N° 2538
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 30 avril 2024.
PROPOSITION DE LOI
visant à sécuriser et à fiabiliser les recettes de la taxe sur les transactions financières,
(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Christophe NAEGELEN, M. Bertrand PANCHER, M. Guy BRICOUT, M. Michel CASTELLANI, M. Paul-André COLOMBANI, Mme Béatrice DESCAMPS, M. Stéphane LENORMAND, M. Max MATHIASIN, M. Paul MOLAC, M. Pierre MOREL-À-L’HUISSIER, M. Benjamin SAINT-HUILE, Mme Nathalie BASSIRE,
députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Cette proposition de loi cherche à améliorer le rendement et le recouvrement de la taxe sur les transactions financières (TTF).
Créée en 2012, la TTF s’applique à l’acquisition d’une action émise par une société dont le siège social est situé en France et dont la capitalisation boursière dépasse un milliard d’euros. Le taux de la taxe est actuellement fixé à 0,3 %. Néanmoins, la TTF est perfectible sur plusieurs points.
Premièrement, la TTF ne couvre pas l’ensemble des transactions financières, et notamment les plus spéculatives. C’est le cas des transactions intra‑journalières (intraday), c’est‑à‑dire des opérations d’achat et de vente au cours d’une même journée. Cette transaction permet de réaliser une plus‑value sans pour autant être une acquisition au sens de la TTF. Les intraday prennent une place de plus en plus importante dans l’ensemble des transactions, notamment depuis l’arrivée du trading haute fréquence (THF) qui confie à des algorithmes la réalisation d’ordres d’achat et de revente à très grande vitesse.
L’assiette de la taxe sur les transactions financières n’intègre pas non plus les produits dérivés. Ces instruments financiers ont des fonctions très différentes mais sont le plus souvent recherchés pour leur caractère spéculatif. Leur effet de levier est en effet important.
Deuxièmement, le recouvrement de la TTF est une exception dans le système fiscal français. D’abord, la TTF fonctionne sur la base d’une déclaration des services d’investissements qui exécutent la transaction. Ensuite, c’est le dépositaire central qui transmet au Trésor le produit de la taxe. C’est donc Euroclear, une société anonyme dont le siège est basé à Bruxelles, qui assure le recouvrement effectif de la taxe sur les transactions financières. Les relations entre l’État et Euroclear sont précisées dans le protocole du 7 septembre 2012. Dans un référé de juin 2017, la Cour des comptes estimait que ce protocole devait être revu.
Ces deux phénomènes expliquent en partie la variabilité des recettes de la TTF, passées de 1,1 milliards d’euros en 2021, à 1,5 milliards d’euros en 2022 et 1,7 milliards d’euros en 2023 mais estimées à seulement 1,2 milliards d’euros pour 2024. La spécificité du recouvrement et le manque de contrôles afférents expliqueraient le décalage entre les recettes constatées et l’activité observée sur les marchés.
Pour toutes ces raisons, la présente proposition de loi étend l’assiette de la taxe et améliore les modalités de son recouvrement.
D’abord, l’article unique de cette proposition de loi étend la taxe sur les transactions financières à certains produits dérivés et aux transactions intra‑journalières (intraday). La proposition de loi propose une taxation des ordres d’achat en lieu et place du transfert de propriété. Cela permet de taxer les transactions intrajournalières. Cette disposition exonère cependant les apporteurs de liquidité ou « market makers », qui contribuent à la liquidité et au bon fonctionnement du marché. La proposition de loi étend également la TTF aux dérivés d’actions et aux dérivés négociés hors des marchés réglementés. La PPL ne concerne pas les « dérivés de couverture », par exemple en matière agricole.
Ensuite, l’article unique recentralise le recouvrement de la taxe sur les transactions financières auprès de la DGFiP. Afin de disposer des informations pertinentes, il est proposé que les comptables publics s’appuient sur le registre RDT2 (Reporting Direct des Transactions), tenu par l’Autorité des marchés financiers en vertu du règlement européen relatif aux marchés d’instruments financiers de 2014, dit MiFIR. Ce registre détaille en effet de manière exhaustive les transactions financières.
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proposition de loi
Article unique
I. – L’article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « que son acquisition donne lieu à un transfert de propriété, au sens de l’article L. 211 17 du même code, » sont supprimés ;
b) Au deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « de », sont insérés les mots : « l’exécution d’un ordre d’achat ou, à défaut, de » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette taxe s’applique également à la souscription d’un contrat financier dérivé lié à des actions, ou à un indice qui réplique des actions, de sociétés mentionnées au premier alinéa. Un taux de 0,03 % est appliqué au montant notionnel du contrat. Par dérogation, pour ceux de ces contrats financiers qui ne sont pas négociés sur un marché réglementé, le taux est de 0,06 %. » ;
2° Le 4° du II est complété par les mots : « , que l’acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété » ;
3° Le VI est ainsi rédigé :
« VI. – La taxe est liquidée, recouvrée et contrôlée par les comptables de la direction générale des finances publiques, notamment à partir du Registre tenu par l’AMF au titre de l’article 26 du règlement (UE) n° 600/2014 du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers. »
4° Au premier alinéa du VII, après la seconde occurrence du mot : « titre, », sont insérés les mots : « ou s’il n’y a pas de livraison du titre, » ;
5° La seconde phrase du VIII est ainsi rédigée : « Un décret précise, que l’acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété au sens de l’article L. 211‑17 du même code, la nature de ces informations, qui incluent le montant de la taxe due au titre de la période d’imposition, les numéros d’ordre quand ils existent des opérations concernées, la date de leur réalisation, la désignation, le nombre et la valeur des titres dont l’acquisition est taxable et les opérations exonérées, réparties selon les catégories d’exonération mentionnées au II du présent article. »
6° Les IX, X et XI sont abrogés.
II. – Le présent article s’applique à compter du 1er janvier 2025.