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N° 215
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 25 août 2022.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
affirmant le soutien de l’Assemblée nationale à l’Ukraine
et condamnant la guerre menée par la Fédération de Russie,
présentée par Mesdames et Messieurs
Pieyre‑Alexandre ANGLADE, Aurore BERGÉ, Benjamin HADDAD, Constance LE GRIP, Charles SITZENSTUHL, Jean‑Louis BOURLANGES, Jean‑Paul MATTEI, Laurent MARCANGELI, les membres du groupe Renaissance (1), les membres du groupe Démocrate (2) et des membres du groupe Horizons et apparentés (3),
députés.
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(1) Mesdames et Messieurs : Caroline Abadie, Damien Adam, Sabrina Agresti‑Roubache, Éric Alauzet, David Amiel, Pieyre‑Alexandre Anglade, Jean‑Philipe Ardouin, Antoine Armand, Quentin Bataillon, Xavier Batut, Belkhir Belhaddad, Mounir Belhamiti, Fanta Berete, Aurore Bergé, Benoît Bordat, Éric Bothorel, Florent Boudié, Chantal Bouloux, Bertrand Bouyx, Pascale Boyer, Yaël Braun‑Pivet, Maud Bregeon, Anthony Brosse, Anne Brugnera, Danielle Brulebois, Stéphane Buchou, Françoise Buffet, Céline Calvez, Éléonore Caroit, Lionel Causse, Thomas Cazenave, Jean‑René Cazeneuve, Pierre Cazeneuve, Émilie Chandler, Clara Chassaniol, Yannick Chenevard, Mireille Clapot, Fabienne Colboc, François Cormier‑Bouligeon, Laurence Cristol, Dominique Da Silva, Christine Decodts, Julie Delpech, Frédéric Descrozaille, Benjamin Dirx, Nicole Dubré‑Chirat, Philippe Dunoyer, Stella Dupont, Sophie Errante, Philippe Fait, Marc Ferracci, Jean‑Marie Fiévet, Jean‑Luc Fugit, Thomas Gassilloud, Anne Genetet, Raphaël Gérard, Hadrien Ghomi, Éric Girardin, Joël Giraud, Olga Givernet, Charlotte Goetschy‑Bolognese, Guillaume Gouffier‑Cha, Jean‑Carles Grelier, Marie Guévenoux, Claire Guichard, Philippe Guillemard, Benjamin Haddad, Nadia Hai, Yannick Haury, Pierre Henriet, Laurence Heydel Grillere, Alexandre Holroyd, Sacha Houlié, Servane Hugues, Monique Iborra, Alexis Izard, Jean‑Michel Jacques, Caroline Janvier, Guillaume Kasbarian, Fadila Khattabi, Brigitte Klinkert, Daniel Labaronne, Emmanuel Lacresse, Amélia Lakrafi, Michel Lauzzana, Pascal Lavergne, Sandrine Le Feur, Didier Le Gac, Gilles Le Gendre, Constance Le Grip, Anaïg Le Meur, Christine Le Nabour, Nicole Le Peih, Fabrice Le Vigoureux, Marie Lebec, Vincent Ledoux, Mathieu Lefèvre, Patricia Lemoine, Brigitte Liso, Jean‑François Lovisolo, Sylvain Maillard, Laurence Maillart‑Méhaignerie, Jacqueline Maquet, Louis Margueritte, Christophe Marion, Sandra Marsaud, Didier Martin, Denis Masséglia, Stéphane Mazars, Graziella Melchior, Ludovic Mendes, Lysiane Métayer, Nicolas Metzdorf, Marjolaine Meynier‑Millefert, Paul Midy, Benoit Mournet, Karl Olive, Nicolas Pacquot, Sophie Panonacle, Astrid Panosyan‑Bouvet, Didier Paris, Charlotte Parmentier‑Lecocq, Emmanuel Pellerin, Patrice Perrot, Anne‑Laurence Petel, Michèle Peyron, Béatrice Piron, Claire Pitollat, Barbara Pompili, Jean‑Pierre Pont, Éric Poulliat, Natalia Pouzyreff, Rémy Rebeyrotte, Robin Reda, Cécile Rilhac, Véronique Riotton, Stéphanie Rist, Marie‑Pierre Rixain, Charles Rodwell, Xavier Roseren, Jean‑François Rousset, Lionel Royer‑Perreaut, Thomas Rudigoz, Laetitia Saint‑Paul, Mikaele Seo, Freddy Sertin, Charles Sitzenstuhl, Philippe Sorez, Bertrand Sorre, Violette Spillebout, Bruno Studer, Liliana Tanguy, Sarah Tanzilli, Jean Terlier, Prisca Thevenot, Huguette Tiegna, Stéphane Travert, Annie Vidal, Patrick Vignal, Corinne Vignon, Lionel Vuibert, Guillaume Vuilletet, Christopher Weissberg, Éric Woerth, Caroline Yadan, Jean‑Marc Zulesi.
(2) Mesdames et Messieurs : Anne‑Laure Babault, Erwan Balanant, Géraldine Bannier, Philippe Berta, Christophe Blanchet, Philippe Bolo, Jean‑Louis Bourlanges, Blandine Brocard, Vincent Bru, Mickaël Cosson, Laurent Croizier, Jean‑Pierre Cubertafon, Romain Daubié, Mathilde Desjonquères, Laurent Esquenet‑Goxes, Marina Ferrari, Estelle Folest, Bruno Fuchs, Maud Gatel, Luc Geismar, Perrine Goulet, Frantz Gumbs, Cyrille Isaac‑Sibille, Élodie Jacquier‑Laforge, Sandrine Josso, Mohamed Laqhila, Fabien Lainé, Florence Lasserre, Philippe Latombe, Pascal Lecamp, Delphine Lingemann, Aude Luquet, Emmanuel Mandon, Éric Martineau, Jean‑Paul Mattei, Sophie Mette, Bruno Millienne, Louise Morel, Hubert Ott, Jimmy Pahun, Frédéric Petit, Maud Petit, Josy Poueyto, Richard Ramos, Sabine Thillaye, Nicolas Turquois, Laurence Vichnievsky, Philippe Vigier, Frédéric Zgainski.
(3) Mesdames et Messieurs : Xavier Albertini, Henri Alfandari, Béatrice Bellamy, Agnès Carel, Paul Christophe, Yannick Favennec‑Bécot, Félicie Gérard, François Gernigon, François Jolivet, Loïc Kervran, Stéphanie Kochert, Luc Lamirault, Jean‑Charles Larsonneur, Anne Le Hénanff, Didier Lemaire, Lise Magnier, Laurent Marcangeli, Thomas Mesnier, Naïma Moutchou, Jérémie Patrier‑Leitus, Plassard, Marie‑Agnès Poussier‑Winsback, Jean‑François Portarrieu, Philippe Pradal, Isabelle Rauch, Vincent Thiébaut, Frédéric Valletoux, André Villiers, Anne‑Cécile Violland.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Depuis le 24 février 2022, la guerre fait rage en Ukraine, au sein même de l’Europe. Refusant la main tendue du dialogue diplomatique, Vladimir Poutine a entraîné la Russie dans une guerre brutale et injustifiée, en attaquant un pays souverain et démocratique.
Il s’agit d’une offensive d’une violence inouïe, d’une négation des principes humanitaires les plus essentiels. L’armée russe frappe indistinctement les cibles civiles et militaires et les nombreux crimes de guerre constatés devront être jugés devant les juridictions internationales.
Cette guerre est totale, massive. Elle n’est pas ciblée, comme la propagande russe cherche à le faire croire. Ce sont des enfants, des femmes et des hommes innocents qui sont les victimes des chars, des missiles et des tirs, ou qui sont obligés de fuir leur pays par centaines de milliers et dans des conditions effroyables.
L’invasion de l’Ukraine a changé la face de l’Europe et du monde pour les années à venir. L’Ukraine a été attaquée pour ce qu’elle est : un pays libre, démocratique et ouvert qui regarde vers l’Europe.
Dans ce moment si singulier, chacun a ressenti le tournant de l’histoire que nous sommes en train de vivre. Nous savons que notre avenir commun et notre capacité, à nous Européens, de faire vivre notre modèle dans ce siècle se décident maintenant.
Car Vladimir Poutine ne veut pas seulement rayer l’Ukraine de la carte, il veut redéfinir à sa manière l’ordre de sécurité sur le continent européen.
Ce moment de bascule, les dirigeants européens l’ont saisi. Là où le Président russe espérait la division, il a trouvé un front uni. Là où il pensait voir l’Europe se disloquer, il la voit se renforcer comme jamais.
Face à cette guerre, dans cette situation d’urgence, nous devons agir avec détermination. C’est ce que nous faisons avec nos partenaires, en prenant des sanctions sévères à l’encontre de la Russie et en apportant tout notre soutien à la résistance ukrainienne.
Soutenir l’Ukraine, c’est reconnaitre également l’aspiration européenne de son peuple. L’avenir de l’Ukraine est au sein de la famille européenne. C’est le message que les Ukrainiens ont exprimé par leur combat acharné et héroïque en faveur de la liberté.
Enfin, ce conflit effroyable nous révèle la nécessité de renforcer l’Europe afin qu’elle devienne une puissance souveraine, indépendante et capable de défendre ses peuples et ses valeurs. Oui, défendre nos valeurs démocratiques a un prix. Un prix déjà élevé. Mais si nous ne sommes pas capables de résister aujourd’hui, alors nous perdrons tout ce que nous avons construit : la liberté, la paix et la sécurité pour les générations à venir en Europe.
En ce 24 août, jour de la fête nationale d’indépendance de l’Ukraine et après six mois de guerre, la représentation nationale française affirme donc, par cette proposition de résolution, sa condamnation ferme de l’agression perpétrée par la Russie ainsi que son soutien total à l’Ukraine et à son peuple.
proposition de rÉsolution
Article unique
L’Assemblée nationale,
Vu l’article 34‑1 de la Constitution,
Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,
Vu l’article 2 de la Charte des Nations Unies,
Vu les articles 7, 8 et 8 bis du Statut de Rome de la Cour pénale internationale,
Vu les articles 13 et 14 de la Convention (III) de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre du 12 août 1949,
Vu la Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949,
Vu le Préambule de la Convention sur la sûreté nucléaire adoptée le 17 juin 1994 par la Conférence diplomatique de l’Agence internationale de l’énergie atomique,
Vu la résolution A/RES/ES‑11/1de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies en date du 2 mars 2022 sur l’agression contre l’Ukraine,
Vu la résolution A/RES/68/262 de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies en date du 27 mars 2014 sur l’intégrité territoriale de l’Ukraine,
Vu l’article 21 du traité sur l’Union européenne,
Vu l’article 196 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,
Vu les conclusions du Conseil européen du 24 février 2022, des 24 et 25 mars 2022 et des 30 et 31 mai 2022,
Vu les conclusions du Sommet de Versailles des 10 et 11 mars 2022,
Vu les résolutions du Parlement européen 2022/2564 en date du 1er mars 2022 sur l’agression russe contre l’Ukraine et 2022/2560 du 7 avril 2022 sur les conclusions du Conseil européen des 24 et 25 mars 2022, y compris les dernières évolutions de la guerre en Ukraine et les sanctions de l’Union contre la Russie ainsi que leur mise en œuvre ;
Considérant l’agression militaire dont fait l’objet l’Ukraine de la part de la Fédération de Russie depuis le 24 février 2022 ;
Considérant la violation manifeste du droit international que constitue cette agression ;
Considérant la persistance, voire l’intensification de cette agression et la possibilité qu’elle puisse durer encore longtemps ;
Considérant la tragédie que constitue cette agression pour le peuple ukrainien ;
Considérant les besoins multiples – financiers, militaires, humanitaires ou de toute autre nature – de l’Ukraine face à cette agression ;
Considérant le coût que représentera la reconstruction du pays pour l’État ukrainien une fois le conflit terminé ;
Considérant les millions de réfugiés ukrainiens ayant fui la guerre et leur pays :
Considérant que la Fédération de Russie s’est rendue coupable d’exactions dont l’atrocité heurte la conscience et notre conception de la vie et de la dignité humaines ;
Considérant que les exactions dont s’est rendue coupable la Fédération de Russie appellent une condamnation par la justice internationale, cette dernière ne pouvant ignorer la commission de tels actes,
Considérant la menace grave qui pèse sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires ukrainiennes en raison de la guerre menée par la Fédération de Russie ;
Considérant que la présence des forces armées de la Fédération de Russie à proximité de la centrale nucléaire de Zaporijia augmente significativement le risque d’un accident aux conséquences dévastatrices ;
Considérant l’annexion illégale de la Crimée par la Fédération de Russie ;
Considérant les liens de solidarité et de fraternité qui unissent l’Union européenne au peuple ukrainien ;
Considérant qu’il est du devoir de la France et de l’Union européenne de venir en aide à l’Ukraine ;
Considérant que la guerre en Ukraine a des conséquences mondiales et appelle une réponse coordonnée à l’échelle européenne et à l’échelle internationale ;
Considérant que les agissements de la Fédération de Russie constituent une menace pour l’Europe et appellent, de fait, un renforcement de l’autonomie stratégique européenne ;
Affirme son soutien le plus total à l’Ukraine et condamne fermement la guerre brutale et injustifiée lancée par la Fédération de Russie à l’encontre du peuple ukrainien ;
Invite le Gouvernement et l’Union européenne à favoriser toute initiative de nature à encourager la fin du conflit ;
Invite l’Union européenne à continuer d’assurer l’Ukraine de son soutien humanitaire, financier et militaire aussi longtemps que durera le conflit ;
Invite le Gouvernement et l’Union européenne à renforcer l’aide humanitaire à destination des civils injustement et dramatiquement affectés par la guerre ;
Soutient le projet d’une nouvelle aide financière à l’Ukraine pour l’aider à faire face aux conséquences de la guerre et permettre à l’État de continuer à remplir ses fonctions essentielles ;
Invite l’ensemble des États membres de l’Union ainsi que tout État voisin à contribuer dans la mesure de ses capacités au mécanisme de protection civile de l’UE et à la mise en place de corridors de solidarité en vue de faciliter les exportations de denrées alimentaires en provenance de l’Ukraine ;
Souhaite que la France continue de prendre une part active dans l’accueil des réfugiés ukrainiens et invite à cet effet le Gouvernement à mettre à disposition des moyens substantiels ;
Invite l’Union européenne et ses États membres à poursuivre et à renforcer les livraisons d’armes à destination de l’Ukraine, si besoin en augmentant le montant des crédits initialement dévolus à la Facilité européenne pour la paix ;
Condamne le crime d’agression, au sens de la Cour pénale internationale, dont s’est rendue coupable la Fédération de Russie vis‑à‑vis de l’Ukraine ;
Condamne les crimes de guerre, voire les crimes contre l’humanité, dont est fortement soupçonnée de s’être rendue coupable la Fédération de Russie vis‑à‑vis de l’Ukraine, des populations civiles ukrainiennes et des prisonniers de guerre ukrainiens ;
Dénonce les actes de torture, les exécutions et autres crimes perpétrés par la Fédération de Russie dans le cadre de cette guerre ;
Appelle la Fédération de Russie à respecter le droit international humanitaire ;
Souhaite que le Gouvernement poursuive activement son soutien à la collecte sur le terrain puis à la conservation des preuves de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, afin que les coupables de tels crimes puissent être jugés par la Cour pénale internationale à l’issue du conflit ;
Insiste, de fait, sur l’absolue nécessité que les exactions épouvantables commises par la Fédération de Russie ne demeurent pas impunies et demande, par conséquent, à l’Union européenne et à ses États membres de continuer à soutenir sans retenue la Cour pénale internationale dans son travail d’enquête sur tout possible crime de guerre commis sur le territoire ukrainien depuis le début de l’agression ;
Insiste sur la nécessité de poursuivre la lutte contre toute forme de désinformation, en particulier celle déployée par l’appareil d’État russe, alors que ce pays en a fait une arme majeure dans ce conflit ;
Se félicite, par conséquent, de la confirmation récente par la Cour de justice de l’Union européenne de l’interdiction de diffusion de Russia Today dans l’Union ;
Insiste sur l’urgente nécessité de faciliter le déploiement d’une mission d’experts de l’Agence internationale de l’énergie atomique à la centrale nucléaire de Zaporijia, ainsi qu’à l’ensemble des installations nucléaires de l’Ukraine ;
Demande la mise en place d’une zone démilitarisée autour de la centrale nucléaire de Zaporijia ;
Invite l’Union européenne et la communauté internationale à poursuivre dans l’instauration de sanctions à l’encontre de la Fédération de Russie, afin de réduire au maximum la capacité du pays à financer la guerre et attire l’attention sur la nécessité d’accroître l’efficacité des sanctions existantes ;
Souhaite que l’Union européenne déploie un plan de soutien à la reconstruction de l’Ukraine une fois le conflit terminé ;
Salue l’octroi du statut d’État candidat à l’adhésion à l’Union européenne à l’Ukraine et à la Moldavie ;
Invite les États membres de l’Union européenne à poursuivre la construction d’une politique de défense et de sécurité européenne, de façon complémentaire et en coopération avec l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord ;
Souhaite, en conséquence des agissements de la Fédération de Russie contre les intérêts de l’ensemble de l’Union européenne, que la France continue de prendre une part active dans le renforcement de l’autonomie stratégique européenne.