N° 2562

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 mai 2024.

PROPOSITION DE LOI

pour un accès plus juste et transparent au marché de l’assurance affinitaire,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Danielle BRULEBOIS,

députée.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi vise à encadrer les pratiques commerciales liées à la distribution de l’assurance affinitaire afin de mieux protéger les consommateurs.

Les assurances affinitaires ont montré leur utilité, elles apportent un nouveau service, et dans la plupart des cas elles sont proposées de façon appropriée et transparente.

La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation a créé une nouvelle catégorie d’assurances, l’assurance affinitaire qui accompagne un produit ou un service vendu à un consommateur. En effet, l’article L. 112‑10 alinéa 1er du Code des assurances dispose que l’assurance affinitaire est « souscrite en complément à un bien ou un service « vendu » par un fournisseur ». Elle peut donc se définir comme l’assurance intrinsèquement liée à un produit ou à un service, duquel elle ne peut être dissociée. Juridiquement, c’est une assurance collective de dommages distribuée aux consommateurs comme accessoire à un contrat principal de vente d’un appareil multimédia (téléphones portable, ordinateurs, montres connectées, consoles de jeux, drones, trottinettes électriques). L’article L. 129‑1 alinéa 2 du code des assurances définit les contrats d’assurance collective de dommages comme « un contrat souscrit par une personne morale en vue de l’adhésion par toute personne intéressée par le bénéfice des garanties pour la couverture des risques autres que ceux mentionnés au 1er alinéa de l’article L. 129‑1 du Code des assurances. »

Cette garantie affinitaire couvre :

– soit le risque de mauvais fonctionnement, de perte y compris de vol ou d’endommagement des biens fournis ;

– soit l’endommagement ou la perte, y compris le vol de bagages et les autres risques liés à un voyage.

Schématiquement, le consommateur adhère à cette assurance collective de dommages par l’intermédiaire d’un courtier, personne morale, qui a préalablement souscrit et négocié les termes du contrat avec un assureur, dont la prime d’assurance, les risques garantis et les exclusions de la police.

C’est donc une assurance complémentaire optionnelle à laquelle il est possible de souscrire à l’achat d’un produit ou d’un service. Dans la pratique, elle est presque systématiquement proposée lors d’achat dans des magasins spécialisés ou des grandes surfaces.

L’assurance affinitaire répond à un nouveau besoin de service et constitue un marché important. Les assurances affinitaires bénéficient de fortes perspectives de croissance, grâce à l’explosion de la vente des objets, technologiques et nomades et grâce au développement du e‑commerce.

Les assurances affinitaires représentent 13 % du total des dossiers du médiateur de l’assurance en 2021. Une tendance qui s’est accélérée depuis le début de l’année. 

Les pratiques d’un groupe commercialisant ce type d’assurance figurent régulièrement dans l’actualité. Depuis 2018, les associations de consommateurs aux côtés de milliers d’entre eux dénoncent leurs agissements. Par exemple, une association de défense des droits des consommateurs comptabilise plus de 6 000 plaintes à ce sujet. Encore aujourd’hui, des personnes découvrent sur leurs relevés de banque des prélèvements indus. Dans le meilleur des cas, ces opérations ont commencé il y a quelques mois et se limitent à une vingtaine d’euros par mois. Mais nombreux sont ceux qui se rendent compte que leur compte fait l’objet depuis des années de plusieurs prélèvements mensuels pour un montant total qui peut dépasser les 100 €. Pour beaucoup, le total des versements indus peut atteindre plusieurs milliers d’euros, après deux ou trois années.

La Direction générale de la concurrence et de la consommation (DGCCRF) a diligenté de nombreuses enquêtes suite aux anomalies constatées. Elle a relevé que certaines étaient constitutives du délit de pratiques commerciales trompeuses visé aux articles L. 121‑2 et L. 121‑3 du code de la consommation. Elle l’explique dans un communiqué du 14 juin 2019. Ce groupe a aussi fait l’objet de poursuites par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui lui a interdit d’exercer l’activité de distribution de contrats d’assurance.

Les pratiques dénoncées de façon concordante par les consommateurs concernent l’absence de prise en compte effective de leur demande de résiliation, et d’autre part, le maintien des prélèvements bancaires sur les comptes des intéressés malgré la confirmation orale de leur résiliation par les conseillers. Plusieurs actions judiciaires sont aujourd’hui en cours.

Le législateur doit se saisir de cette question. Nos voisins ont légiféré à ce sujet. Par exemple, les contrats d’assurance pour téléphones portables, ordinateurs ou tablettes, qui débutent par une période de gratuité sont interdits en Belgique depuis novembre 2022.

Suite à la loi mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022, au 1er janvier 2023, l’assuré dispose d’un délai de 30 jours pour renoncer au contrat d’assurance affinitaire. Et en cas de période de gratuité, le délai de 30 jours sera décompté à partir de la date de paiement de tout ou partie de la première prime.

Bien que la plupart du temps la souscription de contrat d’assurance affinitaire ne pose pas de problème pour les consommateurs qui sont bien informés, il est nécessaire d’apporter d’autres modifications pour éviter que des dérives ne soient possibles, qui ne sont cependant le fait que d’un très petit nombre d’assureurs.

La présente proposition de loi propose de remédier aux situations préjudiciables que connaissent aujourd’hui des milliers de consommateurs.

L’article unique a pour objet de permettre une résiliation à tout moment du contrat d’assurance affinitaire comme c’est le cas pour l’assurance emprunteur. En effet, l’impossibilité de résilier cette assurance avant la première année est aujourd’hui très préjudiciable pour de nombreux consommateurs. Cette durée obligatoire apparait comme disproportionnée par rapport au prix d’acquisition du bien high‑tech ou de téléphonique dont la durée de vie n’excède parfois pas une année. De surcroit, les évolutions technologiques impliquent que les consommateurs revendent rapidement leur bien de téléphonie ou leur ordinateur afin de leur éviter une décote sur la valeur du bien, la garantie n’a alors plus d’objet.

 


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proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 113‑12‑2 du code des assurances, il est inséré un article L. 113‑12‑3 ainsi rédigé :

« Art. L. 113123. – Par dérogation à l’article L. 113‑12, l’assuré qui adhère à des fins non professionnelles à un contrat d’assurance collectif à adhésion facultative constituant un complément d’un bien ou d’un service vendu par un fournisseur peut renoncer à ce contrat, sans frais ni pénalités, à tout moment, dès l’adhésion à cette police d’assurance.

« La proposition d’assurance ou le contrat comporte, à peine de nullité, un modèle de rédaction destiné à faciliter l’exercice de la faculté de résiliation.

« L’assuré notifie à l’assureur ou à son représentant sa demande de résiliation dans les conditions prévues à l’article L. 113‑14.

« Ce droit de résiliation appartient exclusivement à l’assuré.

« Pendant toute la durée du contrat d’assurance et par dérogation à l’article L. 113‑4, l’assureur ne peut pas résilier ce contrat d’assurance pour cause d’aggravation du risque, sauf dans certaines conditions définies par décret en Conseil d’État, résultant d’un changement de comportement volontaire de l’assuré. »