Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

  Audition de M. Thomas Cazenave, ministre délégué aux comptes publics sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 (sous réserve de son dépôt) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)               2

  Présences en réunion...........................17

 


Mardi
31 octobre 2023

Séance de 13 heures 30

Compte rendu n° 029

session ordinaire de 2023-2024

 

 

Présidence de

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission entend M. Thomas Cazenave, ministre délégué aux comptes publics sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 (n° XXX) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

M. le président Éric Coquerel. Nous recevons M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, qui vient nous présenter le projet de loi de finances de fin de gestion pour l’année 2023, adopté en Conseil des ministres ce matin.

C’est le tout premier des collectifs de fin de gestion, créés par la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques. La principale différence avec un collectif budgétaire ordinaire tient au fait qu’il est impossible que le texte comprenne des mesures fiscales, à l’exception des modifications d’affectation de recettes fiscales, ou des mesures relatives aux prélèvements sur recettes, que ce soit lors de son dépôt ou plus tard. Il est également impossible d’y faire figurer des dispositions relatives à l’information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques, sur la comptabilité publique ou encore sur l’approbation de conventions financières. Vous devrez veiller à ces causes supplémentaires d’irrecevabilité lors du dépôt de vos amendements.

Le texte est inscrit à l’ordre du jour de notre commission dès le samedi 4 novembre, à neuf heures trente, avec un délai de dépôt des amendements fixé au jeudi 2 novembre à dixsept heures. Il est également inscrit à l’ordre du jour de la séance publique du mercredi 8 novembre à quinze heures, avec un délai de dépôt des amendements fixé au samedi 4 novembre à dix-sept heures.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué aux comptes publics. Ce projet de loi de fin de gestion (PLFG) pour l’année 2023 est une nouveauté issue de la réforme de la loi organique de 2021 due à Laurent Saint-Martin et Éric Woerth.

La loi de fin de gestion permet au Gouvernement de demander au Parlement une actualisation de la loi de finances initiale, sans pour autant présenter un budget rectificatif. Le texte ne comprend aucune disposition fiscale : nous ne modifions pas l’imposition des Français ou des entreprises. L’objectif est d’ajuster, sous le contrôle du Parlement, le montant des crédits votés initialement dans le projet de loi de finances pour 2023 (PLF), afin de tenir compte des dernières prévisions de dépenses. Le projet de loi qui vous est présenté ne modifie donc pas l’équilibre global du projet de loi initial. Il permet seulement la bonne exécution du budget en fonction des événements survenus au cours de l’année. C’est une avancée.

L’article liminaire de ce PLFG montre le sérieux de la prévision de croissance inscrite dans le PLF initial pour 2023 et la bonne santé de notre économie. Nous confirmons ainsi le taux de croissance de 1 % que beaucoup avaient jugé optimiste. C’est la preuve que notre économie a tenu et que nos entreprises ont continué à se développer, grâce au soutien de l’État qui, en même temps, continuait à protéger les Français contre l’inflation et contre l’augmentation des prix de l’énergie. Nous confirmons aussi la réduction du déficit public à 4,9 %, soit un niveau inférieur à celui prévu dans la loi de finances initiale, qui était de 5 %.

La maîtrise de notre déficit est une priorité dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, laquelle nous conduit à ouvrir 3,8 milliards d’euros de crédits supplémentaires pour faire face à la hausse de la charge de la dette.

L’inflation baissera de 0,3 point par rapport à 2022 et s’établira à 4,9 % en 2023.

Au-delà des dispositifs de protection instaurés pour faire face à la crise, la bonne santé de notre économie est due aux réformes structurelles adoptées ces dernières années.

Si nos prévisions économiques ont été justes, certains événements extérieurs ont affecté l’exécution du budget pour 2023. Notre pays a fait face à des crises nouvelles ; d’autres se sont aggravées. Il est de notre responsabilité d’adapter notre budget pour permettre à la France de poursuivre son action et de respecter ses engagements.

Plus de 600 jours après le début de la guerre, la France continue de soutenir l’Ukraine, sur le plan tant militaire qu’humanitaire. Pour poursuivre ce soutien qui nous rassemble largement et renforcer les capacités de nos armées, le Gouvernement demande au Parlement l’ouverture de crédits à hauteur de 2,4 milliards d’euros, dont 2,1 milliards seront consacrés au budget de l’armée. Ces crédits financeront à la fois notre soutien direct à l’Ukraine et les conséquences de ce conflit. La mission Défense bénéficiera de 1,5 milliard d’euros pour anticiper la loi de programmation militaire (LPM) pour les années 2024 à 2030, conformément à l’engagement du Gouvernement. Ces crédits permettront d’anticiper des commandes et de réduire les reports de charges. Les crédits supplémentaires permettront aussi de compenser le surcoût lié aux activités opérationnelles des forces armées et aux dépenses d’équipement. Cette assemblée a récemment voté, à une large majorité, la loi de programmation militaire, essentielle pour bâtir une France souveraine disposant d’une autonomie stratégique. C’est ce même objectif qui guide l’action du Gouvernement.

Nous augmentons aussi le budget du ministère de l’intérieur, à hauteur de 300 millions d’euros, afin de permettre l’accueil des réfugiés ukrainiens. Il est de notre devoir d’accueillir dignement les demandeurs d’asile. La France respecte ainsi ses engagements visàvis de l’Ukraine et de ses partenaires européens.

L’agriculture a également traversé de nombreuses crises, en 2022 et 2023, comme l’épidémie de grippe aviaire qui a frappé des exploitations agricoles jusqu’au premier trimestre. Si nous pouvons nous réjouir que la situation ait été maîtrisée, les conséquences pour les exploitations touchées ont rendu nécessaire un soutien inédit du Gouvernement. C’est pourquoi le projet de loi qui vous est présenté prévoit une augmentation des crédits du ministère de l’agriculture à hauteur de 800 millions d’euros afin de dédommager les exploitants touchés. Préserver notre modèle agricole est un enjeu de souveraineté essentiel dans le contexte d’instabilité que nous connaissons. C’est une nouvelle preuve de l’engagement du Gouvernement, mais aussi de votre assemblée, pour le monde rural si important pour notre pays.

Le Gouvernement continue de protéger et de soutenir les Français, en particulier ceux qui en ont le plus besoin. Cet objectif vous a conduits à voter l’article 10 de la loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat qui prévoyait la déconjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH). Nous ouvrons donc près de 500 millions d’euros dans le budget du ministère des solidarités et des familles pour tenir compte de la hausse du nombre de personnes bénéficiant de la prime d’activité et de l’AAH. Cette dépense apparaît essentielle dans notre combat pour une société plus inclusive et pour une plus grande autonomie des personnes en situation de handicap.

Enfin, nous soutenons l’emploi dans les territoires d’outre-mer en consacrant 400 millions d’euros supplémentaires aux exonérations de cotisations sociales patronales spécifiques à ces territoires. Si le chômage y a baissé plus vite qu’en métropole depuis 2017, son taux reste plus important et nous devons intensifier nos efforts en faveur du travail, qui permettent de défendre le pouvoir d’achat et de lutter contre la vie chère.

Nous avons tenu à ce que chaque dépense supplémentaire soit compensée par une annulation de crédits : nous modifions l’exécution sans toucher à l’équilibre global issu de la loi de finances initiale. Cette actualisation du PLF pour 2023 est permise par l’effort de maîtrise qui a guidé l’action du Gouvernement dans l’utilisation des crédits votés dans la loi initiale. Par décret du 18 septembre 2023, le Gouvernement a déjà annulé des crédits à hauteur de 5 milliards d’euros. Ce PLFG propose l’annulation de 5,2 milliards d’euros supplémentaires. Nous poursuivons ainsi nos efforts pour une exécution sérieuse du budget.

Notre économie a tenu bon face aux crises. Cette bonne santé économique permet à nos entreprises, dans l’immense majorité des cas, de rembourser les prêts garantis par l’État (PGE) – ces prêts qui ont permis de sauver nos entreprises. Au total, 500 millions d’euros de crédits seront ainsi économisés.

Le dynamisme de notre économie a également permis de limiter nos dépenses en matière de chômage. En effet, les entreprises continuent d’embaucher et les dépenses de l’État diminuent, notamment en ce qui concerne l’activité partielle ou l’allocation de solidarité spécifique (ASS) dévolue aux chômeurs de longue durée. Au total, le ministère du travail procédera à une annulation de crédits à hauteur de 900 millions d’euros.

Par ailleurs, la maîtrise de la hausse des coûts de l’énergie ayant constitué la priorité de notre action depuis un an, 1,1 milliard d’euros sera économisé dans le programme Énergie, climat et après-mines par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

Enfin, s’agissant de la masse salariale des ministères, le principe de la gestion prudente a prévalu puisque nous avons pu appliquer les mesures de revalorisation salariale annoncées en juin 2023 sans augmenter le titre 2 des ministères.

Le texte qui vous est présenté n’implique pas l’approbation de l’ensemble de la politique budgétaire du Gouvernement. Il s’agit d’ajuster les crédits par des ouvertures et des annulations pour tirer les conséquences des événements de l’année en cours. Soutenir l’Ukraine, préserver notre agriculture, poursuivre notre politique d’inclusion, favoriser l’emploi dans les territoires ultramarins : ces objectifs bien définis pourront, je l’espère, réunir une majorité de parlementaires au cours de nos débats.

M. le président Éric Coquerel. N’ayant reçu ce texte que ce matin, je n’ai pas eu suffisamment de temps pour l’analyser et déterminer mon avis. Mais j’ai déjà quelques questions.

S’agissant des crédits, la somme de 100 millions d’euros que vous dégagez pour la construction des équipements liés aux événements de l’été dernier semble faible. Pouvez-vous nous apporter des éclaircissements ?

Par ailleurs, une mesure concerne la compensation d’exonérations dans le champ de l’apprentissage et des services à la personne. Vous savez ce que je pense des politiques d’exonération, mais pouvez-vous détailler la part de ces compensations ?

Enfin, la charge de la dette s’élève à 3,8 milliards d’euros. L’an dernier, 42 % de la charge de la dette étaient liés aux titres à taux variables. Qu’en est-il cette année ?

J’en viens aux annulations. J’entends qu’elles concernent des crédits qui n’ont pas été consommés, mais certains postes m’étonnent, surtout au regard de nos débats en cours sur le prochain PLF. Je pense ainsi à l’annulation de 384 millions d’euros pour l’enseignement supérieur et la recherche. Pour l’an prochain, nous avons adopté en commission une mission Recherche et enseignement supérieur avec le vote favorable des oppositions et l’abstention des groupes de la majorité, estimant qu’il fallait recréditer largement ce poste. Or l’annulation prévue est significative. Pouvez-vous entrer davantage dans le détail ?

J’ai la même demande concernant la mission Cohésion des territoires, et en particulier ce qui a trait au logement. Les crédits de cette mission pour 2024 ont été adoptés en commission grâce au vote des oppositions, car nous estimions que les besoins n’étaient pas suffisamment pris en compte. Je suis étonné qu’il y ait autant de crédits non consommés.

S’agissant de la transition écologique, les annulations de crédits représentent 1,1 milliard d’euros. Là encore, c’est étonnant, compte tenu de l’urgence de la situation.

Enfin, les annulations pour le budget du ministère de l’économie et des finances s’élèvent à 1,498 milliard d’euros. Même s’il y a une ouverture de crédits de paiement (CP), le solde est négatif de 1,312 milliard d’euros. Pouvez-vous là encore nous apporter des éclaircissements ?

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. S’agissant du PLF, nous n’avons pas voté en commission des crédits supplémentaires, mais nous avons réalloué des crédits d’un programme à un autre, dans un jeu à somme nulle.

M. le président Éric Coquerel. Nous ne pouvions pas faire autrement…

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le PLFG est conforme aux prévisions. Il confirme en 2023 une croissance à 1 % et une inflation à 4,9 % – comme nous nous y attendions, le chiffre publié hier est à la baisse et conforte cette prévision. Le déficit est de 4,9 % et la dette publique de 109,7 % du PIB.

Les engagements de cette majorité sont tenus. L’importance des recettes fiscales, supérieures de 2,4 milliards d’euros à l’estimation initiale, est liée à la bonne tenue de notre économie.

S’agissant des crédits, les ouvertures équilibrent peu ou prou les annulations. Globalement, nous finançons les besoins constatés dans les champs régaliens, en particulier notre soutien à l’Ukraine et à nos agriculteurs, par des économies dans les dispositifs de soutien en faveur de nos entreprises face à l’inflation.

La charge de la dette représente 3,8 milliards d’euros supplémentaires. C’est un rappel douloureux pour tous ceux qui prétendent qu’il n’est pas grave de s’endetter.

Ma première question concerne les crédits en faveur de l’Ukraine. Vous ajoutez 2,2 milliards d’euros pour la mission Défense et 300 millions pour la mission Immigration, asile et intégration. Pouvez-vous replacer cet effort, dont je me réjouis, dans l’ensemble des moyens déployés par notre pays en faveur de l’Ukraine ? Quels mécanismes de la mission Défense sont utilisés pour aider nos alliés ? S’agit-il de reconstituer des stocks d’armes que nous mettons à sa disposition ou que nous lui vendons ?

Vous enregistrez une baisse de 1,1 milliard d’euros des prélèvements sur les recettes de l’État en faveur de l’Union européenne ainsi qu’une diminution de 2,1 milliards d’euros des versements en faveur de la France au titre du plan NextGenerationEU. Sur ce dernier point, confirmez-vous qu’il s’agit d’un étalement des versements sans modification du montant dont la France doit bénéficier in fine ?

Vous prévoyez également l’application du document de cadrage relatif à la négociation de la convention d’assurance chômage transmis aux partenaires sociaux qui gèrent l’Unedic à la fin du mois d’août 2023. Confirmez-vous qu’une part minoritaire des excédents de l’Unedic – 2 milliards d’euros – soutiendra les politiques en faveur du plein emploi ? Pouvez-vous dresser un tableau pluriannuel de cette participation et préciser où en sont les négociations relatives à l’assurance chômage qui doivent valider cette participation ?

Par ailleurs, 12,5 milliards d’euros de crédits supplémentaires sont ouverts au titre des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État. Cette opération est neutre du point de vue des déficits, mais je voudrais comprendre pourquoi cette ouverture de crédits est si élevée.

Les reports ont été très élevés en 2020 et 2021, durant la crise sanitaire. Ils avaient diminué en 2022 vers 2023. Qu’en sera-t-il en 2023 vers 2024 ?

Enfin, 1,5 milliard d’euros sont ouverts en autorisations d’engagement (AE) pour l’apprentissage. C’est beaucoup ; c’est la preuve du succès de ce programme et de cette ambition. N’est-il pas temps de réfléchir à des critères qui permettraient d’optimiser cette dépense, et ce dès 2024 ?

M. le président Éric Coquerel. Une dernière question : la logique qui consiste à financer la politique de l’emploi par une ponction sur les excédents de l’Unedic me semble étonnante. Pouvez-vous développer ce point ?

M. Thomas Cazenave, ministre. S’agissant des sommes consacrées à la reconstruction des bâtiments publics dégradés ou détruits pendant les émeutes, France assureurs – la Fédération française de l’assurance – estime le coût des dégâts à 730 millions d’euros. D’après les estimations établies avec les préfectures, les dégâts causés aux bâtiments possédés par des collectivités territoriales s’élèvent à 223 millions d’euros. Les montants pris en charge par les assureurs sont estimés à 110 millions d’euros, soit la moitié environ. Le besoin en crédits s’établit donc à 100 millions d’euros : c’est la somme que nous dégagerons pour accompagner les collectivités territoriales.

Concernant la mission Outre-mer et les exonérations de charges, le besoin de crédits supplémentaires est lié au mécanisme de calcul. En effet, le dynamisme des salaires est important ; or, ces exonérations sont calculées en fonction de seuils exprimés en pourcentage du Smic, qui lui-même progresse fortement. En somme, la dynamique des salaires plus élevée que prévu requiert des compensations d’exonérations plus fortes.

Vous évoquez les 3,8 milliards d’euros supplémentaires consacrés à la charge des intérêts de la dette. C’est pour cette raison que, quand Bruno Le Maire et moi-même avons présenté le budget, nous avons insisté sur la nécessité du redressement de nos finances publiques. Ces 3,8 milliards d’euros sont l’effet, à parts égales, de l’augmentation des taux d’intérêt et de l’inflation.

L’annulation de crédits permet de tenir l’équilibre des dépenses entre ces efforts supplémentaires et des crédits non utilisés et mis en réserve. S’agissant de l’enseignement supérieur et de la recherche, les annulations sont moins élevées que les crédits mis en réserve. Pour ce qui est du périmètre du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, le montant d’annulation de crédits de 1,5 milliard d’euros s’explique pour 500 millions d’euros par la moindre sinistralité des PGE, mais aussi par une sousexécution du dispositif de compensation carbone et par les moindres dépenses de guichet à destination des énergies électro-intensives, liées à la baisse des prix de l’énergie. Nous annulons également 1,1 milliard d’euros de crédits pour le ministère de la transition énergétique, du fait de la sous-exécution constatée sur plusieurs dépenses de guichet. Il en va de même pour le budget du logement : nous ne faisons qu’annuler des crédits non utilisés.

J’en viens aux questions du rapporteur général. Le PLFG accroît notre soutien à l’Ukraine, notamment par le renforcement des capacités de nos armées, avec une ouverture de crédits de 2,1 milliards d’euros. Un premier recensement des mesures en faveur de l’Ukraine a fait apparaître des besoins compris entre 2 et 2,5 milliards d’euros par an pour les années 2022 à 2024 ; l’Inspection générale des finances a reçu au mois de septembre la mission d’établir un recensement global des engagements pris par la France. Je ne peux pas vous donner plus de détails à ce stade.

S’agissant des versements de l’Union européenne, la prise en compte de notre croissance en 2020 et 2021 – plus vigoureuse que prévu – s’est traduite par une baisse de 1,9 milliard d’euros du montant des subventions destinées à la France dans le cadre du plan national de relance et de résilience (PNRR). Cette baisse est largement compensée par les 2,8 milliards d’euros que la France pourra recevoir au titre de REPowerEU. Au total, notre pays pourra recevoir 40,3 milliards d’euros dans le cadre du PNRR.

Les remboursements et dégrèvements liés à la mécanique de l’impôt sont en effet importants, puisqu’ils sont en hausse d’environ 11 milliards d’euros. Pour l’essentiel, cela provient de la mise à jour des prévisions des excédents de versement d’impôt sur les sociétés, des remboursements de crédits de TVA et des restitutions de prélèvements à la source. On constate aussi une baisse de 462 millions d’euros des remboursements et dégrèvements liés à des crédits d’impôt, notamment celui pour services à la personne. Doit aussi être mentionnée une hausse de 1,5 milliard d’euros au titre des remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l’État – essentiellement des admissions en non-valeur, des remises et annulations et autres restitutions, principalement sous l’effet de la mise à jour de la TVA.

S’agissant des excédents de l’Unedic, nous avons eu l’occasion de le dire, les réformes de l’assurance chômage ont produit des gains de 2,2 milliards pour les réformes de 2021 et 2023. Un document de cadrage envoyé le 1er août propose aux partenaires sociaux un co-investissement dans les politiques de plein emploi, pour développer les compétences, soutenir l’apprentissage ou encore accompagner la création de France travail. Le fait qu’une partie de ces économies soit directement reversée en faveur des demandeurs d’emploi et des entreprises nous conduit à minorer les charges futures. En 2023, l’État a alloué près de 2,3 milliards d’euros de ressources à France compétences et consacre globalement 22 milliards à la mission Travail et emploi. Les moindres recettes sont fixées à 2 milliards d’euros pour 2023, ce qui se traduit par une moindre compensation des allégements généraux. Le document précise aussi les montants pour la durée de la convention d’assurance chômage : une baisse de 2,5 à 2,7 milliards en 2024, et jusqu’à une somme comprise entre 3,5 et 4 milliards en 2026. Dans nos projections, ces moindres recettes représentent 27 % à 29 % des excédents globaux de l’Unedic.

Concernant l’apprentissage, les primes aux employeurs représenteront environ 1,3 milliard d’euros, ce chiffre prenant en compte l’évolution du nombre d’apprentis en 2023 et l’entrée en vigueur de l’aide unique à 6 000 euros pour tous les apprentis, contre 5 000 à 8 000 euros auparavant selon l’âge. Nous maintenons l’objectif de 1 million d’entrées en apprentissage. Nous sommes ouverts aux réflexions pour assurer une bonne maîtrise de cette dépense publique très dynamique.

M. le président Éric Coquerel. Nous entendons maintenant les orateurs des groupes.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je salue ce premier projet de loi de finances de fin de gestion, nouvelle catégorie que nous devons à la réforme de nos collègues Woerth et Saint-Martin et qui pérennise une pratique saine adoptée par le Gouvernement ces dernières années. Le scénario macroéconomique est jugé plausible, crédible et équilibré, selon le champ lexical du Haut Conseil des finances publiques. C’est une bonne nouvelle, d’autant que nous sommes en novembre et que nous approchons de l’exécution.

Le cap du désendettement est clair. Tous les indicateurs vont dans ce sens, puisque le déficit public, la dette publique et le solde budgétaire sont en amélioration.

Au nom du groupe Renaissance, je salue votre gestion prudente des deniers publics. Des mises en réserve importantes et des annulations de crédits courageuses permettent de financer les aléas de la gestion : qu’il s’agisse des opérations extérieures, de l’accueil et de l’hébergement des réfugiés ukrainiens ou des calamités agricoles, vous les financez sans détériorer la copie budgétaire. Le financement des annonces de revalorisation a pu être assuré à masse salariale constante.

Concernant les réfugiés ukrainiens, vous évoquez une enveloppe de 300 millions d’euros. Avec Stella Dupont, nous avions suggéré un montant de 330 millions d’euros dans notre rapport. Quelles sont les parts respectives, dans ces montants supplémentaires, de l’hébergement et de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) ?

Par ailleurs, vous ajoutez 5 millions d’euros pour que l’Institut national de l’audiovisuel (INA) recouvre de la trésorerie, mais ce montant reste inférieur à sa demande. Envisagez-vous d’aller plus loin ?

M. Kévin Mauvieux (RN). Nous avons reçu ce texte quelques heures avant cette audition, en plein examen du PLF. Ce n’est pas sérieux et nous n’avons pas pu l’analyser en profondeur.

Le Haut Conseil des finances publiques estime que la Commission européenne pourrait enclencher le mécanisme de correction pour votre budget pour 2023. Pouvez-vous développer ce point ?

Pouvez-vous expliquer le décalage de plus de 9 milliards d’euros concernant la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité (Crim) ?

J’aimerais également vous entendre sur la baisse de 612 millions d’euros de la taxe sur les transactions financières (TTF) ainsi que sur la diminution de plus de 3 milliards d’euros des recettes des produits des participations de l’État dans les entreprises financières.

Vous indiquez que l’augmentation de 3,8 milliards de la charge de la dette est due pour moitié à la hausse des taux d’intérêt et pour l’autre moitié à l’inflation. Permettez-moi de mettre en doute cette déclaration. Je creuserai ce point en tant que rapporteur spécial.

S’agissant enfin des dépenses liées à l’Ukraine, vous avez donné des chiffres, mais vous n’en avez pas expliqué les raisons.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Un projet de loi de finances de fin de gestion est plus facile à établir avec 10,6 milliards de recettes supplémentaires !

Le groupe Les Républicains soutient l’attribution de 800 millions d’euros supplémentaires au monde agricole et de 500 millions supplémentaires à l’AAH en raison de l’application de la déconjugalisation au 1er octobre, mesure qui était attendue.

En revanche, je ne fais pas la même lecture que M. Lefèvre de l’avis du Haut Conseil des finances publiques, puisque celui-ci considère que l’effort d’ajustement structurel est trop modeste, que le déficit structurel passe de 4,2 à 4,1 points. Cet écart de 0,1 point est faible et demeure éloigné de l’objectif de moyen terme d’un déficit de solde structurel de 0,4 point.

En matière d’endettement, le Haut Conseil note que la position de la France continuerait de s’éroder au sein de l’Union européenne. Cela mérite attention.

Vous avez parlé de 2,4 milliards d’euros prévus pour l’Ukraine. Pouvez-vous être plus précis sur la répartition de ces crédits ?

Enfin, les dégâts liés aux émeutes sont évalués à 730 millions d’euros mais vous évoquez des fonds correspondant à 223 millions. Qui paiera les 500 millions restants – des commerces, des particuliers ?

M. Mohamed Laqhila (Dem). Je vous remercie pour la présentation de ce premier PLFG, qui marque une étape vers une gestion budgétaire plus sincère et plus rigoureuse. Par son recentrage sur la régulation des crédits budgétaires, la loi de finances de fin de gestion s’inscrit dans l’esprit initial de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf).

Je salue la réduction du déficit public à 4,9 % du PIB en 2023. La dette, encore importante, diminue par rapport à l’année précédente, soulageant ainsi les générations futures. Je note aussi une prévision de croissance stable, à 1 %, et une inflation à 4,9 % malgré les défis comme celui de la guerre en Ukraine. Enfin, les annulations de crédits montrent une utilisation judicieuse de chaque euro pour le bien-être des citoyens.

Comment préserver le pouvoir d’achat face à une inflation de 4,9 %, tout en maintenant la croissance à 1 % ?

Comment seront gérées les réallocations de crédits face aux urgences comme la guerre en Ukraine, et quelle sera leur incidence pour d’autres secteurs comme celui de l’agriculture ?

Comment la maîtrise de la masse salariale de l’État, sans nouvelle ouverture de crédits, affectera-t-elle les agents publics et la réduction du déficit ?

M. Mickaël Bouloux (SOC). Nous avons reçu le texte ce matin : il est compliqué d’étudier un texte de 150 pages en deux heures et demie.

Ce nouveau format de projet de loi de finances se limite aux mesures budgétaires. Des explications complémentaires seront nécessaires, car nous ne pouvons pas nous satisfaire de simples mentions d’annulations de crédits mis en réserve. À l’avenir, les PLFG devraient presque devenir des pré-lois de règlement et apporter des informations concernant l’exécution de l’année en cours. Vous avez évoqué les annulations de crédits du côté de la transition écologique et du logement. Alors que ces sujets constituent des urgences, pourquoi ne parvienton pas à dépenser ces crédits ?

Vous bénéficiez d’une amélioration notable des recettes, avec 2,6 milliards d’euros supplémentaires d’impôt sur le revenu, 6 milliards d’impôt sur les sociétés et 2 milliards de TVA notamment. Vous annulez aussi de nombreux crédits mis en réserve, ce qui est normal. Malgré cela, vous dégradez le solde de 7,6 milliards, avec 17 milliards en plus pour le budget de l’État, avec notamment 12,5 milliards dus aux remboursements et dégrèvements. Nous ne comprenons pas vos explications. D’un côté, vous indiquez qu’il existe une dynamique de l’impôt, mais de l’autre vous prévoyez plus de remboursements. C’est magique : quand les recettes de l’État augmentent, elles diminuent ! Peut-être y a-t-il un problème de niche fiscale quelque part ?

S’agissant des 3,8 milliards d’euros supplémentaires de charge de la dette, nous continuons à payer les inconséquences des émissions d’obligations indexées sur l’inflation. Existe-t-il un moyen de nous dégager de ce poison qui, chaque année, nous coûte plus cher ?

En ce qui concerne les 2,5 milliards d’euros pour l’armée, le groupe Socialistes et apparentés considère que c’est certainement indispensable face aux dangers que nous affrontons. Toutefois, cela dit quelque chose des priorités politiques, alors qu’il existe d’autres urgences.

Enfin, vous prenez 2 milliards dans les excédents de l’Unedic, qui s’ajoutent aux 2,5 milliards pris dans le PLF pour 2024. Pour nous, c’est une ligne rouge.

Mme Lise Magnier (HOR). Ce PLFG pour 2023 est le premier texte correspondant à cette nouvelle catégorie de loi de finances. Son principal apport, par rapport aux traditionnels collectifs budgétaires de fin d’année, est qu’il exclut les dispositions fiscales pour inclure les seuls ajustements budgétaires nécessaires en fin de gestion. Ce sera bon pour la clarté de nos débats et la qualité de notre travail : trop souvent, les débats lors de l’examen des PLFR de fin de gestion étaient dévoyés, avec une évidente tentation de refaire le match du PLF.

Nous nous réjouissons du maintien de la prévision de déficit public pour 2023 à 4,9 % notamment grâce à des efforts consentis sur le gel des crédits mis en réserve. La croissance devrait bien atteindre 1 % en 2023, ce qui marque la capacité de résilience de notre économie, a fortiori quand on se remémore les vives critiques formulées tous azimuts il y a un an quant à cette prévision.

En revanche, la révision à la hausse de la charge de la dette est une mauvaise nouvelle, qui doit nous rappeler que la maîtrise de notre endettement est un enjeu majeur.

Concernant l’indemnité carburant travailleur, pouvez-vous rappeler quel montant avait été inscrit et quel montant a été consommé, maintenant que les demandes sont closes ? Connaissez-vous le nombre de bénéficiaires et la ventilation par décile de revenus ?

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Je regrette à mon tour que nous n’ayons reçu ce PLFG qu’en fin de matinée. C’est regrettable pour la qualité du débat démocratique.

En 2023, le déficit de l’État sera plus important qu’attendu, à 171 milliards d’euros au lieu des 165 milliards prévus. Nous confirmez-vous que c’est dû à des recettes non fiscales moins élevées du fait de moindres dividendes et d’un décalage du versement de l’aide européenne, ainsi qu’à une charge de la dette plus importante que prévu, ce qui doit en effet nous alerter ?

La contribution sur la rente inframarginale des énergéticiens est inférieure de 9,5 milliards d’euros à ce qui était prévu. Plus généralement, pouvez-vous nous apporter des détails concernant les moindres recettes que vous constatez, en particulier les dividendes des participations de l’État et la contribution des énergéticiens ?

Pouvez-vous également nous éclairer quant aux annulations de crédits qui concernent des missions essentielles pour la transition écologique et sociale ? Ces annulations représentent 1,3 milliard d’euros pour la mission Écologie, développement et mobilité durables, dont 1,1 milliard pour le programme 174 – qui comprend notamment MaPrimeRénov’, le chèque énergie et l’aide à l’acquisition de véhicules propres – et 105 millions pour le programme 203, Infrastructures et services de transport. Vos réponses aux questions du président de la commission ne nous paraissent pas satisfaisantes pour l’instant. En particulier, y a-t-il une sous-exécution des crédits de MaPrimeRénov’ et si oui, pourquoi ?

On note aussi 897 millions d’euros d’annulations de crédits pour la mission Travail et emploi, 384 millions pour la mission Recherche et enseignement supérieur et 289 millions pour la mission Aide publique au développement. Pouvez-vous nous apporter des éclairages complémentaires étant entendu que, comme vous l’avez souligné, ces crédits sont redéployés vers la défense et l’agriculture ?

M. Charles de Courson (LIOT). Alors que l’Insee a annoncé que la croissance est tombée à 0,1 % au troisième trimestre 2023 et que les perspectives du climat des affaires continuent à se dégrader, vos prévisions de croissance à 1 % pour 2023 et à 1,4 % pour 2024 sont-elles encore réalistes ?

Ce projet de loi de finances de fin de gestion montre une aggravation du déficit du budget de l’État de 6,5 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2023, malgré des recettes supplémentaires. Plus grave, le déficit structurel se réduit fort peu. Si le solde effectif s’accroît de 4,8 % du PIB en 2022 à 4,9 % en 2023, le déficit structurel ne se réduit que de 0,1 % – ce qui n’est pas conforme à l’objectif fixé à 0,5 % par le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance. Pourriez-vous nous en dire un mot ?

Le Haut Conseil des finances publiques considère que la baisse moyenne des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), que vous aviez estimée à 16 % dans la loi de finances initiale pour 2023 et que vous maintenez à ce taux dans ce PLFG, sera au minimum de 20 % en moyenne. Partagezvous cette analyse ?

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux questions des autres députés.

M. Daniel Labaronne (RE). Je note la sincérité des prévisions macroéconomiques, puisque nous aurons atteint 1 % de croissance à la fin de l’année 2023, notre acquis de croissance étant déjà de 0,9 % au troisième trimestre.

Vous indiquez que la forte augmentation de la charge de la dette est due à une inflation plus importante que prévu. Ce matin, Bruno Le Maire a évoqué une perspective d’inflation de 4 % plutôt que de 4,9 %. Est-ce de nature à modérer l’augmentation de la charge de la dette ?

M. Fabien Di Filippo (LR). La charge de la dette est supérieure de près de 4 milliards d’euros à ce qui était attendu. Cela aura-t-il des conséquences l’an prochain, avec une accélération de l’effet boule de neige que nous connaissons avec l’actuelle hausse des taux ?

Pour expliquer la hausse des crédits de 5,2 milliards d’euros, vous mentionnez la dynamique des dépenses de prestations sociales. Combien représentent-elles exactement ? Quels sont les champs de l’aide sociale concernés ?

Le chômage repart à la hausse, contrairement aux prévisions du Gouvernement. Quelles conséquences cela aura-t-il dès cette fin d’année pour les comptes publics ?

Concernant les collectivités, nous avons vu les mouvements d’aller et retour entre ce qui avait été avancé pour le bouclier tarifaire et les remboursements réclamés par l’État. Les crédits étaient-ils insuffisants ou bien ces dispositifs sont-ils remis en cause ?

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Vous annoncez 10,6 milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires mais les remboursements et dégrèvements augmentent de 12 milliards. Donc quand les recettes augmentent, elles diminuent. C’est magique ! En tant que rapporteure spéciale de la mission Remboursements et dégrèvements, je vous demanderai des précisions supplémentaires.

Avez-vous déjà une idée du taux d’évolution des bases de fiscalité locale, même s’il se calcule sur douze mois glissants à la fin du mois de novembre ? Cette information est importante pour les collectivités locales.

Enfin, vous annoncez une augmentation du nombre de bénéficiaires de la prime d’activité. Ce n’est pas forcément une bonne nouvelle, puisque cette prime est accordée quand les salaires sont bas. Combien sont ces nouveaux bénéficiaires ?

M. Pascal Lecamp (Dem). Le maintien, la semaine dernière, de la notation de la France par deux agences illustre la bonne tenue des comptes de l’année écoulée.

Le PLFG prévoit l’annulation de plusieurs milliards de crédits, essentiellement en raison de la sous-consommation de divers dispositifs. Parmi eux, relevons la sous-consommation des crédits alloués au versement du dispositif de l’allocation de solidarité spécifique. Pouvez-vous expliquer plus en détail cette sous-consommation, peut-être en lien avec l’évolution de la situation du marché du travail ces derniers mois ?

Quelles mesures seront prises grâce à l’ouverture des crédits supplémentaires en raison de la guerre en Ukraine ? Pouvez-vous en dire plus concernant les 64 millions d’euros alloués à la reconstruction d’équipements rendue nécessaire par les violences urbaines ?

Pouvez-vous expliquer l’annulation de 12,6 millions d’euros de crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ?

M. Charles Sitzenstuhl (RE). La situation au sujet des avances consenties aux collectivités crée des déceptions et pose de nombreuses questions. Dans ma circonscription, plusieurs maires ne comprennent pas ce mode de fonctionnement de l’État. Laisser entendre qu’il pourra y avoir des avances avant le versement des soldes, pour finalement ne pas verser les soldes et même demander un remboursement des avances est compliqué à accepter. En général, qui plus est, il s’agit de montants de quelques milliers d’euros. Ce n’est pas cela qui déséquilibrera nos finances publiques.

M. Thomas Cazenave, ministre. S’agissant des réfugiés ukrainiens, ils bénéficient d’une protection temporaire partout dans l’Union européenne. En 2023, le coût des dispositifs d’accueil s’élève à plus de 300 millions d’euros, dont 175 millions pour le versement de l’ADA et 164 millions d’euros pour le financement des dispositifs d’accueil collectifs et des services d’accès aux soins (SAS) dans les grandes villes d’arrivée. Ces dispositifs sont financés par une ouverture de crédits en loi de finances de fin de gestion, aucun crédit n’ayant été ouvert à ce titre en loi de finances initiale (LFI) pour 2023.

Concernant l’INA, le PLFG prévoit une baisse de 20 millions d’euros de la dotation du secteur audiovisuel public par rapport à la LFI pour 2023, mais cette dotation demeure malgré tout en hausse de 110 millions par rapport à la dotation 2022. Cette baisse est principalement due à une restitution de 26 millions d’euros de crédits ouverts en LFI pour compenser les effets fiscaux de la suppression de la contribution à l’audiovisuel public pour Arte. Nous avons profité de cette bonne nouvelle pour faire un geste envers l’INA, qui reçoit un complément de dotation de 5 millions d’euros. Toutefois, vous avez raison, l’INA a fait part de difficultés de trésorerie en raison de dépenses immobilières imprévues et de l’effet de l’inflation sur les investissements. Nous travaillons avec cet organisme pour estimer précisément les besoins et les accompagner. La progression de 15 % de la dotation de l’INA en 2024 par rapport à 2023 constitue une première réponse.

En ce qui concerne la Crim, les recettes sont en effet inférieures à nos prévisions, à hauteur de 9,5 milliards d’euros. L’objectif de cette contribution est clair : faire contribuer les énergéticiens aux dépenses supplémentaires engagées par l’État pour protéger les Français. L’évaluation de son rendement dépendait de l’estimation et de l’anticipation des prix de l’électricité en 2023 : c’est ainsi que nous avions d’abord estimé les recettes à 7 milliards, avant de les revoir à 12,3 milliards. Heureusement, les prix du marché de l’électricité ont reflué en 2023. Les profits excédentaires des énergéticiens ont donc été moins importants qu’anticipé et le rendement de la Crim a été logiquement revu à la baisse, à 2,8 milliards d’euros au lieu de 12,3 milliards.

La taxe sur les transactions financières baisse de 612 millions d’euros pour deux raisons principales : certaines entreprises sont sorties, de l’assiette du fait de la baisse de leur valorisation boursière ; il y a eu moins de transactions qu’attendu, donc moins de taxation.

S’agissant du mécanisme de correction européen, nous n’avons pas d’indication à ce stade. Nous reviendrons vers vous quand nous y verrons plus clair.

La diminution de 3,3 milliards d’euros du produit des participations financières de l’État est principalement due à la baisse de 3,5 milliards d’euros du dividende de la Banque de France. C’est davantage un sujet de recettes de budget général que de compte d’affectation spéciale Pensions.

S’agissant de la progression de la charge d’intérêt de la dette, je vous confirme la réponse que j’ai faite au président de la commission : nous estimons à 1,9 milliard d’euros l’effet de la hausse de l’inflation sur la charge d’intérêt de la dette, tandis que celui de la hausse des taux de court terme s’établit à 1,9 milliard.

Nous ouvrons 800 millions d’euros pour faire face aux crises que vivent les agriculteurs. Nous nous sommes engagés à accompagner le monde rural.

S’agissant de la masse salariale de l’État, la bonne gestion en exécution et le fait que nous n’ayons pas ouvert de crédits supplémentaires en titre 2 alors même qu’il y a eu des mesures de revalorisation salariale montrent notre rigueur, qui ne s’exerce pas au détriment des agents publics. Ceux-ci ont bénéficié de revalorisations, mais ces efforts ont pu être absorbés par les budgets des ministères.

La transition énergétique est l’une de nos priorités. La sous-exécution de différents chèques énergie explique l’annulation de 400 millions d’euros de crédits. Celle de MaPrimeRénov’ justifie l’annulation de 1 milliard d’euros. Le rythme des rénovations n’a pas été aussi rapide que ce que nous souhaitions tous, en raison de l’augmentation des coûts des matériaux d’une part, et d’une forte demande et des difficultés de la filière à trouver des personnels formés pour conduire des rénovations d’autre part. Pour remobiliser cet outil indispensable et atteindre nos objectifs ambitieux en matière de rénovation énergétique, nous abaissons dans le PLF pour 2024 le reste à charge, nous augmentons les plafonds et nous donnons la priorité aux rénovations globales. J’espère que ces mesures permettront une meilleure exécution. Je note aussi qu’il existe parfois des surexécutions au ministère de la transition écologique, dont 400 millions d’euros de plus dans l’enveloppe consacrée au verdissement des véhicules. En net, nous annulons un peu plus de 1 milliard d’euros de crédits.

En ce qui concerne l’Unedic, dans le document de cadrage qui a été envoyé aux partenaires sociaux, nous avions prévu une contribution de 2 milliards d’euros pour 2023 et 2,5 milliards d’euros au minimum pour 2024, les effets induits de la réforme de l’assurance chômage permettant d’améliorer la situation financière de cet acteur. Les négociations sont en cours avec les partenaires sociaux. En tout état de cause, cette mobilisation au service des demandeurs d’emploi, qui est la raison d’être de l’Unedic, ne dépasse pas un tiers de ses excédents. C’est aussi une manière d’accélérer le retour à l’emploi et d’améliorer la situation financière de l’Unedic que de financer des mesures d’activation des dépenses d’assurance chômage.

S’agissant du coût des émeutes urbaines, France assureurs l’estime à 730 millions d’euros. Pour les collectivités, nous l’estimons à 223 millions d’euros. Pour le reste, je n’ai pas le détail : sont concernés les entreprises, les particuliers, les opérateurs de l’État, l’État luimême – la direction générale des finances publiques, par exemple, a subi les conséquences de violences urbaines et nous devrons payer les reconstructions. Nous travaillons avec les collectivités locales pour les accompagner et compléter ce qui n’est pas couvert par les assureurs.

J’évoquais 2,4 milliards d’euros pour l’Ukraine, dont 2,1 milliards d’euros à destination de nos armées : 1,5 milliard d’euros d’anticipation de la LPM 2024-2030, notamment en matière d’équipements, comme cela a été annoncé par le Gouvernement, et 0,6 milliard d’euros d’ouverture de crédits supplémentaires. Par ailleurs, je l’ai dit, 300 millions d’euros reviennent au ministère de l’intérieur.

En ce qui concerne l’indemnité carburant, le montant initial prévu était de 800 millions d’euros pour 8 millions de bénéficiaires, dont le revenu par part n’excédait pas 1 314 euros net par mois en 2021. Un montant de 430 millions d’euros a été consommé par 4,3 millions de ménages. La composition par décile est la suivante : 3,2 % pour le premier ; 12,5 % pour le deuxième ; 16,3 % pour le troisième ; 18,5 % pour le quatrième ; 26,5 % pour le cinquième.

L’Insee vient d’annoncer 0,1 % de croissance supplémentaire, ce qui porte notre acquis de croissance à 0,9 %. Je rappelle que notre hypothèse est de 1 %. Nous finirons donc l’année entre 1 et 0,9 %, tout près de notre hypothèse. Nos grands équilibres ne sont pas remis en question.

Vous aurez noté que le PLF pour 2024 prévoit une baisse de 16 % des DMTO. Nous avons actualisé cette prévision en la portant à 20 % dans ce PLFG pour 2023. Au 30 septembre, trentesept départements enregistraient une baisse supérieure à 20 % de leurs DMTO – mais d’autres connaissent une hausse. Des échanges sont en cours avec Départements de France pour accompagner ceux qui se trouveraient en situation difficile. Nous actualiserons nos estimations au fil de l’eau.

Nous consacrons 400 millions d’euros aux effets de la déconjugalisation de l’AAH.

S’agissant de la charge de la dette l’année prochaine, nous nous attendons à une baisse de l’inflation en 2024, donc à un reflux de l’effet inflation constaté en PLFG. Cela ne nous conduit pas à revoir notre hypothèse de 2,5 % ou 2,6 % pour 2024, selon que l’on inclut ou pas le tabac.

Au sujet des acomptes versés aux collectivités pour le filet de sécurité, les critères en ont été arrêtés à l’unanimité par l’Assemblée, sur une proposition de Christine Pires Beaune. Nous constatons une situation financière du bloc communal moins dégradée qu’attendu, raison pour laquelle certaines communes n’étaient plus éligibles au filet de sécurité alors qu’elles avaient pu prétendre à un acompte au terme du travail conduit avec les directions départementales des finances publiques (DDFIP). Je comprends la réaction des maires qui doivent rendre l’acompte qui leur a été accordé. Convenons, malgré tout, que c’est le signal d’une bonne résistance de la situation financière des collectivités. Je préfère cette situation à celle dans laquelle il aurait fallu couvrir davantage de collectivités que prévu avec le filet de sécurité. Nous avons été alertés, notamment par vous, monsieur Sitzenstuhl, et nous avons donné des consignes aux DDFIP pour accompagner les collectivités concernées et leur permettre d’étaler leur remboursement. Je rappelle que le montant global s’élève à 69 millions d’euros mais que pour 60 % des collectivités, cela représente moins de 5 000 euros.

La sous-consommation de l’ASS s’explique par le fait que la situation de l’emploi a mieux résisté que prévu.

Les 12,6 millions d’euros de crédits annulés au sein de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales sont liés au décalage dans le temps de plusieurs projets informatiques. Ils sont placés dans la réserve de précaution. Je redis que nous prévoyons par ailleurs 800 millions d’euros supplémentaires pour nos agriculteurs.

Concernant la prime d’activité, nous enregistrons une hausse de 130 000 bénéficiaires, avec un effet montant également positif. Vous vous en inquiétez, madame Pires Beaune, mais c’est aussi une bonne nouvelle : le meilleur dynamisme de l’emploi permet à davantage de gens de bénéficier de la prime d’activité. Nous vous donnerons plus de détails si vous le souhaitez.

S’agissant de la revalorisation des bases taxables en 2023, nous avions prévu 5,1 % dans la LFI pour 2023 et 3,7 % dans le PLF pour 2024. Des ajustements de versements ont été effectués par la DGFIP en exécution, mais le taux d’évolution des bases ne sera connu qu’en février 2024.

Enfin, l’Insee a effectivement publié une prévision d’inflation de 4 % en glissement annuel, soit un ralentissement du rythme. Nous ne modifions pas notre prévision de 4,9 % en moyenne annuelle pour cette année, réaffirmée dans le PLFG ; nous ne revoyons donc pas non plus la charge de la dette à court terme.

 


Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mardi 31 octobre 2023 à 13 heures 30

Présents. - Mme Christine Arrighi, M. Mickaël Bouloux, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Christine Decodts, M. Fabien Di Filippo, Mme Stella Dupont, Mme Marina Ferrari, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, M. Mathieu Lefèvre, M. Philippe Lottiaux, Mme Lise Magnier, Mme Alexandra Martin (Gironde), M. Kévin Mauvieux, Mme Christine Pires Beaune, M. Alexandre Sabatou, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Charles Sitzenstuhl

Excusés. - M. Manuel Bompard, M. Joël Giraud, M. Tematai Le Gayic, M. Jean-Paul Mattei