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N° 2672

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 mai 2024.

PROPOSITION DE LOI

visant à défendre la souveraineté audiovisuelle française,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Philippe BALLARD, Mme Bénédicte AUZANOT, M. Christophe BARTHÈS, M. José BEAURAIN, M. Pierrick BERTELOOT, M. Bruno BILDE, Mme Sophie BLANC, M. Frédéric BOCCALETTI, M. Frédéric CABROLIER, M. Sébastien CHENU, M. Roger CHUDEAU, Mme Annick COUSIN, M. Jocelyn DESSIGNY, Mme Edwige DIAZ, Mme Christine ENGRAND, M. Frédéric FALCON, M. Grégoire DE FOURNAS, Mme Stéphanie GALZY, M. Frank GILETTI, M. Christian GIRARD, M. José GONZALEZ, Mme Florence GOULET, M. Daniel GRENON, Mme Marine HAMELET, M. Laurent JACOBELLI, M. Alexis JOLLY, Mme Laure LAVALETTE, Mme Julie LECHANTEUX, Mme Gisèle LELOUIS, M. Hervé DE LÉPINAU, Mme Katiana LEVAVASSEUR, Mme Marie-France LORHO, M. Philippe LOTTIAUX, M. Alexandre LOUBET, Mme Michèle MARTINEZ, M. Kévin MAUVIEUX, M. Nicolas MEIZONNET, Mme Joëlle MÉLIN, M. Pierre MEURIN, M. Serge MULLER, M. Julien ODOUL, Mme Mathilde PARIS, Mme Caroline PARMENTIER, M. Kévin PFEFFER, Mme Lisette POLLET, Mme Angélique RANC, M. Julien RANCOULE, Mme Laurence ROBERT-DEHAULT, M. Emeric SALMON, M. Philippe SCHRECK, M. Lionel TIVOLI, M. Romain BAUBRY, M. Emmanuel BLAIRY, M. Thibaut FRANÇOIS, M. Jordan GUITTON, M. Stéphane RAMBAUD, Mme Catherine JAOUEN, M. Jorys BOVET, Mme Véronique BESSE,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Le cadre juridique du contrôle sectoriel des concentrations spécifique aux médias est obsolète, dans ses outils et dans son approche.[…] il apparaît à plus d’un titre inadapté et complexe. Il est, en premier lieu, inadapté à la révolution numérique. »

Rapport de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires culturelles, mars 2022.

« Il faut revoir la réglementation sur les concentrations. Il faut pouvoir envisager le plurimédia qui aujourd’hui n’est pas intégré. »

Rachida Dati, ministre de la Culture, mars 2024.

« Il est plus que temps de revisiter la réglementation anticoncentration construite à l’heure de la diffusion par voie hertzienne, pour permettre aux autorités de régulation, et en particulier à l’Arcom, de mieux traiter la dimension plurimédia des groupes. »

RochOlivier Maistre, président de l’Arcom, mars 2024.

 

Le secteur de l’audiovisuel connaît depuis plusieurs décennies de profondes transformations dont la plus significative est la création de nombreuses plateformes de vidéos à la demande par abonnement (SVOD). Cela a augmenté de manière exponentielle l’offre de programmes et concurrencé de manière frontale les chaînes gratuites françaises hertziennes.

Face à ces évolutions, la puissance publique est demeurée jusqu’à présent en retrait, peinant à réformer un cadre législatif posé en 1986 pour réguler un univers strictement national à une époque où Internet n’existait pas. Le développement des plateformes principalement américaines en France a donc été d’autant plus aisé que ces dernières n’ont pas eu à respecter l’ensemble des contraintes législatives et réglementaires qui s’appliquent à leurs concurrents proposant des services principalement linéaires. Elles n’ont été soumises que récemment à des obligations d’investissement dans la production à hauteur de 20 % de leur chiffre d’affaires.

Face à cela, la réglementation concernant les concentrations n’a eu pour effet que de restreindre le développement du secteur français en bloquant par exemple le rapprochement entre TF1 et M6.

Aujourd’hui nous ne pouvons plus ignorer qu’il y a une concurrence frontale entre les offres qui sont portées par les plateformes via Internet comme Netflix, Disney, Amazon et YouTube et les acteurs historiques français. Nous devons briser ces asymétries qui pénalisent l’ensemble des médias par rapport à leurs concurrents délinéarisés.

C’est pourquoi il est indispensable à nos yeux de revenir sur certaines normes anti‑concentration qui paraissent totalement dépassées face aux enjeux actuels du marché audiovisuel.

Nous devons adapter la réglementation pour faire face à la concurrence des plateformes afin de promouvoir l’exception culturelle française et favoriser à terme l’émergence de grands groupes français pour peser sur la scène internationale. Dans leur rapport conjointement mené de 2022, l’inspection générale des finances et l’inspection générale des affaires culturelles déclaraient en ce sens que « cette concurrence accrue justifie, du point de vue des éditeurs, des stratégies visant à constituer des « champions » audiovisuels nationaux ou européens, à même de rivaliser avec les plateformes numériques américaines. »

C’est pourquoi il est indispensable d’adapter la réglementation actuelle en assouplissant les disposition anti‑concentration face à la concurrence des plateformes.

L’article 1er vise donc à modifier l’article 42‑3 de la loi du 30 septembre 1986 afin de porter à un an la durée pendant laquelle le détenteur d’une autorisation d’émettre ne peut céder le contrôle de l’entreprise qui édite les programmes. Cette disposition vise à ne pas retarder inutilement la mise en œuvre de projets permettant d’adapter les entreprises du secteur face aux grandes plateformes tout en évitant d’éventuelles dérives spéculatives.

L’article 2 vise lui à modifier l’article 41 de cette même loi qui fixe le cadre applicable pour les cumuls d’autorisation pour les services de radio et de télévisions, afin de supprimer la limite de sept autorisations d’émettre par la voie hertzienne en mode numérique. Le CSA en 2004 lors du rehaussement de ce plafond avait déjà considéré que celui‑ci créait « une situation de blocage » pour les différents opérateurs du secteur.

 

 


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proposition de loi

Article 1er

La seconde phrase du premier alinéa de l’article 42‑3 de la loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifiée :

1° Les mots : « de cinq ans » sont remplacés par les mots : « d’un an » ;

2° Sont ajoutés les mots : « ou si l’Autorité estime que cette modification de contrôle n’a pas un objectif manifestement spéculatif. »

Article 2

Au quatrième alinéa de l’article 41 de la loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les mots : « d’un nombre maximal de sept » sont remplacés par les mots : « de plusieurs autorisations ».