise sur le chiffre d’affaires des entreprises ; son coût avait donc beaucoup augmenté. Il faudrait une étude particulière pour répondre à votre question. Beaucoup de pays ont instauré des dispositifs similaires, et il faut prendre en compte la question du maintien de la compétitivité des entreprises françaises du secteur du transport maritime.

Nous n’avons pas travaillé sur toutes les aides aux entreprises, mais sur celles déployées dans le cadre du plan d’urgence face à la crise sanitaire liée au covid et du plan de résilience sociale et économique face à la crise énergétique. Nous en avons conclu que le foisonnement d’aide et leur automaticité avaient, dans certains cas, contribué à créer des effets d’aubaine ; ainsi, le soutien public a pu être supérieur aux pertes constatées par les entreprises. Il y a donc là encore un problème de ciblage. L’administration ne disposait souvent pas de données microéconomiques suffisamment fines pour établir ce ciblage. Par ailleurs, il semble difficile d’instaurer, dès la conception de la dépense, des dispositifs de contrôle, pourtant nécessaires pour récupérer a posteriori les sommes. Nous avons cependant relevé quelques récupérations et une amélioration progressive des contrôles de l’administration en 2021 puis en 2022.

Les chambres régionales des comptes ont observé que les collectivités locales commencent à s’emparer du budget vert, développé par la direction du budget avec une méthodologie assez robuste. Cet outil pourrait certainement faire l’objet d’échanges avec les collectivités locales désireuses d’accroître leur expertise dans ce domaine. Cependant, même au niveau de l’État, on constate des difficultés à avancer, malgré une volonté qui semble bien réelle. Nous n’avons pas étudié spécifiquement les budgets verts des collectivités locales de manière transversale.

S’agissant des objectifs d’économies que vous suggérez, monsieur le rapporteur général, les fiches thématiques visent à donner une vue d’ensemble synthétique. Certaines d’entre elles méritent des investigations supplémentaires. Par exemple, le Premier président a retenu l’idée de réaliser un rapport en 2024 sur l’ensemble des aides aux entreprises, et non seulement celles versées pendant la crise, afin d’émettre des recommandations pertinentes pour l’avenir.

M. Christian Charpy, président de la quatrième chambre. S’agissant des collectivités locales, une fiche thématique est consacrée aux transferts financiers de l’État. Ces derniers ont considérablement augmenté ces dernières années, étant donné que les réformes de la fiscalité locale ont été compensées par des attributions de parts de fiscalité – notamment la TVA. Il s’agit donc d’une dépense très importante pour l’État et d’une recette essentielle pour les collectivités locales.

Monsieur le président, la DGF n’est pas indexée sur l’inflation, mais cela n’a rien d’une nouveauté. Entre 2014 et 2017, la DGF a même diminué en montant absolu. Elle a légèrement augmenté en 2023 ; d’autres ressources des collectivités locales sont quant à elles indexées sur l’inflation et la consommation. Le fait que la TVA soit désormais une ressource significative des collectivités locales leur permet de bénéficier de l’inflation et de la progression de la consommation – et si cette dernière a diminué en 2009, ces cas sont très rares. En effet, la consommation reste en général dynamique, grâce notamment aux mesures de maintien de pouvoir d’achat lors des périodes de crise.

Par ailleurs, les bases fiscales qui restent affectées aux collectivités locales, comme les taxes foncières, sont indexées sur l’inflation, avec un an d’écart – ce qui donnera lieu à une très forte progression en 2023. En revanche, les recettes de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) des départements et des communes, qui ont très fortement augmenté en 2021 et en 2022, devraient être plus réduites en 2023.

À partir de là, on peut s’interroger sur le rôle que les transferts financiers jouent dans la maîtrise des dépenses publiques. Plus ils sont élevés, plus ils affectent les recettes de l’État. Un ralentissement des transferts financiers réduit les dépenses de l’État – ou accroît ses recettes ; mais il induit aussi un effet sur les dépenses des collectivités locales, étant donné qu’elles sont contraintes aux règles de l’équilibre budgétaire. Sous la précédente mandature, nous avons instauré des systèmes de régulation des dépenses des collectivités locales : c’étaient les contrats de Cahors – qui n’ont pas duré très longtemps, mais qui visaient à réduire la dépense. Dans la note thématique, nous rappelons que nous pouvons aussi agir sur la dépense des collectivités locales par une meilleure maîtrise des transferts. Cela ne signifie pas revenir aux mesures entreprises entre 2014 et 2017, mais par exemple mieux jouer sur la TVA, qui est une ressource plus dynamique que celles qu’elle a remplacées. L’excédent de compensation en 2022 était de l’ordre de 6 milliards d’euros. Ainsi, nous pourrions maîtriser les évolutions des dépenses, créer des fonds de résilience pour les collectivités locales en difficulté et mieux répartir les transferts entre les collectivités : en effet, les transferts financiers de l’État compensent souvent des dépenses transférées il y a plusieurs années et ne tiennent pas toujours compte des évolutions démographiques des collectivités.

Enfin, concernant le verdissement des transferts financiers, la note revient sur le mécanisme de financement des investissements que constitue le fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) – qui est très paramétrique. À budget constant, nous pourrions réduire la part des transferts automatiques du FCTVA et augmenter les dotations d’aide aux investissements réellement verts.

Mme Catherine Périn, présidente de section. Dans la note « Apprécier la contribution de la dépense publique à la transition écologique », nous avons identifié trois niveaux d’action. Le premier, macroéconomique, est la programmation pluriannuelle des crédits nécessaires à la transition écologique et à l’atteinte des objectifs consentis par la France. Il existe deux manières de procéder : d’une part, il s’agit d’adopter des lois de programmation sectorielles – comme celles votées dans le domaine de la recherche, de la justice ou de la défense. Le projet de loi de programmation énergie-climat est aussi en préparation. D’autre part, certains appellent de leurs vœux une loi de programmation des finances publiques en faveur de la transition écologique – un amendement a été déposé en ce sens durant la discussion du projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027. Une telle loi permettrait d’asseoir la crédibilité de l’engagement et sa compatibilité avec la trajectoire des finances publiques. En amont, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) serait saisi ; un débat budgétaire aurait lieu par la suite, et la Cour des comptes interviendrait en aval pour analyser l’exécution de ces différents textes.

Nous sommes partis du constat que beaucoup de politiques publiques avaient des objectifs volontaristes, mais que les crédits correspondants ne sont souvent pas programmés – ils peuvent même ne pas être évalués. C’est le cas de certaines infrastructures de transport ou de politiques énergétiques, de gestion des déchets ou de l’eau, qui nécessitent pourtant des enveloppes très importantes.

Le deuxième levier d’action est le budget vert. Dans la note thématique, nous émettons des propositions sur la manière d’élargir le périmètre de la budgétisation verte : comme la présidente Camby l’a rappelé, les dépenses brunes et vertes ne portent que sur 10 % du budget de l’État. Nous pourrions aussi affiner les méthodologies utilisées afin de coter des dépenses actuellement considérées comme mixtes. Enfin, nous pourrions rendre cet outil plus opérationnel, car il est encore assez descriptif. Ainsi, le budget vert serait utile pour prendre des décisions de programmation et d’élaboration de la loi de finances de l’année suivante, notamment pendant les revues de dépenses du printemps. En gestion infra-annuelle, un tel outil serait efficace pour choisir d’annuler, de geler ou de maintenir certains crédits. Enfin, il pourrait guider certains textes comme les lois de finances rectificatives en cours d’année. On sait que dans la période récente, beaucoup de dispositifs, notamment tous les boucliers énergétiques, étaient bruns. Par ailleurs, en exécution, il serait intéressant de réaliser des analyses d’écart. En effet, le budget vert correspond actuellement aux crédits présentés dans le PLF, et non à la loi de finances initiale. C’est d’ailleurs ce que la Cour s’emploie à faire depuis deux campagnes budgétaires : chaque note d’exécution budgétaire analyse l’exécution du budget vert propre au périmètre de la mission et une consolidation de ces analyses est présentée dans le rapport sur le budget de l’État.

Le troisième levier renvoie à la qualité de la dépense : il s’agit des études d’impact, des démarches évaluatives et de la bonne connaissance du rapport entre le coût et le bénéfice des dépenses. Or les études d’impact ne sont pas réalisées dans les règles de l’art : de nombreuses données pourtant essentielles en sont absentes. Elles ne comportent pas d’objectifs chiffrés ou d’indicateurs permettant une évaluation ultérieure, ni d’estimation du coût climatique des mesures ou des émissions de gaz à effet de serre, ni de mesures alternatives pour atteindre le même objectif.

De même, pour le rapport entre le coût et le bénéfice des dépenses, les évaluations seraient nécessaires – plus encore au vu de l’importance des mesures qu’il faudra financer. En matière de rénovation des bâtiments, on ignore par exemple le montant d’énergie économisé ou de gaz à effet de serre épargné, mais on connaît le montant de crédits budgétaires utilisés et le nombre de logements transformés. L’enveloppe consommée en dehors du plan France relance s’élevait à 7 milliards d’euros : cette approche pourrait donc être affinée.

De même, le volet environnemental de la politique agricole commune (PAC) n’est pas évalué ; en octobre 2021, l’Autorité environnementale avait invité le Gouvernement à analyser l’impact environnemental du plan stratégique nationale (PSN) en matière agricole.

Les données dont nous disposons sur la gestion de l’eau, notamment sur les prélèvements, sont également partielles : on ne peut pas s’entendre sur des politiques de maîtrise de cette ressource qui se raréfie sans disposer de données complètes.

En matière de déchets, on ne manque pas d’indicateurs – au contraire, il en existe une quarantaine, ce qui rend la consolidation des documents de suivi et la lisibilité des résultats très difficiles. Ainsi, nous peinons à avoir une vision du rapport entre le coût et le bénéfice qui permettrait d’amender une politique ou d’en changer.

Les dépenses fiscales brunes, notamment celles liées aux hydrocarbures, sont rattachées à la mission Écologie, développement et mobilité durables – qui semble assez mal nommée au regard des dispositifs qu’elle finance – de même que les dispositifs de boucliers énergétiques. Cette mission est ainsi déséquilibrée entre des dispositifs verts et bruns. Le choix de maintenir ces dépenses fiscales relève toutefois de la représentation nationale ; le CPO s’était prononcé sur plusieurs dispositifs dans le rapport « La fiscalité environnementale au défi de l’urgence climatique » publié en septembre 2019, au moment de la taxe carbone.

M. Dominique Da Silva (RE). Il faut saluer cet exercice de revue des dépenses initié par le Gouvernement pour 2024 : il témoigne de la volonté de notre majorité d’évaluer la qualité de la dépense publique.

Vous plaidez pour que les dépenses fiscales soient considérées comme des dépenses budgétaires ordinaires, avec le même niveau d’exigence sur leur suivi et leur efficience. Qu’on soit pour ou contre une dépense fiscale, les parlementaires et plus encore les commissaires aux finances que nous sommes reconnaissent l’intérêt de mesurer concrètement l’efficacité d’une dépense fiscale ou budgétaire.

Comment expliquer notre décalage constant avec ce principe de bon sens ? Faut-il en arriver à s’interdire de voter des dépenses fiscales qui ne sont pas clairement pilotées par des outils de mesure ? Prenons l’exemple du CIR, qui est devenu, après la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), la dépense fiscale la plus coûteuse – 7 milliards d’euros ; dans le même temps, le ministre délégué chargé de l’industrie nous explique que cette disposition attire aussi massivement les investisseurs étrangers.

M. Bryan Masson (RN). J’ai lu attentivement votre note thématique sur les transferts financiers entre l’État et les collectivités. Si nous sommes en partie d’accord sur les causes de la dépendance croissante des collectivités aux transferts financiers de l’État, je crains en revanche que nous ne le soyons pas sur les leviers que vous proposez pour y remédier.

Les montants de DGF, après avoir été largement réduits sous le gouvernement de François Hollande, sont stabilisés depuis 2018 ; mais cette stabilisation s’accompagne de deux éléments perturbateurs des finances locales. En premier lieu – vous l’avez rappelé –, les recettes des collectivités diminuent, en raison de la baisse, voire de la suppression de certains impôts locaux ; mais en second lieu – et cela n’a pas été cité dans votre rapport –, l’État, depuis des années maintenant, se décharge sur les collectivités.

Pourtant, vous écrivez dans la synthèse de la note que les collectivités sont « un poids » pour le budget de l’État qu’il faut alléger. Ce mot est terrible : ne trouvez-vous pas que les collectivités ont, au contraire, participé à l’allégement des dépenses et de la responsabilité de l’État ces dernières décennies – police municipale, école et cantines scolaires, état civil, environnement et développement durable, gestion en première ligne de la covid, mise à disposition des centres de vaccination ou des agents de la collectivité, pour faire face à ce que l’État ne pouvait pas faire ?

Dès lors, est-il vraiment sérieux de demander aux communes de prioriser les investissements écologiques pour recevoir un financement de l’État ? Que les communes réfléchissent à intégrer une finalité écologique aux projets d’aménagement du territoire, c’est une évidence – et elles n’ont pas attendu l’État pour le faire ; mais il ne faut pas que l’écologie devienne la condition sine qua non pour que l’État débloque des fonds au profit des collectivités et des fonds nécessaires à la vie quotidienne de nos concitoyens.

Enfin, je n’ai pas trouvé une seule ligne sur les dérives de la métropolisation des territoires, laquelle conduit à une monopolisation des financements de l’État par les grandes villes au détriment des petites et moyennes communes. En effet, de nombreux maires, notamment dans mon département des Alpes-Maritimes, m’ont fait part de leurs inquiétudes.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je souhaitais vous interpeller sur la nuance qui subsiste entre les dépenses fiscales et certains dispositifs fiscaux : ainsi, plusieurs taux réduits de TVA ne sont pas comptabilisés comme des dépenses fiscales tandis que d’autres le sont. Pourriez-vous revenir sur cette définition et nous indiquer comment la faire évoluer ? Il est surprenant que la déduction de l’assiette des revenus fonciers des dépenses de réparation et d’amélioration figure comme une dépense fiscale alors qu’il s’agit d’une charge qui s’impute sur une recette pour déterminer un résultat – cela n’a rien d’exceptionnel.

S’agissant des études d’impact, vous n’avez pas évoqué les enjeux de la simplification. Nous avons travaillé sur ce sujet avec M. Robin Reda dans le cadre d’une mission sur la rationalisation de notre administration. Nous avons évoqué ce besoin de simplification. J’en veux pour preuve le formulaire CERFA de demande du RSA, qui compte pas moins de 136 cases.

Concernant le graphique sur la composition de la dépense publique en 2021 par fonctions, en points de PIB, présenté dans le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, vous notez que les dépenses liées aux services généraux sont légèrement inférieures à celles de l’Allemagne et du reste de la zone euro. Ce graphique ne devrait-il pas être corrigé de la part des services généraux introduits dans chaque mission ?

M. Mohamed Laqhila (Dem). À la veille des discussions des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2024, ces notes thématiques nous donnent une vue à la fois d’ensemble et ciblée de l’état des finances publiques et de l’efficience de nos dépenses. Elles confirment la nécessité d’améliorer le suivi et le contrôle de toutes les dépenses afin d’instaurer des systèmes plus écologiques, efficaces et équitables.

Dans la note thématique « Piloter et évaluer les dépenses fiscales », la Cour rappelle que le coût total des dépenses fiscales est évalué à 94,2 milliards pour l’année 2022, et que les dépenses fiscales portant sur l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés représentent 45 % de leurs recettes. Bien que l’exercice soit difficile, pouvez-vous nous donner des éléments de comparaison sur le poids et la nature des dépenses fiscales en France par rapport à nos voisins européens ? Quelles bonnes pratiques relatives aux méthodes d’évaluation de l’efficacité des dépenses fiscales avez-vous pu observer dans d’autres pays ?

Par ailleurs, le crédit impôt recherche est le dispositif le plus coûteux pour l’État. En dépit d’une baisse de son coût entre 2022 et 2023, il s’élève toujours à un peu plus de 7 milliards d’euros. Si le secret fiscal fait obstacle au suivi précis du CIR, le poste de dépense qu’il représente justifie que l’on s’y intéresse. Vous recommandez un recyclage du CIR : qu’entendez-vous précisément par là ?

Enfin, le Conseil des prélèvements obligatoires recommande de réinstaurer un plafond des dépenses éligibles au CIR à hauteur de 20 millions d’euros, qui alignerait la France sur les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui ont un dispositif similaire. Que pensez-vous de cette recommandation ? Quelles économies ce dispositif permettrait-il de réaliser ?

M. Stéphane Delautrette (SOC). Ces neuf fiches thématiques sont des outils précieux en vue de l’examen des textes financiers à la rentrée.

Le constat a été énoncé : nos collectivités territoriales n’ont plus la main sur leurs recettes et dépendent de plus en plus fortement des transferts financiers opérés par l’État, alors même qu’elles ont un rôle majeur à jouer dans la transition écologique et l’aménagement du territoire – pour ne citer que ces exemples. Le président Coquerel a d’ailleurs abordé la question de la DGF. Outre la réduction de l’autonomie financière de nos collectivités, la situation est problématique en raison de la compensation instaurée par l’État, qui rend moins lisibles et plus volatiles les transferts : il existe 150 canaux différents, dont beaucoup dépendent de situations passées qui ne correspondent plus aux réalités économiques et démographiques locales. Un profond chantier doit s’ouvrir sur ce sujet.

Quelles sont les pistes envisagées par la Cour des comptes sur la réduction des inégalités et le financement de la transition écologique ?

Le budget vert a été évoqué à plusieurs reprises : ce dispositif innovant mérite d’être perfectionné lors de nos prochains débats parlementaires. Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoyait d’assimiler les dépenses mixtes à des dépenses favorables à l’environnement dans le calcul de la part du budget vert. Quelle est votre position sur ce point, qui nous semble aller à l’encontre des objectifs initiaux de ce dispositif ?

M. Christophe Plassard (HOR). À l’heure où le désendettement est une priorité du Gouvernement et de notre majorité, votre contribution à la revue des dépenses nous est particulièrement utile, que ce soit en matière de niches fiscales, d’aides aux entreprises, de financement de la transition écologique ou de transferts entre l’État et les collectivités territoriales. Ces dépenses importantes pour l’État doivent faire l’objet d’une revue régulière. Il nous faut en effet placer la qualité de la dépense publique au centre de notre action.

Premièrement, dans votre note « Garantir l’efficacité des aides de l’État aux entreprises pour faire face aux crises », vous recommandez de mettre en place un dispositif antifraude dès le déploiement des dispositifs d’aide. Nous devons être intraitables sur cette question, qui soulève celle de l’égalité face à la concurrence notamment ; mais comment s’assurer que le déploiement en urgence de ces dispositifs ne se fasse pas au détriment de la lisibilité et de la simplicité ?

Deuxièmement, pourriez-vous comparer plus globalement la fiscalité française et celle des autres pays européens ?

Troisièmement, quel est votre regard sur le budget vert et quelles pistes d’amélioration proposez-vous ?

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). De nombreux pays se sont engagés, depuis longtemps pour certains, dans une revue des dépenses publiques. L’exemple le plus cité est le Canada, qui en a fait un axe fort de ses politiques publiques, voire, parfois, de la privatisation de certaines d’entre elles sur la base des constats opérés.

Le sous-titre du travail que vous avez réalisé, « Orienter les revues des dépenses sur la qualité de la dépense publique », est de notre point de vue déjà tout un programme ! Je ne suis pas certaine que le terme de qualité recouvre le même sens pour l’ensemble des députés ni même pour vous-même.

La note thématique « La contribution de la dépense publique à la transition écologique » souligne les insuffisances du budget vert de l’État et formule des propositions pertinentes sur son amélioration. La question d’un dispositif unique ou d’un encadrement des dispositifs à l’échelle des collectivités territoriales se pose et reste à ce jour non tranchée.

Plusieurs initiatives ont été prises par des communes ou des intercommunalités pour systématiser une approche intégratrice des enjeux écologiques dans la construction des budgets locaux. Ainsi, le budget vert est expérimenté dans les villes de Paris, de Lille et de la métropole du Grand Lyon. À Mérignac, le budget pondéré vise à calculer la somme des dépenses favorables à l’environnement. L’Eurométropole de Strasbourg utilise une méthode permettant de cartographier le budget au regard des objectifs de développement durable. Enfin, les régions Bourgogne Franche-Comté, Grand Est et Nouvelle-Aquitaine ont instauré la méthodologie du budget vert, qui permet aux collectivités de mener une évaluation environnementale de leur budget.

Ce marquage environnemental regroupe plusieurs méthodologies plus ou moins opérationnelles et simples – parfois très complexes, notamment pour les adjoints aux finances de ces collectivités, comme l’illustre un rapport de l’Agence France locale d’avril 2022. Un meilleur accompagnement de cet effort louable de budgétisation locale verte permettrait de mieux apprécier la contribution de la dépense publique locale à la transition écologique. La Cour des comptes pourrait-elle réaliser un travail sur ce sujet ?

M. Tematai Le Gayic (GDR-NUPES). Les entreprises polynésiennes ont bénéficié du fonds de solidarité créé pendant la crise covid pour un montant d’environ 230 millions d’euros. Des difficultés se sont posées dans le déploiement de ces aides, dont beaucoup ont bénéficié sans justificatif et sans être suffisamment informés sur les critères d’éligibilité. Ces bénéficiaires se sont retrouvés du jour au lendemain endettés vis-à-vis du Trésor public et menacés d’une saisie de leurs biens. Dans votre note, vous soulignez le manque de contrôle a priori dans l’octroi de ces aides. La problématique évoquée pour la Polynésie s’est-elle également posée dans l’Hexagone ? Le cas échéant, un dispositif a-t-il été proposé pour permettre à ces entreprises d’échelonner le remboursement ? En Polynésie, le délai s’établissait à un an, quel que soit le type d’aide octroyée.

Est-il possible de proposer des critères d’éligibilité à une défiscalisation nationale en fonction de problématiques économiques, sociales et environnementales propres à chaque territoire ?

Enfin, pensez-vous qu’il est préférable de développer une fiscalité propre à chacun des territoires pour les rendre autonomes dans la création de richesses, plutôt que de compter sur des transferts de l’État vers les collectivités ?

M. Michel Castellani (LIOT). Vos recommandations se comprennent aisément au vu de la situation des finances publiques : il est difficile de s’opposer à l’efficacité des dépenses, à leur évaluation ou à un meilleur ciblage.

Cependant, nous savons combien il est difficile de passer des paroles à l’acte : les besoins sont considérables dans tous les domaines. Pourtant, l’effet de cliquet oblige à revenir en arrière.

Je tiens à souligner les profondes différences économiques et sociales entre les territoires. Dans les régions ultramarines et insulaires, le poids des contraintes géographiques dans la vie économique, sociale et culturelle ne peut pas être sous-estimé. Il est sans aucun doute contre-productif de chercher à répondre de manière univoque à ces situations.

Il conviendrait de considérer les spécificités de ces territoires et de défendre leur développement par des dispositifs fiscaux adaptés et efficaces. Vous mentionnez la nécessité de mieux cibler les dispositifs. Le dispositif de crédit d’impôt pour les investissements réalisés et exploités par les PME en Corse est très utile, mais il mérite d’être pérennisé et mieux ciblé pour éviter les effets pervers observés.

Mme Carine Camby. S’agissant des dépenses fiscales, il convient d’abord de prendre en compte la profusion des dispositifs – il en existe 465, dont seule une petite partie représente des sommes importantes et une dizaine des sommes très faibles. Un travail pourrait être mené pour savoir si tous doivent être conservés. Le décalage entre la volonté initiale et l’efficience constatée s’explique par l’absence d’évaluation : à chaque fois que les lois de programmation des finances publiques ont prévu d’évaluer ou de procéder à des revues des dépenses fiscales, ce travail n’a pas été mis en œuvre. Il existe donc très peu d’évaluations des dépenses fiscales. Nous proposons de relancer un travail systématique d’évaluation pour déterminer quels dispositifs atteignent leurs objectifs et lesquels devraient être réaménagés ou supprimés.

Par ailleurs, la note souligne les difficultés liées aux taux réduits. La définition est effectivement mouvante : les dispositifs très ciblés sont intitulés « dépenses fiscales », tandis que les plus généraux ne sont pas identifiés de cette manière. Une étude du CPO datant d’il y a quelques années montrait que le montant des allègements sur la TVA serait doublé si on y intégrait tout ce qui constitue une dépense fiscale sans être dénommé de la sorte. Il conviendrait d’abord de fixer une définition solide et rigoureuse avant de travailler sur les évaluations.

Il n’existe pas beaucoup de comparaisons avec les pays européens. La Commission européenne avait essayé de mener une telle étude en 2014, mais elle s’était très rapidement heurtée à des difficultés méthodologiques et n’avait pas véritablement conclu ses travaux. Cependant, la France présente certainement des niveaux élevés dans ce domaine, et le dispositif est assez facilement utilisé pour répondre à des besoins ponctuels.

Des dispositifs spécifiques à certains territoires, notamment l’outre-mer, existent. Par ailleurs, des situations peuvent être ponctuellement gérées par le Trésor public. La situation diffère en métropole, où il n’y a pas de territorialisation des dépenses fiscales.

S’agissant des aides aux entreprises, il est nécessaire de contrôler les dispositifs dès le départ. Cela ne complexifie pas nécessairement l’accès du citoyen ou de l’entreprise au dispositif, dès lors qu’il a été bien pensé dès le départ. De nombreux exemples, notamment sur les aides en faveur des entreprises instaurées pour faire face à la crise énergétique, montrent que la mise en place de contrôles initiaux n’a pas entraîné de délais supplémentaires.

M. Christian Charpy. Concernant les transferts financiers, plusieurs de vos questions ne sont pas traitées dans la note « Les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales ». Toutefois, les rapports publics de la Cour, en particulier le dernier rapport public annuel, qui comporte deux chapitres sur la décentralisation, reviennent assez largement sur ces sujets.

Cette note souligne notamment qu’au cours des années passées, en raison de la suppression d’impôts locaux – taxe d’habitation, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) – ou de leur réduction – cotisation foncière des entreprises (CFE) –, l’État a dû augmenter ses transferts et a parallèlement réduit la marge de manœuvre des élus locaux dans la gestion de leur fiscalité. Le bloc communal conserve la maîtrise du foncier ainsi que des recettes complémentaires. En revanche, les départements et les régions en sont dépourvus ; mais c’est la contrepartie logique de décisions votées à l’Assemblée nationale et au Sénat.

S’agissant de la métropolisation des impôts, on peut voir dans les pactes fiscaux une volonté de maintenir au niveau de la métropole ou de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) un certain nombre de ressources et de ne pas les transférer. Ce sont des choix locaux, sur lesquels la Cour n’a pas à se prononcer. En revanche, certaines dotations sont fléchées sur les petites communes, comme la dotation de solidarité rurale ou certaines dotations d’équipement des territoires ruraux.

Mme Catherine Périn. Faut-il intégrer les dépenses mixtes aux dépenses vertes ? Notre proposition n’est pas de trancher, mais d’affiner la cotation. Le budget vert est un outil en construction. Nous travaillons dans ce cadre avec la direction du budget, dont la directrice s’est engagée à affiner la maille de cotation des dépenses du budget de l’État pour aller jusqu’à la brique budgétaire. Par ailleurs, pour élargir le périmètre des dépenses cotées, on peut recourir à d’autres méthodologies tout aussi robustes qui, comme celles actuellement utilisées, seraient également transparentes et mises en ligne sur le site de performance publique de la direction du budget.

La directrice du budget s’est également engagée à utiliser le budget vert et les dépenses cotées vertes et brunes dans les revues de dépenses. La programmation et la construction du projet de loi de finances pour 2024 s’appuieront également sur cet outil.

Pour l’améliorer, nous proposons notamment d’analyser l’exécution de toutes les dépenses cotées et de faire apparaître cette évaluation dans chacun des rapports annuels de performances par mission. Cette proposition a reçu un accueil assez favorable de la part de la direction du budget.

Les initiatives des collectivités locales dans ce domaine sont nombreuses. En lien avec les associations d’élus et le Commissariat général au développement durable, une initiative de la direction générale des collectivités locales est en préparation, avec le soutien technique de la direction du budget, qui se montre volontariste en la matière. Elle vise à instaurer une expérimentation avec les collectivités territoriales volontaires à la rentrée. L’objectif est d’utiliser la taxonomie européenne pour harmoniser les initiatives et les rendre comparables et pérennes, avec l’ambition de généraliser cette expérimentation d’ici 2025.

M. Robin Reda (RE). Dans le cadre de la note « Piloter et évaluer les dépenses fiscales », vous citez le tarif réduit pour les gazoles utilisés comme carburant par les véhicules routiers de transport de marchandises d’au moins 7,5 tonnes, qui coûte 1,2 milliard d’euros par an. Il conviendrait de s’interroger sur la nécessité de redéployer ce dispositif. En effet, il s’agit d’une niche qui, si elle est brune, concerne tout de même un secteur très concurrentiel de notre économie ; dans le même temps, outre les économies générées en dépense par ce dispositif qui pourrait s’éteindre, nous aurons besoin de réorienter vers nos entreprises françaises des investissements verts pour les véhicules.

J’ai été interpellé sur la note qui évoque la TVA à taux réduit sur les travaux d’amélioration des logements de plus de deux ans. Le dispositif a été créé en 1999 et les dernières évaluations datent d’il y a vingt ans. Or, ce sont ces chiffres que nous utilisons pour éclairer nos décisions. Pourtant, cette niche fiscale coûte 4,3 milliards d’euros. Nous avons matière à nous interroger lors du prochain projet de loi de finances.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Vous citez trois objectifs pour maîtriser la qualité de la dépense publique : la clarté, la hiérarchisation et le chiffrage des données. Agir par des coups de rabot sur toutes les lignes budgétaires ne sera pas la bonne politique : nous avons besoin d’une vision de long terme, qui est celle que vous prônez – une évaluation de toutes les politiques publiques. En revanche, je m’étonne de vous entendre dire qu’il ne faut pas seulement regarder la dépense à l’aune de son efficacité : une dépense doit d’abord être efficace pour emporter l’adhésion.

Parmi les quatre leviers proposés pour juguler les dépenses, vous suggérez de limiter la durée de toute nouvelle dépense fiscale à quatre ans. Cette proposition vaudra-t-elle pour les dépenses vertes ?

M. Fabien Di Filippo (LR). Vous mentionnez le fait que l’enjeu n’est pas l’utilité ou l’inutilité globale des dépenses publiques, mais surtout la pertinence de leur ciblage. Vous prenez l’exemple de la rénovation énergétique, du soutien à l’apprentissage, du chèque inflation et du chèque énergie.

On a déjà pu s’en rendre compte : les dépenses sociales en France, et toutes les aides connexes – que je qualifie parfois d’aides sociales déguisées – sont inflationnistes. Selon quels critères faudrait-il davantage les cibler ? Pensez-vous à des critères des revenus, qui risquent d’accroître la fracture entre certains ménages qui travaillent et paient un certain nombre de taxes et d’impôts, et ceux qui ont tendance à en bénéficier ? C’est surtout la réduction de la dépense sociale qui devrait être visée plutôt que sa concentration croissante sur ceux qui sont sans activité.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Vous évoquez dans la note « Les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales » les doublons de dispositifs. Ce point était déjà mentionné dans le rapport « La décentralisation 40 ans après » de la Cour des comptes. Pourriez-vous citer d’autres exemples de doublons qui vous paraissent aberrants et qui seraient à l’origine d’une mauvaise gestion ?

J’ai été stupéfait d’apprendre qu’il n’y avait quasiment aucun contrôle sur l’AAH, alors que ce dispositif représente un montant de 12 milliards d’euros – soit quasiment autant que le RSA. Comment cela s’explique-t-il ?

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Je partage vos propos sur le CIR. Cependant, il faut aussi mentionner sa progression : en 2008, son montant se chiffrait en millions – aujourd’hui, en milliards ! En douze ans, le montant du CIR a été multiplié par huit. Et jusqu’où ira-t-on, puisqu’il n’y a pas de plafond ? Certes, le crédit accordé diffère au delà du seuil de 100 millions d’euros ; mais une entreprise peut réaliser des centaines de millions d’euros et bénéficier de ce crédit. Vous avez cité le CPO, mais vous auriez pu mentionner France Stratégie, le Conseil d’analyse économique (CAE) ou vos propres rapports datés d’il y a quelques années : tous font le même constat – mais on ne tient pas compte de leurs préconisations.

Par ailleurs, quel est le montant de la niche fiscale relative à l’exonération d’impôts et de prélèvements sociaux sur la plus-value réalisée à l’occasion d’une vente de résidence principale ? Je n’ai trouvé cette information nulle part.

M. Charles de Courson (LIOT). La fiche thématique « Assurer la cohérence de la politique du logement face à ses nouveaux défis » a particulièrement retenu mon attention. En effet, je présenterai demain en commission avec mon collègue Daniel Labaronne un long rapport qui tente de répondre à la question de l’évaluation des dépenses en matière de logement. Certaines de vos propositions rejoignent celles que nous faisons, notamment la territorialisation. Nous ne pouvons continuer à proposer une politique du logement centralisée ; il faut réformer les zonages, puisqu’il en existe quatre, qui ne sont pas cohérents les uns avec les autres. Comment territorialiser les exonérations fiscales en matière de politique de logement ?

Depuis trente ans que je siège dans cette commission, nous avons complètement échoué à réduire les dépenses fiscales. D’abord, la dépense fiscale est dynamique : si on ne fait rien, elle augmente spontanément. Finalement, la politique de la hache est peut-être la moins mauvaise du point de vue de l’efficacité : il s’agirait par exemple de réduire toutes les niches de 10 % – alors que si vous vous attaquez à chacune des 465 niches, il y aura toujours quelqu’un pour le contester.

Mme Carine Camby. Il ne faut pas se contenter de vérifier l’efficacité et l’efficience, parce que d’autres critères sont intéressants pour analyser la qualité de la dépense. Je les ai rappelés : le fait que la mesure soit partagée, comprise, cohérente avec les dispositifs qui existent déjà, ou encore compatible avec nos objectifs climatiques.

Nous proposons en effet de limiter la durée des dépenses fiscales à quatre ans afin de pouvoir les évaluer pour les réajuster si nécessaire. L’ambition de la Cour est d’éviter la politique du rabot systématique et de travailler sur une approche de la qualité, de façon à éviter de dépenser inutilement, avec des effets d’aubaine ou des couvertures de risques supérieures aux pertes constatées, ou même de favoriser, dans certains cas, des comportements frauduleux. Nous voulons donc améliorer le ciblage pour aller vers ceux qui sont visés par les politiques publiques mises en place.

S’agissant des doublons de dispositifs, la Cour a produit plusieurs rapports sur la formation professionnelle, l’alternance, l’emploi, qui montrent que des interventions de l’État et des collectivités sont parfois redondantes ou peu coordonnées.

Le contrôle de l’AAH est complexe, étant donné qu’un certificat médical est demandé à la personne qui émet la demande d’aide sans qu’une contre-visite médicale soit nécessaire. Les CAF contrôlent les ressources des personnes, mais pas l’éligibilité à ce dispositif.

À ma connaissance, la plus-value sur la vente d’une résidence principale n’a pas fait l’objet d’une évaluation.

Enfin, nous n’avions pas prévu d’aborder la question des dépenses en faveur du logement lors de la présente audition.

M. Christian Charpy. L’Inspection générale des finances (IGF) a publié un rapport en 2012 sur l’ensemble des dépenses fiscales, qui mentionnait probablement la plus-value sur la vente d’une résidence principale.

M. le président Éric Coquerel. Je vous remercie.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mardi 18 juillet 2023 à 18 heures 15

 

Présents. - Mme Christine Arrighi, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Fabien Di Filippo, M. Luc Geismar, M. Victor Habert-Dassault, Mme Nadia Hai, M. François Jolivet, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Tematai Le Gayic, M. Pascal Lecamp, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, M. Bryan Masson, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Charles Sitzenstuhl

 

Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, Mme Émilie Bonnivard, Mme Stella Dupont, M. Joël Giraud

 

Assistaient également à la réunion. - M. Pierre Cordier, M. Stéphane Delautrette