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N° 2634

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 mai 2024.

 

 

RAPPORT

FAIT

 

AU NOM DE LA COMMISSION SPÉCIALE ([1]) CHARGÉE D’EXAMINER LE PROJET DE LOI relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie,

Par M. Olivier FALORNI,

Rapporteur général

et

Mme Laurence CRISTOL, Mme Caroline FIAT,
Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et M. Didier MARTIN,

Rapporteurs thématiques

Tome I

AVANT-PROPOS, Commentaire des articles ET ANNEXES

 

——

 

Voir le numéro :

 Assemblée nationale :  2462.


La commission spéciale est composée de :

Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente

Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Patrick Hetzel, M. Laurent Panifous et M. Jean-François Rousset, vice-présidents

Mme Chantal Bouloux, Mme Geneviève Darrieussecq, M. François Gernigon et Mme Frédérique Meunier, secrétaires

M. Olivier Falorni, rapporteur général

Mme Laurence Cristol, Mme Caroline Fiat, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et M. Didier Martin, rapporteurs thématiques

Mme Farida Amrani (du 4 mai au 13 mai 2024), M. Thibault Bazin, M. Christophe Bentz, Mme Anne Bergantz, M. Louis Boyard (jusqu’au 10 avril 2024), M. Hadrien Clouet, M. Paul-André Colombani, Mme Bérangère Couillard, M. Charles de Courson, Mme Christine Decodts, M. Stéphane Delautrette, M. Jocelyn Dessigny, M. Pierre Dharréville, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Karen Erodi, Mme Sophie Errante, Mme Martine Etienne (du 11 avril au 3 mai 2024), Mme Elsa Faucillon, M. Emmanuel Fernandes, M. Thierry Frappé, Mme Annie Genevard, M. Raphaël Gérard (jusqu’au 13 mai 2024), M. Joël Giraud, Mme Justine Gruet, M. Jérôme Guedj, M. David Habib (jusqu’au 15 mai 2024), Mme Marine Hamelet, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, M. Philippe Juvin, Mme Emeline K/Bidi, Mme Julie Laernoes (jusqu’au 10 mai puis à compter du 14 mai 2024), M. Gilles Le Gendre, Mme Élise Leboucher, M. Hervé de Lépinau, Mme Brigitte Liso, Mme Christine Loir, Mme Marie-France Lorho, Mme Lise Magnier, M. Christophe Marion, M. Damien Maudet (le 14 mai 2024) M. Thomas Ménagé, Mme Emmanuelle Ménard  compter du 16 mai 2024), M. Yannick Neuder, M. Julien Odoul, Mme Anne-Laurence Pétel (à compter du 14 mai 2024), Mme Michèle Peyron, M. Sébastien Peytavie, M. René Pilato, Mme Christine Pires Beaune, Mme Lisette Pollet, M. Jean-Pierre Pont, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Cécile Rilhac, Mme Sandrine Rousseau (du 11 mai au 13 mai 2024), M. Michel Sala (à compter du 15 mai 2024), Mme Danielle Simonnet, M. Nicolas Turquois, M. David Valence, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, Mme Anne-Cécile Violland, M. Léo Walter

 

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

Avant-propos

Commentaire des articles

Titre Ier Renforcer les soins d’accompagnement, les soins palliatifs et les droits des malades

Article 1er Définition des soins palliatifs et d’accompagnement

Article 1er bis (nouveau) Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement

Article 1er ter (nouveau) Crédits de la stratégie décennale des soins d’accompagnement

Article 1er quater (nouveau) Renforcement de la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie

Article 1er quinquies (nouveau) Rapport sur l’offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues

Article 1er sexies (nouveau) Rapport sur le déploiement des soins d’accompagnement

Article 2 Création des maisons d’accompagnement

Article 2 bis (nouveau) Rapport sur le coût et sur les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale

Article 3 Plan personnalisé d’accompagnement

Article 4 Renforcement de l’utilisation et de l’accessibilité des directives anticipées

Article 4 bis (nouveau) Traçabilité de la sédation profonde et continue jusqu’au décès

Article 4 ter (nouveau) Rapport sur l’application de la loi Claeys-Leonetti et la politique de développement des soins palliatifs

Titre II Aide à mourir

Chapitres Ier et II Définition et conditions d’accès

Article 4 quater (nouveau) Modification de l’intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique

Articles 5, 5 bis et 6 Définition et conditions d’accès de l’aide à mourir

Chapitre III Procédure

Article 7 Demande d’accès à l’aide à mourir

Article 8 Procédure d’examen de la demande d’aide à mourir jusqu’à la prescription de la substance létale

Article 9 Détermination de la date d’administration de la substance létale et droits de la personne

Article 10 Circuit de préparation et de délivrance de la substance létale

Article 11 Accompagnement de la personne pendant l’administration, modalités de cette administration et devenir de la substance létale non utilisée

Article 12 Fin des procédures

Article 13 Création d’un système d’information dédié au suivi de la procédure

Article 14 Recours devant le juge administratif

Article 15 Mesures réglementaires d’application

Chapitre IV Clause de conscience

Article 16 Clause de conscience, responsabilité du chef d’établissement sanitaire ou médico-social et déclaration de professionnels auprès de la commission

Chapitre V Contrôle et évaluation

Article 17 Création d’une commission de contrôle et d’évaluation

Article 18 Évolution des missions de la Haute Autorité de santé et de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, et insertion des produits destinés à l’aide à mourir dans un circuit spécifique et sécurisé

Chapitre V bis (nouveau) Dispositions pénales

Article 18 bis (nouveau) Délit d’entrave à l’aide à mourir

Chapitre VI Dispositions diverses

Article 19 Prise en charge par l’assurance maladie des frais exposés dans le cadre de la mise en œuvre de l’aide à mourir

Article 20 Neutralisation des dispositions du code des assurances et de la mutualité en cas de mise en œuvre de l’aide à mourir

Article 21 Habilitation à légiférer par ordonnance pour l’extension et l’adaptation des dispositions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à WallisetFutuna, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte

Annexes

Annexe n°1 : Liste des personnes auditionnées par la commission spéciale

Annexe n°2 : Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

ANNEXE N°3 : liste des contributions Écrites reçues par la commission spÉciale

Annexe N°4 : textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen DU PROJET de loi

 

   Avant-propos

Le 2 avril 2023, la Convention citoyenne sur la fin de vie achevait ses travaux à l’issue de neuf sessions de travail. Conformément à l’engagement pris par le Président de la République en 2022, elle a réuni pendant trois mois 184 citoyens tirés au sort sur la base de critères représentatifs de la société française. Ces derniers se sont très majoritairement prononcés en faveur du développement des soins palliatifs et de l’ouverture d’une aide active à mourir ([2]).

Ces travaux se sont inscrits dans le sillage de l’avis 139 du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) ([3]). Dans cet avis, le Comité considérait pour la première fois que, si le législateur venait à s’emparer de ce sujet, « il existe une voie pour une application éthique d’une aide active à mourir, à certaines conditions strictes ». Quelques mois plus tard, la mission d’évaluation de la loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « loi Claeys-Leonetti », rejoignait ces conclusions en soulignant que « le cadre législatif actuel n’apporte pas de réponses à toutes les situations de fin de vie, en particulier lorsque le pronostic vital n’est pas engagé à court terme » ([4]).

Au cours de ces dernières décennies, des situations humaines dramatiques ont régulièrement relancé le débat sur la fin de vie qui a trouvé une caisse de résonnance au Parlement. Le législateur est intervenu à différentes reprises pour affirmer la prise en considération de l’autonomie et de la volonté des malades en fin de vie, rechercher le meilleur apaisement possible et consacrer le principe du respect de sa dignité.

La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite « loi Kouchner », a consacré le droit de toute personne malade, consciente et en capacité d’exprimer sa volonté de manière libre et éclairée, de refuser une investigation ou un traitement, même si ce refus est susceptible de mettre sa vie en danger. Elle peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin.

Depuis la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite « loi Leonetti », les actes relevant de l’obstination déraisonnable sont interdits dès lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie.

L’instauration des directives anticipées par cette même loi a permis de mieux connaître la volonté des patients dans l’hypothèse où il ne serait plus en mesure de l’exprimer. Depuis 2016, les directives anticipées s’imposent au médecin sauf en cas d’urgence vitale ou si ces directives anticipées sont manifestement inappropriées ou conformes à la situation médicale du malade.

Enfin, la loi du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « loi Claeys-Leonetti », a aussi autorisé la mise en œuvre d’une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, pour soulager les souffrances insupportables ou réfractaires aux traitements d’une personne atteinte d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme.

Sous la dernière législature, plusieurs propositions de loi ont été déposées à l’Assemblée nationale et au Sénat pour mieux prendre en compte la volonté des malades et proposer la légalisation d’une aide active à mourir. Bien qu’aucune de ces initiatives ne soit parvenue à la fin du processus législatif, on peut néanmoins rappeler que l’Assemblée nationale avait adopté en séance publique, le 8 avril 2021, l’article 1er d’une proposition de loi portée par votre rapporteur général qui définissait les conditions d’accès à une « assistance médicalisée active à mourir » ([5]).

*

Trois ans plus tard, le présent projet de loi complète l’édifice législatif élaboré au cours des dernières décennies. À l’instar d’autres pays européens qui ont franchi le pas depuis le début des années 2000 (Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, Espagne, Autriche, etc.) ([6]), il entend permettre la mise en place d’une « aide à mourir ». Cette notion apparaît plus simple, plus humaine et plus appropriée que celles d’« euthanasie », un mot tragiquement souillé par l’Histoire, ou de « suicide assisté » qui crée de la confusion, au regard de la définition donnée par l’article 5 du projet de loi puisqu’elle couvre les deux modalités d’administration de la substance létale.

Pendant dix jours, la commission spéciale a entendu une grande diversité d’acteurs au cours de trente-cinq heures d’auditions organisées à l’Assemblée nationale, avec des approches souvent différentes du sujet, afin d’acquérir une vision globale de l’application de la loi. Ont notamment été auditionnés la ministre du travail, de la santé et des solidarités, le président et les rapporteurs de l’avis du CCNE précité, des professionnels de santé (médecins, infirmiers, aides‑soignants), des représentants d’institutions ou d’organisations, des représentants des sociétés savantes, des associations actives sur le sujet de la fin de vie ou des associations de bénévoles accompagnant les malades, des fédérations d’établissements ou d’hospitalisation à domicile, des professeures de droit, des philosophes, des représentants des cultes ou encore des obédiences maçonniques.

Dans une ambiance respectueuse de la pluralité des opinions, la commission spéciale a examiné à partir du 13 mai et pendant près de cinquante heures les 1 600 amendements en discussion. Elle a apporté des modifications parfois substantielles au projet de loi, qui repose sur deux piliers déclinés au travers de deux titres.

● Adossé à une stratégie décennale, le titre Ier porte sur le renforcement des soins d’accompagnement, des soins palliatifs et des droits des malades.

L’article 1er rénove et renforce la prise en charge de la fin de vie en intégrant les soins palliatifs dans la notion plus englobante, telle qu’elle a été redéfinie par la commission spéciale, de « soins palliatifs et d’accompagnement », dont il fixe l’objet et les contours. Ce changement de paradigme permet d’envisager la fin de vie dans toutes ses dimensions et de proposer une prise en charge anticipée, adaptée et évolutive, qui s’inscrit dans une démarche palliative initiée précocement, y compris à domicile, et régulièrement réévaluée.

L’article 1er bis concourt à rendre effectif le droit aux soins palliatifs et d’accompagnement. Il donne un cadre législatif à la stratégie décennale des soins d’accompagnement présentée par le Gouvernement. Il dispose que les agences régionales de santé sont garantes de l’effectivité de ce droit et crée une voie de recours devant la juridiction administrative. L’article 1er ter détaille les crédits attribués aux mesures nouvelles résultant de la mise en place de la stratégie décennale des soins d’accompagnement, dont il définit le périmètre budgétaire.

L’article 1er quater comprend plusieurs dispositions renforçant la formation initiale et la formation continue en matière de soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie.

Les articles 1er quinquies et 1er sexies prévoient la remise de rapports au Parlement portant respectivement sur l’offre de soins palliatifs et le nombre de sédations profondes et continues d’une part et, d’autre part, sur une évaluation du déploiement des soins d’accompagnement.

L’article 2 crée une nouvelle catégorie d’établissement social ou médico‑social (ESMS) dénommée « maison d’accompagnement ». Cette structure, intermédiaire entre le domicile et l’hôpital, accueillera et accompagnera les personnes en fin de vie ainsi que leur entourage au sein de petites unités de vie qui proposeront une prise en charge globale et pluridisciplinaire.

L’article 2 bis prévoit la remise d’un rapport sur le coût et les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale.

L’article 3 consacre la création d’un dispositif de coordination autour du patient en instituant et systématisant, dans le cadre de l’annonce du diagnostic d’une affection grave, de proposer au patient la mise en place d’un plan personnalisé d’accompagnement. Il donnera lieu à un temps d’échange dédié à l’anticipation, à la coordination et au suivi des prises en charge sanitaire, psychologique, sociale et médico-sociale de la personne malade et de son entourage afin d’organiser la coordination des prises en charge, dans une démarche de planification anticipée de leurs besoins (« advance care planning »). La commission a adopté plusieurs amendements visant notamment à ce que le patient soit informé de la possibilité de rédiger ou d’actualiser ses directives anticipées et de désigner sa personne de confiance au moment de l’élaboration du plan.

L’article 4 comporte plusieurs mesures d’amélioration des modalités selon lesquelles toute personne peut formuler, par anticipation, ses souhaits en matière de prise en charge médicale. La commission a adopté un amendement afin que les assurés soient informés, lors des rendez-vous de prévention, de la possibilité de rédiger leurs directives anticipées et de désigner leur personne de confiance.

Elle a également précisé qu’une personne peut indiquer dans ses directives anticipées son souhait de recourir à l’aide à mourir, dans l’hypothèse où elle perdrait conscience de manière irréversible. Toutefois, compte tenu du maintien de la nécessité pour le malade de manifester de manière réitérée, jusqu’à l’administration de la substance létale, sa volonté de recourir à l’aide à mourir pour pouvoir effectivement y accéder, une telle disposition resterait sans effet.

En outre, la commission a adopté un amendement tendant à ce que les actes relatifs à la sédation profonde et continue jusqu’au décès fassent l’objet d’une traçabilité (article 4 bis), répondant ainsi à l’une des recommandations de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti. Par ailleurs, l’article 4 ter dispose qu’un rapport évaluant les conditions d’application de cette loi ainsi que la politique de développement des soins palliatifs soit remis au Parlement tous les deux ans.

● Le second titre du projet de loi est relatif à l’aide à mourir.

À l’initiative des rapporteures du titre II et suivant la recommandation du Conseil d’État qui avait rappelé dans son avis du 4 avril dernier que la codification tend à faciliter l’accessibilité et l’intelligibilité des règles de droit, objectif à valeur constitutionnelle ([7]), les dispositions relatives aux articles 5 à 17 ont été insérées dans le code de la santé publique. À cet effet, une nouvelle section dédiée à l’aide à mourir a été créé au sein du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique. En conséquence, l’intitulé de ce chapitre du code a été actualisé pour y faire apparaître explicitement le sujet de la fin de vie (article 4 quater).

Le chapitre I du titre II est consacré à la définition de l’aide à mourir. Aux termes de l’article 5, elle consiste à autoriser et à accompagner une personne qui en a exprimé la demande à recourir à une substance létale, dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles 6 à 15 du projet de loi, afin qu’elle se l’administre ou, lorsqu’elle n’est pas en mesure physiquement d’y procéder, se la fasse administrer par un médecin, un infirmier ou une personne qu’elle désigne. La commission a précisé que cette personne devrait être majeure, se manifester pour le faire, sans possibilité de percevoir aucune rémunération ou gratification à quel titre que ce soit en contrepartie de sa désignation.

En outre, la commission a adopté un amendement précisant que le droit d’avoir « une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance », consacré à l’article L. 1110-5 du code de la santé publique, « comprend celui de bénéficier de l’aide à mourir » (article 5 bis)

Le chapitre II est consacré aux conditions d’accès à l’aide à mourir, définies à l’article 6. Dans la version transmise à l’Assemblée nationale par le Gouvernement, sont éligibles à cette aide les personnes âgées d’au moins 18 ans, de nationalité française ou résidant de façon stable et régulière en France, atteintes d’une affection grave et incurable engageant son pronostic vital à court ou moyen terme, présentant une souffrance physique ou psychologique réfractaire ou insupportable liée à cette affection et aptes à manifester leur volonté de façon libre et éclairée.

Cette dernière condition implique que la personne qui demande une aide à mourir prenne sa décision sans pression, en toute connaissance de cause, c’est-à-dire en ayant conscience de la portée et des conséquences de son choix. Le recours à la notion de volonté met en lumière le caractère central de la décision de la personne dans le processus d’aide à mourir. Il est expressément précisé que les personnes dont une maladie psychiatrique altère gravement le discernement lors de la démarche de demande d’aide à mourir ne peuvent pas être regardées comme manifestant une volonté libre et éclairée.

Pour accéder à l’aide à mourir, la personne doit être atteinte d’une maladie grave et incurable. Comme le souligne l’exposé des motifs du projet de loi, « cela signifie que la personne doit être atteinte d’une maladie qui engage son pronostic vital (maladie grave) et qui ne peut être guérie (maladie incurable). La personne doit voir son pronostic vital engagé à court ou moyen terme du fait de cette pathologie ». La commission spéciale a conservé les deux premières conditions mais est revenue sur la condition relative à l’engagement du pronostic vital à court ou moyen terme. Elle a adopté deux amendements identiques substituant à cette notion celle d’affection grave et incurable « en phase avancée ou terminale ».

À l’initiative de sa présidente, la commission spéciale a également fait évoluer la condition tenant aux souffrances qui doivent être « réfractaires aux traitements » ou « insupportables lorsque la personne ne reçoit pas ou a choisi d’arrêter de recevoir des traitements ». Alors que la rédaction initiale prévoyait que la souffrance, qui doit être liée à l’affection, pouvait être « physique ou psychologique », la commission a modifié ce critère qui repose désormais sur une « souffrance physique accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique ».

Le chapitre III est consacré à l’ensemble de la procédure d’aide à mourir. L’article 7 fixe les conditions de présentation d’une demande d’aide à mourir. Il est notamment précisé que le médecin qui accepte d’examiner cette demande, doit informer la personne sur son état de santé, les perspectives de son évolution, les traitements et les dispositifs d’accompagnement disponibles et lui proposer de bénéficier de soins palliatifs. La commission spéciale a en outre souhaité ajouter une proposition d’orientation vers un psychologue clinicien ou psychiatre et précisé que la demande d’aide à mourir ne pouvait être présentée lors d’une téléconsultation.

L’article 8 définit la procédure d’examen de la demande d’aide à mourir jusqu’à la prescription de la substance létale. Pour procéder à l’appréciation de la situation médicale du malade, le médecin recueille l’avis d’un autre médecin qui ne connait pas la personne, spécialiste de la pathologie de celle-ci, et d’un auxiliaire médical ou d’un aide-soignant qui intervient auprès de la personne ou, à défaut, d’un autre auxiliaire médical. Il peut également recueillir l’avis d’autres professionnels, notamment de psychologues, infirmiers ou aides-soignants, qui interviennent auprès de la personne. La commission spéciale a précisé que le médecin recueillait ces avis dans le cadre d’une procédure collégiale et pluriprofessionnelle et élargi la liste des professionnels pouvant être consultés.

La décision du médecin se prononçant sur la demande d’aide à mourir doit intervenir dans un délai maximum de quinze jours suivant la demande. Après avoir été informée de ce qu’elle pouvait avoir recours à la procédure d’aide à mourir, la personne dispose d’un délai de réflexion, qui ne peut être inférieur à deux jours, avant de confirmer au médecin sa volonté d’accéder à une aide à mourir. La commission spéciale a adopté un amendement pour permettre au médecin d’abréger ce délai, à la demande de la personne, si cela est nécessaire pour assurer la sauvegarde de la dignité de celle-ci. Il n’y a en revanche pas de délai maximal. Cependant, si ce délai de réflexion dépasse trois mois ou si l’aide à mourir n’est pas réalisée dans ce délai, le médecin évalue à nouveau le caractère libre et éclairé de la manifestation de la volonté de la personne.

L’article 9 précise les droits de la personne dans le cadre d’une procédure d’aide à mourir. Si la date retenue est postérieure à un délai de trois mois à compter de la notification de la décision, le médecin devra évaluer à nouveau, à l’approche de cette date, le caractère libre et éclairé de la manifestation de la volonté de la personne. La commission spéciale a toutefois porté ce délai à un an, afin de donner plus de souplesse à la personne pour choisir la date d’administration de la substance létale.

L’article 10 prévoit que lorsque la date de l’administration de la substance létale est fixée, la pharmacie à usage intérieur réalise la préparation magistrale létale et la transmet à une pharmacie d’officine. La commission spéciale a précisé que cette officine doit être désignée par le professionnel de santé en accord avec le patient.

L’article 11 détaille la procédure le jour de la mise en œuvre de l’aide à mourir. Le professionnel de santé doit s’assurer que la personne souhaite procéder à l’administration de la substance létale et surveiller cette administration. L’administration de la substance létale est effectuée par la personne elle‑même sauf si elle n’est pas en mesure d’y procéder physiquement. La commission spéciale a toutefois supprimé cette dernière condition en indiquant que si la personne a désigné une personne majeure qui a accepté cette responsabilité, l’administration est effectuée par cette personne sous le contrôle du professionnel de santé. À défaut, l’administration de la substance létale est réalisée par le professionnel de santé présent.

L’article 12 précise les cas de figure dans lesquels il peut être mis fin à la procédure, tandis que l’article 13 indique que les différents actes qui la jalonnent donnent lieu à un enregistrement dans un système d’information afin d’assurer la traçabilité de chaque procédure d’aide à mourir. Aux termes de l’article 14, la décision du médecin se prononçant sur la demande d’aide à mourir ne peut être contestée que par la personne qui en fait l’objet. Cette disposition a pour conséquence d’interdire tout recours d’un tiers contre une telle décision. Ce contentieux, en dérogation aux règles habituelles de répartition des compétences entre ordres juridictionnels, relève de la juridiction administrative. Enfin, l’article 15 renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer les modalités d’application des dispositions mentionnées ci-avant.

Le chapitre IV est consacré à la clause de conscience. Son article 16 institue une clause de conscience spécifique au profit des professionnels de santé sollicités dans le cadre d’une procédure d’aide à mourir, à l’exception des pharmaciens, assortie d’une obligation d’information et de réadressage. Il garantit aux personnes hospitalisées ou hébergées en établissement social ou médico-social la possibilité de demander une aide à mourir. Il prévoit également que les professionnels de santé disposés à participer à l’aide à mourir se déclarent auprès de la commission d’évaluation et de contrôle.

À cet égard, le chapitre V est consacré aux procédures de contrôle et d’évaluation du dispositif d’accompagnement à l’aide à mourir. L’article 17 prévoit la création d’une commission de contrôle et d’évaluation chargée principalement du contrôle systématique et a posteriori du respect des conditions d’accès et de procédure d’aide à mourir. Cette commission assure également le suivi et l’évaluation de l’aide à mourir par une information annuelle et par des recommandations, ainsi que la gestion du registre des professionnels de santé disposés à participer à l’aide à mourir.

L’article 18 étend le domaine d’intervention de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) aux substances létales utilisées dans le cadre de l’aide à mourir. La HAS est ainsi chargée de définir cette substance et d’établir des recommandations de bonnes pratiques, tandis qu’est prévu un circuit spécifique et sécurisé de distribution des substances utilisées.

L’article 18 bis, qui s’insère dans un chapitre V bis relatif aux dispositions pénales, inséré par la commission spéciale, crée un délit d’entrave à l’aide à mourir, sur le modèle de celui prévu concernant l’interruption volontaire de grossesse (IVG).

Le chapitre VI comporte diverses dispositions permettant d’assurer la mise en œuvre du dispositif. L’article 19 prévoit la prise en charge par l’assurance maladie des frais exposés dans le cadre de la mise en œuvre de l’aide à mourir. L’article 20 vise quant à lui à neutraliser les dispositions législatives du code des assurances et de la mutualité qui prévoient des exclusions de garantie en cas de suicide la première année (ou dans l’année suivant un avenant d’augmentation des garanties) en cas de mise en œuvre de l’aide à mourir. Enfin, l’article 21 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures permettant d’étendre et d’adapter à l’outre-mer le contenu de la loi (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis‑et‑Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte).

*

Légiférer sur la fin de vie exige de l’humilité. L’humilité d’écouter avant de décider. L’humilité de ne pas prétendre avoir la vérité. L’humilité d’avoir des convictions mais pas de certitudes. Mais cela nécessite aussi de la volonté. La volonté de faire plus et de faire mieux pour les malades et leurs proches.

Au fil des ans et des lois, depuis 1999 jusqu’à 2016, deux droits essentiels ont été obtenus. Le droit de ne pas souffrir, car la souffrance n’est pas inévitable et encore moins nécessaire. Le droit de ne pas subir, c’est-à-dire le droit de dire non à l’acharnement thérapeutique. Cela semble aujourd’hui être des évidences, cela ne l’était pas il n’y a pas si longtemps.

Notre devoir est donc de faire de ses droits une réalité, partout et pour tous. Cela passe par le renforcement et le développement massif des soins palliatifs qui sont la réponse primordiale. Mais, comme toute médecine humaine, et malgré le professionnalisme et le dévouement des soignants, ils sont dans certaines circonstances démunis face à certaines souffrances réfractaires ou insupportables. C’est pour cela que ce projet de loi propose un ultime recours, celui d’une aide à mourir pour des malades condamnés par la maladie mais qui ne veulent pas être condamnés à l’agonie.

Une réponse primordiale et un ultime recours. Deux piliers qui ne s’opposent pas mais qui se complètent et s’équilibrent. C’est sur cela que repose ce texte qui a vocation à devenir une grande et belle loi républicaine, de liberté, d’égalité et de fraternité.

 


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   Commentaire des articles

Titre Ier
Renforcer les soins d’accompagnement, les soins palliatifs et les droits des malades

Initialement consacré à « renforcer les soins d’accompagnement et les droits des malades », l’intitulé du titre Ier a fait l’objet d’un amendement adopté par la commission spéciale à l’initiative du rapporteur, M. Didier Martin, afin de mentionner également les soins palliatifs ([8]).

Article 1er
Définition des soins palliatifs et d’accompagnement

Adopté avec modifications

L’article 1er rénove et renforce la prise en charge de la fin de vie en intégrant les soins palliatifs dans la notion plus englobante, telle qu’elle a été redéfinie par la commission spéciale, de « soins palliatifs et d’accompagnement », dont il définit l’objet et les contours. Ce changement de paradigme permet d’envisager la fin de vie dans toutes ses dimensions et de proposer une prise en charge anticipée, adaptée et évolutive, qui s’inscrit dans une démarche palliative engagée précocement, y compris à domicile, et régulièrement réévaluée.

I.   Le droit en vigueur

A.   uNE OFFRE DE SOINS PALLIATIFS STRUCTURée PROGRESSIVEMENT

● Le cadre juridique relatif aux soins palliatifs a été défini et consolidé par le législateur à travers l’adoption de plusieurs grandes lois. Dès 1999 ([9]), celui-ci consacrait ainsi le « droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement » et définissait ces soins, avant de réaffirmer et préciser ces dispositions à travers la loi « Leonetti » en 2005 ([10]) puis la loi dite « Claeys-Leonetti » de 2016 ([11]).

En application de l’article L. 1110‑9 du code de la santé publique, « toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement ». L’article L. 1110‑5 du même code dispose également que « toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur » et précise que « celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée ». Plus globalement, l’article L. 1110‑1 dispose que le « droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne ». Ce cadre législatif trouve également une assise constitutionnelle, au regard notamment de l’alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946 ([12]) ou du principe de sauvegarde de la dignité humaine dont valeur constitutionnelle est reconnue depuis 1994 ([13]).

Les soins palliatifs sont aujourd’hui définis par l’article L. 1110‑10 comme « des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile », précisant qu’ils « visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage ». Comme le souligne l’étude d’impact du projet de loi, cette définition apparaît centrée sur une approche médicale de la prise en charge. Elle relève d’ailleurs que les soins palliatifs sont « très souvent, dans le langage courant, assimilés et réduits aux soins strictement médicaux destinés à traiter la douleur ».

● Le cadre législatif mis en œuvre s’est accompagné d’une politique volontariste de développement des soins palliatifs, laquelle s’est traduite notamment par le déploiement successif de cinq plans nationaux (1999‑2002 ; 2002‑2005 ; 2008‑2012 ; 2015‑2018), le dernier en date portant sur la période 2021‑2024.

Ces mesures ont été soutenues par une dépense publique en nette progression au cours des dernières années. En effet, la Cour des comptes, dans son rapport remis en juillet 2023 à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale ([14]), relève que la dépense publique de soins palliatifs s’élevait à 1,453 milliard d’euros en 2021, soit une augmentation de 24,6 % depuis 2017, principalement imputable aux séjours hospitaliers en unité de soins palliatifs, et observe que l’offre de soins palliatifs a augmenté de près de 30 % depuis 2015.

● Il en résulte, comme le rappelle l’étude d’impact en s’appuyant sur une publication de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ([15]), qu’a pu être développée et structurée une « offre de soins palliatifs qui place désormais la France dans la première moitié du classement des pays de l’OCDE, alors qu’elle était dans la moyenne basse en 2015 ».

B.   UNE OFFRE DE SOINS PALLIATIFS QUI DEMEURE INSUFFISANTE ET HÉTÉROGÈNE

● Le Gouvernement indique que 190 000 patients font aujourd’hui l’objet d’une prise en charge palliative, dont environ 70 000 en hospitalisation à domicile, tandis qu’en 2023 le nombre de soignants spécialisés en soins palliatifs (médecins, infirmiers et aides-soignants) s’élèverait à dix mille ([16]).

Selon le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), la France comptait, en 2021, 7 546 lits hospitaliers en soins palliatifs, dont 1 980 lits en unité de soins palliatifs (LUSP) répartis dans 171 unités de soins palliatifs (USP) et 5 566 lits identifiés de soins palliatifs (LISP) situés dans 904 établissements, ainsi que 420 équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP) ([17]). Les hôpitaux et cliniques privés assurent près d’un quart des soins palliatifs hospitaliers, soit 23 069 séjours en 2023, une proportion stable depuis plusieurs années ([18]).

● Pour autant, comme le souligne le Conseil d’État dans son avis sur le présent projet de loi, « l’offre de soins palliatifs demeure très hétérogène sur le territoire et reste globalement insuffisante ». Ce même constat a été formulé successivement par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) dans son avis 139 du 13 septembre 2022 ([19]), par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale dans son rapport d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti déposé le 29 mars 2023 ([20]), par l’Académie nationale de médecine dans son avis rendu le 27 juin 2023 ([21]) ou encore par la Cour des comptes dans son rapport précité.

La cartographie des soins palliatifs la plus récente, rappelée par la ministre du travail, de la santé et des solidarités au cours de son audition par la commission spéciale, montre que vingt départements ne disposent toujours pas, à ce jour, d’unité de soins palliatifs, en dépit de l’objectif de déploiement de celles-ci sur tout le territoire fixé par les pouvoirs publics. Comme le soulignait la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, en remarquant d’ailleurs le manque de données robustes ([22]), « ce constat questionne l’effectivité de l’accès aux soins palliatifs ».

La Cour des comptes montre que les besoins estimés des personnes majeures en France restent largement non pourvus, surtout à domicile. Dans son rapport, elle estime en effet que « les besoins estimés de soins palliatifs ne seraient couverts qu’à hauteur de 50 % de leur estimation maximale alors même que le droit d’accès aux soins palliatifs, reconnu par la loi Claeys-Leonetti, suppose une couverture de la totalité des besoins ». Cette situation interpelle d’autant plus que ces besoins semblaient connaître une relative stabilisation : ils étaient estimés à 64 % des décès en 2008, soit 335 000 personnes, alors qu’en 2017, les personnes susceptibles de recevoir des soins palliatifs représenteraient 60,6 % des décès, soit 365 273 personnes.

Aussi, la Cour souligne que les progrès réalisés concernant l’offre de soins palliatifs portent essentiellement sur l’hôpital, qu’il s’agisse des LISP ou des USP. Du reste, si 90 780 patients ont bénéficié d’une hospitalisation pour soins palliatifs en 2021, seuls 43 000 patients environ auraient été pris en charge en hospitalisation à domicile (HAD) et 52 000 auraient bénéficié de soins palliatifs en médecine de ville. La Cour estime que le déficit de lits spécialisés persiste et s’élèverait à 4 000 lits la même année, tandis qu’il faudrait environ 200 EMSP extrahospitalières supplémentaires pour couvrir l’ensemble des besoins du territoire.

Cette carence persistante est d’autant plus préoccupante que les perspectives démographiques liées au vieillissement de la population laissent présager une nette progression des besoins de prise en charge palliative. Selon le Gouvernement, les besoins vont augmenter fortement au cours de la prochaine décennie et il faudra être en mesure de prendre en charge près de 250 000 personnes supplémentaires, soit 440 000 personnes, d’ici 2034 ([23]).

● Dans ce contexte, un consensus apparaît aujourd’hui sur la nécessité d’adopter des mesures complémentaires significatives afin de développer les soins palliatifs et de rénover l’accompagnement de la fin de vie. La mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, dans son rapport du 29 mars 2023 précité, soulignait ainsi qu’il « est indispensable de continuer à développer massivement les soins palliatifs afin que les droits des malades prévus par la loi soient pleinement garantis partout en France ».

À cet égard, la Conférence nationale de santé (CNS), dans l’avis qu’elle a remis officiellement le 30 mai 2023 à Mme Agnès Firmin Le Bodo, alors ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé ([24]), qui l’avait saisie, partage « trois convictions essentielles » issues de ses débats :

– la question de la fin de vie est globalement celle de l’accompagnement et ne se réduit pas à la possibilité d’une aide à mourir. Ce débat ne doit pas occulter la problématique plus globale des fins de vie et celle de l’accompagnement sous toutes ses formes (dans le cadre de soins palliatifs, psychologique, de soutien par les aidants et aux aidants, d’appui financier, etc.) ;

– il n’y a pas « une » mais « des » fins de vie, tant les situations sont différentes d’une personne à l’autre, et cette diversité s’accompagne de multiples inégalités qui ne sont pas acceptables ;

– la prise en charge et l’accompagnement des situations de fins de vie sont l’affaire de tous et ne reposent pas seulement sur la médicalisation et l’implication des professionnels. La CNS juge essentiel de rendre plus humaine cette ultime période de la vie et appelle à un réinvestissement sociétal dans l’accompagnement des fins de vie, nécessitant une évolution tant des soignants que des non‑soignants dans le cadre d’une relation de la société à la mort qui doit aussi évoluer.

La Cour des comptes formule quant à elle des recommandations de trois ordres, portant sur l’amélioration des outils d’évaluation et de suivi des besoins et de l’offre de soins palliatifs disponible, sur la réforme de la gouvernance et du pilotage global de la politique de développement de l’accès aux soins palliatifs afin de les rendre plus opérationnels, ainsi que sur l’amélioration de l’accès aux soins palliatifs du point de vue du patient.

Enfin, conformément à une recommandation de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) ([25]) et à la demande du Président de la République, faisant suite à la conclusion des travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie, a été mise en place en juin 2023 une instance de réflexion stratégique chargée d’élaborer une stratégie décennale « soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie ». Dans son rapport conclusif, cette instance, présidée par le professeur Franck Chauvin, définit cinq objectifs stratégiques pour un modèle français de soins d’accompagnement ([26]) :

– permettre un accès équitable aux soins d’accompagnement ;

– favoriser l’anticipation et l’intégration aux autres prises en charge ;

– mobiliser les territoires et les collectivités ;

– impliquer les membres d’un territoire dans la fin de vie et garantir les solidarités ;

– assurer et diffuser des soins d’accompagnement de qualité.

II.   Le dispositif proposé

A.   LE Renforcement des soins palliatifs par leur inTégration dans les soins d’accompagnement

L’article 1er du projet de loi vise à rénover l’approche de la prise en charge de la douleur et de la fin de vie, en intégrant la notion de soins palliatifs, définie à l’article L. 111010 du code de la santé publique, dans celle plus englobante de « soins d’accompagnement ».

Comme le souligne l’étude d’impact du projet de loi, cette notion a fait consensus dans le cadre des concertations menées par l’instance de réflexion stratégique chargée d’élaborer la stratégie décennale « soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie ». Elle permet d’apporter un surcroît d’humanité, en évitant notamment de réduire les personnes à leur maladie ou à leur vulnérabilité.

Sans supprimer la notion de soins palliatifs, dont le Conseil d’État souligne l’intérêt, notamment car celle-ci est connue de tous, cet article introduit un changement de paradigme qui en élargit la portée et souligne que les soins visés ne sont pas exclusivement médicaux. Ainsi, comme le souligne l’exposé des motifs du projet de loi, les soins d’accompagnement ne se résument pas aux soins palliatifs, entendus comme les soins médicaux destinés à traiter la douleur, mais visent à anticiper, prévenir et soulager les souffrances dès l’annonce du diagnostic et aux différents stades de la maladie afin d’améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leur entourage, et de préserver leur dignité et leur bien‑être.

Ils couvrent d’autres soins que les soins palliatifs, tels que les soins de support (prise en charge nutritionnelle, accompagnement psychologique, aide à la pratique d’une activité physique adaptée, etc.) ou encore les soins de confort (musicothérapie, massage, soins socioesthétiques, etc.), et plus largement toutes les mesures et soutiens mis en œuvre pour répondre aux besoins de la personne malade, médicaux ou non médicaux, de nature physique, psychique ou sociale, et à ceux de ses proches aidants.

● L’article 1er propose dès lors une rédaction rénovée et étoffée de l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique, articulée autour de la notion de soins d’accompagnement (4° du I).

Cette rédaction dispose que les soins d’accompagnement mettent en œuvre le droit fondamental à la protection de la santé mentionné à l’article L. 1110‑1 et qu’ils ont pour objet, à l’initiative et sous la conduite des médecins et des professionnels de l’équipe de soins, d’offrir une prise en charge globale de la personne malade afin de préserver sa dignité, sa qualité de vie et son bien‑être.

L’article 1er souligne explicitement l’enjeu d’une démarche palliative initiée précocement et régulièrement réévaluée pour améliorer la qualité de vie du patient jusqu’à la mort, en précisant que, dans le respect de la volonté de la personne, ces soins anticipent, évaluent et procurent, dès le début de la maladie puis de façon renouvelée :

– une réponse aux besoins physiques, dont le traitement de la douleur, ainsi qu’aux besoins psychologiques et sociaux de la personne malade ;

– des soins palliatifs, délivrés de façon active et continue, destinés à soulager sa douleur et à apaiser sa souffrance psychique ;

– un soutien à l’entourage de la personne malade.

Le principe d’une pratique de ces soins par une équipe pluridisciplinaire, comme c’est le cas pour les soins palliatifs en application de l’article L. 1110‑10 en vigueur, est quant à lui réaffirmé. Il est en outre précisé que ces soins sont prodigués quel que soit le lieu de résidence ou de soins de la personne malade.

● Pour tenir compte de la nouvelle rédaction de l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique et intégrer la notion de soins d’accompagnement, l’article 1er opère par ailleurs les coordinations nécessaires aux articles L. 1110‑5‑1, L. 1110‑8, L. 1110‑9, L. 1111‑2 et L. 1111‑4 du même code (respectivement 1°, 2°, 3°, 5° et 6° du I) ainsi qu’aux articles L. 311‑1 et L. 311‑8 du code de l’action sociale et des familles (respectivement 1° et 2° du II).

B.   Un projet de loi accompagné d’une ambitieuse stratégie décennale des soins d’accompagnement

Les rapporteurs, qui ont pu entendre les interrogations suscitées quant au déploiement de moyens humains et budgétaires pour faire face à l’ambition portée par cet article et, plus globalement, par le projet de loi, prennent note de plusieurs éléments de nature à garantir la robustesse et l’ampleur de l’action publique visée.

D’une part, ils soulignent que si, comme le relève le Conseil d’État, des dispositions législatives sont insuffisantes à elles seules pour combler le retard constaté en matière de prise en charge palliative, la plupart des mesures nécessaires ne relèvent pas du domaine de la loi. Par conséquent, il n’est nullement surprenant de ne pas trouver l’intégralité de ces mesures dans le présent projet de loi.

D’autre part, ils relèvent que ce projet de loi est accompagné du déploiement d’une ambitieuse stratégie décennale des soins d’accompagnement, qui a été présentée par la ministre au cours de son audition et publiée le même jour sur le site du ministère ([27]). Cette stratégie, préfigurée par le rapport Chauvin, s’articule autour de trente mesures répondant à quatre objectifs :

– un accès plus juste aux soins d’accompagnement, comprenant notamment la création de maisons d’accompagnement (article 2 du projet de loi) et de plans personnalisés d’accompagnement (article 3) ;

– la mobilisation de l’ensemble de la société, et notamment des aidants et des bénévoles ;

– le développement de la formation et de la recherche, en créant notamment des filières universitaires et un diplôme d’études spécialisé de médecine palliative et soins d’accompagnement ;

– le pilotage de tous les acteurs, en créant un comité scientifique d’orientation de la recherche et de formulation des bonnes pratiques ainsi qu’une instance de gouvernance, de pilotage et d’évaluation de la stratégie.

Sur le plan budgétaire, la stratégie décennale des soins d’accompagnement se traduira par un investissement décisif, à hauteur de 1,1 milliard d’euros de mesures nouvelles, soit une hausse de 66 % des moyens alloués aux soins d’accompagnement sur la période 2024‑2034, pour répondre à une hausse de 16 % des besoins. La dépense publique de soins palliatifs, qui s’élève à 1,6 milliard d’euros en 2023, passera ainsi à 2,7 milliards d’euros en 2034.

La mise en œuvre de cette stratégie, qui commence dès 2024 et précédera l’entrée en vigueur du présent projet de loi, produira des effets d’autant plus précoces et significatifs que la programmation budgétaire présentée prévoit une forte impulsion dès les premières années.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté plusieurs amendements précisant la définition des soins d’accompagnement et leur articulation avec les soins palliatifs, explicitant son ambition de voir les soins palliatifs complétés et non supprimés par la création des soins d’accompagnement.

La commission spéciale a ainsi adopté, en cohérence avec l’amendement du rapporteur Didier Martin ayant d’emblée modifié l’intitulé du titre Ier pour qu’il inclue également les soins palliatifs, un amendement de Mme Geneviève Darrieussecq et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) qui remplace, au présent article 1er, chaque occurrence des « soins d’accompagnement » par les « soins palliatifs et d’accompagnement » ([28]).

La commission spéciale a également adopté plusieurs amendements modifiant l’article L. 1110-10 du code de la santé publique, de façon à garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement ainsi que l’accès à ces soins. Elle a ainsi retenu un amendement de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES selon lequel les soins palliatifs et d’accompagnement « garantissent » le droit fondamental à la protection de la santé, plutôt qu’ils ne le « mettent en œuvre » ([29]). Par des amendements identiques de M. Yannick Neuder et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains d’une part ([30]), et de M. Jean-Pierre Taite (groupe Les Républicains) d’autre part ([31]), la commission a précisé que la prise en charge en soins palliatifs et d’accompagnement est accessible sur l’ensemble du territoire national. Un amendement de M. Jérôme Guedj et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés a ajouté que la répartition des soins palliatifs et d’accompagnement sur le territoire national garantit un accès équitable aux personnes malades ([32]). Par ailleurs, un amendement de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([33]) a précisé que ces soins sont aussi prodigués en milieu carcéral, le cas échéant selon des modalités adaptées.

Enfin, la commission spéciale a apporté des précisions quant à l’objet des soins palliatifs et d’accompagnement, défini au même article L. 1110‑10 du code de la santé publique. En adoptant un amendement de Mme Monique Iborra et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, sous-amendé par le rapporteur Didier Martin pour des raisons légistiques ([34]), elle a prévu que ces soins doivent permettre la rédaction de directives anticipées. Un amendement de Mme Bérangère Couillard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance a ajouté que ces soins s’adaptent à l’évolution de la situation et aux aspirations du patient ([35]). En conséquence d’un amendement de Mme Sophie Errante et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([36]), un annuaire des structures de soutien, reconnues d’intérêt général, est fourni au malade et à sa famille dès le début de la prise en charge. Deux amendements identiques de M. Yannick Neuder et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains d’une part, et de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires d’autre part ([37]), énoncent quant à eux que les soins palliatifs et d’accompagnement peuvent s’appuyer sur l’intervention des bénévoles mentionnés à l’article L. 1110‑11.

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Article 1er bis (nouveau)
Garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement

Introduit par la commission

L’article 1er bis concourt à rendre effectif le droit aux soins palliatifs et d’accompagnement. Il donne un cadre législatif à la stratégie décennale des soins d’accompagnement présentée par le Gouvernement. Il dispose que les agences régionales de santé sont garantes de l’effectivité de ce droit et crée une voie de recours devant la juridiction administrative.

Le présent article résulte de l’adoption par la commission spéciale, contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement, de plusieurs amendements. Il modifie le code de la santé publique de façon à garantir l’effectivité du droit aux soins palliatifs et d’accompagnement.

● Le  comprend une nouvelle rédaction de l’article L. 1110‑9 du code de la santé publique.

Son premier alinéa résulte de l’adoption d’un amendement de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ([38]). Il dispose que le droit de bénéficier de soins palliatifs, au sens de l’article L. 1110‑10 du même code dans sa rédaction résultant de l’article 1er du présent projet de loi, est garanti à toute personne dont l’état de santé le requiert. Il charge les agences régionales de santé de garantir l’effectivité de ce droit qui s’exerce par un recours amiable puis, le cas échéant, par un recours contentieux dans les conditions et selon les modalités déterminées à l’article L. 1110‑9‑1 et par un décret en Conseil d’État.

Son second alinéa résulte de l’adoption d’un amendement de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) ([39]), qui apporte un cadre législatif à la stratégie décennale présentée en complément du présent projet de loi. Il dispose qu’une stratégie décennale des soins d’accompagnement, définie par le Gouvernement et rendue publique, détermine, dans le respect des orientations de la stratégie nationale de santé mentionnée à l’article L. 1411‑1‑1 du code de la santé publique, les objectifs de développement des soins d’accompagnement. Il ajoute que cette stratégie fixe les actions prioritaires à mettre en œuvre et définit l’affectation des moyens correspondants. Un rapport évaluant à mi-parcours la mise en œuvre de la stratégie décennale est remis au Parlement par le Gouvernement.

● Le , qui résulte également de l’amendement précité de M. Thibault Bazin, introduit dans le code de la santé publique un nouvel article L. 1110‑9‑1 disposant que la personne dont l’état de santé le requiert, qui a demandé à bénéficier de soins palliatifs et qui n’a pas reçu, dans un délai fixé par décret, une offre de prise en charge palliative, peut introduire un recours devant la juridiction administrative afin de l’obtenir.

● Le résulte de l’adoption d’un amendement de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES ([40]). En modifiant l’article L. 1434‑2 du code de la santé publique, il intègre l’accès effectif aux soins d’accompagnement parmi les objectifs du schéma régional de santé, lequel figure dans le projet régional de santé.

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Article 1er ter (nouveau)
Crédits de la stratégie décennale des soins d’accompagnement

Introduit par la commission

L’article 1er ter détaille les crédits attribués aux mesures nouvelles résultant de la mise en place de la stratégie décennale des soins d’accompagnement, dont il définit le périmètre budgétaire.

Issu de l’adoption par la commission spéciale, malgré l’avis défavorable du rapporteur et du Gouvernement, d’un amendement de M. Gilles Le Gendre et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([41]), l’article 1er ter porte mention dans le projet de loi des crédits de paiement supplémentaires de la stratégie décennale des soins d’accompagnement, conformément à la programmation présentée en annexe du document publié par le Gouvernement ([42]).

Le présent article précise par ailleurs que le périmètre budgétaire concerné intègre les dépenses relatives à l’hôpital de jour et aux courts séjours, aux séjours en service de médecine générale ou de chirurgie, aux séjours en lits identifiés de soins palliatifs, aux séjours en unité de soins palliatifs, aux journées d’hospitalisation à domicile, aux séjours en soins médicaux et de réadaptation, aux missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (Migac), au fonds d’intervention régional (FIR), dont les équipes mobiles de soins palliatifs et les équipes ressources régionales de soins palliatifs pédiatriques, aux actes des professionnels de santé libéraux, ainsi qu’aux médicaments délivrés en ville et relevant d’un parcours palliatif.

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Article 1er quater (nouveau)
Renforcement de la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement
et à la fin de vie

Introduit par la commission

L’article 1er quater comprend plusieurs dispositions renforçant la formation initiale et la formation continue en matière de soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie.

L’article 1er quater résulte de l’adoption par la commission spéciale, malgré l’avis défavorable du rapporteur et du Gouvernement, de plusieurs amendements relatifs à la formation aux soins palliatifs et d’accompagnement et à la fin de vie.

● Le I modifie le code de l’éducation.

Son  est issu de l’adoption d’un amendement de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires ([43]). En ajoutant un 5° bis au II de l’article L. 631‑1, il dispose qu’un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’accès et les conditions d’obtention du diplôme d’études spécialisées de médecine palliative et de soins d’accompagnement. Il inscrit ce faisant dans le projet de loi la mesure n° 27 de la stratégie décennale présentée par le Gouvernement, qui prévoit la création d’un tel diplôme d’ici le terme de la stratégie.

Son  est issu de l’adoption d’un amendement de Mme Elsa Faucillon et plusieurs de ses collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine ([44]). Il complète le premier alinéa de l’article L. 632‑1 afin que les études médicales théoriques et pratiques comprennent une formation à l’accompagnement de la fin de vie et à l’approche palliative.

● Le II est issu d’un amendement de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) ([45]). Il insère, dans le code de la santé publique, un nouvel article L. 1110‑1‑2 selon lequel les professionnels de santé et du secteur médico-social reçoivent, au cours de leur formation initiale et de leur formation continue, une formation spécifique sur l’évolution des soins d’accompagnement, la prise en charge de la douleur, l’accompagnement de la fin de vie, les dispositifs d’expression de la volonté des malades et l’accueil des personnes en perte d’autonomie et de discernement.

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Article 1er quinquies (nouveau)
Rapport sur l’offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues

Introduit par la commission

L’article 1er quinquies prévoit la remise d’un rapport au Parlement sur l’offre de soins palliatifs et le nombre de sédations profondes et continues.

Le présent article résulte de l’adoption par la commission spéciale d’un amendement de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ([46]), tel que sous‑amendé par le rapporteur Didier Martin ([47]).

Il prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, d’un rapport sur l’offre de soins palliatifs et sur le nombre de sédations profondes et continues, au sens de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie. Les données ainsi recueillies sont agrégées et anonymisées dans les conditions prévues par la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Ce faisant, l’article 1er quinquies donne suite à l’une des propositions formulées par la mission d’évaluation de la loi dite « Claeys-Leonetti » de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, dont les rapporteurs étaient Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, visant à développer la collecte de données et les travaux de recherche sur la fin de vie ([48]).

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Article 1er sexies (nouveau)
Rapport sur le déploiement des soins d’accompagnement

Introduit par la commission

L’article 1er sexies prévoit la remise d’un rapport au Parlement permettant une évaluation du déploiement des soins d’accompagnement.

Le présent article résulte de l’adoption par la commission spéciale, en dépit d’avis défavorables du rapporteur et du Gouvernement, d’un amendement de Mme Elsa Faucillon et M. Pierre Dharréville (groupe Gauche démocrate et républicaine) ([49]). Il prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport annuel permettant une évaluation du déploiement des soins d’accompagnement définis à l’article 1er de la présente loi.

Il est précisé que cette évaluation vise à mesurer, sur l’ensemble du territoire, les besoins recensés en matière de soins d’accompagnement, notamment en soins palliatifs, ainsi que la nature des réponses apportées à ces besoins et, le cas échéant, le nombre et la nature des besoins demeurés non couverts. Le rapport formule, le cas échéant, des propositions visant à garantir effectivement le droit de tous aux soins d’accompagnement.

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Article 2
Création des maisons d’accompagnement

Adopté avec modifications

L’article 2 crée une nouvelle catégorie d’établissement social ou médico‑social (ESMS) dénommée « maison d’accompagnement ». Cette structure, intermédiaire entre le domicile et l’hôpital, accueillera et accompagnera les personnes en fin de vie ainsi que leur entourage au sein de petites unités de vie qui proposeront une prise en charge globale et pluridisciplinaire.

I.   Le droit en vigueur

 L’offre de soins palliatifs est structurée sur le territoire en trois niveaux de prise en charge précisés par l’instruction ministérielle du 21 juin 2023 relative à la poursuite de la structuration des filières territoriales de soins palliatifs dans la perspective de la stratégie décennale 2024‑2034 ([50]). Une graduation est ainsi opérée selon les situations stables et non complexes ou nécessitant des ajustements ponctuels, les situations à complexité médico-psycho-sociale intermédiaire, et les situations à complexité médico-psycho-sociale forte ou instable. S’y ajoutent, comme le rappelle l’étude d’impact jointe au projet de loi, des éléments tels que les dispositifs d’appui à la coordination (DAC), « qui peuvent intervenir pour fluidifier la coordination du parcours, dans des situations apparaissant complexes sur le plan social ».

● Il n’existe toutefois pas, en France, d’établissement social ou médico‑social (ESMS) dont la vocation est spécifiquement d’accueillir et d’accompagner les personnes en fin de vie et leurs proches, en dépit de la variété des établissements et services énumérés au I de l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles ([51]), tels que les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale, ou les services qui assurent des activités d’aide personnelle à domicile.

Aussi, malgré le développement de projets innovants et variés, les structures intermédiaires restent expérimentales et peinent à se structurer de manière adéquate sur les plans économique et institutionnel. Les « maisons de vie », dont la première est apparue à Besançon en 2011, se heurtent à des obstacles juridiques et financiers ([52]). Le bilan de la « maison de répit » de Lyon ([53]) dressé par l’Inspection générale des affaires sociales est « en demi-teinte » ([54]). Les établissements comme la Maison de Gardanne ([55]) ou la Maison médicale Jeanne Garnier ([56]) peuvent parfois être assimilés, sinon réduits, à leur unité de soins palliatifs (USP) ([57]).

● L’absence de solution intermédiaire entre le domicile et l’hôpital, qui distingue la France par rapport à plusieurs de ses voisins européens, conduit, comme le souligne l’étude d’impact jointe au projet de loi, à « favoriser des prises en charge qui ne sont pas toujours adaptées avec, de surcroît, des effets de report vers l’hôpital ».

Le rapport dit « Chauvin », concluant les travaux de l’instance de gouvernance stratégique chargée d’élaborer la stratégie décennale « soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie », souligne en effet que « cette absence de structure spécifique a pour effet un recours trop important à des hospitalisations pour des personnes pourtant stabilisées mais qui ne bénéficient pas d’un cadre adapté à leur domicile ou en établissement pour être accompagnées dans leur fin de vie » ([58]).

Il apparaît ainsi que la prise en charge palliative à l’hôpital intervient essentiellement à la toute fin de vie des patients : le décès touche aujourd’hui trois quarts des patients en USP en service de médecine, qui sont les services de soins palliatifs les plus techniques, et près de la moitié des patients dans les lits identifiés de soins palliatifs (LISP) ([59]).

ACTIVITÉ HOSPITALIÈRE DE SOINS PALLIATIFS EN 2021

Mode de prise en charge

Séjours

Patients

Durée moyenne d’hospitalisation

Part de décès

Part de retour à domicile

USP en services de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO)

37 896

33 115

16 jours

76 %

20 %

USP en soins de suite et de réadaptation (SSR)

6 058

5 435

28 jours

17 %

60 %

LISP en MCO

99 020

83 613

18 jours

46 %

40 %

LISP en SSR

13 116

12 073

42 jours

56 %

25 %

Source : contribution adressée par le CNSPFV ; données ATIH produites à partir du PMSI.

À cet égard, la Cour des comptes constate dans son rapport sur les soins palliatifs que les parcours ne sont pas suffisamment différenciés. Elle montre que, si 67 % des patients admis en unités de soins palliatifs sont en phase palliative terminale, 20 % sont admis en phase palliative plus précoce, pour des séjours « de répit » et amenés à retourner à domicile ([60]).

II.   Le dispositif proposé

● L’article 2 crée une nouvelle catégorie d’ESMS, dénommée « maison d’accompagnement », désignant des structures intermédiaires entre le domicile et l’hôpital visant à accueillir et accompagner les personnes en fin de vie ainsi que leur entourage. Il complète, pour ce faire, la liste d’ESMS énumérés au I de l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles, ajoutant un 18° relatif aux maisons d’accompagnement (a du ), étant entendu que le premier alinéa du II du même article renvoie à un décret, pris après avis de la section sociale du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale, la fixation des conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement de ces établissements.

De telles structures s’inspirent de l’offre proposée au Danemark, en Italie ou encore au Royaume-Uni. Elles ont été recommandées par le rapport Chauvin précité. Elles répondent aux attentes de la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui a proposé de « développer des lieux d’accueil (publics ou privés) pour les personnes en fin de vie, hors du cadre hospitalier classique, par exemple avec des lieux de répit, des maisons d’accueil, des Unités de soins de longue durée (USLD) » ([61]). Comme le souligne l’étude d’impact jointe au projet de loi, elles font par ailleurs suite aux recommandations du Conseil de l’Europe, et notamment à la recommandation du 12 novembre 2003 du comité des ministres, selon laquelle « le respect et la protection de la dignité d’un malade incurable ou d’une personne mourante implique avant tout de lui apporter les soins appropriés dans un environnement approprié, pour lui permettre de mourir dans la dignité » ([62]).

Les maisons d’accompagnement répondent au double objectif de diminuer le recours à l’hospitalisation pour des situations médicales stabilisées et de garantir une fin de vie dans un environnement adapté, en suivant une approche holistique centrée sur la personne et en proposant un accompagnement pluridisciplinaire ou pluriprofessionnel. Comme l’indique l’étude d’impact jointe au projet de loi, ces structures « comporteront une dimension médico-sociale forte en raison, d’une part, d’un faible degré de médicalisation et, d’autre part, d’une approche pluridisciplinaire qui s’inscrira dans un projet personnel de la personne accueillie incluant l’accompagnement de son entourage aidant ».

● Pour consolider, préciser et rendre effectif ces nouvelles structures, l’article 2 insère par ailleurs, dans plusieurs articles du livre III du même code de l’action sociale et des familles, une référence aux maisons d’accompagnement créées au 18° du I de l’article L. 312‑1.

Ainsi, il modifie les deuxième et quatrième alinéas du II du même article (b du ). Il en résulte respectivement que :

– les maisons d’accompagnement s’organisent en unités de vie favorisant le confort et la qualité de séjour des personnes accueillies, dans des conditions et des délais fixés par décret ;

– les prestations délivrées par les maisons d’accompagnement sont accomplies par des équipes pluridisciplinaires qualifiées. Ces structures sont dirigées par des professionnels dont le niveau de qualification est fixé par décret et après consultation de la branche professionnelle ou, à défaut, des fédérations ou organismes représentatifs des organismes gestionnaires d’établissements et services sociaux et médico-sociaux concernés.

L’article 2 modifie également le b de l’article L. 313‑3 pour confier au directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) la délivrance de l’autorisation aux maisons d’accompagnement ().

La modification du premier alinéa de l’article L. 314‑3‑3 () a pour conséquence d’inclure les maisons d’accompagnement dans le champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) spécifique, ce qui permet leur financement par l’assurance maladie au titre du sous-objectif « autres prises en charge » regroupant les soins des Français à l’étranger, les opérateurs financés par l’assurance maladie et les dépenses médico-sociales spécifiques, les maisons d’accompagnement trouvant place dans cette dernière catégorie.

Le financement sera également assuré par un forfait journalier à la charge des personnes accueillies. Comme le rappelle l’étude d’impact, un décret en Conseil d’État sera nécessaire pour permettre la prise en charge d’un tel forfait par une assurance complémentaire, cette possibilité étant actuellement limitée au forfait journalier des établissements hospitaliers ([63]).

Les rapporteurs relèvent que, selon l’étude d’impact, le montant unitaire d’une maison d’accompagnement est estimé à 970 000 euros par an.

BUDGET ANNUEL ESTIMÉ d’UNE MAISON D’ACCOMPAGNEMENT

 

Mission

Fonction

Nombre ETP estimé

Coût

Frais de personnel

Administratif

Directeur

0,1

11 199 €

Agent administratif

0,5

15 000 €

Logistique

Ouvrier (plombier, électricien, jardinier, cuisinier)

0,3

9 289 €

Agent de service général (buanderie, cuisine)

0,7

19 533 €

Agent de service hospitalier

2

53 484 €

Soins d’accompagnement

Médecin

0,2

24 082 €

IDE

2

83 176 €

Aide-soignant

5,4

164 685 €

Accompagnant éducatif et social / auxiliaire de vie

2,7

78 787 €

Assistant social

0,5

18 000 €

Soutien psychologique, émotionnel et autre

Psychologue

1

50 407 €

Total

15,4

527 642 €

Remplacements

15 % pour les remplacements

79 146 €

Prestations extérieures

Externalisation de certaines prestations

70 000 €

Budget pour le personnel total

676 788 €

Budget pour la structure (30 % des frais de personnel*)

290 052 €

Budget total (personnel + structure)

966 841 

Source : étude d’impact jointe au projet de loi. Les coûts des professionnels sont issus des salaires des établissements à but non lucratifs (EBNL).

Enfin, l’article 2 complète le titre IV, relatif aux dispositions spécifiques à certaines catégories d’établissements, par un chapitre X sur les maisons d’accompagnement. Celui-ci comporte un article unique disposant que les personnes suivies dans les maisons d’accompagnement ont accès à l’ensemble des soins d’accompagnement mentionnés à l’article L. 1110‑10 du code de la santé publique créés par l’article 1er du présent projet de loi (). L’étude d’impact jointe au projet de loi précise que, parmi ces soins d’accompagnement, figureront le contrôle de la douleur et des symptômes, la nutrition, les soins infirmiers, l’activité physique adaptée ou encore des actes de kinésithérapeute.

● Si la mise en œuvre des maisons d’accompagnement relève en grande partie du niveau réglementaire et n’est donc pas détaillée dans le dispositif du présent projet de loi, l’exposé des motifs et l’étude d’impact qui l’accompagnent apportent des précisions utiles quant à la nature et au rôle de ces structures. Ainsi, les maisons d’accompagnement seront des structures intermédiaires entre le domicile et l’hôpital, composées de petites unités de vie (douze à quinze lits en hébergement permanent), qui proposeront une prise en charge globale et pluridisciplinaire aux personnes en fin de vie et à leurs proches, dès lors que celles-ci ne relèvent plus d’un service hospitalier mais, pour autant, ne peuvent réintégrer leur logement. Ces personnes pourront être admises lorsque le retour à domicile suite à une hospitalisation est impossible, ou encore lorsque la prise en charge à domicile ou en établissement médico‑social s’avère inadaptée, afin d’éviter une hospitalisation en établissement de santé.

Les maisons d’accompagnement auront pour mission principale d’assurer, avec leurs moyens internes ou le cas échéant par convention avec des partenaires extérieurs et en travaillant avec l’ensemble des ressources de leur territoire, la dispensation de soins d’accompagnement. Elles auront vocation à rester ouvertes sur l’extérieur et à faire appel à des ressources bénévoles. Si les critères et modalités précis d’admission seront définis par le Gouvernement avec les professionnels de santé, intervenant notamment en soins palliatifs, il est indiqué que la décision sera subordonnée à une évaluation médicale appréciant, en particulier, l’opportunité d’un séjour. Aucune limite d’âge ne sera imposée. Les maisons d’accompagnement proposeront un hébergement jusqu’à la fin de vie, mais aussi une ouverture facultative de certaines prestations aux non-résidents. L’étude d’impact évoque des rendez-vous individuels ou des actions collectives d’accompagnement, telles que des séances d’art-thérapie pour les personnes malades ou d’accompagnement au deuil pour les proches.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté plusieurs amendements précisant le cadre juridique applicable aux maisons d’accompagnement, renommées « maisons d’accompagnement et de soins palliatifs » à la suite d’un amendement de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance modifiant l’intitulé du chapitre X créé par l’article 2 du projet de loi dans le titre IV du livre III du code de l’action sociale et des familles ([64]).

Un amendement de M. René Pilato et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, adopté par la commission malgré l’avis défavorable du rapporteur, dispose que ces maisons sont dotées de la personnalité morale de droit public ou de droit privé à but non lucratif ([65]).

La commission spéciale a également adopté plusieurs amendements relatifs aux personnes qui interviennent dans ces établissements. Par un amendement de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES, elle a exigé que les équipes qui délivrent des prestations dans les maisons d’accompagnement soient formées aux enjeux liés à l’accompagnement des personnes en situation de handicap ([66]). Un amendement de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires, a autorisé les maisons d’accompagnement à établir des conventions avec les unités et équipes en charge de ces soins sur le territoire ([67]). En adoptant un amendement du rapporteur Didier Martin ([68]), la commission spéciale a étendu aux maisons d’accompagnement le droit de visite quotidienne garanti par la loi dite « bien‑vieillir » ([69]). Elle a également précisé que les bénévoles ont vocation à intervenir dans ces établissements en adoptant un amendement de M. Yannick Neuder et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ([70]). Enfin, la commission a prévu, à l’initiative de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, que les proches des personnes suivies dans les maisons d’accompagnement bénéficient d’une information sur leurs droits et, notamment, sur le congé de solidarité familiale ([71]).

*

*     *

Article 2 bis (nouveau)
Rapport sur le coût et sur les modalités d’une
réforme du congé de solidarité familiale

Introduit par la commission

L’article 2 bis prévoit la remise d’un rapport sur le coût et les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale.

Cet article résulte de l’adoption par la commission spéciale, avec des avis de sagesse du rapporteur et du Gouvernement, d’un amendement de Mme Caroline Fiat et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ([72]). Il prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur le coût et sur les modalités d’une réforme du congé de solidarité familiale afin d’en accroître le taux de recours et de garantir une revalorisation de l’indemnisation associée.

En l’état actuel du droit, tout salarié peut bénéficier du congé de solidarité familiale, qui lui permet de s’absenter pour assister un proche ([73]) qui souffre d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou est en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable ([74]). La durée de ce congé est convenue avec l’employeur et ne peut excéder une durée maximale fixée par la convention collective ou l’accord collectif d’entreprise ou, en l’absence de dispositions conventionnelles, une durée de trois mois renouvelable une fois. Ce congé n’est en principe pas rémunéré par l’employeur. Mais le salarié peut bénéficier, sous conditions, de l’allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie (Ajap), versée par l’assurance maladie pendant vingt‑et‑un jours au cours de ce congé ([75]). Cette allocation, d’un montant de 63,34 euros brut par jour depuis le 1er avril 2024 ([76]), est également ouverte aux travailleurs indépendants et aux demandeurs d’emploi, les conditions de versement variant selon la situation du bénéficiaire.

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*     *

Article 3
Plan personnalisé d’accompagnement

Adopté avec modifications

Cet article vise à mettre en place un dispositif de soutien à la personne, dans le cadre de l’annonce du diagnostic d’une affection grave. Ce dispositif de soutien s’articulera autour de temps d’échanges en vue de la formalisation d’un plan personnalisé d’accompagnement.

I.   Le droit en vigueur

L’accompagnement des personnes malades est nécessaire au regard du droit au respect de la dignité, du droit à l’information, du droit à la participation à la décision médicale et au consentement aux soins, exprimés respectivement par les articles L. 1110‑2, L. 1111‑2 et L. 1111‑4 du code de la santé publique, et plus largement des droits des usagers du système de santé. Cet accompagnement répond de plus à la préservation de plusieurs droits consacrés par le cadre constitutionnel, tel que le principe de sauvegarde de la dignité humaine ([77]) et du droit à la protection de santé ([78]).

● Plusieurs accompagnements et dispositifs existent néanmoins d’ores et déjà pour permettre aux personnes d’identifier et de pleinement bénéficier des prises en charge à leur disposition :

– en oncologie, un programme personnalisé de soins est élaboré au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) et est proposé au patient lors d’une consultation spécifique dans le cadre du dispositif d’annonce ([79]). Il permet d’identifier le ou les traitements à réaliser. Il peut être adapté ou interrompu en fonction de la réaction du patient aux traitements, et de l’évolution de la maladie ;

– la Haute Autorité de santé a défini en 2019 un plan personnalisé de coordination en santé (PPCS), qui s’adresse aux professionnels de santé. Il concerne tout usager du système de santé en situation complexe, dont la compréhension et la prise en charge nécessitent plusieurs professionnels. Il formalise les besoins des personnes et permet la coordination des interventions nécessaires des professionnels de santé, personnels médico-sociaux et sociaux ;

– lors d’un accueil en établissement ou service social ou médico-social, un projet d’accueil et d’accompagnement est rédigé sous forme contractuelle impliquant l’usager lui-même ([80]). Il définit l’accompagnement professionnel, social et médico-social de l’usager afin de prendre en compte ses besoins et ses attentes.

– enfin, la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie a prévu la rédaction des directives anticipées, qui permettent à une personne d’exprimer sa volonté en ce qui concerne les conditions de la poursuite, de la limitation, de l’arrêt ou du refus de traitements ou d’actes médicaux, pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Ces directives sont révisables et révocables à tout moment et par tout moyen ; elles n’ont pas de forme obligatoire et s’imposent au médecin, pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement, « sauf en cas d’urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale » ([81]), ce qui doit être décidé dans le cadre d’une procédure collégiale et inscrit au dossier médical.

Néanmoins, ces différentes dispositions n’assurent pas une réponse globale et unifiée aux besoins d’accompagnement. Aucun dispositif ne permet de s’assurer que les personnes atteintes d’une pathologie grave et évolutive se verront proposer des temps d’échanges avec un professionnel de santé.

● À l’échelle internationale, plusieurs pays proposent à leurs citoyens des formes plus ou moins avancées de planification anticipée de leurs besoins (« advance care planning » ou ACP). À titre d’exemples :

– en Belgique, la rédaction et le suivi d’un ACP chez des patients qui bénéficient de soins palliatifs font l’objet d’une codification dans la nomenclature des soins de santé. L’ACP contient au moins un entretien sur la possibilité de rédiger une déclaration de volonté, la détermination des objectifs de soins et la désignation éventuelle d’un représentant légal ou mandataire ;

– en Suisse, l’ACP est conçu comme un processus dans lequel les patients et, le cas échéant, leurs proches discutent avec les professionnels de la santé des stratégies et des objectifs thérapeutiques, les définissent et les adaptent régulièrement au déroulement concret de la maladie. L’ACP ne remplace pas les directives anticipées mais les inclut au sein d’un processus permettant aux proches et aux professionnels de connaître les préférences du patient et de les prendre en compte afin de définir une conduite à suivre dans les traitements à mettre en place, notamment en fin de vie ;

– au Canada, la planification anticipée se concrétise également par l’élaboration active d’un plan par la personne, ses proches et les professionnels de santé. Ce plan, qui est évolutif, lui permet d’indiquer ses valeurs, ses objectifs et ses préférences en ce qui concerne les traitements qu’elle souhaite recevoir ou non, ainsi que sur tout ce qui entoure la fin de vie. Elle peut aussi désigner un mandataire qui sera apte à prendre des décisions dès lors qu’elle ne pourrait plus le faire elle-même.

– de même, en Australie, la possibilité est offerte aux personnes de planifier leurs soins de santé futurs et d’anticiper une maladie grave, qui les empêcherait de communiquer leurs préférences ou de prendre des décisions.

Enfin, on peut souligner que les patients peuvent être mieux accompagnés dans certains pays où il existe des gestionnaires de parcours (« case-managers »). Comme le rappelle le rapport Chauvin précité, ceux-ci ont pour mission de suivre la mise en œuvre du parcours de soins d’accompagnement des personnes malades et de leur entourage ([82]).

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 3 vise à répondre aux enjeux de renforcement de l’accessibilité et de la transversalité des soins d’accompagnement, dans une démarche de planification anticipée des besoins des patients.

Introduisant un article L. 1110‑10‑1 dans le code de la santé publique, il prévoit la création d’un dispositif de coordination autour du patient. Dans le cadre de l’annonce du diagnostic d’une affection grave, il serait proposé au patient un temps de discussion avec le médecin ou un professionnel de santé, le cas échéant avec l’assistance de personnes que le patient aura choisies, par exemple sa personne de confiance ([83]), en vue de la formalisation d’un plan personnalisé d’accompagnement.

Élaboré à partir des besoins et des préférences du patient, ce plan sera dédié à l’anticipation, à la coordination et au suivi des prises en charge sanitaire, psychologique, sociale et médico-sociale du patient. Il comportera également un volet relatif à la prise en charge de la douleur. Ce plan pourra évoluer en fonction des besoins et des préférences du patient et pourra être complété par les professionnels qui interviennent auprès du patient, en accord avec ce dernier.

Ce dispositif concernera toutes les personnes atteintes d’une pathologie grave et évolutive, susceptible d’affecter leur pronostic vital. Les patients atteints de pathologies chroniques sont également concernés par le dispositif, dès lors que la pathologie atteint un stade avancé.

Il convient de saluer la volonté du Gouvernement de mieux anticiper et de mieux prendre en compte les besoins et les préférences des patients au travers de ce plan personnalisé d’accompagnement, qui s’inspire des meilleures pratiques au niveau international. Ce dispositif concourra à la diffusion de la culture palliative, qui repose sur l’anticipation et la prise de décisions partagées entre le patient, sa famille et les soignants. Il apporte une réponse à l’une des recommandations de la Convention citoyenne sur la fin de vie qui a souligné notamment le besoin « d’apporter un accompagnement global à tous les patients » et préconisé d’améliorer l’organisation du parcours de soins de la fin de vie.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

Outre plusieurs amendements rédactionnels du rapporteur, la commission a adopté deux amendements de M. Raphaël Gérard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance afin que soit proposé au patient, lors de l’élaboration ou de la révision du plan personnalisé d’accompagnement, d’une part de rédiger ou de réviser ses directives anticipées et que ce plan tienne compte de celles-ci ([84]), et d’autre part de désigner une personne de confiance ([85]).

Ont également été adoptés deux amendements de M. Christophe Marion (groupe Renaissance) précisant qu’il est possible d’être accompagné, lors de l’élaboration du plan, de sa personne de confiance ([86]) et que ce plan tient compte des directives anticipées du patient ([87]).

● La commission spéciale a également adopté plusieurs amendements précisant que le plan est :

– formalisé par écrit (amendement de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains) ([88]) ;

– déposé dans l’espace numérique de santé du patient (amendement de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains) ([89]) ;

– constitué d’un temps de sensibilisation à destination des aidants sur les enjeux liés à l’accompagnement d’un proche en soins palliatifs et à la fin de vie. Il donne lieu à une information sur les droits et les dispositifs d’accompagnement sociaux, économiques et psychologiques dont ces aidants peuvent bénéficier (amendement de M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES) ([90]) ;

– utilisé par les professionnels qui interviennent auprès du patient, y compris à domicile (amendements identiques de Mme Christine Loir et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National, de M. Philippe Juvin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ainsi que de M. Thibault Bazin) ([91]).

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Article 4
Renforcement de l’utilisation et de l’accessibilité des directives anticipées

Adopté avec modifications

Cet article comporte plusieurs mesures d’amélioration des modalités d’utilisation et d’accès aux directives anticipées, afin de faciliter et systématiser leur utilisation, à la fois par les patients et par les professionnels de santé. Il prévoit la possibilité d’annexer le plan personnalisé d’accompagnement aux directives anticipées, il inscrit dans la loi la possibilité de conserver ses directives anticipées dans le dossier médical partagé et autorise un tiers à accéder et à utiliser l’espace numérique de santé d’une personne.

I.   Le droit en vigueur

A.   Les dIrectives anticipÉes

Les directives anticipées constituent un document écrit, révocable à tout moment, visant à assurer, sous certaines conditions, le respect de la volonté des personnes, dans l’hypothèse où elles seraient un jour hors d’état de l’exprimer.

● Elles ont été introduites à l’article L. 1111‑11 du code de la santé publique par la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie. Elles ne concernaient à l’époque que les conditions de limitation ou d’arrêt de traitement. Le médecin devait en tenir compte « pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement », à condition qu’elles datent de moins de trois ans. Elles n’étaient pas contraignantes pour le médecin.

● La loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie a considérablement renforcé le dispositif des directives anticipées. Désormais, les médecins doivent informer leurs patients sur ce dispositif. Des modèles, non obligatoires, ont été élaborés pour faciliter la rédaction des directives anticipées : un pour les personnes atteintes d’une maladie grave ou en fin de vie et un autre pour les personnes en bonne santé. Le législateur a prévu que les directives anticipées peuvent être conservées dans un registre national, qui doit permettre d’informer les particuliers et les professionnels et aider au remplissage du formulaire. Cette mesure n’a toutefois pas été mise en œuvre.

Depuis 2016, les directives anticipées s’imposent au médecin sans condition de temporalité, sous réserve de deux hypothèses : en cas d’urgence vitale « pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation » ou en cas de directives « manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale » du patient. La décision par laquelle un médecin refuse d’appliquer des directives anticipées est entourée de garanties procédurales (procédure collégiale, information de la personne de confiance, de la famille ou des proches).

Il convient de rappeler que le Conseil constitutionnel a confirmé la constitutionnalité des dispositions de l’article L. 1111‑11 du code de la santé publique relatives au refus d’application des directives anticipées dans une décision du 10 novembre 2022 rendue à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité ([92]). Il a jugé qu’en prévoyant la possibilité pour le médecin de refuser l’application des directives anticipées d’un patient, le législateur avait entendu garantir le droit de toute personne à recevoir les soins les plus appropriés à son état et assurer la sauvegarde de la dignité des personnes en fin de vie.

● L’appropriation du dispositif des directives anticipées par la population semble encore insuffisante, près de vingt ans après leur création, comme l’a rappelé l’an dernier la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti. Les directives sont peu utilisées et beaucoup de Français ne savent pas précisément ce dont il s’agit.

D’après les résultats d’un sondage BVA Group d’octobre 2022 pour le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, moins d’un Français sur deux (43 %) connaît les directives anticipées et à peine un Français sur cinq (19 %) sait précisément ce dont il s’agit. Les directives sont en outre peu utilisées : 18 % des Français ont rédigé leurs directives anticipées (13 % des plus de 50 ans et 33 % des plus de 65 ans). Plus d’un tiers des répondants ne souhaite pas procéder à leur rédaction.

Ce faible recours aux directives anticipées peut s’expliquer par la méconnaissance du dispositif, le manque d’information, l’absence d’interlocuteurs susceptibles d’apporter un appui lors de l’expression de choix tranchés sur des sujets médicaux parfois techniques, mais également par la difficulté de se confronter à la question de la fin de vie, comme le soulignait la mission d’évaluation : « le sujet de la fin de vie est mis à distance quand il n’est pas un repoussoir, voire un tabou [...]. En découle une tendance à retarder la discussion sur la fin de vie avec un médecin : moins d’un Français sur cinq préférerait avoir cette discussion en amont avant d’être réellement confronté au sujet » ([93]).

B.   le dossIer mÉdical partagÉ ET L’espace numérique de santé

● Le dossier médical partagé (DMP), initialement appelé « dossier médical personnel », a été créé par la loi n° 2004‑810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie ([94]). Il s’agit d’un outil numérique visant, dans le respect du secret médical, à favoriser la prévention, la coordination, la qualité et la continuité des soins. Il permet de conserver de manière sécurisée les informations relatives à la santé de leurs détenteurs ainsi que les documents produits dans le cadre de leurs parcours de soins, et de les partager avec les professionnels de santé de leur choix. Les professionnels de santé ont l’obligation d’alimenter ce dossier médical partagé à l’occasion de chaque acte ou consultation.

Il constitue désormais l’une des composantes de l’espace numérique de santé (ENS), un outil numérique prévu par la loi n° 2019‑774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé. Ce dernier permet également à son titulaire d’accéder à ses constantes de santé, à l’ensemble des données relatives au remboursement de ses dépenses de santé, à des outils permettant des échanges sécurisés avec les acteurs du système de santé, dont une messagerie de santé sécurisée ou encore à tout service numérique, notamment des services développés pour favoriser la prévention et fluidifier les parcours.

Le dossier médical partagé comporte un volet relatif aux directives anticipées ([95]). Il permet d’y enregistrer ses directives anticipées et de renseigner l’identité de la personne de confiance. À ce jour, 234 808 directives anticipées ont été enregistrées dans l’espace numérique de santé ([96]).

● Les proches aidants de la personne ne disposent pas légalement de la possibilité d’accéder à l’espace numérique de la personne. S’ils souhaitent y accéder, ils doivent donc contourner les règles de sécurisation en utilisant les identifiants du titulaire de l’espace numérique de santé.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 4 du présent projet de loi comporte plusieurs mesures visant à mieux faire connaître les souhaits des patients en matière de prise en charge médicale auprès de leurs proches et des professionnels de santé en complétant le cadre juridique relatif aux directives anticipées. Comme le souligne l’étude d’impact, « le principal objectif de l’article est de favoriser le développement d’une véritable culture de l’anticipation, ainsi que le respect des volontés des personnes lorsque les conditions le permettent. Il s’agit également, dans les deux cas, de ne pas faire peser un poids trop lourd sur la famille ou les proches au moment de relayer les volontés des intéressés, ainsi que de faciliter le travail des professionnels de santé impliqués dans la prise en charge de ces derniers. » ([97])

A.   la possibilitÉ DE RATTACHER les directives anticipÉes ET le plan personnalisÉ d’accompagnement

Les personnes qui bénéficient d’un plan personnalisé d’accompagnement, prévu par l’article 3 du présent projet de loi, pourront l’annexer à leurs directives anticipées, selon la nouvelle rédaction de l’article L. 1111‑11 (a du I). Le médecin ou un professionnel de santé de l’équipe de soins pourra proposer au patient, au moment de l’élaboration ou de l’actualisation du plan, de rédiger ses directives anticipées ou de les mettre à jour.

Le plan personnalisé d’accompagnement et les directives anticipées pourront, le cas échéant, figurer ensemble dans le DMP du patient et donc dans son espace numérique de santé si ce dernier a été activé. Cela permettra renseigner au mieux les soignants sur la volonté du patient lorsqu’ils mettront en œuvre ce plan.

B.   la conservation des directives anticipÉes dans le dossier mÉdical partagÉ

Le b du I vise à inscrire dans la loi, à l’article L. 1111‑11 du code de la santé publique, la possibilité, actuellement prévue au niveau réglementaire ([98]), pour toute personne d’enregistrer et de conserver ses directives anticipées dans le DMP et donc, le cas échéant, dans son espace numérique de santé.

Pour les personnes ayant renseigné leurs directives anticipées dans leur ENS, l’existence de ces directives leur sera « régulièrement » rappelée lorsqu’ils se connecteront à leur ENS. Par ailleurs, il sera toujours possible de conserver ses directives anticipées chez soi ou chez son notaire par exemple.

Il convient de noter que l’écriture proposée remplace la notion de « registre national » des directives anticipées par une référence au dossier médical partagé. Elle tire ainsi la conséquence de l’absence de registre national des directives anticipées. S’appuyant sur les travaux de l’Inspection générale des affaires sociales, qui l’a proposé dès 2015, suivie par le Comité consultatif national d’éthique, le Conseil économique, social et environnemental, la Cour des comptes et la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, qui ont tous insisté sur les enjeux d’accessibilité, de sécurité et de traçabilité afférents, l’étude d’impact précise que « de nombreux acteurs s’accordent à dire que le dossier médical partagé constitue l’outil numérique le plus approprié pour le recueil des directives anticipées ».

C.   la possibilitÉ d’autoriser un tiers À accÉder et À utiliser SON espace numÉrique de santÉ

● Le du II du présent article modifie le IV de l’article L. 1111‑13‑1 afin de prévoir la possibilité pour le titulaire de l’espace numérique de santé d’en déléguer l’accès et l’utilisation à un tiers. Ce dernier peut être la personne de confiance désignée par le patient, un parent ou un proche aidant. Cette autorisation reste révocable à tout moment.

La personne tierce pourra alors se connecter avec sa propre identité au dossier du titulaire, notamment dans le contexte de la fin de vie, et y effectuer pour son compte toute action.

● Cette délégation est entourée de garanties, qui permettent notamment la protection des droits des personnes mineures et des majeurs protégés :

– si le titulaire de l’espace numérique de santé est un mineur, ses représentants légaux sont gestionnaires et utilisateurs de l’espace numérique de santé. Ce droit ne pourra être délégué à une tierce personne ;

– si le titulaire de l’espace numérique de santé est une personne majeure faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, la personne en charge de la mesure de protection, et seulement celle‑ci, dispose au même titre que le titulaire d’un accès à l’espace numérique de santé. Si le titulaire n’est pas apte à exprimer sa volonté, la personne chargée de la mesure de protection peut gérer l’ENS pour son compte. Par coordination, le  du II supprime le quatrième alinéa de l’article L. 1111‑14, qui permet à la personne en charge de la mesure de protection de s’opposer à l’ouverture de l’ENS de la personne protégée.

L’article précise que la délégation des droits d’accès à l’espace numérique de santé ne remet pas en cause les règles de l’accès des professionnels de santé au dossier médical partagé.

L’actualisation du cadre juridique relatif aux directives anticipées, qui constituent un outil précieux pour connaître la volonté du patient lorsqu’il n’est plus en mesure de faire part de sa volonté, est bienvenue. Il convient toutefois de souligner que cette évolution ne conduit pas à ce que les directives anticipées puissent être prises en compte de manière décisive dans le cadre d’une demande d’aide à mourir. En effet, alors que les directives anticipées visent à anticiper une situation où le patient ne serait plus en capacité d’exprimer sa volonté, les conditions d’accès de l’aide à mourir prévues par le titre II du présent projet de loi reposent sur la manifestation libre, éclairée et répétée de la volonté de la personne jusqu’à l’administration de la substance létale.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

Outre plusieurs amendements rédactionnels du rapporteur Didier Martin, la commission spéciale a adopté un amendement de Mme Caroline Fiat (groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale) afin que la personne de confiance reçoive, lors de sa désignation, un guide dans lequel sont explicités son rôle et ses missions ([99]).

Elle a également adopté un amendement de Mme Elsa Faucillon (groupe Gauche démocrate et républicaine) prévoyant que les directives anticipées peuvent être produites sous forme audiovisuelle ([100]).

Un amendement de Mme Frédérique Meunier (groupe Les Républicains), sous‑amendé à l’initiative de Mme Élise Leboucher et des membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale, prévoit qu’une personne peut indiquer, dans ses directives anticipées, « son choix individuel du type d’accompagnement pour une aide à mourir lorsque la personne perd conscience de manière irréversible » ([101]).

Il a également été précisé que le plan personnalisé d’accompagnement est nécessairement annexé aux directives anticipées lorsqu’elles existent (amendements identiques de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES, ainsi que de M. Philippe Vigier et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants)([102]). Les directives anticipées devront être conservées dans le dossier médical partagé (amendements identiques de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance, de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES ainsi que de Mme Monique Iborra et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance) ([103]).

Enfin, la commission a adopté deux amendements prévoyant l’information des patients sur les directives anticipées au cours des rendez-vous de prévention mentionnés à l’article L. 1411-6-2 du code de la santé publique. À l’initiative de M. Christophe Marion (groupe Renaissance), l’article précise désormais que les professionnels de santé qui effectuent les rendez-vous de prévention sensibilisent leurs patients à la possibilité de rédiger leurs directives anticipées ([104]). Un amendement du rapporteur Didier Martin a complété les objectifs assignés à ces rendez-vous, en ajoutant qu’ils visent à promouvoir la rédaction des directives anticipées et la désignation d’une personne de confiance ([105]).

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Article 4 bis (nouveau)
Traçabilité de la sédation profonde et continue jusqu’au décès

Introduit par la commission

L’article 4 bis prévoit d’assurer la traçabilité de la sédation profonde et continue afin de pouvoir disposer de données consolidées sur cette pratique.

Cet article résulte de l’adoption par la commission spéciale, avec avis favorable du Gouvernement, d’un amendement du rapporteur Didier Martin ([106]). Il assure la traçabilité de la sédation profonde et continue au sein du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) et du système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (Sniiram).

Ce nouvel article décline l’une des propositions de la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti, qui avait constaté l’absence de données consolidées sur la pratique de la sédation profonde et continue.

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Article 4 ter (nouveau)
Rapport sur l’application de la loi Claeys-Leonetti et la politique de développement des soins palliatifs

Introduit par la commission

L’article 4 ter prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement tous les deux ans d’un rapport évaluant les conditions d’application de la loi Claeys-Leonetti ainsi que la politique de développement des soins palliatifs.

Cet article résulte de l’adoption par la commission spéciale, avec des avis de sagesse du rapporteur et du Gouvernement, d’un amendement de M. Thibault Bazin et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains ([107]).

L’article 14 de la loi Claeys-Leonetti prévoit qu’à « l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport évaluant les conditions d’application de la présente loi ainsi que la politique de développement des soins palliatifs dans les établissements de santé, les établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 3121 du code de l’action sociale et des familles et à domicile ». Or, ce rapport n’a jamais été remis au Parlement comme l’a constaté la mission d’évaluation ([108]). Afin de favoriser l’effectivité de cette disposition, le présent article additionnel prévoit que le Gouvernement remette au Parlement ce rapport non plus tous les ans mais tous les deux ans.

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  1  —

Titre II
Aide à mourir

Chapitres Ier et II
Définition et conditions d’accès

Article 4 quater (nouveau)
Modification de l’intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier
de la première partie du code de la santé publique

Introduit par la commission

L’article 4 quater complète l’intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique afin d’y faire apparaître la question de la fin de vie, en lien avec la codification dans une section nouvelle des articles 5 à 17 du présent projet de loi.

● Le projet de loi déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale ne prévoyait aucune codification de ses articles 5 à 17, qui portent sur la définition, les conditions d’accès, la procédure, le contrôle et l’évaluation de l’aide à mourir ainsi que sur la clause de conscience, et ce malgré le caractère permanent de ces dispositions.

Or, comme l’a souligné le Conseil d’État ([109]), le Conseil constitutionnel juge que la codification facilite l’accessibilité et l’intelligibilité des règles de droit (décision n° 99‑421 DC du 16 décembre 1999), qui constituent un objectif à valeur constitutionnelle. C’est pourquoi les rapporteures du titre II ont proposé de codifier les articles 5 à 17 du projet de loi en créant une nouvelle section dédiée à l’aide à mourir au sein du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique.

● À l’initiative de la rapporteure Laurence Maillart-Méhaignerie et en cohérence avec la codification de ces articles, la commission spéciale a adopté, avec le soutien du Gouvernement, un amendement complétant l’intitulé du chapitre Ier précité afin d’y faire apparaître la question de la fin de vie : « Information des usagers du système de santé, expression de leur volonté et fin de vie » ([110]).

 

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Articles 5, 5 bis et 6
Définition et conditions d’accès de l’aide à mourir

Articles 5 et 6 : adoptés avec modifications
Article 5 bis : introduit par la commission

L’article 5 définit l’aide à mourir : elle consiste à autoriser et à accompagner la mise à disposition, à une personne qui en a exprimé la demande, d’une substance létale, afin qu’elle se l’administre ou, lorsqu’elle n’est pas en mesure physiquement d’y procéder, se la fasse administrer par un médecin, un infirmier ou une personne volontaire qu’elle désigne.

Introduit par la commission, l’article 5 bis précise que le droit d’avoir « une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance », consacré par le code de la santé publique, comprend celui d’accéder à l’aide à mourir.

L’article 6 définit les conditions d’accès à l’aide à mourir. Sont éligibles à celle-ci les personnes âgées d’au moins 18 ans, de nationalité française ou résidant de façon stable et régulière en France, capables de manifester leur volonté de façon libre et éclairée, atteintes d’une affection grave et incurable engageant leur pronostic vital à court ou moyen terme et présentant une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable en l’absence ou en cas d’arrêt des traitements.

Ces conditions ont été modifiées en deux points par la commission spéciale. Elle est revenue sur la condition d’une « affection grave et incurable engageant le pronostic vital à court ou moyen terme », remplacée par la condition d’une « affection grave et incurable en phase avancée ou terminale ». Elle a également précisé que la condition relative à la souffrance s’entend comme « une souffrance physique accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique » liée à l’affection.

I.   Le droit en vigueur

A.   les lois sur la fin de vie

Il n’existe pas à l’heure actuelle de disposition légale permettant, sous conditions, d’aider une personne atteinte d’une maladie grave et incurable à mourir. En revanche, le législateur est déjà intervenu à plusieurs reprises dans le but d’affirmer la prise en considération de l’autonomie et du choix d’un malade en fin de vie.

 La loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite « loi Kouchner », a été la première à affirmer le principe d’autonomie du patient et de respect de sa dignité ([111]). De ces principes ont découlé la possibilité pour une personne malade, consciente et en capacité d’exprimer sa volonté de manière libre et éclairée, de refuser une investigation ou un traitement, même si ce refus est susceptible de mettre sa vie en danger ([112]). Par ailleurs, elle peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin ([113]).

 La loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, dite « loi Leonetti », a créé les directives anticipées. Par ce document, un citoyen peut préciser par avance ses souhaits dans l’hypothèse où il ne serait plus en mesure d’exprimer sa volonté. Elle a interdit l’obstination déraisonnable pour les patients en fin de vie et affirmé le principe du respect de la dignité des personnes en fin de vie.

Cette loi a contribué à lutter contre « l’acharnement thérapeutique » en créant la décision médicale de limitation ou d’arrêt du traitement, à la demande de la personne malade si celle-ci est en état de manifester sa volonté ou, si elle est inconsciente, sur décision du médecin à l’issue d’une procédure collégiale qui tient compte des directives anticipées ou des vœux exprimés auprès d’une personne de confiance ou des proches. La loi Leonetti a aussi prévu que « si le médecin constate qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il doit en informer le malade, (…) la personne de confiance (…), la famille ou, à défaut, un des proches. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical » ([114]). La volonté du patient, la recherche de l’apaisement et la préservation de la dignité sont désormais au cœur des dispositifs de fin de vie.

 La loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite « loi Claeys-Leonetti », a instauré un droit à la « sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès associée à une analgésie et à l’arrêt des traitements de maintien en vie » ([115]).

La sédation profonde et continue jusqu’au décès permet « de diminuer ou de faire disparaître la perception d’une situation vécue comme insupportable par le patient, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à sa situation ont pu lui être proposés et/ou mis en œuvre sans permettre d’obtenir le soulagement escompté. Dans ce cadre, ce n’est pas la sédation qui conduit au décès mais l’évolution naturelle de la maladie, la sédation permettant seulement que le décès intervienne sans souffrance pour la personne » ([116]).

Les patients capables d’exprimer leur volonté peuvent demander leur placement sous sédation profonde et continue dans deux situations :

– lorsque le patient est atteint d’une affection grave et incurable, que son pronostic vital est engagé à court terme et qu’il présente une souffrance réfractaire aux traitements ;

– lorsque le patient est atteint d’une affection grave et incurable et qu’il décide d’arrêter ses traitements, ce qui engage son pronostic vital à court terme et qui est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable.

La loi prévoit donc trois conditions pour que le patient puisse demander à être placé sous sédation profonde et continue jusqu’au décès :

– l’existence d’une affection grave et incurable ;

– l’engagement du pronostic vital à court terme, ce qui correspond à quelques heures ou quelques jours selon la Haute Autorité de santé ([117]) ;

– l’existence d’une souffrance réfractaire aux traitements, ou insupportable selon les cas.

Ces conditions sont vérifiées par l’équipe soignante dans le cadre d’une procédure collégiale préalable à la mise en œuvre de la sédation profonde et continue.

Les patients en incapacité d’exprimer leur volonté peuvent également être placés sous sédation profonde et continue au titre du refus de l’obstination déraisonnable. La procédure collégiale doit alors permettre de rechercher la volonté du patient en consultant ses directives anticipées et, à défaut, en consultant sa personne de confiance, sa famille ou ses proches ([118]). Les directives anticipées du patient s’imposent au médecin sauf en cas d’urgence vitale « pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation » ou en cas de directives « manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale » du patient. La décision de mettre en œuvre la sédation profonde et continue revient finalement au médecin.

Le faible recours à la sédation profonde et continue jusqu’au décès

Apport majeur de la loi Claeys-Leonetti, la sédation profonde et continue jusqu’au décès, qui doit permettre de « dormir avant de mourir pour ne pas souffrir » selon les mots de M. Jean Leonetti, est rarement pratiquée dans les faits. Bien que difficilement quantifiable en l’absence de données chiffrées consolidées, ce constat, largement partagé par les acteurs du secteur, peut s’expliquer notamment par les facteurs suivants :

– la crainte des professionnels de santé de donner la mort ;

– la difficulté d’identifier le moment opportun pour débuter la sédation, qui n’est possible que lorsque le pronostic vital est engagé « à court terme » ;

– la difficulté, en particulier à domicile et en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), de mettre en œuvre une sédation profonde et continue qui implique une surveillance prolongée du patient ;

– le risque que le patient montre des signes de réveil malgré une dégradation de son état physique, en lien avec un possible arrêt de l’alimentation et de l’hydratation, du fait de l’accoutumance de l’organisme au traitement (tachyphylaxie), et que la sédation dure plus longtemps que prévu ;

– les incertitudes autour du ressenti du patient et de la persistance ou non de douleurs physiques et/ou psychiques.

Sources : Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023.; étude d’impact jointe au présent projet de loi.

Selon la mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, si cette loi a constitué « un indéniable progrès », le cadre législatif en vigueur reste pourtant peu appliqué ([119]).

Le cadre constitutionnel et conventionnel

Le cadre constitutionnel actuel ne comporte pas de dispositions explicites relatives à la fin de vie ou à l’aide à mourir.

Bien qu’il y ait été invité à plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel n’a jamais consacré de droit constitutionnel à la vie. Il a préféré se fonder sur le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation, principe à valeur constitutionnelle qu’il fait découler du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ([120]).

Pour l’examen du présent projet de loi, deux décisions méritent d’être signalées :

– la décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017, dans laquelle le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions législatives autorisant l’arrêt des traitements d’une personne hors d’état d’exprimer sa volonté n’ont pas porté d’atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et à la liberté personnelle ;

– la décision n° 2022-1022 QPC du 10 novembre 2022, par laquelle il a jugé conformes à la Constitution les dispositions relatives au refus du médecin d’appliquer des directives anticipées manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient.

À l’occasion de ces deux décisions, le Conseil constitutionnel a rappelé qu’il appartient « au législateur, compétent en application de l’article 34 de la Constitution, [de] fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, notamment en matière médicale, de déterminer les conditions dans lesquelles la poursuite ou l’arrêt des traitements d’une personne en fin de vie peuvent être décidés » et que le contrôle du Conseil constitutionnel s’exerce dans le respect du large pouvoir général d’appréciation qui est celui du législateur dans ces matières.

Par conséquent, sous réserve d’entourer sa mise en œuvre d’un certain nombre de garanties, l’organisation par le législateur d’un dispositif d’aide à mourir ne soulève ni problème de constitutionnalité, ni problème de conventionnalité, comme l’a rappelé récemment la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans son arrêt Mortier c. Belgique de 2022.

La CEDH a souligné que l’article 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui protège le droit à la vie, ne saurait être interprété comme interdisant en soi la dépénalisation conditionnelle de l’euthanasie ou comme impliquant à l’inverse un droit à mourir.

Source : étude d’impact, pp. 80-82.

B.   les limites du droit en vigueur

● La mission d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti concluait en mars 2023 que « le cadre législatif actuel n’apporte pas de réponses à toutes les situations de fin de vie, en particulier lorsque le pronostic vital n’est pas engagé à court terme » ([121]).

● Dans son avis n° 139 du 13 septembre 2022 concernant la fin de vie, qui a significativement inspiré le présent projet de loi, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est prononcé en faveur de l’ouverture d’une aide active à mourir et considère qu’il « existe une voie pour une application éthique de l’aide active à mourir » dans certaines conditions très précises ([122]).

Le CCNE relève que « le cadre juridique actuel est satisfaisant lorsqu’un pronostic vital est engagé à court terme, offrant des dispositifs respectueux de la dignité des personnes atteintes de maladies graves et évoluées. C’est le cas, par exemple, des situations de personnes atteintes d’un cancer lorsque le pronostic vital est engagé à court terme. L’arrêt des thérapeutiques jugées déraisonnables, la poursuite des soins palliatifs et la possibilité de recours à une sédation profonde et continue jusqu’au décès, permettent en général une fin de vie relativement sereine et paisible » ([123]). Le CCNE rappelle que la notion de « pronostic vital engagé à court terme » correspond à une période allant de quelques heures à quelques jours, selon la définition de la Haute Autorité de santé.

Néanmoins, le CCNE nuance ce constat. « Une prise en charge palliative de qualité ne conduit pas toujours à l’effacement du désir de mourir : une récente étude conduite ([124]) sur la base de plus de 2 000 dossiers médicaux de patients admis en service de soins palliatifs, fait état de 9 % de patients exprimant un souhait de mourir et 3 % une demande d’euthanasie. Certaines personnes souffrant de maladies graves et incurables, provoquant des souffrances réfractaires, dont le pronostic vital n’est pas engagé à court terme, mais à moyen terme, ne rencontrent pas de solution à leur détresse dans le champ des dispositions législatives. Il en va de même des situations de dépendance à des traitements vitaux dont l’arrêt, décidé par la personne lorsqu’elle est consciente, sans altération de ses fonctions cognitives, n’entraîne pas un décès à court terme ». Il ajoute que ces situations soulèvent de « graves questions éthiques » particulièrement lorsque le pronostic vital est engagé à moyen terme, notion qui « pourrait être entendue, à l’instar de certaines législations étrangères, comme couvrant une période de quelques semaines ou quelques mois » ([125]).

Eu égard aux limites inhérentes à la sédation profonde et continue comme le risque de réveil associé à une dégradation de la situation du patient lorsque le décès n’intervient pas à court terme, le CCNE souligne que l’aide active à mourir « pourrait s’adresser aux personnes souffrant de maladies graves et incurables, provoquant des souffrances réfractaires, dont le pronostic vital n’est pas engagé à court terme, mais à moyen terme. Un certain nombre de législations étrangères ont ainsi ouvert la voie d’une aide active à mourir pour les personnes dont le pronostic vital est engagé à un horizon de quelques mois » ([126]).

Il fait alors référence, s’agissant de l’assistance au suicide, aux « États américains de l’Oregon, de Washington, du Vermont, de Californie, du Colorado, du New Jersey, qui ont adopté des législations fixant à six mois l’horizon du pronostic vital à l’intérieur duquel une assistance au suicide est légale ». S’agissant de l’euthanasie et de l’assistance au suicide, le CCNE se réfère à « certains États d’Australie [qui] ont également retenu cet horizon de six mois qui peut être porté à douze mois en cas de pathologie neurodégénérative (exemples de l’État de Victoria, d’Australie occidentale, d’Australie du Sud et de Tasmanie). Dans l’État australien du Queensland, cet horizon est uniformément de douze mois tandis qu’il est de six mois en Nouvelle-Zélande » ([127]).

● Dans son rapport de mai 2023 intitulé « Fin de vie : faire évoluer la loi ? », le Conseil économique, social et environnemental préconise « une modification de la loi pour affirmer qu’en fin de vie, le droit à l’accompagnement est ouvert jusqu’à l’aide active à mourir » ([128]).

● Enfin, le rapport final de la Convention citoyenne sur la fin de vie du 2 avril 2023 indique « qu’au terme de débats nourris et respectueux, la Convention citoyenne s’est positionnée majoritairement en faveur d’une ouverture de l’aide active à mourir pour les raisons suivantes : respecter la liberté de choix de chacun ; combler les insuffisances du cadre d’accompagnement actuel (notamment la sédation profonde et continue) ; mettre fin aux situations ambiguës constatées » ([129]). 76 % des 184 conventionnels se sont positionnés en faveur de l’ouverture de l’aide active à mourir.

II.   Le dispositif proposÉ

Le titre II du présent projet de loi vise à répondre aux limites du cadre actuel sur la fin de vie en ouvrant l’accès à une aide à mourir. Ce faisant, il renforce les droits des malades consacrés dans le code de la santé publique : « Toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté » ([130]). Pour autant, la plupart des dispositions qu’il prévoit (articles 5 à 17) ne fait pas l’objet d’une codification malgré la recommandation du Conseil d’État en ce sens ([131]).

A.   Définition de l’aide à mourir

1.   Le « modèle français » de l’aide à mourir

L’article 5 de la présente loi donne la définition de l’aide à mourir. Celle-ci est définie comme le fait « [d’] autoriser et [d’]accompagner la mise à disposition, à une personne qui en a exprimé la demande, d’une substance létale […] afin qu’elle se l’administre ou, lorsqu’elle n’est pas en mesure physiquement d’y procéder, se la fasse administrer par un médecin, un infirmier ou une personne volontaire qu’elle désigne ».

Cette définition de l’aide à mourir place donc le patient au centre du dispositif puisque c’est à lui que revient finalement la responsabilité de faire le dernier geste. Seules les personnes qui ne seront pas en mesure physiquement de le faire pourront demander l’intervention d’un médecin, d’un infirmier ou d’une « personne volontaire » pour l’administration de la substance létale.

L’article 5 appelle plusieurs observations.

● S’agissant de l’expression d’« aide à mourir », le projet loi utilise un terme « simple et humain » selon les mots du président de la République ([132]). Cette terminologie, qui n’a pas appelé d’« objection » du Conseil d’État ([133]), rappelle celle utilisée par le CCNE dans son avis n° 139 précité qui évoquait une « aide active à mourir », tout en écartant l’adjectif « actif » qui suppose qu’il existe une « aide passive à mourir », expression parfois associée à la sédation profonde et continue jusqu’au décès.

Le concept d’« aide à mourir » met en exergue la dimension fraternelle de la loi, « une loi qui concilie l’autonomie de l’individu et la solidarité de la nation » ([134]). Il permet en outre de couvrir les deux modalités de mise en œuvre du dispositif décrit à l’article 5 et d’éviter de recourir à des notions qui seraient peu pertinentes au regard de la philosophie du projet de loi. L’aide à mourir ne peut être réduite ni à un suicide assisté car le malade doit remplir des conditions strictes et être accompagné jusqu’au dernier moment, ni à une euthanasie dans la mesure où il reviendra au malade de s’administrer la substance létale dans la plupart des cas ([135]). Dans les deux hypothèses, la volonté, libre, éclairée et répétée du malade, sera indispensable à la réalisation de ce dernier geste.

De surcroît, la notion d’« aide à mourir » témoigne de la singularité du modèle proposé. Elle permet de se démarquer de la législation en vigueur dans différents pays. L’étude d’impact du projet de loi souligne que « les différents schémas d’aide à mourir existant en Europe et dans le monde ont fait l’objet d’un examen visant à déterminer s’ils pouvaient constituer des modèles applicables, puis ont été progressivement écartés. Le modèle belge n’a tout d’abord pas été privilégié, dans la mesure où il fait peser une grande responsabilité sur les soignants et intègre une ouverture de l’aide à mourir aux mineurs. Le modèle suisse n’a par ailleurs pas été envisagé car, s’il permet de responsabiliser les patients éligibles et de les laisser libres de leur choix ultimement, il ne couvre pas les situations dans lesquelles la personne n’a pas la capacité physique de s’auto-administrer le produit létal. Ainsi, aucun de ces modèles n’a finalement été retenu, en l’absence d’une conformité absolue avec la philosophie et les principes français devant encadrer la fin de vie et d’un manque de prise en compte de la réalité des situations vécues identifiées dans les limites du cadre existant » ([136]).

● Plusieurs points abordés par l’article 5 ne sont pas précisés :

– les critères que doit remplir la personne qui demande l’aide à mourir, car ils sont mentionnés à l’article 6 ;

– les modalités d’expression de la demande qui, en l’état, pourrait être exprimée par écrit ou par oral ;

– les modalités d’« administration de la substance létale ». Si le chapitre III du titre II donne des précisions sur la prescription, l’élaboration de la préparation magistrale létale par une pharmacie à usage intérieur ou encore sa délivrance par une pharmacie d’officine au médecin ou à l’infirmier qui accompagne le malade, le projet de loi ne donne pas de détails sur la nature et le mode d’administration de la substance. Cette expression pourrait recouvrir plusieurs réalités qui seront précisées par voie réglementaire, de sorte que l’administration serait en principe orale (ingestion sous forme liquide ou de pilules). Mais la substance létale pourrait aussi être injectable ([137]) ;

 la notion de « personne volontaire », qui a fait l’objet de discussions nourries lors des auditions de la commission spéciale. Le recours à une personne autre que le médecin ou l’infirmier accompagnant le malade pour lui administrer la substance létale suscite de nombreuses interrogations. En l’absence de précision, il pourrait s’agir de toute personne, majeure ou mineure, qui accepterait la demande du malade, comme un proche mais pas uniquement. Cette possibilité présente au moins deux avantages. Non seulement elle renforce l’effectivité de l’accès à l’aide à mourir, mais elle permet aussi de protéger sur le plan pénal cette personne volontaire qui pourrait dans les faits, en accord avec le médecin ou l’infirmier, procéder à l’administration de la substance létale vue par certains comme « un dernier geste d’amour ».

2.   La protection pénale de la personne administrant la substance létale

● La rédaction du premier alinéa de l’article 5, qui précise que « l’aide à mourir consiste à autoriser et à accompagner la mise à disposition, à une personne qui en a exprimé la demande, d’une substance létale (…) », vise à exonérer pénalement l’ensemble des actes entrant dans le champ de l’aide à mourir, détaillés au titre II du présent projet de loi. Cette disposition doit ainsi permettre de protéger les professionnels qui interviennent dans la procédure, depuis l’autorisation donnée par le médecin jusqu’à l’administration de la substance létale en passant par sa préparation et sa mise à disposition respectivement par la pharmacie à usage intérieur et la pharmacie d’officine.

L’aide à mourir constituerait ainsi un acte autorisé par la loi au sens de l’article 122-4 du code pénal selon lequel « n’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ».

Cet article 122‑4 du code pénal prévoit en effet une dérogation à l’interdit de tuer, inscrit à l’article 221‑1 du code pénal ([138]) ainsi que dans les codes de déontologie des médecins et des infirmiers, selon lesquels ils n’ont « pas le droit de provoquer délibérément la mort » ([139]).

L’entrée en vigueur de l’article 5 du projet de loi impliquera de faire évoluer ces dernières dispositions, qui relèvent du niveau réglementaire, pour introduire une exception au titre du rôle que jouerait un médecin ou un infirmier dans la mise en œuvre d’une aide à mourir à la demande d’un malade qui ne pourrait s’administrer lui-même la substance létale.

● Le Conseil d’État estime que, sous réserve de plusieurs observations prises en compte par le Gouvernement avant sa transmission à l’Assemblée nationale, « le projet de loi décrit de manière suffisamment claire, détaillée et précise les actes autorisés et leurs conditions de réalisation ainsi que les différentes étapes de la procédure et qu’il satisfait, par conséquent, aux exigences qui découlent du principe de légalité des délits et des peines », condition indispensable pour que l’aide à mourir puisse constituer une cause d’irresponsabilité pénale au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel ([140]). Il souligne cependant qu’il « ne peut être exclu que des manquements dans la mise en œuvre de la procédure prévue pour l’accès à l’aide à mourir puissent donner lieu à des poursuites, notamment pour le délit d’homicide involontaire, dans les conditions et selon les distinctions prévues par l’article 2216 du code pénal ».

B.   conditions d’accès À l’aide à mourir

Très largement inspiré de l’avis n° 139 du CCNE, l’article 6 détaille les cinq conditions d’accès à l’aide à mourir. Comme le souligne le Conseil d’État, « les conditions d’accès à l’aide à mourir sont strictement encadrées par le projet de loi » ([141]).

1.   La personne doit « être âgée d’au moins 18 ans »

Cette condition exclut du dispositif l’ensemble des mineurs, y compris les mineurs émancipés ([142]). L’étude d’impact indique que le choix de ne pas ouvrir l’aide à mourir aux mineurs a été fait notamment pour des raisons :

– scientifiques, car « les traitements actuels sont de plus en plus prometteurs pour les affections chez de jeunes personnes » ;

– éthiques, car « le mineur n’est pas toujours capable de discernement et le rôle des parents, titulaires de l’autorité parentale, peut être discutable dans cette prise de décision du fait de leur rôle dans la protection de la santé de l’enfant » ([143]).

À l’inverse, l’ensemble des majeurs, y compris les majeurs protégés, peuvent, sous réserve de respecter les autres conditions édictées par le projet de loi, demander l’aide à mourir.

2.   La personne doit « être de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France »

La condition de nationalité française ou de résidence stable et régulière est justifiée par la couverture des frais associés à l’aide à mourir par l’assurance maladie, prévue à l’article 19.

Les citoyens étrangers pourront demander à bénéficier d’une aide à mourir sous réserve de résider en France « de façon stable et régulière ». Cette expression est notamment utilisée à l’article L. 111‑11 du code de la sécurité sociale ([144]). Ces deux critères feront l’objet d’une vérification par le médecin sur la base de pièces justificatives précisées par voie réglementaire et versées dans le système d’information ([145]).

3.   La personne doit être atteinte d’une « affection grave et incurable engageant le pronostic vital à court ou moyen terme »

Cette condition repose sur trois critères cumulatifs : l’existence d’une affection grave mais aussi incurable, laquelle doit engager le pronostic vital à court ou moyen terme.

● Pour accéder à l’aide à mourir, la personne devra être atteinte d’une maladie « grave et incurable ».

Cette condition s’inscrit dans la continuité de celles exigées pour la mise en œuvre d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès prévue par la loi Claeys‑Leonetti. La personne doit être atteinte d’une maladie qui engage son pronostic vital (donc grave) et qui ne peut être guérie (donc incurable). Comme le souligne l’étude d’impact, ces deux adjectifs sont importants car la gravité de la maladie ne présume pas des chances de guérison (exemple du cancer) tandis que l’incurabilité n’implique pas nécessairement l’engagement du pronostic vital (exemple de l’arthrose).

● La personne devra en outre voir « son pronostic vital engagé à court ou moyen terme ».

La condition d’engagement du pronostic vital à moyen terme pour ouvrir l’accès à l’aide à mourir vise notamment à apporter une solution aux personnes sans espoir de guérison qui souffrent mais qui ne peuvent pas être placées sous sédation profonde et continue jusqu’au décès selon le cadre actuel.

L’horizon de court ou moyen terme n’est pas défini à l’article 5, ce que n’a pas manqué de relever un très grand nombre de personnes auditionnées par la commission spéciale. Elles se sont fortement interrogées sur la signification de la notion de moyen terme en l’espèce. Le Gouvernement admet d’ailleurs que « l’engagement du pronostic vital à moyen terme ne peut pas être défini de manière juridique, mais implique une échelle de prédictibilité du décès qui est connue par le corps médical, ce qui est plus susceptible de limiter les dérives tout en incluant des personnes exclues des dispositifs actuels » puisque seules les personnes dont le pronostic vital est engagé à court terme peuvent accéder à une sédation profonde et continue jusqu’au décès ([146]).

Pour autant, l’étude d’impact, qui s’appuie sur les travaux précédents de la HAS s’agissant de la sédation profonde et continue, précise que « le moyen terme se compte en semaines ou mois et correspond à une période pour laquelle l’évaluation de ce diagnostic a pu être réalisée par les professionnels de santé » ([147]). Le long terme renverrait à un horizon de plusieurs années ([148]). Dans cette optique, une personne atteinte d’une maladie neurodégénérative comme la sclérose latérale amyotrophique (SLA) – ou maladie de Charcot –, affection très souvent citée dans les débats, ne pourrait pas nécessairement accéder à l’aide à mourir, en particulier au début de la maladie, dès lors que médecin estime qu’il lui reste plusieurs années à vivre.

Le Conseil d’État partage cette analyse. Le moyen terme ne peut selon lui être entendu « que dans le sens employé par la pratique médicale, pour laquelle [il] correspond à un horizon temporel qui n’excède pas douze mois. Il observe que les modalités d’appréciation de l’horizon de “moyen terme” pourront être utilement éclairées, selon les pathologies en cause, par des recommandations formulées par la Haute Autorité de santé » ([149]).

Lors de son audition, le président de la HAS, qui a été saisie par la ministre du travail, de la santé et des solidarités le 22 avril dernier, a indiqué à la commission spéciale que ces recommandations ne seraient pas formulées avant la fin de l’année 2024.

Professeure émérite de droit public à l’Université Paris Panthéon-Assas, Mme Martine Lombard souligne les enjeux médicaux et judiciaires associés au maintien de la condition du pronostic vital engagé à moyen terme, aussi bien pour les médecins que pour les malades et leurs proches : « Poser une telle condition serait faire peser une épée de Damoclès d’abord sur le malade, à qui un médecin risquerait d’opposer un refus au motif qu’il ne pourrait pas s’engager clairement sur un tel terrain, mais aussi sur les médecins, puisque des tiers, en pratique des proches du malade ayant été aidé à mourir, pourraient contester l’appréciation des médecins sur une telle condition de pronostic vital engagé à moyen terme, et cela en saisissant un juge pénal pour homicide (au motif que la dépénalisation de l’aide à mourir prévue au second alinéa de l’article 5 ne s’appliquerait alors pas, faute précisément, selon les plaignants, que la condition de pronostic vital engagé à moyen terme du 3° de l’article 6 ait été remplie) » ([150]).

Il convient de relever que cette condition a pu être inspirée par le cadre législatif en vigueur en Oregon, où le pronostic vital du malade doit être au maximum de six mois, et dans d’autres États américains ou australiens. Toutefois, elle constituerait une spécificité française en Europe au regard des législations belge – sauf pour les mineurs –, néerlandaise et espagnole qui ne prévoient pas de condition temporelle relative à l’engagement du pronostic vital. Enfin, la quasi-totalité des professionnels de santé, notamment les médecins, qu’ils soient favorables ou opposés au projet de loi, ont clairement exprimé l’impossibilité d’établir un pronostic vital de manière fiable et précise au-delà de quelques heures ou de quelques jours.

4.   La personne doit présenter « une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable lorsque la personne ne reçoit pas ou a choisi d’arrêter de recevoir des traitements »

Afin de remplir cette condition, au moins deux critères doivent être réunis.

● D’une part, la personne atteinte d’une affection grave et incurable engageant son pronostic vital à court ou moyen terme devra présenter une souffrance physique ou psychologique nécessairement liée à cette affection. Cette précision constitue une garantie afin d’exclure les souffrances exclusivement liées à des troubles psychiques ou psychologiques qui n’auraient pas de lien direct avec la pathologie qui engage le pronostic vital de la personne.

Ainsi que l’a fait remarquer le Conseil d’État, « une personne faisant état de souffrances psychologiques insupportables liées à l’annonce d’une affection grave et incurable engageant son pronostic vital à l’horizon de quelques mois, ce qui n’est pas rare à l’annonce d’un tel diagnostic, pourra remplir cette condition alors qu’elle ne subit pas encore de souffrances physiques et qu’elle aura refusé un traitement de nature à soulager ses souffrances présentes et à venir » ([151]).

● D’autre part, la souffrance ressentie devra être soit réfractaire aux traitements, soit insupportable lorsque la personne ne reçoit pas ou a choisi d’arrêter de recevoir des traitements.

La Haute Autorité de santé définit une souffrance comme réfractaire lorsque « tous les moyens thérapeutiques et d’accompagnement disponibles et adaptés ont été proposés et/ou mis en œuvre : sans amélioration de la situation du patient ; ou qu’ils entraînent des effets indésirables inacceptables ; ou que leurs effets thérapeutiques ne sont pas susceptibles d’agir dans un délai acceptable pour le patient ». Elle rappelle également que « le patient est le seul à pouvoir apprécier le caractère insupportable de sa souffrance, des effets indésirables ou du délai d’action du traitement » ([152]).

5.   La personne doit être « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée »

Bien que cette condition figure en dernière position, elle n’en est pas moins essentielle.

● Elle implique que la personne qui demande une aide à mourir prenne sa décision sans pression extérieure, en toute connaissance de cause, c’est-à-dire en ayant conscience de la portée et des conséquences de son choix.

C’est la raison pour laquelle l’article 8 indique expressément qu’il est considéré que les personnes qui, outre une maladie grave et incurable, souffrent d’une maladie psychiatrique qui altère gravement leur discernement lors de la demande d’aide à mourir, ne peuvent être regardées comme manifestant une volonté libre et éclairée. De fait, cette condition exclut également les personnes atteintes de maladies neurodégénératives qui altèrent le discernement, à l’image de la maladie d’Alzheimer, ce que le président de la République avait déjà eu l’occasion de préciser ([153]).

Le recours à la notion de volonté permet d’exprimer le caractère central de la décision de la personne dans le processus d’aide à mourir, qui ne doit pas être subi par la personne malade ni imposé par les professionnels de santé. La notion de « volonté libre et éclairée » a été préférée à celle de « discernement », qui peut être considérée équivalente mais qui est surtout utilisée dans le domaine de la responsabilité civile et pénale. Elle fait également référence à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui exige que la décision du patient de demander qu’il soit mis fin à ses jours soit prise librement et en toute connaissance de cause ([154]). Il convient enfin de rappeler que l’expression « libre et éclairé » est déjà utilisée dans le code de la santé publique lorsque le consentement du malade doit être recherché par les professionnels de santé avant de pratiquer un acte médical ou un traitement ([155]).

● Le titre II du projet de loi prévoit que la volonté du malade soit réitérée au moins deux fois :

– à l’issue du délai de réflexion d’une durée minimale de deux jours lorsque le médecin s’est prononcé en faveur de la demande d’aide à mourir (IV de l’article 8) ;

– avant l’administration de la substance létale (article 11).

En outre, le caractère libre et éclairé de la manifestation de la demande doit être vérifié dans deux hypothèses :

– en l’absence de confirmation de la demande dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision du médecin (IV de l’article 8) ;

– si la date retenue pour précéder à l’administration de la substance létale est postérieure à un délai de trois mois à compter de la notification (article 9).

La façon dont la volonté doit être manifestée n’étant pas précisée dans le projet de loi, le malade pourrait, en l’état, procéder par écrit ou par oral.

 Il convient enfin de souligner que le dispositif proposé exclut que la volonté des malades puisse être uniquement exprimée à un instant t, dans leurs directives anticipées par exemple, dès lors qu’ils doivent être en mesure de manifester leur volonté – ou de se rétracter – jusqu’au dernier moment. Par voie de conséquence, le présent projet de loi ne permet pas à des patients devenus inconscients ou du moins hors d’état d’exprimer leur volonté, du fait d’un accident ou d’une dégradation brutale de leur situation, de se voir administrer une substance létale, quand bien même ils auraient réuni les conditions pour accéder à l’aide à mourir. Là aussi, cette impossibilité constituerait une spécificité au regard des lois belge, néerlandaise et espagnole qui l’autorisent.

L’aide à mourir dans les législations étrangères

Pays

Conditions d’accès

Belgique

– La loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie dépénalise l’euthanasie et donne le cadre dans lequel le médecin peut la pratiquer. Le suicide assisté n’est pas dépénalisé dans la loi mais est une pratique tolérée dans les mêmes conditions que l’euthanasie avec un médecin présent lors de l’auto-administration de la substance.

– Le patient doit être capable de discernement.

S’il est inconscient et dans une situation irréversible, il peut bénéficier de l’euthanasie s’il a rédigé une déclaration anticipée (d’une durée indéterminée) contenant la demande.

– Le patient doit exprimer sa demande de manière volontaire, réfléchie et répétée par écrit.

– Le patient doit être dans une situation médicale sans issue, grave et incurable.

– Le patient doit faire état de souffrance physique ou psychique constante, insupportable et qui ne peut être apaisée du fait de la situation médicale.

– La loi ne précise pas à quel terme le pronostic vital doit être engagé.

– Les mineurs ont le droit à ce dispositif aux mêmes conditions, hormis le critère de la souffrance psychique qui n’est pas admis pour eux, et le critère du pronostic vital qui doit être engagé à brève échéance pour les mineurs.

Espagne

– La loi du 24 mars 2021 réglementant l’euthanasie autorise l’euthanasie et le suicide assisté en les rassemblant sous un même terme « euthanasie ». Cette loi ouvre un droit à toute personne de solliciter et recevoir une « aide au décès ».

– Le patient doit avoir la nationalité espagnole ou résider sur le territoire depuis au moins 12 mois et être âgé de 18 ans ou plus.

– Le patient doit être capable de discernement : il doit être capable et conscient au moment de la demande.

Si le patient est considéré comme en incapacité de fait, il peut bénéficier du dispositif s’il a rédigé des directives anticipées en ce sens.

– Le patient doit formuler sa demande de manière autonome, authentique et libre, par écrit.

– Le patient doit être atteint d’une maladie grave et incurable ou être dans un état grave, chronique et invalidant.

– Le patient doit subir des souffrances physiques ou mentales constantes et insupportables du fait de sa situation médicale.

– La loi ne précise pas à quel terme le pronostic vital doit être engagé.

Oregon
(États-Unis) ([156])

– Premier État américain à avoir légalisé, en 1997, le suicide assisté.

– Le patient doit habiter l’Oregon et avoir plus de 18 ans.

– Le patient doit être capable de discernement ; les patients souffrant d’une maladie psychique ou d’une dépression ne sont pas éligibles.

– Le patient doit habiter l’Oregon et avoir plus de 18 ans.

– Le patient doit avoir été diagnostiqué par le médecin responsable et un médecin consultant d’une maladie incurable en phase terminale (le pronostic vital doit être engagé dans un horizon de 6 mois).

– Le patient doit avoir exprimé volontairement son souhait de mourir par écrit.

Pays-Bas

– La loi du 12 avril 2001 autorise l’aide au suicide et l’interruption de la vie par un médecin sur demande.

– Le patient doit être âgé de 12 ans ou plus. Pour les mineurs âgés de 12 à 16 ans, le consentement des représentants légaux est nécessaire, et pour les mineurs de 16 à 18 ans, les parents ou représentants légaux doivent être associés à la prise de décision.

– Le patient doit être capable de discernement.

– Le patient doit exprimer sa demande de manière volontaire et mûrement réfléchie.

Les patients âgés de 16 ans ou plus peuvent bénéficier de l’aide active à mourir, même s’ils n’ont plus la capacité d’exprimer leur volonté, dès lors qu’ils ont rédigé une déclaration contenant une demande d’euthanasie lorsqu’ils étaient encore considérés comme capables de faire une évaluation raisonnable de leurs intérêts vis-à-vis de l’aide active à mourir.

– Le patient doit être atteint d’une maladie incurable.

– Le patient doit subir une souffrance physique ou psychique insupportable et sans perspective d’amélioration du fait de sa maladie.

– La loi ne précise pas à quel terme le pronostic vital doit être engagé.

Suisse ([157])

– L’assistance au suicide dans un but altruiste ou désintéressé n’est pas interdite.

– Aucun critère de nationalité n’est requis.

– Le patient doit disposer d’une capacité de discernement.

– La volonté du patient doit être indépendante.

– Le patient doit endurer une souffrance insupportable due à des symptômes de la maladie et/ou à des limitations fonctionnelles.

– La fin de vie ne doit pas être nécessairement proche (depuis 2021).

– L’examen d’autres alternatives est obligatoire : options thérapeutiques, autres offres d’aides et de soutien.

Source : étude d’impact, pp. 83-86.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

Outre deux amendements codifiant les articles 5 et 6 ([158]) et des amendements rédactionnels de la rapporteure Laurence Maillart-Méhaignerie, la commission a adopté plusieurs amendements sur des points majeurs du projet de loi.

● À l’article 5, Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ont été à l’initiative d’une évolution de la définition de l’aide à mourir. Elle consiste désormais à autoriser et à accompagner « une personne qui en a exprimé la demande à recourir à » une substance létale dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles 6 à 11 ([159]). Cette nouvelle rédaction souligne que la personne qui demande l’aide à mourir est assistée et qu’il ne s’agit pas uniquement d’accompagner la mise à disposition du produit létal.

La commission a également adopté, avec un avis favorable du Gouvernement, un amendement de la rapporteure Laurence Maillart-Méhaignerie afin d’encadrer la notion de « personne volontaire » : celle-ci doit être une personne majeure et « ne peut percevoir aucune rémunération ou gratification à quelque titre que ce soit en contrepartie de sa désignation » ([160]). Un sous-amendement de Mme Marie-Noëlle Battistel et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés précise qu’elle doit « se manifester » pour administrer la substance létale ([161]) – et non pas simplement « accepter de le faire » – et un sous-amendement de Mme Marie-Noëlle Battistel et des membres du groupe Socialistes et apparentés précise qu’elle est accompagnée et assistée par le médecin ou l’infirmier, rappelant ainsi les articles suivants du titre II ([162]).

● À l’initiative de Mme Marie-Noëlle Battistel et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés, la commission a adopté, avec un avis de sagesse de la rapporteure et du Gouvernement, un amendement portant article additionnel précisant que le droit à « une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance », consacré à l’article L. 1110‑5 du code de la santé publique, « comprend celui de bénéficier de l’aide à mourir » (nouvel article 5 bis([163]).

● À l’article 6, la commission a fait évoluer deux conditions d’ouverture de l’accès à l’aide à mourir:

– la condition de « l’affection grave et incurable engageant le pronostic vital à court ou moyen terme » a été remplacée par celle d’une « affection grave et incurable en phase avancée ou terminale » (amendements identiques de M. Stéphane Delautrette et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés ainsi que de Mme Anne-Laurence Petel et plusieurs de ses collègues des groupes Renaissance et Démocrate (MoDem et Indépendants)([164]) ;

– la condition relative à l’existence d’une « souffrance physique ou psychologique liée à l’affection » a été remplacée par celle consistant en une « souffrance physique accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique » (amendement de Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente de la commission spéciale) ([165]).

*

*     *

 

Chapitre III
Procédure

Article 7
Demande d’accès à l’aide à mourir

Adopté avec modifications

Cet article définit les modalités de présentation de la demande d’aide à mourir par le patient et l’obligation d’informations incombant au médecin.

I.   Le droit en vigueur

● Si aucun principe constitutionnel ou conventionnel ne fait obstacle à un dispositif instaurant, en fin de vie, une assistance au suicide et une euthanasie à la demande de la personne, les jurisprudences constitutionnelles et européennes exigent, en revanche, que le dispositif soit assorti de garanties suffisantes afin de sauvegarder la dignité de la personne humaine et la liberté personnelle.

Ces garanties, de nature matérielle et procédurale, doivent assurer le respect de la volonté libre et éclairée du patient.

Ainsi, statuant sur la procédure d’arrêt des traitements et de mise en œuvre de la sédation profonde et continue jusqu’au décès lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, le Conseil constitutionnel a mis l’accent sur les garanties procédurales tendant à rechercher la volonté du patient. Il a notamment relevé que « le médecin doit préalablement s’enquérir de la volonté présumée du patient », soit en respectant les directives anticipées, soit en consultant la personne de confiance désignée par le patient ou, à défaut, sa famille ou ses proches. Il a également considéré que la procédure collégiale destinée à éclairer le médecin était entourée de garanties suffisantes pour assurer sa conformité à la Constitution au regard des principes de respect de dignité de la personne humaine et de liberté personnelle ([166]).

Le respect de la volonté du patient est également primordial dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) lorsqu’elle apprécie la conformité des procédures d’euthanasie ou de suicide assisté au droit à la vie consacré par l’article 2 la Convention. La Cour juge ainsi que l’article 2 oblige les autorités nationales à empêcher un individu de mettre fin à ses jours si sa décision n’a pas été prise librement et en toute connaissance de cause ([167]).

À cet égard, la Cour note également que le Comité des droits de l’homme des Nations unies a considéré que l’euthanasie ne constituait pas en soi une atteinte au droit à la vie si elle est entourée de solides garanties légales et institutionnelles permettant de vérifier que les professionnels de la médecine appliquent une décision explicite, non ambiguë, libre et éclairée de leur patient, afin que toute personne soit protégée contre les pressions et les abus.

Au regard de ces différentes jurisprudences, le Conseil d’État relève dans son avis sur le présent projet de loi que, pour être conforme aux principes constitutionnels et conventionnels, le « dispositif doit prévoir, d’une part, que la demande de la personne s’appuie sur la manifestation d’une volonté libre et éclairée et, d’autre part, que cette expression de volonté, s’agissant en particulier des personnes les plus vulnérables, est entourée de garanties renforcées ».

À cet égard, la procédure relative à la décision de refus ou d’interruption des traitements prise par le patient, lorsqu’elle est susceptible de mettre sa vie en danger, nécessite une réitération de sa décision dans un délai raisonnable, conformément à l’article L. 1111-4 du code de la santé publique. De même, lorsque le patient est conscient, la mise en œuvre de la sédation profonde et continue jusqu’au décès ne peut avoir lieu qu’à sa demande, à l’issue d’une procédure collégiale destinée à vérifier que les conditions exigées par la loi sont remplies, comme le prévoit l’article L. 1110-5-2 du code de la santé publique.

● Des garanties supplémentaires peuvent être exigées en ce qui concerne les personnes vulnérables conformément à la jurisprudence la CEDH qui considère que les « autorités [ont] le devoir de protéger les personnes vulnérables même contre des agissements par lesquels elles menacent leur propre vie » ([168]). Les majeurs protégés sont susceptibles d’entrer dans une telle catégorie bien que les garanties procédurales spécifiques pouvant être instaurées doivent également respecter leur autonomie.

Conformément à l’article 425 du code civil, toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté, peut bénéficier d’une mesure de protection juridique.

Les mesures de protection judiciaire sont de différents types. Elles font l’objet d’une gradation en fonction de leur caractère contraignant et doivent être proportionnées à l’état de vulnérabilité de la personne. La mesure de protection est décidée par le juge des tutelles, qui statue non seulement sur l’opportunité d’ouvrir une mesure mais également sur son degré de protection.

La mesure de curatelle, qui prévoit l’assistance de la personne pour les actes patrimoniaux importants, est moins contraignante que la mesure de tutelle, qui prévoit, en principe, sa représentation pour tous les actes de la vie civile.

Toutefois, des aménagements sont possibles entre les régimes de curatelle et de tutelle. Le curateur peut solliciter du juge l’autorisation de représenter la personne vulnérable pour un acte déterminé tandis qu’en régime de tutelle, le juge peut énumérer certains actes que la personne pourra faire seule ou seulement avec l’assistance du tuteur.

En outre, l’article 458 du code civil précise que, sous réserve des dispositions particulières prévues par la loi, l’accomplissement des actes dont la nature implique un consentement strictement personnel ne peut jamais donner lieu à assistance ou représentation de la personne protégée. Il existe ainsi un noyau dur de droits personnels des majeurs protégés qu’ils exercent seuls.

● En matière médicale, le législateur a souhaité exclure de certains dispositifs les majeurs protégés qui bénéficient d’une mesure de protection avec représentation relative à la personne. Cela est notamment le cas du don du sang ou du don d’organes. En outre, pour certains actes médicaux graves, l’autorisation du juge des tutelles est systématiquement nécessaire pour l’ensemble des majeurs protégés, tels que la stérilisation définitive (article L. 2123‑2 du code de la santé publique) ou le don de cellules hématopoïétiques (article L. 1241‑4 du même code).

En dehors de ces exceptions, le principe est celui de l’autonomie des personnes protégées, qui doivent prendre seules les décisions relatives à leur personne dans la mesure où leur état le permet ([169]). L’article L. 1111‑4 du code de la santé publique prévoit explicitement que le consentement de la personne sous tutelle doit systématiquement être recherché pour la mise en œuvre de tout acte médical, au besoin avec l’assistance de la personne chargée de sa protection. Lorsque la personne protégée n’est pas elle est apte à exprimer sa volonté, il appartient à la personne chargée de la mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne de donner son autorisation, en tenant compte de l’avis exprimé par la personne protégée. L’intervention du juge des tutelles est prévue, sauf urgence, en cas de désaccord entre le majeur protégé et la personne chargée de sa protection.

Le législateur n’a pas exclu les personnes protégées du droit de refuser un traitement ou d’accéder à une sédation profonde et continue jusqu’au décès, ni prévu l’autorisation obligatoire du juge des tutelles. L’arrêt des traitements et la sédation profonde et continue sont donc ouverts aux majeurs protégés. La loi du 2 février 2016 permet au majeur protégé de désigner une personne de confiance ou de rédiger ses directives anticipées avec l’autorisation du juge des tutelles.

Les dispositions réglementaires prévoient seulement que, lorsque la personne protégée est hors d’état d’exprimer sa volonté, le médecin recueille l’avis de la personne chargée de la mesure de représentation, sans être toutefois tenu de suivre cet avis ([170]).

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 7 du présent projet de loi définit les conditions de présentation de la demande d’aide à mourir par le patient et les informations que le médecin doit lui fournir dans ce cadre.

● D’une part, le I prévoit les modalités de présentation de la demande d’aide à mourir.

La personne qui souhaite accéder à l’aide à mourir peut présenter sa demande auprès du médecin en activité de son choix. Cette liberté de choix du médecin permet de ne pas allonger la procédure ou nuire à son effectivité si le patient ne dispose pas de médecin traitant.

En revanche, afin d’assurer l’indépendance du médecin à l’égard du patient et prévenir tout conflit d’intérêt potentiel, le I du présent article dispose que le médecin ne peut être un parent, un allié, le partenaire ou un ayant droit du patient.

Le projet de loi précise que la demande formulée par la personne doit être expresse. La définition de la forme de cette demande est renvoyée par l’article 15 du projet de loi à un décret en Conseil d’État.

Il est en outre précisé que le patient ne peut introduire simultanément plusieurs demandes.

● Le présent article prévoit des dispositions spécifiques concernant les personnes faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec assistance ou représentation relative à la personne. Celles-ci sont inclues dans le droit d’accéder à l’aide à mourir. En effet, si l’article 6 du projet de loi dispose que pour être éligible à l’aide à mourir la personne doit être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée, les conditions d’ouvertures des mesures de protection « ne permettent pas d’exclure qu’une personne bénéficiant d’une mesure de protection juridique puisse être en mesure d’exprimer sa volonté » de telle façon, comme le relève le Conseil d’État dans son avis.

Le présent article dispose que les personnes faisant l’objet d’une mesure de protection juridique l’indiquent au médecin. Cette disposition concerne tant les mesures avec assistance à la personne (mesure de sauvegarde ou curatelle) qu’avec représentation (tutelle). Comme le précise l’étude d’impact, l’existence d’une telle mesure devrait en principe figurer dans le dossier médical partagé en vertu de l’article R. 1111‑42 du code de la santé publique, mais il est possible que celui-ci ne soit pas correctement renseigné.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État considère que l’inclusion des majeurs protégés dans le droit d’accéder à l’aide à mourir est cohérent avec les évolutions législatives récentes tendant à renforcer l’autonomie des majeurs protégés et le respect de leur liberté personnelle. Il estime en outre que « l’aide à mourir s’entend comme un "acte dont la nature implique un consentement strictement personnel", au sens de l’article 458 du code civil, qui ne peut jamais donner lieu à assistance ou représentation de la personne protégée ».

L’information du médecin sur l’existence d’une telle mesure de protection est nécessaire afin d’assurer la mise en œuvre des garanties spécifiques relatives aux personnes protégées prévues par l’article 8.

● D’autre part, le II de l’article 7 détaille les obligations d’informations qui pèsent sur le médecin qui recueille la demande d’aide à mourir.

Le médecin doit ainsi :

– informer le patient sur son état de santé, sur les perspectives de son évolution, les traitements et les dispositifs d’accompagnement disponibles ;

– proposer à la personne de bénéficier des soins palliatifs et s’assurer qu’elle puisse, le cas échéant, effectivement y accéder ;

– indiquer à la personne qu’elle peut renoncer à tout moment à sa demande ;

– expliquer à la personne les conditions d’accès à l’aide à mourir et sa mise en œuvre.

L’obligation d’information de la personne permet ainsi d’assurer le caractère éclairé de la demande et constitue une garantie procédurale primordiale. En outre, l’obligation de proposer une prise en charge en soins palliatifs et de s’assurer de l’effectivité de l’accès à ces soins garantit que la demande d’aide à mourir ne naît pas d’une impossibilité du patient de recevoir les soins appropriés à son état de santé et au traitement de sa souffrance.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement ([171]) de la rapporteure Laurence Cristol codifiant les dispositions du chapitre III du projet de loi relatif à la procédure d’aide à mourir au sein d’une nouvelle sous-section 3 « Procédure » dans de la nouvelle section 2 du chapitre I du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique et insérant les dispositions de l’article 7 au sein d’un nouvel article L. 1111‑12‑3.

La commission spéciale a également adopté plusieurs amendements précisant les conditions de présentation de la demande d’aide à mourir.

Adopté avec avis favorable de la rapporteure et du Gouvernement, un amendement de M. Cyrille Isaac-Sibille et Mme Geneviève Darrieussecq (groupe Démocrate (MoDem et Indépendants)) dispose que la demande ne peut être présentée lors d’une téléconsultation, considérant qu’un examen à distance du patient ne garantit pas la qualité d’écoute nécessaire à l’évaluation de la demande ([172]).

En outre, un amendement de la rapporteure Laurence Cristol a renforcé les garanties relatives à la présentation d’une demande par un majeur protégé ([173]). Alors que le projet de loi prévoyait qu’il revenait au patient d’indiquer au médecin qu’il fait l’objet d’une mesure de protection, l’amendement de la rapporteure inverse la charge de l’information en confiant au médecin le soin de demander à la personne si elle est protégée. L’amendement ajoute que le médecin pourra consulter le registre national des personnes sous protection créé par la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien‑vieillir et de l’autonomie, qui sera effectif au plus tard le 31 décembre 2026.

Les obligations d’information du patient ont été renforcées s’agissant des personnes en situation de handicap. L’amendement présenté par M. Sébastien Peytavie et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES dispose que le médecin propose à la personne en situation de handicap de bénéficier de tous les dispositifs et droits visant à garantir la prise en charge de ses besoins médicaux, matériels, psychologiques et sociaux ([174]).

Enfin, un amendement adopté à l’initiative de la rapporteure Laurence Cristol prévoit que le médecin qui reçoit la demande d’aide à mourir propose systématiquement au patient une consultation avec un psychologue clinicien ou un psychiatre ([175]).

 

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Article 8
Procédure d’examen de la demande d’aide à mourir jusqu’à la prescription de la substance létale

Adopté avec modifications

Cet article définit la procédure d’examen de la demande d’aide à mourir. Il prévoit une évaluation par le médecin désigné par le patient, rendue dans un délai maximal de quinze jours au terme d’une procédure consultative impliquant au moins deux autres professionnels de santé, dont un médecin n’intervenant pas auprès du patient.

Si le médecin considère que les conditions d’accès à l’aide à mourir sont remplies, le patient doit réitérer sa demande dans un délai qui ne peut être inférieur à 48 heures. Le médecin détermine alors, en concertation avec le patient, quel sera le professionnel de santé chargé de l’accompagner lors de l’administration de la substance létale, et procède à la prescription de celle-ci.

  1.   Le droit en vigueur

● La décision d’arrêt des traitements et la mise en œuvre de la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès, prévue par la loi Claeys-Leonetti précitée, est prise à l’issue d’une procédure collégiale instaurée à l’article L. 1110‑5‑2 du code de la santé publique.

La marche à suivre est définie par voie réglementaire ([176]). Elle repose sur la décision du médecin en charge du patient, qui se prononce à l’issue d’une procédure collégiale destinée à l’éclairer. La collégialité prend la forme d’une concertation avec les membres de l’équipe de soins, si elle existe, et de l’avis motivé d’au moins un médecin extérieur appelé en qualité de consultant.

Le code de la santé publique précise qu’il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant. En outre, l’avis motivé d’un deuxième consultant peut être recueilli par ces médecins si l’un d’eux l’estime utile.

La décision de limitation ou d’arrêt de traitement est motivée. La personne de confiance ou, à défaut, la famille, ou l’un des proches du patient est informé de la nature et des motifs de la décision de limitation ou d’arrêt de traitement.

Le Conseil constitutionnel a considéré la procédure collégiale destinée à éclairer le médecin entourée de garanties suffisantes pour assurer sa conformité à la Constitution au regard des principes de respect de dignité de la personne humaine et de liberté personnelle ([177]).

La Cour européenne des droits de l’homme attache une grande importance aux garanties procédurales des législations relatives à l’aide à mourir. S’agissant de la loi belge, la Cour a précisé, dans sa décision Mortier c. Belgique, exiger l’indépendance des différents médecins consultés tant à l’égard du patient qu’à l’égard du médecin traitant.

● S’agissant de l’information des proches du patient, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que la législation belge, qui ne prévoyait ni obligation d’information de la famille ni prise en compte de son avis, ne méconnaissait pas le droit au respect de la vie privée et familiale protégé à l’article 8 de la Convention, dès lors que cette absence d’implication était conforme au souhait de l’intéressé et correspondait tant au devoir de confidentialité des médecins qu’au respect du secret médical.

● Les législations étrangères ouvrant un droit au suicide assisté ou à l’euthanasie prévoient des procédures diverses qui font généralement appel à plusieurs médecins. Quant à la décision finale, elle est prise, selon les pays, par un médecin seul ou par un collège de médecins.

Ainsi, s’agissant de la procédure d’évaluation de l’éligibilité du patient à l’euthanasie, la législation belge prévoit que la décision est prise par un médecin seul qui a obligation de consulter un deuxième médecin, indépendant tant du patient qu’à l’égard du médecin traitant, et qui possède une compétence particulière quant à la pathologie en cause. Il s’entretient également avec l’équipe soignante en contact régulier avec le patient, si elle existe. En outre, si le médecin est d’avis que le décès n’interviendra manifestement pas à brève échéance, il doit consulter un troisième médecin, psychiatre ou spécialiste de la pathologie concernée.

En Espagne, la décision finale est prise par une commission de garantie et d’évaluation régionale composée d’au moins sept membres dont un médecin, un infirmier et un juriste.

La législation en vigueur dans l’Oregon prévoit une première évaluation par le médecin traitant qui sollicite ensuite l’avis d’un second médecin, spécialiste de la pathologie de la personne. Celui-ci doit confirmer l’éligibilité du patient au suicide assisté. En outre, si l’un des médecins considère qu’il existe des doutes sur l’existence d’une pathologie psychiatrique altérant le discernent du patient, il l’oriente vers un psychologue ou un psychiatre qui confirme que le patient est en capacité d’exprimer une volonté éclairée.

S’agissant des délais de réflexion laissés aux patients ou des délais enserrant la mise en œuvre de l’aide active à mourir, les législations étrangères sont très diverses.

Les Pays-Bas et le Luxembourg ne prévoient, par exemple, aucun délai minimal de réflexion ou de mise en œuvre de l’aide à mourir.

Le Canada a supprimé le délai de réflexion obligatoire de dix jours qui existait auparavant. La procédure d’évaluation de l’admissibilité à l’aide à mourir demeure toutefois enserrée dans un délai d’au moins quatre-vingt-dix jours lorsque le décès du patient n’est pas susceptible d’intervenir à court terme. Cette durée peut être réduite si la personne risque de perdre sa capacité décisionnelle.

En Belgique, si le médecin traitant estime que le décès du patient n’interviendra manifestement pas à brève échéance, il doit laisser s’écouler un délai d’un mois entre la demande écrite du patient et l’euthanasie. En revanche, aucun délai ne s’impose si le décès est susceptible d’intervenir à court terme.

La législation portugaise prévoit un délai de réflexion du patient d’au moins deux mois.

En Suisse, la procédure d’assistance au suicide n’est pas prévue par la loi. Par conséquent, les procédures varient selon l’association que la personne choisit pour l’accompagner. Toutefois, le code de déontologie prévoit une évaluation de l’admissibilité au suicide assisté appréciée par deux entretiens médicaux, espacés d’au moins deux semaines.

II.   Le Dispositif ProposÉ

La procédure d’évaluation des critères d’accès à l’aide à mourir prévue par le projet de loi repose sur la décision du médecin auprès duquel le patient a introduit sa demande, prise au terme d’une procédure consultative nécessitant l’avis d’au moins deux autres professionnels de santé, dont un médecin. Ce cadre procédural vise à « prévenir d’éventuelles défaillances qui pourraient conduire à une mauvaise évaluation ou à une évaluation partiale des conditions d’éligibilité des personnes souhaitant une aide à mourir » comme le note l’étude d’impact.

● Le I du présent article prévoit que le médecin choisi par le patient procède à la vérification des conditions d’admissibilité prévues à l’article 6. Il précise expressément que les personnes dont une maladie psychiatrique altère gravement le discernement ne peuvent être regardées comme remplissant la condition d’aptitude à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.

Le médecin désigné par le patient vérifie les conditions dites « administratives », d’âge et de nationalité ou de résidence prévues aux 1° et 2° de l’article 6.

● En revanche, le II du présent article exige, pour la vérification des conditions nécessitant une appréciation médicale, que le médecin recueille l’avis d’autres professionnels de santé.

Ces conditions sont listées par les 3°, 4° et 5° de l’article 6. Elles tiennent à l’existence d’une affection grave et incurable engageant le pronostic vital à court ou moyen terme, à la souffrance physique ou psychologique liée à cette affection qui est soit réfractaire au traitement soit insupportable lorsque la personne a choisi d’arrêter de recevoir des traitements, et à l’aptitude à manifester sa volonté de manière libre et éclairée.

Pour l’appréciation de ces trois conditions, le médecin désigné par le patient doit obligatoirement recueillir l’avis de deux autres professionnels de santé, à savoir :

– un médecin qui n’intervient pas auprès de la personne malade et qui est spécialiste de la pathologie rencontrée si lui-même ne l’est pas ;

– un auxiliaire médical ou un aide-soignant qui intervient auprès de la personne ou, à défaut, un autre auxiliaire médical.

Le médecin consulté est un médecin qui « n’intervient pas auprès de la personne ». Il doit remplir vis-à-vis du patient les mêmes conditions d’indépendance que celles imposées à l’article 7 au premier médecin, c’est-à-dire ne pas avoir de liens familiaux ni être un ayant droit. Le projet de loi ajoute que le médecin consulté a accès au dossier médical de la personne et peut l’examiner avant de rendre son avis.

Le médecin en charge de la procédure peut également recueillir l’avis d’autres professionnels qui interviennent auprès de la personne. Le projet de loi fait notamment mention de psychologues, infirmiers ou aides-soignants, sans que cette énumération soit limitative.

Enfin, lorsque le patient fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec assistance ou représentation relative à la personne, le médecin doit informer la personne chargée de la mesure de protection et tenir compte de ses observations.

En dehors de cette situation, le projet de loi ne prévoit pas la consultation des proches. Selon l’étude d’impact, ce choix a été fait afin « de rappeler que la décision d’accéder à l’aide à mourir appartient à la personne seule ».

● Le III du présent article prévoit que le médecin se prononce dans un délai maximal de quinze jours à compter de la présentation de la demande d’aide à mourir. Cet encadrement vise, selon l’exposé des motifs, à « protéger l’accès de la personne à l’aide à mourir contre un traitement dilatoire de sa demande ».

Le médecin notifie sa décision motivée au patient. En outre, le projet de loi prévoit qu’il informe de cette décision la personne en charge d’une mesure de protection judiciaire.

● Le IV instaure un délai de réflexion pour le patient, d’un minimum de deux jours à compter de la notification de la décision du médecin autorisant l’accès à l’aide à mourir. Au terme de ce délai, le patient doit confirmer sa demande.

Le projet de loi ne fixe aucune limite maximale à ce délai de réflexion. En revanche, si la confirmation de la volonté de recourir à l’aide à mourir intervient plus de trois mois après la décision favorable du médecin, celui-ci doit procéder à nouvel examen du caractère libre et éclairé de la volonté du patient. Il revient au médecin de décider s’il est nécessaire, pour cette évaluation, de remettre en œuvre la procédure prévue au II.

● Le V prévoit que, lorsque la personne a confirmé sa demande, le médecin l’informe des modalités d’administration et d’action de la substance létale. Selon l’exposé des motifs, il s’agit « d’une information personnalisée sur les produits, le mode d’administration qui sera utilisé, l’existence d’une procédure en cas d’incident, la durée etc. ».

Le médecin et le patient déterminent ensemble le professionnel de santé qui sera chargé d’accompagner l’administration de la substance létale. Il s’agit d’un médecin ou d’un infirmier afin de pouvoir intervenir en cas d’incident.

● Le VI dispose que le médecin prescrit la substance létale conformément aux recommandations de bonnes pratiques élaborées par la Haute Autorité de santé aux termes de l’article 18 du projet de loi.

Le médecin adresse cette prescription à une pharmacie à usage intérieur autorisée à préparer la substance létale. Ces pharmacies seront désignées par arrêté ministériel conformément aux dispositions introduites à l’article L. 5121‑1 du code de la santé publique par l’article 18 du présent projet de loi.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol codifiant les dispositions du présent article au sein d’un nouvel article L. 1111‑12‑4 du code de la santé publique ([178]).

Un autre amendement de la rapporteure Laurence Cristol, également adopté avec avis favorable du Gouvernement, supprime la référence aux maladies psychiatriques parmi les maladies altérant gravement le discernement des patients et ne permettant pas d’accéder à l’aide à mourir ([179]). Il s’agit ainsi d’inclure l’ensemble des maladies altérant gravement le discernement, et non les seules maladies psychiatriques, afin d’éviter toute discrimination envers les personnes atteintes de ces pathologies.

La commission spéciale a en outre adopté plusieurs amendements renforçant les garanties liées à la procédure d’évaluation de la demande. Des amendements de la rapporteure Laurence Cristol ont précisé que le recueil des avis des professionnels de santé s’effectuait dans le cadre d’une procédure collégiale et pluriprofessionnelle ([180]), que le second médecin consulté était nécessairement un spécialiste de la pathologie du patient ([181]) et que la liste des professionnels pouvant être consultés inclut, si la personne est hébergée dans un établissement social ou médico-social, le médecin qui assure son suivi ou un professionnel de l’établissement qui l’accompagne ([182]). Il est de plus indiqué que la concertation entre professionnels peut se tenir à distance ([183]).

Un amendement de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outremer et Territoires a précisé qu’il ne devait pas exister de lien hiérarchique entre le médecin en charge de l’évaluation de la demande et le second médecin consulté. Ce dispositif reprend la formulation retenue dans la procédure collégiale prévue pour la sédation profonde et continue jusqu’au décès pour affermir l’indépendance des médecins dans leur décision ([184]).

Un amendement de la rapporteure Laurence Cristol dispose que le médecin consulté examine le patient, sauf s’il ne l’estime pas nécessaire, afin de ne pas alourdir inutilement la procédure, notamment en cas de pronostic vital engagé à court terme ([185]).

Un amendement de Mme Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues du groupe Écologiste - NUPES impose que la décision du médecin soit notifiée au patient à l’oral et à l’écrit afin d’assurer sa bonne information ([186]).

La commission spéciale a également adopté un amendement de Mme Bérangère Couillard et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance permettant que le délai de réflexion du patient, fixé à 48 heures par le projet de loi, soit abrégé à sa demande, si le médecin estime cela de nature à préserver la dignité de la personne ([187]).

Enfin, la commission spéciale a adopté un amendement de Mme Geneviève Darrieussecq et M. Cyrille Isaac-Sibille (groupe Démocrate (MoDem et Indépendants)) disposant que la procédure d’évaluation de la demande d’aide à mourir ne peut être effectuée par des sociétés de téléconsultation ([188]).

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Article 9
Détermination de la date d’administration de la substance létale et droits de la personne

Adopté avec modifications

Cet article détermine les modalités selon lesquelles la personne ayant recours à l’aide à mourir choisit la date, le lieu et les personnes qui l’accompagneront lors de l’administration de la substance létale.

  1.   Le dispositif proposÉ

● Le I dispose que la date d’administration de la substance létale est choisie par le patient en concertation avec le professionnel de santé qui l’accompagnera lors de cette administration.

Si la date choisie est postérieure à plus de trois mois à la date de la décision du médecin acceptant la demande d’aide à mourir, celui-ci doit évaluer à nouveau, le caractère libre et éclairé de la volonté du patient. Il lui revient de décider s’il est nécessaire, pour effectuer cette évaluation, de remettre en œuvre la procédure consultative prévue au II de l’article 8. Cette disposition, identique à celle de l’article 8 lorsque le patient confirme sa demande dans un délai supérieur à trois mois, vise à assurer qu’à chaque étape de la procédure le patient confirme de manière libre et éclairée sa demande.

● Le II du présent article détermine le choix du lieu où sera réalisée l’aide active à mourir. Il dispose que la personne peut, en concertation avec le professionnel de santé qui l’accompagnera, choisir un autre lieu que son domicile.

Enfin, cet article dispose que le patient peut être accompagné par les personnes de son choix.

L’exposé des motifs et l’étude d’impact précisent toutefois qu’il devra être tenu compte des contraintes, notamment de sécurité, qui pourraient se poser pour la mise en œuvre de l’aide à mourir. Ainsi, « des considérations de sécurité pourraient faire obstacle à ce qu’une personne malade, hospitalisée, puisse être accompagnée par un trop grand nombre de personnes ». De même, selon l’exposé des motifs, « la possibilité pour la personne de demander à mourir hors de son domicile ne lui confère pas un droit à choisir tout lieu de réalisation ».

  1.   Les Modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol procédant à la codification des présentes dispositions au sein d’un nouvel article L. 1111‑12‑5 du code la santé publique ([189]).

En outre, un amendement de Mme Anne Bergantz et plusieurs de ses collègues du groupe Démocrate (MoDem et Indépendants) a été adopté malgré les avis défavorables de la rapporteure et du Gouvernement ([190]). Il assouplit le contrôle par le médecin de la volonté libre et éclairée de la personne qui demande l’aide à mourir. Alors que le projet de loi prévoyait que le médecin devait à nouveau procéder à ce contrôle si la date fixée était postérieure de trois mois à la notification de l’acceptation de la demande, la commission spéciale a porté ce délai à un an.

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Article 10
Circuit de préparation et de délivrance de la substance létale

Adopté avec modifications

Cet article définit les conditions de préparation et de délivrance de la substance létale afin de garantir la sécurité du dispositif. Seules les pharmacies à usage intérieur désignées par arrêté ministériel seront autorisées à la préparer. Elles la transmettront à la pharmacie d’officine désignée par le professionnel de santé accompagnant le patient lors de son administration.

  1.   Le droit en vigueur

● La notion de médicament est définie à l’article L. 51111 du code de la santé publique comme « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée, en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier ses fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique ».

Les médicaments sont susceptibles de prendre différentes formes. Les spécialités pharmaceutiques sont fabriquées industriellement et exploitées par les entreprises. Elles doivent obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM). Les préparations magistrales, hospitalières ou officinales, sont définies comme tout médicament préparé au vu de la prescription destinée à un patient déterminé et réalisé en l’absence de spécialité pharmaceutique disponible ou adaptée.

● La notion de préparation magistrale est plus particulièrement définie au 1° de l’article L. 5121‑1 du code de santé publique comme « tout médicament préparé selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé lorsqu’il n’existe pas de spécialité pharmaceutique adaptée ou disponible, y compris du fait de l’absence de commercialisation effective, disposant d’une autorisation de mise sur le marché ».

Les préparations magistrales se distinguent des préparations hospitalières ou officinales qui sont réalisées en avance et en petites séries pour un ou plusieurs patients. La préparation magistrale est extemporanée, pour un patient déterminé, selon une prescription médicale.

Les préparations sont réalisées et délivrées sous la responsabilité d’un pharmacien qui détient le monopole de la fabrication, du contrôle, de la distribution et de la vente de médicaments. Il peut exercer en pharmacie à usage intérieur ou en pharmacie d’officine.

● Les pharmacies à usage intérieur sont définies à l’article L. 5126‑1 du code de santé de publique comme celles qui « répondent aux besoins pharmaceutiques des personnes prises en charge par l’établissement, service ou organisme dont elles relèvent, ou au sein d’un groupement hospitalier de territoire ou d’un groupement de coopération sanitaire dans lequel elles ont été constituées ».

Elles assurent notamment la préparation, le contrôle, la détention, l’évaluation et la dispensation des médicaments au sein de l’établissement dont elles relèvent.

La pharmacie d’officine est définie à l’article L. 5125‑1 du code de santé publique comme « l’établissement affecté, d’une part, à la dispensation au détail des médicaments, produits et objets mentionnés aux articles L. 42111 et L. 512524 et, dans les conditions définies par décret, de médicaments expérimentaux ou auxiliaires ainsi qu’à l’exécution des préparations magistrales ou officinales et, d’autre part, au conseil pharmaceutique et à l’exercice des missions prévues à l’article L. 512511 A ».

Certaines substances peuvent faire l’objet d’un encadrement spécifique engendrant des modalités de contrôle et de mise à disposition renforcées. C’est le cas des substances qualifiées de vénéneuses – stupéfiantes, psychotropes ou susceptibles de présenter un danger pour la santé. Les conditions de prescription et de délivrance de telles préparations sont fixées après avis des conseils nationaux de l’ordre des médecins et de l’ordre des pharmaciens conformément à l’article L. 5132‑8 du code de la santé publique. Elles sont classées sur liste I ou liste II selon le degré de risque pour la santé.

II.   Le Dispositif ProposÉ

● Le présent article définit la chaîne de préparation et de mise à disposition des substances létales destinées à l’aide à mourir, en les insérant dans un circuit spécifique garantissant la sécurité sanitaire tout en assurant leur délivrance sur l’ensemble du territoire.

Lorsque la date d’administration de la substance létale est fixée, celle-ci est préparée par une pharmacie à usage intérieur spécifiquement autorisée par arrêté du ministre de la santé.

Le choix de confier la préparation des substances létales à un nombre limité de pharmacies est justifié dans l’étude d’impact par le faible nombre de patients concernés ainsi que par la volonté d’assurer la maîtrise des risques spécifiques liés à de telles préparations, à leur circulation et à leur traçabilité. L’article 18 du présent projet de loi dispose en outre que la Haute Autorité de santé sera chargée d’émettre des recommandations relatives à leur préparation.

● Aux termes du présent article, la substance létale prend la forme d’une préparation magistrale, conformément à l’objectif d’assurer son caractère adapté à chaque patient.

● La pharmacie à usage intérieur remet la substance à une pharmacie d’officine dans des conditions sécurisées prévues à l’article 18 du projet de loi.

L’article 10 dispose que le professionnel de santé chargé d’accompagner le patient lors de l’administration de la substance létale choisit la pharmacie d’officine auprès de laquelle il la collecte.

Le présent article précise que, lorsque la personne est hébergée dans un établissement disposant d’une pharmacie à usage intérieur, celle-ci joue le rôle de pharmacie d’officine. Elle est donc désignée pour être l’établissement auprès duquel le professionnel de santé collecte la substance létale.

Le circuit de la substance létale ainsi défini, reposant sur sa préparation par une pharmacie à usage intérieur spécialement désignée et sa délivrance par une pharmacie d’officine, assure la délivrance de la substance létale sur tout le territoire tout en inscrivant sa préparation dans un cadre sécurisé.

  1.   Les modifications apportées par la commisison SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol codifiant les présentes dispositions dans un nouvel article L. 1111‑12‑6 du code de la santé publique ([191]).

La commission spéciale a également adopté, avec avis favorable de la rapporteure et du Gouvernement, trois amendements identiques de Mme Sandrine Dogor-Such et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National ([192]), de Mme Geneviève Darrieussecq et M. Cyrille Isaac-Sibille (groupe Démocrate (MoDem et Indépendants)) ([193]) ainsi que de M. Christophe Bentz et plusieurs de ses collègues du groupe Rassemblement National ([194]) indiquant que la substance létale est préparée par des pharmacies à usage intérieur exclusivement hospitalières, afin d’exclure les pharmacies à usage intérieur des Ehpad.

Enfin, un amendement de la rapporteure Laurence Cristol prévoit que la pharmacie d’officine qui délivre la substance létale est désignée par le professionnel de santé en accord avec le patient, afin de respecter le souhait éventuel de confidentialité ou de discrétion de ce dernier ([195]).

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Article 11
Accompagnement de la personne pendant l’administration, modalités de cette administration et devenir de la substance létale non utilisée

Adopté avec modifications

Cet article définit les obligations du professionnel de santé qui accompagne la personne lors de l’administration de la substance létale. Celui-ci doit vérifier que la personne confirme sa volonté d’avoir recours à l’aide à mourir et surveiller l’administration de la substance létale.

  1.   Le Dispositif proposé

● Le I détaille les obligations du médecin ou de l’infirmier chargé d’accompagner la personne lors de l’administration de la substance létale. Il doit, en premier lieu, vérifier que la personne confirme sa volonté de procéder à l’administration de la substance létale (). Cette disposition assure ainsi que, jusqu’à la dernière étape de la procédure, la volonté réitérée de la personne est respectée. Lorsque la personne confirme sa volonté de recourir à l’aide à mourir, le professionnel de santé doit alors préparer la substance létale et surveiller son administration (2° et 3°).

● Le II précise que la personne peut confirmer sa volonté mais demander un report de l’administration de la substance létale. La procédure est alors suspendue et une nouvelle date est fixée dans les conditions prévues à l’article 9.

● Le III précise que l’administration de la substance létale est en principe réalisée par la personne elle-même, conformément à la définition de l’aide à mourir énoncée à l’article 5 du présent projet de loi. Toutefois, lorsque la personne n’est pas physiquement en mesure d’y procéder, l’administration peut être réalisée par une personne volontaire de son choix ou par le professionnel de santé.

Ces dispositions correspondent à la volonté de mettre l’accent sur l’autodétermination de la personne, qui réalise en principe elle-même l’administration de la substance, sans toutefois exclure de l’accès à l’aide à mourir les personnes dont l’état physique ne leur permettrait pas d’effectuer le geste. Elles répondent aux observations du CCNE qui avait relevé, dans son avis 139, que « laisser en dehors du champ de la loi ceux qui ne sont physiquement plus aptes à un tel geste soulèverait un problème d’égalité des citoyens qui constitue en luimême une difficulté éthique majeure ».

L’administration par une personne volontaire est subordonnée à la condition qu’aucune contrainte n’y fasse obstacle. L’étude d’impact précise que ces obstacles peuvent être d’ordre technique, au regard du mode d’administration de la substance létale. Elle prend pour exemple la pose d’une perfusion qui ne peut être effectuée que par un professionnel de santé.

Lorsqu’il ne procède pas à l’administration de la substance létale, la présence du professionnel de santé aux côtés de la personne n’est pas obligatoire. Toutefois, il doit se trouver à proximité suffisante pour être en mesure d’intervenir en cas de difficulté lors de l’administration. Le présent article renvoie aux recommandations élaborées à ce sujet par la Haute Autorité de santé, conformément aux dispositions introduites par l’article 18 du projet de loi, qui lui donnent pour mission d’élaborer des recommandations de bonnes pratiques sur les conditions d’utilisation des substances létales.

 Le IV du présent article définit les conditions d’établissement du certificat de décès.

Le certificat de décès est établi dans les conditions de droit commun prévues à l’article L. 222342 du code général des collectivités territoriales.

Cet article définit les professionnels de santé habilités à dresser un certificat de décès. Il ne peut être dressé que par un médecin, en activité ou retraité, par un étudiant en cours de troisième cycle des études de médecine en France ou un praticien à diplôme étranger hors Union européenne autorisé à poursuivre un parcours de consolidation des compétences en médecine.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a toutefois introduit une expérimentation permettant aux infirmiers de signer les certificats de décès. Les modalités de l’expérimentation ont été précisées par un décret du 6 décembre 2023. Initialement limitée à six régions, l’expérimentation a été étendue à l’ensemble du territoire par la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels et un décret du 23 avril 2024. De même, les conditions de l’expérimentation ont été élargies : alors qu’il n’était initialement possible de faire appel à un infirmier pour établir le certificat de décès que lorsqu’« aucun médecin ne peut intervenir dans un délai raisonnable », cette condition est désormais supprimée.

En revanche, les infirmiers ainsi habilités ne peuvent rédiger un certificat de décès que lorsque le décès est intervenu au domicile de la personne ou dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, à l’exclusion des situations où le caractère violent de la mort est manifeste.

Ce certificat, rédigé sur un modèle établi par le ministère chargé de la santé, précise la ou les causes de décès.

 Enfin, le V du présent article prévoit les modalités de destruction de la substance létale lorsque celle-ci n’a pas été utilisée intégralement.

Le professionnel de santé doit rapporter la substance à la pharmacie d’officine auprès de laquelle il se l’est procurée. La substance est alors détruite par l’officine selon les modalités sécurisées prévues pour les médicaments à usage humain non utilisés.

Enfin, le professionnel de santé doit rédiger un compte rendu de l’ensemble des actes réalisés, de la vérification de la volonté du patient, jusqu’à l’administration de la substance létale.

II.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol ([196]) codifiant les présentes dispositions dans un nouvel article L. 1111‑12‑7 du code de la santé publique.

Un amendement de Mme Christine Pires Beaune et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés a également été adopté afin d’indiquer que les dispositions de l’article 11 trouvent application le jour de l’aide à mourir ([197]).

La commission spéciale a adopté plusieurs amendements relatifs à l’intervention de la personne volontaire. L’amendement de Mme Cécile Rilhac et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ([198]), sous‑amendé par M. Hadrien Clouet et les membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale ([199]), a procédé à la réécriture de l’alinéa 7 afin de donner la liberté de choix au patient entre auto-administration et administration par un tiers. L’amendement prévoit que, si elle a désigné une personne qui a accepté cette responsabilité, l’administration est effectuée par cette personne majeure sous le contrôle du professionnel de santé ; sinon, l’administration de la substance létale est réalisée par le professionnel de santé présent.

La commission spéciale a également adopté deux amendements de M. Christophe Marion (groupe Renaissance). L’un prévoit que la personne volontaire est âgée d’au moins 18 ans, est apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée et ne peut recevoir aucun paiement en contrepartie de l’administration de la substance létale ([200]). L’autre ajoute que la personne volontaire est informée par le professionnel de santé présent de son droit à bénéficier de séances d’accompagnement psychologique prévues dans le cadre du dispositif Mon soutien psy, permettant la prise en charge de séances d’accompagnement psychologique par l’assurance maladie ([201]).

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Article 12
Fin des procédures

Adopté avec modifications

Cet article détermine les conditions dans lesquelles s’achève la procédure d’aide à mourir.

  1.   Le Dispositif proposÉ

Il est mis fin à la procédure d’aide à mourir dans les trois situations énoncées au présent article.

● En premier lieu, la procédure prend fin lorsque la personne décide de renoncer à l’aide à mourir. Cette disposition est conforme au principe, énoncé à l’article 7, selon lequel ce renoncement est possible à tout moment. Lorsque la personne décide ainsi, elle en informe soit le médecin en charge de l’évaluation de sa demande, soit le professionnel de santé choisi pour l’accompagner lors de l’administration de la substance létale.

● En deuxième lieu, la procédure s’interrompt également lorsque le médecin en charge de l’évaluation de la demande du patient prend connaissance, postérieurement à sa décision d’acceptation, d’éléments d’information le conduisant à considérer que les conditions d’éligibilité n’étaient pas remplies ou cessent de l’être. Cette condition permet, selon l’avis du Conseil d’État, « d’assurer la protection de la personne qui demande l’aide à mourir » et de mieux « circonscrire l’étendue de la responsabilité du médecin » ([202]).

● Enfin, la procédure s’arrête lorsque la personne refuse l’administration de la substance létale. Cette hypothèse est à distinguer de la demande de report de l’administration mentionnée à l’article 11, laquelle ne met pas fin à la procédure mais nécessite seulement la détermination d’une nouvelle date.

● Lorsque la procédure prend fin selon l’une des trois modalités ainsi définies, la personne doit, si elle le souhaite, présenter une nouvelle demande donnant lieu à la mise en œuvre de l’ensemble de la procédure prévue au chapitre III du présent projet de loi.

II.   lES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA COMMISSION SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol ([203]) codifiant les présentes dispositions dans un nouvel article L. 1111‑12‑8 du code de la santé publique.

La commission spéciale a également adopté un amendement de M. Laurent Panifous et plusieurs de ses collègues du groupe Libertés, Indépendants, Outremer et Territoires précisant que, lorsqu’il est mis fin à la procédure dans le cas où le médecin prend connaissance, postérieurement à sa première décision, d’éléments d’information le conduisant à considérer que les conditions d’éligibilité n’étaient pas remplies ou cessent de l’être, il notifie sa décision motivée par écrit à la personne et, si celle-ci fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec assistance ou représentation relative à la personne, à la personne chargée de la mesure de protection ([204]).

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Article 13
Création d’un système d’information dédié au suivi de la procédure

Adopté avec modifications

Cet article crée un système d’information permettant l’enregistrement, par les professionnels de santé, de chacun des actes de la procédure d’aide à mourir. Ce système d’information assure la traçabilité des procédures et permettra à la commission de contrôle et d’évaluation créée par l’article 17 d’assurer le contrôle de la régularité du dispositif.

  1.   Le droit en vigueur

● La création d’un système d’information doit respecter le droit applicable en matière de traitement de données personnelles fixé par la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés et par le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (dit « RGPD »).

La création d’un système d’information enregistrant les actes liés à la procédure d’aide à mourir s’apparente en effet à un traitement de données au sens des articles 1er et 2 du RGPD et 2 de la loi du 6 janvier 1978.

En outre, les données de santé constituent des données à caractère personnel dites « sensibles » relevant de l’article 9 du RGPD et de l’article 6 de la loi du 6 janvier 1978. Elles font, à ce titre, l’objet de protection spécifique.

Les données à caractère personnel concernant la santé sont définies comme les données relatives à la santé physique ou mentale d’une personne physique, y compris la prestation de services de soins de santé, qui révèlent des informations sur l’état de santé de cette personne. Les données de santé sont classées en trois catégories : celles qui sont des données de santé par nature (antécédents médicaux, maladies, prestations de soins réalisés, résultats d’examens, traitements, etc.), celles qui, du fait de leur croisement avec d’autres données, deviennent des données de santé en ce qu’elles permettent de tirer une conclusion sur l’état de santé ou le risque pour la santé d’une personne et celles qui deviennent des données de santé en raison de leur destination, c’est-à-dire de l’utilisation qui en est faite au plan médical.

Le traitement des données de santé est en principe prohibé par la législation européenne et nationale, à moins qu’un tel traitement réponde à un motif légitime. L’article 9 du RGPD liste les motifs permettant de déroger à cette interdiction de principe. En outre, les données de santé sont couvertes par le secret médical qui limite en principe l’accès à ces données aux personnes participant à la prise en charge du patient.

● La création d’un traitement de données personnelles peut être autorisée par voie réglementaire après consultation obligatoire de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).

En revanche, le recours à la loi est nécessaire lorsque le traitement de données ne peut être mis en œuvre sans modification d’une disposition législative qui y fait obstacle, ainsi que dans le cas où le traitement conduit à fixer des règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, matières que l’article 34 de la Constitution réserve à la loi ([205]).

  1.   Le Dispositif proposÉ

● Le présent article crée un système d’information, dans lequel chaque acte effectué par les professionnels de santé pour la mise en œuvre de la procédure d’aide à mourir prévue au chapitre III du titre II du projet de loi sera enregistré.

Conformément aux dispositions de l’article 17 du projet de loi, ce traitement de données sera confié à la commission de contrôle et d’évaluation des procédures d’aide à mourir, qui aura pour rôle de s’assurer de la régularité des procédures suivies et de l’évaluation de la mise en œuvre de la loi.

● Dans son avis sur le présent projet de loi, le Conseil d’État estime qu’une disposition législative est nécessaire pour la création de ce système d’information, dès lors qu’il déroge aux dispositions de l’article L. 1110-4 du code de la santé publique, qui réserve l’accès aux données médicales aux seuls professionnels participant à la prise en charge du patient.

En outre, le Conseil d’État estime que l’objet d’un tel traitement de données est conforme au cadre européen et national régissant la protection des données personnelles de santé dès lors qu’il peut être rattaché aux dérogations à l’interdiction du traitement de données personnelles de santé prévues par l’article 9 du RGPD.

En effet, le Conseil d’État souligne que le traitement créé par le projet de loi « a notamment pour finalité de permettre un contrôle des procédures d’aide à mourir en vue d’identifier, le cas échéant, des anomalies susceptibles de révéler l’existence d’un délit ou d’un crime ou de donner lieu à des actions en responsabilité » et remplit la condition prévue au f) du paragraphe 2 de l’article 9 du RGPD dès lors qu’il est nécessaire à la constatation, à l’exercice ou à la défense d’un droit en justice. Le Conseil d’État considère que le traitement peut également être rattaché à la dérogation prévue au i) du même paragraphe, dès lors qu’il peut être regardé comme nécessaire pour des motifs d’intérêt public dans le domaine de la santé publique.

● Les conditions de traitement et de partage des données enregistrées au sein de ce système d’information sont renvoyées par l’article 17 du projet de loi à un décret en Conseil d’État pris après avis de la Cnil.

L’étude d’impact précise que l’ensemble des actes de la procédure d’aide à mourir devra être enregistré dans le système d’information, ce qui aura pour conséquence, que tant qu’une étape n’aura pas été complétée, l’étape suivante sera bloquée. La substance létale ne pourra ainsi être délivrée que si l’ensemble des étapes précédentes a été renseigné dans le système d’information.

Si l’article 13 du projet de loi se limite à prévoir la création de ce système d’information, l’étude d’impact liste les actes et documents qui auront vocation à y être enregistrés.

INFORMATIONS RENSEIGNÉES DANS LE SYSTÈME D’INFORMATION TENU PAR LA COMMISSION DE CONTRÔLE ET D’ÉVALUATION

Stade de la procédure d’aide à mourir

Informations à renseigner

1. Demande

Demande initiale de la personne, accompagnée des pièces attestant :

- L’authentification de l’identité et de l’âge

- La satisfaction de la condition de nationalité ou résidence

- L’attestation de bonne délivrance des informations (générales) sur l’aide à mourir transmises par le médecin

- Le caractère libre et éclairé de la volonté exprimée (pièces complémentaires relatives à la capacité des personnes, notamment, le cas échéant, de la personne chargée de la mesure de protection)

Proposition formalisée de prise en charge palliative transmise par le médecin, le cas échéant

2. Évaluation

Décision du médecin

Avis complémentaires

3. Confirmation

Confirmation de la demande de la personne, incluant les souhaits en matière de date, lieu et présence de proches pendant l’aide à mourir

Attestation du médecin sur le maintien du discernement si cette réitération intervient plus de trois mois après son évaluation

Attestation de bonne délivrance des informations personnalisées sur les modalités d’administration et d’action de la substance létale transmises par le médecin

Prescription de la substance létale, accompagnée des informations nécessaires à sa préparation

Identification du professionnel de santé (médecin ou infirmier) accompagnant

4. Préparation de la substance létale

Validation des étapes successives du circuit, de la réception initiale de la prescription, en passant par la mise à disposition de la substance létale, jusqu’à la mise dans le circuit de recyclage des produits non utilisés, le cas échéant

5. Réalisation de l’aide à mourir

Compte rendu du déroulement de l’aide à mourir, notamment en cas d’incident

Source : étude d’impact du projet de loi

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol ([206]) codifiant les présentes dispositions dans un nouvel article L. 1111‑12‑9 du code de la santé publique.

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Article 14
Recours devant le juge administratif

Adopté avec modifications

Cet article définit les modalités de recours juridictionnel à l’encontre des décisions d’aide à mourir. Il prévoit, d’une part, qu’elles ne pourront être contestées que par la personne qui a formulé la demande d’aide à mourir. Cette disposition ferme la capacité à agir des tiers. D’autre part, il confie au juge administratif la compétence de connaître de l’ensemble de ces recours, en dérogation aux règles habituelles de répartition des compétences entre ordres juridictionnels.

  1.   Le droit en vigueur

 Le droit au recours effectif est un principe à valeur constitutionnelle reconnu par le Conseil constitutionnel sur le fondement de l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789. Le juge constitutionnel considère ainsi qu’il ne saurait « être porté d’atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction » ([207]).

Le Conseil constitutionnel admet toutefois que des restrictions puissent être apportées au droit au recours des personnes pouvant justifier d’un intérêt leur donnant qualité pour agir, pour des motifs d’intérêt général et sous réserve que ces limitations soient proportionnées à l’objectif poursuivi ([208]).

Le droit d’accès à un tribunal et le droit au recours effectif sont également protégés respectivement par les articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Le recours contre une décision administrative est ouvert à toute personne ayant intérêt à agir. Le juge administratif peut toutefois exclure certaines catégories de requérant du cercle des personnes intéressées afin de réserver un droit d’action à ceux qu’il estime principalement concernés. C’est ce que traduit l’exigence d’un « intérêt direct » à agir.

Les décisions d’arrêt des traitements et de pratique d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès sont susceptibles de recours selon les conditions de droit commun devant le juge administratif ou le juge judiciaire, selon les règles usuelles de répartition des compétences entre ordres juridictionnels, suivant que la décision est prise par un médecin exerçant dans le cadre du service public hospitalier ou un médecin libéral exerçant dans le cadre du secteur privé.

S’agissant plus particulièrement de la procédure d’arrêt des traitements et de la sédation profonde et continue jusqu’au décès des personnes hors d’état d’exprimer leur volonté, le Conseil constitutionnel a jugé que le droit au recours effectif imposait que la décision soit notifiée aux personnes auprès desquelles le médecin s’est enquis de la volonté du patient, dans des conditions leur permettant d’introduire un recours en temps utile. Le Conseil d’État a estimé qu’il résultait nécessairement de ces réserves d’interprétation que le médecin ne peut mettre en œuvre une décision d’arrêter ou de limiter un traitement avant que les personnes qu’il a consultées et qui pourraient vouloir saisir la juridiction compétente d’un tel recours n’aient pu le faire et obtenir une décision de sa part ([209]).

● S’agissant de la répartition des compétences entre ordres juridictionnels administratif et judiciaire, le Conseil constitutionnel affirme que, conformément à la conception française de séparation des pouvoirs, figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République celui selon lequel, à l’exception des matières réservées par nature à l’autorité judiciaire, relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l’annulation ou la réformation des décisions prises, dans l’exercice des prérogatives de puissance publique, par les autorités exerçant le pouvoir exécutif, leurs agents, les collectivités territoriales de la République ou les organismes publics placés sous leur autorité ou leur contrôle ([210]).

Toutefois, le Conseil constitutionnel admet que le législateur, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, unifie les règles de compétence juridictionnelle au sein de l’ordre juridictionnel principalement intéressé. Il est ainsi dérogé aux règles habituelles de compétence entre les juridictions administrative et judiciaire « lorsque l’application d’une législation ou d’une réglementation spécifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se répartiraient, selon les règles habituelles de compétence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire » ([211]).

  1.   Le dispositif proposÉ

● L’article 14 du présent projet de loi prévoit, en premier lieu, que la décision du médecin se prononçant sur l’aide à mourir ne peut être contestée que par la seule personne ayant formé cette demande.

Cette disposition a pour effet de fermer les recours des tiers à l’encontre des décisions d’acceptation ou de refus de l’aide à mourir. Cette fermeture du prétoire est justifiée dans l’étude d’impact par la volonté de « sécuriser les procédures d’aide à mourir, en évitant que des recours formés par des tiers fassent obstacle à la volonté libre et éclairée de la personne malade ».

Le Conseil d’État a estimé que cette restriction du droit aux recours des tiers ne portait pas atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et de protection du droit à la vie, ni au droit au recours effectif, « eu égard au caractère éminemment intime de la demande d’accès à l’aide à mourir qui trouve son fondement dans la liberté personnelle garantie par l’article 2 de la Déclaration de 1789 et dans le principe d’autonomie qui découle du droit au respect de la vie privée et familiale énoncé à l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales » ([212]).

Cette disposition n’a toutefois pas pour effet de faire obstacle à la saisine du juge pénal par les tiers et par la Commission de contrôle et d’évaluation prévue à l’article 17 du présent projet de loi, s’ils estiment que des manquements susceptibles de constituer des crimes ou des délits ont été commis lors de la mise en œuvre de la procédure d’aide à mourir.

● En second lieu, le présent article donne compétence à la juridiction administrative pour connaître des recours contre les décisions d’aide à mourir.

Cette disposition déroge à la répartition habituelle des compétences entre ordres juridictionnels. Les juridictions administratives et judiciaires sont respectivement compétentes pour connaître des recours contre les décisions médicales selon que la décision a été prise par un médecin exerçant dans le cadre du service public hospitalier ou de médecin exerçant dans un cadre libéral.

La dérogation à cette répartition habituelle des compétences est justifiée dans l’étude d’impact par la nécessité d’éviter les jurisprudences divergentes entre ordres juridictionnels. L’étude d’impact estime également que la majorité des décisions d’aide à mourir devraient avoir lieu en établissement public, justifiant que l’ordre administratif soit principalement intéressé. Enfin, elle affirme que les procédures d’urgence existantes dans l’ordre administratif sont sans équivalentes au sein de l’ordre judiciaire.

La Cour de cassation, au sujet de décisions d’arrêt de traitement, avait admis que le droit à la vie n’entrait pas dans le champ de la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution et ne constituait donc pas une matière que la Constitution réservait par nature à l’autorité judiciaire ([213]).

Toutefois, le Conseil d’État relève dans son avis que le législateur n’a pas, s’agissant de ces recours dirigés contre les décisions d’arrêt des traitements et de sédation profonde et continue, unifié les règles de compétence juridictionnelle au sein de la juridiction administrative. Il estime que les motifs présentés par l’étude d’impact pour justifier de la dérogation aux règles de compétence ne sont pas étayés et considère ainsi qu’il n’est « pas établi que l’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie de déroger aux règles habituelles de compétence » ([214]).

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol codifiant les présentes dispositions dans un nouvel article L. 1111‑12‑10 du code de la santé publique ([215]).

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Article 15
Mesures réglementaires d’application

Adopté avec modifications

Cet article renvoie à un décret en Conseil d’État les mesures réglementaires d’application du chapitre III du projet de loi relatif à la procédure d’aide à mourir.

  1.   Le droit en vigueur

 Le Conseil constitutionnel a jugé qu’il appartenait au législateur, « compétent en application de l’article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques, notamment en matière médicale, de déterminer les conditions dans lesquelles la poursuite ou l’arrêt des traitements d’une personne en fin de vie peuvent être décidés » ([216]).

Ainsi, s’agissant de la procédure d’arrêt des traitements et de mise en œuvre d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès, le Conseil constitutionnel a estimé que le législateur n’avait pas méconnu l’étendue de sa compétence en renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de fixer les conditions de déroulement de la procédure collégiale dès lors qu’il l’avait encadré avec suffisamment de précision en définissant les intervenants à cette procédure et son objet ([217]).

  1.   Le dispositif proposÉ

 Le présent article renvoie à un décret pris après avis du Conseil d’État les conditions d’application des articles 7 à 14 du projet de loi, relatifs à la procédure d’aide à mourir.

L’article mentionne notamment la précision par voie réglementaire des dispositions relatives :

 aux modalités d’information de la personne qui demande l’aide à mourir ;

 à la forme et au contenu de la demande d’aide à mourir et de sa confirmation à l’issue du délai de réflexion ;

 à la procédure de vérification des conditions d’accès à l’aide à mourir prévues à l’article 6 et du recueil des avis des professionnels de santé par le médecin en charge de la procédure d’évaluation.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Laurence Cristol codifiant les présentes dispositions dans un nouvel article L. 1111‑12‑11 du code de la santé publique ([218]).

 

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Chapitre IV
Clause de conscience

Article 16
Clause de conscience, responsabilité du chef d’établissement sanitaire ou médico-social et déclaration de professionnels auprès de la commission

Adopté avec modifications

L’article 16 institue une clause de conscience spécifique au profit des professionnels de santé sollicités dans le cadre d’une procédure d’aide à mourir, assortie d’une obligation d’information et de réadressage. Il garantit aux personnes hospitalisées ou hébergées en établissement social ou médico-social la possibilité de demander une aide à mourir. Il prévoit également que les professionnels de santé disposés à participer à l’aide à mourir se déclarent auprès de la commission d’évaluation et de contrôle.

I.   Le droit en vigueur

Le cadre juridique en vigueur, s’il garantit la liberté de conscience des professionnels de santé et admet l’existence de « clauses de conscience », reconnaît des limites à celles-ci.

● La jurisprudence du Conseil constitutionnel garantit la sauvegarde de la liberté de conscience, y compris pour les professionnels de santé. Initialement conçue comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République ([219]), la liberté de conscience est désormais rattachée directement ([220]) à l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, qui dispose que « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ». Si le Conseil constitutionnel a admis, pour sauvegarder cette liberté, le droit pour un professionnel de santé de ne pas pratiquer d’interruptions volontaires de grossesse (IVG), il précise que cette liberté « relève de sa conscience personnelle et ne saurait s’exercer aux dépens de celle des autres médecins et membres du personnel hospitalier qui travaillent dans son service » ([221]). Il garantit par ailleurs le principe constitutionnel d’égalité des usagers devant la loi et devant le service public, et précise que le chef de service d’un établissement public de santé ne peut s’opposer à ce que des IVG soient effectuées dans son service.

Au niveau européen, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) met en balance la liberté de conscience, garantie par l’article 9 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, avec d’autres droits fondamentaux. Elle estime que « les États sont tenus d’organiser leur système de santé de manière à garantir que l’exercice effectif de la liberté de conscience des professionnels de la santé dans le contexte de leurs fonctions n’empêche pas les patients d’accéder aux services auxquels ils ont droit en vertu de la législation applicable » ([222]). La CEDH a notamment, dans une décision de 2001, rejeté la requête de pharmaciens refusant de mettre en vente la pilule contraceptive dans leur officine ([223]).

● Une clause de conscience dite « générale » garantit explicitement, au niveau législatif, la possibilité pour le professionnel de santé de refuser un soin. En effet, conformément à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1110‑3 du code de la santé publique, « le principe énoncé au premier alinéa du présent article [aucune personne ne peut faire l’objet de discriminations dans l’accès à la prévention ou aux soins] ne fait pas obstacle à un refus de soins fondé sur une exigence personnelle ou professionnelle essentielle et déterminante de la qualité, de la sécurité ou de l’efficacité des soins ».

Le même article dispose toutefois que le refus de soins du médecin ne peut être discriminatoire. Il ne peut être exercé en cas d’urgence et le professionnel de santé ne peut manquer à ses devoirs d’humanité. Il est également précisé que la « continuité des soins doit être assurée quelles que soient les circonstances, dans les conditions prévues par l’article L. 63151 du présent code », lequel dispose que, « lorsque le médecin se dégage de sa mission de soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, il doit indiquer à ses patients le confrère auquel ils pourront s’adresser en son absence ». Le code de déontologie médicale, de valeur réglementaire, réaffirme cette dernière disposition : « s’il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins » ([224]).

Alors que l’interprétation de la notion de soins au sens de l’article L. 1110‑3 demeure stricte, le législateur peut également garantir l’existence d’une clause de conscience spécifique concernant certains actes, pour une catégorie de professionnels ou un type d’établissements ([225]). Comme le rappelle l’étude d’impact jointe au projet de loi, le législateur a prévu de telles clauses concernant l’interruption volontaire de grossesse ([226]), la stérilisation contraceptive ([227]) ainsi que les recherches sur les embryons ou les cellules souches ([228]), qui sont des actes médicaux et non des soins au sens de l’article L. 1110‑3 du code de la santé publique.

En dehors de ces cas, la responsabilité pénale du professionnel de santé peut être engagée à la suite d’un refus de soins, notamment pour non-assistance à personne en péril ([229]).

● Les rapporteurs notent qu’une clause de conscience est prévue dans chacun des pays dotés d’un cadre législatif relatif à l’aide à mourir. Les modalités de recours à cette clause sont toutefois variables, tant en termes de formalités que de délais.

MODALITÉS DE RECOURS À LA CLAUSE DE CONSCIENCE SELON LES PAYS

Pays

Cadre législatif

Délais applicables

Belgique

Les médecins disposent d’une clause de conscience dans le cadre d’actes d’aide à mourir. Tout refus de réalisation d’actes doit être justifié et le patient dirigé vers une association spécialisée dans un délai de sept jours suivant la demande. Une fois le patient ré-adressé, le médecin doit transmettre son dossier médical au nouveau médecin dans un délai de quatre jours.

– 7 jours suivant la demande pour la transmission du patient vers une association spécialisée ;

– 4 jours pour la transmission du dossier médical au médecin désigné.

Espagne

Les professionnels de santé disposent d’un droit à l’objection « de conscience », qu’ils invoquent par écrit. L’écrit doit être enregistré et conservé par les administrations sanitaires locales.

Aucun délai n’est fixé par la loi.

États-Unis (Oregon)

Les médecins peuvent faire une demande de transmission du dossier médical du patient à un autre médecin s’ils ne souhaitent pas pratiquer l’acte.

Aucun délai n’est fixé par la loi.

Luxembourg

Les médecins et professionnels de santé ont le droit de refuser de pratiquer l’euthanasie ou le suicide assisté. Ils doivent, le cas échéant, en informer le patient dans les 24 heures qui suivent la demande et communiquer le dossier médical au médecin désigné par le patient.

– 24 heures suivant la demande pour notifier le refus ;

– Aucun délai de transmission du dossier médical n’est fixé.

Pays-Bas

L’euthanasie ne constituant pas un droit, les médecins peuvent refuser de la pratiquer. Ils doivent en informer le patient à un « stade précoce » et peuvent l’orienter vers un autre médecin sans que cela ne soit une obligation.

Aucun délai n’est fixé par la loi, le médecin est tenu d’informer le patient de son refus à un stade précoce.

Source : étude d’impact jointe au projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, 10 avril 2024.

II.   Le dispositif proposÉ

L’article 16 du présent projet de loi institue une clause de conscience spécifique au profit des professionnels de santé sollicités pour concourir à la mise en œuvre d’une procédure d’aide à mourir. Il définit des garanties assurant l’effectivité de l’aide à mourir en cas de recours à cette clause.

● D’une part, l’article 16 dispose que les professionnels de santé ne sont pas tenus de concourir à la mise en œuvre des dispositions prévues aux chapitres II et III, relatives aux conditions d’accès et à la procédure d’aide à mourir.

Il est précisé que bénéficient de cette clause les professionnels de santé mentionnés à l’article 7 ainsi qu’aux I à V et au premier alinéa du VI de l’article 8 du projet de loi (I.). Sont dès lors concernés :

– le médecin en activité auprès de qui la personne qui souhaite accéder à l’aide à mourir en fait la demande expresse ;

– le médecin désigné pour avis par le premier médecin, qui doit être spécialiste de la pathologie si le premier ne l’est pas ;

– l’auxiliaire médical ou l’aide-soignant qui intervient auprès de la personne ou, à défaut, d’un autre auxiliaire médical ;

– les autres professionnels de santé, psychologues, infirmiers ou aides-soignants intervenant auprès de la personne, dont l’avis est sollicité.

Il en résulte que les pharmaciens ne bénéficient pas de la clause de conscience. Comme le souligne l’étude d’impact jointe au projet de loi, une telle clause porterait atteinte à l’accès effectif à l’aide à mourir dans la mesure où les pharmaciens auront le monopole de la délivrance des substances létales utilisées pour les actes d’aide à mourir.

Le Conseil d’État, dans son avis sur le présent projet de loi, confirme la légitimité de cette exclusion et estime que « les missions de réalisation de la préparation magistrale létale et de délivrance de la substance létale, qui interviennent après la prise de décision et avant la mise en œuvre de l’administration de la substance létale, ne concourent pas de manière suffisamment directe à l’aide à mourir pour risquer de porter atteinte à la liberté de conscience des pharmaciens et des personnes qui travaillent auprès d’eux » ([230]).

Du reste, les rapporteurs notent que cette limitation apportée à la liberté de conscience des pharmaciens recueille l’assentiment de majorité de la profession et qu’elle n’emporte aucun risque d’inconstitutionnalité, celle-ci étant déjà prévue pour d’autres actes. Ainsi, si la partie réglementaire du code de la santé publique dispose que l’intérêt de la santé du patient peut justifier le refus pour un pharmacien de dispenser un médicament ([231]), la Cour de cassation a jugé que ce refus ne pouvait être invoqué pour la délivrance de médicaments à visée contraceptive ou abortive, précédant la décision précitée de la Cour européenne des droits de l’homme ([232]).

Les rapporteurs relèvent par ailleurs qu’aucun enregistrement des professionnels refusant de concourir à la mise en œuvre de l’aide à mourir n’est prévu, eu égard notamment au caractère disproportionné d’une telle mesure.

● Pour ne pas faire obstacle à la mise en œuvre de l’aide à mourir, la clause de conscience est assortie d’une obligation d’information et d’orientation du demandeur. Le second alinéa du I de l’article 16 dispose ainsi que le professionnel de santé qui ne souhaite pas participer à la mise en œuvre de ces dispositions doit informer sans délai la personne de son refus et lui communiquer le nom de professionnels de santé susceptibles de lui apporter leur aide.

● Par ailleurs, le II de l’article 16 dispose que, concernant les personnes admises dans les établissements de santé ou hébergées dans les établissements ou services sociaux et médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312‑1 du code de l’action sociale et des familles, le responsable de l’établissement ou du service est tenu de permettre l’intervention des professionnels de santé et des personnes sollicitées pour mettre en œuvre et accompagner l’aide à mourir.

Il en résulte une responsabilité additionnelle du directeur d’établissement ou du chef de service dans la mise en œuvre effective de l’aide à mourir, notamment dans le cadre du réadressage qui incombe au professionnel de santé faisant valoir la clause de conscience. Comme précisé par l’étude d’impact, sans imposer une mission de service public, cette disposition garantit un accès à l’aide à mourir : le directeur de la structure sera tenu d’y permettre l’intervention des professionnels de santé volontaires, extérieurs à l’établissement, pour traiter une demande d’aide à mourir formulée par une personne hospitalisée ou hébergée dans ladite structure, puis pour l’accompagner dans la suite de la procédure.

● Enfin, le III de l’article 16 prévoit que les professionnels de santé disposés à participer à la mise en œuvre de la procédure d’aide à mourir peuvent se déclarer auprès de la commission d’évaluation et de contrôle prévue à l’article 17 du projet de loi. Cette commission est notamment chargée de centraliser les données et d’établir un registre à cette fin. Comme le souligne l’étude d’impact, cet enregistrement, qui n’est pas prévu par la législation relative à l’interruption volontaire de grossesse, a vocation à permettre un réadressage plus efficace et ainsi à mieux garantir le droit d’accès à l’aide à mourir.

En application du 3° du I du même article 17, et conformément à l’avis du Conseil d’État ([233]), ce registre sera accessible aux seuls médecins, dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ([234]).

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

Les modifications apportées par la commission spéciale à l’article 16 portent principalement sur le réadressage en cas de recours, par un professionnel de santé, à sa clause de conscience, ainsi que sur le registre des professionnels volontaires tenu par la commission de contrôle et d’évaluation.

Deux amendements identiques présentés par la rapporteure Caroline Fiat d’une part, et par M. Hadrien Clouet et les membres du groupe La France insoumise – Nouvelle Union Populaire écologique et sociale d’autre part ([235]) prescrivent que le professionnel de santé qui refuse de concourir à la mise en œuvre de l’aide à mourir communique à la personne le nom de professionnels « disposés à » le participer, et non « susceptibles d’y » participer.

La commission a par ailleurs adopté un amendement de M. Jean-François Rousset et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance ordonnant que les professionnels de santé disposés à participer à la mise en œuvre de l’aide à mourir « se déclarent », et non « peuvent se déclarer », auprès de la commission de contrôle et d’évaluation ([236]).

En cohérence avec les amendements adoptés sur les autres articles du titre II du projet de loi, la commission spéciale a également adopté un amendement de la rapporteure Caroline Fiat codifiant les dispositions de l’article 16 dans le code de la santé publique ([237]).

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Chapitre V
Contrôle et évaluation

Article 17
Création d’une commission de contrôle et d’évaluation

Adopté avec modifications

L’article 17 prévoit la création d’une commission de contrôle et d’évaluation chargée principalement du contrôle systématique et a posteriori du respect des conditions d’accès et de procédure d’aide à mourir. Cette commission assure également le suivi et l’évaluation de l’aide à mourir par une information annuelle et par des recommandations, ainsi que la gestion du registre des professionnels de santé disposés à participer à l’aide à mourir.

I.   Le droit en vigueur

● En l’absence de toute procédure de contrôle a posteriori de décisions d’ordre médical, notamment concernant la fin de vie, le législateur a défini en France des conditions de réalisation de certains actes et a prévu des garanties spécifiques visant à protéger les droits du patient.

À titre d’exemple, les actes de limitation ou d’arrêt des traitements « ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu’ils résultent d’une obstination déraisonnable » ([238]), tandis que la procédure de sédation profonde et continue est mise en œuvre dans deux cas limitatifs : «  Lorsque le patient atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ; 2° Lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable » ([239]). Le Conseil constitutionnel a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la conformité à la Constitution de certaines dispositions des articles L. 1110‑5‑1 et L. 1110-5-2 du code de la santé publique et a jugé que le législateur avait « assorti de garanties suffisantes la procédure qu’il a mise en place » ([240]).

Aussi, des voies de recours sont ouvertes, y compris à travers des procédures d’urgences devant la juridiction administrative telles que les référés suspension et liberté et, si l’article 122-4 du code pénal dispose que la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires n’est pas pénalement responsable, la responsabilité civile des professionnels de santé impliqués peut être engagée en cas de faute. Il en va de même de leur responsabilité pénale, en cas de manquement aux dispositions applicables révélant l’existence d’un délit ou d’un crime, tandis que des recours disciplinaires peuvent également être introduits dans de telles hypothèses.

● Dans les pays qui proposent une législation en matière d’aide à mourir, un contrôle est exercé selon des modalités variables, a priori ou a posteriori, par une commission ad hoc ou non, au niveau national ou local.

Les rapporteurs relèvent, comme le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi, que le caractère suffisant d’un contrôle a posteriori a été admis par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Cette dernière a en effet jugé le contrôle de la décision médicale relative à l’euthanasie en Belgique, exercé uniquement a posteriori par une commission fédérale ([241]), n’est pas incompatible avec les droits à la vie et au respect de la vie privée et familiale garantis par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CSDH) ([242]), dès lors que ces actes sont soumis à des conditions strictement réglementées par la loi, qui prévoit un certain nombre de garanties matérielles et procédurales. Elle a souligné la nécessité qu’un tel contrôle soit « effectué de manière particulièrement rigoureuse », et en particulier que les règles de composition et de fonctionnement de la commission chargée de ce contrôle garantissent son indépendance.

II.   Le dispositif proposÉ

La création d’un dispositif d’aide à mourir suppose la mise en place concomitante d’une instance de contrôle du respect des conditions et des garanties procédurales fixées. À cette fin, l’article 17 prévoit la création d’une commission de contrôle et d’évaluation, placée auprès du ministre chargé de la santé et chargée de plusieurs missions.

● La principale mission attribuée à cette commission est le contrôle du respect, pour chaque aide à mourir, des conditions d’accès et de procédure prévues par les chapitres II et III du titre II du présent projet de loi (1° du I). L’étude d’impact souligne que la commission n’a pas vocation à intervenir dans le déroulement d’une procédure d’aide à mourir et ajoute qu’elle « n’est ni une instance d’expertise en appel des décisions d’éligibilité, ni une instance de réexamen des avis rendus dans le cadre des procédures collégiales. Son contrôle ne peut se dérouler qu’en aval de ces dernières. »

Il est précisé que le contrôle, effectué a posteriori, sur le modèle belge, sera réalisé notamment à partir des données enregistrées dans le système d’information ad hoc prévu à l’article 13, dont la commission est responsable en application du II. L’article dispose que les données enregistrées dans ce système d’information sont traitées et partagées dans des conditions décret pris en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).

L’étude d’impact indique que seront enregistrés l’ensemble des actes de la procédure et ajoute que, tant qu’une étape n’aura pas été complétée, l’étape suivante sera bloquée. Ainsi, la délivrance du produit létal par le pharmacien nécessitera la réalisation de toutes les étapes antérieures.

Nonobstant les obligations légales relatives au secret médical résultant de l’article L. 1110‑4 du code de la santé publique, les médecins membres de la commission de contrôle et d’évaluation pourront avoir accès, dans la mesure strictement nécessaire à leur mission, au dossier médical de la personne ayant procédé ou fait procéder à l’administration de la substance létale (III).

Le dernier alinéa du I dispose que, lorsqu’à l’issue de son contrôle, la commission estime que des faits commis par les professionnels de santé à l’occasion de la mise en œuvre de l’aide à mourir sont susceptibles de constituer un manquement aux règles déontologiques ou professionnelles, elle peut saisir la chambre disciplinaire de l’ordre compétent.

● La commission assure également le suivi et l’évaluation de l’application de l’aide à mourir afin d’en informer annuellement le Gouvernement et le Parlement et de leur proposer des recommandations (2° du I).

● Elle est par ailleurs chargée d’enregistrer les déclarations des professionnels de santé qui sont disposés à participer à la mise en œuvre de l’aide à mourir, en application du III de l’article 16 (3° du I). Il est précisé que le registre constitué, qui a pour objet de faciliter l’orientation des personnes demandant l’aide à mourir, notamment lorsqu’un professionnel fait usage de sa clause de conscience, sera, conformément à l’avis du Conseil d’État, accessible aux seuls médecins, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État pris après avis de la Cnil.

● Le dernier alinéa de l’article 17 renvoie à un décret pris en Conseil d’État la composition de la commission et ses règles de fonctionnement propres à garantir son indépendance et son impartialité, ainsi que les modalités d’examen, pour chaque personne ayant demandé l’aide à mourir, du respect des conditions d’accès et de procédure.

L’étude d’impact précise que la commission sera composée de représentants de l’État, d’experts dans les domaines du droit, des sciences humaines et sociales, et de professionnels de santé, notamment de médecins, seuls compétents pour l’analyse de données relevant du secret médical, tandis que le Conseil d’État indique qu’il importera qu’elle comporte au moins deux médecins, pour les cas où l’un d’entre eux devrait se déporter.

S’agissant des règles de fonctionnement de la commission, l’étude d’impact précise qu’elles pourraient par exemple « porter sur l’examen à échéances régulières de chaque procédure d’aide à mourir réalisée pendant une période déterminée (un mois, un trimestre, etc.), sur la base d’une extraction anonymisée du système d’information ». Elle ajoute que les cas qui ne soulèveraient aucune question donneraient lieu à une décision de validation par la commission qui ferait l’objet d’un enregistrement dans le système d’information et d’une transmission aux professionnels concernés. En cas de difficulté, la commission pourrait décider de lever l’anonymat et, afin d’être éclairée sur les conditions dans lesquelles l’aide a été dispensée, elle aurait la possibilité d’interroger les personnes intervenues dans la procédure ainsi que de se faire communiquer tous les éléments nécessaires.

● Les rapporteurs relèvent l’abondance des observations formulées par le Conseil d’État sur cette commission. Ils notent que celui-ci estime que « le principe même de l’existence d’une telle commission ne contrevient à aucun principe de nature constitutionnelle » et formule plusieurs remarques soulignant les garanties apportées par le dispositif :

– les prérogatives de l’autorité judiciaire ne font l’objet d’aucune restriction dès lors, d’une part, que l’appréciation de la commission ne revient pas, en droit, à éteindre l’action publique et, d’autre part, que l’action publique n’est pas subordonnée à l’action de la commission ;

– le cadre strict dans lequel s’inscrit l’aide à mourir, qui permet de l’envisager comme une cause d’irresponsabilité pénale par autorisation de la loi au sens de l’article 122-4 du code pénal, ne semble pas justifier un contrôle systématique de l’autorité judiciaire, dont l’indépendance est garantie par la Constitution ;

– la commission de contrôle et d’évaluation devant être regardée comme une « autorité constituée » au sens de l’article 40 du code de procédure pénale ([243]), elle sera tenue, si elle suspecte, dans le cadre de son contrôle, que des faits sont susceptibles de constituer un crime ou un délit, d’effectuer un signalement au procureur de la République, à qui seul appartiendra d’apprécier l’opportunité d’engager des poursuites ;

– les proches des personnes décédées pourraient engager l’action publique en saisissant directement le parquet d’une plainte ou en se constituant partie civile. L’intervention de la commission ne délivrerait pas non plus les professionnels de santé, notamment ceux exerçant au sein du service public hospitalier, des obligations prévues en particulier à l’article 40 du code de procédure pénale et à l’article 434-1 du code pénal, aux termes duquel toute personne ayant connaissance d’un crime dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets, ou dont les auteurs sont susceptibles de commettre de nouveaux crimes qui pourraient être empêchés, est tenue d’en informer les autorités judiciaire ou administrative.

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté plusieurs amendements qui précisent l’action et la composition de la commission de contrôle et d’évaluation créée par l’article 17. Un amendement de la rapporteure Caroline Fiat a explicité le caractère a posteriori du contrôle exercé par cette commission, rétablissant cette mention qui figurait dans l’avant-projet de loi en adéquation avec le dispositif décrit par l’étude d’impact ([244]). Par un autre amendement de la rapporteure, la commission spéciale a indiqué que, dans sa mission de suivi et d’évaluation, la commission de contrôle et d’évaluation exploite notamment des données agrégées et anonymisées ([245]). Enfin, un amendement de Mme Marie-Noëlle Battistel et plusieurs de ses collègues du groupe Socialistes et apparentés a imposé, conformément à l’exigence fixée par le Conseil d’État ([246]), que la commission de contrôle et d’évaluation soit composée d’au moins deux médecins ([247]).

En cohérence avec les amendements adoptés sur les autres articles du titre II du projet de loi, la commission a également adopté un amendement de la rapporteure codifiant les dispositions de l’article 17 dans le code de la santé publique ([248]).

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Article 18
Évolution des missions de la Haute Autorité de santé et de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, et insertion des produits destinés à l’aide à mourir dans un circuit spécifique et sécurisé

Adopté avec modifications

L’article 18 étend le domaine d’intervention de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) aux substances létales utilisées dans le cadre de l’aide à mourir. La HAS est ainsi chargée d’établir des recommandations de bonnes pratiques tandis qu’est prévu un circuit spécifique et sécurisé de distribution des substances utilisées.

I.   Le droit en vigueur

● En France, le pharmacien détient un monopole de fabrication, de contrôle ainsi que de distribution et de vente de médicaments à usage humain ([249]), traditionnellement entendus comme « toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines » ([250]).

Si l’administration d’une substance de nature à entraîner la mort constitue un empoisonnement au sens du code pénal ([251]), les substances létales peuvent être, comme les médicaments contraceptifs et abortifs, rattachées à la définition européenne du médicament ([252]). Reprise à l’article L. 5111‑1 du code de la santé publique, celle-ci précise qu’est aussi entendue comme médicament « toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée, en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier ses fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique » ([253]).

Il existe différentes catégories de médicaments et l’article L. 5121‑1 du code de la santé publique distingue ainsi les préparations magistrales, définies comme tout médicament préparé selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé, des préparations hospitalières ou officinales, lesquelles sont réalisées en avance et en petites séries pour un ou plusieurs patients.

Comme le rappelle l’étude d’impact jointe au projet de loi, la dispensation du médicament, c’est-à-dire le fait de le remettre à un patient, se fait sous la responsabilité et le contrôle de pharmaciens, lesquels peuvent exercer en officine ([254]) ou en pharmacie à usage intérieur (PUI) ([255]).

● Deux opérateurs sont responsables de l’évaluation et de l’encadrement des pratiques et des produits de santé :

– la Haute Autorité de santé (HAS) ([256]) évalue le service attendu des produits. Elle élabore et diffuse des guides de bon usage des soins et des recommandations de bonne pratique, sans préjudice des mesures prises par l’ANSM dans ses missions de sécurité sanitaire. Les tâches dont elle est chargée sont énumérées par l’article L. 161‑37 du code de la sécurité sociale ;

– l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ([257]) évalue régulièrement l’évolution des risques et bénéfices des médicaments commercialisés. Elle mène des actions d’information et de sensibilisation au bon usage des produits de santé ([258]).

● En application de l’article L. 5121‑14‑3 du code de la santé publique, l’entreprise qui exploite un médicament est tenue de contribuer à son bon usage, notamment en veillant à ce qu’il soit prescrit dans le respect de son autorisation de mise sur le marché ainsi que d’éventuelles autres autorisations ou enregistrement. Elle prend toutes les mesures d’information qu’elle juge appropriées à l’attention des professionnels de santé lorsqu’elle constate des prescriptions non conformes au bon usage de ce médicament et en avise sans délai l’ANSM.

II.   Le dispositif proposé

L’article 18 définit la chaîne de mise à disposition des substances létales destinées à l’aide à mourir de façon à apporter une protection renforcée à toutes les étapes en précisant les obligations des fabricants ainsi que les missions de la HAS et de l’ANSM. Ce faisant, il prévient toute dérive et garantit la possibilité de bénéficier de l’aide à mourir sur tout le territoire. En outre, alors que les substances létales sont caractérisées par une absence de but thérapeutique, il modifie la partie législative du code de la sécurité sociale et du code de la santé publique afin d’adapter les dispositions existantes relatives à l’encadrement des produits de santé.

● D’une part, l’article 18 complète les missions confiées à la HAS et l’ANSM. Celles-ci ont été consultées sur cette évolution. Elles voient leur domaine d’intervention étendu aux substances létales utilisées dans le cadre de l’aide à mourir, préparations prescrites sans visée thérapeutique.

L’article 18 attribue à la HAS, en ajoutant un 23° à l’article L. 161‑37 du code de la sécurité sociale, la mission d’élaborer des recommandations de bonne pratique concernant les substances susceptibles d’être utilisées pour l’aide à mourir, en tenant compte notamment des comptes rendus effectués par les professionnels de santé accompagnant la personne lors de leur administration, mentionnés au V de l’article 11 du projet de loi (I).

L’étude d’impact jointe au projet de loi précise que ces recommandations, incluant une liste de produits susceptibles, isolément ou de manière combinée, d’être utilisés pour l’aide à mourir, indépendamment de leur autorisation de mise sur le marché, seront élaborées en lien avec les sociétés savantes et en considération de la littérature scientifique internationale. Elles auront vocation à être actualisées.

L’article 18 complète enfin le premier alinéa du II de l’article L. 5311‑1 du code de la santé publique afin que l’ANSM puisse, sur demande du ministre chargé de la santé, procéder à l’évaluation des produits destinés à être utilisés pour l’aide à mourir (4° du II).

● D’autre part, l’article 18 sécurise la chaine de circulation de la substance létale. L’étude d’impact précise ainsi que l’ordonnance de prescription de la substance létale sera directement transmise par le prescripteur à une pharmacie à usage intérieur autorisée, qui procédera à la préparation et à la facturation à l’assurance maladie, puis emballera le produit de façon à garantir sa confidentialité afin de le transmettre aux pharmacies d’officine désignées par transporteur sécurisé garantissant sa bonne conservation. En dernier lieu, la substance sera délivrée aux professionnels de santé accompagnant le patient récipiendaire de l’aide à mourir.

Aussi, au regard de la spécificité de l’usage et des effectifs relativement limités de personnes concernées, la préparation des substances létales est réservée aux pharmacies à usage intérieur des établissements de santé ou des groupements de coopération sanitaire désignées par arrêté du ministre chargé de la santé (1° du II).

Le même 1° du II complète la définition de la préparation magistrale prévue au 1° de l’article L. 5121‑1 du code de la santé publique. Il dispose qu’est qualifiée de létale une préparation magistrale utilisée pour l’aide à mourir préparée dans le respect des recommandations élaborées par la HAS. En conséquence, la préparation létale serait une sous-catégorie de préparation magistrale.

Pour en sécuriser la délivrance, ce même alinéa dispose également que la préparation est délivrée dans les conditions mentionnées à l’article L. 5132‑8 du même code, relatif aux préparations vénéneuses. Il en résulte que ces conditions seront fixées après avis des conseils nationaux de l’ordre des médecins et de l’ordre des pharmaciens. Il est entendu par ailleurs que, la substance létale étant rattachée à la catégorie des préparations magistrales définie à l’article L. 5121-1, elle entre dans le monopole pharmaceutique défini à l’article L. 4211-1, qui lui-même comprend des garanties de transport, sous la responsabilité du pharmacien, fixées au niveau réglementaire ([259]).

L’article 18 prévoit en outre un double circuit de distribution hospitalier et officinal, permettant un meilleur accès au produit pour les patients. À cette fin, il modifie l’article L. 5126‑6 du code de la santé publique pour permettre aux PUI chargées de la préparation de transmettre les préparations magistrales létales aux pharmacies d’officine ou aux PUI chargées de leur délivrance, mentionnées à l’article 10 du projet de loi (3° du II).

Enfin, l’article 18 clarifie l’étendue des obligations du fabricant des produits qui composent la substance létale, notamment en matière de suivi du bon usage. Il modifie l’article L. 5121‑14‑3 du code de la santé publique afin d’obliger les entreprises exploitant des médicaments à veiller à ce que la substance létale soit prescrite dans le respect des recommandations élaborées par la HAS (2° du II).

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

La commission spéciale a adopté un amendement de la rapporteure Caroline Fiat confiant à la Haute Autorité de santé le soin de définir les substances létales susceptibles d’être utilisées pour l’aide à mourir ([260]).

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Chapitre V bis (nouveau)
Dispositions pénales

(Division nouvelle)

Article 18 bis (nouveau)
Délit d’entrave à l’aide à mourir

Introduit par la commission

L’article 18 bis crée un délit d’entrave à l’aide à mourir, sur le modèle de celui prévu concernant l’interruption volontaire de grossesse (IVG).

Cet article résulte de l’adoption par la commission spéciale, avec le soutien du Gouvernement, d’un amendement de la rapporteure Caroline Fiat ([261]). Il ajoute au sein du titre II du projet de loi un nouveau chapitre V bis relatif à des dispositions pénales et crée un délit d’entrave à l’aide à mourir.

● Le nouvel article L. 1111‑12‑14 du code de la santé publique punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher de pratiquer ou de s’informer sur l’aide à mourir par tout moyen, y compris par voie électronique ou en ligne, notamment par la diffusion ou la transmission d’allégations ou d’indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales de l’aide à mourir :

– soit en perturbant l’accès aux établissements habilités à pratiquer l’aide à mourir ou tout lieu où elle peut régulièrement y être pratiquée, la libre circulation des personnes à l’intérieur de ces lieux ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ou en perturbant le lieu quel qu’il soit choisi par une personne pour l’administration de la substance létale ;

– soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d’intimidation à l’encontre des personnes cherchant à s’informer sur l’aide à mourir, des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans les établissements habilités, des patients souhaitant recourir à l’aide à mourir ou de l’entourage de ces derniers.

Il ajoute que toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, dont l’objet statutaire comporte la défense des droits des personnes à accéder à l’aide à mourir, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions précitées lorsque les faits ont été commis en vue d’empêcher ou de tenter d’empêcher l’aide à mourir ou les actes préalables.

● La rédaction de cet article s’inspire ainsi de celle de l’article L. 2223-2 du code de la santé publique relatif au délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). À cet égard, il convient de relever que le Conseil constitutionnel, dans une décision du 16 mars 2017 ([262]), a jugé ce dispositif conforme à la Constitution en formulant deux réserves d’interprétation :

– la seule diffusion d’informations à destination d’un public indéterminé sur tout support, notamment sur un site de communication au public en ligne, ne saurait être regardée comme constitutive de pressions, menaces ou actes d’intimidation au sens des dispositions adoptées, sauf à méconnaître la liberté d’expression et de communication. Ces dispositions ne peuvent donc permettre que la répression d’actes ayant pour but d’empêcher ou de tenter d’empêcher une ou plusieurs personnes déterminées de s’informer sur une IVG ou d’y recourir ;

– sauf à méconnaître également la liberté d’expression et de communication, le délit d’entrave, lorsqu’il réprime des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d’intimidation à l’encontre des personnes cherchant à s’informer sur une IVG, ne saurait être constitué qu’à deux conditions : que soit sollicitée une information, et non une opinion ; que cette information porte sur les conditions dans lesquelles une IVG est pratiquée ou sur ses conséquences et qu’elle soit donnée par une personne détenant ou prétendant détenir une compétence en la matière.

● Conformément aux amendements adoptés afin d’intégrer dans le code de la santé publique les dispositions du titre II du présent projet de loi, l’article 18 bis insère les dispositions susmentionnées dans un article L. 1111‑12‑14 figurant dans une sous-section 6 relative aux dispositions pénales, complétant la section 2 bis du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique, telle qu’elle résulte de l’article 5 de la présente loi.

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*     *

Chapitre VI
Dispositions diverses

Article 19
Prise en charge par l’assurance maladie des frais exposés dans le cadre de la mise en œuvre de l’aide à mourir

Adopté avec modifications

Cet article vise à assurer la prise en charge intégrale par l’assurance maladie des frais exposés dans le cadre de la mise en œuvre de l’aide à mourir. Il prévoit également la publication d’un arrêté ministériel devant fixer le prix de cession des préparations magistrales létales pris en charge dans le cadre de l’aide à mourir ainsi que le tarif des honoraires ou rémunérations forfaitaires des professionnels de santé pour les missions réalisées dans le cadre de l’aide à mourir, qui ne pourront par ailleurs pas donner lieu à un dépassement ou à une franchise.

I.   Le droit en vigueur

L’article L. 160‑8 du code de la santé publique liste les frais relevant de la protection sociale contre le risque et les conséquences de la maladie. Certains de ces frais peuvent faire l’objet d’une participation de l’assuré, prévue à l’article L. 160‑13 du même code.

Cependant, l’article L. 160‑14 énumère les cas dans lesquelles cette participation de l’assuré peut être limitée ou supprimée. C’est le cas par exemple de la plupart des patients en soins palliatifs dès lors qu’ils sont en situation d’affection de longue durée (ALD) : ils voient leur prise en charge intégralement couverte par l’assurance maladie (3° de ce même article).

Dans la même optique, l’article L. 160‑15 exclut de la participation forfaitaire, mentionnée au II de l’article L. 160‑13, les mineurs et les bénéficiaires de la protection complémentaire en santé.

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article prévoit d’abord une prise en charge intégrale par l’assurance maladie de l’ensemble des frais afférents à l’aide à mourir (I). Cette solution doit « garantir l’équité entre les personnes en fin de vie qui souhaiteraient bénéficier de l’aide à mourir sans considération de leur niveau de revenus, dans le respect du principe de solidarité qui fonde notre système de santé » ([263]).

● En rétablissant le 3° de l’article L. 160‑8 du code de la santé publique, le du I intègre à la liste des frais couverts par l’assurance maladie obligatoire les frais exposés dans le cadre de la mise en œuvre de l’aide active à mourir.

Le et le du I visent à permettre une prise en charge intégrale par l’assurance maladie de ces frais, respectivement en ajoutant un 32° à l’article L. 160‑14, qui énumère les cas où la participation de l’assuré peut être limitée ou supprimée, et en complétant l’article L. 160‑15, qui exclut toute participation forfaitaire et franchise pour les mineurs (qui, pour mémoire, sont exclus de l’accès à l’aide à mourir par l’article 5 du projet de loi) et les bénéficiaires de la protection complémentaire en santé.

Le II prévoit la publication d’un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, qui fixera :

– le prix de cession des substances létales pris en charge dans le cadre de l’aide à mourir, couvrant les frais de leur réalisation, de leur acheminement et de délivrance. La substance létale étant délivrée en pharmacie, elle pourra être entièrement prise en charge dans le cadre du tiers payant ;

– le tarif des honoraires ou rémunérations forfaitaires des professionnels de santé pour les missions réalisées dans le cadre de l’aide à mourir. Ces honoraires ne pourront donner lieu à dépassement.

● La prise en charge intégrale par l’assurance maladie des frais associés au recours à l’aide à mourir permettra d’en garantir et d’en faciliter l’accès, conformément au principe de solidarité qui est au fondement de notre modèle de sécurité sociale. Les dépenses de santé d’une grande partie des malades qui devraient avoir recours à l’aide à mourir sont déjà prises en charge à 100 %, dans le cadre du tiers payant, par l’assurance maladie obligatoire puisqu’il s’agit pour beaucoup de personnes en situation d’affection de longue durée (ALD).

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

Cet article a été adopté avec deux modifications rédactionnelles à l’initiative de la rapporteure.

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Article 20
Neutralisation des dispositions du code des assurances et de la mutualité en cas de mise en œuvre de l’aide à mourir

Adopté avec modifications

Cet article vise à neutraliser les dispositions législatives du code des assurances et de la mutualité qui prévoient des exclusions de garantie en cas de suicide la première année d’un contrat d’assurance (ou dans l’année suivant un avenant d’augmentation des garanties) en cas de mise en œuvre de l’aide à mourir.

I.   Le droit en vigueur

Une assurance décès permet l’apport d’une garantie à l’ayant droit du contrat en cas de décès de l’assuré. Fin 2022, il existait plus de 32 millions de contrats à adhésion individuelle couvrant la garantie décès ([264]) et 14 millions de salariés étaient assurés par des contrats collectifs comprenant une garantie décès ([265]).

● La légalisation de l’aide à mourir est susceptible de produire des effets non souhaités sur l’exécution des contrats d’assurance sur la vie, lors de la première année ou durant l’année suivant un avenant d’augmentation des garanties.

En effet, selon l’article L. 1327 du code des assurances, une assurance en cas de décès est de nul effet « si l’assuré se donne volontairement la mort au cours de la première année du contrat. L’assurance en cas de décès doit couvrir le risque de suicide à compter de la deuxième année du contrat. En cas d’augmentation des garanties en cours de contrat, le risque de suicide, pour les garanties supplémentaires, est couvert à compter de la deuxième année qui suit cette augmentation. »

Une disposition similaire figure à l’article L. 223‑9 du code de la mutualité : « La garantie en cas de décès est de nul effet si le membre participant se donne volontairement la mort au cours de la première année de l’adhésion ou du contrat collectif. La garantie en cas de décès doit couvrir le risque de suicide à compter de la deuxième année du contrat. En cas d’augmentation des garanties en cours de contrat, le risque de suicide, pour les garanties supplémentaires, est couvert à compter de la deuxième année qui suit cette augmentation. »

● En l’absence d’intervention du législateur, il ne peut être exclu que les règles sur le suicide prévues par le code des assurances et le code de la mutualité soient appliquées, s’il était estimé par l’assureur ou la mutuelle que l’administration d’une substance létale dans le cadre d’une procédure d’aide à mourir était assimilable à un suicide. Les personnes ayant recours à l’aide à mourir et titulaires d’un contrat d’assurance sur la vie, conclu moins d’une année avant le décès, ou ayant fait l’objet d’un avenant d’augmentation des garanties moins d’un an avant le décès, pourraient alors perdre le bénéfice des garanties attachées à leur contrat.

II.   Le dispositif proposÉ

Le présent article vise à éviter que le décès entraîné par l’aide à mourir soit assimilé à un suicide afin que les assureurs et les organismes mutualistes couvrent bien le décès en cas de recours à l’aide à mourir, écartant ainsi toute ambiguïté.

● Le I du présent article complète l’article L. 132-7 du code des assurances tandis que le II complète l’article L. 223-9 du code de la mutualité, afin d’y inscrire l’obligation de couvrir le décès en cas de mise en œuvre de l’aide à mourir prévue par la présente loi. Le III précise que les dispositions du présent article s’appliquent aux contrats en cours au jour de l’entrée en vigueur de la présente loi.

● Cette mesure évitera qu’une personne renonce à recourir à l’aide à mourir pour des raisons assurantielles. Il est à noter que cette mesure a été jugée plus sécurisante sur le plan juridique qu’une assimilation du décès lié à une aide à mourir à une mort naturelle, comme cela peut être le cas dans d’autres législations (Belgique, Luxembourg, Québec, etc.).

III.   Les modifications apportées par la commission SPÉCIALE

Cet article a été adopté avec une modification rédactionnelle proposée par la rapporteure.

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Article 21
Habilitation à légiférer par ordonnance pour l’extension et l’adaptation des dispositions en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à WallisetFutuna, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte

Adopté sans modification

Cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi permettant d’étendre et d’adapter en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna les dispositions de la présente loi, ainsi que de procéder aux adaptations nécessaires de ces dispositions aux caractéristiques particulières à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte.

  1.   Le droit en vigueur

● La Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna sont régis par le principe de spécialité législative, qui implique l’extension formelle des dispositions pour qu’elles y trouvent application. Bien que le droit commun de la santé ne s’applique pas en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, l’État est compétent en matière de garanties des libertés publiques, d’ordre public et de respect du corps humain. À Wallis-et-Futuna, même si le système de santé est régi par l’État, il y fonctionne selon une organisation particulière nécessitant des adaptations.

Que ce soit en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française ou à Wallis-et-Futuna, l’État n’est pas compétent pour les questions d’aide et de sécurité sociales.

● Les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, bien que relevant du principe d’identité législative, disposent d’un régime particulier de sécurité sociale, qui suppose des adaptations des dispositions du projet de loi.

  1.   Le dispositif proposÉ

● Dans les conditions prévues par l’article 38 de la Constitution ([266]), le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi permettant :

– d’étendre et d’adapter en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, les dispositions de la présente loi ainsi que, le cas échéant, les dispositions d’autres codes et lois nécessaires à son application, en tant qu’elles relèvent de la compétence de l’État () ;

– de procéder aux adaptations nécessaires de ces dispositions aux caractéristiques en matière de santé et de sécurité sociale particulières à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte ().

● Le recours à une habilitation sur le fondement de l’article 38 de la Constitution plutôt que par l’habilitation « permanente » de son article 74‑1 ([267]) permet d’enserrer dans des délais préfix la mise en œuvre du présent projet de loi en outre-mer. Le délai de douze mois doit permettre d’associer pleinement les collectivités concernées à l’élaboration des mesures précitées.

● Le dernier alinéa prévoit qu’un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance. Conformément à l’article 38 de la Constitution, l’ordonnance deviendra caduque si le projet de loi de ratification n’est pas déposé avant l’expiration de ce délai.

● Cet article a été adopté par la commission spéciale sans modification.

 


  1  —

Annexes

Annexe n°1 :
Liste des personnes auditionnées par
la commission spéciale

(par ordre chronologique)

  Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

  Comité consultatif national d’éthique  Pr Jean-François Delfraissy, président, Pr Régis Aubry et M. Alain Claeys, co-rapporteurs de l’avis 139 « Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité » (2022)

  Table ronde avec les ordres des professionnels de santé

– Conseil national de l’Ordre des médecins  Dr François Arnault, président, et Mme Julie Laubard, directrice adjointe des services juridiques

– Conseil national de l’Ordre des pharmaciens *  Dr Carine Wolf - Thal, présidente, et Mme Caroline Lhopiteau, directrice générale

 Conseil national de l’Ordre des infirmiers  Mme Sylvaine Mazière-Tauran, présidente, et Mme Soumaya Majeri, responsable des affaires juridiques

  Audition conjointe

 Académie nationale de médecine – Pr Jacques Bringer, président du comité Éthique, et Mme Claudine Bergoignan-Esper, vice-présidente du comité Éthique

 Conseil économique, social et environnemental  M. Albert Ritzenthaler, président de la commission temporaire sur la fin de vie, et Mme Dominique Joseph, rapporteure de l’avis « Fin de vie : faire évoluer la loi ? » (2023)

  Table ronde avec les fédérations hospitalières

 Fédération de l’hospitalisation privée (FHP)  Mme Christine Schibler, déléguée générale, et Mme Béatrice Noëllec, directrice des relations institutionnelles et de la veille sociétale

 Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés solidaires (Fehap) *  M. Charles Guépratte, directeur général, et Pr Olivier Guérin, conseiller médical

 Fédération hospitalière de France (FHF) *  Pr Bertand Guidet, président du comité d’éthique, et M. Marc Bourquin, conseiller stratégie et responsable de l’articulation et de la coordination Parcours, proximité, autonomie et territoire

 Fédération hospitalière des centres de lutte contre le cancer (Unicancer)  Mme Sophie Beaupère, déléguée générale

 Fédération nationale des établissements d’hospitalisation à domicile (Fnehad) *  Dr Élisabeth Hubert, présidente, et M. Mathurin Laurin, délégué national

  Table ronde avec les acteurs du domicile

 Association des directeurs au service des personnes âgées (ADPA)  M. Pascal Champvert, président

 Collectif national des maisons de vie  Mme Laure Hubidos, présidente

 Équipe mobile de soins palliatifs de l’Essonne  Mme Françoise Ellien, directrice

 Fédération française de services à la personne et de proximité (Fédésap) * – M. Didier Pagel, président de la commission « soins », et Mme Anne Richard, responsable Affaires publiques et médico-social

 Syndicat national des établissements, résidences et services d’aide à domicile privés pour personnes âgées (Synerpa) *  M. JeanMarc Venard, vice-président, et Dr Éric Kariger, président de la commission médicale et soins

  Haute Autorité de santé – Pr Lionel Collet, président, et Dr Pierre Gabach, adjoint à la direction de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et chef du service des bonnes pratiques

  Table ronde sur les enjeux éthiques

 Dr François Blot, médecin réanimateur, président du comité d’éthique de l’Institut Gustave Roussy

– Mme Valérie Depadt, maître de conférences en droit privé, conseillère de l’Espace éthique Île-de-France

 Dr Véronique Fournier, fondatrice du centre d’éthique clinique de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris

 M. Fabrice Gzil, professeur associé de philosophie et d’éthique à l’Université Paris-Saclay, co-directeur de l’Espace éthique Île-de-France

 M. Emmanuel Hirsch, professeur émérite d’éthique médicale, Université Paris-Saclay

  Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie  Mme Sarah Dauchy, présidente, et Mme Giovanna Marsico, directrice

  Table ronde sur les soins palliatifs

 Pr Franck Chauvin, professeur en santé publique, président de l’instance de réflexion stratégique chargée de préfigurer le plan décennal « Soins palliatifs, prise en charge de la douleur et accompagnement de la fin de vie en France » 2024‑2034

 Dr Claire Fourcade, médecin en soins palliatifs, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap)

 Dr Michèle Lévy-Soussan, médecin responsable de l’unité mobile d’accompagnement et de soins palliatifs de la Pitié-Salpêtrière (Assistance publique - Hôpitaux de Paris)

 Pr Valeria Martinez, professeure anesthésie - douleur chronique à l’hôpital Raymond Poincaré (Assistance publique - Hôpitaux de Paris), présidente de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD)

  Table ronde avec des représentants des cultes

 Assemblée des évêques orthodoxes de France  Me Carol Saba, responsable de la commission médias

– Conférence des Évêques de France  Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours, vice-président, et Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes

 Fédération protestante de France – M. le pasteur Christian Krieger, président, et Dr Jean-Gustave Hentz, président de la commission Éthique et société

 Grande Mosquée de Paris – Pr Sadek Beloucif, référent pour les questions de fin de vie, chef du service d’anesthésie-réanimation à l’hôpital Avicenne (Assistance publique - Hôpitaux de Paris)

 Union bouddhiste de France  M. Antony Boussemart, co-président

  Table ronde sur les enjeux philosophiques et sociologiques

 M. Philippe Bataille, professeur de sociologie, écrivain, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales

 M. Damien Le Guay, philosophe, écrivain, chargé d’enseignement à l’espace éthique de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris

 M. Frédéric Worms, professeur de philosophie, directeur de l’École normale supérieure (ENS‑PSL)

  Table ronde réunissant des professionnels de santé

 Dr Francis Abramovici et Dr Antoine de Beco, membres du Collège de la médecine générale

 Mme Arlette Schuhler, secrétaire adjointe du Conseil national professionnel des aides-soignants, et M. Denis Fischer, responsable Communication

– Dr Valérie Mesnage, neurologue, et Dr Christine RaynaudDonzel, pneumo-oncologue, membres du collectif « Pour un accompagnement soignant solidaire »

 Pr Pierre-François Perrigault, membre de la Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar)

– Dr Sophie Moulias, médecin-gériatre à l’hôpital Ambroise Paré (Assistance publique - Hôpitaux de Paris)

  Table ronde avec des associations

 Alliance Vita *  M. Tugdual Derville, porte-parole, et Dr Olivier Trédan, conseiller médical

 Association pour le droit de mourir dans la dignité *  M. Jonathan Denis, président, et M. Yoann Brossard, secrétaire général

 Fondation Jérôme Lejeune  M. Jean-Marie Le Méné, président, et Mme Véronique Bourgninaud, chargée de plaidoyer Dignité, handicaps et pathologies

 Le Choix *  Dr Denis Labayle, co-président

  Table ronde sur l’accompagnement des personnes en fin de vie

 Association Être-là  M. Jacques de Beauval, président, et M. Matthieu Lantier, délégué général

 France Assos Santé *  Mme Agnès Bourdon-Busin, administratrice au titre d’APF France Handicap, et Mme Stéphanie Pierre, chargée de mission santé publique

 Jusqu’à la mort accompagner la vie (Jalmalv)  M. Olivier de Margerie, président

 Mme Elsa Walter, auteure de l’ouvrage À vous je peux le dire (2022)

  Table ronde avec les obédiences maçonniques

– Fédération française du droit humain  M. Sylvain Zeghni, Grand Maître national, président du conseil national, et Mme Martine Baissas, responsable de la commission éthique-bioéthique

– Grande Loge de France  M. Michel Hannoun, représentant du Grand Maître

– Grande Loge féminine de France – Mme Catherine Lyautey, Grande Maîtresse, et Mme Frédérique Moati, présidente de la commission nationale éthique bioéthique

 Grand Orient de France  M. Guillaume Trichard, Grand Maître

  M. Thierry Beaudet, président du Conseil économique, social et environnemental, Mme Claire Thoury, présidente du comité de gouvernance de la Convention citoyenne sur la fin de vie, Mme Soline Castel et M. Jean-Michel Poncet, membres de la Convention citoyenne

  Table ronde réunissant

 Dr Marina Carrère d’Encausse, médecin échographiste

– Dr Jean-Marie Gomas, cofondateur de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap)

 Mme Marie de Hennezel, psychologue clinicienne

 Mme Martine Lombard, professeure émérite de droit public à l’Université Paris-Panthéon-Assas

 Pr Didier Sicard, président du Comité consultatif national d’éthique (1999 2008), coordinateur de la commission chargée de réfléchir sur les modalités d’assistance au décès pour les personnes en fin de vie (2012)

 Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé (2012-2017)

  M. Haïm Korsia, Grand‑rabbin de France **

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

** Audition par le bureau et les rapporteurs de la commission spéciale.


  1  —

Annexe n°2 :
Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

(par ordre chronologique)

  Table ronde avec les syndicats de pharmaciens et d’internes en pharmacie et biologie

 Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) *  M. Philippe Besset, président, et Mme Élise Palfray, membre du Bureau national et présidente de la commission « Entreprise officine »

 Fédération nationale des syndicats d’internes en pharmacie et en biologie (FNSIP-BM) *  M. Antoine Soula, président, et Mme Céline Marie, vice-présidente

 Syndicat national des pharmaciens, praticiens hospitaliers et praticiens hospitaliers universitaires (SNPHPU)  M. Philippe Meunier, président, et M. Romain De Jorna, secrétaire général

 Syndicat national des pharmaciens des établissements de santé (Synprefh)  M. Jean Poitou, pharmacien et juriste

 Union des syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo) * – Mme Marie-Josée Augé-Caumon, conseiller, et Mme Laura Cerminara, responsable de l’exercice professionnel

  M. Emmanuel Terrier, maître de conférence à l’Université de Montpellier, spécialiste en droit médical, bioéthique et déontologie

  Audition commune

 La Ligue contre le cancer *  M. Philippe Amiel, président du comité éthique et cancer de la Ligue, et Mme Laura Lévêque, responsable du service « Développement de projets innovants »

– Association pour la recherche sur la SLA (Arsla)  Mme Sabine Turgeman, directrice générale, et Mme Bettina Ramelet, directrice générale adjointe

  Cour des comptes, au titre du rapport sur les soins palliatifs (juillet 2023)  M. François de la Gueronnière, conseiller maître et président de section à la sixième chambre, et Mme Juliette Méadel, conseillère référendaire à la sixième chambre

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 


  1  —

   ANNEXE N°3 :
liste des contributions Écrites reçues par
la commission spÉciale

(Par ordre chronologique)

  Ordre national des infirmiers

  Association pour le droit de mourir dans la dignité *

  Association le choix citoyen pour une mort choisie *

  Collectif national des maisons de vie

  Collectif des médecins généralistes

  M. Jacques Giber et Mme Marie-Laure Auzanneau

  Collège de la médecine générale

  Syndicat national des établissements, résidences et services d’aide à domicile privés pour personnes âgées *

  Conseil économique, social et environnemental

  Collectif « Pour un accompagnement soignant solidaire »

  Pr Didier Sicard

  Dr François Blot

  Mme Elsa Walter

  Syndicat de la juridiction administrative

  Mme Valérie Depadt

  Syndicat national des pharmaciens des établissements de santé (Synprefh)

  Fédération française de l’Ordre maçonnique du droit humain

  Grande Loge féminine de France

  Associations familiales catholiques - confédération nationale

  Contribution conjointe de la Fédération des prestataires de santé à domicile, de l’Union des prestataires de santé à domicile et de la Fédération nationale des infirmiers

  Comité consultatif national d’éthique

  Think tank Terra Nova *

  M. Jean-François Mattei

  Pr. Jean-François Delfraissy, Pr Régis Aubry et M. Alain Claeys

  M. Emmanuel Terrier

  Mme Frédérique Wild

  Dr Véronique Fournier

  Association Ultime Liberté *

  Collectif Soulager mais pas tuer

  Fédération nationale des syndicats d’internes en pharmacie et biologie médicale *

  Société médico-psychologique

  Contribution conjointe de la Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem) *, du groupe Domicile compétences et de la Fondation du domicile

  Grande Mosquée de Paris

  Association Empreintes

  France Assos Santé *

  Collectif Handicaps *

  Dr Jean-Marie Gomas

  Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) *

  Mme Marie de Hennezel

  Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) *

  Dr Marina Carrère d’Encausse, médecin échographiste

  Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie

  Fédération nationale des établissements d’hospitalisation à domicile (Fnehad) *

  Fondation Jérôme Lejeune

  Ligue nationale contre le cancer *

  Association Alliance Vita *

  Fédération française de services à la personne et de proximité (Fédésap) *

  Conseil national de l’Ordre des médecins – Section éthique et déontologie

  Union syndicale des pharmaciens d’officine (Uspo) *

  Mme Martine Lombard

  Conférence des évêques de France

  Association Être-là

  M. Emmanuel Hirsch

  Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar)

  Association nationale des médecins coordonnateurs et du secteur médicaux-social (MCOOR)

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

 


  1  —

Annexe N°4 :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs
À l’occasion de l’examen DU PROJET de loi

Projet de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code de la santé publique

L. 1110‑5‑1, L. 1110‑8, L. 1110‑9, L. 1110‑10, L. 1111‑2 et L. 1111‑4

1er

Code de l’action sociale et des familles

L. 311‑1 et L. 311‑8

1er bis

Code de la santé publique

L. 1110‑9 et L. 1110‑9‑1 [nouveaux]

1er quater

Code de l’éducation

L. 631‑1 et L. 632‑1

1er quater

Code de la santé publique

L. 1110‑1‑2 [nouveau]

2

Code de l’action sociale et des familles

L. 311‑5‑2, L. 312‑1, L. 313‑3, L. 314‑3‑3 et L. 34‑10‑1 [nouveaux]

3

Code de la santé publique

L. 1110‑10‑1 [nouveau]

4

Code de la santé publique

L. 1111‑6, L. 1111‑11, L. 1111‑13‑1, L. 1111‑14 et L. 1411‑6‑2

4 bis

Code de la santé publique

L. 1110‑5‑2

4 ter

Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie

14

4 quater

Code de la santé publique

Intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie

5

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑1 [nouveau]

5 bis

Code de la santé publique

L. 1110‑5

6

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑2 [nouveau]

7

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑3 [nouveau]

8

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑4 [nouveau]

9

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑5 [nouveau]

10

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑6 [nouveau]

11

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑7 [nouveau]

12

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑8 [nouveau]

13

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑9 [nouveau]

14

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑10 [nouveau]

15

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑11 [nouveau]

16

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑12 [nouveau]

17

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑13 [nouveau]

18

Code de la sécurité sociale

L. 161‑37

18

Code de la santé publique

L. 5121‑1, L. 5121‑14‑3, L. 5126‑6 et L. 5311‑1

18 bis

Code de la santé publique

L. 1111‑12‑14 [nouveau]

19

Code de la sécurité sociale

L. 160‑8, L. 160‑14 et L. 160‑15

20

Code des assurances

L. 132‑7

20

Code de la mutualité

L. 223‑9

 


([1]) La composition de cette commission spéciale figure au verso de la présente page.

([2]) Rapport de la Convention citoyenne sur la fin de vie, avril 2023. Composée de 184 citoyens tirés au sort, la Convention avait pour mission de répondre à la question suivante : « Le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ? »

([3]) CCNE, avis 139, « Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité », 13 septembre 2022.

([4]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023.

([5]) Proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie de M. Olivier Falorni (n° 288). Dans le cadre d’une journée réservée aux textes proposés par le groupe Libertés et Territoires, l’examen de cette proposition de loi n’a jamais été achevé en séance publique. Elle avait été adoptée par la commission des affaires sociales le 31 mars 2021.

([6]) Sur ce sujet, le lecteur peut se référer au tableau figurant dans le commentaire des articles 5 et 6.

([7]) Conseil constitutionnel, décision n° 99‑421 DC du 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l’adoption de la partie législative de certains codes.

([8]) Amendement CS1955.

([9]) Loi n° 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs, article 1er.

([10]) Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades à la fin de la vie.

([11]) Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.

([12]) Cet alinéa dispose que « la Nation garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». Le Conseil constitutionnel en déduit un droit à la protection de la santé, depuis sa décision n° 90‑283 DC du 8 janvier 1991, Loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme.

([13]) Décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994.

([14]) Cour des comptes, « Les soins palliatifs, une offre de soins à renforcer », communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, juillet 2023.

([15]) OCDE, Time for Better Care at the End of Life, 2023.

([16]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.

([17]) CNSPFV, Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie en France, troisième édition, 2023.

([18]) Données transmises aux membres de la commission spéciale par la Fédération hospitalière privée (FHP).

([19]) CCNE, « Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité », avis 139 rapporté par le Pr Régis Aubry et M. Alain Claeys, 13 septembre 2022.

([20]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023.

([21]) Académie nationale de médecine, avis « Favoriser une fin de vie digne et apaisée : Répondre à la souffrance inhumaine et protéger les personnes les plus vulnérables », 27 juin 2023.

([22]) À cet égard, le CNSPFV, dans une contribution écrite adressée aux membres de la commission spéciale, souligne qu’en France, « les données sur les soins palliatifs sont modestes : à l’exception des données sur l’activité hospitalière, il est difficile d’obtenir des données globales et fiables sur le nombre de patients suivis dans un parcours palliatif ».

([23]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.

([24]) CNS, avis « Pour un meilleur accompagnement des fins de vie », adopté en « procédure d’urgence » par la commission permanente le 21 avril 2023. La CNS est un organisme consultatif placé auprès du ministre chargé de la santé (article L. 1411‑3 du code de la santé publique).

([25]) Igas, Évaluation du plan national 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie, juillet 2019.

([26]) Pr Franck Chauvin, « Vers un modèle français des soins d’accompagnement », rapport remis à la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, novembre 2023.

([27]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.

([28]) Amendement CS1767.

([29]) Amendement CS1056.

([30]) Amendement CS446.

([31]) Amendement CS1112.

([32]) Amendement CS636.

([33]) Amendement CS984.

([34]) Amendement CS1209 et sous-amendement CS1964.

([35]) Amendement CS1274.

([36]) Amendement CS1675.

([37]) Amendements CS486 et CS741.

([38]) Amendement CS3.

([39]) Amendement CS1331.

([40]) Amendement CS1059.

([41]) Amendement CS1336.

([42]) Gouvernement, Stratégie décennale des soins d’accompagnement, 22 avril 2024.

([43]) Amendement CS755.

([44]) Amendement CS1397.

([45]) Amendement CS1371.

([46]) Amendement CS1839.

([47]) Sous-amendement n° CS1969.

([48]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023, p. 11.

([49]) Amendement CS1373.

([50]) Instruction ministérielle n° DGOS/R4/DGS/DGCS/2023/76 du 21 juin 2023 relative à la poursuite de la structuration des filières territoriales de soins palliatifs dans la perspective de la stratégie décennale 2024‑2034.

([51]) Cet article énumère les établissements et services, dotés ou non d’une personnalité morale propre, considérés comme des établissements et services sociaux et médico-sociaux au sens du code.

([52]) Les maisons de vie sont des structures de répit et d’accompagnement, intermédiaires entre le domicile et l’hôpital. Elles ont pour mission d’accueillir des personnes vulnérables atteintes de pathologie graves (soins palliatifs), évolutives ou chroniques, dans un environnement se rapprochant au plus du domicile.

([53]) Cet établissement d’hébergement temporaire de 21 chambres, inauguré en 2019 et complété par une équipe mobile, est ouvert aux enfants et adultes de moins de 60 ans malades ou en situation de handicap, résidant dans la métropole de Lyon, et, s’ils le souhaitent, à leurs proches aidants pour un séjour maximal de 30 jours par an.

([54]) Igas, Soutenir les aidants en levant les freins au développement de solutions de répit, décembre 2022, point n° 25.

([55]) Cet établissement de soins palliatifs, créé en 1994 dans le contexte de l’épidémie du VIH, propose aujourd’hui un accompagnement pour les personnes malades dans un moment d’aggravation et quelles que soient les pathologies, à travers une aide à la prise en charge à domicile, un accueil à la journée, des temps de répit ou, pour les situations les plus aiguës, une hospitalisation dans deux unités de soins de 12 lits.

([56]) Cet établissement de soins palliatifs, fondé en 1874, comporte la plus grande USP d’Europe (81 lits), une équipe mobile, un accueil ambulatoire, un département de recherche, enseignement et formation ou encore une activité de conseil et d’expertise.

([57]) Les USP, qui existent depuis la circulaire dite « Laroque » du 26 août 1986 relative à l’organisation des soins et à l’accompagnement des malades en phase terminale, sont des services dont les lits sont totalement dédiés à la prise en charge palliative et à l’accompagnement de la fin de vie, à la fois lieux de soins et lieux de vie pour la personne malade et ses proches.

([58]) Pr. Franck Chauvin, Vers un modèle français des soins d’accompagnement, rapport adressé à la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, novembre 2023, p. 46.

([59]) Les LISP, créés par la circulaire n° 2002-98 du 19 février 2002 relative à l’organisation des soins palliatifs et de l’accompagnement, offrent une prise en charge spécialisée en soins palliatifs dans un service d’hospitalisation fréquemment confronté à des fins de vie mais dont l’activité n’est pas exclusivement consacrée aux soins palliatifs.

([60]) Cour des comptes, Les soins palliatifs, une offre de soins à renforcer, communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, juillet 2023.

([61]) Conseil économique, social et environnemental, rapport de la Convention citoyenne sur la fin de vie, avril 2023, p. 29.

([62]) Recommandation Rec (2003) 24 du comité des ministres aux États membres sur l’organisation des soins palliatifs, adoptée le 12 novembre 2003, p. 7.

([63]) 6° de l’article R. 871-2 du code de la sécurité sociale.

([64]) Amendement CS932.

([65]) Amendement CS1844.

([66]) Amendement CS1153.

([67]) Amendement CS762.

([68]) Amendement CS1984.

([69]) Loi n° 2024-317 du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie, article 11.

([70]) Amendement CS487.

([71]) Amendement CS1872.

([72]) Amendement CS1851.

([73]) En application de l’article L. 3142‑6 du code du travail, ce proche peut être un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou une personne partageant le même domicile, ou une personne ayant désigné le salarié comme personne de confiance.

([74]) Le cadre législatif applicable à ce congé est défini par la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail (articles L. 3142‑6 à L. 3142‑15).

([75]) Les règles d’indemnisation de ce congé sont précisées à l’article L. 161‑9‑3 du code de la sécurité sociale tandis que le chapitre 8 du titre VI du livre Ier du même code (articles L. 168‑1 à L. 168‑7) définit les règles applicables à l’Ajap.

([76]) https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F706

([77]) Principe à valeur constitutionnelle fondé sur la première phrase du Préambule de la Constitution de 1946.

([78]) Droit déduit par le Conseil constitutionnel depuis sa décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991.

([79]) Article R. 6123‑91‑1 du code de la santé publique.

([80]) Article L. 311-3 du code de l’action sociale et des familles.

([81]) Article L. 1111‑11 du code de la santé publique.

([82]) Pr. Franck Chauvin, op. cit., p. 19.

([83]) L’article L. 1111‑6 du code de la santé publique prévoit notamment que « si la personne majeure le souhaite, la personne de confiance l’accompagne dans ses démarches, assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions et l’aide à la connaissance et à la compréhension de ses droits si elle rencontre des difficultés ».

([84]) Amendement CS706.

([85]) Amendement CS732.

([86]) Amendement CS1330.

([87]) Amendement CS1329.

([88]) Amendement CS178.

([89]) Amendement CS181.

([90]) Amendement CS1140.

([91]) Amendements CS578, CS909 et CS989.

([92]) Décision n° 2022-1022 QPC du 10 novembre 2022.

([93]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023.

([94]) Voir articles L. 1111‑13 et suivants du code de santé publique.

([95]) Article L. 1111‑15 du code de la santé publique.

([96]) Étude d’impact, p. 66.

([97]) Ibid., p. 70.

([98]) Articles R. 1111‑19 et R. 1111‑42 du code de la santé publique.

([99]) Amendement CS1849.

([100]) Amendement CS1407.

([101]) Amendement CS993 et sous-amendement CS1990.

([102]) Amendements CS1065 et CS1912.

([103]) Amendements CS930, CS1113 et CS1211.

([104]) Amendement CS1328.

([105]) Amendement CS1952.

([106]) Amendement CS1968.

([107]) Amendement CS10.

([108]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023.

([109]) Conseil d’État, avis du 4 avril 2024, point 49.

([110]) Amendement CS1953.

([111]) Article L. 1110-2 du code de la santé publique.

([112]) Article L. 1111-4 du code de la santé publique.

([113]) Article L. 1111-6 du code de la santé publique. Depuis la loi Claeys-Leonetti, la personne de confiance émet non plus un « avis » mais un « témoignage » : elle doit exprimer la volonté du malade.

([114]) Article L. 1110‑5 du même code.

([115]) Article L. 1110-5-2 du même code.

([116]) Étude d’impact, p. 77.

([117]) HAS, Guide du parcours de soins – Comment mettre en œuvre une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès, 2018.

([118]) Article L. 1111‑4 du code de la santé publique.

([119]) Assemblée nationale, commission des affaires sociales, rapport (n° 1021) en conclusion des travaux de la mission d’évaluation de la loi n° 2016‑87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (M. Olivier Falorni, président ; Mme Caroline Fiat et M. Didier Martin, rapporteurs), 29 mars 2023, p. 89.

([120]) Décisions n° 94-343-344 DC du 27 juillet 1994 et n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010.

([121]) Rapport n° 1021 de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale précité.

([122]) CCNE, avis n° 139, Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité, 13 septembre 2022, p. 4.

([123]) Ibid., p. 23.

([124]) Guirimand, F., Dubois, E., Laporte, L. et al. Death wishes and explicit requests for euthanasia in a palliative care hospital: an analysis of patients files. BMC Palliat Care 13, 53 (2014).

([125]) CCNE, op. cit., p. 24.

([126]) Ibid., p. 25.

([127]) Ibid., p. 25.

([128]) CESE, Avis, « Fin de vie : faire évoluer la loi ? », mai 2023.

([129]) Rapport de la Convention citoyenne sur la fin de vie, avril 2023. Composée de 184 citoyens tirés au sort, la Convention avait pour mission de répondre à la question suivante : le cadre d’accompagnement de la fin de vie est-il adapté aux différentes situations rencontrées ou d’éventuels changements devraient-ils être introduits ?

([130]) Article L. 1110‑5 du code de la santé publique.

([131]) Conseil d’État, op. cit., point 49.

([132]) Entretien de M. Emmanuel Macron accordé à Libération et La Croix, éditions du 10 mars 2024.

([133]) Conseil d’État, op. cit., point 21.

([134]) Ibid.

([135]) Selon l’Académie française, l’euthanasie (du grec euthanasia, « mort douce et facile ») correspond à une « action destinée à donner la mort à un malade incurable qui demande ou a demandé que l’on abrège ses souffrances ou sa déchéance physiologique ». À noter que la demande de mourir n’apparaît pas nécessairement dans la définition de l’euthanasie. Ainsi, selon le Larousse, il s’agit de l’« acte d’un médecin qui provoque la mort d’un malade incurable pour abréger ses souffrances ou son agonie, illégal dans la plupart des pays ».

([136]) Étude d’impact, pp. 90-91.

([137]) Ibid., p. 93.

([138]) « Le fait de donner volontairement la mort à autrui constitue un meurtre. Il est puni de trente ans de réclusion criminelle. »

([139]) Voir respectivement les articles R. 4127‑38 du code de la santé publique pour les médecins et R. 4312‑21 du même code pour les infirmiers.

([140]) Conseil d’État, op. cit., point 39.

([141]) Op. cit., point 11.

([142]) L’émancipation est l’acte par lequel un mineur est juridiquement assimilé à un majeur et peut accomplir seul les actes nécessitant la majorité légale. Un mineur émancipé n’est plus sous l’autorité de ses parents et a la capacité juridique. Voir les articles 413-1 et suivants du code civil.

([143]) Étude d’impact, p. 91.

([144]) La sécurité sociale « assure, pour toute personne travaillant ou résidant en France de façon stable et régulière, la couverture des charges de maladie, de maternité et de paternité ainsi que des charges de famille et d’autonomie ».

([145]) Étude d’impact, p. 94. En l’absence d’autres précisions, on peut rappeler que, s’agissant par exemple de la protection universelle maladie (Puma), qui garantit à toute personne travaillant ou résidant en France de manière stable et régulière un droit à la prise en charge de ses frais de santé, la régularité de la situation est vérifiée à partir de la présentation d’une pièce d’identité, d’un passeport ou, s’agissant des ressortissants d’un pays n’appartenant pas à l’Espace économique européen et autre que la Suisse, un titre de séjour et un acte d’état civil. La condition de stabilité implique de résider en France depuis au moins trois mois puis au moins six mois par an. Elle peut être attestée par un bail de location datant de plus de trois mois, par trois quittances de loyer successives, par des factures successives d’électricité, de gaz, de téléphone, etc.

([146]) Étude d’impact, p. 91.

([147]) Ibid., pp. 94-95.

([148]) Étude d’impact., p. 91.

([149]) Conseil d’État, op. cit., point 23.

([150]) Contribution écrite adressée à la commission spéciale.

([151]) Conseil d’État, op. cit., point 24.

([152]) HAS, op. cit., p. 11.

([153]) Entretien à Libération et La Croix, éditions du 10 mars 2024.

([154]) Étude d’impact, p. 95.

([155]) Article L. 1111‑4 du code de la santé publique.

([156]) Depuis 1997, la Cour suprême des États-Unis considère que les États sont libres de légiférer localement sur le suicide assisté. À ce jour, onze États autorisent le suicide assisté, soit légalement, soit par jurisprudence.

([157]) C’est l’Académie suisse des sciences médicales qui fixe les conditions médico-éthiques de l’assistance au suicide.

([158]) Amendements CS1954 et CS1961. Voir le commentaire de l’article 4 quater.

([159]) Amendement CS934.

([160]) Amendement CS1928.

([161]) Sous-amendement CS2023.

([162]) Sous-amendement CS2018.

([163]) Amendement CS647.

([164]) Amendements CS659 et CS1558.

([165]) Amendement CS2025.

([166]) Décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017, Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés.

([167]) CEDH, 20 janvier 2011, n° 31322/07, Haas c. Suisse, § 54.

([168]) CEDH, 20 janvier 2011, n° 31322/07, Haas c. Suisse, § 54.

([169]) Article 459 du code civil.

([170]) Article R. 4127-37-2 du code de la santé publique.

([171]) Amendement CS2003.

([172]) Amendement CS1105.

([173]) Amendement CS1998.

([174]) Amendement CS1143.

([175]) Amendement CS1999.

([176]) Article R. 4127-37-2 du code de la santé publique.

([177]) Décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017.

([178]) Amendement CS2004.

([179]) Amendement CS2000.

([180]) Amendement CS2001.

([181]) Amendement CS2017.

([182]) Amendement CS2015.

([183]) Amendement CS2014.

([184]) Amendement CS790.

([185]) Amendement CS2016.

([186]) Amendement CS1082.

([187]) Amendement CS1278.

([188]) Amendement CS1519.

([189]) Amendement CS2005.

([190]) Amendement CS1778.

([191]) Amendement CS2006.

([192]) Amendement CS329.

([193]) Amendement CS1525.

([194]) Amendement CS1706.

([195]) Amendement CS2028.

([196]) Amendement CS2007.

([197]) Amendement CS680.

([198]) Amendement CS977.

([199]) Amendement CS2029.

([200]) Amendement CS1318.

([201]) Amendement CS1316.

([202]) Conseil d’État, op. cit., point n° 26.

([203]) Amendement CS2008.

([204])Amendement CS803.

([205]) Conseil d’État, 26 octobre 2011, Association pour la Promotion de l’Image, n° 317827.

([206]) Amendement CS2009.

([207]) Décision n° 2012‑268 QPC du 27 juillet 2012, Mme Annie M., cons. n° 4 ; décision n° 2012‑243/244/245/246 QPC du 14 mai 2012, Société YONNE REPUBLICAINE et autre, cons. n° 11.

([208]) Décisions n° 2011‑138 QPC du 17 juin 2011, Association Vivraviry, et n° 2012‑288 QPC du 17 janvier 2013, Consorts M..

([209])  CE, 6 décembre 2017, Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés (UNAFTC), n° 403944.

([210])  Conseil constitutionnel, décision n° 86‑224 DC du 23 janvier 1987, cons. n° 15 et 16.

([211]) Conseil constitutionnel, décisions n° 89-261 DC du 28 juillet 1989, cons. n° 19 et 20, et n° 2010‑71 QPC du 26 novembre 2010, cons. n° 36.

([212]) Avis n° 408204 du Conseil d’État, p. 14.

([213]) Cass Ass. plén., 28 juin 2019.

([214]) Conseil d’État, op. cit, p. 37.

([215]) Amendement CS2010

([216]) Conseil constitutionnel, décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017, § 6, 7 et 8 ; décision n° 2022‑1022 QPC du 10 novembre 2022, § 6, 7 et 8.

([217]) Décision n° 2017‑632 QPC du 2 juin 2017.

([218]) Amendement CS2011.

([219]) Décision n° 77-87 DC du 23 novembre 1977 sur la loi relative à la liberté d’enseignement, point n° 5 : « Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 "Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi" ; que le Préambule de la Constitution de 1946 rappelle que "Nul ne peut être lésé dans son travail ou son emploi en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances" ; que la liberté de conscience doit donc être regardée comme l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ».

([220]) Décision n° 2013-353 QPC du 18 octobre 2013, M. Franck M. et autres, point n° 7.

([221]) Décision n° 2001‑446 DC du 27 juin 2001 sur la loi relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception, point n° 15.

([222]) CEDH, R. R c. Pologne, n° 27617/04, 26 mai 2011, point n° 206.

([223]) CEDH, Pichon et Sajous c. France, n° 49853/99, 2 octobre 2001.

([224]) Article. R. 4127‑47 du code de la santé publique.

([225]) L’article 4 de la loi dite « Veil »  7517 du 17 janvier 1975 dispose par exemple qu’un « établissement d’hospitalisation privé peut refuser que des interruptions volontaires de grossesse soient pratiquées dans ses locaux ».

([226]) Article L. 2212-8 du code de la santé publique.

([227]) Article L. 2123-1 du code de la santé publique.

([228]) Article L. 2151-7-7 du code de la santé publique.

([229]) Article 223-6 du code pénal.

([230]) Conseil d’État, avis sur un projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, n° 408204, 4 avril 2024, point n° 38.

([231]) Article R. 4235‑61 du code de la santé publique : « Lorsque l’intérêt de la santé du patient lui paraît l’exiger, le pharmacien doit refuser de dispenser un médicament. Si ce médicament est prescrit sur une ordonnance, le pharmacien doit informer immédiatement le prescripteur de son refus et le mentionner sur l’ordonnance. »

([232]) Cass. crim., 21 octobre 1998, JCP 1998 II, n° 10163.

([233]) Op. cit., point n° 48 : « ’il convient d’en [le registre] limiter l’accès aux médecins, seuls chargés d’examiner la demande d’aide à mourir et d’accompagner la personne ou de convenir avec elle d’un infirmier ou d’un autre médecin disposé à l’accompagner ».

([234]) La consultation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés résultant des dispositions du paragraphe 4 de l’article 36 du Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (RGPD).

([235]) Amendements CS1828 et CS1868.

([236]) Amendement CS1715.

([237]) Amendement CS1985.

([238]) Article L. 1110-5-1 du code de la santé publique.

([239]) Article L. 1110-5-2 du même code.

([240]) Décision n° 2017-632 QPC du 2 juin 2017.

([241]) CEDH, Mortier c. Belgique, requête n° 78017/17, 4 octobre 2022.

([242]) Articles 2 et 8 de la CSDH.

([243]) Aux termes duquel « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatif ».

([244]) Amendement CS1973.

([245]) Amendement CS1853.

([246]) Conseil d’État, avis sur un projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, n° 408204, 4 avril 2024, point n° 47.

([247]) Amendement CS697.

([248]) Amendement CS1986.

([249]) Article L. 4211-1 du code de la santé publique.

([250]) Article L. 5111-1 du code de la santé publique.

([251]) Article 221-5 du code pénal.

([252]) Directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.

([253]) Voir le commentaire sous l’article 10 du présent projet de loi.

([254]) La pharmacie d’officine est définie à l’article L. 5125-1 du code de santé publique comme « l’établissement affecté, d’une part, à la dispensation au détail des médicaments, produits et objets mentionnés aux articles L. 42111 et L. 512524 et, dans les conditions définies par décret, de médicaments expérimentaux ou auxiliaires ainsi qu’à l’exécution des préparations magistrales ou officinales et, d’autre part, au conseil pharmaceutique et à l’exercice des missions prévues à l’article L. 5125-1-1 A ».

([255]) Les pharmacies à usage intérieur sont définies à l’article L. 5126-1 du code de santé de publique comme celles qui « répondent aux besoins pharmaceutiques des personnes prises en charge par l’établissement, service ou organisme dont elles relèvent, ou au sein d’un groupement hospitalier de territoire ou d’un groupement de coopération sanitaire dans lequel elles ont été constituées ».

([256]) Créée par la loi n° 2004‑810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, la HAS est une autorité publique indépendante à caractère scientifique.

([257]) Créée par la loi n° 93-5 du 4 janvier 1993 relative à la sécurité en matière de transfusion sanguine et de médicament, elle est un établissement public administratif et l’une des agences françaises de sécurité sanitaire.

([258]) Article L. 161-40-1 du code de la santé publique.

([259]) Articles R. 5125-45 et suivants du code de la santé publique.

([260]) Amendement CS1975.

([261]) Amendement CS1980 (rect).

([262]) Décision n° 2017‑747 DC du 16 mars 2017, Loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, points n° 14 et 15.

([263]) Étude d’impact, p. 155.

([264]) France Assureurs, L’assurance prévoyance en 2022.

([265]) Centre technique des institutions de prévoyance, Cahier statistique des institutions de prévoyance. Données chiffrées 2022.

([266]) « Le Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. Les ordonnances sont prises en conseil des ministres après avis du Conseil d’État. »

([267]) « Dans les collectivités d’outre-mer visées à l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, le Gouvernement peut, par ordonnances, dans les matières qui demeurent de la compétence de l’État, étendre, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou adapter les dispositions de nature législative en vigueur à l’organisation particulière de la collectivité concernée, sous réserve que la loi n’ait pas expressément exclu, pour les dispositions en cause, le recours à cette procédure. »