N° 2305

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 7 mars 2024.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire (n° 2197).

PAR M. Jean-Luc FUGIT

Député

——

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES,

PAR M. Antoine ARMAND

Député

Avant-propos – Synthèse – Commentaires des articles – Avis – Annexes

 

 

Voir les numéros :

 Sénat : 229, 300, 301, 296 et T.A. 66 (2023-2024).

 Assemblée nationale : 2197.


SOMMAIRE

___

Pages

avant-propos DU RAPPORTEUR

SYNTHèse

COMMENTAIREs des articles du projet de loi

titre iER L’autoritÉ de sÛretÉ nuclÉaire et de radioprotection

Chapitre Ier Missions et fonctionnement de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Section 1 Dispositions modifiant le code de l’environnement

Article 1er (supprimé) Création de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) qui rassemblera les compétences de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

Article 2 Fonctionnement, déontologie, indépendance et transparence de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Article 2 bis Règles de parité applicables à la composition du collège de l’ASNR

Article 2 ter (supprimé) Précisions sur l’activité de la commission des sanctions dans le rapport d’activité de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Article 3 Activités pouvant être exercées par l’ASNR, notamment en matière de recherche

Article 4 Dispositions relatives à la transparence, l’information et l’association du public

Article 4 bis (supprimé) Rôle et composition de la Commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs

Article 4 ter  Correction d’une erreur rédactionnelle

Article 4 quater Transmission à l’Opecst du rapport annuel d’activité de l’ASNR

Section 2 Dispositions transitoires

Article 5 Transfert des biens, droits et obligations de l’IRSN et continuité du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

Chapitre II Ressources humaines

Section 1 Dispositions modifiant le code de l’environnement

Article 6 Statut des personnels de la future autorité, instances et règles du dialogue social et harmonisation des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature

Section 2 Dispositions transitoires

Article 7 Transfert des salariés de l’IRSN à l’ASNR et au CEA

Article 8 Dispositions transitoires en matière de conventions et d’accord collectifs

Article 9 Possibilité pour les agents contractuels et les salariés privés de la future autorité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d’accéder à un corps de fonctionnaire

Article 10 Dispositions transitoires tendant à garantir la continuité de la représentation sociale au sein de la future autorité

Article 11 Augmentation des rémunérations versées au sein de l’IRSN et de l’ASN ; élaboration d’un rapport du Gouvernement et d’évaluations par l’ASNR sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à la nouvelle autorité

Article 11 bis (nouveau) Consultation des comités sociaux de l’ASN et de l’IRSN sur des dispositions portant organisation et fonctionnement des services de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection ainsi que le projet de règlement intérieur de cette dernière

Chapitre III Le haut-commissaire à l’énergie atomique

Article 12 Rattachement du haut-commissaire à l’énergie atomique au Premier ministre

Chapitre IV Dispositions de coordination et finales

Article 13 Soumission de la recherche de l’ASNR à l’évaluation du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) et coordination

Article 14 Conditions de nomination du président de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection et actualisation de références législatives

Article 15 Entrée en vigueur

Article 15 bis (nouveau) Rapports de suivi de la mise en œuvre de la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

TITRE II Adaptation des règles de la commande publique aux projets nucléaires

Chapitre Ier Sécurisation des procédures relatives à la commande publique pour les projets nucléaires

Article 16 Faculté de déroger à l’obligation d’allotissement des marchés publics pour certains projets dans le domaine nucléaire

Article 17 Faculté de déroger à la durée maximale des accords-cadres des marchés publics pour certains projets nucléaires

Article 17 bis Faculté de prendre en compte la crédibilité des offres dans les critères d’attribution d’un marché public pour certains projets nucléaires

Article 17 ter Faculté de recourir à des avenants pour modifier un marché public sans remise en concurrence pour certains projets nucléaires

Chapitre II Mesures destinées à renforcer la protection des intérêts fondamentaux de la Nation en matière nucléaire

Article 18 Dérogation aux obligations de publicité et de mise en concurrence pour les marchés concernant les domaines nucléaires les plus sensibles

avis fait au nom de la commission des affaires économiques

liste des personnes auditionnées par M. jean-Luc fugit, rapporteur

liste des personnes auditionnées par M. Antoine armand, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

 


   avant-propos DU RAPPORTEUR

Le système français de contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection est un système robuste, à l’efficacité démontrée, mais qui va être confronté au cours des prochaines années à un nouveau contexte nucléaire lié notamment à la relance de la filière et aux nouveaux défis que cela pose. Ce système est actuellement fondé sur, d’une part, une Autorité de sureté nucléaire (ASN) créée en 2006 et chargée de la prise de décision et, d’autre part, un Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), créé en 2002. Il résulte de réorganisations successives intervenues depuis plus d’un demi‑siècle, qui ont eu pour objectif de prendre en compte les évolutions de la politique industrielle française, les normes internationales de sûreté et le retour d’expérience d’accidents survenus à l’étranger, afin de renforcer toujours plus le contrôle de la sûreté nucléaire, qui relève en premier lieu de l’exploitant.

En effet, dès 1945, sur le conseil du physicien Frédéric Joliot-Curie, le général de Gaulle décide de créer un organisme de recherche dédié aux applications civiles et militaires des sciences de l’atome : le Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Au début des années 1960, un nouvel acteur apparaît dans le paysage français du nucléaire : Électricité de France (EDF) qui dispose d’un monopole sur l’étude, la réalisation et l’exploitation des moyens de production d’électricité. En l’absence de législation ou de réglementation spécifiques, aucune disposition ne définit précisément les modalités de contrôle des installations nucléaires. De ce fait, EDF se tourne naturellement vers la commission de sûreté des installations atomiques du CEA. Pour suivre l’accélération du plan nucléaire civil français, un nouvel organisme de contrôle, rattaché au ministère de l’industrie, est créé en 1973 : le service central de sûreté des installations nucléaires (SCSIN). Si l’autorité de décision en matière de sûreté est désormais le SCSIN, le rôle d’expertise technique du CEA est conforté, car le SCSIN n’est pas doté de moyens d’expertise propres et doit donc faire appel aux ressources du CEA, au sein duquel un département de sûreté nucléaire (DSN), regroupant l’ensemble des compétences en matière de sûreté, a été créé en 1970.

Cette organisation reste néanmoins imparfaite puisque le CEA assume un rôle d’expert pour la sûreté tout en étant lui-même exploitant d’installations nucléaires. Aussi, est-il rapidement envisagé la création d’un organisme d’expertise totalement indépendant du CEA. Les oppositions à ce projet sont vives : les organisations syndicales y voient un début de démantèlement du CEA. Un compromis est trouvé avec la création l’Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN), en 1976, qui reste rattaché au CEA. L’idée de la nécessité d’un contrôle plus indépendant conduit, en 1991, à transformer le SCSIN, placé sous l’autorité du seul ministre chargé de l’énergie, en une direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN) placée sous l’autorité conjointe des ministres chargés de l’énergie et de l’environnement.

En 1998, M. Jean-Yves Le Déaut, à l’époque président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), rédige à la demande du Premier ministre M. Lionel Jospin, un rapport sur le système français de radioprotection, de contrôle et de sécurité nucléaire. Ce rapport préconise la création d’une autorité administrative indépendante (AAI) chargée du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, ainsi que d’une agence indépendante du CEA, regroupant l’IPSN et l’Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI). Trois années plus tard, l’article 5 de la loi du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale prévoit la création de l’IRSN à partir de l’IPSN et de l’OPRI. Il est finalement institué en 2002 sous la forme d’un établissement public industriel et commercial (Epic) relevant de plusieurs tutelles ministérielles.

Puis, en 2006, la loi n° 2006-686 relative à la transparence et à la sûreté nucléaire crée l’ASN sous la forme d’une AAI qui exerce des missions de contrôle des activités et des exploitants nucléaires civils ainsi que des missions d’information du public. En situation d’urgence radiologique, elle est chargée de proposer aux pouvoirs publics les actions de protection à mettre en place pour protéger la population et l’environnement. Elle dispose d’expertises internes sur certains champs spécifiques, notamment sur la protection de l’environnement et les équipements nucléaires sous pression.

Ces deux entités, l’une chargée de la décision en matière de sûreté nucléaire et l’autre de l’expertise, travaillent ensemble, le plus souvent en mode projet, « au pied du réacteur », comme le rappelle l’Opecst dans son rapport sur la réforme du contrôle et de la recherche en sûreté nucléaire et radioprotection du 11 juillet 2023 ([1]). Loin de distinguer de manière rigide l’expertise et la décision, comme l’approche institutionnelle pourrait en induire l’idée, il existe un continuum étroit entre les deux activités. Le niveau de la sûreté nucléaire est donc fonction de la qualité des échanges entre la sphère de contrôle et l’exploitant, garant de la sûreté de ses installations. Cela suppose transparence et esprit de dialogue. Ainsi, les relations qu’entretiennent l’ASN et l’IRSN ne sont pas celles d’un « pouvoir » et d’un « contre-pouvoir ». Les deux organisations ont d’ailleurs trop pâti de cette présentation polémique qui ne correspond en rien à la réalité. Le décret n° 2016-283 du 10 mars 2016 dispose d’ailleurs que le président de l’ASN siège au conseil d’administration de l’IRSN, mais aussi que l’ASN rend un avis sur les programmes de recherche de l’IRSN.

Cette séparation entre une autorité de décision et un expert technique n’est cependant pas un modèle répandu partout. Comme l’Opecst l’a souligné dans son rapport de juillet 2023 : « à l’étranger, plusieurs pays ont opté pour des modèles dans lesquels les compétences d’expertise et de décision sont réunies et ont défini des processus en ce sens ». C’est notamment le cas aux États-Unis, au Canada ou au Japon, même si chaque pays a ses spécificités et son histoire propres. D’autres pays s’inspirent en revanche du « modèle français », tels que la Belgique. L’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ne recommande pas de modèle spécifique mais indique que l’organisme de réglementation peut obtenir des avis ou des services à caractère technique ou spécialisé selon les besoins pour appuyer ses fonctions réglementaires, sans que cela l’exonère des responsabilités qui lui ont été confiées.

Néanmoins, le nouveau contexte nucléaire en cours d’émergence va susciter une charge de travail accrue pour les autorités de contrôle de la sûreté et de la sécurité nucléaires. L’annonce par le Président de la République, en février 2022, d’un plan de relance du nucléaire, la prolongation des réacteurs au-delà de cinquante ou soixante ans, les évolutions technologiques, les impacts du changement climatique, le cyberterrorisme, sont autant de défis auxquels peuvent s’ajouter des difficultés inattendues, comme les problèmes de corrosion sous contrainte récemment rencontrés sur le parc. Le déploiement d’une filière EPR 2 et l’apparition de nombreuses innovations autour des petits réacteurs comme les SMR (small modular reactor) représentent également un défi. Le tissu très dense des start-up se révèle particulièrement actif en ce domaine. Demain, la sphère de contrôle devrait donc se trouver confrontée à une multitude d’acteurs privés. Bien que l’organisation actuelle ait permis de gérer de façon satisfaisante les enjeux de sûreté nucléaire et de radioprotection depuis 2006, dans un contexte de calme relatif dans le domaine de l’industrie nucléaire, elle pourrait être moins adaptée à ce nouveau contexte.

L’objectif du présent projet de loi est ainsi d’adapter le système de sûreté à un contexte inédit dans l’histoire du nucléaire français. Il crée pour cela une nouvelle autorité, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), qui intégrerait, en sus des missions de l’ASN, l’essentiel des missions d’expertise et de recherche de l’IRSN. La nouvelle autorité serait ainsi chargée :

– d’une mission générale d’expertise, de recherche et de formation dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ;

– de contribuer au maintien d’un haut niveau de compétences en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection et d’améliorer constamment les connaissances dans ces domaines ;

– d’assurer une veille permanente en matière de radioprotection ;

– de contribuer aux travaux et à l’information du Parlement en ces domaines ;

– de participer à l’information du public et à la mise en œuvre de la transparence.

Ce projet présente plusieurs avantages. Cela concerne d’abord la fixation d’un calendrier unique de priorités. Par le passé, la Cour des comptes avait en effet pu souligner des « relations difficiles » durant les premières années d’existence de l’ASN et l’IRSN, en raison de priorités divergentes et d’une absence de coordination quant à la communication des deux organisations ([2]). Si ces difficultés initiales de coordination paraissent aujourd’hui résorbées, de l’avis des principales parties prenantes, en raison d’une concertation permanente entre l’autorité et l’expert ([3]), il n’en demeure pas moins que subsiste un double niveau de pilotage (d’une part de l’ASN sur l’expertise de l’IRSN, d’autre part de l’IRSN sur ses expertises thématiques) qui limite l’efficience et la réactivité du processus. Ainsi, la relation ASN-IRSN doit être encadrée par une convention négociée entre les deux parties, qui est mise à jour tous les cinq ans, appuyée par neuf documents-cadres précisant les modalités de mise en œuvre de cette convention dans des domaines particuliers (expertise, inspection, relations internationales, information du public, etc.). En complément, et en plus des plans directeurs respectifs de l’ASN et de l’IRSN, un protocole entre l’ASN et l’IRSN est négocié tous les ans pour se mettre d’accord sur les priorités de l’année à venir. Pour veiller à la mise en œuvre de ce paquet conventionnel, des réunions régulières entre les deux directions générales sont nécessaires.

Cette organisation et ce niveau de formalisme résultent de l’existence même d’entités séparées, avec chacune des intérêts propres qui conduisent à complexifier le pilotage des priorités et l’allocation des moyens, au détriment du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Dans un contexte sans relance nucléaire, ces coûts d’interfaces avaient un effet limité. En revanche, dans le contexte de la relance du nucléaire, l’existence d’une direction générale unifiée et d’un comité de direction rassemblant les activités de l’ASN et de l’IRSN serait un moyen de renforcer le partage d’information et le pilotage des moyens de la future autorité.

Ce serait également le cas dans un contexte de situation de crise puisque, actuellement, l’IRSN et l’ASN disposent chacun d’un centre de crise, d’une organisation spécifique et de moyens propres pour assurer leurs missions en cas de crise. Ainsi, une organisation unique permettrait la mise en place d’un interlocuteur unique pour les autorités publiques ainsi que la fluidification des échanges entre les équipes en charge de l’expertise et celles chargées de proposer des actions de protection de la population aux autorités.

Du point de vue des ressources humaines, il existerait également des tensions sur certaines ressources rares qui sont actuellement dupliquées dans chacune des entités. La nouvelle organisation permettrait ainsi d’éviter la dispersion des compétences techniques et scientifiques rares, ce que des mesures budgétaires et salariales ne pourront pas faire à elles seules. En réunissant les compétences de personnels très bien formés et aguerris aux questions traitées et en facilitant leur travail collectif, la réforme améliorera encore la qualité de l’expertise, de l’instruction et de la décision sur les dossiers soumis à l’autorité de contrôle. Elle doit conduire à une amélioration globale de la sûreté des installations, par une meilleure intégration en amont puis à un contrôle techniquement approfondi des exigences de sûreté. Une organisation unique devrait également renforcer les opportunités de mobilité professionnelle, y compris géographique, au sein de l’autorité.

En matière de transparence, une des nouvelles obligations introduites par le projet de loi est la présentation à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques et au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), qui peut émettre un avis, d’un certain nombre de sujets importants justifiant la mise en place d’un processus d’association du public. C’est ce qui a déjà été fait, par exemple, dans le cadre de l’instruction du dossier de demande d’autorisation de création du centre de stockage en couche géologique profonde Cigéo. Par ailleurs, reprenant les dispositions du premier alinéa de l’article R. 592-47 du code de l’environnement, la future autorité communiquera la nature et les principaux résultats des programmes de recherches qu’elle mène dans ses domaines de compétences aux autorités concernées ainsi qu’à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire, au Haut Conseil de la santé publique et au Conseil d’orientation des conditions de travail, selon leurs domaines de compétences respectifs.

Le Gouvernement met également en avant le fait que les start-up françaises du nucléaire devront être accompagnées pour élaborer les référentiels de sûreté des petits réacteurs (SMR) : la création d’une nouvelle entité contribuera à la rationalisation des compétences critiques et simplifiera la relation avec ces nouveaux acteurs.

Enfin, une autorité unifiée disposera d’un plus grand pouvoir d’influence dans les instances internationales et pourra harmoniser sa communication pour défendre une vision française unique de la sûreté. En effet, tant l’ASN que l’IRSN ont actuellement un investissement actif à l’international, appuyé par des directions de l’action internationale tout à fait bien intégrées dans les réseaux généralistes et spécifiques au monde nucléaire, notamment auprès de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et de l’Agence de l’énergie nucléaire (AEN) de l’OCDE. Ce positionnement sera maintenu et conforté par la jonction des équipes, tant au niveau des spécialistes techniques bien connus de leurs réseaux internationaux que des équipes « relations internationales ». Par sa taille, la future autorité sera la plus importante au niveau européen et parmi les plus importantes au niveau mondial. Cela est de nature à accroître encore l’influence française à l’international, au bénéfice de niveaux de sûreté ambitieux et pertinents.

Les principes fondamentaux de la sûreté nucléaire seront bien évidemment préservés, qu’il s’agisse de la transparence de l’information en matière de sûreté nucléaire, notamment vis-à-vis du Parlement, de la publication des rapports d’expertise, en particulier ceux sur lesquels s’appuient actuellement les décisions de l’ASN, ou de l’appui de la recherche à la décision. Le rapporteur est particulièrement attaché à ce que les activités de recherche de l’IRSN, comme celles de l’ASN, soient maintenues au plus haut niveau d’expertise et appuyées par un conseil scientifique.

Dans le cadre de la nouvelle autorité, la séquence « expertise – recommandation de l’autorité indépendante – décision politique » continuerait d’être parfaitement respectée et serait toujours aussi lisible pour les observateurs avertis comme pour le grand public. La réorganisation n’aurait cependant pas de sens si elle revenait à ériger une nouvelle muraille de Chine, en faisant de ce cloisonnement quelque chose de trop rigide.

Puisqu’est projetée une évolution structurelle, il faut s’attendre à ce que son appropriation par les acteurs fasse l’objet d’une courbe d’apprentissage. Cette période transitoire, par nature délicate, ne saurait donc être concomitante avec la phase opérationnelle des nouveaux programmes attendus, ce qui ouvre, pour une éventuelle réorganisation, une fenêtre d’opportunité relativement étroite, qui justifie de mener cette réforme afin de parvenir à une mise en place de la nouvelle structure au 1er janvier 2025.

En améliorant l’efficacité des procédures en matière de contrôle de la sûreté nucléaire, en rapprochant experts et chercheurs au sein d’une structure unique et en remettant sur la table la question des moyens humains, financiers et techniques alloués au contrôle de la sûreté nucléaire, ce projet de loi permettra donc un renforcement de la sûreté nucléaire dans un moment de relance du nucléaire et d’émergence de nouveaux acteurs dans ce domaine.

 

 


   SYNTHèse

Le titre Ier du projet de loi est relatif à la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ANSR).

L’article 1er prévoyait la création de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, dotée du statut d’autorité administrative indépendante (AAI), et définissait ses missions fondamentales. Cet article a été supprimé par la commission, contre l’avis du rapporteur.

L’article 2 précise les règles de déontologie, d’indépendance et de transparence de la future ASNR. Alors que la rédaction initiale de cet article renvoyait la définition de ces règles au règlement intérieur de la nouvelle autorité, le Sénat a souhaité porter le principe de distinction entre expertise et décision au niveau législatif et élargir son champ. Tout en saluant cette évolution, qui permet notamment d’inclure des décisions importantes comme le redémarrage des centrales nucléaires, le rapporteur a tenu à clarifier, en commission, la portée de cette distinction. De même, le principe d’une publication des résultats des expertises et des avis des groupes permanents d’experts a été consacré au niveau législatif par le Sénat. Cette disposition nouvelle, qui tend à renforcer la transparence et l’information du public, gage de crédibilité et d’acceptabilité de la politique de sûreté nucléaire, s’inspire d’une recommandation du rapport précité de l’Opecst du 11 juillet 2023. Enfin, le Sénat a prévu la mise en place d’une commission d’éthique et de déontologie, renforçant ainsi encore davantage les garanties en termes d’indépendance et d’impartialité de la nouvelle autorité. Un amendement du rapporteur a permis de clarifier le champ des missions de cette commission, afin de ne pas limiter ses attributions.

L’article 2 bis, introduit par le Sénat, permet de maintenir une composition paritaire au sein de la nouvelle autorité en modifiant les règles de désignation qui doivent être respectées par le Président de la République. Il n’a pas été modifié par la commission.

L’article 2 ter, introduit par le Sénat et sur lequel l’avis de la commission des affaires économiques a été sollicité, précise que le rapport d’activité de l’Autorité de sûreté nucléaire doit comporter un bilan de l’activité de sa commission des sanctions. Cet article a été supprimé par adoption d’un amendement du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, au double motif que ce bilan est déjà réalisé en pratique et que de telles précisions sur le contenu d’un rapport d’activité ne sont pas du domaine de la loi.

L’article 3 précise certaines activités exercées par l’ASNR, notamment en matière de recherche, de formation ou de traitement de données, issues de l’IRSN.

À l’initiative du rapporteur, la commission a complété cet article pour permettre à l’ASNR de se positionner comme un acteur majeur de la recherche, dans la continuité des travaux internationalement reconnus de l’IRSN. Il prévoit désormais que la nouvelle autorité présente chaque année les programmes de recherche menés en son sein ou confiés à d’autres organismes de recherche devant l’Opecst. Surtout, le rapporteur a souhaité doter l’ASNR d’un conseil scientifique, sur le modèle de celui qui existe aujourd’hui au sein de l’IRSN. Ce conseil sera sollicité sur la stratégie scientifique de l’autorité ainsi que sur toute autre question relative à la recherche en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection. Il sera chargé d’évaluer la pertinence des programmes de recherche que définit l’autorité, d’en effectuer un suivi et d’évaluer leurs résultats. Il pourra en outre formuler toute recommandation sur l’orientation des activités de recherche de l’ASNR.

L’article 4, dans sa rédaction initiale, renforce l’information du Parlement et de la société civile en prévoyant que l’ASNR présente à l’Opecst et au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) les sujets sur lesquels une association du public est organisée. Le Sénat a complété cet article pour permettre à l’Opecst, au HCTISN et à l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli) de formuler des observations sur les projets de décision d’adoption ou de modification du règlement intérieur de l’ASNR. Cet ajout du Sénat, qui soulevait des difficultés d’ordre déontologique, a été supprimé par la commission.

L’article 4 bis, introduit par le Sénat et supprimé par la commission, apportait des précisions sur le rôle de la Commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs.

L’article 4 ter est rédactionnel et n’a pas été modifié par la commission.

L’article 4 quater, introduit par le Sénat, précise que le rapport annuel d’activité établi par l’ASNR est transmis à l’Opecst avant sa publication. Il n’a pas été modifié par la commission.

L’article 5 prévoit le transfert à titre gratuit des biens, droits et obligations de l’IRSN à l’État et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Cet article permet en outre d’assurer la continuité des mandats des membres du collège de l’ASN au sein de la future ASNR. La commission y a apporté des modifications de nature rédactionnelles.

L’article 6 rassemble les dispositions concernant le statut des personnels de la future autorité, les instances représentatives du personnel et les règles du dialogue social. Il est ainsi prévu une cohabitation des statuts de droit public et de droit privé des personnels au sein de la nouvelle autorité, la mise en place d’une instance de dialogue social spécifique – le comité social d’administration – compétente pour l’ensemble des personnels, l’instauration de règles d’élections professionnelles et de négociations collectives tenant compte du caractère mixte de l’autorité, et l’harmonisation des indemnités accessoires et des remboursements de frais de toute nature. La commission a adopté cet article modifié par deux amendements rédactionnels du rapporteur.

L’article 7 définit les modalités de transfert des salariés de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire à l’ASNR et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives. Il prévoit à cet égard le transfert au CEA des 140 salariés de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) et des 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée. La commission a adopté cet article avec un amendement rédactionnel du rapporteur.

L’article 8 détermine les dispositions transitoires en matière de conventions et d’accords collectifs. Il prévoit ainsi que les salariés transférés à l’ASNR conserveront les effets des conventions et accords ainsi que des engagements unilatéraux applicables au sein de l’IRSN au 1er janvier 2025 jusqu’à l’entrée en vigueur des nouveaux accords et conventions qui leur seront substitués, ou à défaut jusqu’au 30 juin 2027. La commission a adopté cet article sans modification.

L’article 9 donne aux agents contractuels et aux salariés privés de la future ASNR l’opportunité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d’accéder à des corps de fonctionnaires qui seront identifiés par décret comme pertinents pour les missions de l’autorité. La commission a adopté cet article sans modification.

L’article 10 prévoit les dispositions transitoires tendant à garantir la continuité de la représentation sociale au sein de la future ASNR, qui devrait être créée le 1er janvier 2025. La constitution du comité social d’administration (CSA) de l’ASNR devrait intervenir au plus tard le 31 mars 2026 ; jusqu’à cette constitution, le CSA de l’ASN et le comité social et économique (CSE) de l’IRSN seraient maintenus en fonction et exerceraient les missions relatives respectivement aux agents publics et aux salariés. La commission a adopté cet article sans modification.

L’article 11 prévoit que l’IRSN et l’ASN consacrent respectivement 15 millions d’euros et 0,7 million d’euros à l’augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024. L’article prévoit également que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er juillet 2024, un rapport sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives pour exercer leurs missions en 2025. Il prévoit également que soient évaluées la faisabilité et l’opportunité d’instituer un préfigurateur chargé de la mise en œuvre de la création de l’ASNR.

La commission a modifié cet article en introduisant la question des moyens techniques nécessaires à la future autorité dans le cadre du rapport d’évaluation des besoins en matière de sûreté nucléaire, en prévoyant que ce rapport prévoit un dispositif d’accompagnement à la conduite du changement et en renforçant la dimension d’analyse opérationnelle du rapport sur la mise en place d’un préfigurateur.

L’article 11 bis a été introduit en commission par l’adoption de deux amendements identiques du rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Il prévoit la consultation anticipée des comités sociaux de l’ASN et de l’IRSN sur des dispositions portant organisation et fonctionnement des services de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection ainsi que le projet de règlement intérieur de cette dernière.

L’article 12, sur lequel a été sollicité l’avis de la commission des affaires économiques, rattache le haut-commissaire à l’énergie atomique (HCEA) au Premier ministre, alors qu’il est aujourd’hui placé auprès de l’administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Alors que le projet de loi initial supprimait simplement la base légale fondant le rattachement du HCEA au CEA, le Sénat a créé une nouvelle base légale permettant son rattachement au Premier ministre et considérablement détaillé et enrichi ses fonctions. La commission des affaires économiques a donc adopté un amendement de rédaction globale présenté par son rapporteur pour avis, maintenant une base légale au HCEA mais définissant simplement les grandes orientations de ses missions, le détail de celles-ci relevant manifestement du pouvoir réglementaire. Cet amendement a été adopté par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

L’article 13 d’une part, vise à soumettre la recherche menée au sein de l’ASNR à l’évaluation du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) et, d’autre part, procède à des coordinations légistiques. Il ouvre également à tous les personnels qualifiés de l’ASNR, de droit public comme de droit privé, la possibilité de participer aux missions de contrôle de l’autorité. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article modifié par un amendement rédactionnel du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

L’article 14, dans sa rédaction initiale, prévoyait que la nomination à la présidence de l’ASNR serait soumise, en application de l’article 13 de la Constitution, à un avis de la commission permanente compétente en matière d’énergie au sein de chaque assemblée. Le Sénat a souhaité, avec raison, que cette nomination soit contrôlée par la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques, à savoir, à l’Assemblée nationale, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. En effet, la raison d’être de la future autorité ne sera pas de garantir l’approvisionnement énergétique, mais bien d’assurer la sûreté nucléaire. La commission a apporté des modifications de nature rédactionnelle à cet article.

L’article 15 fixe l’entrée en vigueur des articles du titre Ier du projet de loi, relatif à l’ASNR, au 1er janvier 2025, en prévoyant quelques exceptions. La commission a adopté cet article en y apportant des modifications de nature rédactionnelle.

L’article 15 bis a été introduit par la commission pour prévoir la remise à l’Opecst de trois rapports de suivi de la mise en place de l’ASNR, dans un souci de bonne information du Parlement.

Au titre II du projet de loi, les articles 16 à 18, sur lesquels l’avis de la commission des affaires économiques était sollicité (« délégation au fond »), adaptent certaines dispositions du code de la commande publique aux projets structurants dans le secteur nucléaire, afin d’en sécuriser la passation.

L’article 16 permet de déroger à l’obligation d’allotissement des marchés publics pour ces projets. La commission des affaires économiques, dont les amendements ont été adoptés par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, a élargi la dérogation à l’allotissement des marchés à la réalisation d’installations destinées à assurer la fabrication ou la maintenance d’emballages de transport de substances radioactives issues d’installations nucléaires de base.

L’article 17 permet de déroger à la durée maximale des accords-cadres, la durée ainsi fixée devant tenir compte des aléas inhérents à la réalisation de tels projets. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article en y apportant les modifications de nature rédactionnelle proposées par la commission des affaires économiques.

L’article 17 bis, introduit par le Sénat, permet la prise en compte d’un critère de crédibilité des offres dans l’attribution d’un marché relatif à la réalisation d’un réacteur électronucléaire. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article en y apportant les modifications de nature rédactionnelle proposées par la commission des affaires économiques.

L’article 17 ter, également introduit par le Sénat, précise sous quelles conditions ce même type de marché peut faire faire l’objet d’un avenant sans nouvelle mise en concurrence, en tenant compte, notamment, de l’évolution de la conception du projet. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article en y apportant les modifications de nature rédactionnelle proposées par la commission des affaires économiques.

Enfin, l’article 18 permet de déroger aux règles de publicité et de mise en concurrence pour la passation de certains marchés publics dans le domaine nucléaire, lorsque la protection des intérêts essentiels de l’État est en jeu.

Pour tous ces articles qui lui étaient « délégués au fond », la commission des affaires économiques a supprimé la codification au sein du code de la commande publique.

 

 


   COMMENTAIREs des articles du projet de loi

titre iER
L’autoritÉ de sÛretÉ nuclÉaire et de radioprotection

Chapitre Ier
Missions et fonctionnement de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Section 1
Dispositions modifiant le code de l’environnement

Article 1er (supprimé)
Création de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) qui rassemblera les compétences de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

Supprimé par la commission

 

Cet article vise à instituer une nouvelle autorité, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), qui rassemblera les deux organisations actuelles de la sûreté nucléaire que sont l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

I.   Le droit en vigueur

A.   le cadre actuel de la gouvernance de la sûreté et de la sécurité du nucléaire en France

L’article L. 591-1 du code de l’environnement définit la sûreté nucléaire comme « l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets ». La radioprotection renvoie à « la protection contre les rayonnements ionisants », tandis que la sécurité des installations nucléaires désigne la prévention et la lutte contre les actes de malveillance. Enfin, le même article L. 591-1 définit la sécurité nucléaire comme englobant la sûreté nucléaire, la radioprotection, la prévention et la lutte contre les actes de malveillance ainsi que les actions de sécurité civile en cas d’accident.

En France, la sûreté nucléaire est assurée à titre principal par l’exploitant. Elle est contrôlée par deux acteurs distincts :

– l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), une autorité administrative indépendante (AAI) chargée de prendre les décisions individuelles et réglementaires ;

– l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), un établissement public industriel et commercial (EPIC) qui exerce des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sûreté, mais aussi de la sécurité des installations (prévention et lutte contre la malveillance) et de la radioprotection (prévention contre les effets néfastes que peuvent provoquer les rayonnements ionisants).

L’émergence de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France coïncide avec les débuts expérimentaux du nucléaire en France. Le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), initialement seul exploitant, dispose d’un service de protection contre les radiations (SPR) à partir de 1951, puis à partir de 1960, d’une commission de sûreté des installations atomiques (CSIA), chargée de prendre toutes les décisions relatives à la sûreté. Après plusieurs évolutions, l’organisation actuelle du contrôle, fondée sur une autorité indépendante et un expert distinct du CEA, émerge au début des années 2000.

Ce cadre général repose également sur des dispositions de droit international telles que la Convention sur la sûreté nucléaire adoptée le 17 juin 1994, ou de droit européen, notamment la directive 2009/71/Euratom du Conseil du 25 juin 2009 établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires. L’article 5 de cette directive prévoit que les États membres de l’UE instituent et maintiennent une autorité de réglementation compétente dans le domaine de la sûreté nucléaire des installations et que cette autorité est séparée sur le plan fonctionnel de tout autre organisme ou organisation s’occupant de la promotion ou de l’utilisation de l’énergie nucléaire, y compris la production d’électricité, afin de garantir son indépendance effective de toute influence indue dans sa prise de décision réglementaire. Ce même article prévoit que l’autorité de réglementation doit posséder en interne les compétences juridiques ainsi que les ressources humaines et financières nécessaires pour remplir ses obligations.

1.   Rôle et statut de l’ASN

Créée en 2006 par la loi n° 2006-686 relative à la transparence et à la sûreté nucléaire, l’ASN est une autorité administrative indépendante qui exerce des missions de contrôle des activités et des exploitants nucléaires civils ainsi que des missions d’information du public. En situation d’urgence radiologique, elle est chargée de proposer aux pouvoirs publics les actions de protection à mettre en place pour protéger la population et l’environnement. Elle dispose d’expertises internes sur certains champs spécifiques, notamment sur la protection de l’environnement et les équipements nucléaires sous pression.

La politique générale de l’ASN et les décisions à enjeu sont prises par son collège, qui est constitué d’un président et de quatre commissaires, désignés pour six ans par le Président de la République et les présidents des deux assemblées (la nomination du Président relevant de l’article 13 de la Constitution). Ils sont irrévocables et astreints à un devoir d’impartialité. Le collège rend publiques ses décisions et prises de position, et rend compte au Parlement.

L’organisation et la direction des services de l’ASN relèvent de son directeur général. L’article L. 592-13 du code de l’environnement permet au président de déléguer sa signature à des agents des services de l’autorité. L’ASN rend annuellement 2 300 décisions. Parmi ces décisions, environ une trentaine seulement sont rendues directement par le collège de l’ASN. Les autres sont déléguées aux services. Les décisions les plus importantes de l’ASN s’appuient sur une expertise technique (environ 300 par an). L’article L. 592-46 du code de l’environnement permet à l’ASN d’avoir recours à l’appui technique de l’IRSN, sous la forme d’activités d’expertise soutenues par des activités de recherche. L’IRSN transmet alors à l’ASN un avis d’expertise qui est versé à l’instruction du dossier. La majorité des décisions prises par l’ASN ne donnent pas lieu à une demande d’appui technique de l’IRSN, en raison soit d’une absence de besoin d’expertise, pour les décisions à faibles enjeux, soit en raison du recours à une expertise interne.

L’effectif de l’ASN est de 470 ETPT (soit environ 530 agents), dont 329 inspecteurs, répartis au siège et au sein de ses divisions territoriales. Son budget annuel est de 74,9 millions d’euros en loi de finances initiale (LFI) pour 2024.

2.   Rôle et statut de l’IRSN

L’IRSN a été créé par la loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale, laquelle a prévu la fusion, effective en 2002, de l’Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN), créé en 1976, et de l’Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI) au sein de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), expert technique distinct du CEA.

L’article L. 592-45 du code de l’environnement définit l’IRSN comme « un établissement public de l’État à caractère industriel et commercial qui exerce, à l’exclusion de toute responsabilité d’exploitant nucléaire, des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire ». L’article R. 592-40 du même code prévoit une tutelle conjointe sur l’IRSN de cinq ministres : le ministre chargé de l’environnement, le ministre de la défense, les ministres chargés de l’énergie, de la recherche et de la santé.

L’institut est dirigé par un conseil d’administration composé de vingt-trois membres. Le directeur général de l’IRSN est nommé par décret par le président de la République, conformément à l’article 13 de la Constitution, pris sur rapport des ministres de tutelle, sur la proposition du président du conseil d’administration. À l’exception des activités de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND), qui sont sous l’autorité d’un directeur général adjoint de l’IRSN ad hoc, rattaché directement aux ministres chargés de la défense et de la sécurité nucléaire et nommé par décret du Président de la République sur le rapport des ministres des armées et de la sécurité nucléaire et du premier ministre, les services de l’IRSN sont placés sous l’autorité de son directeur général.

L’IRSN dispose de compétences d’expertise généralistes et spécialisées, et de capacités de recherche. Son budget annuel est de 285 millions d’euros (dont 182,6 millions d’euros proviennent de crédits budgétaires), dont plus de 90 % portent sur des missions de service public, de recherche et d’enseignement, avec ou sans partenariat avec d’autres établissements publics ou entreprises du secteur privé, pour un effectif total de 1 744 personnes en 2024.

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour une croissance verte confie à l’IRSN des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire. Il est notamment chargé d’une mission d’appui technique aux autorités publiques compétentes en matière de sûreté, radioprotection et sécurité, aussi bien dans la sphère civile que dans celle de la défense, et assure également certaines missions de service public, notamment en matière de surveillance de l’environnement et des personnes exposées aux rayonnements ionisants. La surveillance de l’environnement se concrétise notamment par l’activité de dosimétrie, exercée sous deux formes complémentaires :

– la dosimétrie passive qui mesure l’exposition externe des personnes. L’IRSN fabrique des dosimètres (1,5 million par an), les distribue à 25 000 clients puis en lit les résultats dans des appareils spécialisés ;

– la dosimétrie interne (anthroporadiométrie, radiotoxicologie) qui mesure pour sa part l’exposition interne des personnes.

Ces activités sont nécessaires pour faire face à une éventuelle crise : elles permettent à la fois de disposer d’outils ou de matériels pour ces situations (un stock stratégique de dosimètres est maintenu) et de maintenir les compétences nécessaires à la mise en œuvre de ces outils et matériels. En effet, en cas d’accident nucléaire ou radiologique, les dosimétries passive et interne doivent être simultanément mises en œuvre sur un grand nombre de personnes.

L’appui technique à l’ASN par des activités d’expertise, qui conduit à la publication d’environ 300 avis rédigés chaque année, représente 30 % du budget et 25 % des activités de l’Institut. La mission de recherche de l’IRSN soutient l’activité d’expertise.

3.   La séparation fonctionnelle entre les deux entités

Il existe une séparation fonctionnelle claire entre les deux entités. L’ASN est chargée de la décision et rend environ 1 800 décisions par an. Pour les dossiers complexes nécessitant une expertise (environ 300 par an), elle s’appuie sur l’IRSN. En vertu de l’article L. 592-46 du code de l’environnement, l’IRSN fournit un « appui technique, sous la forme d’activités d’expertise soutenues par des activités de recherche » indispensable à l’exercice par l’ASN de ses missions. Cet appui technique se matérialise notamment par une convention revue annuellement et par le fait que le président de l’ASN est membre de droit du conseil d’administration de l’IRSN. Fruit d’une longue histoire, ce système est internationalement reconnu pour sa qualité technique, son indépendance et sa capacité à rendre compte au public de manière transparente.

Cette séparation entre une autorité de décision et un expert technique n’est pas un modèle répandu partout. Comme l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) l’a souligné dans son rapport sur la réforme du contrôle et de la recherche en sûreté nucléaire et radioprotection du 11 juillet 2023 : « à l’étranger, plusieurs pays ont opté pour des modèles dans lesquels les compétences d’expertise et de décision sont réunies et ont défini des processus en ce sens ». C’est notamment le cas aux États-Unis, au Canada ou au Japon, même si chaque pays a ses spécificités et son histoire propre. D’autres pays s’inspirent en revanche du « modèle français », tels que la Belgique. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ne recommande pas de modèle spécifique mais indique que l’organisme de réglementation peut obtenir des avis ou des services à caractère technique ou spécialisé selon les besoins pour appuyer ses fonctions réglementaires, sans que cela l’exonère des responsabilités qui lui ont été confiées.

Les quatre piliers de la sûreté nucléaire

Une image contenant texte, carte de visite, Police, logo

Description générée automatiquement

4.   La sûreté des installations nucléaires de défense et la sécurité des installations nucléaires civiles

La sûreté et la sécurité des installations nucléaires de défense et la sécurité des installations nucléaires civiles font l’objet d’une organisation spécifique en raison d’enjeux sécuritaires particuliers, qui justifient un rattachement plus ou moins direct au ministère des armées. La loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire a réformé l’organisation relative au nucléaire militaire. L’expertise en matière de sûreté des installations nucléaires de défense a alors été rapprochée du nucléaire civil en étant intégrée à l’IRSN, afin de mettre fin à la spécificité du nucléaire militaire. Cette expertise est intégrée à la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) de l’IRSN, sous tutelle du ministre de la Défense, également compétente pour les questions de sécurité des installations civiles.

En revanche, le contrôle de la sûreté des installations militaires est effectué par l’Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND), dirigée par un délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection (DSND) placé auprès du ministre des armées, mais indépendant des organismes en charge de l’exploitation des installations et activités nucléaires intéressant la défense.

Enfin, le contrôle de la sécurité des installations militaires est assuré par la direction de la protection des installations, moyens et activités de la défense (DPID) qui relève du ministère des armées. Le contrôle de la sécurité des installations civiles est exercé par le haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère de la transition écologique.

Organisation de l’expertise et du contrôle de la sécurité
et de la sûreté nucléaires dans les domaines militaire et civil

 

Nucléaire militaire

Nucléaire civil

Sûreté

Expertise : direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) de l’IRSN

Expertise : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

Contrôle : Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND)

Contrôle : Autorité de sûreté nucléaire (ASN)

Sécurité

Direction de la protection des installations, moyens et activités de la défense (DPID)

Expertise : direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) de l’IRSN

Contrôle : Haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère de la transition écologique

Source : IRSN

B.   le besoin d’une réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire

1.   Une situation « hors normes » du point de vue du contexte nucléaire

L’objectif de la réforme affiché par le Gouvernement est d’adapter le système de sûreté à un contexte « hors normes », inédit dans l’histoire du nucléaire français. En effet, notre système de sûreté fait face au chantier inédit du programme nucléaire gouvernemental et à des risques environnementaux comme internationaux qui posent plusieurs défis :

– poursuite de l’exploitation du parc nucléaire existant au-delà de 50 ans, voire de 60 ans ;

– lancement d’un programme de construction de trois paires de réacteurs EPR2 et mise à l’étude de huit réacteurs supplémentaires ;

– soutien à la recherche et à l’innovation dans les technologies nucléaires (notamment les petits réacteurs modulaires, dits « SMR ») ;

 projet Cigéo (stockage des déchets radioactifs en couche géologique profonde) et projet de piscine d’entreposage centralisée de combustibles usés d’EDF ;

– prévention des risques liés notamment au changement climatique ou aux cyberattaques.

En outre, l’IRSN comme l’ASN vont faire face, entre 2024 et 2027, à d’importants chantiers d’expertise et de décision retracés dans le tableau ci-après :

Une image contenant texte, capture d’écran, logiciel, nombre

Description générée automatiquement

À cet égard, quelle que soit l’organisation retenue, les effectifs, l’attractivité des métiers et les moyens des acteurs du contrôle et de l’expertise en matière de sûreté nucléaire devront être significativement renforcés au cours des prochaines années. Le Gouvernement estime que la constitution d’une autorité unique de décision et d’expertise offrirait plusieurs avantages par rapport à la situation actuelle.

2.   Les avantages potentiels d’un rapprochement ASN-IRSN

Ces avantages concernent d’abord la fixation d’un calendrier unique de priorités. Par le passé, la Cour des comptes avait en effet pu souligner des « relations difficiles » durant les premières années d’existence de l’ASN et l’IRSN, en raison de priorités divergentes et d’une absence de coordination quant à la communication entre les deux organisations ([4]). Ces difficultés initiales de coordination paraissent aujourd’hui résorbées, de l’avis des principales parties prenantes, en raison d’une concertation permanente entre l’autorité et l’expert ([5]).

Il n’en demeure pas moins un double niveau de pilotage (d’une part, de l’ASN sur l’expertise de l’IRSN, d’autre part, de l’IRSN sur ses expertises thématiques) qui limiterait l’efficience et la réactivité du processus. La relation ASN-IRSN doit être encadrée par une convention négociée entre les deux parties, qui est mise à jour tous les cinq ans, appuyée par neuf documents cadre précisant les modalités de mise en œuvre de cette convention dans des domaines particuliers (expertise, inspection, relations internationales, information du public, etc.). En complément, et en sus des plans directeurs respectifs de l’ASN et de l’IRSN, un protocole entre l’ASN et l’IRSN est négocié tous les ans pour se mettre d’accord sur les priorités de l’année à venir. Pour veiller à la mise en œuvre de ce « paquet conventionnel », des réunions régulières entre les deux directions générales sont nécessaires.

Cette organisation et ce niveau de formalisme résultent de l’existence même d’entités séparées, avec chacune des intérêts propres qui conduisent à complexifier le pilotage des priorités et l’allocation des moyens, au détriment du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Dans un contexte sans relance nucléaire, ces coûts d’interface ont un effet limité et c’est ce qui a pu être constaté sur la décennie précédente. En revanche, dans le contexte de la relance du nucléaire, l’existence d’une direction générale unifiée et d’un comité de direction rassemblant les activités de l’ASN et de l’IRSN serait un moyen de renforcer le partage d’informations et le pilotage des moyens de la future autorité.

Ce serait également le cas en cas de crise : à l’heure actuelle, pour assurer leurs missions dans une telle situation, l’IRSN et l’ASN disposent chacun d’un centre de crise, d’une organisation spécifique et de moyens propres. À cet égard, une organisation unique permettrait la mise en place d’un interlocuteur unique pour les autorités publiques ainsi que la fluidification des échanges entre les équipes en charge de l’expertise et celles chargées de proposer des actions de protection de la population aux autorités. Selon les syndicats de l’IRSN, auditionnés par le rapporteur, la mise en place d’un centre unique de crise était cependant déjà étudiée avant la perspective de réforme.

Du point de vue des ressources humaines, il existerait également des tensions pour certaines ressources rares qui sont actuellement dupliquées dans chacune des entités. La nouvelle organisation permettrait ainsi d’éviter la dispersion des compétences techniques et scientifiques rares, ce que des mesures budgétaires et salariales ne pourront pas assurer à elles seules. Une organisation unique devrait ainsi renforcer les opportunités de mobilité professionnelle, y compris géographique, au sein de l’Autorité.

Le Gouvernement met également en avant le fait que les start-up françaises du nucléaire devront être accompagnées pour élaborer les référentiels de sûreté des petits réacteurs (SMR) : la création d’une nouvelle entité contribuera à la rationalisation des compétences critiques et simplifiera la relation avec ces nouveaux acteurs.

Enfin, une Autorité unifiée disposera d’un plus grand pouvoir d’influence dans les instances internationales et pourra harmoniser sa communication pour défendre une vision française unique de la sûreté.

3.   Le choix entre AAI et API

Concernant le statut d’autorité administrative indépendante (AAI), le Gouvernement a fait le choix de son maintien plutôt que de mettre en place une autorité publique indépendante (API), dotée d’une personnalité morale et d’une responsabilité juridique autonome de celle de l’État. Au regard de l’ampleur des risques associés aux activités nucléaires, le statut d’AAI apparaît ainsi plus protecteur et davantage à même de garantir la capacité de décision et l’indépendance de l’autorité. Elle sera détachée de toute contingence financière liée à des contentieux. Pour cette raison, le statut d’AAI a été retenu car il limite les interférences entre le processus décisionnel de la future autorité et les conséquences financières de ses décisions.

C’est également la recommandation du rapport du 11 juillet 2023 de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) sur « Les conséquences d’une éventuelle réorganisation de l’ASN et de l’IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection ». Plus généralement, le maintien d’un statut d’autorité administrative indépendante (AAI), qui est déjà celui de l’ASN, a également été retenu afin de limiter les modifications administratives et juridiques concernant la structure, dans le cadre d’une rationalisation qui nécessite déjà la conduite d’un certain nombre de chantiers de transformation importants, notamment dans le domaine des ressources humaines et des systèmes d’information.

Enfin, les dispositions prises dans le cadre du présent projet de loi permettent à l’ASNR de fonctionner en tant qu’AAI, notamment en lui donnant la possibilité d’embaucher des agents sous les différents statuts existant actuellement au sein de l’ASN et de l’IRSN (fonctionnaires, contrats de droit privé…). En effet, les fonctionnaires de l’ASN actuelle sont en position normale d’activité et sont extrêmement attachés à ce positionnement, qui permet des parcours de carrière fluides avec le reste de l’administration, notamment dans le contrôle des risques conventionnels (inspection de l’environnement, spécialité ICPE) et les administrations centrales des ministères chargés de l’environnement, de l’énergie et des industries. Or, un fonctionnaire de l’État peut être en position normale d’activité auprès d’une AAI, mais pas auprès d’une API.

II.   Le texte initial du projet de loi

Le rapprochement entre l’ASN et l’IRSN avait initialement été proposé par le Gouvernement dans le cadre d’un amendement présenté lors de l’examen du projet de loi dit d’« accélération du nucléaire » à l’Assemblée nationale, début 2023. Cette proposition avait été rejetée par les députés. Le Parlement avait réagi le 25 avril 2023 par une saisine de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst) dont le rapport a été publié en juillet 2023.

Le projet de loi prévoit le démantèlement de l’IRSN, à compter du 1er janvier 2025 (date prévue formellement à l’article 15), et le transfert de l’essentiel de ses missions et salariés (1 600 environ) vers l’ASN (transfert formellement prévu à l’article 6 et 7 du présent projet de loi), qui deviendrait l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), gardant le statut d’AAI. L’ASNR emploierait des salariés de droit privé issus de l’IRSN et des fonctionnaires et contractuels issus de l’ASN.

Outre l’abrogation des dispositions législatives relatives à l’IRSN (formellement prévue à l’article 13), le projet de loi modifie et complète les dispositions du code de l’environnement applicables à l’ASN, de façon à fixer dans la loi « les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l’organisation et au fonctionnement » de la future ASNR, ainsi que l’impose l’article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes. Le projet de loi y apporte les seules adaptations rendues nécessaires par l’intégration de l’IRSN, sans les amoindrir.

Dans le présent article, le 1° complète la définition de la sûreté nucléaire figurant à l’article L. 591-1 du code de l’environnement, afin de préciser qu’elle a également pour objectif de protéger la santé humaine ainsi que l’environnement.

Les 2° à 4° créent l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), substituée à l’ASN. La nouvelle autorité aurait une mission générale qui intégrerait, en plus des missions de l’ASN, l’essentiel des missions d’expertise et de recherche de l’IRSN. La nouvelle autorité serait ainsi chargée :

– d’une mission générale d’expertise, de recherche et de formation dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ;

– de contribuer au maintien d’un haut niveau de compétences en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection et d’améliorer constamment les connaissances dans ces domaines ;

– d’assurer une veille permanente en matière de radioprotection et de contribuer à la surveillance radiologique de l’environnement et des personnes exposées aux rayonnements ionisants ;

– de contribuer aux travaux et à l’information du Parlement en ces domaines ;

– de participer à l’information du public et à la mise en œuvre de la transparence.

Enfin, le 5° de l’article 1er renomme le collège de l’ASN en « collège de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection ». À ce sujet, l’article 5 du projet de loi précise que les mandats des membres du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire ne sont pas interrompus du fait de l’entrée en vigueur de la présente loi. Les membres du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire ainsi maintenus exercent jusqu’au terme de leur mandat les fonctions de membre du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, telles qu’elles résultent de la présente loi.

Il convient de souligner que deux activités spécifiques de l’IRSN ne seraient pas intégrées à la future ASNR, en raison de leurs spécificités (leur transfert est prévu à l’article 7 du présent projet de loi). D’une part, les activités de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) seraient transférées à l’Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND), sous l’autorité du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense (DSND). La DEND, dirigée par un militaire sous l’autorité du ministre des armées, est chargée à titre principal de la sûreté des installations militaires et de la sécurité des installations civiles et compte 140 ETP. En raison du caractère régalien de ces activités, liées à la Défense nationale, leur intégration à une autorité administrative indépendante, qui ne dépend pas du ministre des armées, n’a pas été privilégiée par le Gouvernement. De ce fait, les contrats du personnel de la DEND seraient transférés au CEA, qui mettra le personnel à disposition de l’ASND. Une convention entre l’ASNR et l’ASND apparaîtrait nécessaire, notamment concernant l’articulation entre contrôle au titre de la sûreté nucléaire et contrôle au titre de la sécurité des installations civiles.

D’autre part, les activités de fabrication et de commercialisation des appareils de dosimétrie passive seraient également transférées au CEA. En effet, la fourniture de dosimètres constitue une activité commerciale ouverte à la concurrence, qui nécessite de la part du producteur un démarchage, ce d’autant plus que l’IRSN fait face dans ce domaine à un acteur dominant le marché mondial qui détient, en France, une part de marché équivalente à la sienne. En cas d’intégration de la dosimétrie passive à l’ASNR, l’autorité administrative indépendante se retrouverait en conflit d’intérêts car elle devrait démarcher les exploitants également placés sous son contrôle. Une convention entre l’ASNR et le CEA apparaîtrait nécessaire, notamment concernant la fourniture massive de dosimètres en situation d’urgence radiologique.

Enfin, il convient de souligner que le transfert des activités de l’IRSN à la nouvelle autorité entraînera des conséquences financières non négligeables. D’une part, elle se traduira par la suppression de la subvention pour charges de service public de l’IRSN, imputée aujourd’hui sur le programme 190 (mission « Recherche et enseignement supérieur ») pour un montant de 170 millions d’euros. Ces crédits seront réorientés au sein du budget de l’État vers les crédits constituant le programme de la future autorité. En outre, l’IRSN bénéficiait d’une taxe affectée (61 millions d’euros par an environ) et il sera nécessaire d’organiser la réaffectation de celle-ci au sein du budget général de l’État, en l’orientant vers le programme dont relèvera la future autorité. Il faudra également, dans le budget de la future autorité, prévoir une prise en compte de l’impact financier lié à l’arrêt de certaines activités commerciales et tout particulièrement des activités relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée. Puisque ces dernières seront transférées au CEA, les recettes (environ 12 millions d’euros) et dépenses associées (environ 9,5 millions d’euros) correspondantes seront transférées de l’IRSN au CEA. Ce manque à gagner d’environ 2,5 millions d’euros devra être compensé.

Enfin, la mise en place de la future autorité aura des impacts importants sur la gestion financière, afin d’assurer la continuité des activités pendant la période de transition puis de manière pérenne :

– paramétrage et déploiement au sein de l’autorité de l’outil comptable Chorus ;

– mise en place du circuit de la dépense ;

– reprise des engagements antérieurs ;

– prise en compte des impacts sur les marchés publics en cours (avenants, mutualisation, continuité).

À ce titre, les directions de l’ASN et l’IRSN ont souhaité que soit entrepris dès maintenant, dans l’optique de la promulgation du présent projet de loi, un travail de définition des principes d’organisation et de fonctionnement de la future entité, travail auquel sera associé le personnel des deux organismes. Ainsi, des groupes de travail thématiques ont été mis en place, dont un portant sur la gestion budgétaire et comptable. Ils associent également la Direction du budget, la Direction générale des finances publiques et l’Agence de l’information financière de l’État.

Le coût de la transition et de l’installation de la nouvelle autorité représente quelques millions d’euros.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

A.   L’examen en commission

Outre trois amendements rédactionnels, la commission a adopté un amendement COM-63 de M. Chaize (LR), rapporteur pour avis, sous-amendé par le rapporteur (COM-93) pour élargir la définition de la sécurité nucléaire, en y intégrant la protection de la santé publique et de l’environnement.

Elle a en outre adopté un amendement COM-66 de M. Chaize visant à compléter la mission d’information du Parlement par l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), en mentionnant l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) et les commissions parlementaires permanentes compétentes.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement n° 91 de M. Chaize (LR), rapporteur pour avis, visant à renommer la nouvelle autorité en « Autorité indépendante de sûreté nucléaire et de radioprotection ». Cet intitulé avait été recommandé par l’Opecst, dans son rapport du 11 juillet 2023, qui demandait de « donner à la nouvelle autorité administrative un nom rappelant son caractère indépendant, par exemple : « Autorité indépendante de sûreté nucléaire et de radioprotection » (AISNR) ». Toutefois, si dans le cadre de ce rapport, il était nécessaire de souligner le caractère d’indépendant de la nouvelle structure, son inscription dans la loi pourrait paradoxalement conduire à s’interroger sur l’effectivité de son indépendance juridique et fonctionnelle, alors que celle-ci est en réalité déjà garantie par son statut d’autorité administrative indépendante (AAI). En effet, aucune AAI ne mentionne son caractère d’indépendance dans son intitulé, puisque celui-ci est garanti par la loi. Par conséquent, cet ajout ne semble plus nécessaire.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté, contre l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques de suppression de l’article CD10 de Mme Delphine Batho (Écologiste-NUPES), CD57 de Mme Julie Laernoes (Écologiste-NUPES), CD66 de M. Gérard Leseul (Socialistes et apparentés), CD80 de M. Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine-NUPES), CD143 de Mme Anne Stambach-Terrenoir (La France insoumise-NUPES) et CD293 de M. Benjamin Saint-Huile (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires).

*

*     *

 

Article 2
Fonctionnement, déontologie, indépendance et transparence de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 2 du projet de loi précise les règles de déontologie, d’indépendance et de transparence de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

I.   Le droit en vigueur

A.   L’indépendance de l’ASN est garantie par son statut et des règles de déontologie

L’indépendance de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est garantie par son statut d’autorité administrative indépendante (AAI), prévu à l’article L. 592-1 du code de l’environnement.

L’article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, dispose que toute AAI est instituée par la loi. Les règles relatives à la composition, aux attributions et aux principes fondamentaux relatifs à l’organisation et au fonctionnement des AAI sont également fixées par la loi.

La loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes prévoit ainsi les règles de déontologie et de fonctionnement applicables aux AAI. Ces règles doivent être précisées dans un règlement intérieur, adopté par le collège de l’autorité sur proposition de son président et publié au Journal officiel, en application de l’article 14 de cette loi ([6]). Le règlement intérieur détermine les règles déontologiques applicables à ses agents et, le cas échéant, à ses collaborateurs ou experts, conformément à l’article 13 de la même loi. L’ASN s’est ainsi dotée d’une charte de déontologie des commissaires et des agents, annexée à son règlement intérieur et applicable à l’ensemble de ses agents, ainsi que d’un référent déontologue.

Par ailleurs, l’article 16 de la loi précitée prévoit que toute AAI dispose de services placés sous l’autorité de son président, sous réserve des exceptions prévues par la loi pour les services qui sont chargés de l’instruction ou du traitement des procédures de sanction et de règlement des différends.

Enfin, en cas de conflit d’intérêts, des règles de déport des membres d’une AAI sont prévues par l’article 12 de la même loi.

Le président de l’ASN est chargé, en application de l’article L. 592-9 du code de l’environnement, de prendre les mesures appropriées pour assurer le respect par les membres du collège de l’ASN de leurs obligations en matière de déontologie résultant de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 précitée. L’article L. 592-2 du même code précise que le collège de l’autorité est composé de cinq membres nommés par décret du Président de la République pour un mandat de six ans non renouvelable. Ils sont irrévocables et astreints à un devoir d’impartialité.

En application de l’article L. 592-13 du même code, le règlement intérieur de l’ASN prévoit les conditions dans lesquelles le collège de l’autorité peut donner délégation de pouvoirs à son président ou, en son absence, à un autre membre du collège, ainsi que celles dans lesquelles le président peut déléguer sa signature à des agents des services de l’autorité. Toutefois, ni les décisions à caractère règlementaire, ni les avis sur les projets de décret ou d’arrêté ministériel ne peuvent faire l’objet de délégation. Les décisions les plus importantes, comme la mise en service ou les prescriptions applicables aux principales installations nucléaires, relèvent de la seule compétence du collège de l’ASN. Comme indiqué dans l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, « ce dispositif ne peut raisonnablement être mis en œuvre que pour un nombre restreint de dossiers, ceux à plus forts enjeux (une quarantaine par an par rapport aux 2 500 décisions annuelles prises par l’autorité) ». Les autres décisions sont déléguées aux services de l’ASN, placés sous la responsabilité de son directeur général.

B.   L’IRSN s’est doté de dispositifs destinés à éviter tout conflit d’intérêts

L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est un établissement public de l’État à caractère industriel et commercial (Epic) placé sous la tutelle conjointe des ministères chargés de la transition écologique, de l’énergie, des armées, de la recherche et de la santé.

L’Institut s’appuie sur ses activités de recherche pour développer et consolider ses missions d’expertise, de surveillance et d’intervention en situation d’urgence. Il est amené pour cela à effectuer une grande partie de ses recherches dans le cadre de projets en partenariat avec le monde académique, mais également avec les industriels du secteur nucléaire. Des accords de collaboration ou des accords-cadres pluriannuels ont notamment été mis en place avec Électricité de France (EDF), Framatome ou Orano afin de mieux connaître les matériaux et équipements des installations nucléaires et de définir des programmes de recherche à la lumière des perspectives industrielles.

Afin de prévenir tout conflit d’intérêts avec les industriels opérant dans son domaine d’expertise, l’IRSN s’est doté d’une charte d’éthique et de déontologie, prévue à l’article R. 592-48 du code de l’environnement. L’édition initiale de la charte, datée de juin 2013, a été actualisée en 2022 pour couvrir « les différents enjeux déontologiques auxquels l’Institut est confronté dans le cadre de ses missions (la rigueur scientifique, l’indépendance, l’intégrité, l’impartialité et le conflit d’intérêts) » ([7]). Le chapitre « Indépendance » de la charte prévoit notamment que « l’IRSN réalise ses missions en étant guidé par des considérations scientifiques et techniques, indépendamment de tout intérêt politique, économique ou commercial particulier. Il s’assure de l’absence de tout conflit d’intérêts susceptible d’influencer son jugement et de remettre en cause son objectivité » (point 3) et que « l’indépendance de l’Institut se traduit dans les contrats d’études ou recherches, en particulier avec des industriels du secteur nucléaire ou radiologique, où l’IRSN stipule l’impératif de sa libre interprétation des résultats qu’il a produits » (point 8).

Une commission d’éthique et de déontologie, prévue à l’article R. 592‑56 du code de l’environnement, est chargée de conseiller le conseil d’administration de l’IRSN pour la rédaction de la charte et de suivre son application. La charte a ainsi fait l’objet d’un avis favorable de la commission d’éthique et de déontologie le 3 octobre 2022, avant d’être approuvée par le conseil d’administration de l’IRSN le 8 décembre 2022.

C.   l’information du public et la transparence sont essentielles à l’acceptabilité du nucléaire

1.   Les règles de transparence au sein de l’ASN

Les avis et décisions délibérés par le collège de l’ASN sont rendus publics dans le respect des règles de confidentialité prévues par la loi, conformément à l’article L. 592-27 du code de l’environnement. L’article 15 du règlement intérieur de l’autorité précise qu’ils sont publiés au Bulletin officiel et sur le site internet de l’ASN.

Le président de l’ASN doit également rendre compte des activités de l’autorité à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), en application des articles L. 592-30 et L. 592-31 du code de l’environnement.

La transparence au sein de l’ASN est également assurée par la publication des avis des groupes permanents d’experts, prévus à l’article 20 de son règlement intérieur. Ces groupes, constitués d’experts issus d’organismes de sûreté français et étrangers, d’industriels, d’universitaires et d’experts non institutionnels, permettent une confrontation des points de vue et apportent à l’autorité un éclairage indépendant en vue de sa prise de décision. Bien qu’elle ne constitue pas une obligation juridique, la publication des avis des groupes depuis 2009 contribue à renforcer la transparence des décisions de l’ASN.

2.   Les règles de transparence au sein de l’IRSN

L’article L. 592-47 du code de l’environnement dispose que l’IRSN contribue à l’information du public. Cette information se matérialise par des obligations de publication. Ainsi, lorsqu’ils ne relèvent pas de la défense nationale, l’Institut publie les avis rendus sur saisine d’une autorité publique ou de l’ASN, en concertation avec l’autorité concernée.

Chaque avis présente, pour le sujet ou le dossier expertisé, la position que l’IRSN adresse à cette autorité, au terme de son instruction scientifique et technique en matière d’évaluation et de maîtrise des risques, ainsi que ses éventuelles recommandations. Les avis émis sur saisine de l’ASN sont publiés bimensuellement sur le site internet de l’IRSN.

L’article R. 592-41 du code de l’environnement prévoit par ailleurs que l’IRSN organise la publicité des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont il a l’initiative. Cet article charge également l’Institut d’organiser, par voie électronique, la publicité des données scientifiques résultant de ces programmes de recherche. Il contribue enfin à la transparence et à l’information du public en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, notamment en élaborant et en rendant public un rapport annuel d’activité.

II.   Le texte initial du projet de loi

L’article 2 du projet de loi initial renvoie au règlement intérieur de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) la définition de ses règles d’indépendance, de transparence et de déontologie.

A.   Dispositions relatives à l’indépendance de l’ASNR

Le  du présent article 2 crée un nouvel article L. 592-13-1 du code de l’environnement afin de préciser les règles nécessaires à l’indépendance de l’ASNR.

Cet article dispose tout d’abord que le règlement intérieur de l’ASNR définit les dispositions nécessaires à la mise en œuvre des articles 12 à 14 de la loi n° 2017‑55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, y compris en ce qui concerne les activités d’expertise et de recherche, afin de prévenir les conflits d’intérêts. Il s’agit des règles relatives au déport des membres de l’ASNR en cas de conflit d’intérêts (article 12), des règles déontologiques applicables à ses agents, collaborateurs ou experts (article 13) et des règles d’organisation, de fonctionnement et de déontologie de l’autorité (article 14).

Ces règles, déjà applicables à l’ASN, sont donc étendues aux activités d’expertise et de recherche qui étaient exercées en partie par l’IRSN.

Le nouvel article L. 592-13-1 du code de l’environnement prévoit par ailleurs que le règlement intérieur de l’ASNR définit les modalités de fonctionnement et les règles propres à distinguer le processus d’expertise et d’instruction conduit par ses services, d’une part, du processus d’élaboration des avis et décisions délibérés par son collège, d’autre part. Seraient ainsi concernés les près de quarante avis ou décisions pris par le collège chaque année.

Comme cela a été indiqué au rapporteur lors de ses auditions, un groupe de travail, piloté par les comités de direction de l’ASN et de l’IRSN, a été spécifiquement mis en place afin de définir les modalités de cette distinction.

B.   Dispositions relatives à la transparence des décisions de l’ASNR

Le  du présent article 2 crée un nouvel article L. 592-14 du code de l’environnement afin de préciser les règles de transparence des décisions de la nouvelle autorité.

Cet article renvoie au règlement intérieur de l’ASNR la définition des modalités de publication des résultats de ses activités d’expertise et d’instruction dans l’ensemble de ses domaines de compétence.

Le règlement intérieur constitue en effet le support approprié pour identifier précisément, en fonction de la nature des dossiers et décisions traités par l’ASNR, la nature des documents rendus publics et le cadencement temporel de leur publication. Ainsi, comme précisé dans l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, « pour les dossiers présentant le plus d’enjeu, ce règlement intérieur pourra prévoir la publication des conclusions de l’expertise et de l’instruction au moment de la consultation du public sur le projet de décision, afin de contribuer à l’éclairer dans le cadre de cette participation – ce qui contribuera à renforcer l’information du public tout au long du processus de décision. Pour des dossiers techniques de longue durée et à forts enjeux, comme les expertises en matière sismique ou le suivi des phénomènes de corrosion sous contrainte, des publications régulières sur l’avancée des connaissances pourront être prévues, sans nécessairement qu’elles ne soient liées à un acte juridique particulier. À l’autre extrémité du spectre en termes de durée d’instruction, pour les modifications ponctuelles de règles d’exploitation dans une installation donnée, ou pour les quelques centaines d’autorisations délivrées chaque année pour l’exercice d’activités nucléaires par le secteur médical ou les industries classiques, il pourra être retenu d’en rendre compte de manière synthétique dans le rapport annuel de la future autorité présenté à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) ».

Par ailleurs, le nouvel article L. 592-14 précité précise que les avis rendus à la demande du Gouvernement, des commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat ou de l’Opecst sont rendus publics dans des conditions définies par leur destinataire.

Enfin, ce nouvel article prévoit que l’ASNR organise la publicité des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont elle prend l’initiative, sous réserve des secrets protégés par la loi. Le même devoir de transparence qu’aujourd’hui s’applique donc au champ plus large des compétences de la nouvelle autorité.

C.   Dispositions relatives à la déontologie au sein de l’ASNR

Le  du présent article 2 réécrit l’article L. 592-13 du code de l’environnement afin de clarifier la répartition des responsabilités entre le président de l’ASNR, le collège et la commission des sanctions. Ainsi, hormis celles expressément confiées à la commission des sanctions ou au président de l’ASNR, les attributions de l’autorité sont exercées par son collège, selon le premier alinéa de l’article.

Le deuxième alinéa de l’article L. 592-13 reprend en les précisant les dispositions relatives au contenu du règlement intérieur qui figuraient déjà à cet article. Ainsi, le règlement intérieur de l’ASNR prévoit les conditions dans lesquelles le collège de l’autorité peut donner délégation de pouvoirs à son président ou, en son absence, à un autre membre du collège, ou à un membre des services de l’autorité, ainsi que celles dans lesquelles le président peut déléguer sa signature à des agents des services de l’autorité. Toutefois, ni les décisions à caractère règlementaire, ni les avis sur les projets de décret ou d’arrêté ministériel ne peuvent faire l’objet de délégation.

III.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté quatorze amendements au présent article 2.

● La commission a tout d’abord souhaité renforcer la distinction entre expertise et décision par l’adoption de l’amendement COM-11 du rapporteur M. Pascal Martin (Union Centriste) modifiant le nouvel article L. 592-13-1 du code de l’environnement, créé par le .

Tout d’abord, cet amendement étend le champ de la distinction entre le processus d’expertise et d’instruction par les services, d’une part, et le processus d’élaboration des avis et des décisions, d’autre part, à l’ensemble des dossiers faisant l’objet d’une expertise, soit environ 300 dossiers par an. Dans la version initiale de l’article, une telle distinction était prévue uniquement pour les avis et décisions du collège, soit environ quarante décisions par an. Le rapporteur salue cette avancée du Sénat, qui permet notamment d’inclure des décisions importantes comme le redémarrage des centrales nucléaires.

De plus, cet amendement remplace la distinction de processus par une distinction de responsabilités. Il est ainsi précisé que la personne responsable de l’expertise devra être distincte de la personne ou des personnes responsables de l’élaboration de la décision et de la prise de décision.

Enfin, les modalités de distinction et d’interaction entre les personnels chargés des activités d’expertise et les personnels chargés des activités d’élaboration de la décision et de prise de décision sont renvoyées au règlement intérieur.

● Une commission d’éthique et de déontologie est mise en place au sein de la nouvelle autorité par les amendements identiques COM-25 du rapporteur M. Pascal Martin, COM-78 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques M. Patrick Chaize (Les Républicains) et COM-32 rect. de M. Ronan Dantec (Écologiste, Solidarité et Territoires).

Le rôle de cette commission est défini dans un nouvel article L. 592-13-2 du code de l’environnement, ajouté au du présent article 2. Elle serait chargée de conseiller le collège pour la rédaction du règlement intérieur et d’en suivre l’application. Elle veillerait en particulier au respect des principes de distinction entre expertise et décision et de publication des résultats des expertises et des avis prévus par la loi.

Le rapporteur tient à rappeler qu’une telle commission existe déjà au sein de l’IRSN, en application de l’article R. 592-56 du code de l’environnement.

● L’existence des groupes permanents d’experts est consacrée au niveau législatif par les amendements identiques COM-5 du rapporteur M. Pascal Martin et COM-85 du rapporteur pour avis M. Patrick Chaize. Le  du présent article 2 est ainsi complété par un nouvel article L. 592-13-3 du code de l’environnement qui précise que l’ASNR s’appuie en tant que de besoin sur des groupes permanents d’experts, nommés à raison de leurs compétences. Les modalités de nomination de ces experts et les règles propres à assurer la diversité de l’expertise et à prévenir les conflits d’intérêts sont renvoyées au règlement intérieur de l’autorité.

L’importance de ces groupes permanents d’experts est mise en avant par le rapport de l’Opecst de juillet 2023 sur les conséquences d’une éventuelle réorganisation de l’ASN et de l’IRSN, rédigé par le rapporteur et M. le sénateur Stéphane Piednoir ([8]). Les auteurs du rapport suggèrent ainsi que le rôle de ces groupes « pourrait à l’avenir être renforcé et étendu à des sujets plus diversifiés. L’encouragement de la confrontation et de la diversité des expertises, ainsi que la publication ouverte de leurs résultats, pourrait significativement renforcer la confiance du public en favorisant une plus grande transparence dans le processus décisionnel ».

● L’amendement COM-4 du rapporteur M. Pascal Martin modifie l’article L. 592-14 du code de l’environnement, réécrit par le du présent article 2, afin de consacrer dans la loi le principe de publication des résultats des expertises réalisées par l’ARSN et des avis des groupes permanents d’experts. Il reviendra par la suite au règlement intérieur de définir les modalités de mise en œuvre de ces dispositions.

Là encore, cette disposition nouvelle s’inspire d’une recommandation du rapport précité de l’Opecst en faveur du maintien d’un « même niveau élevé d’information et de transparence » et d’« une publication distincte des rapports d’expertise ». Le rapport préconisait également une « publication ouverte » des résultats des groupes permanents d’experts.

● Afin de mieux prévenir tout conflit d’intérêts avec les industriels du secteur nucléaire, le  nouveau, qui résulte de l’adoption de l’amendement COM‑13 du rapporteur M. Pascal Martin, complète l’article L. 592‑16 du code de l’environnement afin de faciliter le déport du président de l’ASNR, membre du collège décisionnaire, sur les conventions signées avec les industriels. Les conditions dans lesquelles le président peut donner délégation de pouvoir à un membre des services de l’autorité en matière de passation de convention doivent être définies dans le règlement intérieur de l’autorité.

● Les amendements identiques COM-24 du rapporteur M. Pascal Martin, COM-45 rect. de M. Ronan Dantec (Écologiste, Solidarité et Territoires) et COM46 rect. de M. Daniel Fargeot (Union Centriste) modifient l’article L. 59213 du code de l’environnement, réécrit par le du présent article 2, afin d’étendre à l’ensemble des personnels de l’ASNR, et non à ses seuls agents, la possibilité d’être délégataires de la signature du président. Cette modification est justifiée par le fait le personnel de la future autorité sera à la fois composé d’agents publics (fonctionnaires et contractuels) et de salariés de droit privé.

 Enfin, les amendements identiques COM-12 du rapporteur M. Pascal Martin et COM-76 du rapporteur pour avis M. Patrick Chaize ainsi que l’amendement COM-10 du rapporteur M. Pascal Martin procèdent à des modifications rédactionnelles.

B.   L’examen en séance publique

Le Sénat n’a pas modifié l’article 2 en séance publique.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté treize amendements à l’article 2.

● L’amendement CD378 du rapporteur permet de clarifier la distinction entre expertise et décision. En effet, le groupe de travail ad hoc chargé de se pencher sur les modalités cette distinction, mis en place dans le cadre des travaux de préfiguration de la nouvelle autorité et réunissant des membres de l’IRSN et de l’ASN, est arrivé à un consensus permettant de garantir la qualité des résultats de l’expertise et de la prise de décision. Ce consensus correspond au principe selon lequel la personne validant l’expertise doit être distincte de la personne signant la décision ou proposant le projet de décision au collège de la nouvelle autorité. Les amendements identiques CD429 du rapporteur et CD332 de M. Emmanuel Maquet (Les Républicains) procèdent à une modification rédactionnelle de cohérence.

● Les amendements identiques CD380 du rapporteur et CD361 de M. Anthony Brosse (Renaissance) clarifient les missions de la commission d’éthique et de déontologie. Il convient en effet de ne pas limiter ses attributions à des points particuliers, afin de ne pas omettre d’autres éléments qui relèvent manifestement de ses attributions comme, par exemple, la gestion des éventuels conflits d’intérêts des personnels. Aussi, afin de permettre à la commission de jouer pleinement son rôle de mise en œuvre du cadre déontologique applicable aux autorités administratives indépendantes, ces amendements permettent une saisine de la commission sur l’ensemble des questions entrant dans le champ des articles 13 et 14 de la loi n° 2017‑55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, c’est-à-dire sur les règles déontologiques applicables aux agents et, le cas échéant, aux collaborateurs ou experts de l’autorité, ainsi que sur les règles d’organisation, de fonctionnement et de déontologie de l’autorité, définies dans le règlement intérieur.

● Tout en maintenant le principe de publication des résultats d’expertise et des avis des groupes permanents d’experts, consacré dans la loi par le Sénat, l’amendement de précision rédactionnelle CD383 du rapporteur renvoie les règles et modalités de publication au règlement intérieur de l’autorité.

● Enfin, la commission a adopté sept amendements rédactionnels CD375, CD376, CD377, CD382, CD384, CD385 et CD386 du rapporteur.

*

*     *

Article 2 bis
Règles de parité applicables à la composition du collège de l’ASNR

Adopté par la commission sans modification

 

L’article 2 bis du projet de loi, introduit par le Sénat en commission, clarifie les règles de parité au sein du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

I.   Le droit en vigueur

La composition du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est définie à l’article L. 592-2 du code de l’environnement.

Ce collège est composé de cinq membres nommés par décret du Président de la République en raison de leur compétence dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, pour une durée de six ans.

Parmi ces cinq membres, trois d’entre eux, dont le président, sont désignés par le Président de la République. Les deux autres membres sont désignés respectivement par le Président de l’Assemblée nationale et par le Président du Sénat (alinéa 2 de l’article L. 592-2 précité).

Ces désignations doivent respecter les exigences de parité qui découlent de l’article 74 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes et de l’ordonnance n° 2015-948 du 31 juillet 2015 relative à l’égal accès des femmes et des hommes au sein des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, prise sur son fondement. Ces exigences de parité trouvent donc à s’appliquer dans les autres autorités administratives indépendantes : il en est ainsi, par exemple, au sein du collège de la Commission de régulation de l’énergie (art. L. 132-2 du code de l’énergie).

Le troisième alinéa de l’article L. 592-2 précité dispose que, parmi les trois membres nommés par le Président de la République, l’écart entre le nombre d’hommes et de femmes ne doit pas être supérieur à un. Pour les deux autres membres, le membre succédant à une femme doit être un homme et réciproquement.

Ces règles ne garantissent pas, en elles-mêmes, une parité effective au sein du collège de l’ASN. En effet, jusqu’en décembre 2023, le collège était composé de trois femmes et deux hommes. À cette date, le Président du Sénat devait désigner un homme et le Président de la République avait la faculté de désigner également un homme. Si tel avait été le cas, le collège aurait été composé de quatre hommes et une seule femme.

Composition du collège au 9 décembre 2023

Source : ASN

Le Président de la République a toutefois nommé une femme, de sorte que le collège est aujourd’hui composé de trois hommes et deux femmes, mais cette composition paritaire aurait pu ne pas être respectée.

Composition du collège au 30 janvier 2024

Source : ASN

II.   LEs dispositions adoptées par le Sénat

● L’article 2 bis résulte de l’adoption, par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, d’un amendement portant article additionnel COM-90 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques M. Patrick Chaize (Les Républicains).

Il permet de maintenir une composition paritaire au sein de la nouvelle autorité en modifiant les règles de désignation qui doivent être respectées par le Président de la République. Désormais, celui-ci devra désigner les membres relevant de son pouvoir de nomination de telle sorte qu’au sein des membres du collège, hors président, il y ait le même nombre d’hommes que de femmes.

L’article 2 bis modifie le troisième alinéa de l’article L. 592-2 précité en ce sens.

● En séance publique, le Sénat a adopté l’article 2 bis sans modification.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article 2 bis sans modification.

*

*     *

Article 2 ter (supprimé)
Précisions sur l’activité de la commission des sanctions dans le rapport d’activité de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection

Supprimé par la commission

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 2 ter dispose que le rapport d’activité de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) doit rendre compte des activités de sa commission des sanctions. Cet article a été introduit sur proposition du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques du Sénat.

La commission des affaires économiques a adopté un amendement de suppression de l’article 2 ter, proposé par le rapporteur. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet amendement de suppression.

  1.   LE DROIT EN VIGUEUR

A.   L’AUTORITÉ DE sûreté NUCLÉAIRE (ASN) ÉTABLIT UN RAPPORT ANNUEL d’ACTIVITÉ

L’article L. 592-31 du code de l’environnement, issu de dispositions de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (dite loi « TSN »), prévoit que l’ASN établisse un rapport annuel d’activité qu’elle transmet à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST). À cette occasion, l’ASN exprime son avis sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Par ailleurs, à la demande de l’OPECST, le président de l’ASN rend compte des activités de celle-ci ([9]).

B.   L’EXISTENCE D’UNE COMMISSION DES SANCTIONS AU SEIN DE L’ASN

L’article L. 592-41 du code de l’environnement institue, au sein de l’ASN, une commission des sanctions.

Celle-ci existe depuis octobre 2021. Elle est constituée de huit membres dont quatre membres titulaires, issus du Conseil d’État et de la Cour de cassation, et quatre membres suppléants. Leur mandat est limité à six ans, renouvelable une fois ([10]).

La commission des sanctions se réunit sur saisine du collège de l’ASN : celui-ci peut décider d’ouvrir une procédure contre un exploitant d’installation nucléaire de base ou d’équipement sous pression nucléaire, un responsable de transport de substances radioactives ou un responsable d’activités nucléaires réglementées par le code de la santé publique ([11]) n’ayant pas pris les mesures satisfaisantes en réponse à une mise en demeure. La commission des sanctions peut alors prononcer des sanctions administratives, dont le montant est fonction de la gravité des manquements constatés.

C.   LA LOI « NUCLÉAIRE » AVAIT PRÉVU D’INTÉGRER L’ACTIVITÉ DE LA COMMISSION DES SANCTIONS DANS LE RAPPORT ANNUEL DE L’ASN

L’article 27 du projet de loi « Nucléaire » prévoyait que le rapport annuel de l’ASN rende compte des activités de la commission des sanctions. Le Conseil constitutionnel a toutefois invalidé cette disposition sur le fondement du premier alinéa de l’article 45 de la Constitution, considérant qu’il s’agissait d’un cavalier législatif ([12]).

II.   leS dispositIons adoptÉes par le sénat

L’article 2 ter résulte de l’adoption de l’amendement COM-91 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques du Sénat, Patrick Chaize (LR). Cet amendement a été adopté en commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (CATDD). Il reprend à l’identique les dispositions censurées de l’article 27 de la loi « Nucléaire », en prévoyant que le rapport annuel de l’ASN comporte un compte rendu de l’activité de la commission des sanctions de l’autorité.

Aucun amendement n’a été adopté par le Sénat en séance publique.

Il peut être relevé que le rapport annuel de l’ASN fait état du rôle et des activités de la commission des sanctions ([13]). Plus généralement :

– l’article L. 592-29 du code de l’environnement permet à l’OPECST, aux commissions permanentes compétentes du Parlement et au Gouvernement de saisir l’ASN pour qu’elle formule des avis ou réalise des études sur les questions relevant de sa compétence ;

– l’article L. 592-30 du code de l’environnement prévoit que le président de l’ASN rende compte des activités de celle-ci à la demande de l’OPECST ;

– l’article L. 592-31 du code de l’environnement prévoit la transmission du rapport annuel d’activité de l’ASN à l’OPECST. À cette occasion, l’ASN doit se prononcer sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ;

– enfin, l’OPECST et les commissions de chaque assemblée parlementaire demeurent libres de la fixation de leur ordre du jour et peuvent auditionner l’ASN quand elles le souhaitent.

III.   LES TRAVAUX DE la commission

La commission des affaires économiques a adopté l’amendement de suppression CE97 du rapporteur pour avis et a en conséquence supprimé l’article 2 ter. En effet, l’ASN réalise déjà un bilan d’activité de la commission des sanctions dans son rapport annuel. De plus, il n’est pas du ressort de la loi de préciser le contenu de ce rapport. Enfin, comme cela a été rappelé supra, l’OPECST dispose déjà de tous les pouvoirs de contrôle nécessaires si elle souhaite obtenir des informations complémentaires sur l’activité de cette commission des sanctions.

Suivant l’avis de la commission des affaires économiques, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a supprimé l’article 2 ter.


*

*     *

Article 3
Activités pouvant être exercées par l’ASNR, notamment en matière de recherche

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 3 du projet de loi précise certaines activités exercées par l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), notamment en matière de recherche, de formation ou de traitement de données, issues de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Cet article a été enrichi par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, en prévoyant notamment la mise en place d’un conseil scientifique au sein de la nouvelle autorité.

I.   Le droit en vigueur

A.   La mission de recherche de l’IRSN

L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), établissement public à caractère industriel et commercial (Epic), exerce, à l’exclusion de toute responsabilité d’exploitant d’installation nucléaire de base, des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire, en application de l’article L. 592-45 du code de l’environnement. Ces missions sont détaillées à l’article R. 592-39 du même code.

Missions d’expertise et de recherche de l’IRSN
(article R. 592-39 du code de l’environnement)

Au titre de ses missions, l’IRSN :

– réalise des expertises, des recherches et des travaux, notamment d’analyses, de mesures ou de dosages, pour des organismes publics ou privés, français ou étrangers ;

– définit des programmes de recherches, menés en son sein ou confiés à d’autres organismes de recherche français ou étrangers, en vue de maintenir et développer les connaissances et compétences nécessaires à l’expertise dans ses domaines d’activité ;

– contribue à la formation en radioprotection des professionnels de santé et des personnes professionnellement exposées ;

– apporte un appui technique à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense et aux autorités et services de l’État qui en font la demande ;

– propose à l’ASN, au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense, en cas d’incident ou d’accident impliquant des sources de rayonnements ionisants, des mesures d’ordre technique, sanitaire et médical propres à assurer la protection de la population, des travailleurs et de l’environnement et à rétablir la sécurité des installations. Dans de telles circonstances, l’Institut fournit également, en tant que de besoin, un appui technique aux autres autorités de l’État concernées ;

– participe à la veille permanente en matière de radioprotection, notamment en concourant à la surveillance radiologique de l’environnement et en assurant la gestion et l’exploitation des données dosimétriques concernant les travailleurs exposés aux rayonnements ionisants ;

– assure la gestion de l’inventaire des sources de rayonnements ionisants ;

– assure la comptabilité centralisée des matières nucléaires pour les autorités de l’État chargées de la protection et du contrôle des matières nucléaires non affectées aux moyens nécessaires à la mise en œuvre de la politique de dissuasion et pour les autorités de l’État chargées des accords internationaux de coopération et de non-prolifération nucléaire ;

– apporte son concours technique aux autorités de l’État chargées de la protection et du contrôle des matières nucléaires, de leurs installations et de leur transport ainsi que de l’interdiction des armes chimiques.

L’existence d’un important secteur électronucléaire en France ainsi que le recours croissant aux rayonnements ionisants dans les domaines de la recherche, de l’industrie ou de la santé supposent pour l’IRSN de disposer d’experts de haut niveau, afin de contribuer au progrès des connaissances scientifiques et techniques dans le domaine des risques nucléaires et radiologiques. L’activité de recherche de l’Institut lui permet également de développer et de consolider ses facultés d’expertise, de surveillance et d’intervention en situation d’urgence.

Cette double activité d’expertise et de recherche, partagée par d’autres organismes d’évaluation des risques comme l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) ou le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), garantit une expertise tenant compte des dernières avancées de la recherche, tout en contribuant à l’attractivité de l’Institut.

Par ailleurs, le statut d’Epic favorise les activités de recherche de l’IRSN. Doté de la personnalité morale, l’Institut peut conclure des partenariats avec d’autres établissements de recherche, des établissements de santé, mais également avec les industriels du secteur nucléaire. Ainsi, la plupart des programmes de recherche menés par l’IRSN sont conçus dans une approche partenariale avec des universités, des laboratoires ou des organismes techniques de sûreté nucléaire. Ils s’inscrivent également dans le cadre de dispositifs tels que le programme « Recherche en matière de sûreté nucléaire et radioprotection » de l’Agence nationale de la recherche ou le programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon Europe » de la Commission européenne. Ces dispositifs de financement à l’échelle nationale ou européenne contribuent au développement d’une recherche de haut niveau et favorisent l’émergence de partenariats nationaux, européens et internationaux. Avec les industriels, des accords de collaboration ou des accords‑cadres pluriannuels ont notamment été mis en place avec Électricité de France (EDF), Framatome ou Orano afin de mieux connaître les matériaux et équipements des installations nucléaires et de définir des programmes de recherche à la lumière des perspectives industrielles.

Enfin, la politique de recherche de l’IRSN s’appuie sur un conseil scientifique, prévu à l’article R. 592-54 du code de l’environnement. Ce conseil examine, pour avis, les programmes d’activités de l’établissement. Il s’assure de la pertinence des programmes de recherche que définit l’établissement et de leur suivi. Il évalue leurs résultats et peut formuler toute recommandation sur l’orientation des activités de l’Institut. En outre, un comité d’orientation des recherches est chargé de conseiller le conseil d’administration en matière d’objectifs et de priorités pour les recherches menées par l’établissement dans les champs de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, à l’exclusion des domaines relevant de la défense, conformément à l’article L. 592-50 du même code.

B.   L’ASN s’appuie sur les travaux de recherche de l’IRSN

Aux termes de l’article L. 592-31-1 du code de l’environnement, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) suit les travaux de recherche et de développement menés aux plans national et international pour la sûreté nucléaire et la radioprotection. Elle formule toutes propositions ou recommandations sur les besoins de recherche pour la sûreté nucléaire et la radioprotection. Ces propositions et recommandations sont communiquées aux ministres et aux organismes publics exerçant les missions de recherche concernés, afin qu’elles soient prises en compte dans les orientations et la définition des programmes de recherche et de développement d’intérêt pour la sûreté nucléaire ou la radioprotection.

L’article L. 592-46 du même code précise que, pour la réalisation de ses missions, l’ASN a recours à l’appui technique, sous la forme d’activités d’expertise soutenues par des activités de recherche, de l’IRSN. L’autorité oriente la programmation stratégique relative à cet appui technique.

Dans ce cadre, des dispositions encadrent l’accès et la divulgation de données relatives aux rayonnements ionisants. Ainsi, l’article L. 592-46-1 du code de l’environnement prévoit que lorsque l’IRSN est chargé, à la demande de l’ASN ou d’une autre autorité publique, d’une mission d’expertise d’une situation d’exposition potentielle ou avérée aux rayonnements ionisants, il accède, à sa demande et dans des conditions préservant la confidentialité des données à l’égard des tiers, aux informations qui lui sont strictement nécessaires, sans que puisse lui être opposé le secret médical ou le secret des affaires. Seuls les personnels de l’IRSN habilités à cet effet par le directeur général de l’Institut ont accès à ces données. L’article L. 592-48 du même code prévoit quant à lui que les personnels, collaborateurs occasionnels et membres des conseils et commissions de l’Institut sont tenus, sous peine de sanctions pénales, de ne pas divulguer les informations liées aux données dosimétriques individuelles auxquelles ils ont accès.

Enfin, l’ASN s’appuie sur un comité scientifique composé de personnalités scientifiques reconnues dans leur domaine et nommées par le collège. Ce comité est chargé de lui apporter une vision des travaux de recherche et de développement menés aux plans national et international pour la sûreté nucléaire et la radioprotection, ainsi que la connaissance des axes stratégiques de recherche, en particulier ceux des ministères et des organismes publics impliqués dans la recherche (orientations stratégiques des organismes, appels à projets…) ([14]).

II.   Le texte initial du projet de loi

La future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) devant disposer du statut d’autorité administrative indépendante, les règles relatives à ses attributions doivent être fixées par la loi, comme le prévoit l’article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.

Le présent article 3 procède donc aux adaptations législatives nécessaires à la reprise, par la nouvelle autorité, d’un certain nombre d’activités de l’IRSN, en particulier en matière de recherche, mais également de formations ou de délivrance d’habilitations.

Le I crée trois nouveaux articles L. 592-14-1 à L. 592-14-3 du code de l’environnement afin de permettre à l’ASNR, comme c’est le cas aujourd’hui de l’IRSN :

– d’exercer des activités nucléaires, à l’exception de celles soumises au régime des installations nucléaires de base (nouvel article L. 592-14-1) ;

– de dispenser certaines activités commerciales telles que la formation, la délivrance d’attestations, d’agréments, d’habilitations, de qualifications ou de certifications professionnelles, de mettre en œuvre des procédures d’évaluation ou de contrôle de la conformité des équipements de travail et des équipements de protection individuelle, d’assurer la gestion de données d’intérêt public pouvant comprendre des données à caractère personnel et de santé.

Ces activités peuvent donner lieu à des rémunérations pour services rendus, selon des règles de déontologie définies par le règlement intérieur de la nouvelle autorité (nouvel article L. 592‑14‑2) ;

– de bénéficier, pour la réalisation de ses expertises, de l’appui technique des services de l’État et de ses établissements publics compétents (nouvel article L. 592-14-3).

Le II rétablit l’article L. 592-15 du code de l’environnement pour prévoir que l’ASNR est assimilée à un établissement public de recherche. La nouvelle autorité bénéficiera ainsi de toutes les prérogatives attachées à ce statut, notamment pour pouvoir employer différents profils de chercheurs (doctorants, chercheurs en mission, chercheurs étrangers…) ou pour conclure des partenariats de recherche et participer à des programmes de recherche, comme c’est actuellement le cas de l’IRSN.

Le  du III transfère à l’ASNR les missions de l’IRSN relatives aux rayonnements ionisants. Les nouveaux articles L. 592-24 à L. 592-24-3 du code de l’environnement prévoient ainsi :

– que la nouvelle autorité assure, en lien avec le ministère du travail, la gestion et l’exploitation des données des mesures de l’exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants (nouvel article L. 592-24) ;

– que ses agents, collaborateurs occasionnels et cocontractants sont tenus, sous peine de sanctions pénales, de ne pas divulguer les informations nominatives liées aux données dosimétriques individuelles auxquelles ils ont accès (nouvel article L. 592-24-1) ;

– en cas d’expertise d’une situation d’exposition aux rayonnements ionisants, que ses agents accèdent aux informations qui leur sont strictement nécessaires, sans que puisse leur être opposé le secret médical ou le secret en matière industrielle ou commerciale (nouvel article L. 592-24-2) ;

– que la nouvelle autorité gère l’inventaire des sources de rayonnements ionisants et y assure l’accès aux agents de contrôle de l’inspection du travail et aux inspecteurs de la radioprotection (nouvel article L. 592-24-3).

Un nouvel article L. 592-24-4 du code de l’environnement, également créé par le du III, précise que l’ASNR apporte son appui technique au Gouvernement, aux autorités publiques, aux services de santé de prévention et de santé au travail ainsi qu’aux employeurs.

Le du III complète l’article L. 592-28 dudit code pour indiquer que l’ASNR participe, notamment par ses activités de recherche, aux échanges internationaux dans ses domaines de compétence.

Le du III crée une nouvelle sous-section intitulée : « Attributions en matière de recherche » au sein de la section 4 du chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement, relative aux attributions de l’ASNR, composée d’un unique article L. 592-28-2.

Aux termes de cet article, la nouvelle autorité suit les travaux de recherche et de développement menés, aux plans national et international, en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection. Elle formule toutes propositions ou recommandations sur les besoins de recherche pour la sûreté nucléaire et la radioprotection. Ces propositions et ces recommandations sont communiquées aux ministres et aux organismes publics exerçant les missions de recherche concernées, afin qu’elles soient prises en compte dans les orientations et la définition des programmes de recherche et de développement d’intérêt pour la sûreté nucléaire ou la radioprotection. Elle définit des programmes de recherche menés en son sein ou confiés à d’autres organismes de recherche, français ou étrangers, en vue de maintenir et de développer les connaissances et les compétences nécessaires à l’accomplissement de ses missions.

Les , et  du III procèdent à des modifications rédactionnelles de cohérence des intitulés des sous-sections 1, 2 et 3 de la section 4 du chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement, relative aux attributions de la nouvelle autorité.

III.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté cinq amendements au présent article 3.

Afin de permettre à l’ensemble des personnels d’accéder aux données dosimétriques individuelles et aux données nécessaires à l’expertise d’une situation d’exposition aux rayonnements ionisants, l’amendement COM-16 du rapporteur M. Pascal Martin (Union Centriste) remplace le terme d’« agents » par celui, plus large, de « personnels ». En effet, la nouvelle autorité sera à la fois composée d’agents publics (fonctionnaires et contractuels) et de salariés de droit privé.

La commission a également adopté quatre amendements rédactionnels COM-15 du rapporteur M. Pascal Martin, COM-81 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques M. Patrick Chaize (Les Républicains) et les amendements identiques COM-14 du rapporteur M. Pascal Martin et COM-79 du rapporteur pour avis M. Patrick Chaize.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté l’article 3 sans modification.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté onze amendements à l’article 3.

● L’amendement CD435, adopté par la commission des affaires économiques à l’initiative de Mme Marie-Noëlle Battistel (Socialistes et apparentés) et présenté par le rapporteur pour avis de cette commission, M. Antoine Armand (Renaissance), étend la liste des activités de l’ASNR pouvant donner lieu à des rémunérations pour services rendus. Il complète le I du nouvel article L. 592-14-2 du code de l’environnement afin de permettre à la nouvelle autorité de réaliser des travaux d’analyse, de mesurage et de dosage ainsi que des activités d’expertise et de recherche en appui d’organismes publics ou privés français ou étrangers, sous réserve de ne pas se trouver en situation de conflit d’intérêts et de ne pas porter atteinte à la défense et à la sécurité nationale.

Le rapporteur partage la préoccupation des auteurs de l’amendement et considère que la liste des activités mentionnées au I du nouvel article L. 592-14-2 mériterait d’être précisée et complétée, notamment pour y intégrer les activités d’évaluation et d’analyse de certains matériels comme les filtres à charbon actifs, dont l’IRSN est le spécialiste en France, ou certains filtres à air présents dans les installations nucléaires. Pour autant, toutes les prestations réalisées aujourd’hui par l’IRSN ne pourront pas être pérennisées, principalement pour des raisons de déontologie. Dans ce contexte, la rédaction proposée par l’amendement CD435 parait a priori trop large, c’est pourquoi le rapporteur a demandé le retrait de cet amendement, au profit d’une rédaction plus précise inventoriant les activités commerciales non couvertes par la rédaction actuelle, qui pourrait faire l’objet d’un amendement en séance publique.

 La commission a en outre adopté deux amendements du rapporteur visant à permettre à l’ASNR de se positionner comme un acteur majeur de la recherche, dans la continuité des travaux internationalement reconnus de l’IRSN.

– L’amendement CD397 prévoit que la nouvelle autorité présente chaque année les programmes de recherche menés en son sein ou confiés à d’autres organismes de recherche devant l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst). Cet amendement améliorera l’information et le suivi de l’Opecst en matière de recherche dans le champ de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

– L’amendement CD396 dote l’ASNR d’un conseil scientifique, sur le modèle de celui qui existe aujourd’hui au sein de l’IRSN. La consécration législative de cette instance traduit la détermination de la nouvelle autorité à jouer un rôle important en matière d’activités de recherche. Ce conseil sera sollicité sur la stratégie scientifique de l’autorité ainsi que sur toute autre question relative à la recherche en sûreté nucléaire et en radioprotection. Il sera chargé d’évaluer la pertinence des programmes de recherche que définit l’autorité, d’en effectuer un suivi et d’évaluer leurs résultats. Il pourra en outre formuler toute recommandation sur l’orientation des activités de recherche de l’ASNR. 

● Enfin, la commission a adopté huit amendements rédactionnels CD389, CD390, CD391, CD392, CD393, CD394, CD395 et CD387 du rapporteur.

*

*     *

Article 4
Dispositions relatives à la transparence, l’information et l’association du public

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 4 du projet de loi, dans sa rédaction initiale, renforce l’information du Parlement et de la société civile en prévoyant que l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) présente à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) et au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) les sujets sur lesquels une association du public est organisée.

Le Sénat a complété cet article pour permettre à l’Opecst, au HCTISN et à l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli) de formuler des observations sur les projets de décision d’adoption ou de modification du règlement intérieur de l’ASNR. Cette disposition, qui soulève des difficultés d’ordre déontologique, a été supprimée par la commission.

I.   Le droit en vigueur

A.   L’information du public et de la société civile

Les textes internationaux, conventionnels et constitutionnels garantissent le droit à l’information et à la participation du public en matière environnementale.

La Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, signée le 25 juin 1998, établit le droit de toute personne d’obtenir des autorités publiques les informations qu’elles détiennent sur l’environnement.

Au niveau européen, le droit à l’information en matière nucléaire s’exerce dans le cadre défini par la directive 2014/87/Euratom du 8 juillet 2014 modifiant la directive 2009/71/Euratom établissant un cadre communautaire pour la sûreté des installations nucléaires. Cette directive prévoit en particulier que « les États membres veillent à ce que le cadre national exige que l’autorité de réglementation compétente : […] f) fournisse des informations relatives à la sûreté nucléaire » (point 6 de la section I sur les obligations générales).

Au niveau national, l’article 7 de la Charte de l’environnement, qui a valeur constitutionnelle ([15]), prévoit que « toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ».

Le code de l’environnement comporte plusieurs dispositions relatives à l’information du public en matière nucléaire. Son article L. 592-1, qui définit la mission de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), dispose que cette autorité participe à l’information du public et à la transparence dans ses domaines de compétence. À ce titre, elle rend publics les avis et décisions délibérés par son collège dans le respect des règles de confidentialité prévues par la loi, conformément à l’article L. 592-27 du même code.

Concernant l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), l’article R. 592-41 du code de l’environnement prévoit que la nature et les résultats des programmes de recherche menés par l’Institut font l’objet, en fonction des domaines de compétences concernés, d’une communication aux autorités chargées du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ainsi qu’au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), au Haut Conseil de la santé publique et au Conseil d’orientation des conditions de travail.

Au-delà de ces dispositions législatives et règlementaires, l’ASN et l’IRSN mettent en œuvre, séparément ou conjointement, des concertations et des procédures de participation du public, au travers notamment de « dialogues techniques ». L’étude d’impact annexée au présent projet de loi rappelle que l’ASN est en contact étroit avec les commissions locales d’information (CLI) et souligne que la qualité des interactions est saluée par l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli). L’ASN et l’Anccli coprésident la conférence nationale des CLI qui se tient chaque année. De son côté, l’IRSN répond aux sollicitations des CLI et de l’Anccli.

Les commissions locales d’information (CLI)

Créées par une circulaire du Premier ministre du 15 décembre 1981, les commissions locales d’information (CLI) ont été mises en place dans les années 1980 autour de la plupart des installations nucléaires, à l’initiative des conseils départementaux. Depuis 2000, l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli) représente les CLI au niveau national.

La loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire confère une base légale à ces commissions. Les CLI ont une mission générale de suivi, d’information et de concertation en matière de sûreté nucléaire sur les personnes et sur l’environnement pour ce qui concerne les installations du site. Elles sont chargées d’assurer une large diffusion des résultats de leurs travaux, sous une forme accessible au plus grand nombre (article L. 125-17 du code de l’environnement).

Pour l’exercice de leurs missions, les CLI peuvent faire réaliser des expertises, y compris des études épidémiologiques, et faire procéder à toute mesure ou analyse dans l’environnement relative aux émissions ou rejets des installations du site. L’exploitant, l’ASN et les autres services de l’État leur communiquent tous les documents et toutes les informations nécessaires à l’accomplissement de leurs missions (article L. 125-24 du même code).

Les CLI sont financées par les collectivités territoriales et par l’ASN.

L’ASN et l’IRSN sont, en outre, associés aux travaux du HCTISN. Ils ont ainsi été largement impliqués dans la concertation réalisée de septembre 2018 à mars 2019 sous l’égide du Haut Comité dans le cadre du quatrième réexamen de sûreté des réacteurs de 900 mégawatts électriques (MWe) du parc nucléaire français ([16]).

Le Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)

Le HCTISN a été institué par la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.

Défini à l’article L. 125-34 du code de l’environnement, le Haut Comité est une instance d’information, de concertation et de débat sur les risques liés aux activités nucléaires et l’impact de ces activités sur la santé des personnes, sur l’environnement et sur la sécurité nucléaire. À ce titre, il peut émettre un avis sur toute question dans ces domaines ainsi que sur les contrôles et l’information qui s’y rapportent. Il peut également se saisir de toute question relative à l’accessibilité de l’information en matière de sécurité nucléaire et proposer toute mesure de nature à garantir ou à améliorer la transparence.

Le HCTISN peut être saisi par le ministre chargé de la sûreté nucléaire, par les présidents des commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, par le président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), par les présidents des commissions locales d’information (CLI) ou par les exploitants d’installations nucléaires de base de toute question relative à l’information concernant la sécurité nucléaire et son contrôle.

Ce Haut Comité représente l’ensemble des parties prenantes de la sécurité nucléaire. Il est composé de 40 membres listés à l’article L. 125-37 du code de l’environnement : des parlementaires, des représentants des CLI, d’associations, des exploitants, d’organisations syndicales de salariés, de personnalités qualifiées et de représentants de l’ASN, des autres services de l’État concernés et de l’IRSN.

B.   L’information du Parlement

Créé par la loi n° 83-609 du 8 juillet 1983 ([17]), l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) est un organe d’information commun à l’Assemblée nationale et au Sénat composé de dix-huit députés et dix‑huit sénateurs. Il a pour mission, aux termes de la loi, « d’informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique afin, notamment, d’éclairer ses décisions ».

L’Opecst a adopté plusieurs rapports sur la sécurité nucléaire, portant notamment sur le contrôle des équipements sous pression nucléaires en 2015 ([18]), sur la sûreté de ces équipements en 2017 ([19]), ou encore sur les drones et la sécurité des installations nucléaires en 2015 ([20]).

Plus récemment, le rapporteur et le sénateur M. Stéphane Piednoir ont rédigé, au nom de l’Opecst, un rapport sur les conséquences d’une éventuelle réorganisation de l’ASN et de l’IRSN, rendu public en juillet 2023 ([21]).

La compétence et l’expertise de l’Opecst en matière nucléaire sont reconnues par plusieurs dispositions législatives qui lui confèrent un rôle d’information et de contrôle. L’article L. 592-29 du code de l’environnement permet ainsi à l’Office parlementaire de demander à l’ASN de formuler des avis ou de réaliser des études sur des questions relevant de sa compétence. En application de l’article L. 592-30 du même code, le président de l’ASN rend compte à l’Opecst des activités de l’autorité. L’article L. 592-31 prévoit la transmission à l’Office du rapport annuel d’activité de l’ASN. L’Opecst est enfin chargé d’évaluer le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, mis à jour tous les cinq ans, en application de l’article L. 542‑1‑2 du même code.

II.   Le texte initial du projet de loi

Le présent article 4 renforce l’association de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) et du Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) à la sûreté nucléaire.

Le I crée, au sein de la section 4 du chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement, relative aux attributions de l’ASNR, une nouvelle sous-section intitulée « Attributions en matière d’information et de transparence », composée des articles L. 592-29 à L. 592-31.

Le II ajoute, au sein de cette nouvelle sous-section, un nouvel article L. 592‑29-1.

Le premier alinéa de cet article prévoit que l’ASNR présente à l’Opecst et au HCTISN, qui peut émettre un avis, les sujets sur lesquels une association du public est organisée ainsi que les modalités de sa mise en œuvre et leur en rend compte.

Le deuxième alinéa de cet article transfère à la nouvelle autorité les obligations d’information imposées à l’IRSN par l’article R. 592-41 du code de l’environnement, tout en y associant l’Opecst. Il prévoit ainsi que l’ASNR communique la nature et les principaux résultats de ses programmes de recherche aux autorités concernées, à l’Opecst, au HCTISN, au Haut Conseil de la santé publique et au Conseil d’orientation des conditions de travail, selon leurs domaines de compétence respectifs.

III.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté quatre amendements au présent article 4.

● L’amendement COM-82 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, M. Patrick Chaize (Les Républicains), sous-amendé par le rapporteur M. Pascal Martin (Union Centriste), modifie le nouvel article L. 592‑29‑1 du code de l’environnement pour ajouter les commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat aux bénéficiaires des obligations d’information qui s’appliquent à l’ASNR. Il prévoit, d’une part, que la transmission à l’Opecst des sujets sur lesquels une association du public est organisée se fait en lien avec ces commissions et, d’autre part, que la nature et les principaux résultats des programmes de recherche leur sont communiqués.

● Les amendements identiques COM-17 du rapporteur M. Pascal Martin et COM-83 du rapporteur pour avis M. Patrick Chaize complètent le nouvel article L. 592-29-1 précité afin de prévoir que la nouvelle autorité :

– présente son projet de décision d’adoption du règlement intérieur à l’Opecst qui peut formuler des observations ;

– transmet ce même projet au HCTISN et à l’Anccli qui peuvent également formuler des observations ;

– transmet son projet de décision de modification du règlement intérieur à l’Opecst, au HCTISN et à l’Anccli qui peuvent formuler des observations.

● Enfin, l’amendement COM-84 du rapporteur pour avis M. Patrick Chaize précise que les observations formulées par l’Opecst sur un projet de décision d’adoption ou de modification du règlement intérieur de l’ASNR sont élaborées en lien avec les différentes commissions permanentes compétentes des deux assemblées.

B.   L’examen en séance publique

Le Sénat n’a pas modifié l’article 4 en séance publique.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Outre trois amendements rédactionnels CD398, CD399 et CD400 du rapporteur, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté deux amendements identiques CD402 du rapporteur et CD194 de M. Antoine Armand (Renaissance), rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, afin de supprimer la disposition, introduite par le Sénat, prévoyant une transmission du projet d’adoption ou de modification du règlement intérieur de la nouvelle autorité à l’Opecst, au HCTISN et à l’Anccli, qui pouvaient formuler les observations.

Cet ajout soulevait plusieurs difficultés, en particulier sur le plan déontologique. En effet, de nombreux membres du HCTISN entretiennent des liens forts avec la future autorité : les exploitants, qui auraient été amenés à formuler un avis sur la manière dont fonctionne l’autorité chargée de les contrôler, les associations et les commissions locales d’information (CLI), dont certaines sont financées par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le seront demain par la nouvelle autorité, ou encore des administrations de l’État, qui auraient été amenées à se prononcer sur le fonctionnement d’une autorité administrative indépendante. L’Anccli, quant à elle, est financée par l’ASN à hauteur de 1,2 million d’euros par an. La validation par cette association du règlement intérieur de l’autorité qui la finance pourrait être susceptible de créer des blocages pour des motivations qui ne seraient pas nécessairement liées à la sûreté. De plus, il est hétérodoxe de prévoir la consultation obligatoire d’une structure associative concernant le fonctionnement d’une autorité administrative. Enfin, de nombreuses dispositions du projet de loi permettent de mieux associer l’Opecst au suivi et au contrôle de la sûreté nucléaire, en particulier aux articles 3, 4 et 4 quater. La transmission à l’Opecst du projet de règlement intérieur ne parait donc pas indispensable, d’autant que ce règlement sera rendu public et pourra faire l’objet de recours.

*

*     *

Article 4 bis (supprimé)
Rôle et composition de la Commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs

Supprimé par la commission

 

L’article 4 bis, introduit par le Sénat en séance publique, confortait le rôle d’expert de la Commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs auprès de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst). Il modifiait en outre sa composition. La commission a supprimé cet article.

I.   Le droit en vigueur

La Commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs (CNE2) a été instituée par la loi n° 2006‑739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs. Elle a succédé à la première Commission nationale d’évaluation, créée par la loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991 modifiant le code du travail et le code de la santé publique en vue de favoriser la prévention des risques professionnels et portant transposition de directives européennes relatives à la santé et à la sécurité du travail.

Les missions et la composition de la CNE2 sont définies à l’article L. 542‑3 du code de l’environnement.

La Commission nationale est chargée d’évaluer annuellement l’état d’avancement des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs. Cette évaluation donne lieu à un rapport annuel qui fait également état des recherches effectuées à l’étranger. Il est transmis au Parlement, qui en saisit l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst). Le rapport est ensuite rendu public.

La CNE2 est composée de douze membres :

– six personnalités qualifiées, dont au moins deux experts internationaux, désignées à parité par l’Assemblée nationale et par le Sénat, sur proposition de l’Opecst ;

– deux personnalités qualifiées désignées par le Gouvernement sur proposition de l’Académie des sciences morales et politiques ;

– quatre experts scientifiques, dont au moins un expert international, désignés par le Gouvernement sur proposition de l’Académie des sciences.

Le mandat des membres de la Commission, d’une durée de six ans, est renouvelable une fois. La Commission est renouvelée par moitié tous les trois ans.

II.   les dispositions adoptées par le sénat

L’article 4 bis résulte de l’adoption par le Sénat, en séance publique, d’un amendement portant article additionnel n° 4 rect. bis de M. Stéphane Piednoir (Les Républicains), qui a reçu un avis défavorable du Gouvernement.

Cet article additionnel modifie l’article L. 542-3 du code de l’environnement afin de conforter le rôle de la CNE2 et de modifier sa composition.

Le précise que l’Opecst peut demander à la Commission nationale de lui présenter une expertise sur un sujet relevant de son domaine de compétence, en dehors du seul cadre de la remise de son rapport annuel.

Le modifie la composition de la Commission pour porter de six à huit le nombre de personnalités qualifiées désignées à parité par l’Assemblée nationale et par le Sénat, sur proposition de l’Opecst. La Commission comporterait ainsi quatorze membres, contre douze aujourd’hui.

Enfin, le prévoit que le Haut-Commissaire à l’énergie atomique soit membre de droit de la CNE2.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté un amendement CD436 de suppression de l’article 4 bis, présenté par M. Antoine Armand au nom de la commission des affaires économiques, avec un avis favorable du rapporteur.

Le de cet article, qui prévoyait que le Haut-Commissaire à l’énergie atomique soit membre de droit de la CNE2, était en effet problématique dans la mesure où ce dernier est appelé à exercer un rôle de conseil en matière de politique nucléaire auprès du Gouvernement. Il importe donc que son positionnement reste clair et qu’il n’engage pas le Gouvernement au titre des avis de la CNE2, qui est une commission indépendante. En outre, la CNE2 peut tout à fait réaliser une expertise pour l’Opecst, sans qu’il soit nécessaire de l’inscrire dans la loi, comme le prévoyait le .

*

*     *

Article 4 ter
Correction d’une erreur rédactionnelle

Adopté par la commission sans modification

 

L’article 4 ter, introduit par le Sénat en séance publique, corrige une erreur rédactionnelle dans le code de l’environnement.

I.   Les dispositions adoptées par le Sénat

L’article 4 ter résulte de l’adoption par le Sénat, en séance publique, d’un amendement portant article additionnel n° 5 rect. bis de M. Stéphane Piednoir (Les Républicains), qui a reçu un avis favorable du Gouvernement.

Cet amendement corrige une erreur rédactionnelle à l’article L. 592-30 du code de l’environnement, relatif à l’information de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) sur l’activité de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

II.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

Cet article a été adopté sans modification par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

*

*     *

Article 4 quater
Transmission à l’Opecst du rapport annuel d’activité de l’ASNR

Adopté par la commission sans modification

 

L’article 4 quater, introduit par le Sénat en séance publique, précise que le rapport annuel d’activité établi par l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) est transmis à l’Opecst avant sa publication.

I.   Le droit en vigueur

En application de l’article L. 592-31 du code de l’environnement, le rapport annuel d’activité établi par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est transmis à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst).

À cette occasion, l’ASN se prononce sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

II.   les dispositions adoptées par le sénat

L’article 4 quater résulte de l’adoption par le Sénat, en séance publique, d’un amendement portant article additionnel n° 3 rect. bis de M. Stéphane Piednoir (Les Républicains). Le Gouvernement a donné un avis de sagesse à cet amendement.

Il complète l’article L. 592-31 du code de l’environnement afin de préciser que le rapport annuel d’activité établi par l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) est transmis à l’Opecst avant sa publication. Comme l’a indiqué l’auteur de l’amendement, il s’agit de mettre en accord le code de l’environnement avec la pratique existante et de garantir le maintien, à l’avenir, de cette pratique qui contribue à améliorer l’information du Parlement.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement durable a adopté l’article 4 quater sans modification.

*

*     *

Section 2
Dispositions transitoires

Article 5
Transfert des biens, droits et obligations de l’IRSN et continuité du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 5 du projet de loi prévoit le transfert à titre gratuit des biens, droits et obligations de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) à l’État et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Cet article permet en outre d’assurer la continuité des mandats des membres du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) au sein de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). 

I.   Le texte initial du projet de loi

Le I de l’article 5 prévoit que les biens, droits et obligations de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sont transférés à titre gratuit, en tenant compte de la réparation des attributions prévues par le présent projet de loi :

– à l’État, qui comprend l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) et le ministère de la Défense, qui ne disposent pas de la personnalité morale ;

– au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Les modalités de ce transfert doivent être précisées par décret en Conseil d’État.

Il est précisé que le I ne concerne pas le transfert des salariés et des conventions et accords collectifs de l’IRSN, prévu par les articles 7 et 8 du présent projet de loi.

Afin d’assurer la continuité du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, le II de l’article 5 prévoit de ne pas interrompre le mandat des membres du collège de l’ASN, qui deviendront, jusqu’au terme initial de leur mandat, membres du collège de la nouvelle autorité.

II.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement COM-67 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques M. Patrick Chaize (Les Républicains).

Cet amendement, relatif aux modalités de transfert des biens, droits et obligations de l’IRSN à l’État et au CEA mentionnées au I, a trois objets :

– il prévoit que ce transfert « respecte » la répartition des attributions prévue par le présent projet de loi, et non plus qu’il en « tient compte » ;

– il précise que ce transfert ne donne lieu au versement d’aucun honoraire ;

– il prévoit la possibilité de recourir à une convention de transfert.

B.   L’examen en séance publique

Le Sénat n’a pas modifié l’article 5 en séance publique.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté trois amendements rédactionnels CD407, CD405 et CD408 du rapporteur.

*

*     *

Chapitre II
Ressources humaines

Section 1
Dispositions modifiant le code de l’environnement

Article 6
Statut des personnels de la future autorité, instances et règles du dialogue social et harmonisation des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature

Adopté par la commission avec modifications

 

Cet article rassemble les dispositions concernant le statut des personnels de la future autorité, les instances représentatives du personnel et les règles du dialogue social. Il est ainsi prévu une cohabitation des statuts de droit public et de droit privé des personnels au sein de la nouvelle autorité, la mise en place d’une instance de dialogue social spécifique – le comité social d’administration – compétente pour l’ensemble des personnels, l’instauration de règles d’élections professionnelles et de négociations collectives tenant compte du caractère mixte de l’autorité, et l’harmonisation des indemnités accessoires et des remboursements de frais de toute nature.

I.   Le droit en vigueur

A.   deux entités fonctionnant avec des règles différentes en matière de ressources humaines

L’Autorité de sûreté nucléaire est une autorité administrative indépendante (AAI) qui emploie, conformément au statut général des AAI et des autorités publiques indépendantes (API), des fonctionnaires (environ 400) et des contractuels de droit public (moins de 80 personnes). L’ASN peut, en outre, bénéficier de la mise à disposition, avec leur accord, d’agents d’établissements publics (article L. 592-12 du code de l’environnement). Selon l’étude d’impact annexée au projet de loi, ces agents représentent 11 % de l’effectif total de l’ASN ; ils proviennent majoritairement de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Un comité social d’administration (CSA) constitue l’instance de dialogue social de l’ASN, comme la loi le prévoit pour les administrations de l’État, y compris pour les AAI (article L. 251-2 du code général de la fonction publique). Ce CSA est chargé de l’examen des questions collectives de travail ainsi que des conditions de travail ; en son sein, une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail est mise en place. Le cadre général des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature est actuellement défini, pour l’ASN, par le code général de la fonction publique, ainsi que par des décrets d’application.

L’IRSN est, quant à lui, un établissement public industriel et commercial (EPIC), qui emploie des salariés de droit privé, pour un effectif total de 1 744 personnes en 2022. Comme dans les structures employant majoritairement des personnels de droit privé de plus de onze salariés, l’instance de dialogue social de l’IRSN est un comité social et économique (CSE). Ce CSE est compétent sur les questions individuelles et collectives de travail, ainsi qu’en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (articles L. 2312-8 à L. 2312-10 du code du travail). Sa composition et son fonctionnement sont fixés par le code du travail (articles L. 2314-1 à L. 2314-37). La fixation des conditions applicables au versement des indemnités accessoires et remboursements de frais de toute nature est définie, au sein de l’IRSN, par un accord d’entreprise après négociation collective.

B.   les défis posés par le rapprochement des deux structures en matière de ressources humaines

L’étude d’impact annexée au projet de loi met en avant deux raisons principales pour justifier le choix d’une nouvelle autorité ouverte à plusieurs statuts de droit privé comme public, comme prévu par le présent article. La première tient à la volonté de contribuer à l’attractivité de la future autorité en conservant la diversité des viviers de recrutement. La seconde repose sur la garantie des droits des salariés et des agents publics.

Deux alternatives ont été écartées par le Gouvernement :

– le recrutement exclusif de fonctionnaires et de contractuels de droit public ne répondait pas à plusieurs besoins essentiels, notamment à la continuité des conditions d’emploi des salariés de l’IRSN et à l’attractivité de la future autorité, en particulier pour les activités de recherche ;

– le recrutement de fonctionnaires détachés sur contrat de droit privé, ainsi que de salariés de droit privé uniquement, car cette option aurait méconnu la nature publique d’une autorité administrative indépendante, tout en étant peu attractive pour les fonctionnaires de l’ASN.

Aux termes de l’article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes, « la loi fixe les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l’organisation et au fonctionnement des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes ». Ces dispositions donnent au législateur la compétence pour fixer les règles de recrutement du personnel des AAI. Le législateur peut donc, sans qu’aucune norme de valeur constitutionnelle ne s’y oppose, prévoir expressément la possibilité pour l’ASNR de recruter des salariés de droit privé. Cette option a notamment été retenue pour des autorités publiques indépendantes telles que l’Autorité des marchés financiers, la Haute Autorité de santé ou l’Agence française de lutte contre le dopage.

Les dispositions de la même loi organique permettent en outre au législateur d’instituer au sein de la future autorité une instance sociale sui generis (ici dénommée « comité social d’administration ») compétente pour l’ensemble des personnels, qu’ils soient de droit public ou de droit privé, et exerçant les attributions du comité social d’administration prévu par le code général de la fonction publique et celles du conseil social et économique telles que définies par le code du travail. Cette entité doit comprendre une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Cette formation est obligatoire pour les entités de plus de 200 agents (art. L. 251-3 du code général de la fonction publique, article 9 du décret n° 2020-1427 du 20 novembre 2020).

Enfin, une question se pose concernant les conditions applicables au versement des indemnités accessoires et remboursement de frais de toute nature. Faute de dispositions législatives spécifiques, l’emploi d’agents de statuts public et privé pourrait conduire à des disparités de traitement dans le fonctionnement quotidien, telles que des indemnités différentes versées pour la prise d’astreinte, des taux de remboursement différents pour les frais de déplacement des personnels en mission, etc. Il est ainsi nécessaire de prévoir une harmonisation sur tous ces sujets au sein de la future autorité.

Ce pouvoir relève en principe du pouvoir réglementaire, mais le Conseil constitutionnel a déjà indiqué, à propos de l’attribution à la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL) d’un pouvoir réglementaire, que les dispositions de l’article 21 de la Constitution « ne font cependant pas obstacle à ce que le législateur confie à une autorité de l’État autre que le Premier ministre, le soin de fixer, dans un domaine déterminé et dans le cadre défini par les lois et règlements, des normes permettant de mettre en œuvre une loi » ([22]). Par conséquent, le législateur peut prévoir que le collège de la future autorité peut définir des indemnités accessoires et des modalités de remboursements de frais.

Cela nécessitera toutefois de mettre en place un modèle de support administratif et de gestion des ressources humaines intégrant la double compétence pour gérer à la fois des agents de droit public et des salariés de droit privé. Cela pourra se traduire par la constitution d’équipes spécialisées dans l’un ou l’autre des cadres de gestion, à l’instar des organisations qui possèdent cette particularité (comme la Caisse des dépôts et des consignations). La mise en place de deux commissions distinctes pour les agents de droit privé et de droit public induira en outre une charge administrative supplémentaire au titre de l’organisation et de l’animation du dialogue social pour deux commissions distinctes et des réunions plénières du CSA.

II.   le texte initial du projet de loi

La future autorité pourra recruter des personnels sous une grande diversité de statuts : salariés de droit privé, contractuels publics, fonctionnaires et statuts liés aux activités de recherche. Afin d’assurer la qualité du dialogue social, mais aussi la sécurité juridique des consultations obligatoires de l’instance prévues tant par le code général de la fonction publique que par le code du travail, il est nécessaire de légiférer pour instituer au sein du CSA deux commissions et une formation spécialisée en santé et sécurité au travail, qui ne sont pas définies dans la loi en l’état du droit actuel.

A.   Une structure faisant cohabiter fonctionnaires et salariés de droit privé

Le Gouvernement prévoit de faire cohabiter les différents statuts, publics et privés, au sein de la nouvelle autorité. Tel est l’objet de la nouvelle rédaction de l’article L. 592-12 du code de l’environnement, prévue aux alinéas 2 à 6 du présent article du projet de loi initial. Celui-ci dispose que le personnel de l’ASNR comprend des fonctionnaires, des agents contractuels de droit public, ainsi que des salariés de droit privé, dont les conditions d’emploi sont régies par le code du travail, sous réserve des dispositions de la section 3 du chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement, consacrée au fonctionnement de l’ASNR, et des adaptations prévues par décret en Conseil d’État.

Cette formulation est proche de celle retenue pour les agences régionales de santé (ARS) depuis la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, qui a été reprise depuis pour divers autres établissements publics à caractère administratif.

B.   Le dialogue social au sein de la future autorité

Après l’article L. 592-12 du code de l’environnement revu par le présent article, il est inséré un article L. 592-12-1 qui concerne la mise en place d’un comité social d’administration (CSA) unique (alinéas 7 à 24 du présent article du projet de loi initial).

Au sein du CSA, deux commissions seraient instituées pour garantir la représentation de chaque catégorie de personnels. La commission des agents publics exercerait des attributions des comités sociaux d’administration mentionnées aux 3°, 4° et 5° de l’article L. 253-1 du code général de la fonction publique. Cela concerne les orientations stratégiques sur les politiques de ressources humaines, les lignes directrices de gestion en matière de mobilité, de promotion et valorisation des parcours professionnels, les enjeux et les politiques d’égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations – lorsque ces attributions concernent, de manière exclusive, les fonctionnaires et agents contractuels de droit public. Les autres attributions prévues à l’article L. 253-1 du code général de la fonction publique seraient donc abordées par la formation plénière (fonctionnement et organisation des services, accessibilité et qualité des services rendus) ou par la formation spécifique chargée des questions de santé, de sécurité et de conditions de travail (questions relatives à la protection de la santé physique et mentale, à l’hygiène, à la sécurité des agents dans leur travail, à l’organisation du travail, au télétravail, aux enjeux liés à la déconnexion et aux dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques).

La commission des salariés exercerait toutes les attributions des comités sociaux économiques, mais seulement lorsqu’elles concernent, de manière exclusive, les personnels de droit privé. Les questions relatives aux domaines traités par la formation plénière, et par la formation spécifique chargée des questions de santé, de sécurité et de conditions de travail, seront prises en charge au niveau du comité social d’administration lorsqu’elles concernent l’ensemble des personnels.

Les représentants du personnel siégeant au comité social d’administration seraient élus par les collèges des agents publics et des salariés, au scrutin de liste à la représentation proportionnelle, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. Les candidatures seraient présentées par les organisations syndicales qui remplissent les conditions de droit commun prévues par le code général de la fonction publique (articles L. 211-12 et L. 211-21), pour le collège des agents publics, et par le code du travail (article L. 2314-52) pour le collège des salariés.

La composition de la représentation du personnel au sein du comité social d’administration doit être fixée par décret en Conseil d’État de façon à permettre la représentation de chaque collège, en tenant compte des effectifs, d’une part, des agents publics et, d’autre part, des salariés. L’ordre de grandeur serait de trois quarts de salariés et un quart d’agents publics au moment de la constitution de l’ASNR.

Par référence au premier alinéa de l’article L. 2315-23 du code du travail, il est précisé que le comité social d’administration serait doté de la personnalité civile et gèrerait son patrimoine (cette disposition est en principe applicable aux comités sociaux et économiques). Il gèrerait son budget de fonctionnement et le budget des activités sociales et culturelles de l’ensemble du personnel. Le fonctionnement et les moyens du comité, ainsi que les ressources destinées à financer ces activités, doivent être fixés par décret en Conseil d’État.

C.   Les élections professionnelles et les délégués syndicaux

Le présent article institue en outre, aux alinéas 25 à 35 du présent article du projet de loi initial, un nouvel article L. 592-12-2 au sein du code de l’environnement pour fixer les règles des élections professionnelles et des négociations collectives en tenant compte du caractère mixte de l’Autorité. Le projet de loi prévoit, à cet égard, de transposer les règles de droit commun respectives s’attachant aux deux statuts, privé et public.

Il prévoit tout d’abord que le chapitre III du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code du travail, relatif aux délégués syndicaux, est applicable aux salariés de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Il prévoit ensuite que les délégués syndicaux sont désignés par les organisations syndicales représentatives du collège des salariés qui y constituent une section syndicale (chaque syndicat disposant d’une section syndicale peut désigner un représentant de la section s’il n’est pas représentatif). Seraient représentatives au sein du collège des salariés les organisations syndicales qui satisfont aux critères mentionnés à l’article L. 2121-1 du code du travail et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés aux dernières élections du comité social d’administration dans ce collège. La validité des accords collectifs serait subordonnée à leur signature par, d’une part, le président de l’ASNR ou son représentant et, d’autre part, une ou plusieurs organisations syndicales représentatives selon les conditions définies à l’article L. 2232-12 du code du travail. Les taux de 30 % et de 50 % des suffrages exprimés mentionnés à cet article seraient appréciés au sein du collège des salariés.

Pour les agents publics de l’ASNR, les organisations représentatives habilitées à négocier seraient celles qui disposent d’au moins un siège au sein du comité social d’administration, au titre du collège des agents publics. En application des dispositions de l’article L. 223-1 du code général de la fonction publique, un accord conclu sur le fondement des articles L. 221-2 ou L. 222-2 du même code serait valide, pour les agents publics, s’il est signé par une ou plusieurs des organisations habilitées à négocier pour le collège de ces personnels. Selon l’article L. 222-3, auxquels ces articles renvoient, ces accords peuvent porter sur les domaines relatifs :

1° Aux conditions et à l’organisation du travail, notamment aux actions de prévention dans les domaines de l’hygiène, de la sécurité et de la santé au travail ;

2° Au temps de travail, au télétravail, à la qualité de vie au travail, aux modalités des déplacements entre le domicile et le travail ainsi qu’aux impacts de la numérisation sur l’organisation et les conditions de travail ;

3° À l’accompagnement social des mesures de réorganisation des services ;

4° À la mise en œuvre des actions en faveur de la lutte contre le changement climatique, de la préservation des ressources et de l’environnement et de la responsabilité sociale des organisations ;

5° À l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;

6° À la promotion de l’égalité des chances, à la reconnaissance de la diversité et la prévention des discriminations dans l’accès aux emplois et la gestion des carrières ;

7° À l’insertion professionnelle, au maintien dans l’emploi et à l’évolution professionnelle des personnes en situation de handicap ;

8° Au déroulement des carrières et à la promotion professionnelle ;

9° À l’apprentissage ;

10° À la formation professionnelle et à la formation tout au long de la vie ;

11° À l’intéressement collectif et aux modalités de mise en œuvre de politiques indemnitaires ;

12° À l’action sociale ;

13° À la protection sociale complémentaire ;

14° À l’évolution des métiers et la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Dans tous ces domaines, le présent projet de loi prévoit que l’ASNR peut inviter les représentants des salariés et des agents publics à participer à des négociations conjointes. Ces négociations donneraient lieu, le cas échéant, à la conclusion d’accords distincts et applicables spécifiquement aux salariés de droit privé, selon les modalités précédemment évoquées.

D.   L’harmonisation des indemnités accessoires et des remboursements de toute nature

Enfin, dans son alinéa 36, le présent article du projet de loi initial rétablit et réécrit l’article L. 592-12-3 du code de l’environnement, abrogé par la loi n° 2017‑55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, pour donner la capacité à l’ASNR d’harmoniser les primes accessoires liées à certaines sujétions communes, dans le respect des dispositions légales applicables aux différentes catégories de personnels et en complément des dispositions réglementaires ainsi que des conventions, accords collectifs et engagements unilatéraux qui leur sont applicables. Seront par exemple concernés les montants maximums de remboursement des nuitées ou des repas en déplacement, les conditions de prise en charge des billets de train ou encore les indemnités du personnel d’astreinte.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

A.   L’examen en commission

La commission a adopté un amendement de clarification rédactionnelle COM-1 du rapporteur.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement n° 92 de M. Chaize (LR), rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, visant à garantir que les personnels de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection de nationalité étrangère ou apatrides ne peuvent être recrutés pour pourvoir des emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l’exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l’exercice de prérogatives de puissance publique (alinéa 6 du présent article). Dans sa décision n° 98‑399 DC du 5 mai 1998, le Conseil constitutionnel avait en effet rappelé que les personnels de nationalité étrangère ne peuvent exercer des fonctions inséparables de la souveraineté nationale.

Cet ajout ne présente pas de difficultés juridiques majeures, mais le rapporteur souligne que la réglementation prévoit déjà ce type d’exclusion. Ainsi, l’article 3-1 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 prévoit que « les agents contractuels de nationalité étrangère ou apatrides ne peuvent être recrutés pour pourvoir des emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l’exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l’exercice de prérogatives de puissance publique ».

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté deux amendements rédactionnels CD414 et CD415 du rapporteur.

*

*     *

Section 2
Dispositions transitoires

Article 7
Transfert des salariés de l’IRSN à l’ASNR et au CEA

Adopté par la commission avec modifications

 

Cet article définit les modalités de transfert des salariés de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Pour maintenir le statut des salariés de l’IRSN au sein de l’ASNR, le projet de loi prévoit une dérogation aux dispositions de droit commun du code du travail.

L’article prévoit en outre le transfert au CEA des 140 salariés de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) et des 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée.

I.   Le droit en vigueur

L’IRSN est un établissement public industriel et commercial (EPIC), qui emploie des salariés de droit privé, pour un effectif total de 1 744 personnes en 2022. L’essentiel de ces salariés (1 600 environ) a vocation à intégrer la nouvelle Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

A.   L’expertise nucléaire de défense

L’IRSN comporte une direction spécifique chargée d’expertiser les dossiers dans des domaines relevant de prérogatives du Gouvernement, en matière notamment de sécurité des installations civiles et du transport de matières nucléaires, de sûreté et de radioprotection pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense, ainsi que de non-prolifération et de contrôle des matières dangereuses (chimiques, biologiques et nucléaires). Cette direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) de l’IRSN compte 140 personnes. Elle fournit, d’une part, un appui technique au haut fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère de la transition écologique, lequel définit et met en œuvre les politiques de sécurité des installations civiles. Elle fournit, d’autre part, un appui technique au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection (DSND) placé auprès du ministre de la Défense et du ministre chargé de l’industrie, autorité de sûreté compétente concernant les installations et les activités intéressant la défense.

Faute de dispositions dérogatoires, ces personnels auraient vocation à être transférés dans l’autorité administrative indépendante, l’ANSR, que le projet de loi propose de créer. Le Gouvernement, par le présent article, prévoit de transférer leurs contrats de travail au sein du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), tout en les mettant à disposition de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

B.   la dosimétrie passive

Par ailleurs, environ 40 salariés de l’IRSN sont actuellement en charge des activités relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée (ou dosimètres passifs).

L’IRSN détient environ la moitié du marché national de dosimètres passifs. L’activité de dosimétrie passive consiste en la fabrication de 1,5 million de dosimètres par an pour 25 000 clients, en leur commercialisation puis en la lecture de ces dosimètres dans des machines spécialisées. Les dosimètres sont en effet envoyés à leurs destinataires pour usage, puis retournés à l’IRSN pour être lus. La dosimétrie interne (anthroporadiométrie, radiotoxicologie) permet de mesurer l’exposition interne des personnes.

Faute de dispositions dérogatoires, ces personnels auraient vocation à être transférés au sein de l’ANSR, ce qui pourrait poser des difficultés potentielles au regard du droit de la concurrence. En effet, ces activités nécessitent un démarchage commercial actif de la part de l’entité qui les opère, auprès de clients qui seront soumis au contrôle de l’ASNR.

II.   Le texte initial du projet de loi

L’article 7 prévoit d’abord, dans son premier alinéa, le transfert de l’ensemble des salariés de l’IRSN vers l’ASNR, à l’exception des 140 salariés de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) et des 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée, transférés au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Ce transfert ne s’accompagne pas d’une obligation de requalification du contrat en contrat de droit public, par exception aux dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail (alinéa 2).

Il est ensuite précisé que le CEA, ou une de ses filiales désignées par décret, sera substitué à l’IRSN en qualité d’employeur des salariés de l’institut qui exercent des missions relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée. Les contrats de travail des intéressés lui seraient transférés sans autre modification (alinéa 3). Ce transfert permettrait de maintenir des activités nécessitant un démarchage commercial actif, sans poser de difficultés au regard du droit de la concurrence.

Puis il est précisé que le CEA sera substitué à l’IRSN en qualité d’employeur des salariés de l’Institut qui apportent un appui technique aux autorités de l’État dans les matières suivantes :

– sûreté nucléaire et radioprotection, pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense, y compris en cas d’incident ou d’accident ;

– sécurité des installations et des transports des matières nucléaires ou des sources de rayonnements ionisants ;

– non-prolifération, contrôle et comptabilité centralisée des matières nucléaires ;

– interdiction des armes chimiques, au titre de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques.

Les contrats de travail de ces salariés seraient transférés au CEA sans autre modification (ces dispositions sont précisées aux alinéas 4 à 9 du présent article). Les intéressés seraient, d’office, mis à disposition du ministre de la Défense, et en pratique auprès du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection (DSND), pour y exercer leur mission pendant une durée de trois ans, renouvelable de plein droit à leur demande.

À l’issue de la durée minimale prévue par le projet de loi, les salariés ne demandant pas le renouvellement de leur mise à disposition auprès du DSND seront affectés au CEA, dans un poste correspondant à leur qualification et sans perte de rémunération (alinéa 12).

Les modalités des transferts et mises à disposition ainsi que de l’appui technique apporté aux autorités de l’État compétentes prévues par le présent article doivent être précisées par décret en Conseil d’État (alinéa 13). En particulier, il faudra organiser la coopération entre les 25 ETP de généralistes et les experts sur lesquels ils s’appuyaient qui seront au sein de l’ASNR, car ils seront désormais répartis au sein de deux structures différentes.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté un amendement rédactionnel CD416 du rapporteur.

*

*     *

Article 8
Dispositions transitoires en matière de conventions et d’accord collectifs

Adopté par la commission sans modification

 

Cet article détermine les dispositions transitoires en matière de conventions et d’accords collectifs. Il prévoit ainsi que les salariés transférés à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) conserveront les effets des conventions et accords ainsi que des engagements unilatéraux applicables au sein de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au 1er janvier 2025 jusqu’à l’entrée en vigueur des nouveaux accords et conventions qui leur seront substitués, ou à défaut jusqu’au 30 juin 2027. Le projet de loi prévoit ainsi une durée transitoire maximale de trente mois pour les salariés transférés à l’ASNR.

Les salariés transférés au CEA se verraient, quant à eux, appliquer le régime de droit commun, caractérisé par un maintien de l’effet des conventions et accords collectifs pour une durée maximale de quinze mois.

I.   Le droit en vigueur

L’IRSN dispose actuellement d’un accord d’entreprise régissant de nombreux domaines comme la rémunération, la gestion prévisionnelle des emplois et compétences (GPEC), la formation, l’entretien annuel et la qualité de vie au travail.

L’article L. 2261-14 du code du travail prévoit en outre que lorsque l’application d’une convention ou d’un accord est mise en cause en cas de modification de la situation juridique de l’employeur, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention ou de l’accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d’un an à compter de l’expiration d’un délai de préavis de trois mois (prévu à l’article L. 2261-9 du code du travail), sauf clause prévoyant une durée supérieure. Les salariés transférés peuvent donc, pendant cette durée, se prévaloir du dispositif le plus favorable entre celui de l’entité absorbante et celui de l’entité absorbée.

Lorsque la convention ou l’accord qui a été mis en cause n’a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans ce délai, les salariés concernés bénéficient d’une garantie de rémunération. Le montant annuel de cette garantie de rémunération, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par le contrat de travail, ne peut être inférieur à la rémunération versée, en application de la convention ou de l’accord mis en cause, lors des douze derniers mois. Une négociation postérieure au transfert des salariés doit s’engager, à la demande d’une des parties intéressées, dans les trois mois qui suivent la mise en cause des accords.

II.   Le texte initial du projet de loi

Selon les dispositions de l’alinéa 1 de l’article 8, les salariés transférés à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) conserveraient les effets des conventions et accords, mais aussi des engagements unilatéraux, applicables au sein de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au 1er janvier 2025 jusqu’à l’entrée en vigueur des nouveaux accords et conventions qui leur seront substitués, ou à défaut jusqu’au 30 juin 2027 (soit une durée transitoire maximale de trente mois). Le contenu de l’article L. 2261-14 du code du travail est ici repris, avec cependant une limite de durée fixée à trente mois, tandis que cette durée est fixée à un an dans le code du travail. Ce délai se justifie par l’absence, au sein de l’ASN, d’accords et conventions applicables à des salariés. Le cadre dérogatoire prévu par le projet de loi vise donc à répondre à un cas spécifique et inédit – celui de l’intégration de salariés au sein d’une autorité administrative indépendante (AAI) – nécessitant un vaste travail de négociations.

Par ailleurs, à compter de la date d’entrée en vigueur du projet de loi – soit le 1er janvier 2025 – et jusqu’à la désignation des représentants du personnel de l’ASNR – au plus tard le 31 mars 2026 (telle que prévue par l’article 10), l’autorité et les délégués syndicaux de l’IRSN pourront engager, à la demande de l’une des parties intéressées, les négociations destinées soit à adapter les stipulations actuelles des conventions et accords, soit à élaborer de nouvelles stipulations. Ces négociations ont vocation à continuer avec les délégués syndicaux des salariés de la nouvelle autorité à compter de leur désignation (alinéa 2 du présent article).

À compter du 1er juillet 2027, en l’absence de conventions et d’accords de substitution, les salariés bénéficieront d’une garantie de rémunération selon les modalités fixées par l’article L. 2261-14 du code du travail (alinéa 3 du présent article).

L’article 8 prévoit, en revanche, dans son alinéa 4, une application des règles de droit commun, inscrites à la section 6 du chapitre Ier du titre VI du livre II de la deuxième partie du code du travail, pour les 140 salariés de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) et les 40 salariés en charge des activités relatives à la fourniture et à l’exploitation de dosimètres à lecture différée, qui seraient transférés au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) en application de l’article 7 du projet de loi. Cette différence de traitement avec les salariés de l’IRSN transférés à l’ASNR s’explique par la différence de situation : s’agissant du CEA, il existe déjà un corpus d’accords dont l’étude d’impact du projet de loi estime qu’il est globalement assez proche de celui de l’IRSN. Les dispositions de droit commun semblent donc suffisantes pour engager la transition en matière de conventions et d’accords collectifs. Ainsi, les accords et conventions collectifs applicables à l’IRSN continueront de produire leurs effets jusqu’à l’entrée en vigueur d’un nouvel accord ou d’une nouvelle convention s’y substituant, ou à défaut, pendant une durée d’un an à compter de l’expiration du délai de préavis de trois mois prévu à l’article L. 2261-9 du code du travail (délai issu de l’article L. 2261-14 du code du travail).

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

A.   L’examen en commission

La commission a adopté un amendement COM-42 de M. Dantec (Écologiste, Solidarité et Territoires) qui permettra à l’ensemble des salariés de droit privé, y compris ceux qui seront recrutés entre le 1er janvier 2025 et le 30 juin 2027, de bénéficier des conventions, accords et engagements unilatéraux qui étaient applicables au 31 décembre 2024 à l’IRSN jusqu’à l’entrée en vigueur des conventions, accords ou engagements qui leur sont substitués au sein de la nouvelle autorité.

Elle a également adopté un amendement rédactionnel COM-2 du rapporteur.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat n’a pas adopté d’amendements.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté cet article sans modification.

*

*     *

Article 9
Possibilité pour les agents contractuels et les salariés privés de la future autorité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d’accéder à un corps de fonctionnaire

Adopté par la commission sans modification

 

Cet article donne aux agents contractuels et aux salariés privés de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) l’opportunité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d’accéder à des corps de fonctionnaires qui seront identifiés par décret comme pertinents pour les missions de l’autorité.

I.   Le droit en vigueur

L’article L. 320-1 du code général de la fonction publique dispose que les fonctionnaires sont, en principe, recrutés par concours. L’article L. 325-1 du même code prévoit trois types de concours :

– le concours externe, ouvert à tous les candidats justifiant de certains diplômes ou de certaines études ;

– le concours interne, réservé aux agents ayant accompli une certaine durée de service ;

– le troisième concours, réservé à des candidats justifiant d’une expérience professionnelle dans le secteur privé ou associatif, ou de l’exercice d’un mandat électif local.

Le principe du recrutement par concours, ainsi que la nature des conditions exigées pour se présenter au concours, relèvent du domaine de la loi (l’article 34 de la Constitution réservant à la loi la fixation des règles concernant les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires). Les modalités du choix du jury de concours et le détail des conditions exigées pour se présenter au concours relèvent en revanche du domaine du règlement. Il s’ensuit que si le législateur l’autorise, l’autorité réglementaire peut organiser un mode de recrutement par concours réservé à certaines catégories de personnels et selon des modalités particulières, par dérogation à l’article L. 325-1 du code général de la fonction publique.

Le même type de dispositif a déjà été prévu par le passé. Ainsi, l’ordonnance n° 2018-359 du 16 mai 2018 fixant les modalités de transfert des personnels administratifs des juridictions mentionnées au 1° du I de l’article 109 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et celles de leur accès aux corps des services judiciaires ou aux corps communs du ministère de la justice, a prévu, en son article 5, que l’accès aux corps de fonctionnaires du ministère de la justice, dont la liste était fixée par décret en Conseil d’État, pouvait être organisé par la voie de recrutements réservés exceptionnels valorisant les acquis de l’expérience professionnelle. Il s’agissait d’instituer des recrutements réservés exceptionnels au seul profit des salariés de droit privé et des agents contractuels de l’État exerçant leurs fonctions au sein des juridictions sociales pour leur permettre d’intégrer des corps de fonctionnaires du ministère de la justice.

II.   Le texte initial du projet de loi

Par dérogation à l’article L. 325-1 du code général de la fonction publique, l’article 9 du projet de loi donne aux agents contractuels de droit public et aux salariés de droit privé de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) l’opportunité de passer un concours réservé, afin de leur permettre d’accéder à des corps de fonctionnaire qui seront identifiés par décret comme pertinents pour les missions de l’autorité.

Le premier alinéa de l’article 9 prévoit que cette disposition est ouverte pour une durée de six ans à compter de l’entrée en vigueur de la réforme, soit au 1er janvier 2025. La liste des corps de fonctionnaires de l’État ouverts par ce moyen sera fixée par décret en Conseil d’État. Il s’agit donc d’un mode de recrutement exceptionnel visant à valoriser les acquis de l’expérience professionnelle pour les salariés de droit privé et les contractuels de l’IRSN qui rejoindront la nouvelle entité.

Selon les dispositions de l’alinéa 2, cet accès aux corps de fonctionnaires concernés serait réservé aux agents contractuels de droit public et aux salariés de droit privé de l’ASNR qui, à la date du 31 décembre de l’année précédant celle au titre de laquelle est ouvert le recrutement réservé exceptionnel, sont en fonction ou bénéficient d’un des congés assimilables à du travail effectif, et qui justifient à cette date d’une durée d’ancienneté de quatre années en équivalent temps plein au sein de l’Institut de radioprotection de sûreté nucléaire, de l’Autorité de sûreté nucléaire ou de l’ASNR.

Ce concours est présenté par le Gouvernement comme un facteur d’attractivité pour la nouvelle autorité, en ce qu’il offrirait la possibilité aux agents contractuels publics ou salariés privés rejoignant la future entité de s’inscrire dans une carrière publique étatique en rejoignant un corps de la fonction publique. La durée de six ans retenue par l’article 9 est estimée nécessaire pour que le recrutement exceptionnel puisse être organisé dans une situation où les candidats auront connaissance des avantages et inconvénients de leur intégration dans un corps de fonctionnaires par rapport à leur situation initiale.

L’article 8 du projet de loi prévoit en effet une période maximale de trente mois pendant laquelle les conditions des conventions et accords qui sont applicables aux salariés seront renégociées. La période de six ans permettrait un délai « utile » d’un peu plus de trois ans après la fin de cette situation transitoire.

Le dispositif proposé offre, de plus, une solution partielle aux craintes d’une érosion de l’effectif des personnels fonctionnaires d’État dans la future autorité, formulée par les représentants syndicaux de l’ASN lors de leur audition par le rapporteur. Toutefois, étant adapté à peu de salariés, son impact devrait être restreint car le passage au statut de fonctionnaire pour des salariés de droit privé ayant déjà une carrière avancée pourrait ne pas constituer une option intéressante, notamment en matière de droit à la retraite. Dans son étude d’impact, le Gouvernement prévoit une cible de 100 candidats d’ici 2030.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

Le Sénat a adopté cet article sans modification.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté cet article sans modification.

*

*     *

Article 10
Dispositions transitoires tendant à garantir la continuité de la représentation sociale au sein de la future autorité

Adopté par la commission sans modification

 

Cet article prévoit les dispositions transitoires tendant à garantir la continuité de la représentation sociale au sein de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), qui devrait être créée le 1er janvier 2025.

La constitution du comité social d’administration (CSA) de l’ASNR devrait intervenir au plus tard le 31 mars 2026 ; jusqu’à cette constitution, le CSA de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le comité social et économique (CSE) de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) seraient maintenus en fonction et exerceraient les missions relatives respectivement aux agents publics et aux salariés. Initialement fixé à douze mois, le délai imparti pour mettre en place le nouveau CSA a été étendu à quinze mois.

Le Sénat a adopté un amendement visant à préciser que la formation conjointe du CSA de l’ASN et du CSE de l’IRSN pourra siéger à la demande de ces comités et à la demande du président de la nouvelle autorité.

I.   Le droit en vigueur

Créés par la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique et mis en place à l’issue des élections professionnelles de décembre 2022, les comités sociaux d’administration (CSA) sont des instances de dialogue social issues de la fusion entre les comités techniques et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Un comité social d’administration de proximité est créé auprès de chaque autorité administrative indépendante, par décision de cette dernière (article L. 251‑2 du code général de la fonction publique, article 7 du décret n° 2020-1427 du 20 novembre 2020 relatif aux comités sociaux d’administration dans les administrations et les établissements publics de l’État). Ces comités sont chargés de l’examen des questions collectives de travail ainsi que des conditions de travail (articles 48 à 52 du décret n° 2020-1427 du 20 novembre 2020 précité). Par ailleurs, il est institué au sein de ces comités une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Cette formation est obligatoire pour les entités de plus de 200 agents (article L. 251-3 du code général de la fonction publique, article 9 du décret n° 2020- 1427 du 20 novembre 2020).

Au sein des entités de droit privé composées de plus de onze salariés pendant douze mois consécutifs, et notamment au sein des établissements publics industriels et commerciaux tels que l’IRSN, un comité social et économique (CSE) est mis en place (articles L. 2311-1 et L. 2312-1 du code du travail). Les attributions du comité social et économique sont définies en fonction de l’effectif de l’entité (article L. 2312-2 du code du travail). En 2022, l’IRSN comptait 1 744 salariés. En conséquence, le comité social et économique de l’IRSN est compétent sur les questions individuelles et collectives de travail, ainsi qu’en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail (articles L. 2312-8 à L. 2312-10 du code du travail). La composition et le fonctionnement du comité social et économique, instance compétente de l’IRSN, sont fixés par le code du travail (articles L. 2314-1 à L. 2314-37 du code du travail). Les membres du conseil social et économique sont élus pour quatre ans (article L. 2314-33 du même code).

Afin d’assurer la représentation de l’ensemble des personnels de tous statuts au sein des instances de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, l’article 6 du présent projet de loi prévoit la mise en place d’un comité social d’administration (CSA). Ce CSA serait doté de la personnalité civile et gérerait son patrimoine – comme l’actuel comité social et économique de l’IRSN. Au sein du CSA, deux commissions seraient instituées, la commission des agents publics et la commission des agents privés : elles seraient compétentes sur les problématiques qui concerneraient, de manière exclusive, les personnels de droit public et les personnels de droit privé, respectivement.

À ce titre, les directions de l’ASN et l’IRSN ont souhaité que soit entrepris dès maintenant, dans l’éventualité de la promulgation du présent projet de loi, un travail de définition des principes d’organisation et de fonctionnement de la future entité, travail auquel sera associé le personnel des deux organismes. Des groupes de travail thématiques ont été mis en place, dont un portant sur le dialogue social. Les informations relatives aux travaux des groupes sont accessibles de manière coordonnée sur les sites intranet respectifs de l’ASN et de l’IRSN. Une plateforme d’accès commun au personnel de l’ASN et de l’IRSN doit être mise en place afin d’offrir un espace d’information unique sur les avancées des travaux de rapprochement des deux entités.

S’agissant du dialogue social, outre les instances existantes, un accord de concertation quadripartite regroupant les directions de l’ASN et de l’IRSN et les représentants élus des deux organismes a été signé le 14 décembre 2023, créant une commission de concertation relative au projet de rapprochement entre les deux entités (CCPF). La CCPF met à l’ordre du jour les thématiques comme l’état d’avancement et résultats des travaux des groupes de travail institués dans le cadre de la préparation de la mise en œuvre de l’ASNR ou bien encore, lorsque celui-ci sera prêt, le schéma organisationnel de la future structure ainsi que les impacts dans les organisations et sur les personnels des entités.

II.   Le texte initial du projet de loi

L’article 10 du projet de loi initial prévoit, dans son premier alinéa, que jusqu’à la constitution du comité social d’administration de l’ASNR, qui interviendrait au plus tard le 31 mars 2026, le CSA de l’ASN et le CSE de l’IRSN seraient maintenus en fonction et exerceraient les missions relatives respectivement aux agents publics et aux salariés, sous la présidence du représentant de l’ASNR. À la demande des syndicats de l’ASN et de l’IRSN, le délai imparti pour mettre en place le nouveau CSA a été étendu à quinze mois au lieu de douze mois selon le code du travail.

L’alinéa 2 prévoit que les membres des instances représentatives du personnel existantes au sein de l’ASN et de l’IRSN poursuivraient leur mandat jusqu’à la désignation des représentants du personnel issus des élections permettant la constitution du CSA de l’ASNR.

Toutefois, avant même la constitution du nouveau CSA, l’alinéa 3 précise que les comités pourraient siéger en formation conjointe, dans le respect de leurs attributions respectives, pour connaître des sujets communs à l’ensemble du personnel. Dans ce cas, les conditions de vote s’apprécieraient au regard de l’ensemble des membres présents de la formation conjointe. L’avis de la formation conjointe se substituerait aux avis de chacune des instances.

L’alinéa 4 prévoit ensuite que le patrimoine du CSE de l’IRSN sera dévolu au CSA de l’ASNR à la date de la désignation des membres de celui-ci.

L’alinéa 5 prévoit enfin que, par dérogation aux dispositions de l’article L. 2143-10 du code du travail, les mandats des délégués syndicaux désignés au sein de l’IRSN subsisteraient au sein de l’ASNR. Leur mandat prendrait fin au plus tard à la date de la désignation des membres du CSA de l’ASNR.

Un décret en Conseil d’État doit préciser les modalités d’application de cet article 10.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

A.   L’examen en commission

La commission a adopté deux amendements identiques de clarification COM-7 du rapporteur et COM-89 du rapporteur pour avis, visant à préciser que la formation conjointe du CSA de l’ASN et du CSE de l’IRSN pourra siéger à la demande de ces comités ou à la demande du président de la nouvelle autorité.

Un amendement COM-43, rédactionnel, a également été adopté.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat n’a pas modifié l’article.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté cet article sans modification.

*

*     *

Article 11
Augmentation des rémunérations versées au sein de l’IRSN et de l’ASN ;
élaboration d’un rapport du Gouvernement et d’évaluations par l’ASNR
sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires
à la nouvelle autorité

Adopté par la commission avec modifications

 

Cet article prévoit que l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) consacrent respectivement 15 millions d’euros et 0,7 million d’euros à l’augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024.

L’article prévoit également que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er juillet 2024, un rapport sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives pour exercer leurs missions en 2025 ainsi que les mesures indispensables pour assurer l’attractivité des conditions d’emploi de ses personnels par rapport au marché du travail dans le domaine du nucléaire. Un amendement a également été adopté au Sénat pour que soient évaluées la faisabilité et l’opportunité d’instituer un préfigurateur chargé de la mise en œuvre de la création de l’ASNR dans le cadre de ce rapport.

Enfin, l’ASNR devra également évaluer ses besoins en matière de ressources humaines et financières pour les cinq années suivant la promulgation de la présente loi et présenter ses propositions au Gouvernement et au Parlement.

I.   Le droit en vigueur

A.   un Écart de rémunération préjudiciable aux autorités de contrôle de la sûreté nucléaire

L’ASN et l’IRSN réalisent une évaluation prospective de leurs besoins humains et financiers dans le cadre de la préparation des projets de loi de finances. Chaque année, l’ASN rend un avis sur les moyens nécessaires au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Les rémunérations versées aujourd’hui à l’IRSN et à l’ASN se situent en deçà des pratiques salariales des grands acteurs du secteur, l’écart avec ceux-ci étant de 20 % à 30 %. Ceci pénalise ces deux institutions pour recruter et maintenir les talents nécessaires à l’accomplissement de leur mission. Ce sujet est d’ailleurs l’objet d’une des recommandations du rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) du 11 juillet 2023 : « l’augmentation des effectifs doit aller de pair avec un renforcement de l’attractivité des métiers concernés, y compris sur le plan des rémunérations. Leur fixation doit tenir compte non seulement des conditions offertes dans d’autres établissements publics, tel le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), mais aussi de celles qui sont proposées dans les entreprises du secteur privé recrutant dans le même secteur ». En effet, dans le contexte de relance du nucléaire, une forte concurrence est à l’œuvre entre les acteurs de la filière pour le recrutement de compétences rares. La rémunération est l’un des facteurs d’attractivité que peut déployer une entité pour attirer à elle les ressources humaines disponibles.

B.   Les moyens budgétaires des deux institutions

Plusieurs programmes budgétaires contribuent au financement de l’ASN :

– l’action 9 « Contrôle de la sûreté nucléaire » du programme 181 « Prévention des risques » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » finance les emplois et dépenses de personnel ainsi que les dépenses de fonctionnement, d’investissement et d’intervention engagées au titre de la réalisation des cinq grandes missions de l’ASN ;

– les programmes supports du ministère de la transition écologique (programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables »), des ministères économiques et financiers (programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économique et financière ») ainsi que du Secrétariat général du Gouvernement (programme 354 « Administration territoriale de l’État ») financent certaines charges de fonctionnement de l’ASN, notamment s’agissant de son siège et de ses divisions territoriales.

Au total, les moyens budgétaires de l’ASN, de 74,9 millions d’euros en crédits de paiement (CP) en 2024, ont évolué à la hausse ces dernières années (+ 22 % depuis 2014).

Concernant les emplois, en 2024, le plafond d’emplois de l’ASN s’élève à 470 équivalents temps plein travaillé (ETPT), ce qui représente une augmentation de 13 ETPT par rapport à la loi de finances pour 2023 (schéma d’emplois positif de +10 ETP valorisés pour 2024 à +5 ETPT, extension en année pleine du schéma d’emplois 2023 sur 2024 de +2 ETPT et transfert de 6 ETPT depuis l’IRSN et le CEA). L’autorité avait demandé, pour la période 2024‑2027, la création de 29 équivalents temps plein (ETP) (12 en 2024, 5 en 2025, 6 en 2026, 6 en 2027). La nouvelle autorité devra donc également bénéficier d’un renforcement de ses moyens humains et financiers pour faire face à la lourde charge de travail induite par le nouveau contexte nucléaire.

Concernant l’IRSN, la loi de finances pour 2024 a acté une augmentation de 3,4 millions d’euros de son budget qui atteint 182,6 millions d’euros en crédits de paiement. Ses crédits sont inscrits à l’action 11 « Recherche dans le domaine des risques » du programme 190 « Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Sur ces crédits, l’IRSN bénéficie de 114,85 millions d’euros pour les missions de recherche relatives aux questions de sûreté nucléaire et de radioprotection, qu’il s’agisse d’études, de recherches finalisées ou de travaux plus fondamentaux. L’IRSN mène aussi des recherches dans le domaine des déchets radioactifs, notamment sur les enjeux d’expertise relatifs au projet Cigeo, dédié au stockage géologique de déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue. Enfin, l’IRSN mène des recherches dans le domaine des effets sur l’homme des rayonnements ionisants. La recherche relative aux effets des rayonnements ionisants sur les personnes concerne aussi bien les expositions chroniques (ou répétées), les expositions associées à des actes médicaux spécifiques dans le cadre de la lutte contre le cancer, que les expositions pouvant résulter de situations accidentelles ou d’actes malveillants (menaces dites « NRBC »).

Les crédits restants permettent l’appui à l’Autorité de sûreté nucléaire (45,12 millions d’euros) ainsi que les activités de sûreté nucléaire et radioprotection des activités de défense, de contrôle des matières nucléaires et de protection contre la malveillance (18,21 millions d’euros).

Le plafond d’emplois de l’IRSN est de 1 653 ETPT en 2024, soit une augmentation de 5 ETPT depuis 2023, mais l’augmentation effective n’est que de 1 ETPT puisque la loi de finances pour 2024 prévoit le transfert de 4 ETPT vers l’ASN. L’IRSN devrait voir ses effectifs croître de 34 ETPT entre 2023 et 2027. Toutefois, le besoin exprimé par l’Institut est bien supérieur et s’élève à 65 ETPT supplémentaires.

II.   Le texte initial du projet de loi

Dans son alinéa 1, le présent article prévoit que l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et l’Autorité de sûreté nucléaire consacrent respectivement 15 millions d’euros et 0,7 million d’euros à l’augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024. Ce montant permet d’assurer un traitement équitable entre les salariés de l’IRSN (près de 1 750 personnes) et les contractuels de droit public de l’ASN (moins de 80 personnes). Bien que cette disposition soit inhabituelle dans un texte de loi, ce que n’a pas manqué de relever le Conseil d’État dans son avis, le rapporteur estime nécessaire d’envoyer un signal positif aux équipes de la nouvelle entité.

L’objectif est en effet de renforcer l’attractivité de la future autorité en engageant, dès 2024, un rééquilibrage inédit des rémunérations des entités publiques œuvrant au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection à travers l’octroi d’une enveloppe spécifique destinée à réévaluer les salaires des contractuels de l’ASN et de l’IRSN à l’issue de la promulgation de la loi. Ces montants correspondent à une moyenne de 730 euros par mois par personne (cotisations sociales, salariales et patronales, incluses). Par ailleurs, la loi laisse latitude aux directions générales des deux institutions pour procéder à une répartition de ces montants de manière à tenir compte des métiers en tension. Une utilisation individualisée de cette enveloppe devrait donc permettre de traiter les situations où ce différentiel est le plus pénalisant.

Il convient de souligner qu’il sera nécessaire d’adresser un message similaire aux fonctionnaires de l’ASN, dont le projet de loi ne prévoit pas la revalorisation de la rémunération. Selon les syndicats de l’ASN interrogés par le rapporteur, cette revalorisation des seuls statuts privés ou contractuels pourrait en effet être préjudiciable à la cohésion sociale qui est nécessaire à la réussite de ce projet de réforme. Selon le ministère, des échanges sont en cours à ce sujet.

L’alinéa 2 du présent article prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport, avant le 1er juillet 2024, élaboré avec le concours de l’Autorité de sûreté nucléaire, de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives en 2025, pour exercer leurs missions respectives prévues par la présente loi, dans le nouveau contexte de relance nucléaire marqué par des aléas climatiques extrêmes et des événements incertains, ainsi que les mesures indispensables pour assurer l’attractivité des conditions d’emploi de leurs personnels respectifs par rapport au marché du travail dans le domaine du nucléaire. Ce rapport sera nécessaire pour éclairer les enjeux budgétaires et financiers lors de l’adoption des crédits de la nouvelle autorité en projet de loi de finances pour 2025, car la nouvelle structure fera l’objet d’un programme budgétaire unique dans un esprit de rationalisation par rapport aux schémas de financement complexes existant aujourd’hui pour les deux entités.

Enfin, l’alinéa 3 de l’article prévoit que l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection devra évaluer les besoins prévisionnels humains et financiers qui lui seront nécessaires dans les cinq années suivant l’entrée en vigueur du texte pour exercer ses missions dans le nouveau contexte nucléaire, ainsi que les mesures indispensables pour assurer l’attractivité des conditions d’emploi de ses personnels par rapport au marché du travail dans le domaine du nucléaire. Cette évaluation et les propositions qui en résultent devront être présentées au Gouvernement et à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, en lien avec les différentes commissions parlementaires compétentes.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

A.   L’examen en commission

La commission a adopté trois amendements. L’amendement COM-68 de M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, vise à intégrer le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans le champ du rapport d’évaluation sur les moyens de la sûreté nucléaire. La commission a également adopté un amendement COM-69 du même auteur visant à évaluer, dans le rapport, la faisabilité et l’opportunité d’instituer un préfigurateur chargé de la mise en œuvre de la création de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Enfin, elle a adopté un amendement COM-3 de M. Pascal Martin, rapporteur, portant une précision rédactionnelle.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement 64 de M. Gilbert-Luc Devinaz (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain) portant une précision quant au nouveau « contexte nucléaire », en indiquant que le rapport que le Gouvernement devra remettre au Parlement doit prendre en compte les aléas climatiques extrêmes et des événements incertains (cyberterrorisme).

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté six amendements à cet article. Elle a ainsi adopté deux amendements CD55 et CD56 de Mme Christelle Petex (Les Républicains) qui prévoient d’ajouter une évaluation des moyens techniques nécessaires à la nouvelle autorité dans le cadre du rapport d’évaluation des moyens financiers et humains nécessaires pour la future ASNR et le CEA, devant être rendu par le Gouvernement avant le 1er juillet 2024, ainsi que dans le cadre du rapport sur les moyens humains et financiers devant être mis à disposition de l’ASNR pour les cinq premières années suivant sa création.

Elle a également adopté un amendement CD424 du rapporteur qui prévoit d’inclure, dans le rapport d’évaluation des moyens humains et financiers nécessaires aux autorités de contrôle de la sûreté nucléaire, une analyse des dispositifs d’accompagnement à la conduite du changement à mettre en place.

Elle a enfin adopté trois amendements identiques CD418 du rapporteur, CD9 de Mme Danielle Brulebois et CD362 de M. Anthony Brosse (Renaissance), qui prévoient que le rapport mentionné au II analyse la faisabilité, et non l’opportunité, de nommer un préfigurateur.

*

*     *

Article 11 bis (nouveau)
Consultation des comités sociaux de l’ASN et de l’IRSN sur
des dispositions portant organisation et fonctionnement des services
de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection ainsi que
le projet de règlement intérieur de cette dernière

Créé par la commission

 

Cet article, créé par la commission, permet au collège de l’ASN de consulter le comité social de cette autorité et de saisir le directeur général de l’IRSN pour qu’il consulte le comité social et économique de l’institut sur les projets de règlement intérieur et de décision portant organisation et fonctionnement des services de la future ASNR.

Il convient d’assurer une continuité de fonctionnement entre, d’une part, l’Autorité de sureté nucléaire et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire et, d’autre part, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection. Or deux décisions sont indispensables au fonctionnement de cette nouvelle autorité : l’adoption de son règlement intérieur et la décision d’organisation et de fonctionnement de ses services.

Il est donc indispensable de prendre les dispositions législatives nécessaires à l’élaboration anticipée de ces deux décisions sans attendre la constitution de la nouvelle Autorité, afin que celle-ci puisse être opérationnelle dès son instauration au 1er janvier 2025. Il convient donc que les actuelles instances représentatives puissent être consultées, avant même l’entrée en vigueur de la création de la future ASNR, sur un projet élaboré par l’actuel collège de l’ASN. En effet, l’actuel collège de l’ASN constituera celui de la nouvelle Autorité. En outre, les membres des actuelles instances représentatives des personnels sont appelés à poursuivre leur mandat jusqu’à la désignation des représentants du personnel issus d’élections qui permettront la constitution d’un nouveau comité social d’administration.

Le présent article, créé par l’adoption de deux amendements identiques CD428 du rapporteur et CD439 de la commission des affaires économiques (sur proposition du rapporteur pour avis M. Antoine Armand), prévoit ainsi de permettre au collège de l’Autorité de sûreté nucléaire de consulter le comité social d’administration de cette autorité et de saisir le directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire afin qu’il consulte le comité social et économique de cet institut sur un projet de décision portant organisation et fonctionnement des services de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, ainsi que sur un projet de règlement intérieur pour cette même autorité. Ces comités disposent d’un délai de deux mois pour donner leur avis sur les projets qui leur sont adressés.

*

*     *

Chapitre III
Le haut-commissaire à l’énergie atomique

Adopté par la commission avec modifications

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 12 rattache le haut-commissaire à l’énergie atomique (HCEA) au Premier ministre, alors qu’il est aujourd’hui rattaché au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Le projet de loi initial supprimait toute référence législative au HCEA, mais le Sénat a rétabli une base légale à celui-ci et détaillé le contenu de ses missions.

La commission des affaires économiques a adopté un amendement de rédaction globale de son rapporteur, conservant l’assise législative du HCEA mais supprimant l’essentiel du détail de ses missions, son pouvoir d’avis sur certains textes programmatiques en matière d’énergie et de climat ainsi que l’avis des commissions permanentes compétentes du Parlement sur sa nomination. Cet amendement a ensuite été adopté par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

I.   LE DROIT en vigueur

A.   L’organisation du CEA

Le CEA a été créé en 1945. Dès son origine, l’ordonnance ([23]) l’instituant précise que les attributions d’ordre administratif et financier sont confiées à un administrateur général, tandis que l’impulsion scientifique et technique est attribuée à un haut-commissaire.

Les articles L. 332-1 et L. 332-2 du code de la recherche explicitent le statut et les missions du CEA, défini comme un « établissement à caractère scientifique, technique et industriel ». Le CEA a par ailleurs le statut d’établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Acteur de la recherche, le CEA est aussi exploitant d’installations nucléaires à cette fin.

Le CEA est dirigé par un administrateur général. Il comporte également un conseil scientifique et un Comité de l’énergie atomique.

Le Comité de l’énergie atomique du CEA

L’article L. 332-2 du code de la recherche dispose que le Comité de l’énergie atomique « arrête le programme de recherche, de fabrication et de travaux » du CEA. L’article R. 332-9 du même code précise qu’outre les missions précitées, il examine toutes questions relatives au CEA à la demande du conseil d’administration, de l’administrateur général ou du haut-commissaire à l’énergie atomique.

Le conseil scientifique du CEA

Les attributions et la composition du conseil scientifique sont mentionnées à l’article R. 332-12 du code de la recherche. Il formule des recommandations sur les orientations et activités scientifiques du CEA et émet des avis sur la pertinence de ses activités scientifiques et de ses investissements. Il évalue les résultats des programmes de recherche du CEA.

B.   Le rattachement et les missions du HCEA

Le HCEA est nommé par décret en conseil des ministres pour une durée de 4 ans, renouvelables une fois. Il est placé auprès de l’administrateur général du CEA. L’article L. 332-4 du code de la recherche ancre les missions du HCEA au sein du CEA :

– il est conseiller scientifique et technique auprès de l’administrateur général du CEA ;

– il peut saisir le Comité de l’énergie atomique et l’autorité administrative compétente concernant l’orientation générale scientifique et technique qui lui paraît souhaitable ;

– il préside le conseil scientifique, ce dernier l’assistant dans ses fonctions.

Le décret n° 2016-311 du 17 mars 2016 ([24]) apporte certaines précisions complémentaires sur ses missions :

– le HCEA peut être chargé, à la demande de l’administrateur général ou d’un ministre, de missions de conseil et d’expertise pour le CEA, ainsi que de missions intéressant la défense nationale et l’enseignement ;

– il peut saisir les ministres intéressés de propositions relatives à l’orientation générale scientifique et technique du CEA ;

– il participe au contrôle gouvernemental de la dissuasion nucléaire et à la gestion patrimoniale des matières nucléaires nécessaires à la défense.

Le décret  2023-1383 du 30 décembre 2023 ([25]) modifie certaines attributions du HCEA et le rattache, pour sa gestion administrative et budgétaire, au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN).

Principales modifications de compétences du Hcea apportées
par le décret n° 20231383 du 30 décembre 2023

 

Compétence concernée

Avant le décret du 30 décembre 2023

Depuis l’entrée en vigueur du décret du 30 décembre 2023

Secrétariat du Conseil de politique nucléaire (CPN)

Exercé par le Secrétariat général de la Présidence de la République

Exercé par SGDSN, avec possibilité pour celui-ci de confier au HCEA la préparation des délibérations du CPN et le suivi de leur mise en œuvre

Missions de conseil et d’expertise

À la demande de l’administrateur général ou d’un ministre, le HCEA est chargé de missions dans les domaines intéressant le CEA, la défense nationale et l’enseignement

– à la demande du ministre chargé de la défense, de l’énergie ou du SGDSN, chargé de missions intéressant le domaine de la politique nucléaire, de la défense et la sécurité nationale

– à la demande du ministre chargé de l’énergie, de la recherche ou de l’enseignement supérieur, chargé de missions intéressant la recherche et l’enseignement supérieur dans le domaine de la politique nucléaire

Possibilité de saisine des membres du Gouvernement par le HCEA

Saisine par le HCEA des ministres intéressés sur des propositions relatives à l’orientation générale scientifique et technique du CEA

Saisine par le HCEA des membres du Gouvernement concernés de propositions, dans le domaine des activités nucléaires civiles et militaires, sur l’orientation générale scientifique et technique dans les domaines de la politique nucléaire, de la défense et de la sécurité nationale

Présidence du conseil scientifique

HCEA

HCEA ; mais celui-ci ne participe plus au conseil d’administration du CEA

Le conseil scientifique n’assiste plus formellement le HCEA

II.   LE TEXTE INITIAL DU PROJET DE LOI

Dans la continuité des modifications opérées par le décret n° 2023-1383 du 30 décembre précité, l’article 12 du projet de loi initial abroge l’article L. 332-4 du code de la recherche prévoyant le rattachement du HCEA au CEA, afin de permettre son rattachement auprès du Premier ministre par voie réglementaire. Ce rattachement lui permettrait notamment d’exercer, par délégation, le secrétariat du Conseil de politique nucléaire – cette disposition étant d’ailleurs déjà prévue par ce même décret du 30 décembre.

Le Gouvernement estime que le positionnement du HCEA auprès de l’administrateur général du CEA a progressivement conduit à « restreindre sa capacité d’impulsion scientifique », selon l’étude d’impact du projet de loi. Or, dans le contexte de relance de la filière nucléaire, il souhaite renforcer son rôle. En le rattachant au Premier ministre, il entend ainsi lui permettre d’exercer sa fonction de conseiller scientifique et technique directement auprès du Gouvernement sur les questions nucléaires, tout en lui confiant un rôle de préparation et de suivi des CPN.

S’agissant des moyens qui sont attribués au HCEA, celui-ci disposerait, selon la même étude d’impact, de cinq à six équivalents temps plein transférés du CEA et d’un agent de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) qui, en complément de ses attributions au sein de la DGEC, l’assistera pour l’exercice des missions relatives au secrétariat des Conseils de politique nucléaire.

Dans son avant-projet de loi transmis au Conseil d’État, le Gouvernement envisageait de conserver la base légale du HCEA en créant un nouvel article L. 141‑13 dans le code de l’énergie : cet article précisait que le HCEA était rattaché au Premier ministre et indiquait très brièvement quelles étaient ses missions, sur le modèle de la rédaction actuelle de l’article L. 332-4 du code de la recherche.

Cependant, dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État a estimé que si des dispositions législatives sont bien nécessaires pour abroger l’article L. 332-4 du code de la recherche, une base légale n’était pas nécessaire pour définir les nouvelles missions du HCEA, le Premier ministre étant « libre d’user du pouvoir réglementaire pour organiser, comme il l’entend, le travail du Gouvernement ».

III.   les dispositions adoptées par le sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté l’amendement COM-52 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Patrick Chaize (LR). Cet amendement rétablit la base légale du HCEA, tout en conservant la modification de son rattachement du CEA vers le Premier ministre. Le nouvel article ainsi créé est codifié non plus dans le code de la recherche, mais dans le code de l’énergie.

Le rapporteur Patrick Chaize justifie notamment le rétablissement de cette base légale par le fait qu’il serait incohérent de supprimer la base légale du conseil scientifique du CEA tout en maintenant, aux articles L. 332‑2 et L. 332-3 du même code, celles du Comité de l’énergie atomique et du conseil d’administration du CEA ([26]).

Surtout, la nouvelle rédaction de l’article 12 ainsi proposée détaille et enrichit les missions du haut-commissaire.

1.   Missions générales et mode de désignation du HCEA

Le I du nouvel article L. 141-13 du code de l’énergie précise les missions du HCEA. Ce dernier conseille le Gouvernement en matière scientifique et technique dans le domaine de l’énergie nucléaire. Il préside le conseil scientifique du CEA et peut saisir le Comité de l’énergie atomique et toute autre autorité compétente de ses propositions concernant, dans le domaine des activités nucléaires civiles et militaires, l’orientation générale scientifique et technique qui lui paraît souhaitable. Il peut assurer le secrétariat du CPN. Il s’agit donc, pour l’essentiel, de préciser au niveau législatif des dispositions existant déjà au niveau réglementaire.

Le II du même article L. 141-13 précise son rattachement, son mode de désignation et ses obligations déontologiques :

– le HCEA est placé auprès du Premier ministre ;

– sa nomination sera soumise à l’avis des commissions permanentes compétentes du Parlement en application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution – en l’occurrence, celles chargées de l’énergie ;

– le HCEA devra soumettre une déclaration d’intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ;

– son mandat sera limité à une durée de 4 ans, renouvelable une fois, comme c’est déjà le cas aujourd’hui.

Le VII de l’article L. 141-13 du code de l’énergie renvoie à un décret la fixation des modalités d’organisation et de fonctionnement du HCEA.

Il peut être relevé qu’aucune nomination à un emploi ou fonction relevant directement de l’autorité hiérarchique du Gouvernement, pour l’exercice de missions qui sont clairement et historiquement identifiées comme étant des missions de conseil, n’est soumise à l’avis des commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le risque d’inconstitutionnalité de cette disposition est dès lors majeur.

2.   Les possibilités de saisine du HCEA sur certains textes législatifs et réglementaires

Les III, IV et V de l’article L. 141-13 du code de l’énergie précisent les modalités de saisine du HCEA et définissent ses relations avec le Parlement.

Le III du nouvel article L. 141-13 précise que le HCEA pourra être saisi par l’administrateur général du CEA d’une demande de conseils scientifiques et techniques. De plus, le Gouvernement, le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat pourront le saisir d’un avis sur un projet de texte législatif ou réglementaire, un projet d’acte européen ou sur une question relatifs aux activités nucléaires civiles.

Le IV dispose de plus que la saisine pour avis du HCEA est :

– obligatoire sur la loi quinquennale sur l’énergie (LPEC) ([27]) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ;

– facultative sur la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et le plan national intégré énergie‑climat (PNIEC).

Le V précise que le HCEA doit publier un rapport annuel sur l’état des activités nucléaires civiles, sur les plans technique et scientifique. Ce rapport doit aussi évaluer l’atteinte des objectifs programmatiques en matière d’énergie nucléaire.

Le Haut Conseil pour le climat (HCC) remplit déjà largement de telles attributions, comme cela a d’ailleurs été relevé par le HCEA lui-même en audition. L’article L. 132-4 du code de l’environnement dispose ainsi :

– que le HCC rend chaque année un rapport portant notamment sur le respect de la trajectoire des émissions de gaz à effet de serre (GES) au regard de la SNBC, l’efficacité des politiques publiques en matière de réduction des GES ;

– que le Gouvernement doit présenter au Parlement et au Conseil économique, social et environnemental (CESE), les mesures déjà mises en œuvre et celles prévues pour répondre aux préconisations du rapport ;

– que le HCC rend un avis sur la SNBC et les budgets carbone.

L’article L. 132-5 du même code prévoit la possibilité pour le HCC de s’autosaisir ou d’être saisi par le Gouvernement, le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat ou le CESE sur toute question ou projet de texte législatif ou toute question relative à son domaine d’expertise.

De plus, le Conseil supérieur de l’énergie est consulté sur « l'ensemble des actes de nature réglementaire émanant du Gouvernement, intéressant le secteur de l'électricité ou du gaz, à l'exception de ceux qui relèvent du domaine de compétence de la Caisse nationale des industries électriques et gazières » ([28]).

Enfin, l’OPECST produit régulièrement des rapports en lien avec les enjeux de politique nucléaire et organise fréquemment des auditions à ce sujet.

3.   Reddition de comptes au Parlement

Le VI de l’article L. 141-13 du code de l’énergie prévoit que les commissions compétentes du Parlement en matière d’énergie nucléaire et l’OPECST doivent être destinataires des avis obligatoires du HCEA sur la LPEC et la PPE, tout comme de son rapport annuel. Ce rapport doit faire l’objet d’une présentation par le haut-commissaire.

4.   Maintien d’une référence au conseil scientifique du CEA dans le code de la recherche

Le III de l’article 12 conserve l’article L. 332-4 du code de la recherche, que le projet de loi initial abrogeait. Cet article permet de conserver une assise légale au conseil scientifique du CEA et d’en définir les grandes missions, ses modalités de composition et de fonctionnement demeurant précisées par voie réglementaire.

B.   l’EXAMEN EN Séance publique

En séance, seul un amendement rédactionnel n° 94 du rapporteur Patrick Chaize a été adopté, avec avis favorable de la commission et du Gouvernement.

IV.   Les TRAVAUX DE la commission

La commission des affaires économiques a adopté l’amendement de rédaction globale CE66 du rapporteur pour avis.

Cet amendement conserve une assise législative au HCEA tout en renvoyant au niveau réglementaire le détail de ses missions. En effet, le rapporteur considère que les missions du HCEA ne doivent pas être détaillées dans la loi, celui-ci étant placé sous l’autorité hiérarchique directe du Gouvernement. La nouvelle rédaction de l’article 12 précise de manière très générale le rôle de conseil de HCEA auprès du Gouvernement en matière scientifique et technique sur les sujets nucléaires, tant civils que militaires. Il est précisé que cette mission inclut les enjeux de production d’électricité et de cycle du combustible, compte tenu de l’importance majeure que revêtent ces deux questions pour la souveraineté énergétique de la France, ce qu’ont montré les travaux de la commission d’enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France ([29]). Le HCEA devra aussi évaluer l’état des activités nucléaires civiles et le degré d’atteinte des objectifs de la politique nucléaire civile.

Outre la suppression de plusieurs dispositions introduites par le Sénat et qui relèvent manifestement du domaine réglementaire, l’amendement de rédaction globale supprime également :

– l’avis des commissions permanentes compétentes en matière d’énergie, à l’Assemblée nationale et au Sénat, sur la nomination du HCEA. Une telle procédure d’avis, prévue au cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, concerne les emplois ou fonctions ne relevant pas de l’autorité hiérarchique directe du Gouvernement et qui impliquent des pouvoirs de décision et de direction (présidents d’autorités administratives ou publiques indépendantes, d’établissements ou d’entreprises publics) ([30]). Le HCEA étant sous l’autorité hiérarchique directe du Premier ministre, une telle disposition présente donc un risque manifeste d’inconstitutionnalité. Un amendement de coordination à l’article 13 du projet de loi (CE68) a également été adopté pour tirer les conséquences de cette suppression ;

– l’avis obligatoire du HCEA sur la LPEC et la PPE, d’une part, et facultatif sur la SNBC et le PNIEC, d’autre part. Le rapporteur pour avis considère que le HCEA n’a pas vocation à se substituer à d’autres organismes disposant d’une vision globale sur les enjeux d’énergie ou de transition énergétique, notamment le Haut Conseil pour le climat.

Enfin, l’amendement CE66 supprime l’article L. 332-4 du code de la recherche, comme cela était prévu dans le projet de loi initial, le maintien d’une base légale au conseil scientifique du HCEA n’étant pas nécessaire.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

*

*     *

Chapitre IV
Dispositions de coordination et finales

Article 13
Soumission de la recherche de l’ASNR à l’évaluation du Haut Conseil
de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES)
et coordination

Adopté par la commission avec modifications

 

Cet article vise à soumettre la recherche menée au sein de l’ASNR à l’évaluation du HCERES et à effectuer des coordinations légistiques. Le Sénat a adopté un amendement permettant à l’ensemble des personnel de l’ASNR de participer aux missions de contrôle de l’autorité.

I.   Le droit en vigueur

En matière de recherche, l’IRSN dispose aujourd’hui d’une notoriété et d’une visibilité dans le monde de la recherche qui devront être préservées. Par suite du transfert des missions de recherche qui relèvent actuellement de l’IRSN, il y a lieu de faire entrer l’ASNR dans le champ d’application de certaines dispositions du code de la recherche.

En outre, l’ASNR devra poursuivre la collaboration engagée par l’IRSN avec les industriels du secteur nucléaire, indispensable à la recherche en sûreté nucléaire. L’Autorité aura cependant la charge de contrôler ces exploitants, ce qui peut soulever certaines questions de déontologie.

Enfin, il est essentiel de garantir des ressources humaines et financières suffisantes à l’ASNR, sachant que l’IRSN bénéficiait du support de ses activités commerciales, notamment en matière de dosimètres, pour financer certaines de ses activités de recherche. Le manque à gagner de ce point de vue, à la suite du transfert au CEA de cette activité, est estimé à environ 3 millions d’euros.

II.   Le texte initial du projet de loi

Cet article de coordination contient plusieurs suppressions ou modifications d’articles dans les codes de la consommation, de l’environnement, de la recherche et de la santé publique, afin de les adapter à la nouvelle autorité qui sera mise en place.

En premier lieu, l’article L. 512-20 du code de la consommation prévoit que les agents habilités et les officiers et agents de police judiciaire peuvent se communiquer spontanément les informations et documents détenus ou recueillis dans l’exercice de leurs missions respectives, sans que les dispositions de l’article 11 du code de procédure pénale sur le secret de la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction ou celles relatives au secret professionnel fassent obstacle à une telle communication. Il est prévu que ces informations et documents peuvent être communiqués, pour l’exécution de leurs missions respectives en matière de conformité ou de sécurité des produits, notamment à l’ASN et à l’IRSN. Les alinéas 1 et 2 du présent article modifient le code de la consommation pour faire référence à la dénomination de la future autorité.

Le code de l’environnement est ensuite modifié à plusieurs occurrences. D’abord, la constitution de l’ASNR conduit à une modification de la composition du Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN). Il est donc nécessaire de modifier l’article L. 125-37 du code de l’environnement relatif à la composition de cette instance (alinéas 4 et 5). Ensuite, la référence à la mission de suivi de la recherche de l’ASN à l’article L. 592-31-1 du code de l’environnement, intégrée par l’article 3 du présent projet de loi à l’article L. 592-28-2 du même code, est supprimée.

L’article L. 592-34 du code de l’environnement, qui prévoit un décret en Conseil d’État précisant les conditions d’application du chapitre relatif à l’ASN et à l’IRSN est abrogé. Un article L. 592-45 est créé, qui reprend le renvoi à un décret en Conseil d’État d’application en l’adaptant à la création de l’ASNR, pour ce qui concerne les prestations pouvant être rémunérées et les procédures d’homologation des décisions.

Concernant le code de la recherche, la future autorité se verra confier les missions actuelles de l’IRSN en matière de recherche, qu’il s’agisse de recherche amont ou de recherche finalisée. Afin de pouvoir exercer pleinement ces nouvelles missions, la future autorité devra pouvoir être reconnue officiellement comme établissement réalisant de la recherche par le ministère chargé de la recherche. L’article L. 114-3-1 est modifié pour permettre au Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) d’évaluer, à la demande de l’ASNR, les activités de recherche de l’autorité. En revanche, l’établissement ASNR ne sera pas évalué par le HCERES en tant qu’établissement de recherche.

Le code de la recherche est également modifié, pour rendre l’abrogation par l’article 12 du présent projet de loi de l’article L. 332-4 du même code relatif au haut-commissaire à l’énergie atomique applicable à l’outre-mer.

Enfin, la constitution de l’ASNR conduit également à plusieurs modifications du code de la santé publique par la suppression de la référence à l’IRSN à l’article L. 1411-5-1 ainsi qu’à l’article L. 1451-1.

III.   les dispositions adoptées par le SÉnat

A.   L’examen en commission

La commission a adopté un amendement du rapporteur COM-18 qui vise à permettre, par modification de l’article L. 596-2 du code de l’environnement (alinéa 16), à l’ensemble des personnels de l’ASNR d’être nommés inspecteurs de la sûreté nucléaire, de mener des enquêtes techniques et d’être nommés inspecteurs de la radioprotection en remplaçant le terme « agents » par le terme plus englobant de « personnels ». Le personnel de la future ASNR serait en effet à la fois composé d’agents publics (fonctionnaires et contractuels) et de salariés de droit privé. Le Conseil d’État avait relevé dans son avis que le Conseil constitutionnel a jugé qu’aucune exigence constitutionnelle n’impose que tous les emplois participant à l’exercice de « fonctions régaliennes » soient occupés par des fonctionnaires (décision n° 2019-790 DC du 1er août 2019) et que des dispositions prévoyant qu’un organisme public peut employer des agents contractuels de droit privé accomplissant pour son compte des missions de police administrative n’ont ni pour objet ni pour effet de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale (décision n° 2023-1042 QPC du 31 mars 2023, à propos de l’Office national des forêts).

L’amendement adopté ne conduit toutefois pas à confier aux salariés de droit privé qui seraient inspecteurs de sûreté nucléaire l’exercice de prérogatives de police judiciaire, ce qui serait contraire à l’article 66 de la Constitution. Les articles L. 172-4 et L. 596-10 du code de l’environnement, qui ne sont pas modifiés, réservent l’exercice de ces prérogatives aux fonctionnaires et aux agents publics.

La commission a par ailleurs adopté un amendement de coordination COM‑70 du rapporteur pour avis (M. Chaize, LR), qui vise à assurer l’application outre-mer de l’article 12 du présent projet de loi (alinéas 20 à 25).

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement rédactionnel de M. Chaize.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a adopté un amendement CD441 de M. Antoine Armand, rapporteur de la commission des affaires économiques, tirant les conséquences, en termes de coordination juridique, de la suppression, à l’article 12, de la mention du haut-commissaire à l’énergie atomique dans le code de la recherche.

*

*     *

Article 14
Conditions de nomination du président de l’Autorité de sûreté nucléaire
et de radioprotection et actualisation de références législatives

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 14 du projet de loi, dans sa rédaction initiale, prévoit que la nomination à la présidence de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) sera contrôlée par la commission permanente compétente en matière d’énergie au sein de chaque assemblée.

Le Sénat a souhaité que cette nomination soit contrôlée par la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques.

L’article 14 procède en outre à des modifications rédactionnelles de coordination.

I.   Le droit en vigueur

Le cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution dispose qu’« une loi organique détermine les emplois ou fonctions […] pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés ».

L’annexe de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution dresse la liste des emplois et fonctions concernés. Les nominations du Président de la République à la présidence de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et à la direction générale de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sont ainsi contrôlées par le Parlement.

L’annexe de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution détermine les commissions permanentes compétentes au sein de chaque assemblée pour émettre un avis sur les nominations aux emplois et fonctions mentionnés dans l’annexe de la loi organique précitée. Il s’agit :

– pour la présidence de l’ASN, de la commission compétente en matière d’énergie, à savoir la commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale comme au Sénat ;

– pour la direction générale de l’IRSN, de la commission compétente en matière d’environnement, c’est-à-dire la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée nationale et la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable au Sénat.

II.   Le texte initial du projet de loi

A.   Conditions de nomination du président de l’ASNR

Le III du présent article 14 modifie l’annexe de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution afin de tirer les conséquences de la création de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

En remplaçant la référence à l’ASN par une référence à l’ASNR, le du III prévoit un contrôle de la nomination à la présidence de la nouvelle autorité par la commission compétente en matière d’énergie, à savoir la commission des affaires économiques dans les deux assemblées. Le du III supprime la référence à la nomination à la direction générale de l’IRSN.

B.   Actualisation de références législatives

Les I et II du présent article 14 procèdent à de nombreuses coordinations rédactionnelles afin de tirer les conséquences de la création de l’ASNR.

Le I remplace les références à l’ASN par des références à l’ASNR dans :

– le code de la défense ( du I) ;

– le code de l’environnement ( du I) ;

– le code de la santé publique ( du I) ;

– le code du travail ( du I) ;

– la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ( du I) ;

– la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes ( du I).

Le II remplace, à l’article L. 221-6 du code de l’environnement, la référence à l’IRSN, chargé de publier les résultats d’études épidémiologiques et d’études sur l’environnement liées aux rayonnements ionisants, par une référence à l’ASNR.

III.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté six amendements à l’article 14.

● L’amendement COM-22 du rapporteur M. Pascal Martin (Union Centriste) modifie le III pour prévoir que la commission permanente compétente de chaque assemblée pour émettre un avis sur la nomination à la présidence de l’ASNR, en application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, est la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques. Il s’agit de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire à l’Assemblée nationale et de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable au Sénat.

Comme l’a rappelé avec justesse le rapporteur M. Pascal Martin, la raison d’être de la future ASNR ne sera pas de garantir l’approvisionnement énergétique, mais d’assurer la sûreté nucléaire. Le choix de la commission chargée de la prévention des risques technologiques traduit donc cette priorité accordée à la sûreté. À cet égard, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale assure déjà un suivi des questions de sûreté nucléaire à plusieurs titres. Elle est, pour mémoire, compétente pour émettre un avis au titre de l’alinéa 5 de l’article 13 de la Constitution sur la nomination du directeur général de l’IRSN. En outre, cette commission examine chaque année, pour avis, les crédits relatifs à la prévention des risques du projet de loi de finances. Elle se prononce, dans ce cadre, sur les subventions accordées à l’ASN et à l’IRSN. Enfin, c’est bien cette commission qui a été chargée d’examiner au fond le présent projet de loi.

● Les amendements identiques COM-19 du rapporteur M. Pascal Martin et COM-71 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques M. Patrick Chaize (Les Républicains) et l’amendement COM-20 du rapporteur M. Pascal Martin procèdent à plusieurs corrections d’erreurs de référence. La commission a également adopté l’amendement de coordination légistique COM-21 du rapporteur et l’amendement COM-6 visant à supprimer une référence obsolète, également présenté par le rapporteur.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté un amendement de coordination légistique COM-96 du rapporteur M. Pascal Martin.

IV.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté trois amendements de coordination rédactionnelle CD409, CD410 et CD411 du rapporteur.

*

*     *

Article 15
Entrée en vigueur

Adopté par la commission avec modifications

 

L’article 15 du projet de loi fixe l’entrée en vigueur des articles du titre Ier, relatif à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), au 1er janvier 2025, en prévoyant quelques exceptions.

I.   le texte INITIAL du PROJET DE LOI

L’article 15 fixe l’entrée en vigueur du titre Ier du présent projet de loi, relatif à l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), au 1er janvier 2025.

Plusieurs exceptions sont néanmoins prévues :

– les I et II de l’article 11, relatifs respectivement à l’augmentation de la rémunération des salariés et des contractuels de droit public de l’ASN et de l’IRSN en 2024 et à la remise d’un rapport au Parlement sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à l’ASNR en 2025, entrent en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel ;

– l’article 12, qui vise à rattacher le haut-commissaire à l’énergie atomique auprès du Premier ministre, entre également en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel ;

– le troisième alinéa du IV de l’article L. 592-12-1 du code de l’environnement, dans sa rédaction issue de l’article 6 du présent projet de loi, qui exclut les agents publics de l’ASNR du champ de l’action sociale interministérielle, entre en vigueur à compter de la date à laquelle ces agents publics bénéficient de plein droit du dispositif d’activités sociales et culturelles du comité social d’administration de la nouvelle autorité et au plus tard le 1er juillet 2027.

II.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’examen en commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement COM-23 du rapporteur M. Pascal Martin (Union Centriste).

Outre la suppression d’une référence obsolète, cet amendement prévoit une entrée en vigueur immédiate de la disposition prévoyant que la commission permanente compétente dans chaque assemblée pour émettre un avis sur la nomination du président de l’ASNR est la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques.

En effet, le mandat de l’actuel président expirant en novembre 2024, le Président de la République devrait nommer le nouveau président avant le 1er janvier 2025.

B.   L’examen en séance publique

En séance publique, le Sénat a adopté l’article 15 sans modification.

III.   LES TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté un amendement de coordination juridique CD443 du rapporteur de la commission des affaires économiques, M. Antoine Armand (Renaissance), et un amendement rédactionnel CD412 du rapporteur.

*

*     *

Article 15 bis (nouveau)
Rapports de suivi de la mise en œuvre de la réforme de la gouvernance
de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

Créé par la commission

 

L’article 15 bis du projet de loi, créé par la commission, prévoit la remise à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) de trois rapports de suivi de la mise en place de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

L’article 15 bis résulte de l’adoption, par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, de deux amendements identiques CD413 du rapporteur et CD363 de M. Anthony Brosse (Renaissance).

Afin d’améliorer le suivi de la mise en œuvre de la réforme de la gouvernance de la sureté nucléaire et de la radioprotection par le Parlement, cet article prévoit la remise de plusieurs rapports à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) :

– un rapport du Gouvernement faisant état de l’avancée des travaux préparatoires de mise en œuvre de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), remis à l’Opecst au plus tard le 1er juillet 2024 ;

– un rapport de l’ASNR dressant un bilan de sa création et de la mise en œuvre de la réforme, remis à l’Opecst au plus tard le 1er juillet 2025 ;

– un second rapport de l’ASNR, dressant un nouveau bilan de sa création et de la mise en œuvre de la réforme, remis à l’Opecst au plus tard le 1er juillet 2026.

Ce suivi renforcé de la réforme par l’Opecst, pendant une durée de deux ans, doit permettre de garantir pleinement l’effectivité du contrôle et de l’évaluation exercés par les parlementaires. Conformément aux conclusions adoptées par l’Office lors de sa réunion du 28 février 2023 ([31]), l’Opecst veillera spécifiquement au maintien des compétences dans la structure unifiée, à la distinction entre expertise et contrôle et à la mise en œuvre des engagements relatifs à l’information, à la transparence et au dialogue technique avec la société.

*

*     *

 


TITRE II
Adaptation des règles de la commande publique aux projets nucléaires

Les articles 16 à 18 du projet de loi permettent aux pouvoirs adjudicateurs et aux entités adjudicatrices de déroger à certaines règles applicables en matière de commande publique pour des projets liés au nucléaire. Dans les faits, les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices concernés seraient :

– d’une part, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, (ANDRA), qui sont des personnes morales de droit public et donc des pouvoirs adjudicateurs ;

– d’autre part, EDF, qui est une entité adjudicatrice, du fait de son actionnariat et de son activité ([32]).

RTE, qui est une entité adjudicatrice, bénéficiera également des dispositions des articles 16, 17, 17 bis et 17 ter lorsqu’elles s’appliquent à la réalisation d’un réacteur électronucléaire au sens de la loi « Nucléaire » ([33]), étant donné que celle-ci a inclus, dans la définition de cette réalisation, les ouvrages de raccordement du réacteur au réseau de transport d’électricité.

Les articles 16 et 17 complètent l’arsenal de mesures d’accélération prévues par cette loi « Nucléaire », adoptée par le Parlement en mai 2023. L’article 18 permet de sécuriser la préservation des intérêts essentiels de l’État pour certains marchés publics dans le domaine nucléaire.

Le Conseil constitutionnel a souligné, dans sa décision sur cette même loi « Nucléaire », que de telles mesures d’accélération relèvent de la mise en œuvre des « exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l’indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement ». Selon le Gouvernement, cela permet de fonder des dérogations complémentaires dès lors qu’elles contribuent à accélérer les projets nucléaires ([34]). De plus, le Conseil d’État, dans son avis sur le présent projet de loi, a relevé que les mesures relatives à la sécurisation des procédures de la commande publique pour les porteurs de projets nucléaires, étaient circonscrites dans leur champ d’application matériel et qu’elles pouvaient être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel sur la loi « Nucléaire ».

Selon l’étude d’impact, l’ampleur et la longue durée des chantiers, la complexité des projets nucléaires ou encore la nécessité, pour la construction des futurs EPR2, d’opérer selon une logique sérielle, justifie de telles mesures. La relance du nucléaire constitue en effet un défi industriel inédit.

Enfin, sur des aspects plus formels, le Conseil d’État a admis le choix du Gouvernement de ne pas codifier les dispositions dérogatoires sur la commande publique du projet de loi, « en raison de la spécificité de leur champ d’application ».

Chapitre Ier
Sécurisation des procédures relatives à la commande publique pour les projets nucléaires

Adopté par la commission avec modifications

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 16 permet aux pouvoirs adjudicateurs et aux entités adjudicatrices de déroger à l’obligation d’allotissement des marchés publics pour certains projets dans le domaine nucléaire. Le Sénat a codifié cette disposition et modifié son champ d’application.

La commission des affaires économiques a supprimé cette codification et a élargi la dérogation à d’autres installations relatives au nucléaire. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article ainsi modifié.

I.   Le DROIT en vigueur

A.   Le droit français impose l’allotissement des marchés publics, mais le droit européen en fait une faculté

L’article L. 2113-10 du code de la commande publique (CCP) impose qu’un marché public soit passé en lots séparés. Cette obligation d’allotir en droit français n’est toutefois qu’une faculté en droit de l’Union européenne :

– l’article 46 de la directive 2014/24/UE ([35]) dispose que « les pouvoirs adjudicateurs peuvent décider d’attribuer un marché sous la forme de lots distincts », tout en prévoyant explicitement la faculté pour les États membres de rendre cet allotissement obligatoire ;

– l’article 65 de la directive 2014/25/UE ([36]), qui traite spécifiquement des marchés passés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux est rédigée dans des termes similaires pour les entités adjudicatrices concernées.

B.   Des exceptions à l’obligation d’allotissement sont prévues, sans toutefois répondre aux spécificités de certains marchés passés dans le secteur du nucléaire

1.   Des exceptions à l’obligation d’allotissement sont prévues par le code de la commande publique

L’article L. 2113-10 du CCP précité n’impose pas l’allotissement lorsque l’objet du marché ne permet pas d’identifier des prestations distinctes.

L’article L. 2113-11 du CCP permet également de déroger à l’obligation d’allotir un marché public dans 3 cas, rappelés ci-dessous. La possibilité offerte aux entités adjudicatrices de ne pas allotir en cas de risque de procédure infructueuse est issue d’une disposition de la loi « Industrie verte », récemment adoptée par le Parlement ([37]).

Art. L. 2113-11 du code de la commande publique

« L’acheteur peut décider de ne pas allotir un marché dans l’un des cas suivants :
« 1° Il n’est pas en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation, de pilotage et de coordination ;

« 2° La dévolution en lots séparés est de nature à restreindre la concurrence ou risque de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l’exécution des prestations ;

« 3° Pour les entités adjudicatrices, lorsque la dévolution en lots séparés risque de conduire à une procédure infructueuse.

« Lorsqu’un acheteur décide de ne pas allotir le marché, il motive son choix en énonçant les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision. »

2.   Ces dérogations ne sont pas totalement adaptées aux projets nucléaires

Dans l’étude d’impact sur le présent projet de loi, le Gouvernement explique pourquoi les dérogations à l’obligation d’allotir permises par l’article L. 2113-11 du CCP ne sont pas totalement adaptées aux projets nucléaires :

– s’agissant de l’impossibilité pour l’acheteur d’assurer par lui-même l’organisation, le pilotage et la coordination nécessaires (1° de l’article), il souligne qu’EDF peut assurer ces missions mais que cela ne serait pas nécessairement optimal du fait des risques de dérives de calendrier ou « de refus des constructeurs d’endosser les résultats des études conduites par des tiers » ;

– s’agissant du risque de procédure infructueuse (3° de l’article), le Gouvernement souligne qu’un tel risque n’existe pas vraiment pour ce type de marchés.

La seule exception qui pourrait donc s’appliquer est celle concernant le risque de rendre techniquement difficile ou plus coûteuse l’exécution des prestations (2° de l’article). Cependant, là encore, le Gouvernement souligne que c’est surtout le fait de procéder à l’allotissement qui peut rendre le projet d’ensemble plus difficile ou plus coûteux, sans pour autant qu’il y ait une hausse du coût au niveau de chaque prestation concernée. De même, il souligne que le Conseil d’État a eu l’occasion d’appliquer de manière restrictive cette dérogation, en jugeant que l’absence d’allotissement d’un marché n’est pas admise au motif d’une économie de moins de 2 % sur la procédure ([38]). En définitive, le risque le plus important lié à l’allotissement des marchés pour des projets dans le domaine nucléaire serait « un risque d’interface (i.e., lié à la coordination entre intervenants ou à son absence) et de retard de nature à engendrer des surcoûts importants », selon l’étude d’impact du projet de loi.

II.   le Texte initial du projet de loi

Afin d’accélérer et de limiter les coûts de la réalisation de diverses installations nucléaires ou de leur démantèlement et de la remise en état des sites associés, l’article 16 du projet de loi permet de déroger à l’obligation d’allotissement pour certains projets nucléaires. Comme cela vient d’être expliqué, l’article L. 2113-11 du CCP s’avère en effet insuffisant pour répondre au besoin de tels projets. Une telle mesure permet aussi de prévenir d’éventuels contentieux.

L’étude d’impact du projet de loi souligne que les coûts du retard de la construction d’un réacteur, tels qu’estimés par la délégation interministérielle au nouveau nucléaire (DINN), sont de 10 millions d’euros 2020 (M€2020) en phase d’étude, de 50 à 60 M€2020 en phase de travaux de génie civil et de 25 M€2020 en phase de montage.

Les marchés concernés par la dérogation sont les marchés de travaux, de fournitures ou de service nécessaires à la réalisation des installations, des travaux et des opérations de démantèlement et de réhabilitation de sites listés dans le tableau ci-dessous.

Catégories de marchés publics éligibles à la dérogation introduite par l’article 16 du projet de loi

 

Numérotation à l’art. 16

Objet du marché

Réalisation d’un réacteur électronucléaire au sens de la loi « Nucléaire » de juin 2023, c’est-à-dire « l’ensemble des constructions, des aménagements, des équipements, des installations et des travaux liés à sa création ou à sa mise en service ainsi que ses ouvrages de raccordement au réseau de transport d’électricité » et « les installations ou les aménagements directement liés à la préparation des travaux en vue de la réalisation de celui-ci », pour les réacteurs situés à proximité immédiate d’une installation nucléaire de base (INB) existante, dont la demande d’autorisation de création est déposée d’ici juin 2043.

Réalisation d’une INB ([39]) ou d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) soumise à autorisation ou enregistrement à des fins de recherche relative aux utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire ou à la maîtrise de ses effets (cela concerne, par exemple, le réacteur Jules Horowitz du CEA)

Réalisation d’une INB ou d’une ICPE soumise à autorisation lorsqu’elle est destinée à assurer des activités de gestion de déchets radioactifs ou de combustibles usés issus d’INB

Réalisation de travaux souterrains relatifs à un laboratoire souterrain de recherche pour le stockage ou l’entreposage de déchets radioactifs à haute activité et à vie longue (par exemple, le laboratoire de Bure) ou d’opérations de réhabilitation du site après arrêt définitif de ce type d’installation

Réalisation d’opérations de démantèlement :

– d’une INB, lorsqu’elle abrite ou a abrité des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation ou déclaration ;

– d’installations nucléaires de base secrètes.

Réalisation d’opérations de réhabilitation de site après arrêt d’une ICPE lorsque celle‑ci abrite ou a abrité des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation ou déclaration

III.   les dispositions adoptées par le sénat

A.   l’examen En commission

La commission de l’aménagement du territoire du développement durable du Sénat a adopté un amendement COM-55 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques Patrick Chaize (LR). Cet amendement de rédaction globale procède à plusieurs séries de modifications par rapport à la rédaction initiale du présent article 16.

1.   L’extension du champ d’application de la dérogation à l’obligation d’allotissement

L’amendement COM-55 complète le 1° de l’article 16 afin d’y mentionner la réalisation d’installations d’entreposage de combustibles usés qui bénéficieraient, par arrêté, des mesures d’accélération de la loi « Nucléaire ». Ces installations pourront donc bien bénéficier de l’exception à l’obligation d’allotissement des marchés.

Au 2° de l’article 16, le champ de la dérogation à l’obligation d’allotissement est élargi à la réalisation d’installations directement nécessaires aux activités de recherche qui sont visées par ce même 2°. La rédaction initiale de l’article 16 n’incluait que les installations de recherche proprement dites. Selon le rapport de la commission des affaires économiques du Sénat sur le projet de loi ([40]), cet ajout reflète la volonté du CEA d’inclure les installations « supports » pouvant se trouver « sur le chemin critique de la réalisation ou de l’exploitation de l’installation principale ».

Enfin, tant pour la réalisation d’installations de recherche que pour la réalisation d’installations d’entreposage de combustible usé ou de gestion des déchets radioactifs, l’amendement COM-55 précise que cette notion de réalisation « regroupe notamment l’ensemble des constructions, des aménagements, des équipements, des installations et des travaux liés à sa création, à sa mise en service ou à son extension, ainsi que les installations ou les aménagements directement liés à la préparation des travaux en vue de la réalisation de celle-ci ». Cette définition se fonde sur celle de la réalisation d’un réacteur électronucléaire utilisée dans la loi « Nucléaire », en y ajoutant les extensions d’installations et en permettant une interprétation plus large des aménagements, équipements, installations et travaux concernés (puisqu’il est indiqué que la réalisation regroupe « notamment » ceux-ci).

2.   La mention expresse des marchés mixtes

L’amendement COM-55 du rapporteur Patrick Chaize explicite le fait que les marchés dits « mixtes », définis à l’article L. 1111-5 du CCP ([41]), peuvent bien bénéficier des dérogations à l’obligation d’allotissement prévues au présent article 16.

3.   Des précisions rédactionnelles et une codification des dispositions dans le code de la commande publique

Outre diverses précisions rédactionnelles, l’amendement de M. Patrick Chaize substitue au terme de marchés « nécessaires » à la réalisation d’une installation, celui de marchés « relatifs » à une telle réalisation, en soulignant que ce dernier terme avait déjà été utilisé à l’article 16 de la loi « Nucléaire », qui concerne les pouvoirs de régularisation du juge administratif en matière de contentieux lié à la réalisation d’un réacteur électronucléaire.

De plus, l’amendement codifie les dispositions de l’article 16 dans un nouvel article L. 2173-1 du code de la commande publique. Le rapporteur Patrick Chaize justifie cette codification par le fait que les mesures concernées doivent être pérennes. On peut cependant relever que le code de la commande publique n’a jamais eu vocation à accueillir de dispositions sectorielles et que, par ailleurs, la réalisation d’un réacteur électronucléaire visée au 1° de l’article renvoie à la loi « Nucléaire », qui est d’application temporaire (20 ans).

B.   l’examen En séance publique

Aucun amendement n’a été adopté au Sénat en séance publique sur cet article.

IV.   Les travaux de la commission

La commission des affaires économiques a adopté un amendement CE78 du rapporteur pour avis visant à supprimer la codification des dispositions de l’article 16, le code de la commande publique n’ayant pas vocation à accueillir des dispositions sectorielles.

Elle a ensuite adopté trois amendements relatifs au champ d’application de la dérogation à l’obligation d’allotissement des marchés publics, tous trois déposés par le rapporteur pour avis.

L’amendement CE77 supprime l’inclusion, par le Sénat, des installations directement nécessaires aux activités de recherche visées par le 2° de l’article 16, une telle précision n’étant pas nécessaire. En effet, le Sénat a précisé, à l’alinéa 12 du même article 16, ce que recouvre la notion de « réalisation » d’une installation. De plus, l’amendement CE102 du rapporteur pour avis ajoute à la liste des marchés publics pouvant déroger à l’obligation d’allotissement ceux relatifs à la réalisation d’installations de fabrication ou de maintenance d’emballages de transport de substances radioactives, de telles installations étant cruciales pour le bon avancement des autres chantiers mentionnés à l’article 16.

L’amendement CE101 permet, quant à lui, d’inclure dans le champ de la dérogation de ce même article 16 les travaux de surface pour les laboratoires de recherche souterrains sur le stockage ou l'entreposage de déchets radioactifs à haute activité et à vie longue (4° de l’article), en complément des travaux souterrains déjà mentionnés.

La commission a également adopté un amendement rédactionnel CE79 du rapporteur au titre du chapitre Ier du titre II ainsi que deux amendements rédactionnels CE76 et CE75 du rapporteur à l’article 16.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté l’article 16 ainsi modifié.

*

*     *

Adopté par la commission avec modifications

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 17 permet, pour les mêmes installations que celles visés à l’article 16, de déroger à la durée maximale des accords-cadres prévue pour les marchés publics.

Le Sénat a codifié la mesure, a précisé qu’elle est applicable aux marchés mixtes et a indiqué que cette dérogation doit être dûment justifiée. La commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a supprimé cette codification et apporté des précisions rédactionnelles. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

I.   Le DROIT en vigueur

L’article L. 2125-1 du CCP permet à un acheteur public de recourir à diverses techniques d’achat pour présélectionner des opérateurs économiques susceptibles de répondre à son besoin.

Parmi ces techniques figure l’accord-cadre qui, aux termes de ce même article, « permet de présélectionner un ou plusieurs opérateurs économiques en vue de conclure un contrat établissant tout ou partie des règles relatives aux commandes à passer au cours d’une période donnée ». L’accord-cadre est un outil de planification qui permet, selon un guide pratique sur le sujet édité par la direction des affaires juridiques du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, « d’ajuster la réponse aux besoins, à mesure de l’apparition de ceux-ci » ([42]).

L’accord-cadre peut être conclu avec un ou plusieurs opérateurs. Une fois conclu, il permet notamment à l’acheteur de passer des marchés à bons de commande ou des marchés subséquents dans le cadre de cet accord, sans nouvelles mesures de publicité, les titulaires de l’accord-cadre ayant déjà été désignés. La durée maximale des accords-cadres est fixée :

– à 8 ans pour les entités adjudicatrices ;

– à 4 ans pour les pouvoirs adjudicateurs.

La dérogation à ces durées n’est admise que dans des cas exceptionnels, qui doivent être justifiés, « notamment par leur objet ou par le fait que leur exécution nécessite des investissements amortissables sur une durée supérieure ou par un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse dans le cadre de la procédure de passation d’un accord-cadre engagée par une entité adjudicatrice », selon le même article L. 2125-1 du CCP. Cette dernière précision relative à la dérogation autorisée pour les entités adjudicatrices résulte de l’article 27 de la loi « Industrie verte ».

En droit européen, le considérant 72 de la directive 2014/25/UE précitée (voir le commentaire de l’article 16) indique que le besoin d’une telle dérogation pourrait se présenter, par exemple, lorsque « les opérateurs économiques ont besoin de disposer d’équipements dont la durée d’amortissement est supérieure à huit ans et […] doivent être disponibles en tout temps pendant toute la durée de l’accordcadre ». Le considérant 62 de la directive 2014/24/UE précitée est rédigé en des termes similaires.

II.   Le texte initial du projet de loi

L’article 17 du projet de loi sécurise la possibilité de déroger à la durée maximale des accords-cadres prévue par le code de la commande publique. Ainsi, pour les projets mentionnés à l’article 16, les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices pourront déroger à cette durée maximale, pour une durée qui peut égaler celle du projet concerné. Cette durée doit être fixée en fonction des aléas inhérents à la réalisation de ce dernier.

Comme celles de l’article 16, ces dispositions vont dans le sens d’une accélération des projets dans le domaine nucléaire, de la maîtrise de leurs coûts et d’une meilleure visibilité sur les investissements à réaliser. De plus, la dérogation de l’article 17 répond au besoin de standardisation des équipements utilisés dans la réalisation des différentes installations : l’étude d’impact souligne que ces équipements industriels complexes sont produits en petites séries dans l’industrie nucléaire. Par ailleurs, pour certains équipements, des dizaines ou des centaines de références différentes peuvent exister.

De plus, la construction d’un EPR s’étale sur une durée bien supérieure à 8 ans. Par exemple, la mise en service du premier EPR2 à Penly est aujourd’hui espérée pour 2035, le chantier devant débuter à l’été 2024. Les durées associées aux opérations préparatoires à un démantèlement sont également plus longues que celles permises par les accords-cadres : elles peuvent durer 5 à 10 ans selon l’étude d’impact, le démantèlement proprement dit étant « la phase la plus longue et la plus susceptible d’aléas, qui peut durer plusieurs décennies ».

Enfin, en favorisant le recours à des équipements standardisés, le bénéfice des dispositions de l’article 17 du projet de loi s’étendra même au-delà des phases de construction et de mise en service des réacteurs, puisque l’exploitation et la maintenance en seront aussi rendues plus aisées.

Le Conseil d’État, dans son avis sur le projet de loi, n’a noté aucun obstacle constitutionnel ou conventionnel à la mesure. Il a cependant relevé que l’article 17 introduit une limite qui ne figure aujourd’hui pas en droit, « de sorte qu’elle va audelà de ce qu’impose la transposition du droit de l’Union européenne, et qu’elle impose en outre aux acheteurs de prévoir dans les accords-cadres concernés par la mesure une durée plus longue, par la prise en compte des aléas, que celle annoncée par ailleurs pour la réalisation du projet ». Les services ministériels ont toutefois indiqué à votre rapporteur que cet article 17 limitera le risque que la dérogation à la durée maximale des accords-cadres déjà prévue en droit « puisse être interprétée de manière excessivement restrictive ».

III.   les dispositions adoptées par le Sénat

A.   l’examen En commission

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement COM‑56 du rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques, Patrick Chaize (LR).

Comme pour les autres amendements du rapporteur ayant trait à la commande publique, il codifie les dispositions de l’article 17 au sein du code de la commande publique.

Sur le fond, l’amendement COM-56 précise, comme à l’article 16, que les dispositions de l’article 17 sont également applicables aux marchés mixtes définis à l’article L. 1111-5 du CCP.

Il ajoute enfin que l’emploi de la dérogation prévue à l’article 17 doit être justifié, cette exigence de justification étant applicable en droit commun pour déroger à la durée maximale des accords-cadres. Cette précision est effectuée dans un souci de conformité au droit de l’Union européenne, selon l’exposé sommaire de l’amendement.

B.   l’examen En séance publique

Aucun amendement n’a été adopté au Sénat en séance publique sur cet article.

IV.   Les travaux de la commission

La commission des affaires économiques a adopté un amendement CE74 du rapporteur pour avis visant à supprimer la codification des dispositions de l’article 17, le code de la commande publique n’ayant pas vocation à accueillir des dispositions sectorielles.

Elle a également adopté deux amendements CE73 et CE72, d’ordre rédactionnel.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

*

*     *

Adopté par la commission avec modifications

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 17 bis précise que pour les marchés publics relatifs à la réalisation d’un réacteur électronucléaire, les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices peuvent inclure, parmi les critères d’attribution d’un marché public, la crédibilité des offres des soumissionnaires ou en tenir compte. Cet article est issu d’un amendement du rapporteur pour avis du Sénat Patrick Chaize.

La commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a supprimé la codification des dispositions de l’article 17 bis au sein du code de la commande publique. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

I.   Le DROIT en vigueur

A.   La partie législative du code de la commande publique définit de manière générale la notion d’offre économique la plus avantageuse

L’article L. 2152-7 du code de la commande publique prévoit qu’un marché public est attribué au soumissionnaire qui présente l’offre économiquement la plus avantageuse. Cette notion peut être déterminée selon deux approches :

– soit sur la base du critère du prix ou du coût ;

– soit sur la base d’une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché, incluant le prix ou le coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux.

Cette définition est en vigueur depuis la promulgation de la loi « Industrie verte », en octobre 2023. Auparavant, la notion d’offre économique la plus avantageuse devait être déterminée « sur la base d’un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution ». À compter du 22 août 2026, en application de l’article 35 de la loi « Climat et résilience » ([43]), cette définition sera une nouvelle fois modifiée afin d’inclure de manière obligatoire un critère prenant en compte les caractéristiques environnementales de l’offre.

B.   La partie réglementaire du code de la commande publique et la jurisprudence permettent de préciser cette notion

L’article R. 2152-7 du CCP énumère, de manière non exhaustive, certains critères qui peuvent être pris en compte au titre de la notion d’offre économiquement la plus avantageuse. Y figurent, par exemple, la qualité, les délais d’exécution, la sécurité des approvisionnements, l’interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles ou encore l’organisation, les qualifications et l’expérience du personnel assigné à l’exécution du marché, etc. Il est précisé que « d’autres critères peuvent être pris en compte s’ils sont justifiés par l’objet du marché ou ses conditions d’exécution ».

Si le critère de crédibilité des offres n’est pas expressément mentionné dans la partie réglementaire du CCP, la jurisprudence a déjà reconnu que ce critère pouvait être pris en compte pour fonder le choix de l’attributaire d’un marché ([44]).

En droit de l’Union européenne, l’article 67 de la directive 2014/24/UE et l’article 82 de la directive 2014/25/UE se réfèrent également à la notion d’offre économique la plus avantageuse pour attribuer le marché, en citant divers exemples de critères pouvant être pris en compte à ce titre. Le critère de crédibilité des offres n’est, là non plus, pas expressément mentionné.

II.   Les dispositions adoptées par le sénat

A.   l’examen En commission

L’article 17 bis résulte de l’adoption d’un amendement COM-57 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Patrick Chaize (LR), par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat.

Il prévoit explicitement au niveau législatif que, pour les marchés relatifs à la réalisation d’un réacteur électronucléaire, c’est-à-dire pour ceux mentionnés au 1° de l’article 16 du projet de loi, les critères d’attribution du marché peuvent prendre en compte la crédibilité des offres des soumissionnaires ou en tenir compte. Il précise sur le fondement de quelles caractéristiques peut s’apprécier cette crédibilité (faisabilité et maturité des solutions techniques ou adéquation des délais, des moyens ou des méthodes).

Cette disposition est codifiée dans le code de la commande publique.

Le rapporteur Patrick Chaize a souhaité l’introduction de cette disposition dans le texte car elle permet, à son sens, de sélectionner les offres « selon leur faisabilité et leur maturité technologiques, mais aussi selon l’adéquation des délais, des moyens et des méthodes », selon l’exposé sommaire de l’amendement. La disposition s’appliquerait uniquement à la réalisation des réacteurs électronucléaires au sens de la loi « Nucléaire », ce qui permet de circonscrire la dérogation.

B.   l’examen En séance publique

L’article 17 bis n’a pas été modifié en séance publique au Sénat.

III.   Les travaux de la commission

La commission des affaires économiques a adopté un amendement CE71 du rapporteur pour avis visant à supprimer la codification des dispositions de l’article 17 bis, le code de la commande publique n’ayant pas vocation à accueillir des dispositions sectorielles.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

*

*     *

 

Adopté par la commission avec modifications

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 17 ter précise comment doit s’apprécier le caractère nécessaire de travaux, de fournitures ou de services supplémentaires fondant le recours à un avenant sans nouvelle procédure de mise en concurrence, dans le cadre des marchés relatifs à la réalisation d’un réacteur électronucléaire. Cet article est issu d’un amendement du rapporteur pour avis du Sénat, Patrick Chaize.

La commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a supprimé la codification des dispositions au sein du code de la commande publique et adopté des amendements d’ordre rédactionnel. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

I.   le droit en vigueur

L’article L. 2194-1 du CCP permet de recourir à un avenant dans le cadre d’un marché public, sans passer par une nouvelle procédure de mise en concurrence, sous réserve que cela ne change pas la nature globale du marché et dans un nombre de cas limitativement énumérés ci-dessous.

Art. L. 2194-1 du code de la commande publique

« Un marché peut être modifié sans nouvelle procédure de mise en concurrence dans les conditions prévues par voie réglementaire, lorsque :

« 1° Les modifications ont été prévues dans les documents contractuels initiaux ;

« 2° Des travaux, fournitures ou services supplémentaires sont devenus nécessaires ;

« 3° Les modifications sont rendues nécessaires par des circonstances imprévues ;

« 4° Un nouveau titulaire se substitue au titulaire initial du marché ;

« 5° Les modifications ne sont pas substantielles ;

« 6° Les modifications sont de faible montant.

« Qu’elles soient apportées par voie conventionnelle ou, lorsqu’il s’agit d’un contrat administratif, par l’acheteur unilatéralement, de telles modifications ne peuvent changer la nature globale du marché. »

Des précisions complémentaires sur ces conditions sont apportées par la partie réglementaire du CCP (articles R. 2194-1 et suivants). En particulier, l’article R. 2194-2 de ce même code précise comment s’apprécie la possibilité de conclure un avenant sans nouvelle procédure de mise en concurrence lorsque « des travaux, fournitures ou services supplémentaires sont devenus nécessaires » (2° de l’article L. 2194-1 CCP) :

– ces travaux, fournitures ou services ne devaient pas figurer dans le marché initial ;

– et le changement de titulaire doit être impossible pour des raisons économiques ou techniques. Celles-ci peuvent notamment être liées « à des exigences d’interchangeabilité ou d’interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché initial ».

L’article R. 2194-3 dudit code précise que pour les pouvoirs adjudicateurs, le montant de la modification ainsi engendrée ne peut être supérieur à 50 % du montant du marché initial.

En droit de l’Union européenne, l’article 89 de la directive 2014/25/UE et l’article 72 de la directive 2014/24/UE précitées précisent, de la même manière, qu’une telle modification peut avoir lieu lorsqu’un changement de contractant est impossible pour des raisons économiques ou techniques et présenterait un inconvénient majeur ou entraînerait une augmentation substantielle des coûts.

II.   Les dispositions adoptées par le sénat

A.   l’examen En commission

L’article 17 ter résulte de l’adoption de l’amendement COM-58 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Patrick Chaize (LR), en commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Il indique, pour les marchés publics relatifs à la réalisation d’un réacteur électronucléaire mentionnés au 1° de l’article 16 du projet de loi, comment doit s’apprécier la notion de travaux, fournitures ou services supplémentaires justifiant la conclusion d’un avenant sans remise en concurrence :

– sous réserve de l’absence de changement de la nature globale du marché, cette notion peut notamment s’apprécier en fonction de l’évolution de la conception du projet ;

– reprenant au niveau législatif les critères figurant à l’article R. 2194-2 du CCP, il précise aussi qu’un avenant sans remise en concurrence n’est alors permis que si le changement de titulaire est impossible pour des raisons économiques ou techniques, tenant notamment à des exigences d’interchangeabilité ou d’interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché initial.

Comme pour l’article 17 bis, le rapporteur Patrick Chaize relève que des dispositions similaires figuraient dans l’avant-projet de loi transmis par le Gouvernement au Conseil d’État. Il souhaite faciliter le recours à de tels avenants en réintroduisant une disposition à ce sujet dans le projet de loi, faisant observer que « la construction de réacteurs électronucléaires, compte tenu de sa durée longue et de sa complexité avérée, nécessite de reposer sur des contrats à même d’intégrer les évolutions techniques nécessaires ». La disposition permettrait ainsi de clarifier l’interprétation de la notion de travaux, services ou fournitures supplémentaires et de limiter le risque contentieux associé.

Tout comme pour les autres articles ayant trait à la commande publique, le Sénat a codifié cette disposition dans le code de la commande publique.

B.   l’examen En séance publique

Cet article n’a fait l’objet d’aucune modification en séance publique au Sénat.

III.   Les travaux de la commission

La commission des affaires économiques a adopté un amendement CE70 du rapporteur pour avis visant à supprimer la codification des dispositions de l’article 17 ter, le code de la commande publique n’ayant pas vocation à accueillir des dispositions sectorielles. Elle a également adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur pour avis (CE100 et CE99).

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

*

*     *

Chapitre II
Mesures destinées à renforcer la protection des intérêts fondamentaux de la Nation en matière nucléaire

Adopté par la commission avec modifications

 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, saisie au fond, a sollicité l’avis de la commission des affaires économiques sur cet article.

L’article 18 permet de déroger aux règles de publicité et de mise en concurrence pour la passation de certains marchés publics dans le domaine nucléaire, lorsque la protection des intérêts essentiels de l’État est en jeu.

Le Sénat a codifié la disposition, a ajusté son périmètre et a créé des obligations de reddition des comptes devant l’État et le Parlement concernant l’emploi de cette dérogation. La commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a conservé les ajustements de périmètre opérés par le Sénat mais a supprimé les dispositions de rapportage, ainsi que la codification. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

I.   Le DROIT en vigueur

A.   Certains marchés dérogent aux règles de droit commun de la commande publique

Le titre II du livre V de la deuxième partie du code de la commande publique (articles L. 2500-1 et suivants), intitulé « Autres marchés publics », prévoit des règles spécifiques à certains marchés publics. Parmi ces dernières, l’article L. 2512‑3 dispose que sont soumis à ces règles spécifiques :

– les marchés qui exigent le secret ou dont l’exécution doit s’accompagner de mesures particulières de sécurité ;

– les marchés pour lesquels la protection des intérêts essentiels de l’État l’exige.

Ces règles spécifiques s’appliquent à condition que les mesures de sécurité ou de protection concernées ne puissent être garanties par d’autres moyens. L’application de ces dispositions spécifiques permet notamment aux marchés publics concernés d’être conclus sans publicité ni mise en concurrence.

En droit de l’UE, ce sont les articles 24 de la directive 2014/25/UE et 15 de la directive 2014/24/UE qui prévoient de telles dispositions. Ainsi, la directive 2014/25/UE ne s’applique pas lorsque « la protection des intérêts essentiels de la sécurité d’un État membre ne peut être garantie par des mesures moins intrusives, par exemple en imposant des conditions en vue de protéger la confidentialité des informations que l’entité adjudicatrice met à disposition dans le cadre d’une procédure d’attribution de marché » mais encore lorsque l’application de celle-ci « obligerait un État membre à fournir des informations dont il estimerait la divulgation contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité ». Ces dispositions sont reprises par la directive 2014/24/UE.

B.   La jurisprudence récente confirme la faculté de recourir à de telles dérogations

Le Conseil constitutionnel a admis la possibilité de déroger aux obligations de publicité et de mise en concurrence en matière de commande publique lorsqu’un motif d’intérêt général le justifie ([45]).

En droit de l’Union européenne, plusieurs décisions ont confirmé la possibilité de déroger au droit de la commande publique pour certains marchés publics intervenant dans des domaines particulièrement sensibles :

– l’attribution sans mise en concurrence de la construction et de l’exploitation d’un terminal de gaz naturel liquéfié en Lituanie, jugée appropriée et proportionnée compte tenu des enjeux de sécurité énergétique s’y rattachant ([46]) ;

– la non-application des directives relatives aux marchés publics pour la construction de la centrale nucléaire de Dukovany, en République Tchèque, en raison des intérêts essentiels de l’État en jeu ([47]) ;

– la non-application des mêmes directives pour l’impression de documents particulièrement sensibles, en Pologne ([48]), sur le même fondement.

C.   Certaines activités dans le domaine nucléaire sont particulièrement sensibles

L’article L. 1333-2 code de la défense soumet à autorisation ou à déclaration, ainsi qu’à contrôle :

– l’importation et l’exportation de matières nucléaires, c’est-à-dire les matières nucléaires fusibles, fissibles ou fertiles ou toute matière, à l’exception des minerais, contenant des éléments de cette nature ;

– l’élaboration, la détention, l’utilisation et le transport de ces mêmes matières ;

– les activités nucléaires mettant en œuvre les sources de rayonnements ionisants, mais uniquement pour ce qui concerne la protection contre les actes de malveillance.

L’article R. 1333-8 du code de la défense précise les seuils applicables aux matières nucléaires soumises à autorisation.

Par ailleurs, l’article L. 591-1 du code de l’environnement précise que parmi les composantes de la sécurité nucléaire figurent non seulement la sûreté nucléaire ([49]) mais aussi la prévention et la lutte contre les actes de malveillance.

Les bâtiments d’installations nucléaires qui abritent des matières sensibles doivent donc être particulièrement protégés. Des enjeux de sécurité d’approvisionnement, de lutte contre la prolifération nucléaire ou de sûreté nucléaire y sont attachés.

II.   Le texte initial du projet de loi

À la lumière des récentes évolutions jurisprudentielles, l’article 18 du projet de loi clarifie, sécurise et précise l’application des dispositions du titre II du livre V de la deuxième partie du CCP aux marchés publics les plus sensibles du secteur nucléaire. Il prévoit donc que sont dispensés de l’application des règles du code de la commande publique, notamment des obligations de publicité et de mise en concurrence, les marchés relatifs aux installations ayant vocation à abriter des matières nucléaires et dont la détention est soumise à autorisation, dans deux cas :

– lorsque ces marchés concernent la conception, la construction, le fonctionnement ou le démantèlement des bâtiments, y compris leurs fondations et structures, destinés à recevoir de telles matières ;

– lorsqu’ils concernent la conception, la qualification, la fabrication, la modification, la maintenance ou le retrait de structures, équipements, systèmes, matériels, composants ou logiciels contribuant à la protection contre les actes de malveillance ou à la sûreté nucléaire.

Ces dispositions concernent donc l’ensemble du cycle de vie des installations, équipements ou autres composants visés.

Présentation générale d’un réacteur nucléaire

Source : IRSN

Il s’agit ainsi de préciser ce que recouvre la notion d’intérêts essentiels de l’État en ce qui concerne les ouvrages nucléaires afin de mieux contribuer à la lutte contre la prolifération nucléaire et à la prévention des risques d’ingérence étrangère. L’étude d’impact du projet de loi relève ainsi que « ce risque d’ingérence n’est pas limité aux États, et peut également être le fait d’entreprises qui y sont liées et qui pourraient, en particulier en cas de conflit, chercher à perturber le fonctionnement d’installations existantes, à ralentir la construction d’installations en cours de chantier ou encore à exploiter des informations qu’elles tiendraient de leurs interventions passées ».

Le Conseil d’État, dans son avis sur le projet de loi, n’a pas identifié d’obstacle conventionnel à la mesure, dès lors que l’objet des marchés visés par le projet de loi est précisément défini et qu’ils « peuvent être considérés comme hors du champ de la directive au titre de la protection des intérêts essentiels de l’État, sans que des mesures moins intrusives ne puissent, en l’espèce, garantir la protection de ces intérêts ».

On peut enfin relever que le Conseil constitutionnel a souligné, à l’occasion de sa décision sur la loi « Nucléaire » de juin 2023, que les éléments essentiels du potentiel économique de la Nation font partie des exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation ([50]).

III.   Les dispositions adoptées par le Sénat

A.   L’Examen en commission

La commission de l’aménagement et du développement durable du Sénat a adopté l’amendement COM‑59 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Patrick Chaize (LR).

Cet amendement codifie les dispositions de l’article 18 dans le CCP. Il précise aussi la notion de lutte contre les actes de malveillance par un renvoi à l’article L. 1333-3 du code de la défense.

Par analogie avec une rédaction employée à l’article 11 de la loi « Nucléaire » concernant les travaux d’un réacteur ne pouvant débuter qu’après la délivrance de l’autorisation de création ([51]), l’amendement précise au 1° de l’article 18 que sont inclus dans le champ de la dérogation, en complément des bâtiments destinés à recevoir des matériels nucléaires, ceux destinés à héberger des matériels de sauvegarde, fondations et structures incluses.

Au 2° de l’article 18, le même amendement COM-59 précise que les diverses installations et équipements concernés sont ceux qui contribuent directement ou indirectement à la protection contre les actes de malveillance ou à la sûreté nucléaire. Cette précision est ajoutée dans un souci d’exhaustivité, de sûreté et de sécurité, selon l’exposé sommaire de l’amendement.

Enfin, cet amendement ajoute des dispositions visant à améliorer le contrôle de l’emploi du dispositif par l’État et par le Parlement (nouvel article L. 2516-2 du CCP), en prévoyant :

– que les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices doivent informer l’État lorsqu’ils recourent aux dérogations ouvertes par l’article 18 du projet de loi ;

– qu’un rapport annuel est transmis par le Gouvernement au Parlement sur l’utilisation de celles-ci, sous réserve des secrets protégés par la loi.

B.   L'examen En séance publique

Aucun amendement n’a été adopté en séance publique au Sénat sur l’article 18.

IV.   Les travaux de la commission

La commission des affaires économiques a adopté un amendement de rédaction globale CE69 du rapporteur pour avis. Cet amendement conserve l’essentiel des modifications apportées par le Sénat en apportant quelques clarifications et améliorations rédactionnelles. Comme pour les précédents articles relatifs à la commande publique, il supprime la codification des dispositions de l’article 18 au sein du code de la commande publique.

La seule disposition introduite par le Sénat et supprimée par la commission est celle obligeant les acheteurs publics qui mettent en œuvre la dérogation au code de la commande publique prévue par l’article 18 d'informer l'État du recours aux dispositions prévues à ce même article, ainsi que l’obligation pour le Gouvernement de remettre annuellement un rapport au Parlement sur un tel recours. De telles dispositions vont en effet à l’encontre des mesures d’accélération et de simplification du titre II du présent projet de loi.

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a adopté cet article ainsi modifié.

 

 


   avis fait au nom de la commission des
affaires économiques

 

Conscient des enjeux colossaux de la transition écologique et énergétique, le Gouvernement s’est engagé dans une vigoureuse politique de relance du nucléaire, première source d’électricité décarbonée de notre pays. Ainsi, les dix prochaines années verront la prolongation des centrales REP (réacteur à eau pressurisée) existantes bien au-delà des 40 ans initialement envisagés et la construction de plusieurs EPR de deuxième génération, ainsi que le développement de petits réacteurs modulaires, dits SMR.

La réussite d’un tel programme nécessite des mesures d’accompagnement à la hauteur de ces chantiers.

Le titre Ier du présent projet de loi propose ainsi de réorganiser le système national de sûreté nucléaire et de radioprotection pour le renforcer face aux défis qui l’attendent.

Le titre II permet d’adapter certaines règles de la commande publique pour répondre au défi industriel que représente la relance du nucléaire, annoncée par le Président de la République lors du discours de Belfort, le 10 février 2022.

La commission des affaires économiques a reçu délégation, pour leur examen au fonds, des articles 2 ter, 12 et 16 à 18, qui font l’objet de commentaires intégrés au rapport de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Mais eu égard à l’importance de ces sujets, la commission des affaires économiques s’est également saisie pour avis de l’ensemble du texte. Tel est l’objet de cet avant-propos.

  1.   La réunion de l’ASN et de l’IRSN pour une Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection renforcée sur tous les plans

En France aujourd’hui, sûreté nucléaire et radioprotection ([52]) sont assurées par deux organismes distincts, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui assure les contrôles en matière de sûreté et prend les décisions individuelles et réglementaires, et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui assure l’évaluation des risques en ces domaines par des expertises techniques, notamment à la demande de l’ASN, mais aussi par les recherches qu’il finance ou mène en propre.

Le titre Ier du présent projet de loi propose de créer un seul acteur, que l’on désignera comme « Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection » (ASNR) dans le reste du rapport, en fusionnant ces deux organismes.

À la veille d'une relance historique de notre industrie électronucléaire et d'une mobilisation sans précédent de notre autorité de sûreté, il est en effet indispensable de réorganiser le système français de sûreté nucléaire et de radioprotection pour le renforcer sur tous les plans.

L’urgence de la transition ne permet pas d’attendre. Il lui faut être rapidement en capacité de répondre à la montée en puissance des dossiers nucléaires et à la diversification des technologies à expertiser – d’autant que les équipes auront également à statuer sur la fin du chantier de l’EPR de Flamanville et le projet Cigéo (stockage de déchets radioactifs en couche géologique profonde), sans parler de l’étude des nouveaux risques liés au changement climatique.

Cette réunion des deux entités permettra de dégager des ressources humaines avec le regroupement de certaines activités transverses et une coordination simplifiée des échanges entre les équipes. En outre, la nouvelle autorité bénéficiera d’une ouverture plus large à d’autres types de contrats ou de collaborations qui lui permettront de diversifier ses sources de connaissances. Et des moyens financiers supplémentaires ont été annoncés par le Gouvernement.

D’autres avantages fonctionnels sont également attendus :

– une plus grande fluidité dans les procédures, alors que des divergences de priorités généreraient aujourd’hui des retards dans les échanges entre l’ASN et l’IRSN ;

– un peu moins de procédures administratives pour les contrôlés, qui n’auront qu’un seul interlocuteur ;

– une parole unique qui aura plus d’influence devant les instances internationales pour peser sur la définition des normes nucléaires mondiales ;

– une organisation de la gestion de crise unifiée, donc plus lisible et opérationnelle ;

– enfin, la mutualisation de savoirfaire et de compétences techniques et scientifiques rares aujourd’hui. Il est notamment presque impossible d’avoir à l’ASN comme à l’IRSN un spécialiste de chaque technologie étudiée pour les petits réacteurs innovants (sels fondus, gaz, etc.) dans un contexte de tension sur le marché du travail.

La réforme proposée se veut ambitieuse aussi sur les plans de la déontologie et de la transparence. En particulier, l’indépendance du système de sûreté nucléaire et de radioprotection sera renforcée par l’intégration d’un établissement public sous tutelle dans une autorité administrative indépendante, dont les statuts garantissent la prévention des conflits d’intérêts et la protection contre les pressions diverses. Sont également confortés des principes généraux importants, comme la séparation de l’expertise et de la décision ou certaines obligations de publicité, qui sont mis en pratique mais sans être inscrits dans la loi.

A.   La fusion des deux entités

1.   Le choix de conserver le statut d’autorité administrative indépendante (article 1er)

 L’indépendance de la nouvelle entité est un incontournable de la réforme. L’ASN est une autorité administrative indépendante, l’IRSN un établissement public à caractère industriel et commercial soumis à la tutelle de cinq ministères. Il importe que le futur régulateur et gendarme du nucléaire et des installations émettant des rayonnements ionisants en France ne soit soumis aux pressions ni des exploitants de ces installations ou des appareils qu’elle contrôlera, ni de l’État, par ailleurs actionnaire unique du principal exploitant de centrales nucléaires civiles. Il s’agit en effet de garantir une action impartiale, tout en permettant la participation à ses travaux de personnes et professionnels aux profils divers.

Le droit français offre toutefois deux statuts possibles : celui d’autorité administrative indépendante (AAI) et celui d’autorité publique indépendante (API), statut attribué, par exemple, à l’Autorité des marchés financiers créée en 2003.

Depuis la loi organique du 20 janvier 2017 ([53]), la création d’une AAI ou d’une API passe nécessairement par l’adoption d’une loi, qui fixe « les règles relatives à la composition et aux attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à l’organisation et au fonctionnement » de ces autorités. La loi organique n° 2010‑837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution prévoit par ailleurs un contrôle parlementaire sur la désignation de leurs présidents. Enfin, la loi ordinaire du 20 janvier 2017 pose un certain nombre de règles déontologiques, d’organisation et de fonctionnement applicables aux deux statuts. La différence fondamentale est que l’AAI est une institution agissant au nom de l’État et que l’API est dotée de la personnalité morale.

Les raisons du choix du statut d’AAI sont de trois ordres :

– le réalisme et le souci de conserver un contrôle engagé : le maintien en activité des installations existantes comme la construction de nouvelles mobilisent ou engagent des montants financiers considérables, et on ne peut écarter le risque, théorique, qu’elles causent des dommages très importants. Même si la responsabilité de l’exploitant d’installations à risque reste la règle de base, la coresponsabilité des décisions qui les auront autorisées ou auront défini des prescriptions éventuellement inadaptées pourrait être soulevée. Or, la personnalité morale d’une API engagerait la responsabilité personnelle de ses décideurs. Le projet de réforme s’attache donc à préserver les membres du collège de la future autorité d’un poids disproportionné, intimidant voire paralysant pour des individus.

Pour autant, les avis et les décisions que prend une AAI peuvent toujours être contestés voire fonder des demandes indemnitaires ; mais les recours s’adressent directement à l’État ;

– le maintien d’un cadre attractif pour les fonctionnaires. L’enjeu n’est pas mineur car seuls des agents publics peuvent exercer les pouvoirs de police judiciaire des contrôleurs des installations nucléaires (voir la partie II de cet avant‑propos). Or le statut d’API imposerait aux fonctionnaires intéressés de passer sous un statut contractuel, perdant pendant leur activité au sein de l’autorité tous leurs droits statutaires et compliquant leur retour dans un poste administratif ;

– enfin, la cohérence avec l’urgence de la réforme : l’article 15 du projet de loi (voir le point 4) prévoit sa mise en œuvre dès le 1er janvier 2025. Opter pour un statut d’API ajouterait une complication importante : au lieu de modifier les règles du jeu pour les seuls personnels de l’IRSN, elles changeraient également pour les personnels de l’ASN.

Le choix du statut d’AAI permet ainsi de construire le régime de la future autorité en repartant des dispositions relatives à l’ASN (les sections I à VI du chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement), que les articles 1er et 3 du projet de loi viennent compléter afin d’intégrer les missions et attributions de l’actuel IRSN.

 L’article 1er introduit par ailleurs la nouvelle dénomination de la future autorité administrative indépendante : « Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection ». Sur proposition de sénateurs de la commission des affaires économiques (91 rectifié), contre le Gouvernement, mais avec un avis de sagesse de la commission saisie au fond, le Sénat a ajouté, en séance, le qualificatif d’« indépendante » (aux 3° et 3° bis, alinéas 4 et 5) – sans toutefois opérer les coordinations nécessaires sur les intitulés mentionnés dans d’autres parties du projet de loi (par même dans les coordinations listées par l’article 14).

Le Gouvernement a pourtant souligné qu’aucune AAI ne porte cette mention.

La commission des affaires économiques a donc adopté l’amendement CE80 de son rapporteur supprimant ce qualificatif.

2.   L’intégration des missions, attributions et activités de l’IRSN (articles 1er, 3 et 13)

● Avant de recomposer le système de sûreté nucléaire et de radioprotection français, l’article 1er du projet de loi étend le périmètre de responsabilité de la sûreté nucléaire – ou plutôt explicite son étendue dans sa définition par l’article L. 591-1 du code de l’environnement – à la protection de la santé publique et de l’environnement.

Le projet de loi initial se référait à la santé humaine ; la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (COM-93) et la commission des affaires économiques (COM-63) du Sénat lui ont préféré la notion de santé publique. La santé publique traite de la santé humaine mais dans une approche tant individuelle que globale. Un de ses enjeux est de prévenir les risques sanitaires et protéger les populations en général.

● L’article 1er complète ensuite l’article L. 592-1 (section I du chapitre II), qui définit la mission générale de l’autorité. L’article 3 du projet de loi vient ultérieurement préciser les attributions de la future autorité en complétant les sections 3 « Fonctionnement » et 4 « Attributions ».

Un tableau (à la fin du 3 du présent A) récapitule l’ensemble des missions et attributions qui seront dévolues à l’ASNR, en montrant leurs évolutions.

Les missions de contrôle de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et des activités nucléaires visées par le code de la santé publique, assumées aujourd’hui par l’ASN, sont toutes maintenues.

Les autres dispositions des articles 1er et 3 intègrent les attributions actuelles de l’IRSN, à l’exception de deux ensembles d’activités (voir les II et III de l’article 7) :

– d’un côté, la production, la fourniture et l’exploitation de dosimètres à lecture différée, dits passifs, dans la mesure où il s’agit d’activités commerciales menées dans un secteur très concurrentiel. Leur exploitant ne doit pas pouvoir tirer avantage de sa position ;

– et de l’autre, l’appui technique aux services de l’État (et plus précisément de la Défense nationale) en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense, en matière de sécurité des installations et des transports de matières nucléaires ou de sources de rayonnements ionisants relevant du code de la défense, ainsi qu’en matière de non‑prolifération des matières nucléaires et d’interdiction des armes chimiques. De nature régalienne, ces activités ne peuvent en effet être reprises par une AAI. Elles seront donc rattachées à l’autorité de sûreté nucléaire défense (ASND), autorité administrative indépendante personnifiée par le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense (DSND), placé auprès du ministre des armées.

Les contrats des personnels concernés (environ 40 salariés pour le premier ensemble et environ 130 pour l’équipe de la direction de l’expertise nucléaire de défense – DEND) seront juridiquement repris par le Commissariat à l’énergie atomique (voir les mêmes II et III de l’article 7).

La future autorité conservera néanmoins la surveillance radiologique de l’environnement et des personnes exposées aux rayonnements ionisants et le recueil et l’analyse de données dosimétriques concernant la population générale, les travailleurs et les patients (article L. 592-1, article 1er du projet de loi).

L’article 3 développe cette mission de surveillance radiologique des travailleurs exposés aux rayonnements ionisants qu’assure aujourd’hui l’IRSN (article L. 592-24). Et pour ce faire, les articles suivants, L. 592-24-1 à L. 592-24‑3, reprennent l’essentiel des obligations et pouvoirs définis par les actuels articles L. 592-48 (obligation de confidentialité s’agissant des données dosimétriques individuelles nominatives) et L. 592-46-1 (droit de ses personnels habilités d’accéder aux informations nécessaires sans que puissent leur être opposé le secret médical ou le secret des affaires).

La mission générale de la future autorité (article 1er) englobera ainsi, à l’instar de l’IRSN aujourd’hui, l’expertise et la recherche, ainsi que la formation, dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Quant aux attributions précises, le projet de loi les énumère à l’article 3, à savoir, outre les activités relatives à la radioprotection (hors fourniture de dosimètres passifs) et à la recherche (voir le point suivant) :

– des « activités nucléaires », autres que l’exploitation des installations nucléaires de base (INB) évidemment exclue. L’IRSN utilise en effet, pour certains travaux de recherche ou d’analyse, des sources émettrices de rayonnements ionisants, comme des accélérateurs de particules (article L. 592-14-1) ;

– les activités et prestations de l’IRSN pouvant faire l’objet de facturation, qui seront reprises par la future autorité (articles L. 592-14-1 et L. 592-14-2, aux alinéas 3 à 9) : formations, délivrance d’attestations, d’agréments, d’habilitations ou de certifications divers, mise en œuvre de procédures d’évaluation de conformité ou réalisation d’opérations de conformité des équipements de travail et protections individuelles, etc.

Le II de l’article L. 592-14-2 précise que lesdites activités pourront encore donner lieu à rémunération.

Les ministères ont confirmé au rapporteur que ces dispositions reprennent la quasi-totalité de ces activités, qui n’étaient pas détaillées dans l’actuelle section VII du chapitre II consacrée à l’institut, mais dans son décret d’application.

Ne sont pas encore intégrées les prestations, à titre onéreux, d’analyse, de mesurage et de dosage, ainsi que les activités d’expertise et de recherche que l’IRSN peut réaliser pour le compte d’organismes publics ou privés, français ou étrangers. Par exemple, l’institut a été récemment certifié pour l’évaluation de la sûreté des futures installations nucléaires en Pologne. Il dispose par ailleurs de matériels uniques en France permettant de mesurer l’efficacité des systèmes de filtration et d’épuration des circuits de ventilation des installations industrielles.

La reprise de ces activités exige que soient bien identifiées leurs limites. L’ASN et l’IRSN y travaillent. Toutefois, convaincue de l’intérêt de poursuivre ce type d’activités, la commission des affaires économiques a adopté l’amendement CE54 de Mme Battistel (SOC), qui acte leur inscription dans la liste des attributions reprises de l’IRSN, avec un sous-amendement CE105 de son rapporteur pour en rappeler les limites (la prévention des conflits d’intérêts et l’absence d’atteinte à la défense et la sécurité nationale).

● Enfin, bouclant la réunion des missions et attributions de l’ASN et de l’IRSN, l’article 13 du projet de loi substitue à la section VII traitant de l’IRSN une section VII « Dispositions d’application » avec un article unique (L. 592‑45) prévoyant qu’un décret en Conseil d’État viendra préciser les modalités d’application de l’ensemble du chapitre II.

Ce décret (et non le futur règlement intérieur) devra notamment préciser les conditions dans lesquelles les salariés de l’ASNR pourront exercer les activités et prestations susceptibles d’être payantes, ainsi que les procédures d’homologation des décisions à caractère réglementaire technique (cf. l’article L. 592‑20).

Amendé directement par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, ou sur proposition de la commission des affaires économiques, le même article 13 (alinéas 10, 16 et 27) ouvre à l’ensemble des personnels de la future autorité la possibilité de mener des enquêtes publiques, de participer au contrôle des installations nucléaires de base (INB) et autres installations relevant de son périmètre de compétences (se reporter au tableau) ou devenir inspecteurs de la radioprotection (voir la partie II de cet avant-propos).

● Par rapport au projet de loi initial, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a ajouté à l’article L. 592-1 relatif aux missions générales de l’ASNR (à l’article 1er) :

– le fait pour la future autorité de pouvoir travailler avec des organismes extérieurs, publics ou privés, français ou nationaux (COM-8) ;

– avec la commission des affaires économiques, la précision que l’ASNR participera à l’information du public et à la transparence « dans ses domaines de compétences » (COM-9 et COM-72).

Enfin, la commission des affaires économiques du Sénat a inscrit dans la mission générale de l’ASNR le fait que la future autorité contribuera aux travaux et à l’information de l’OPECST et des commissions parlementaires compétentes (COM-66).

En revanche, le Sénat a peu modifié l’article 3, essentiellement pour opérer des coordinations – on parle de personnels et non plus d’agents afin de tenir compte de la future diversité des statuts (COM-16) – ou apporter des précisions juridiques. Il a, en particulier, sur proposition de sa commission des affaires économiques (COM-81), corrigé la notion de « secret en matière industrielle et commerciale » à l’article L. 592-24-2 pour celle plus adaptée de « secret des affaires », déjà utilisée par le code de l’environnement ou le code des relations entre le public et l’administration.

3.   Une double responsabilité : maintenir un haut niveau de compétences et contribuer à l’amélioration constante des connaissances scientifiques et techniques en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection (articles 1er et 3)

Le nouvel article L. 592-1 pose un principe fort, et crucial pour l’avenir de la recherche en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection : « l’ASNR contribue, par ses travaux d’analyse, de mesurage et de dosage ainsi que par ses activités d’expertise, de recherche et de formation, au maintien d’un haut niveau de compétences en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection et concourt à l’amélioration constante des connaissances, scientifiques et techniques, dans ces domaines » (alinéa 8 de l’article 1er).

Non seulement l’ASNR conservera des activités de recherche en son sein, mais elle devra contribuer activement à l’amélioration constante des connaissances, tout en entretenant un haut niveau de compétences en interne et en externe en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.

L’affirmation de ces deux objectifs parmi les premières responsabilités de la future autorité est la reconnaissance des synergies entre expertise et recherche. Les expertises alimentent la recherche ; la recherche consolide et approfondit les expertises.

Elle répond aussi, de manière claire, à la crainte, exprimée par certains acteurs, de voir s’affaiblir la recherche dans ses domaines de compétences. Plusieurs raisons sont invoquées :

– ces recherches auraient un moindre intérêt pour une autorité qui exerce avant tout une mission de contrôle ; certains observeraient même une évolution des inspections de l’ASN vers un contrôle plus de conformité aux normes (à l’instar du positionnement de l’autorité de sûreté américaine, la NRC) que de sûreté proprement dit. Autant les recherches prospectives sur les risques potentiels ou à venir présentent une utilité évidente pour le contrôle de sûreté ; autant elles pourraient sembler moins prioritaires dans un contrôle de conformité ;

– des auditionnés s’inquiètent par ailleurs de la perte des compétences, entre les départs d’employés de l’IRSN, qui préfèrent quitter l’institut avant la fusion et le transfert des équipes affectées à la dosimétrie passive et à la sûreté nucléaire et la radioprotection des activités intéressant la défense nationale. Même si l’ASNR ne sera plus chargée de ces missions, ces acteurs déplorent la rupture du dialogue technique entre les équipes « civiles » et « militaires ».

Sur ce dernier point, les auditions par le rapporteur des responsables de l’ASN et du CEA et la contribution de l’autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND) ont montré que les transferts ne devraient pas bouleverser l’équilibre du système de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Concernant les dosimètres passifs, seules sont transférées les activités d’assemblage et d’exploitation. L’enjeu sera avant tout de s’assurer, par convention par exemple, de l’engagement à fournir un stock d’appareils en cas de crise.

S’agissant des activités intéressant la défense, le transport des matières radioactives ou la non-prolifération, le fonctionnement des équipes de la direction de l’expertise nucléaire de défense (DEND) ([54]) restera proche de l’existant : elles conserveront leur autonomie et, restant dans les mêmes locaux, pourront continuer à échanger avec leurs interlocuteurs habituels au sein de la nouvelle autorité. En tout état de cause, l’ASND s’assurera que les ressources nécessaires au bon accomplissement de leurs missions et de celles de l’ASNR resteront accessibles.

Sur l’attractivité des emplois dans la future autorité, des mesures (en termes de rémunération, d’accès à des concours réservés et d’élargissement des métiers accessibles aux personnels issus de l’IRSN) sont prévues par les articles 9, 11 et 13 du projet de loi (voir la partie II de cet avant-propos) pour fidéliser et attirer les compétences.

En outre, la nouvelle dimension de recherche de l’ASNR lui vaut d’être assimilée, par le nouvel article L. 592-15 (article 3), à un « établissement public dont les statuts prévoient une mission de recherche ». Cela lui facilitera la conclusion de partenariats de recherche, la participation à des programmes de recherche, ainsi que la contribution et la participation à des brevets.

Cela l’autorise par ailleurs à recourir aux différents types de contrats de recrutement de chercheurs et doctorants ([55]).

Au demeurant, les nouveaux articles L. 592-1 et L. 592-28-2 (articles 1er et 3) permettront de faire réaliser ces recherches par des organismes externes, publics ou privés, français ou étrangers. Sans parler des groupes permanents d’experts (GPE), déjà mis en place par l’ASN et consultés en amont de ses décisions les plus importantes, que des amendements de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (COM-5) et de la commission des affaires économiques du Sénat (COM-85) pérennisent en leur donnant une base légale (article 2). Ces spécialistes extérieurs sont nommés à raison de leurs compétences, selon des modalités définies par le règlement intérieur de l’ASN. Ils sont issus de la société civile, des laboratoires de recherche universitaires, des bureaux de contrôle, des organismes d’expertise, des exploitants concernés par les sujets traités ainsi que des autorités de sûreté étrangères. Ce croisement d’expertises permet d’accéder aux meilleures pratiques et aux connaissances les plus récentes.

En tout état de cause, la nouvelle sous-section 4 « Attributions de recherche » et son article unique L. 592-28-2, introduits par l’article 3, confirment la place que la recherche prendra dans l’organisation de l’ASNR. Sans épuiser le champ des missions données à l’ASNR en matière de recherche et de maintien des compétences par l’article L. 592-1, ces dispositions précisent certaines des responsabilités qu’elles induisent :

– suivre les travaux de recherche et développement menés aux plans national et international ;

– formuler toutes propositions sur les besoins de recherche pour la sûreté nucléaire et la radioprotection à l’intention des ministères et organismes publics de recherche concernés qui doivent les prendre en compte ;

– et définir les programmes de recherche menés en son sein ou confiés à d’autres organismes de recherche, français ou étrangers « en vue de maintenir et de développer les connaissances et compétences nécessaires à l’accomplissement de ses missions ».

On relève enfin que le 1° du III de l’article 13 du projet de loi prévoit que l’ASNR pourra demander au Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) d’évaluer ses activités de recherche (article L. 114-3 du code de la recherche).

 


Missions, attributions, activités et responsabilités des organismes (Modifications apportées par les articles 1, 2 ter, 3, 4 et 4 quater)

ASNR

ASN

IRSN

Section 1 – L. 592-1

Ajoute une mission générale d’expertise, de recherche et de formation dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

Et précise que :

– en relation avec des organismes publics ou privés, français ou étrangers, l’ASNR contribue, par ses travaux d’analyse, de mesurage et de dosage ainsi que par ses activités d’expertise, de recherche et de formation, au maintien d’un haut niveau de compétences en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection et concourt à l’amélioration constante des connaissances, scientifiques et techniques, dans ces domaines ;

– elle assure une veille permanente en matière de radioprotection sur le territoire national. [reprise de l’actuel L. 592-24] ;

– elle contribue à la surveillance radiologique de l’environnement et des personnes exposées aux rayonnements ionisants, au recueil et à l’analyse de données dosimétriques concernant la population générale, les travailleurs et les patients, y compris en cas d’accident nucléaire.

Section 1 Mission générale

(L.592-1 complété) L’ASN participe au contrôle de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et des activités nucléaires mentionnées à l’article L.1333-1 du code de la santé publique

[à savoir les activités comportant un risque d’exposition des personnes aux rayonnements ionisants ou les actions nécessaires pour prévenir ou réduire les risques liés à une exposition à une source naturelle de rayonnements ionisants].

 

Section 4 Attributions :

(L.592-19 inchangé) Champs d’action :

– les installations nucléaires de base (INB) ;

– le transport des substances radioactives ;

– les équipements sous pression nucléaire ;

– et les activités nucléaires mentionnées au code de la santé publique.

 

Section 3 Fonctionnement

L. 592-14-1. (nouveau) Dans le cadre de ses attributions, l’ASNR est autorisée à exercer des activités nucléaires, à l’exclusion de celles soumises au régime des INB.

Art. L. 592-14-2. (nouveau) Elle peut :

1° Dispenser des formations, délivrer des attestations, des habilitations, des qualifications ou des certifications professionnelles et exercer les missions dévolues aux organismes certificateurs mentionnés à l’article L. 6113-2 du code du travail ;

2° Délivrer des agréments, attestations, habilitations ou certificats justifiant la capacité de leurs titulaires à exercer des activités dans un domaine d’intervention spécialisé relevant de ses domaines de compétence ;

3° Exercer, dans ses domaines de compétence, des missions confiées à des organismes certifiés ou accrédités ou à des organismes notifiés chargés de mettre en œuvre des procédures d’évaluation de la conformité ou de réaliser les opérations de contrôle de conformité des équipements de travail et des équipements de protection individuelle ;

4° Assurer la gestion, dans le cadre de l’exercice de ses missions, de traitements de données d’intérêt public pouvant comprendre des données à caractère personnel et de santé. (…)

 

Section 7 IRSN

(L.592-45 remplacé) A l’exclusion de toute responsabilité d’exploitant nucléaire, l’IRSN exerce des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire.

Section 3

Art. L. 592-14-3. (nouveau) L’ASNR peut bénéficier, pour la réalisation de ses expertises, de l’appui technique des services de l’État et de ses établissements publics compétents.

 

(L.592-46 remplacé) Appui technique à l’ASN pour la réalisation de ses missions, sous la forme d’activités d’expertise soutenues par des activités de recherche (…)

Section 1 – L.592-1 (suite)

– L’ASNR participe, dans ses domaines de compétence, à l’information du public et à la mise en œuvre de la transparence.

 

Section 3 - L.592-14

L’ASNR publie les résultats des expertises réalisées dans le cadre de ses instructions, ainsi que les avis des groupes permanents d’experts […] Le règlement intérieur définit les modalités de publication de ces résultats et des résultats de ses activités d’instruction.

Les avis rendus dans le cadre prévu à l’article L. 592-29 [à savoir les avis ou études réalisés à la demande du Gouvernement, de l’OPECST, etc.] sont rendus publics dans des conditions définies par l’autorité de saisine.

Elle organise la publicité, sous réserve des secrets protégés par la loi, des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont elle prend l’initiative. [voir également l’article L. 592-29-1]

 

(L. 592-27 sans changement)

Section 1

(L. 592-1 complété) Participe à l’information du public et à la transparence dans ses domaines de compétences.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(L.592-27 inchangé) L’ASN rend publics les avis et décisions délibérés par son collège.

 

(L.592-47 remplacé) Contribue à l’information du public.

 

 

 

Lorsqu’ils ne relèvent pas de la défense nationale, publie les avis rendus sur saisine d’une autorité publique ou de l’ASN…

 

 

 

 

 

Organise la publicité des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont il a l’initiative.

 

(L. 592-20 et L. 592-25 sans changement)

Section 4

(L.592-20 inchangé) Peut prendre des décisions réglementaires pour compléter les modalités d’application des décrets et arrêtés pris dans ses domaines de compétences…

(L.592-25 inchangé) Est aussi consultée sur ces projets de décrets et arrêtés

 

(L. 592-21 et L. 592-23 sans changement)

(L.592-21 inchangé) Prend les décisions individuelles qui lui sont attribuées par les lois et règlements (reçoit les déclarations, procède aux enregistrements, accorde les autorisations, édicte les prescriptions – dont des analyses, expertises, etc. par un prestataire extérieur (L.592-23 inchangé) – et délivre les agréments)

 

(L. 592-22 sans changement)

(L592-22 inchangé) Assure le contrôle du respect des règles générales et des prescriptions particulières dans ses domaines de compétences.

Sous réserve des compétences de la commission des sanctions, dispose des pouvoirs de contrôle et de sanction prévus par les codes de l’environnement et de la santé publique

 

Section 4

Art. L. 592-24. L’ASNR assure, en lien avec le ministère du travail, la gestion et l’exploitation des données des mesures de l’exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants. (…)

Art. L. 592-24-3. (nouveau) L’ASNR gère l’inventaire des sources de rayonnements ionisants et y assure l’accès aux agents de contrôle de l’inspection du travail ainsi qu’aux inspecteurs de la radioprotection.

Art. L. 592-24-4. (nouveau) L’ASNR apporte son appui technique au Gouvernement et aux autorités publiques dans ses domaines de compétence.

Elle apporte son appui technique aux services de santé de prévention et de santé au travail et aux employeurs concernés

 

(L.592-24 remonté au L.592-1) Veille permanente en matière de radioprotection sur le territoire national

 

(L.592-46-1 remplacé) Peut être chargé par l’ASN d’une mission d’expertise d’une situation d’exposition potentielle ou avérée aux rayonnements ionisants (...)

(L.592-28) Ajoute :

Elle participe, notamment par ses activités de recherche, aux échanges internationaux dans ses domaines de compétence.

(L.592-28 complété) Adresse au Gouvernement ses propositions pour la définition de la position française dans les négociations internationales et participe, à la demande de celui-ci, à la représentation française dans les organisations internationales et communautaires compétentes

 

(L. 592-28-1 sans changement)

(L.592-28-1 inchangé) Coopère avec les autorités compétentes des autres États. Peut leur fournir des prestations de conseil ou mener des missions d’appui

 

Section 1 – L.592-1 (suite)

– L’ASNR contribue aux travaux et à l’information du Parlement, dont l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) et les différentes commissions parlementaires compétentes, en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.

(L.592-29 sans changement)

Section 4 – L.592-29-1 (nouveau) L’ASNR présente à l’OPECST, en lien avec les différentes commissions permanentes compétentes, ainsi qu’au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN), qui peut émettre un avis, les sujets sur lesquels une association du public est organisée ainsi que les modalités de sa mise en œuvre et leur en rend compte.

Elle communique la nature et les principaux résultats des programmes de recherche qu’elle mène dans ses domaines de compétence aux autorités concernées ainsi qu’à l’OPECST, aux différentes commissions permanentes compétentes, au HCTISN, au Haut Conseil de la santé publique et au Conseil d’orientation des conditions de travail, selon leurs domaines de compétence respectifs. (…)

(L.592-31 précisé) Son rapport annuel d’activité est remis à l’OPECST avant sa publication

 

 

 

(L.592-29 inchangé) Formule des avis ou réalise des études à la demande du Gouvernement, des commissions parlementaires compétentes ou de l’OPECST (…)

 

 

 

 

(L.592-30 corrigé) Rend compte de ses activités à la demande de l’OPECST.

 

(L592-31 complété) Et transmet son rapport annuel d’activité à l’OPECST. À cette occasion l’autorité se prononce sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection

 

Abrogé par le 2° du II (l’alinéa 6) de l’article 13 ; remplacé par : Section 4  Soussection 4 Attributions en matière de recherche

Art. L. 592-28-2. (nouveau) L’ASNR suit les travaux de recherche et de développement menés, aux plans national et international, en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Elle formule toutes propositions ou recommandations sur les besoins de recherche pour la sûreté nucléaire et la radioprotection. Ces propositions et ces recommandations sont communiquées aux ministres et aux organismes publics exerçant les missions de recherche concernées, afin qu’elles soient prises en compte dans les orientations et la définition des programmes de recherche et de développement d’intérêt pour la sûreté nucléaire ou la radioprotection.

Elle définit des programmes de recherche menés en son sein ou confiés à d’autres organismes de recherche, français ou étrangers, en vue de maintenir et de développer les connaissances et les compétences nécessaires à l’accomplissement de ses missions dans ses domaines de compétence.

(L592-31-1 abrogé-remplacé)

 

Suit les travaux de recherche et développement menés au plan national et international pour la sûreté nucléaire et la radioprotection.

Formule des propositions ou recommandations sur les besoins de recherche en la matière.

 

((L. 592-32 et L. 592-33 sans changement))

(L.592-32 inchangé) Associée à la gestion des situations d’urgence radiologique résultant d’évènements pouvant porter atteinte à la santé des personnes et à l’environnement par exposition aux rayonnements ionisants…

(L.592-33 inchangé) Partage les alertes et l’information des États tiers (européens ou extérieurs)

 

(maintenue)

Section 5 Enquêtes techniques

 

(maintenue)

Section 6 Commission des sanctions

 

 


4.   La mise en œuvre pratique de la fusion (hors ressources humaines)

a.   Le transfert des biens, droits et obligations de l’IRSN (article 5)

Le I de l’article 5 organise le transfert, à titre gratuit, des biens, droits et obligations de l’IRSN à l’État et au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Il ne concerne pas en revanche les contrats d’emplois et conventions de prestations de service qui sont traités par les articles 7 et 8 du projet de loi (voir la partie II).

L’article 5 prévoyait initialement que ces transferts « tiennent compte » de la répartition des attributions prévue par le projet de loi. Sur proposition de sa commission des affaires économiques, le Sénat a durci le dispositif en précisant que les transferts « doivent respecter » cette répartition.

Sur proposition de la commission des affaires économiques (COM-67), le Sénat a introduit par ailleurs la possibilité de recourir à une convention de transfert, bien qu’il soit prévu qu’un décret en Conseil d’État précise les modalités de ces transferts.

En séance, le Gouvernement a tenté de faire supprimer ces modifications en faisant valoir la nécessité de garder de la souplesse dans la mise en œuvre des transferts et en indiquant qu’un inventaire de ces biens, droits et obligations étant nécessaire, le décret est le cadre juridique le plus sécurisé pour en arrêter les détails.

b.   Le maintien des mandats des membres du collège de l’ASN (articles 5 et 2 bis)

Pour garantir la continuité des missions de sûreté nucléaire et de radioprotection, le II de l’article 5 maintient le mandat des membres du collège de l’ASN au-delà de l’entrée en vigueur de la présente loi. Ils exerceront jusqu’au terme de leur mandat les fonctions de membre du collège de l’ASNR telles qu’elles résulteront de la loi.

L’actuel article L. 592-2 du code de l’environnement dispose que le collège de l’ASN est composé de cinq membres, nommés en raison de leur compétence pour six ans non renouvelables. Trois sont choisis par le Président de la République ; les deux autres sont respectivement désignés par le Président de l’Assemblée nationale et le Président du Sénat (avec l’obligation de nommer une femme si le membre sortant était un homme et réciproquement).

Les règles de désignation de ses membres, de déontologie et de fonctionnement du collège de l’ASN s’appliqueront de la même façon au collège de la future autorité. Le projet de loi apporte toutefois deux évolutions :

– en matière de délégation de pouvoir (voir le B) ;

– et s’agissant de la parité au sein du collège.

Adopté sur proposition de la commission des affaires économiques du Sénat (COM-90), l’article 2 bis réécrit le troisième alinéa de l’article L. 592-2 pour substituer à l’exigence selon laquelle, parmi les trois membres du collège nommés par le Président de la République, l’écart entre femmes et hommes doit être au maximum d’une personne la nouvelle exigence que ces nominations assurent le même nombre de femmes et d’hommes au sein de l’ensemble du collège, hormis le président.

Ainsi, alors que, par le jeu des renouvellements par moitié du collège tous les trois ans, le rapport hommes/femmes pouvait être de 3+1, il devra être nécessairement de 2 + 2 à la date d’une nomination par le Président de la République.

Un amendement identique avait été adopté par les deux assemblées lors des premières discussions sur la fusion de l’ASN et de l’IRSN à l’occasion de l’examen de la loi dite « Nucléaire ».

c.   Un calendrier ambitieux et nécessaire (article 15)

En vertu de l’article 15, la fusion sera juridiquement opérée et la nouvelle autorité mise en place le 1er janvier 2025 ([56]).

Tous les acteurs auditionnés par le rapporteur ont souligné, ou admis, le caractère exigeant de cette échéance.

Douze groupes de travail ont été mis en place depuis près d’un an pour discuter entre représentants de l’IRSN et de l’ASN des conditions pratiques de la fusion et des futures modalités de travail au sein de l’ASNR. Ces discussions progressent à des rythmes variables : certaines sont bien avancées comme celles portant sur l’installation d’une cellule de crise unique ; d’autres s’avèrent plus complexes comme le choix des cadres de gestion (systèmes informatiques, comptabilité, etc.), alors que ces outils font partie des dossiers « incontournables » à résoudre pour la mise en œuvre opérationnelle de la réforme dès le 2 janvier 2025.

Le Gouvernement comme les responsables de l’ASN affirment néanmoins que la première étape de la réforme peut parfaitement aboutir à la date prévue. Les articles 8, 9 et 10 du projet de loi prévoient en outre des mesures transitoires ou des entrées en vigueur différées pour certains volets de la réforme (voir la partie II).

Reporter la date d’entrée en vigueur de la fusion n’apparaît donc pas nécessaire. Et retarder la réforme reviendrait à l’opérer à un moment encore plus chargé pour les équipes des deux organismes – ou à l’enterrer s’il s’agit d’attendre un moment « plus adapté ».

La charge de travail s’alourdit déjà, mais l’IRSN, dont l’expertise intervient dans les premiers temps du processus d’instruction, a montré au rapporteur que son personnel est en capacité d’y faire face sur les trois prochaines années ([57]). Indépendamment de la perturbation causée par la réforme, le maintien des emplois et fonctions concernés évitera de rebattre les cartes. En revanche, si l’ASN commence déjà se préparer à l’arrivée des nouveaux chantiers, ses capacités de réponse seraient insuffisantes. Mais ses prises de décision intervenant plus tard, la date du 1er janvier 2025 apparaît finalement comme la moins perturbante, tout en répondant à l’urgence de doter l’ASN des moyens supplémentaires dont elle aura besoin à partir de la mi-2025.

Au reste, il est primordial de ne pas faire durer davantage les incertitudes. Chaque entité et ses personnels ont besoin de pouvoir se projeter sur des arbitrages précis.

B.   Des règles de fonctionnement, de déontologie et de transparence consolidées voire renforcées

1.   Une répartition des responsabilités explicitée (article 2)

L’article 2 du projet de loi (alinéas 4 et 5) précise la répartition des responsabilités : en dehors des compétences expressément confiées à la commission des sanctions et au président de l’autorité, les attributions de l’autorité seront exercées par son collège. C’est lui qui prendra les décisions et formulera les avis.

Toutefois, comme c’est déjà le cas (à l’article L. 592-13 du code de l’environnement), il restera possible au collège de déléguer des pouvoirs (à l’exception de ses avis sur des textes réglementaires et de ses décisions réglementaires) au président, et au président de déléguer sa signature à des membres du personnel.

L’article 2 ajoute la possibilité pour le collège de déléguer ses pouvoirs à un membre des services de l’autorité en l’absence du président. Des amendements de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (COM‑24) et des sénateurs Daniel Fargeot (UC, COM-46 rectifié) et Ronan Dantec (Écologistes, COM-45 rectifié) ont par ailleurs explicité le fait que la délégation de signature peut être faite avec d’autres personnels que les agents publics. Enfin, la même commission a ajouté la faculté pour le président de donner délégation de pouvoir à un membre des services afin de passer les conventions nécessaires à l’accomplissement des missions de l’autorité (COM‑13, alinéas 16 et 17).

Le projet de loi renvoie au règlement intérieur le soin de définir les conditions de ces délégations.

2.   Des règles déontologiques réaffirmées (articles 2 et 4)

a.   Des principes fondamentaux posés par la loi

L’article 2 du projet de loi vient compléter les quelques dispositions législatives prévues par le chapitre II du titre IX du livre V du code de l’environnement en matière de déontologie des travaux et des personnels de l’autorité de sûreté nucléaire (alinéas 7 à 11).

● Le texte initial du nouvel article L. 592-13-1 se référait pour l’essentiel aux articles 12 à 14 ([58]) de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, renvoyant au règlement intérieur de l’autorité la définition des règles nécessaires à leur mise en œuvre, « y compris s’agissant des activités d’expertise et de recherche ». Le Sénat est toutefois venu préciser une des règles fondamentales en la matière (voir le point b suivant).

La prévention des risques de conflits d’intérêts est la première préoccupation. Elle est la base de l’impartialité des travaux, avis et décisions de la future autorité. Elle est donc inscrite comme l’objectif central des exigences posées par l’article L. 592‑13‑1, mais aussi du nouvel article L. 592-13-3 qui prévoit que le règlement intérieur définisse les modalités de la nomination des membres des groupes permanents d’experts (voir supra) mais aussi les règles propres à assurer la diversité de l’expertise et à prévenir les conflits d’intérêts en général.

Parmi les implications de la prévention des conflits d’intérêts, il est une règle qui inquiète les personnels de l’IRSN : l’interdiction pour les personnels des AAI – comme des API – de se faire recruter par les acteurs qu’ils auront contrôlés dans les trois ans de ce contrôle. Elle s’applique aussi aux personnels des établissements publics ; mais l’IRSN a considéré que les appuis techniques apportés par ses experts aux contrôles réalisés par l’ASN ne constituent pas un contrôle à proprement parler. Bien que la Cour des comptes ait jugé cette interprétation un peu trop permissive, indiquent les ministères, la plupart de ses personnels peuvent ainsi passer de l’institut à un exploitant avec lequel ils auront dialogué. Les représentants des personnels de l’IRSN affirment que cette possibilité représente une perspective de carrière importante s’ils souhaitent changer de fonctions sans quitter le secteur nucléaire, et donc un élément d’attractivité des emplois à l’institut.

De fait, leur intégration dans la future autorité les soumettra à une lecture plus rigoureuse de la règle dès lors qu’ils participeront à des contrôles. La distinction entre expertise et décision, évoquée au point b, ne permettra pas de contourner cette règle, quelles que soient sa portée et l’organisation des travaux retenue, car même si l’expert « de terrain » ne porte pas la responsabilité de l’expertise finale, ni a fortiori la responsabilité de la décision prise ensuite, son travail d’évaluation l’aura mis en contact avec le contrôlé.

En conséquence, le renforcement du cadre déontologique de leurs emplois pourrait effectivement présenter un impact négatif sur l'attractivité de certains métiers, selon la perception des représentants des personnels de l’IRSN. Ce renforcement apparaît pourtant souhaité par l'ensemble des acteurs du secteur, tant la confiance dans l'indépendance et la liberté des acteurs de la sûreté nucléaire est centrale.

● Voulant s’assurer que les règles déontologiques posées par la loi ou le futur règlement intérieur soient bien prises en compte, les commissions de l’aménagement du territoire et du développement durable (COM-25) et des affaires économiques (COM-78) du Sénat, ainsi que le sénateur écologiste Ronan Dantec et plusieurs de ses collègues (COM-32 rectifié) ont introduit un nouvel article L. 592‑13-2 prévoyant l’installation d’une commission d’éthique et de déontologie « chargée de conseiller le collège pour la rédaction du règlement intérieur, de suivre son application et, dans les conditions définies par le règlement intérieur, de garantir le respect des règles » de déontologie, notamment s’agissant des conflits d’intérêts (alinéa 10 de l’article 2). Une telle commission existe déjà au sein de l’IRSN.

Invoquant une délimitation trop restrictive de ses missions, le Gouvernement a proposé, en séance publique, d’indiquer seulement qu’elle est chargée de conseiller le collège « dans les conditions prévues aux articles 13 et 14 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 » (relative au statut général des AAI et API).

Pour sa part, la commission des affaires économiques a décidé de supprimer cette disposition, par l’adoption de l’amendement CE83 de son rapporteur, considérant qu’il serait regrettable de limiter les attributions de l’instance de déontologie de la future autorité, et préférant lui laisser le choix de la forme de cette instance. Le cadre général applicable aux organismes publics impose, en tout état de cause, de mettre en place une telle instance, mais l’ASNR pourra choisir entre une commission ou un référent.

b.   Une distinction entre expertise et décision préservée

La qualité actuelle de l'organisation de la sûreté nucléaire sera préservée, notamment la distinction entre les personnes en charge de l'expertise technique lors de l'instruction d'un dossier et celles (notamment les membres du collège de l'ASN) en charge de la décision relative à ce même dossier.

La distinction entre expertise et décision est une garantie essentielle de la qualité du processus comme de la crédibilité de chaque étape. L’expertise a vocation à éclairer la décision sur les enjeux techniques du sujet mais ne l’engage pas. Il importe que le décideur reste libre d’avoir une interprétation différente et de resituer la question technique dans son contexte global. Réciproquement l’expert ne doit pas se censurer parce qu’il a un lien hiérarchique avec l’autorité qui prendra la décision.

Cette distinction découle aujourd’hui de l’organisation duale du système de sûreté nucléaire. Pour autant, l’unification de l’instance ne remet pas en cause ce principe. Il impose seulement d’adapter l’organisation interne de l’autorité.

Le nouvel article L. 592-13-1 vise explicitement ce principe. Dans sa version initiale, il se contentait de prévoir la définition par le règlement intérieur des modalités de fonctionnement et des règles propres à distinguer le processus d’expertise et d’instruction conduit par ses services et le processus d’élaboration des avis et décisions délibérés par son collège. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a réécrit cette disposition pour préciser et élargir la portée du principe (COM‑11).

L’alinéa 8 de l’article 2 dispose ainsi que : « lorsque l’instruction recourt à une expertise réalisée par ses services », on doit distinguer, d’une part, la personne responsable de l’expertise et, d’autre part, la personne ou les personnes responsables de l’élaboration de la décision et de la prise de décision.

Alors que la règle initiale ne devait s’appliquer qu’aux décisions prises par le collège, soit une cinquantaine de décisions par an, le Sénat l’a étendue à toutes les décisions s’appuyant sur une expertise (tel que le redémarrage d’une centrale nucléaire), soit environ 350 décisions par an.

Le Sénat explique par ailleurs avoir voulu remplacer la distinction des processus par une distinction des responsabilités (ou plus précisément des personnes responsables). Toutefois, l’interprétation du principe est brouillée par l’alinéa 9 suivant, également introduit par le Sénat, dans la mesure où il n’évoque plus des personnes responsables mais des « personnels chargés des activités d’expertise et les personnels chargés des activités d’élaboration de la décision et de prise de décision ». Cela amènerait à considérer l’ensemble des personnels contribuant à ces actions, voire à imaginer des équipes dédiées. De fait, le rapporteur de la commission dit s’inspirer du fonctionnement de l’IRSN dont la recherche et l’expertise sont organisées en pôles thématiques où coexistent un pôle recherche et un pôle expertise distincts.

Le Gouvernement a donc proposé, en séance, la suppression de l’alinéa 9 en invoquant son incohérence avec la règle plus opérationnelle définie à l’alinéa 8.

Mais au-delà de ce problème, les services ministériels et l’ASN ont alerté le rapporteur sur la nécessité de ne pas trop rigidifier l’organisation. Plusieurs modes doivent pouvoir s’envisager selon la nature et les enjeux des dossiers. Il serait excessif d’imposer une telle distinction aux expertises de conformité des installations aux normes existantes. Rappelons, par exemple, que ce sont les experts de l’ASN, seuls, qui ont demandé le changement du couvercle de la cuve de Flamanville. On doit également pouvoir envisager de confier à une même personne l’instruction, l’expertise et l’élaboration de la décision relatives à de petits dossiers, la distinction se faisant alors au niveau des responsables qui valident et signent les résultats de chaque étape (expertise et décision). Une même personne pourrait aussi être alternativement expert ou décideur selon les dossiers, notamment quand les personnels des services centraux apportent un appui aux personnels des divisions territoriales de l’autorité.

En tout état de cause, le point précis où la distinction sera faite doit être précisé par le règlement intérieur (comme c’est prévu par l’article L. 592‑13‑1). En effet, le processus d’expertise se fait souvent en deux étapes pour les dossiers les plus complexes : l’évaluation proprement dire et sa validation technique. De même, l’instruction connaît plusieurs étapes avant la prise de décision.

La commission des affaires économiques a, pour sa part, considéré que, bien que plus adaptée, la définition du principe issue du Sénat est encore trop floue (parle-t-on de la ou des personnes responsables ?), et trop rigide pour préserver les bénéfices attendus de la mutualisation des compétences. Constatant la difficulté à énoncer en termes simples et non ambigus la règle d’une distinction entre expertise et décision, elle a donc adopté l’amendement CE104 de son rapporteur qui supprime les alinéas 8 et 9.

La crédibilité des avis et décisions de la future autorité lui impose nécessairement de prendre en compte cette exigence dans l’organisation de ses travaux. Mais le règlement intérieur est le mieux à même d’en définir les modalités.

c.   L’autonomie du règlement intérieur en débat (article 4)

Plusieurs dispositifs introduits par le projet de loi définissent une règle générale relative au fonctionnement de la future autorité avant de renvoyer à son règlement intérieur le soin de préciser leurs modalités.

Cette structuration des normes est parfaitement cohérente avec les règles constitutionnelles distinguant les domaines de la loi et du règlement et avec le principe posé par la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 qui prévoit expressément que seuls les principes fondamentaux d’organisation et de fonctionnement d’une AAI (ou d’une API) relèvent du niveau de la loi.

Pour autant, nombre d’acteurs ont dit au rapporteur leur regret que la loi ne soit pas plus précise dans ses attendus, en particulier s’agissant de déontologie, de transparence et d’information du public. Ils déplorent en particulier que les nouvelles dispositions n’assurent plus une publication des avis rendus par l’IRSN sur saisine de l’ASN avant la décision de l’autorité, contrairement à ce que permet aujourd’hui l’article L. 592-47 ([59]). Le nouvel article L. 592-14 (à l’alinéa 13 de l’article 2 du projet de loi) prévoit toujours la publication des expertises fondant les décisions de l’autorité, mais sans préciser la temporalité de cette publication. De fait, les services ministériels et responsables de l’ASN ont expliqué qu’elles seront le plus souvent publiées en même temps que les avis. Il importe en effet que les décisions puissent être prises sans pressions, ni internes ni exernes.

De leur côté, tout en reconnaissant que le renvoi au règlement intérieur offre une plus grande souplesse, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (COM-17) et la commission des affaires économiques (COM-83) du Sénat ont voulu s’assurer que le règlement intérieur respecte les intentions du législateur. Pour ce faire, elles ont introduit le principe d’une présentation à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST), au Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sûreté nucléaire (HCTISN) et à la fédération nationale des commissions locales d’information auprès des installations nucléaires de base – l’Association nationale des comités et commissions locales d’information ou ANCCLI – des projets de décision d’adoption ou de modification du règlement intérieur de l’ASNR, sur lesquels ces entités peuvent formuler des observations (article L. 592-29-1, alinéas 6 à 7 de l’article 4). Sur proposition de la commission des affaires économiques (COM-84), il est également prévu que les observations de l’OPECST soient élaborées en lien avec les commissions compétentes (alinéa 8).

Or, cette procédure soulève d’importantes difficultés :

– Le HCTISN rassemble l’ensemble des parties prenantes du nucléaire. Il apparaît donc paradoxal qu’on soumette les règles internes qui régiront le fonctionnement de la future autorité de contrôle à une instance comptant les exploitants qu’elle contrôlera ainsi que l’État dont elle doit être indépendante ;

– quant à l’ANCCLI, elle est financée par l’ASN et devrait continuer à l’être par l’ASNR. Il ne faudrait pas qu’elle utilise son pouvoir d’observation pour obtenir davantage.

Par ailleurs, une telle procédure est lourde car il faudra attendre les retours des différents organismes sur un projet qui ne pourra être finalisé qu’à partir du 2 janvier 2025. Cela retardera d’autant la mise en œuvre pratique de la réforme, et perturbera la continuité des activités de l’autorité.

Le Gouvernement avait donc proposé, en séance, de revenir à une présentation au seul OPECST et dans les deux mois suivant sa publication.

La commission des affaires économiques a décidé de supprimer cette procédure (alinéas 6 à 8 de l’article 4) en raison des difficultés relevées, mais plus globalement parce que soumettre la loi interne de la future autorité à différents acteurs extérieurs (y compris parlementaires) lui paraît contradictoire avec l’exigence d’indépendance de cette autorité. À cet effet, elle a adopté l’amendement CE87 de son rapporteur, qui supprime l’ensemble de l’article (voir le point suivant).

3.   Le renforcement de la transparence et de l’information du public (articles 2, 2 ter, 4, 4 bis et 4 quater)

a.   Une mission essentielle renforcée par le projet de loi

La transparence et l’information du public sont des conditions essentielles de la confiance des Français envers le système de sûreté nucléaire national et le ou les organismes chargés de leur protection. Or, la crédibilité du système est indispensable pour l’acceptation de la relance du nucléaire en France.

Le projet de loi s’attache à les renforcer en inscrivant dans la loi différentes obligations de publication à l’article 2 du projet de loi :

– non seulement le principe de la publication des avis et décisions délibérés par le collège de l’autorité est évidemment préservé (article L. 592-27), mais on a vu que les résultats des expertises réalisées dans le cadre des instructions de la future autorité devront être systématiquement publiés.

La version initiale du premier alinéa de l’article L. 592-14 renvoyait au règlement intérieur de la future autorité la définition des modalités de publication des résultats de l’ensemble de ses activités d’expertise et d’instruction. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat (COM-4) a précisé cette obligation en ciblant spécifiquement les expertises réalisées à l’appui d’une instruction (alinéa 13 de l’article 2).

La commission des affaires économiques a toutefois préféré revenir à la version initiale de cet alinéa (à l’exception du cas des activités d’instruction, qui est déjà traité par l’article L. 592 27 du code de l’environnement) et a adopté en ce sens l’amendement CE84 de son rapporteur, considérant qu’une règle absolue de publication pour des documents pouvant contenir des secrets protégés par la loi irait un peu trop loin. Renvoyer au règlement intérieur le soin de préciser les différents cas de figure lui paraît une approche plus souple – mais aussi plus conforme au statut d’une autorité administrative indépendante ;

– le même article L. 592-14 liste d’autres actes auxquels cette obligation devra également s’appliquer : les avis des groupes permanents d’experts et ceux qui sont rendus à la demande du Gouvernement, des commissions parlementaires compétentes ou de l’OPECST (cf. l’article L. 592-29).

On relève qu’a contrario, les études sans avis réalisées à la demande des mêmes acteurs (et mentionnées par l’article L. 592-29 précité) ne sont pas soumises à une obligation de publication.

L’amendement CE84 précité ne reprend pas explicitement l’objectif d’une publication systématique des avis des groupes permanents d’experts, laissant à nouveau le soin au futur règlement intérieur d’en définir le cadre ;

– enfin, ledit article L. 592-14 prévoit que l’ASNR devra publier les données scientifiques résultant des programmes de recherche dont elle prend l’initiative (sous réserve des secrets protégés par la loi).

b.   … Mais parfois sans nécessité

● L’article 4 du projet de loi propose également de compléter les dispositifs de transparence et d’information sur la sûreté nucléaire et la radioprotection par un nouvel article L. 592-29-1, qui prévoit, notamment, une information privilégiée de différents organismes intéressés. Ainsi :

– l’ASNR devra présenter à l’OPECST (avec les commissions parlementaires compétentes, cf. les amendements COM-82 et COM-92 du Sénat), ainsi qu’au HCTISN, qui pourra émettre un avis, les sujets sur lesquels une association du public est organisée ainsi que les modalités de sa mise en œuvre et leur en rendre compte.

Les services ministériels précisent qu’il s’agit de pérenniser des formes d’association des publics novatrices expérimentées avec succès. Elles interviennent sur des sujets en cours d’instruction, et non au moment où la décision est prise. Cela a été fait, par exemple, dans le cadre de l’instruction du dossier de demande d’autorisation de création du centre Cigéo ;

– l’ASNR devra également communiquer la nature et les principaux résultats des programmes de recherche qu’elle mène aux autorités concernées ainsi qu’à l’OPECST, aux commissions parlementaires compétentes (cf. les mêmes amendements COM-82 et COM-92 du Sénat), au HCTISN, au Haut Conseil de la santé publique et au Conseil d’orientation des conditions de travail – selon leurs domaines de compétence respectifs.

Toutefois, le rapporteur de la commission des affaires économiques relève que ces dispositions complètent, sans véritable valeur ajoutée, des dispositifs existants, qui permettent déjà de répondre aux demandes d’information de l’OPECST et du Parlement :

– l’article L. 592-29 prévoit ainsi que l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) formule des avis ou réalise des études à la demande du Gouvernement, des commissions parlementaires compétentes ou de l’OPECST ;

– l’article L. 592-30 dispose que l’ASN rend compte de ses activités à la demande de l’OPECST ;

– et l’article L. 592-31 prévoit que l’ASN transmet son rapport annuel d’activité à l’OPECST.

Sans compter que le projet de loi prévoit par ailleurs (article L. 592 14 à l’article 2) la publication des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont elle aura l’initiative.

En outre, rien ne s’oppose à ce que la future autorité échange avec l’OPECST sur les procédures d’association du public envisagées.

Pour ces différentes raisons, le rapporteur a proposé la suppression de l’ensemble de l’article 4 (au-delà des seuls alinéas 6 à 8, voir supra) par un amendement CE87 adopté par la commission des affaires économiques.

● Au cours de son examen, d’autres mesures visant à renforcer la transparence et l’information ont été créées par le Sénat :

– l’article 2 ter exige ainsi que le rapport d’activité annuel de l’autorité de sûreté transmis à l’OPECST contienne désormais un compte rendu de l’activité de sa commission des sanctions (se reporter au commentaire de cet article) ;

– l’article 4 bis, adopté en séance, contre l’avis du Gouvernement, sur proposition de sénateurs de la commission des affaires économiques (4 rectifié bis), dispose que la commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et déchets radioactifs (CN2E), chargée d’évaluer chaque année l’état d’avancement de ces études et recherches, pourra être sollicitée par l’OPECST pour une expertise en dehors du seul cadre de son évaluation annuelle (article L. 542-3 du code de l’environnement).

Pour représenter l’ensemble des disciplines scientifiques et compétences concernées par sa mission, elle passera de six à huit membres. Et le haut‑commissaire à l’énergie atomique en sera membre de droit.

– enfin, le 4 quater impose que le rapport annuel de l’ASNR soit remis à l’OPECST avant sa publication (cf. l’amendement de plusieurs sénateurs de la commission des affaires économiques du Sénat n° 3 rectifié bis).

Or, il apparaît que ces trois cas correspondent déjà des dispositions déjà prévues par la loi ou pratiquées sans aucune difficulté. Il n’apparaît donc pas utile de modifier la loi pour le même résultat.

Sur proposition de son rapporteur, la commission des affaires économiques a ainsi supprimé ces articles (amendements CE97, CE89 et CE90).

II.   Dispositions relatives aux ressources humaines

A.   Les modalités de transfert des contrats de travail

La création de l’ASNR nécessite d’organiser les transferts de personnel de l’IRSN vers cette nouvelle autorité, d’une part, et vers le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), d’autre part.

L’article 7 du projet de loi précise les modalités de transfert des contrats de travail des salariés de l’IRSN :

– le I prévoit que l’ASNR se substitue à l’IRSN en qualité d’employeur pour ceux-ci, à l’exception des salariés mentionnés aux II et III de l’article 7 (voir infra). Les contrats de travail des salariés de l’IRSN sont, en conséquence, transférés à l’ASNR. Il est par ailleurs précisé que les dispositions de l’article L. 1224-3 du code du travail ne sont pas applicables à ces transferts. Cela signifie que l’ASNR ne sera pas obligée de proposer aux salariés de l’IRSN un contrat de droit public, et qu’il ne sera pas mis fin de plein droit au contrat d’un salarié qui refuserait ce nouveau contrat de droit public. Les salariés de l’IRSN pourront donc conserver leur statut de salarié de droit privé ;

– le II et le III prévoient que le CEA se substitue à l’IRSN en tant qu’employeur pour :

Les modalités de ces transferts et mises à disposition doivent être précisées par décret en Conseil d’État. Les salariés dont le contrat de travail est transféré au CEA, seront soumis au régime de droit commun en matière de conventions et d’accords collectifs applicables en période de transition ([60]) (article 8), le Gouvernement soulignant dans l’étude d’impact que « la comparaison des dispositifs conventionnels du CEA et de l’IRSN conduit (…) au constat qu’ils présentent pour les intéressés des similitudes importantes et des niveaux de protection et d’avantages très comparables ». Pour les conventions et accords applicables aux salariés rejoignant l’ASNR, les modalités de maintien des conventions et accords collectifs seront décrits infra.

Cet article 7 n’a fait l’objet d’aucune modification par le Sénat et constitue la traduction opérationnelle, en matière de transfert des contrats de travail, de la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire.

B.   Le Statut du personnel de la nouvelle autorité et les modalités du dialogue social en son sein

L’article 6 du projet de loi précise la nature des contrats de travail des différentes catégories de personnel de l’ASNR et les modalités d’organisation du dialogue social au sein de l’entité.

1.   La nature des contrats de travail

Le nouvel article L. 592-12 du code de l’environnement prévoit que le personnel de l’ASNR comporte à la fois des fonctionnaires, des agents contractuels de droit public et des salariés de droit privé. Aujourd’hui, le personnel de l’ASN est majoritairement composé de fonctionnaires et de contractuels de droit public et celui de l’IRSN de salariés de droit privé ([61]). Cette diversité de catégories de personnel envisagée répond essentiellement à deux besoins :

– permettre de maintenir les droits liés au statut du personnel de l’ASN, d’une part, et de celui de l’IRSN, d’autre part, chacun conservant son contrat ;

– permettre un recrutement diversifié afin de garantir l’attractivité de la future autorité.

2.   L’organisation du dialogue social au sein de la future ASNR

Pour assurer l’organisation du dialogue social au sein de chaque entité, l’IRSN dispose aujourd’hui d’un comité social et économique (CSE) et l’ASN d’un comité social d’administration (CSA).

a.   Un comité social d’administration unique, composé de deux commissions

La création de l’ASNR nécessite la création d’une structure de dialogue social particulière, permettant la représentation de l’ensemble des catégories de personnel : fonctionnaires, contractuels de droit public, salariés de droit privé. L’article 6 du projet de loi crée ainsi un comité social d’administration unique, qui exercera les compétences du CSA et du CSE pour l’ensemble du personnel de la future ASNR. Ce CSA unique serait présidé par le président de l’ASNR et composé de représentants du personnel et de l’administration. En son sein, 2 commissions seraient instituées :

– la commission des agents publics, qui exercerait les compétences d’un CSA en matière d’organisation stratégique des politiques de ressources humaines, de parcours professionnels, d’égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations, lorsque ces questions concernent de manière exclusive les fonctionnaires et contractuels de droit public ;

– la commission des salariés, qui exercerait les compétences d’un CSE lorsque les problématiques associées concernent de manière exclusive les salariés de droit privé. Ce CSE n’exercerait pas les attributions, prévues par le code du travail, qui concernent l’exercice du droit d’alerte et les réclamations dans une entreprise disposant du statut de société anonyme.

Tous les autres sujets auront donc vocation à être traitées par le CSA unique, en formation plénière.

Par ailleurs, il est créé, au sein de ce même CSA, une formation spécialisée chargée des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail pour l’ensemble du personnel. Des formations locales sur les mêmes sujets peuvent être créées lorsque des risques professionnels particuliers le justifient.

Le futur CSA sera doté de la personnalité civile, ce qui lui permettra de gérer son patrimoine ainsi que le budget des activités sociales et culturelles de l’ensemble du personnel ; en conséquence, les fonctionnaires de l’ASN n’auront plus accès à l’action sociale interministérielle. L’article 15 du projet de loi précise que ce dispositif demeure applicable tant que les mêmes agents ne bénéficient de plein droit du nouveau dispositif d’activités sociales et culturelles qui est prévu, l’entrée en vigueur de ce dernier devant intervenir au plus tard le 1er juillet 2027. Par ailleurs, l’article 10 indique que le patrimoine du CSE de l’IRSN est dévolu au CSA de l’ASNR.

b.   La désignation des instances représentatives du personnel et les modalités du dialogue social

L’article 6 du projet de loi précise aussi les modalités d’élection des représentants du personnel siégeant au sein du CSA. Sont également détaillées les modalités des négociations collectives et les règles applicables à la représentativité des organisations syndicales au sein des collèges. En particulier, est prévue la possibilité de négociations conjointes entre représentants du personnel de droit public et de droit privé, à l’initiative de l’ASNR.

Des dispositions transitoires ad hoc sont instituées concernant la validité des conventions, accords collectifs et engagements unilatéraux en cours, ainsi que pour les instances de dialogue social déjà existantes au sein des deux entités :

– les conventions, accords et engagements actuellement applicables aux salariés de l’IRSN restent applicables jusqu’à l’entrée en vigueur des nouveaux engagements ou, à défaut, jusqu’au 30 juin 2027 (art. 8), soit 30 mois après l’entrée en vigueur de la création de l’ASNR (1er janvier 2025). Au 1er juillet 2027, à défaut de nouveaux accords, les salariés de l’IRSN bénéficieront d’une garantie de rémunération ;

– le CSA actuel de l’ASN et le CSE de l’IRSN restent en fonction jusqu’à la constitution du futur CSA unique, qui doit intervenir au plus tard le 31 mars 2026. Il est prévu que ces comités puissent siéger en formation conjointe, le Sénat ayant précisé que cela doit se faire à la demande de ces comités ou du président de l’ASNR ([62]) (art. 10).

Au total, sur l’ensemble de ces dispositions (CSA unique et modalités du dialogue social), le Conseil d’État a pu relever, dans son avis sur le projet de loi, la « grande complexité du dispositif » ainsi créé mais note également qu’il n’est contraire à aucun principe constitutionnel, en particulier celui de participation mentionné par le Préambule de la Constitution de 1946 ([63]). Il recommande une attention particulière aux modalités d’application de la loi. L’étude d’impact souligne par ailleurs que la structuration des instances de dialogue social telle que proposée s’appuie sur des dispositifs appliqués dans des établissements publics disposant de différentes catégories de personnel, tels que Voies navigables de France ou l’Agence nationale du contrôle du logement social.

La commission des affaires économiques a adopté un amendement CE91 du rapporteur portant article additionnel après l’article 11. Il permet la consultation du comité social d’administration de l’ASN et du CSE de l’IRSN, avant le 31 décembre 2024, sur le projet de règlement intérieur de la future ASNR. Cet amendement précise également que le règlement intérieur de l’ASN demeure applicable jusqu’à l’adoption du règlement intérieur de la future ASNR. Ces dispositions permettent d’assurer la continuité de fonctionnement entre les différents organismes concernés et l’adoption du règlement intérieur dans les meilleurs délais une fois l’ASNR créée. La commission des affaires économiques a également adopté, à l’article 15, un amendement CE96 permettant l’entrée en vigueur immédiate de telles dispositions.

c.   La possibilité d’harmoniser les montants des indemnités et frais accessoires entre les différentes catégories de personnel

Enfin, l’article L. 592-12-3 du code de l’environnement nouvellement créé prévoit que le collège de l’ASNR puisse harmoniser, entre les différentes catégories de personnel, les montants des indemnités accessoires liées à des sujétions communes et les modalités de remboursement des frais de toute nature.

3.   La position du Sénat sur ces dispositions

Lors de l’examen de ces dispositions au Sénat, le rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, M. Pascal Martin (UC), n’a pas souhaité modifier l’équilibre de l’article, « fruit d’un travail de dialogue entre l’ensemble des parties prenantes » : des précisions rédactionnelles et de clarification ont simplement été apportées sur différents points.

À l’article 13, un amendement COM-18 du rapporteur Pascal Martin a cependant précisé que les inspecteurs de la sûreté nucléaire et les inspecteurs de la radioprotection pourront être nommés parmi l’ensemble du personnel de la future ASNR, tous statuts confondus. De même, les enquêtes techniques pourront être menées par toute catégorie de personnel. Selon l’exposé sommaire de l’amendement, cela permettra « de renforcer les effectifs consacrés à l’inspection de la nouvelle autorité ». Les missions de police judiciaire demeureront exercées par des fonctionnaires ou des agents publics.

En séance publique, un amendement n° 92 du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Patrick Chaize (LR), a été adopté avec double avis favorable de la commission et du Gouvernement. Reprenant la jurisprudence du Conseil constitutionnel en la matière ([64]), il précise, à l’article 6 du projet de loi, que le personnel de la future ASNR « de nationalité étrangère ou apatride ne peut être recruté pour pourvoir des emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l’exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l’exercice de prérogatives de puissance publique ».

C.   Les dispositions visant à garantir l’attractivité de la nouvelle autorité

Les auditions menées par votre rapporteur ont fait ressortir les enjeux majeurs d’attractivité relatifs aux emplois dans le domaine de la sûreté nucléaire.

Comme cela a été souligné, la possibilité pour la future ASNR de recruter à la fois des salariés de droit privé, des fonctionnaires et des contractuels de droit public participe de cette attractivité (article 6).

Autre mesure d’attractivité, l’article 9 organise pendant 6 ans une voie d’accès réservé, sous la forme d’un concours, aux corps de fonctionnaires de l’État, pour les contractuels de droit public et des salariés de droit privé de la future ASNR. Ce recrutement spécifique doit valoriser les acquis de l’expérience professionnelle, ce qui passe notamment par la justification de 4 années d’ancienneté au sein de l’ASN, de l’IRSN ou de l’ASNR. Les corps de fonctionnaires concernés doivent être précisés par décret en Conseil d’État : à ce sujet, les services ministériels ont précisé à votre rapporteur qu’à ce stade, les corps concernés ne sont pas fixés, mais que « pour ce qui concerne la filière technique, on peut penser notamment au corps des ingénieurs de l’industrie et des mines (IIM) au regard du volume de la population technique et cadre dans les deux entités. L’ouverture de concours pour chaque corps sera décidée en concertation avec les gestionnaires de corps (…) et la direction générale de l’administration et de la fonction publique ». On peut relever que des dispositions semblables ont déjà existé au sein du ministère de la justice, afin que les salariés et les contractuels des juridictions sociales puissent intégrer des corps de fonctionnaires du ministère de la justice ([65]).

L’article 11 du projet de loi comporte aussi des mesures liées à l’attractivité de la nouvelle ASNR. Le I de cet article prévoit en effet que l’IRSN et l’ASN doivent respectivement consacrer 15 millions d’euros (M€) et 0,70 M€ à l’augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024. Cela représente, selon le ministère, une augmentation moyenne d’environ 10 %. À noter que le Conseil d’État, dans son avis sur le projet de loi, a estimé qu’une telle disposition ne relevait pas du domaine de la loi tel que défini par l’article 34 de la Constitution et l’article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017. Elle contribue cependant à répondre au besoin d’attractivité de cette nouvelle autorité.

Cette disposition de l’article 11 entre en vigueur de manière immédiate (article 15).

Le projet de loi ne comporte pas de dispositions relatives à la revalorisation de la rémunération des fonctionnaires de l’ASN. Le ministre Christophe Béchu, lors de l’examen du projet de loi en séance au Sénat le 7 février 2024, a expliqué qu’un « décret est nécessaire, fruit des négociations qui doivent avoir lieu entre les agents publics de l’ASN (…) pour les agents publics, un décret sera pris au terme du processus de négociations ».

D.   évaluation des besoins nécessaires à la future ASNR

En complément des dispositions précitées sur l’augmentation de la rémunération des salariés de l’IRSN et des contractuels de l’ASN, l’article 11 du projet de loi prévoit 2 dispositions complémentaires :

– au II de l’article, la remise d’un rapport au Parlement avant le 1er juillet 2024 sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à l’ASNR et au CEA en 2025. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement COM-69 du rapporteur pour avis Patrick Chaize, prévoyant que ce rapport évalue également la faisabilité et l’opportunité d’instituer un préfigurateur à la réforme de l’ASNR. Les dispositions de ce II sont d’entrée en vigueur immédiate (article 15) ;

– au III de l’article, une évaluation par l’ASNR des moyens humains et financiers qui lui sont nécessaires dans les 5 ans suivant l’entrée en vigueur de la réforme, ainsi que des mesures propres à garantir l’attractivité des conditions d’emploi de celle-ci. Ce travail fera l’objet d’une présentation au Gouvernement et à l’OPECST, en lien avec les commissions permanentes compétentes.

Sur ces deux dispositions, le Conseil d’État a relevé qu’elles ne pouvaient être regardées, « compte tenu de leur objet, comme destinées à assurer l’information du Parlement afin de lui permettre de contrôler l’action du Gouvernement et d’évaluer les politiques publiques et ne relèvent, par suite, pas non plus du domaine de la loi » ([66]). Comme pour celle relative aux rémunérations, elles constituent néanmoins un signal important sur la nécessité de prévoir des moyens et des mesures d’attractivité en adéquation avec les besoins de la future autorité.

III.   La nomination du futur président de l’ASNR par les commissions permanentes compétentes du parlement

Le III de l’article 14 du projet de loi prévoit quelles commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat seront compétentes pour émettre un avis sur la nomination du président de la future ASNR, en application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

Aujourd’hui, la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution prévoit :

– que la nomination du président de l’ASN relève de la commission compétente en matière d’énergie ;

– que la nomination du président de l’IRSN relève de la commission compétente en matière d’environnement.

L’article 36 du Règlement de l’Assemblée nationale prévoit que la commission des affaires économiques est compétente en matière d’énergie et la commission du développement durable en matière d’environnement.

Le projet de loi initial du Gouvernement prévoyait que la nomination du président de la future ASNR soit soumise à l’avis de la commission compétente en matière d’énergie. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a adopté un amendement COM-22 de son rapporteur, Pascal Martin (UC), prévoyant que cet avis relèverait de la commission compétente en matière de prévention des risques naturels et technologiques ([67]), afin de permettre à cet avis de revenir à cette même commission.

L’amendement COM-23 du même auteur prévoit une entrée en vigueur immédiate de ce changement de compétence de commission, sans attendre l’échéance du 1er janvier 2025, au motif que le mandat du président actuel prend fin en novembre 2024 et qu’il est logique que la commission qui sera compétente sur la nomination du futur président de l’ASNR se prononce sur le mandat du président de l’ASN dont la continuité sera assurée à compter du 1er janvier 2025 (cf. article 5 du projet de loi).

Par ailleurs, le Sénat a également supprimé la présidence du Haut Conseil des biotechnologies de la liste des nominations soumises à l’avis des commissions permanentes compétentes du Parlement, cet organisme ayant été supprimé en 2022 (amendement COM-6 du rapporteur Pascal Martin).

La commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a adopté l’amendement CE98 du rapporteur à l’article 14, qui rétablit la version initiale du projet de loi, prévoyant que c’est la commission compétente de chaque assemblée en matière d’énergie qui se prononcera sur la nomination du président de la future ASNR, c’est-à-dire la commission des affaires économiques. Une telle attribution est cohérente avec les compétences de cette commission, qui est non seulement compétente sur les enjeux d’énergie mais aussi sur ceux relatifs à l’industrie, à l’innovation ou encore à la recherche appliquée. Ces enjeux s’inscrivent pleinement dans la réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire qui doit permettre, conformément au titre du projet de loi, de répondre au défi de la relance de la filière nucléaire.

La commission des affaires économiques a également adopté l’amendement de coordination juridique CE92 à l’article 15, qui tire les conséquences du rétablissement de la compétence de cette commission pour l’avis sur la nomination du président de la future ASNR.

 


  1  

   liste des personnes auditionnées
par M. jean-Luc fugit, rapporteur

(par ordre chronologique)

Autorité de sûreté nucléaire (ASN)

M. Bernard Doroszczuk, président

M. Olivier Gupta, directeur général

Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) *

M. Jean-Christophe Niel, directeur général

Mme Karine Herviou, directrice générale adjointe en charge de la sûreté nucléaire

M. Patrice Bueso, directeur de la stratégie

Mme Emmanuelle Mur, responsable des relations institutionnelles

Table ronde avec les représentants du personnel de
l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) UNSP-FO et membres du Comité social d’administration de proximité (CSAP)

Mme Charlotte Guenault, inspectrice à la direction des centrales nucléaires (ASN Montrouge)

M. Thomas Lomenede, inspecteur à la division ASN d’Orléans

M. Romain Veillot, inspecteur à la division ASN de Lyon

M. Jonathan Ruille, inspecteur à la direction des déchets, des installations de recherche et du cycle (ASN Montrouge)

Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires – Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

M. Cédric Bourillet, directeur général de la prévention des risques

Mme Anne-Cécile Rigail, cheffe du service des risques technologiques

Table ronde avec les représentants du personnel de
l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

M. François Jeffroy, délégué syndical central (CFDT)

M. Philippe Bourachot, délégué syndical central (CGT)

Mme Névéna Latil Querrec, déléguée syndicale (CGT Fontenay)

M. Luc Codron, délégué syndical central (CFE-CGC)

M. Pascal Cuendet, délégué syndical (CFE-CGC Le Vésinet)

Mme Tatiana Taurines, déléguée syndicale centrale (CFDT)

Table ronde « Information du public et transparence »

 Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli)

M. Jean-Claude Delalonde, président

M. Yves Lheureux, directeur

Mme Coralie Pineau, directrice technique

 Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)

Mme Christine Noiville, directrice de recherche au CNRS

M. Cédric Vilette, adjoint au chef de la mission « Sûreté nucléaire et radioprotection » (MSNR)

Mme Elsa Demangeon, chargée de mission à la MSNR

Autorité à la sûreté nucléaire de défense (ASND)

M. François Bugaut, délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense (DSND)

Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) *

M. François Jacq, administrateur général

M. Thibault Taillandier, chargé d’affaires publiques et institutionnelles

M. Stéphane Piednoir, sénateur, président de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst)

Table ronde avec les industriels

 Framatome

M. Thierry Gillot, directeur « Santé, sécurité, sûreté, environnement et protection »

Mme Françoise de Bois, directrice « Autorité réglementaire »

 Société française d’énergie nucléaire (Sfen) *

Mme Valérie Faudon, déléguée générale

M. Bertrand de l'Epinois, président de la section « Sûreté »

M. Thomas Jaquemet, responsable des affaires publiques

 Orano *

Mme Laurence Gazagnes, membre du comité exécutif et directrice « Sûreté, Santé, Sécurité et Environnement & Industrialisation » des projets du groupe

Table ronde d’associations

 Nuclear Transparency Watch (NTW)

M. Julien Dewoghélaëre, chargé de projet

M. Malcolm de Butler, coordinateur

 France Nature Environnement (FNE) *

M. Guillaume Blavette, membre du réseau énergie

 Réseau « Sortir du nucléaire » (RSN) *

Mme Marion Rivet, chargée de plaidoyer

Table ronde des acteurs SMR (Small Modular Reactor)

 Hexana

M. Paul Gauthé, cofondateur et directeur technique

 Jimmy *

M. Antoine Guyot, président-directeur général et cofondateur

 Stellaria

M. Guillaume Campioni, directeur technique

M. Jacques Repussard, ancien directeur général de l’IRSN

M. Mickaël Mangeon, chercheur associé au laboratoire « Environnement, Ville, Société » (EVS unité mixte de recherche 5600 du Centre national de la recherche scientifique)

M. André-Claude Lacoste, ancien président de l’ASN

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie

Audition conjointe d’anciens membres de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst)

M. Jean-Yves Le Déaut, ancien député, ancien président

M. Claude Birraux, ancien député, ancien premier vice-président

M. Cédric Villani, ancien député, ancien président

Électricité de France (EDF) *

M. Bernard Salha, directeur de la recherche et développement

Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) *

M. Louis-Michel Guillaume, directeur général adjoint délégué pour les missions relevant de la défense et de la sécurité nationale

M. Patrice Bueso, directeur de la stratégie

Mme Emmanuelle Mur, responsable des relations institutionnelles

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.


  1  

   liste des personnes auditionnées
par M. Antoine armand, rapporteur pour avis
de la commission des affaires économiques

M. Vincent Berger, haut-commissaire à l'énergie atomique

Table ronde représentants des personnels de l’Institut de radioprotection et de sûreté (IRSN)

M. Philippe Bourachot, délégué syndical central CGT

M. Luc Codron, délégué syndical central CFE-CGC

M. Pascal Cuendet, délégué syndical CFE-CGC

M. François Jeffroy, délégué syndical central CFDT

Mme Névéna Latil Querrec, déléguée syndicale CGT

Mme Tatiana Taurines, déléguée syndicale centrale CFDT

Table ronde des représentants du personnel au comité social d’administration de proximité (CSAP) de l’Autorité de sûreté
nucléaire (ASN)

Mme Amélie Gagnaire, inspectrice à la direction des déchets, des installations de recherche et du cycle (ASN Montrouge)

Mme Charlotte Guenault, inspectrice à la direction des centrales nucléaires (ASN Montrouge)

M. Jonathan Ruille, inspecteur à la direction des déchets, des installations de recherche et du cycle (ASN Montrouge)

M. Kalilou Thiam, inspecteur à la division ASN de Bordeaux

M. Sébastien Cizaire, représentant du personnel UNSP-FO et membre du CSAP

Table ronde « commande publique »

 Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) *

M. Pierre-Marie Abadie, directeur général

Mme Gaëlle Saquet, secrétaire générale

 Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) *

M. François Jacq, administrateur général

 Électricité de France (EDF) *

M. Michaël Varescon, chef du pôle nucléaire de la direction juridique énergies

Mme Karine Hamon, directrice juridique achats

Mme Véronique Loy, directrice adjointe des affaires publiques

 

Autorité de sûreté nucléaire (ASN)

M. Bernard Doroszczuk, président

M. Olivier Gupta, directeur général

Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) *

M. Jean-Christophe Niel, directeur général

Mme Karine Herviou, directrice générale adjointe en charge de la sûreté nucléaire

M. Patrice Bueso, directeur de la stratégie

Mme Emmanuelle Mur, responsable des relations institutionnelles

Table ronde « services ministériels »

 Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique – Direction des affaires juridiques (DAJ)

M. Raphaël Arnoux, sous-directeur du droit de la commande publique

 Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)

M. Guillaume Bouyt, sous-directeur de l'industrie nucléaire

 Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

Mme Anne Cécile Rigail, cheffe du service des risques technologiques

 Délégation interministérielle au nouveau nucléaire (DINN) :

M. Joël Barre, délégué interministériel

M. Pierre Guillot, responsable juridique et régulation

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.


  1  

   LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

Par ordre alphabétique

M. François Bugaut, Délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense

Groupement des industriels français de l’énergie nucléaire (GIFEN) *

Orano *

Réseau Sortir du nucléaire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques


([1]) https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/rapports/ots/l16b1519_rapport-information.pdf

([2]) Rapport particulier de la Cour des comptes sur l’IRSN (exercices 2007 à 2012), juin 2014. 

([3]) Rapport particulier de la Cour des comptes sur l’IRSN (exercices 2007 à 2012), juin 2014.

([4]) Rapport particulier de la Cour des comptes sur l’IRSN (exercices 2007 à 2012), juin 2014.

([5]) Rapport au nom de l’Opecst sur les conséquences d’une éventuelle réorganisation de l’ASN et de l’IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, M. Jean‑Luc Fugit, député, et M. Stéphane Piednoir, sénateur, 11 juillet 2023.

([6]) Décision n° 2018-DC-0644 de l’Autorité de sûreté nucléaire du 9 octobre 2018 portant adoption du règlement intérieur de l’Autorité de sûreté nucléaire

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000038057353

([7]) https://www.irsn.fr/sites/default/files/2023-02/IRSN_Charte-ethique-deontologie_122022.pdf  

([8]) Rapport de l’Opecst sur les conséquences d’une éventuelle réorganisation de l’ASN et de l’IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, MM. Jean‑Luc Fugit, député, et Stéphane Piednoir, sénateur, 11 juillet 2023.

([9]) Article L. 592-30 du code de l’environnement.

([10]) Article L. 592-41 du code de l’environnement.

([11]) https://www.asn.fr/tout-sur-l-asn/commission-des-sanctions

([12]) Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023.

([13]) Voir pp. 130 et 131 du rapport annuel 2021 et p. 132 du rapport annuel 2022.

([14]) Article 2 de la décision n° 2018-DC-0650 de l’Autorité de sûreté nucléaire du 6 novembre 2018 relative au comité scientifique auprès de l’Autorité de sûreté nucléaire.

([15]) Conseil constitutionnel, décision n° 2008-564 DC du 19 juin 2008.

([16]) http://www.hctisn.fr/IMG/pdf/6-_avis_hctisn_vf_suite_pleniere_19_09_cle844811.pdf  

([17]) Loi n° 83-609 du 8 juillet 1983 portant création d’une délégation parlementaire dénommée Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

([18]) Rapport de l’Opecst sur le contrôle des équipements sous pression nucléaires : le cas de la cuve du réacteur EPR, MM. Jean-Yves Le Déaut, député, et Bruno Sido, sénateur, 9 juillet 2015.

([19]) Rapport de l’Opecst sur la sûreté des équipements sous pression nucléaires, MM. Jean-Yves Le Déaut, député, et Bruno Sido, sénateur, 9 mars 2017.

([20]) Rapport de l’Opecst sur les drones et la sécurité des installations nucléaires, MM. Jean-Yves Le Déaut, député, et Bruno Sido, sénateur, 29 janvier 2015.

([21]) Rapport de l’Opecst sur les conséquences d’une éventuelle réorganisation de l’ASN et de l’IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, MM. Jean‑Luc Fugit, député, et Stéphane Piednoir, sénateur, 11 juillet 2023.

([22]) Décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986

([23]) Ordonnance n° 45-2563 du 18 octobre 1945 instituant un Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives.

([24]) Décret n° 2016-311 du 17 mars 2016 relatif à l’organisation et au fonctionnement du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives.

([25]) Décret n° 2023-1383 du 30 décembre 2023 relatif au conseil de politique nucléaire et au haut-commissaire à l’énergie atomique.

([26]) Avis n° 296 (2023-2024) de M. Patrick Chaize, déposé le 30 janvier 2024.

([27]) Article L. 100-1 A du code de l’énergie.

([28]) Article D. 142-21 du code de l’énergie.

([29]) Rapport d’enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France, n° 1028, déposé le 30 mars 2023.

([30]) Voir la liste des emplois et fonctions en annexe de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

([31]https://www.senat.fr/fileadmin/Office_et_delegations/OPECST/Actualites/OPECST_2023_Conclusion_CSN_VF1-1.pdf  

([32]) Voir articles L. 1211-1 et L. 1212-1 du code de la commande publique pour la définition des pouvoirs adjudicateurs et des entités adjudicatrices.

([33]) Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

([34]) Étude d’impact du présent projet de loi, p. 179.

([35]) Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

([36]) Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.

([37]) Article 26 de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte, dite loi « industrie verte ».

([38]) Conseil d’État, 11 août 2009, Communauté urbaine Nantes métropole, n° 319949.

([39]) L’article L. 593-2 du code de l’environnement liste 5 grands types d’INB : les réacteurs nucléaires, les installations de préparation, d’enrichissement, de fabrication, de traitement ou d’entreposage de combustibles nucléaires ou de traitement, d’entreposage ou de stockage de déchets radioactifs, les installations contenant des substances radioactives ou fissiles, les accélérateurs de particules et les centres de stockage en couche géologique profonde.

([40]) Avis n° 296 précité.

([41]) Marché portant sur des travaux et sur des fournitures ou des services ; marché ayant pour objet des services et des fournitures.

([42]) Les accords-cadres, avril 2019.

([43]) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([44]) Conseil d’État, 24 juin 2011, Ministre de l’écologie, n° 347720.

([45]) Décision n° 2020-807 DC du 3 décembre 2020.

([46]) Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), 29 avril 2021, aff. C-847/19 P.

([47]) Décision de la Commission SA.58207.

([48]) CJUE, 7 septembre 2023, aff. C-601/21.

([49]) Le même article L. 591-1 définit la sûreté nucléaire comme « l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets ».

([50]) CC, décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, § 28

([51]) « Parmi les opérations liées à la réalisation d’un réacteur électronucléaire, la construction des bâtiments, y compris leurs fondations, destinés à recevoir des combustibles nucléaires ou à héberger des matériels de sauvegarde ne peut être entreprise qu’après la délivrance de l’autorisation de création ».

([52]) Pour rappel l’article L. 591-1 du code de l’environnement définit ainsi la sécurité nucléaire et deux de ses deux principaux piliers, la sûreté nucléaire et la radioprotection :

« La sécurité nucléaire comprend la sûreté nucléaire, la radioprotection, la prévention et la lutte contre les actes de malveillance ainsi que les actions de sécurité civile en cas d’accident.

« La sûreté nucléaire est l’ensemble des dispositions techniques et des mesures d’organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l’arrêté et au démantèlement et des installations nucléaires de base ainsi qu’au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d’en limiter les effets.

« La radioprotection est la protection contre les rayonnements ionisants, c’est-à-dire l’ensemble des règles, des procédures et des moyens de prévention et de surveillances visant à empêcher ou à réduire les effets nocifs des rayonnements ionisants produits sur les personnes, directement ou indirectement, y compris par les atteintes portées à l’environnement. »

([53]) Loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes et loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

([54]) Au sein de la  DEND, une équipe est chargée spécifiquement de la défense et de la sécurité, apportant un appui technique aux services du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (HFDS MTECT), autorité en charge de la prévention contre les actes de malveillance des installations nucléaires civiles, ou intervenant auprès du comité technique Euratom et du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère de l’industrie. Elle sera également transférée au CEA et rattachée à l’ASND et son chef deviendra l’un des adjoints du délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les installations et activités intéressant la défense (DSND).

([55]) À savoir des contrats doctoraux de droit privé (article L. 412-3 du code de la recherche), des contrats post doctoraux (L. 412-4), des contrats liés à un projet ou une opération de recherche (L. 431-4), des contrats de chercheurs docteurs « à objet défini de recherche » (L. 431-5) et des contrats de droit public permettant de recruter un agent public (L. 431-6).

([56]) L’article 15 dispose toutefois que l’article L. 592-12-1 relatif au comité social d’administration de la future autorité (voir l’article 6 du projet de loi) n’entrera en vigueur qu’à compter de la date à laquelle les agents publics bénéficieront de plein droit du dispositif d’activités sociales et culturelles géré par ce comité, et au plus tard le 1er juillet 2027.

Quant aux nouveaux rôles et statut du haut-commissaire à l’énergie atomique (voir le commentaire de l’article 12), ils seront d’application immédiate.

([57]) Voir le planning des prochaines échéances d’expertise et de décision pour l’ASN et l’IRSN publié dans la note L’essentiel résumant le rapport de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur le présent projet de loi : https://www.senat.fr/rap/l23-300/l23-300-syn.pdf

([58]) Art.12. Interdit de siéger et participer à une délibération, une vérification ou un contrôle en cas de conflit d’intérêts, ou d’existence d’un tel intérêt dans les 3 années précédentes ; en cas d’exercice de fonctions ou d’un mandat présent ou dans les 3 dernières années au sein d’une personne morale concernée ; ou dans le cas où il représente ou a représenté sur la même période une des parties intéressées.

Art.13. Le règlement intérieur de l’autorité détermine les règles déontologiques applicables à ses personnels, et le cas échéant à ses collaborateurs ou experts.

Art.14. Le règlement intérieur de l’autorité précise les règles d’organisation, de fonctionnement et de déontologie en son sein. Il est publié au JO.

([59]) « Art. L. 592-47. – L’IRSN contribue à l’information du public. Lorsqu’ils ne relèvent pas de la défense nationale, l’institut publie les avis rendus sur saisine d’une autorité publique ou de l’Autorité de sûreté nucléaire, en concertation avec l’autorité concernée, et organise la publicité des données scientifiques résultant des programmes de recherche dont il a l’initiative. »

([60]) Article L. 2261-14 du code du travail.

([61]) Selon l’étude d’impact : 1 744 salariés de l’IRSN et, à l’ASN, 381 fonctionnaires, 77 agents contractuels de droit public et 278 agents mis à disposition de l’ASN.

([62]) Amendements identiques COM-89 de M. Chaize et COM-7 de M. Martin.

([63]) « Tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».

([64]) Décision n° 98-399 DC du 5 mai 1998.

([65]) Ordonnance n° 2018-359 du 16 mai 2018 fixant les modalités de transfert des personnels administratifs des juridictions mentionnées au 1° du I de l’article 109 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et celles de leur accès aux corps des services judiciaires ou aux corps communs du ministère de la justice

([66]) Conseil constitutionnel, décision n° 2020-800 DC du 11 mai 2020.

([67])  Cette compétence ne figure cependant pas formellement parmi celles de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire mentionnées à l’article 36 du Règlement de l’Assemblée nationale.