N° 309
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2022.
PROPOSITION DE LOI
visant à préserver le jury populaire de cour d’assises,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),
présentée par Mesdames et Messieurs
Francesca PASQUINI, Christine ARRIGHI, Julien BAYOU, Lisa BELLUCO, Cyrielle CHATELAIN, Charles FOURNIER, Marie‑Charlotte GARIN, Hubert JULIEN‑LAFERRIÈRE, Julie LAERNOES, Benjamin LUCAS, Sébastien PEYTAVIE, Marie POCHON, Jean-Claude RAUX, Sandra REGOL, Sandrine ROUSSEAU, Eva SAS, Sabrina SEBAIHI, Aurélien TACHÉ, Sophie TAILLÉ‑POLIAN, Nicolas THIERRY, Soumya BOUROUAHA, André CHASSAIGNE, Elsa FAUCILLON, Stéphane PEU, Davy RIMANE, Ségolène AMIOT, Rodrigo ARENAS, Carlos Martens BILONGO, Florian CHAUCHE, Hadrien CLOUET, Jean‑François COULOMME, Sébastien DELOGU, Emmanuel FERNANDES, Charlotte LEDUC, Manon MEUNIER, François PIQUEMAL, Aurélien SAINTOUL, Matthias TAVEL, Mickaël BOULOUX, Arthur DELAPORTE, Inaki ECHANIZ, Fatiha KELOUA HACHI, Christine PIRES BEAUNE, Claudia ROUAUX,
députés.
– 1 –
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Cette proposition de loi vise à maintenir le lien entre la justice et les citoyens. Héritage de la Révolution de 1789, le jury populaire de cour d’assises, symbole éclatant de la démocratie en matière judiciaire, doit être défendu et préservé. Il s’agit d’une institution précieuse qui, en permettant à des juges et à des citoyens de se rencontrer, de délibérer et de rendre la justice ensemble « au nom du peuple français », favorise la confiance des Français en leur justice criminelle. Il s’agit par ailleurs d’une institution vertueuse qui, en impliquant les citoyens dans le fonctionnement de la justice et en s’appuyant sur l’oralité des débats, garantit les libertés civiles, participe à forger la citoyenneté, et façonne une justice de qualité marquée par la proximité et l’humanité.
Pourtant, si les dispositions de la loi n° 2021‑1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire ne sont pas modifiées, les cours d’assises et leurs jurés seront remplacés dans environ 60 % dans affaires relevant actuellement de leur compétence par des cours criminelles départementales, dont la principale caractéristique est d’être exclusivement composées de magistrats professionnels. Cette disparition du jury populaire dans plus de la moitié des affaires criminelles, qui n’a pas fait l’objet d’un débat public digne de ce nom au regard de l’attachement profond des Français pour cette institution, est prévue pour le 1er janvier 2023.
Cette évolution constituerait une régression démocratique majeure, qui éloignerait les Français de leur justice et saperait leur confiance en celle‑ci. Il convient, à l’inverse, de tirer les enseignements du rapport conclusif des États généraux de la justice rendu au président de la République le 8 juillet 2022, qui porte pour intitulé « Rendre justice aux citoyens », et qui indique expressément que « la participation de citoyens à l’œuvre de justice est primordiale et doit être préservée ». Le jury populaire ne doit pas être sacrifié sur l’autel d’une politique de gestion des flux, et doit au contraire faire l’objet d’une protection particulière.
C’est pourquoi, Mesdames, Messieurs, la présente proposition de loi vise à empêcher la généralisation des cours criminelles départementales, et à mettre fin à leur expérimentation.
proposition de loi
Article 1er
La loi n° 2021‑1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire est ainsi modifiée :
1° L’article 9 est abrogé ;
2° Le IV de l’article 59 est ainsi rédigé :
« IV – Dans les départements où est en cours l’expérimentation prévue aux II et III de l’article 63 de la loi n° 2019‑222 du 23 mars 2019 de programmation 2018‑2022 et de réforme pour la justice, le terme de cette expérimentation est fixé au 1er janvier 2023.
« Les personnes ayant fait l’objet d’une mise en accusation devant la cour criminelle avant le 1er janvier 2023, sans avoir été jugées à cette date, sont renvoyées devant la cour d’assises sur décision du premier président de la cour d’appel. »
Article 2
La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.