N° 1586
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juillet 2023.
PROPOSITION DE LOI
visant à lutter contre la délinquance juvénile
en responsabilisant les détenteurs de l’autorité parentale,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Lionel ROYER‑PERREAUT, Damien ABAD, Romain DAUBIÉ, Luc LAMIRAULT, Constance LE GRIP, Lysiane MÉTAYER, Jérémie PATRIER‑LEITUS, Robin REDA, Charles SITZENSTUHL, Phillipe SOREZ, Annie VIDAL, Lionel VUIBERT,
députés.
– 1 –
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La présente proposition de loi vise à lutter contre la délinquance juvénile en responsabilisant les détenteurs de l’autorité parentale.
Alors que le rapport d’information sénatorial relatif à la délinquance des mineurs publié le 21 septembre 2022 pointait la difficulté de disposer d’une « photographie complète et actuelle de ce phénomène sur l’ensemble de la chaîne pénale », les émeutes qui ont touché l’ensemble du pays à la fin du mois de juin 2023 ont mis en lumière la jeunesse des délinquants.
Ainsi, sur les 875 personnes interpellées dans la nuit du jeudi 29 au vendredi 30 juin, « un tiers sont des jeunes, parfois des très jeunes », a détaillé en personne le président de la République Emmanuel Macron avant que le ministère de l’Intérieur indique que le moyenne d’âge s’élevait à 17 ans.
Malgré l’incomplétude des chiffres concernant la délinquance juvénile, les études statistiques dont nous disposons confirment ce que les récentes scènes de pillages et d’agitations urbaines ont montré : la violence d’une partie de la jeunesse française. Ainsi, de 2016 à 2021, le nombre de mineurs se rendant coupable de coups et blessures volontaires sur personne de moins de 15 ans a progressé de 6,7 %. Sur la même période, c’est une augmentation de 59,7 % des mineurs se rendant coupables de violences sexuelles sur d’autres mineurs.
Face à cet état de fait, il est nécessaire que les pouvoirs publics durcissent le panel des sanctions.
Reprenant les grands principes de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquance, le code de la justice pénale des mineurs est entré en vigueur au mois de septembre 2021. Il énumère les grands principes de la justice pénale appliquée aux mineurs, notamment la primauté de l’éducation sur la répression ou encore l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de leur âge.
Ainsi, le mineur de moins de 13 ans, qui dispose d’une présomption de non discernement, ne peut être placé en détention provisoire. Il peut cependant se voir appliquer différentes mesures éducatives ainsi qu’un avertissement judicaire.
Le mineur âgé de 13 à 16 ans peut quant à lui être condamné à des peines restrictives de liberté, comme à des peines de sursis. De plus, le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs ont la possibilité de prononcer une peine d’amende ou une peine privative de liberté qui ne peut toutefois être supérieure à la moitié de la peine encourue par les majeurs. C’est l’excuse de minorité.
Enfin, la juridiction concernant les individus âgés de 16 à 18 ans les rend susceptibles de faire l’objet de mesures proches de celles qui pourraient viser des personnes majeures, comme des travaux d’intérêts généraux. De plus, si les circonstances l’exigent, la justice peut décider de ne pas appliquer l’excuse de minorité, et de condamner les mineurs à une peine semblable à une personne majeure.
Les auteurs de cette proposition de loi n’estiment pas nécessaire de modifier le code de la justice pénale des mineurs. Ils considèrent cependant qu’un renforcement des sanctions à l’égard des détenteurs de l’autorité parentale lorsque le mineur se voit condamner est nécessaire.
Ainsi, l’article 227‑17 du code pénal stipule que « le fait, par le père ou la mère, de se soustraire, sans motif légitime, à ses obligations légales au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant mineur est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ». Cette proposition de loi, en son article premier, instaure, lorsque le mineur s’est rendu auteur ou complice d’un crime ou d’un délit, de vérifier automatiquement que le ou les détenteurs de l’autorité parentale n’ont pas failli à leur obligation légale vis‑à‑vis de leur enfant. Il est de plus proposé une peine complémentaire de travail d’intérêt général pour les détenteurs de l’autorité parentale dans ce cas précis.
De surcroît, afin de disposer d’une photographie complète de la délinquance juvénile, l’article 2 demande au Gouvernement de mettre en place un suivi statistique de la délinquance des mineurs sur l’ensemble de la chaîne pénale en publiant chaque année des indicateurs globaux et détaillés. Cette proposition est portée par le rapport sénatorial relatif à la délinquance des mineurs.
En définitif, les auteurs de ce texte proposent donc à la fois d’évaluer plus finement la délinquance juvénile et de faciliter la mise en œuvre de la responsabilité pénale parentale prévue à l’article 227‑17 du code lorsqu’un mineur se rend coupable ou complice d’un crime ou d’un délit.
Puisque l’école de la République et l’État ne peuvent pas tout, cette proposition de loi a pour ambition de faire prendre conscience aux parents de leur responsabilité dans les agissements de leur enfant.
Tel est l’objet de la présente proposition de loi
proposition de loi
Article 1er
Après le premier alinéa de l’article 227‑17 du code pénal, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque le mineur s’est rendu auteur ou complice d’un crime ou d’un délit, le possible manquement du parent ou des parents titulaires de l’autorité parentale à leurs obligations légales définies au premier alinéa est automatiquement contrôlé et vérifié.
« Dans ce cas précis, en sus des peines encourues au premier alinéa, une peine complémentaire de travail d’intérêt général peut être prononcée au détenteur de l’autorité parentale. »
Article 2
Le ministère de l’Intérieur met en place un suivi statistique de la délinquance des mineurs sur l’ensemble de la chaîne pénale. Il publie en ce sens chaque année des indicateurs globaux et détaillés par infractions. Les données sources sont librement disponibles et consultables.