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N° 2645

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 mai 2024.

 

 

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales,

 

 

 

Par M. Édouard BÉNARD,

Député.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro : 2518.

 

 

 


– 1 –

 

SOMMAIRE

___

Pages

avant-propos

I. LES FAMILLES MONOPARENTALES, UN PUBLIC nombreux et fragile NéCESSITANT DES POLITIQUES PUBLIQUES SPéCIFIQUES

A. LA MONOPARENTALITé EST UN PHéNOMène de plus en plus répandu en france

1. Les familles monoparentales représentent désormais un quart des familles françaises

2. La proportion de familles monoparentales est plus élevée outre-mer

B. Les familles monoparentales sont soumises à des conditions de vie plus précaires

1. Les parents isolés sont davantage confrontés à la pauvreté

2. Les familles monoparentales vivent plus souvent dans des logements inadaptés à leurs besoins

C. Des familles très majoritairement dirigées par des femmes, ce qui renforce les inégalités de genre

II. VERS UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DES DéFIS RENCONTRéS PAR LES FAMILLES MONOPARENTALES

A. Des progrès sur la visibilité des familles monoparentales dans les politiques familiales

1. La naissance des politiques familiales et de prestations sociales dédiées aux familles monoparentales

2. La prise en compte de la monoparentalité dans les dispositifs socio-fiscaux

B. Des évolutions récentes en faveur DES MéNAGES MODESTES

C. Des progrès largement en deçà des enjeux

1. Un non-recours encore massif

2. Des dispositifs socio-fiscaux inadaptés aux familles monoparentales

3. Une absence de prise en compte des « mères solo » dans les règles relatives au congé maternité

Commentaire des articles

Article 1er Allonger la durée du congé de maternité pour les femmes en situation de monoparentalité

Article 2 Permettre aux familles monoparentales de percevoir les allocations familiales dès le premier enfant

Article 3 Déduire l’allocation de soutien familial et la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants des ressources prises en compte pour le calcul de l’aide personnalisée au logement

Article 4 Gage financier

Travaux de la commission

ANNEXE N°1 : Liste des personnes entendues par lE rapporteur

Annexe n° 2 : textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi

 

 

 

 


– 1 –

   avant-propos

Mesdames, Messieurs,

Le 5 avril dernier, s’est tenu dans l’hémicycle, à la demande des membres du groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR), un débat sur « la place, dans la société et dans le droit, des familles monoparentales » ([1]).

C’est dans le même esprit que, le 8 mars dernier, la présente proposition de loi visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales a été déposée par votre rapporteur et les membres de ce même groupe.

À travers ce texte, ils souhaitent formuler trois premières propositions pour répondre de manière immédiate à l’urgence sociale et monétaire dans laquelle se trouvent les familles monoparentales. En effet, il est bien documenté qu’elles sont particulièrement vulnérables et largement sur-affectées par une précarisation à l’œuvre dans l’ensemble de notre société.

Cette proposition de loi a ainsi vocation à poser une première pierre pour améliorer les conditions de vie des nombreuses familles monoparentales – des mères isolées et de leurs enfants en particulier – qui connaissent aujourd’hui des difficultés considérables pour subvenir à leurs besoins quotidiens.

Elle fournit également l’opportunité de mettre en exergue les carences de nos politiques publiques à destination de l’ensemble des familles. Répondre à l’urgence sociale et monétaire qu’elles ressentent doit, en effet, nous encourager à entamer un débat sur la nécessité de renforcer et de mieux orienter nos politiques publiques. Elles doivent être mises en phase avec les évolutions de la société, sans négliger les inégalités professionnelles et les insuffisances en matière de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle qui persistent, voire s’amplifient, dans le monde du travail. Il sera nécessaire, plus tard, d’aller plus loin et de définir un véritable statut de parent isolé.


I.   LES FAMILLES MONOPARENTALES, UN PUBLIC nombreux et fragile NéCESSITANT DES POLITIQUES PUBLIQUES SPéCIFIQUES

A.   LA MONOPARENTALITé EST UN PHéNOMène de plus en plus répandu en france

1.   Les familles monoparentales représentent désormais un quart des familles françaises

Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), « une famille est la partie d’un ménage comprenant au moins deux personnes et constituée :

«  soit d’un couple vivant au sein du ménage, avec le cas échéant son ou ses enfant(s) appartenant au même ménage ;

«  soit d’un adulte avec son ou ses enfant(s) appartenant au même ménage (famille monoparentale). »

Une famille monoparentale comprend ainsi un parent isolé ainsi qu’un ou plusieurs enfants. Selon le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), « un parent est isolé s’il vit sans conjoint dans le logement » ([2]), mais il peut être en couple avec une personne qui n’habite pas dans le logement. Un parent isolé peut donc être un individu célibataire, divorcé ou séparé, qui vit seul avec un ou plusieurs enfants à charge.

Les familles en situation de monoparentalité représentent une part de plus en plus considérable des familles françaises. En effet, alors qu’elles représentaient 10 % des familles en 1970, cette proportion s’élevait à 24,7 % en 2020. Cette progression s’observe depuis les années 1970, avec une forte accélération dans les années 1990 ([3]). De ce fait, la part des enfants mineurs vivant en famille monoparentale a doublé entre 1990 et 2018, passant de 1,5 à 3 millions d’enfants ([4]).

L’accroissement du nombre de familles monoparentales est principalement dû au développement de la monoparentalité « choisie » découlant d’une séparation consentie, prenant le plus souvent la forme du divorce par consentement mutuel ([5]). Tandis que le veuvage était précédemment la principale cause des familles monoparentales, c’est désormais la séparation des parents qui est l’explication la plus fréquente puisqu’elle est à l’origine de 79 % des situations de monoparentalité ([6]). Les naissances hors couple sont le deuxième motif le plus courant (15 % du total). Les décès constituent un facteur minoritaire puisque, en 2011, seuls 6 % des parents isolés étaient veufs ([7]).

2.   La proportion de familles monoparentales est plus élevée outre-mer

Les territoires ultramarins se caractérisent par un taux de familles monoparentales plus élevé que la moyenne nationale. Les configurations familiales varient cependant significativement. À La Réunion, 32,4 % des familles sont monoparentales ([8]). En Guyane et dans les Antilles, les familles monoparentales représentent 40 % des familles et un enfant sur deux vit dans une famille monoparentale, soit pratiquement le double de ce qui est observé dans les autres départements ([9]).

Proportion des familles monoparentales et d’enfants vivant au sein d’une famille monoparentale

Source : Panorama des familles d’aujourd’hui, HCFEA, 2021.

Par ailleurs, la part d’enfants ayant vécu entre leur naissance et leurs dix ans dans une famille monoparentale est supérieure à la moyenne nationale dans les Antilles et en Guyane. Cela peut s’expliquer par le fait que les familles monoparentales y sont principalement dues aux naissances hors union. Ainsi, 36 % des parents isolés à La Réunion déclarent n’avoir jamais habité avec le parent non-gardien ([10]).

B.   Les familles monoparentales sont soumises à des conditions de vie plus précaires

1.   Les parents isolés sont davantage confrontés à la pauvreté

Les familles monoparentales ont des conditions de vie en moyenne plus précaires. Elles représentent 25 % des 10 % les moins favorisés, et 45 % des 20 % les plus modestes. Elles sont en conséquence moins représentées dans les déciles plus élevés ([11]).

En outre, les familles en situation de monoparentalité sont davantage exposées à la grande pauvreté, définie comme le fait de cumuler un niveau de vie inférieur à 50 % du niveau de vie médian et une situation de privation matérielle et sociale sévère ([12]). Cette plus grande exposition à la pauvreté se comprend aisément puisque les familles monoparentales dépendent d’un salaire unique. En outre, les parents isolés sont plus souvent confrontés au chômage et ils sont en moyenne moins qualifiés que les parents en couple.

Les parents isolés ont plus de difficultés à combiner vie professionnelle et impératifs familiaux, notamment par manque de solution de garde adaptée aux types d’emplois occupés. Ils sont également davantage confrontés au temps partiel subi, diminuant à la fois leurs ressources disponibles et la possibilité d’accéder à des places en crèches, lesquelles donnent la priorité aux familles confiant leur enfant sur l’entièreté de la semaine.

Au-delà de ces données objectives, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques des ministères sociaux (Drees) met en exergue la vision sombre que les familles monoparentales ont de leur situation ([13]). Alors que 85 % des parents en couple estiment leur situation bonne, cette proportion n’est que de 62 % pour les parents isolés.

En outre, lors des auditions conduites par votre rapporteur, de nombreux acteurs ont souligné, à l’image de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), que la pauvreté des familles monoparentales était sans doute largement sousestimée, le coût d’un enfant variant en réalité selon le temps passé au logement de ses parents. Ainsi, pour les familles qui ont la garde principale ou exclusive de leurs enfants, le coût lié à l’enfant est plus important. Selon la Drees, le surcoût associé à cette configuration serait équivalent à 0,5 unité de consommation ([14]). La Drees recommande ainsi, de même que le Sénat ([15]), de prendre en compte la situation spécifique des familles monoparentales dans le calcul de la pauvreté pour saisir pleinement le coût supplémentaire lié à l’enfant et à la situation d’isolement. Votre rapporteur ne peut que souscrire à cette préconisation.

2.   Les familles monoparentales vivent plus souvent dans des logements inadaptés à leurs besoins

Les enfants des familles monoparentales habitent plus fréquemment dans des logements surpeuplés : 24 % d’entre eux sont concernés contre 10 % dans les familles dites traditionnelles ([16]). Ce phénomène est évidemment en lien avec la plus grande précarité des familles monoparentales. Il résulte également d’une plus grande concentration dans les centres urbains et les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ces derniers comptent en effet plus de logements sociaux, dans lesquels les familles monoparentales sont surreprésentées.

Par ailleurs, les parents isolés sont moins souvent propriétaires de leur logement que les parents en couple : tel est le cas de 65,9 % des familles traditionnelles, mais de seulement 28,9 % des familles monoparentales ([17]).

Enfin, les familles monoparentales consacrent en moyenne une part plus élevée de leurs ressources pour se loger. Le taux d’effort des mères isolées pour disposer d’un logement était de 31 % en 2013 contre 18 % pour les parents en couple. Les mères isolées sont également plus exposées aux impayés de loyers : elles constituaient 40 % des ménages en impayé en 2013 ([18]).

C.   Des familles très majoritairement dirigées par des femmes, ce qui renforce les inégalités de genre

Les familles monoparentales sont, dans la grande majorité des cas, dirigées par la mère. Les femmes représentaient 83 % des parents isolés en 2018, tandis que 84,4 % des enfants mineurs vivant en famille monoparentale habitaient avec leur mère ([19]).

Part des familles mère-enfant au sein des familles monoparentales

Source : Panorama des familles d’aujourd’hui, HCFEA, 2021.

Les études montrent en outre que les mères isolées sont souvent dans une situation plus précaire que les pères isolés. Ainsi, 45 % d’entre elles sont des employées et seulement une mère isolée sur dix est cadre, alors que 18 % des pères isolés sont cadres et 32 % sont ouvriers ([20]).

De manière générale, les parents vivant en couple avec leurs enfants sont plus diplômés que les parents isolés. Ce phénomène est encore plus marqué chez les mères isolées : seules 35 % d’entre elles détiennent un diplôme supérieur au baccalauréat contre 52 % des femmes vivant en couple avec leurs enfants. Cet écart de formation est moins important chez les pères : 36 % des pères de familles monoparentales et 42 % des pères vivant en couple avec leurs enfants ont un diplôme d’études supérieures ([21]).

Le taux de pauvreté des familles monoparentales varie selon qu’elles sont composées d’un père isolé ou d’une mère isolée. Si le taux de pauvreté des enfants issus de familles monoparentales s’élève globalement à 41 %, il atteint 46 % pour les enfants vivant avec une mère isolée contre 22 % pour les enfants avec un père isolé. Les mères en situation de monoparentalité sont également deux fois plus souvent bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) que les pères isolés ([22]).

Les mères isolées sont aussi moins souvent en situation d’emploi en raison des contraintes liées à la garde d’enfants parfois difficilement compatibles avec l’organisation du travail. Elles tendent donc à privilégier des emplois dont les horaires changent ou pour lesquels il faut travailler en fin de semaine. Les contrats aidés occupés par des parents isolés le sont à 96,9 % par des femmes ([23]). De plus, les mères isolées sont plus souvent employées à temps partiel. Or, pour 40 % des mères isolées à temps partiel, celui-ci est subi, comme l’a souligné la direction générale de la cohésion sociale auditionnée par votre rapporteur.

Les différences observées entre pères et mères isolés portent également sur la durée de cette situation de monoparentalité. Celle-ci est en moyenne de 4,1 ans pour les hommes contre 6 ans pour les femmes ([24]). Comme l’a souligné la direction générale de la cohésion sociale lors de son audition par votre rapporteur, les pères isolés se trouvent souvent plus tard en situation de monoparentalité, lorsque leur carrière est déjà bien avancée et que les enfants sont plus âgées, de sorte que les problèmes de garde sont moindres.

II.   VERS UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DES DéFIS RENCONTRéS PAR LES FAMILLES MONOPARENTALES

A.   Des progrès sur la visibilité des familles monoparentales dans les politiques familiales

1.   La naissance des politiques familiales et de prestations sociales dédiées aux familles monoparentales

Les politiques familiales dédiées aux familles monoparentales sont apparues en France dans les années 1970, au moment où ce phénomène commençait à connaître une croissance importante. La création de l’allocation parent isolé (API) en 1976, ainsi que de l’allocation de soutien familial (ASF) en 1984, ont ainsi orienté certaines politiques publiques exclusivement à destination des parents isolés.

L’API permettait de garantir un revenu aux parents isolés. Elle a été remplacée par le revenu de solidarité active (RSA) en 2008.

L’ASF constitue une prestation importante pour les familles monoparentales. Elle s’adresse aux personnes qui supportent la charge d’un enfant sans l’aide d’un de ses parents, voire de ses deux parents. Elle est versée pour chaque enfant et vient en soutien des familles les plus modestes.

2.   La prise en compte de la monoparentalité dans les dispositifs socio-fiscaux

Outre ces prestations sociales dédiées, les familles monoparentales bénéficient d’aménagements dans les dispositifs socio-fiscaux.

Depuis 1996, les parents isolés assurant la garde à titre exclusif ou principal de leur enfant bénéficient d’une demi-part fiscale supplémentaire. Par ailleurs, le RSA et la prime d’activité font l’objet d’une bonification en cas de monoparentalité, quoique seulement pour une durée limitée s’agissant du RSA.

Le montant du complément de libre choix du mode de garde (CMG), qui apporte une aide établie en fonction des revenus aux parents faisant garder leur enfant de moins de 6 ans, est également majoré de 40 % en cas de monoparentalité.

D’autres aménagements sont prévus, comme la majoration de certains plafonds de ressources pour diverses prestations. Le tableau ci-après recense l’ensemble des dispositifs bénéficiant spécifiquement aux familles monoparentales, qu’il s’agisse de prestations dédiées ou d’une prise en compte de la monoparentalité dans les dispositifs socio-fiscaux.

Aménagements des prestations familiales et sociales en fonction de la situation d’isolement du parent

Source : Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales, rapport (n° 485) de Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, 28 mars 2024.

B.   Des évolutions récentes en faveur DES MéNAGES MODESTES

Afin de soutenir les ménages modestes dans un contexte d’inflation élevée, un certain nombre de prestations sociales et familiales ayant un effet direct sur les familles monoparentales ont été revalorisées en avril 2024. C’est le cas, notamment, du RSA et de la prime d’activité, mais aussi de l’ASF, du CMG et des allocations familiales.

Outre ces revalorisations, depuis le 1er janvier 2020, le CMG est versé à taux plein jusqu’à l’entrée en maternelle. Avant cette date, son montant était réduit dès lors que l’enfant atteignait l’âge de 3 ans. Dans le but de mieux prendre en compte les défis liés à la conciliation entre vie familiale et professionnelle, le CMG sera étendu aux enfants de familles monoparentales jusqu’à 12 ans et à partir du 1er septembre 2025. Il sera possible pour les parents d’enfants en garde alternée de bénéficier dès le 1er décembre 2023 du CMG « emploi direct », en employant directement une personne qui garde les enfants à domicile.

La création en 2017 de l’Agence de recouvrement des impayés de pension alimentaire (Aripa) a apporté une amélioration significative. L’agence a pour mission d’entamer des procédures de médiation entre les parents séparés et d’organiser les transferts de pensions entre parents. Lorsque le débiteur manque à ses obligations, l’Aripa lance une procédure de recouvrement de l’impayé et verse le manque à gagner dans le cadre de l’ASF au parent gardien. Ce dernier évite ainsi une perte de revenus.

Enfin, les caisses d’allocations familiales (Caf) ont lancé en 2021 un « parcours séparation » qui propose un accompagnement aux parents venant de se séparer pour favoriser leur accès aux droits et garantir le suivi des familles les plus fragiles. Selon la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), plus de 400 000 familles ont bénéficié de ce parcours chaque année. Par ailleurs, la convention d’objectifs et de gestion (COG) 2023‑2027 de la Cnaf fixe comme objectif de « lutter contre la pauvreté des familles monoparentales par un élargissement et une simplification de l’accès aux prestations et services de la branche ».

C.   Des progrès largement en deçà des enjeux

Au-delà des évolutions positives décrites, votre rapporteur souligne que les dispositifs existants restent très largement insuffisants pour pallier les difficultés rencontrées par les familles monoparentales. Ce constat rejoint celui exprimé par tous les interlocuteurs auditionnés dans le cadre de cette proposition de loi.

1.   Un non-recours encore massif

Le non-recours aux droits est un frein majeur pour certaines familles monoparentales qui ne bénéficient pas de l’ensemble des prestations qui leur sont destinées. Selon la Drees, 15 % des familles monoparentales se trouveraient dans ce cas ([25]). Le défaut d’information, mais surtout la complexité procédurale dont l’Igas a fait état lors de son audition, expliquent cette situation qui conduit à évincer certaines familles des prestations auxquelles elles pourraient prétendre.

Par ailleurs, le manque de lisibilité est un frein direct pour l’accès aux droits de ces familles. La mauvaise compréhension des allocations peut déboucher sur un trop-perçu découlant d’erreurs commises par les déclarants ou par les caisses. Certains ménages préfèrent donc ne pas solliciter les dispositifs en vigueur, de peur d’accumuler une « dette » vis-à-vis de l’institution.

De fait, 60 % des contrôles effectués par la Cnaf ont pour conséquence une adaptation des prestations fournies. Or, les familles monoparentales sont particulièrement concernées par les contrôles. Alors qu’elles représentent seulement 15 % des familles bénéficiaires, elles sont ciblées par 35 % des contrôles effectués par l’algorithme mis en place. Lors de son audition, le directeur général de la Caisse a néanmoins affirmé que les familles monoparentales ne seraient plus surreprésentées sur l’ensemble des contrôles effectués.

L’impact de l’inflation sur les familles monoparentales

Dans un contexte d’inflation élevée, les familles font partie des publics les plus exposés aux difficultés financières. Certaines associations, comme le Secours populaire, ont alerté sur la hausse du nombre de personnes ayant recours à des associations pour subvenir à leurs besoins quotidiens.

Le HCFEA ([26]) se fonde sur les observations des associations pour constater que les familles, en particulier les plus précaires, ont été davantage touchées par l’inflation. 42 % des adhérents du réseau de l’Union nationale des associations familiales (Unaf) estiment que les ménages les plus touchés sont des familles à revenus modestes ou qui bénéficient des prestations sociales. Les familles monoparentales sont citées comme l’un des publics les plus fragiles par le réseau de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (Unccas).

Le Secours populaire indique dans son rapport d’activité 2022 avoir accueilli un public composé à 28 % de mères isolées, lesquelles sont donc fortement représentées. La moitié des familles soutenues par le Secours populaire et le Secours catholique en 2022 sont des familles monoparentales.

2.   Des dispositifs socio-fiscaux inadaptés aux familles monoparentales

De nombreux interlocuteurs auditionnés par votre rapporteur ont souligné que les dispositifs socio-fiscaux ne permettaient pas de prendre correctement en compte la situation des familles monoparentales.

En particulier, le fait d’inclure les pensions alimentaires dans les ressources prises en compte pour le calcul des prestations sociales ne permet pas toujours aux familles monoparentales de bénéficier d’effets distributifs suffisants. En effet, la pension alimentaire est considérée comme un transfert de revenus entre ménages. Comme cela a été souligné par l’Inspection générale des affaires sociales et l’Inspection générale des finances lors des auditions menées par votre rapporteur, cela créée une inégalité vis-à-vis d’autres parents qui bénéficient de l’ASF, faute de pension. Lorsque l’ASF est du même montant que la pension alimentaire, il est plus avantageux pour les familles monoparentales, sur le plan fiscal, de toucher cette prestation.

Du fait de ces distorsions, le HCFEA conclut qu’une mère isolée ayant la garde de deux enfants et appartenant au premier décile des salaires touche 113 euros de plus par mois si elle bénéficie de l’ASF que si le parent non-gardien verse une pension ([27]). Si le parent isolé touche le RSA ainsi qu’une pension, le montant de celle-ci est alors déduit de la prestation, ce qui retire toute utilité au versement de la pension alimentaire.

3.   Une absence de prise en compte des « mères solo » dans les règles relatives au congé maternité

Votre rapporteur remarque une absence de prise en compte de la situation des mères « solo » s’agissant du congé maternité. La durée de celui-ci ne s’élève qu’à seize semaines en France pour les deux premiers enfants, quand d’autres pays européens comme la Croatie et la Pologne attribuent respectivement trente et vingt‑six semaines de congé ([28]). En outre, la France attribue désormais vingt‑cinq jours de congés aux pères dans le cadre du congé paternité. Par définition, les mères isolées ne peuvent pas bénéficier de ce congé conçu pour que les pères puissent soulager les mères lorsque les parents sont en couple, et pour prolonger le temps passé par les parents avec leur enfant nouveau-né. Les mères isolées sont généralement cantonnées au congé légal de seize semaines, notoirement insuffisant pour s’organiser avant la reprise du travail.

*

Au regard du constat dressé ci-avant, votre rapporteur estime nécessaire et urgent de modifier certains aspects de la politique familiale à destination des familles monoparentales. La présente proposition de loi s’inscrit dans cette ambition pour réduire la précarité des familles monoparentales en proposant des ajustements dans le calcul et l’attribution des prestations sociales et familiales.

Ainsi, l’article 1er permet aux femmes se trouvant en situation de monoparentalité de bénéficier d’un congé maternité de vingt‑six semaines de grossesse dès le premier enfant.

L’article 2 prévoit l’attribution des allocations familiales aux familles monoparentales dès le premier enfant. Les familles monoparentales étant plus souvent composées d’un seul enfant, cela permettrait à une grande partie d’entre elles de percevoir un revenu complémentaire.

Enfin, l’article 3 exclut les pensions alimentaires des ressources prises en compte pour l’attribution de l’aide personnalisée au logement.


   Commentaire des articles

Adopté avec modifications

Le présent article allonge la durée du congé maternité pour les femmes en situation de monoparentalité de seize à vingt‑six semaines dès le premier enfant.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur.

  1.   Le droit existant

L’article L. 1225‑17 du code du travail permet aux salariées de bénéficier d’un congé de maternité pendant une période qui commence six semaines avant la date présumée de l’accouchement (congé prénatal) et se termine dix semaines après (congé postnatal), soit seize semaines au total. Il s’agit d’un droit qui ne peut être refusé à la salariée. Le congé ne peut pas durer moins que huit semaines, dont six semaines après l’accouchement.

La durée du congé de maternité peut être adaptée en fonction du nombre d’enfants à naître et d’enfants à charge. Ainsi, la naissance de jumeaux ouvre droit à un congé d’une durée totale de trente‑quatre semaines, et quarante‑six semaines s’il s’agit de triplés ([29]).

L’article L. 1225‑19 du même code prévoit également que, lorsque la salariée ou le foyer assume la charge de deux enfants au moins, ou a mis au monde deux enfants nés viables, elle peut bénéficier d’un congé de maternité de vingt‑six semaines.

Dans une famille dite « traditionnelle », le père ou le conjoint de la mère de l’enfant, s’il est salarié, bénéficie par ailleurs d’un congé de paternité prévu à l’article L. 1225‑35. Le décret du 10 mai 2021 ([30]) en fixe la durée à vingt‑cinq jours calendaires pour la naissance d’un enfant et trente‑deux jours calendaires en cas de naissances multiples.

En revanche, les mères isolées ne bénéficient pas d’aménagements spécifiques alors qu’elles organisent seules le début de la vie de leur enfant.

  1.   Le droit proposé

L’article 1er de la présente proposition de loi insère dans le code du travail un article L. 1255‑19‑1 accordant aux femmes en situation de monoparentalité le bénéfice de l’adaptation prévue à l’article L. 1225‑19 du même code, afin de leur garantir l’accès à un congé de maternité de vingt‑six semaines dès le premier enfant.

Cette disposition rétablit une forme d’égalité avec les couples accueillant un enfant, lesquels peuvent également bénéficier du congé paternité, et de tenir compte du caractère particulièrement éprouvant d’une naissance et de premiers mois de vie supportés de manière isolée par la mère.

  1.   Les modifications apportées par la commission

L’article 1er a été adopté par la commission des affaires sociales avec une modification de nature rédactionnelle apportée à l’initiative du rapporteur. Celle-ci précise la notion de « femme seule », désormais décrite comme une femme « célibataire, divorcée ou séparée ».

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Adopté sans modification

Le présent article permet aux parents isolés, supportant leur charge parentale à titre exclusif ou principal, de percevoir les allocations familiales dès le premier enfant.

  1.   Le droit existant

L’article L. 521‑1 du code de la sécurité sociale prévoit l’attribution d’allocations familles à partir du deuxième enfant à charge. Les allocations familiales sont des prestations sociales reversées par les caisses d’allocations familiales. Leur montant varie en fonction du nombre d’enfants à charge et du revenu des familles. Elles sont composées d’un montant de base majoré lorsqu’une famille accueille un troisième enfant, en vertu de l’article L. 512‑3 du même code.

Les familles monoparentales peuvent bénéficier d’autres allocations dès le premier enfant, et notamment de l’allocation de soutien familial (ASF) prévue par l’article L. 523‑1 du code de la sécurité sociale. Celle-ci est versée lorsque l’autre parent ne participe plus à l’entretien de l’enfant depuis au moins un mois ou verse au parent gardien une pension alimentaire mensuelle inférieure à 195,85 euros.

Les allocations familiales sont cumulables avec les autres prestations familiales. Les familles monoparentales composées de deux enfants ou plus peuvent ainsi bénéficier de l’ASF et des allocations familiales. Les familles monoparentales sont néanmoins plus souvent composées d’un seul enfant ([31]). De ce fait, elles bénéficient relativement peu des allocations familiales.

  1.   Le droit proposé

L’article 2 de la présente proposition de loi modifie l’article L. 521‑1 du code de la sécurité sociale pour permettre le versement des allocations familiales « dès le premier enfant lorsque le parent en supporte la charge à titre exclusif ou principal ».

  1.   Les modifications apportées par la commission

L’article 2 a été adopté sans modification par la commission des affaires sociales.

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Adopté avec modifications

Le présent article déduit l’allocation de soutien familial et les pensions alimentaires des ressources prises en compte pour le calcul de l’aide personnalisée au logement.

La commission a adopté des modifications rédactionnelles et a par ailleurs notamment supprimé la référence à l’allocation de soutien familial, d’ores et déjà exclue des ressources considérées pour le calcul de l’aide personnalisée au logement.

  1.   Le droit existant

L’aide personnalisée au logement est une aide financière prévue à l’article L. 821‑1 du code de la construction et de l’habitation. Elle est attribuée sous conditions de ressources, l’ensemble des ressources du foyer étant prises en compte sur les douze derniers mois.

La pension alimentaire, définie à l’article 373‑2‑2 du code civil, est considérée comme un transfert de revenu entre le parent non-gardien et le parent gardien. Elle est comptabilisée dans le calcul des impôts et de certaines prestations sociales, comme l’aide personnalisée au logement (APL).

Les familles monoparentales sont pourtant davantage susceptibles de vivre dans un logement surpeuplé, notamment du fait de leur plus grande précarité. Selon l’Insee, si 14 % des enfants mineurs vivent dans un logement surpeuplé, ce taux atteint 24 % pour les enfants de famille monoparentale ([32]). Ce constat appelle à un calcul de l’aide personnalisée au logement permettant de mieux prendre en compte les difficultés de logement spécifiques rencontrées par ces familles.

  1.   Le droit proposé

L’article 3 de la présente proposition de loi édicte une règle de calcul de l’aide personnalisée au logement plus juste pour les familles monoparentales.

Il insère au sein du code de la construction et de l’habitation un nouvel article L. 822‑8‑1 disposant que la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, communément désignée comme la pension alimentaire, ainsi que l’allocation de soutien familial (ASF) ([33]) sont exclues des ressources prises en compte pour le calcul de l’aide personnalisée au logement.

  1.   Les modifications apportées par la commission

La commission des affaires sociales a adopté quatre amendements du rapporteur. Deux sont de nature rédactionnelle. Un troisième amendement vise à corriger une erreur de référence juridique tandis que le dernier procède à la rectification d’une erreur matérielle : le dispositif de l’article 3 prévoit d’exclure l’allocation de soutien familial des ressources prises en compte pour le calcul de l’aide personnalisée au logement ce qui est, en réalité, déjà le cas en l’état actuel du droit. La commission a donc supprimé cette disposition superfétatoire.

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Adopté sans modification

Le présent article prévoit la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs afin d’assurer la recevabilité financière de la présente proposition de loi.

La présente proposition de loi est de nature à accroître les charges publiques supportées par les organismes de sécurité sociale car elle prévoit l’allongement du congé maternité pour les mères isolées, ce qui suppose le versement d’indemnités. En outre, elle attribue les allocations familiales aux familles monoparentales dès le premier enfant et elle exclut les pensions alimentaires du calcul de l’aide personnalisée au logement, mesures également de nature à accroître le montant des prestations sociales versées.

L’article 4 de la présente proposition de loi compense ces charges pour les organismes de sécurité sociale et, le cas échéant, pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre 1er du livre III du code des impositions sur les biens et services.

 

 

 


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   Travaux de la commission

Lors de sa réunion du mercredi 22 mai 2024, la commission examine la proposition de loi visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales (n° 2518) (M. Édouard Bénard, rapporteur) ([34]).

M. Édouard Bénard, rapporteur. Je vous remercie de m’accueillir dans cette commission pour la défense d’un texte « pansement » qui est nécessaire et même primordial pour réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales. La présente proposition de loi est le fruit du cheminement de notre groupe qui, dès 2022, sous l’impulsion de Pierre Dharréville, a déposé un texte transpartisan visant à lutter contre la précarité de ces familles. Le 5 avril dernier, nous avons également été à l’initiative d’un riche débat en séance publique : il nous a permis de matérialiser nos interrogations et d’échanger en partant de ce qui nous semble l’angle d’approche le plus pertinent, à savoir la place des familles monoparentales dans la société et le droit.

Il nous a semblé important, en vue de formuler des propositions de progrès, de revenir sur l’existence sociale et juridique de ces familles. Ce qui ressort des travaux préparatoires, ce sont avant tout les limites de l’ensemble des politiques publiques familiales. Les familles monoparentales souffrent d’une insuffisante reconnaissance sociale et juridique qui exacerbe leur vulnérabilité. Elles sont, de plus, suraffectées par une précarisation à l’œuvre dans l’ensemble de notre société.

Les familles en situation de monoparentalité occupent une place de plus en plus considérable dans notre pays : alors qu’elles comptaient pour 10 % des familles en 1970, elles en représentent désormais le quart, soit plus de 2 millions, et le nombre d’enfants mineurs vivant avec un parent solo a doublé entre 1990 et 2018 – il est passé de 1,5 à 3 millions. Par ailleurs, les territoires ultramarins se caractérisent par un taux de familles monoparentales plus élevé que la moyenne nationale. À La Réunion, 32 % des familles sont concernées. En Guyane, le taux s’élève à 40 %. Un enfant sur deux y vit dans une famille monoparentale, soit le double de ce qu’on observe dans les autres départements. Ces chiffres soulignent la nécessité d’une adaptabilité de nos politiques publiques.

C’est en toute cohérence et fidèles à notre engagement ancien en la matière que nous présentons cette proposition de loi portant sur un sujet d’actualité qui, je le sais, mobilise nombre d’entre vous à travers pléthore d’initiatives. Je pense à ceux qui sont associés au groupe de travail transpartisan qui a vu le jour ou encore à la mission confiée par le Gouvernement à Xavier Iacovelli et Fanta Berete. Ce texte n’a pas pour but d’occulter ou de devancer les conclusions de ces initiatives salutaires, mais simplement à ouvrir le débat et à apporter un pansement, je l’ai dit, c’est-à-dire une première réponse aux préoccupations les plus urgentes des familles monoparentales, grâce à trois avancées sur lesquelles je reviendrai après avoir dressé un bref état des lieux, afin que vous puissiez juger par vous-mêmes à quel point une action du législateur est nécessaire et urgente.

Retenez ce chiffre : 41 % des enfants des familles monoparentales vivent en dessous du seuil de pauvreté. Ces familles dépendent généralement d’un seul revenu et sont souvent prises dans une spirale négative qui voit des paramètres tels que l’accès à l’emploi, aux modes de garde et au logement se renforcer mutuellement. Les parents-gardiens sont en moyenne moins qualifiés, ont moins accès à un emploi stable et à temps plein, parviennent moins facilement à faire garder leurs enfants et habitent plus fréquemment un logement surpeuplé et éloigné de leur travail. Le taux d’effort des mères isolées en matière de logement était de 31 % en 2013, contre 18 % pour les parents en couple. Comment pouvons-nous accepter une telle différence ?

Vous me direz que nous savons déjà tout cela. En réalité, nous ne connaissons que la partie immergée de l’iceberg, car les échelles d’équivalence utilisées pour mesurer la richesse des ménages sous-estiment la pauvreté des familles monoparentales. Toutes les personnes que j’ai auditionnées, notamment les membres de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), l’ont confirmé. La situation est donc encore pire que ce qu’on croit généralement.

Il faut également souligner à quel point les familles monoparentales sont le théâtre d’inégalités femmes-hommes. Le taux de pauvreté est de 46 % pour les enfants vivant avec une mère isolée, contre 22 % pour ceux vivant avec un père isolé. Par ailleurs, les mères en situation de monoparentalité sont deux fois plus souvent au revenu de solidarité active (RSA) que les pères isolés. Avec cette proposition de loi, c’est très largement aux mères isolées et à leurs enfants que nous voulons tendre la main.

Que font les pouvoirs publics ? Si la situation des familles monoparentales est aujourd’hui mieux prise en compte dans les politiques publiques qu’il y a vingt ans, la réponse n’est toujours pas à la hauteur de l’enjeu et de l’urgence de la situation. « Dans la difficulté, les caisses d’allocations familiales CAF (CAF) nous laissent tomber » : cette phrase est revenue à maintes reprises lors des auditions et elles insupportable pour nous, législateurs, car nous ne pouvons pas accepter que les politiques publiques que nous votons ne permettent pas de protéger les plus fragiles. Nous ne pouvons pas supporter qu’un quart des ménages, et demain la moitié, soit encore marginalisé par nos dispositifs sociaux et fiscaux.

Les insuffisances de l’État sont rendues évidentes par trois phénomènes distincts, dont le premier est le non-recours aux droits, massif, des parents isolés : il est estimé à 15 % par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), ce qui est bien la preuve que l’accompagnement est plus qu’insuffisant. Le défaut d’information, la complexité des procédures et le manque de lisibilité des dispositifs sont autant de facteurs qui expliquent ce non-recours extrêmement préjudiciable.

J’ouvre une parenthèse pour souligner un chiffre : les familles monoparentales sont ciblées par 35 % des contrôles effectués par les CAF alors qu’elles ne représentent que 15 % des bénéficiaires. Ce ciblage injustifié doit cesser : il dégrade directement la situation des familles monoparentales en les dissuadant d’avoir recours aux aides. Ces familles craignent de se tromper dans leurs déclarations du fait de la complexité des dispositifs et de faire l’objet d’un redressement de la CAF. Nous avons eu de nombreuses alertes à sujet.

La deuxième insuffisance que je tiens à mettre en lumière est que nos dispositifs sociaux et fiscaux sont profondément inadaptés aux familles monoparentales. Je pense en particulier à l’inclusion des pensions alimentaires dans les ressources prises en compte pour le calcul des prestations sociales, ce qui ne permet pas toujours aux familles monoparentales de bénéficier d’effets distributifs suffisants. La pension alimentaire étant considérée comme un transfert de revenus entre ménages, il est plus rentable pour une femme isolée de toucher l’allocation de soutien familial (ASF) que de bénéficier d’une pension alimentaire versée par le père. Nous devons nous saisir de cette situation profondément anormale.

La troisième carence, elle aussi coupable, est l’absence de prise en compte des mères solos dans les règles relatives au congé maternité. Comme vous le savez, la durée de ce congé ne s’élève qu’à seize semaines en France pour les deux premiers enfants et à vingt-six semaines à compter du troisième. Par ailleurs, si la France attribue désormais vingt-cinq jours de congé aux pères, par définition les mères isolées ne peuvent pas bénéficier de ce congé, conçu pour que les pères puissent soulager les mères et prolonger le temps passé avec l’enfant lorsque les parents sont en couple. De plus, les mères isolées sont généralement cantonnées au congé légal de seize semaines, car elles ont rarement plus de deux enfants. C’est manifestement injuste lorsqu’on connaît les difficultés auxquelles les mères isolées sont confrontées. Ce cumul d’inégalités constitue une injustice grave contre laquelle nous nous devons d’agir. Il faut modifier certains aspects de la politique familiale.

Nous nous y attelons avec cette proposition de loi. Son article 1er permettra aux femmes se trouvant en situation de monoparentalité de bénéficier d’un congé maternité de vingt-six semaines dès le premier enfant. Par l’article 2, nous attribuerons des allocations familiales dès le premier enfant à toutes les familles monoparentales. Enfin, l’article 3 exclura les pensions alimentaires des ressources prises en compte pour l’attribution de l’aide personnalisée au logement (APL).

Mes chers collègues, nous pouvons converger sur ces trois mesures, qui sont de justice sociale : je vous encourage à les voter. Bien entendu, quel que soit l’ADN politique de mon groupe, cette proposition de loi n’a aucune velléité révolutionnaire et nous ne prétendons pas tout résoudre avec ce texte. Nous pensons, en effet, qu’il faudra aller plus loin, en particulier par la mise en place d’un statut spécifique de parent isolé : ces femmes et ces hommes doivent pouvoir bénéficier d’une prise en compte globale de toutes les difficultés auxquelles ils font face. Lorsque les réalités professionnelles et personnelles sont entremêlées, il est nécessaire d’apporter une réponse claire et englobante. Cela nécessite un travail de fond que nous ne pouvons pas mener à l’occasion d’une proposition de loi, mais nous défendrons cette revendication dans le cadre des travaux conduits à l’Assemblée et au-dehors.

Nous nous interrogeons encore sur l’opportunité et la manière de créer un véritable statut pour la famille monoparentale, qui emporterait bien plus de conséquences. Je défendrai donc, après l’article 3, un amendement visant à ce que les pouvoirs publics engagent pleinement, dans toutes ses dimensions et rapidement, une réflexion à ce sujet.

Si beaucoup de questions demeurent, et demeureront, l’ambition de la proposition de loi que j’ai l’honneur de vous présenter est de permettre à chaque famille de notre pays de vivre dignement, peu importe sa composition. Y veiller, ce sera permettre à 3 millions d’enfants de mieux s’épanouir. Après tout, le dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 dispose que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». Chers collègues, je vous invite à tous voter cette proposition de loi, qui posera une première pierre très attendue par des millions de Françaises et de Français.

Mme la présidente Charlotte Parmentier-Lecocq. Nous en venons aux autres orateurs.

Mme Fanta Berete (RE). Depuis vingt ans, je suis à la tête d’une famille monoparentale. De ce mode de faire famille je tiens mon adaptation, ma grande résilience, ma compétence organisationnelle, y compris dans des situations acrobatiques, et une persévérance sacrément prononcée. Comme 25 % des familles françaises, j’ai développé des compétences tout‑terrain, car la réalité quotidienne est complexe. Elle peut également être très difficile – précarité, mal-logement, isolement –, car elle reflète les inégalités économiques et sociales. Je rappelle, en particulier, que 82 % des parents solos sont des femmes.

Je me suis engagée, depuis le début de mon mandat, à les soutenir. Le Gouvernement fait de même, par des actions fortes comme le doublement de l’ASF, la création de l’Agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires ou l’extension du complément de libre choix du mode de garde (CMG). Le Gouvernement s’est aussi engagé en me confiant, avec le sénateur Xavier Iacovelli, une mission qui rendra ses conclusions en juillet.

Cher Édouard Bénard, merci : je me réjouis que les familles monoparentales inspirent les parlementaires. La période est propice aux initiatives, qu’il s’agisse de ma proposition de loi sur le statut et la carte « parent solo », du rapport de Colombe Brossel et de Béatrice Gosselin ou des travaux transpartisans conduits par Philippe Brun et Sarah Legrain. Je partage votre constat et votre préoccupation. Si l’identification des besoins est très pertinente, les travaux que je mène actuellement me poussent à faire quelques remarques au sujet de l’article 1er de votre proposition de loi, qui tend à caler la durée du congé maternité sur celle prévue pour les femmes attendant un troisième enfant, soit vingt-six semaines. La durée du congé maternité est aujourd’hui de seize semaines, ou dix-neuf et demie si l’on ajoute le congé du second parent. Votre objectif, qui est de rétablir l’égalité de traitement avec les familles en couple, n’est donc pas rempli. Par ailleurs, allonger ce congé est certes une piste à envisager, mais cela pourrait être contre-productif lorsqu’on est déjà en situation de précarité : le code du travail, vous le savez, ne prévoit aucune indemnisation en la matière – cela relève surtout des conventions collectives nationales.

S’agissant de l’article 2, l’allocation à laquelle vous faites référence existe bien dans les territoires d’outre-mer, mais son montant est symbolique, puisqu’il s’élève à 24,71 euros, pour toutes les familles. Nous étudions l’impact d’une telle mesure dans le cadre de la mission en cours.

Pour ces raisons et compte tenu du coût de cette proposition de loi, estimé à 1 milliard d’euros, le groupe Renaissance s’abstiendra.

M. Victor Catteau (RN). Aider les parents isolés, c’est garantir à chaque enfant les mêmes chances de réussite, indépendamment de la structure familiale, et c’est permettre aux 25 % de familles monoparentales de vivre dignement. Les parents isolés, en majorité des mères, sont particulièrement précaires : 34,5 % des familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté. Les difficultés, déjà nombreuses pour bien des foyers français, sont décuplées et vécues plus douloureusement encore par les parents isolés – perte de revenus lorsque la monoparentalité est subie, impossibilité de trouver un emploi adapté aux contraintes du foyer, difficulté d’accès au logement, impossibilité de faire garder son enfant, gestion du quotidien chaotique, santé physique et mentale dégradée. Cela signifie, pour ces familles, avoir le sentiment permanent que rien ne sera facile, accepter la galère comme seul mode de vie possible. Il nous est évidemment insupportable, en tant que législateurs, de voir que ces familles, de plus en plus nombreuses, se sentent en marge de la société et les parents invisibilisés.

De telles situations étant spécifiques, la réponse législative doit l’être aussi, grâce à un cadre favorable permettant à ces familles de vivre dignement et à tous les enfants de notre pays de connaître un développement serein. C’est pourquoi nous sommes évidemment pour le versement des allocations familiales dès le premier enfant et pour l’exclusion de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant et de l’ASF du calcul des APL, mais nous pensons qu’il est possible d’aller plus loin encore, notamment en défiscalisant la pension alimentaire, en augmentant le plafond du crédit d’impôt pour garde d’enfant et en accordant prioritairement des places en crèche.

Mme Sarah Legrain (LFI - NUPES). Nous sommes réunis pour débattre d’un texte visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales, qui représentent, rappelons-le, un quart des familles de ce pays et qui subissent une très forte précarisation. Le texte répond à plusieurs de leurs revendications : prolongation du congé maternité, versement des allocations familiales dès le premier enfant et exclusion de la pension alimentaire des ressources prises en compte pour le calcul des APL.

Six mois après la niche de La France insoumise qui a permis d’aborder ce sujet en proposant de déconjugaliser l’ASF, c’est grâce à nos collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine que le sort des mères isolées est de nouveau inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée. Nous arrivons à l’heure de vérité : si le Gouvernement, le Premier ministre Attal et le Président Macron lui-même aiment beaucoup parler des mères isolées, c’est pour l’instant grâce à l’opposition que des mesures d’urgence réclamées par tous les collectifs de familles monoparentales sont mises à l’ordre du jour. Lorsque le MoDem a déposé une proposition de loi visant à défiscaliser les pensions alimentaires, le Gouvernement s’y est opposé et les députés Renaissance ont tout bonnement détricoté le texte.

Pour que l’heure de vérité soit complète, je reviens sur les causes de la précarité contre laquelle la présente proposition de loi vise à lutter, comme un pansement, nous a dit le rapporteur. Les difficultés cumulées par les familles monoparentales ne tombent pas du ciel : elles découlent de politiques dont ces familles sont les premières victimes. Dans 82 % des cas, il s’agit de mères isolées : parce que ce sont des femmes, elles subissent les inégalités femmes-hommes au travail, occupent davantage de contrats à durée déterminée, de temps partiels subis, d’emplois mal rémunérés à horaires décalés. Et pourtant le Gouvernement détricote le code du travail, remet en cause les 35 heures et refuse toutes nos propositions de loi tendant à revaloriser les métiers féminisés, à augmenter le Smic, à indexer les salaires sur l’inflation ou à bloquer les prix alimentaires.

Parce que les mères isolées ne sont pas moins actives mais ont un risque de chômage plus élevé, elles galèrent à concilier recherche d’emploi et charge familiale. Le Gouvernement, avec sa réforme du RSA, impose néanmoins 15 heures d’activité et s’en prend de nouveau à l’assurance chômage en réduisant les indemnités, après avoir imposé une injuste réforme des retraites qui pénalise en premier lieu les carrières hachées des femmes. Ces carrières sont profondément liées au manque de solutions d’accueil des enfants, mais le Gouvernement continue de saper les services publics et de laisser le secteur privé faire du profit sur le dos des bébés. Face à la crise du recrutement de professionnels de la petite enfance, le Gouvernement préfère abaisser le taux d’encadrement, ce qui augmente les risques de maltraitance, plutôt que de revaloriser enfin substantiellement les salaires dans ce secteur. Parce qu’elles ont au mieux un seul salaire pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants, les familles monoparentales souffrent plus que les autres du mal-logement. Or que fait le Gouvernement ? Il rabote les APL et casse la loi SRU en matière de logement social. Ce sont toutes ces mesures antisociales et cette politique générale qui sont à l’origine de la précarité des mères isolées. Et comme cela ne suffisait pas, le Gouvernement a décidé de les stigmatiser lors des révoltes d’il y a quelques mois.

Mme Sylvie Bonnet (LR). Si de 2012 à 2022, la France a perdu 100 000 naissances annuelles, elle s’apprête à en perdre quelque 50 000 entre 2022 et 2023. Emmanuel Macron et François Hollande ont consciencieusement détricoté la politique familiale. Réforme du congé parental, réduction du quotient familial, fin de l’universalité des allocations familiales : ces décisions, conjuguées à la crise économique et à la pénurie des modes de garde, expliquent une chute de la natalité inédite ces dix dernières années, les naissances ayant reculé de plus de 10 %.

Le groupe Les Républicains a toujours soutenu les familles. Chaque année, il propose dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de restaurer l’universalité des allocations familiales ; de les verser dès le premier enfant ; de les augmenter dès le deuxième enfant de 15 % ; de relever le plafond du quotient familial à 3 000 euros ou encore de revaloriser tous les ans les prestations familiales pour tenir compte de l’inflation.

Pour protéger les familles monoparentales, les députés Les Républicains ont déposé par le passé des propositions de loi visant à défiscaliser les pensions alimentaires du parent seul ou à accroître les pensions de réversion des conjoints survivants lorsque ceux-ci n’ont pas acquis de droit personnel à pension.

Les familles monoparentales doivent bénéficier d’un accompagnement accru pour relever les défis économiques et sociaux uniques qui s’imposent à elles. Si nous partageons les objectifs de la proposition de loi, nous considérons que la politique familiale ne peut pas se limiter au soutien aux seules familles monoparentales sans risquer de compromettre l’équité, l’efficacité et la cohésion sociale.

Les familles prennent diverses formes – biparentales, monoparentales, recomposées – qui ont, chacune, des besoins spécifiques. Le fait de cibler uniquement les familles monoparentales serait injuste envers les autres familles qui ont également à affronter des défis significatifs. En outre, le soutien à toutes les familles contribue à la stabilité familiale en réduisant les tensions économiques et sociales qui pourraient mener à des séparations. Cette stabilité est également cruciale pour le développement des enfants, qui doivent pouvoir accéder aux mêmes opportunités, indépendamment de la structure familiale.

Si la somme des mesures proposées ne peut prétendre remplacer une véritable politique familiale qui doit s’adresser à l’ensemble des familles, le groupe Les Républicains soutient néanmoins le texte.

M. Nicolas Turquois (Dem). De prime abord, l’intention du groupe GDR de proposer des mesures ciblées sur les familles monoparentales peut sembler louable, mais, à y regarder de plus près, il est manifeste que plusieurs dispositions de la proposition de loi sont problématiques.

En premier lieu, les articles 1er et 2 présentent des risques de fraude massive car indétectable. Face à 2 millions de familles composées d’un seul parent et d’au moins un enfant, la sécurité sociale sera en effet dans la quasi-impossibilité de contrôler le caractère effectif de la monoparentalité du foyer.

En second lieu, ces dispositions pourraient avoir des effets particulièrement pervers pour les bénéficiaires potentiels qui, nous le savons, seraient à 80 % des femmes seules ; celles-ci pourraient hésiter à s’engager dans une situation de concubinage ou à la régulariser de peur de perdre le bénéfice des aides attachées à la monoparentalité.

Peut-être avez-vous vous-même identifié ces risques car vous ne semblez pas tellement tenir à l’adoption de la proposition de loi : elle est le dernier point de votre ordre du jour réservé.

Le groupe Démocrate a déjà fait plusieurs propositions en faveur des familles monoparentales parmi lesquelles la déductibilité des pensions alimentaires du revenu fiscal de référence, à l’initiative de ma collègue Aude Luquet.

Sous l’impulsion du Gouvernement, l’accompagnement des familles monoparentales connaît une forte actualité. Une mission a été confiée à notre collègue Fanta Berete et au sénateur Xavier Iacovelli sur le soutien aux familles monoparentales. Ses conclusions devraient être rendues au cours du mois de juillet. Par ailleurs, une concertation avec les partenaires sociaux, les élus et les associations a été lancée en vue de la création d’un congé de naissance de trois mois pour chaque parent, qui serait indemnisé à hauteur de 50 % du salaire dans la limite de 1 900 euros et s’ajouterait aux congés de maternité et de paternité.

Le groupe Démocrate s’opposera à ce texte qui présente des risques de fraude trop élevés et individualise encore un peu plus notre protection sociale, ce qui est contraire à notre philosophie.

M. Paul Christophe (HOR). Les députés étant déterminés à répondre aux difficultés financières et sociales rencontrées par les familles monoparentales, nombre de propositions de loi ont vu le jour ces derniers temps. Elles nous permettent d’alimenter nos débats et de construire ensemble des solutions adaptées aux besoins des familles. En effet, nous nous devrons de venir en aide aux 2 millions de familles monoparentales que compte notre pays, en particulier aux 41 % d’entre elles vivant sous le seuil de pauvreté.

Par les trois articles de votre texte, vous proposez d’étendre la durée du congé de maternité pour les femmes seules, d’élargir le bénéfice des allocations familiales dès le premier enfant pour les familles monoparentales et d’exclure du calcul de l’APL la pension alimentaire et l’ASF pour les familles monoparentales. Sur le fond, vos intentions nous semblent tout à fait louables, mais la forme nous interroge puisqu’elle crée une rupture d’égalité avec le parent en couple.

Rappelons également les nombreuses mesures prises récemment dont nous souhaitons creuser le sillon : la collecte automatique de la pension alimentaire auprès du parent débiteur ; la garantie du versement des pensions alimentaires aux enfants majeurs, mesure défendue par mon collègue Vincent Thiébaut ; la réforme du complément de mode de garde qui entre en vigueur le 1er janvier 2025 ; ou encore les efforts pour lever les freins à l’emploi qui pénalisent trop souvent les familles monoparentales. Autant de preuves que le sujet n’appartient pas qu’à l’opposition, chers collègues.

Bien d’autres mesures seront prochainement débattues à la suite des annonces gouvernementales et des conclusions de la mission de Fanta Berete et Xavier Iacovelli, sur lesquelles nous comptons beaucoup.

Il nous paraît donc plus judicieux d’attendre ces conclusions prévues pour le mois de juillet au plus tard et de s’en inspirer pour amender le prochain PLFSS.

En conséquence, le groupe Horizons et apparentés s’abstiendra.

M. Philippe Brun (SOC). Chacune et chacun d’entre nous cherche à mettre en lumière le sujet socialement écrasant mais politiquement invisibilisé depuis de trop nombreuses années des familles monoparentales. Cela concerne un quart des familles, 83 % des parents isolés sont des femmes ; 40 % des enfants issus de ces familles vivent sous le seuil de pauvreté.

Depuis les deux dernières années, nous avons, les uns et les autres, multiplié les initiatives : l’adoption de la proposition de loi de notre collègue Aude Luquet visant à défiscaliser la pension alimentaire ; la mission menée par Fanta Berete et Xavier Iacovelli dont nous attendons aujourd’hui les conclusions ; l’adoption d’un amendement socialiste au projet de loi de finances (PLF) pour 2024 ayant pour objet d’attribuer une prime de fin d’année aux familles monoparentales ; le travail transpartisan qui associe quarante et un députés afin de doter les familles monoparentales d’un statut. Je me réjouis de l’accord qui semble se dessiner en la matière et l’adoption de la proposition de loi d’Édouard Bénard viendra donner du poids au travail que nous essayons de mener collectivement.

Le texte comprend trois articles qui figurent également dans la proposition de loi que nous avons écrite avec des députés issus de tous les groupes. Ces articles concernent l’allongement du congé de maternité, les allocations familiales dès le premier enfant pour les familles monoparentales et l’exclusion de la pension alimentaire du revenu fiscal de référence pour le calcul des aides personnalisées au logement.

L’adoption du texte serait un signal très fort pour continuer le travail que nous avons engagé. Au nom du groupe de travail transpartisan que j’ai l’honneur d’animer, je forme le vœu que nous puissions nous asseoir autour d’une table avec le Gouvernement, dont nous avons besoin afin d’éviter les fourches de l’article 40 de la Constitution, pour enfin écrire ensemble une proposition de loi.

M. Yannick Monnet (GDR - NUPES). La monoparentalité est un état de fait : elle concerne plus d’un quart des familles. On dénombre aujourd’hui plus de 2 millions de familles monoparentales, qui comptent plus de 3 millions d’enfants. Dans les territoires d’outre-mer, ces familles sont majoritaires parmi les familles avec enfants. Dans 82 % des cas, elles ont à leur tête, une mère – ce taux monte à 98 % à La Réunion.

Ces familles rencontrent des difficultés spécifiques par rapport aux familles biparentales : près de 35 % des familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté contre 14 % pour les familles biparentales. Cette vulnérabilité s’aggrave pour les mères : le taux de pauvreté des enfants vivant seuls avec leur mère atteint 46 % contre 22 % pour les enfants vivant seuls avec leur père. Parallèlement, le non-recours au RSA et à l’ASF s’établit à 15 %.

Les mesures exceptionnelles ne peuvent évidemment suffire ; il faut des réponses structurelles. Les difficultés rencontrées par ces familles se répercutent sur les enfants dont l’épanouissement se trouve perturbé. Le parent doit assumer à la fois un rôle de soutien familial et un rôle de principal, pour ne pas dire unique, pourvoyeur de revenus. Là encore, à situation égale, les femmes subissent plus fortement les difficultés qui sont exacerbées par les inégalités salariales.

Ce texte s’inscrit dans la réflexion qu’il nous faut mener collectivement sur l’opportunité et la manière de créer un statut de familles monoparentales. Plus largement, il entend participer à l’effort de lutte contre la stigmatisation de ces familles, lesquelles sont, selon le réseau de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale, l’un des publics les plus fragiles. Nous devons donc agir.

Mme Marie-Charlotte Garin (Ecolo - NUPES). La galère des fins de mois, les pensions alimentaires non versées, les seconds parents démissionnaires, le temps qui manque tout le temps – le temps pour soi, le temps pour chercher un travail dans un monde où les horaires sont inadaptés à la vie de parent célibataire. Pour certaines familles monoparentales, cela se traduit par du stress – celui de ne pas pouvoir offrir aux enfants une alimentation de qualité, un logement stable, des vêtements neufs ou des fournitures scolaires – qui se mue parfois en détresse. Les mères représentent 84 % des familles monoparentales et sont surreprésentées dans les titulaires de contrats précaires. Je ne vais pas vous abreuver de chiffres parce que le lien entre monoparentalité et précarité n’est plus à démontrer.

Je remercie donc le groupe GDR de mettre à l’ordre du jour cette proposition de loi pour réduire la précarité sociale et financière des familles monoparentales. Je salue toutes les initiatives en ce sens prises à l’Assemblée – je pense notamment aux travaux de mes collègues Philippe Brun et Sarah Legrain.

Allonger le congé de maternité pour les femmes monoparentales, ouvrir le versement des allocations familiales dès le premier enfant et améliorer le calcul de l’APL : ce sont autant de pas pour soutenir les familles monoparentales.

Plutôt que de parler de réarmement démographique, c’est à un soutien concret aux familles monoparentales et à la parentalité que nous devrions nous attacher, loin des grands discours réactionnaires du Président de la République.

De manière plus générale, les Écologistes soutiennent l’individualisation de l’ensemble des aides sociales et du système fiscal. Autrement dit, l’ASF ne pourrait pas être supprimée à une mère isolée qui décide de vivre de nouveau en concubinage – c’était le sens des travaux menés par La France insoumise. L’impôt sur le revenu individualisé, déconnecté du statut conjugal, permettrait de rappeler que le mariage n’est plus un accord économique depuis bien longtemps. Les femmes ne peuvent être dépendantes économiquement de qui que ce soit. Il est temps que notre émancipation se traduise pleinement dans notre système social.

Le groupe Écologiste votera évidemment en faveur de la proposition de loi.

Mme la présidente Charlotte Parmentier-Lecocq. Nous avons une autre intervention.

M. François Ruffin (LFI - NUPES). Il y a quelques mois, le Président de la République nous enjoignait au réarmement démographique. Quelle drôle de vision – très mécanique – de l’homme et de la femme que de penser qu’ils auraient des enfants non par plaisir, par désir par joies d’être parents mais pour réarmer la nation.

Plutôt que des mots d’ordre martiaux invitant à la procréation, nous devons trouver les moyens de soutenir les familles et de leur donner une sécurité. Avoir un enfant ne doit pas être une source d’inquiétude. Nous avons donc besoin d’une politique familiale qui s’adresse aux familles traditionnelles – papa, maman et les deux enfants – mais aussi aux familles homoparentales et monoparentales. La majorité reproche au texte de proposer des mesures spécifiques, mais il y a bien un problème spécifique aujourd’hui.

Toutes les mamans solos que j’ai rencontrées le disent : « quand on se sépare, il faut se débrouiller ». Nous devons tout faire tout pour que la séparation ne soit synonyme de chute pour elles. Aujourd’hui, les femmes représentent plus de 80 % des chefs de famille monoparentales. Il n’est déjà pas normal que 20 % des enfants grandissent sous le seuil de pauvreté dans notre pays, mais cette proportion monte à 40 % pour les familles monoparentales. C’est scandaleux.

Il y a bien un problème spécifique qui réclame des réponses spécifiques. Le texte l’aborde sous l’angle de la fiscalité et des revenus. Il faut compléter ces mesures par une politique d’accompagnement en matière de logement, d’emploi et de parentalité en cas de séparation tant celle-ci est désormais dans l’ordre normal du couple.

M. le rapporteur. S’agissant du risque accru de fraude, dès lors qu’on crée un droit, on s’expose à ce que d’aucuns y dérogent. Les sociologues auditionnés mais aussi l’Igas et l’Inspection générale des finances ont vivement contesté la théorie de l’appel d’air.

En ce qui concerne l’indemnisation du congé de maternité, la proposition de loi se heurte à l’absence de statut des familles monoparentales. Néanmoins, il appartient à la loi de précéder les accords collectifs dans l’entreprise qui compléteront le financement par la sécurité sociale. Oui, l’alignement sur la durée de vingt-six semaines est proposé dans un souci d’égalité.

Enfin, madame Bonnet, votre question renvoie au sens que l’on donne à l’égalité. À l’instar de M. Ruffin, je considère qu’à une situation spécifique, il convient d’apporter des réponses spécifiques par souci de cohésion sociale. Les politiques familiales ont trop longtemps invisibilisé la réalité des familles monoparentales. Le débat a vocation à y remédier. Il n’est par ailleurs pas interdit de s’interroger plus largement sur le modèle nataliste de la politique familiale.

La commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Allonger la durée du congé de maternité pour les femmes en situation de monoparentalité

La commission adopte l’amendement AS22 de M. Édouard Bénard.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Permettre aux familles monoparentales de percevoir les allocations familiales dès le premier enfant

La commission adopte l’article 2 non modifié.

Après l’article 2

Amendement AS14 de M. Matthieu Marchio

M. Matthieu Marchio (RN). Je demande un scrutin public sur cet amendement.

Mme la présidente Charlotte Parmentier-Lecocq. La demande doit être présentée par au moins un dizième des membres de la commission. Faute de réunir le nombre de voix requises, je vous invite à présenter votre amendement.

M. Matthieu Marchio (RN). Cet amendement devrait recueillir l’approbation de nombreux groupes.

Le pouvoir d’achat des familles françaises ne cesse de se réduire, et les familles monoparentales sont parmi les plus exposées à l’inflation galopante. Dans ma région des Hauts-de-France, plus durement touchée que les autres, près de 35 % des familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté.

La pension alimentaire permet difficilement de compenser les charges que représentent l’éducation d’un enfant, son alimentation ou son habillement. Le prix des fournitures a ainsi augmenté de 11 % lors de la dernière rentrée scolaire. Il faut ajouter la flambée des prix de l’alimentation, de l’énergie, de l’essence, des loyers, etc.

Les femmes sont évidemment les premières concernées puisqu’elles composent la quasi-totalité des familles monoparentales.

Afin que les enfants et leurs mères bénéficient de l’intégralité de la pension alimentaire, l’amendement a pour objet de déduire celle-ci du revenu fiscal de référence, lequel est déterminant pour l’obtention d’un logement social ou d’une bourse. La pension doit être considérée non pas comme un revenu mais comme une nécessité pour assumer les charges liées à l’éducation de l’enfant.

Il est urgent de redonner aux femmes leur argent et leur pouvoir d’achat afin d’aider les plus modestes et de réparer ce qu’elles ressentent comme une injustice – une de plus. Je ne doute pas un seul instant que vous voterez, mes chers collègues, cet amendement de bon sens.

M. le rapporteur. Je partage votre constat et cette mesure présente un intérêt indéniable pour les familles monoparentales dont le niveau de vie pourrait ainsi être amélioré. Néanmoins, sa place est dans le PLF.

Avis défavorable.

M. Philippe Brun (SOC). La disposition que vous proposez a été adoptée en novembre 2022 dans la proposition de loi relative à la charge fiscale de la pension alimentaire de notre collègue Aude Luquet. Nous devons désormais militer pour son inscription à l’ordre du jour du Sénat. Nous ne voterons donc pas l’amendement puisqu’il est satisfait par le texte que l’Assemblée a déjà adopté.

Mme Fanta Berete (RE). La mission que je mène avec Xavier Iacovelli compte cinq piliers parmi lesquels la fiscalité. Nous avons recensé toutes les propositions faites par les parlementaires ces dernières années. La proposition de loi de Mme Luquet en fait évidemment partie. Elle n’a pas encore été inscrite à l’ordre du jour du Sénat car il reste à lever certaines difficultés d’application qui ont été identifiées. Nous nous y employons avec les ministères concernés.

M. Matthieu Marchio (RN). Je m’étonne des arguments qui me sont opposés par mes collègues socialistes et communistes.

Si nous attendons encore une fois le PLF, la disposition ne sera jamais votée puisqu’elle ne survivra pas à l’article 49, alinéa 3. Si nous voulons agir, il faut le faire maintenant.

Ensuite, contrairement à ce que vous prétendez, mon amendement n’est pas satisfait puisque le texte est bloqué au Sénat.

Je vous propose donc de voter immédiatement cette mesure pour qu’elle soit de nouveau à l’ordre du jour. Il est urgent d’agir pour aider les mères de famille qui galèrent plus que jamais.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS3 de Mme Martine Etienne

Mme Martine Etienne (LFI - NUPES). L’amendement vise à demander un rapport sur l’opportunité d’étendre à toutes les familles le versement des allocations familiales dès le premier enfant.

Cette mesure est destinée à lutter contre la précarité des familles et la pauvreté infantile qui explose dans notre pays. 3 millions d’enfants vivent sous le seuil de pauvreté, soit un sur cinq tandis que pour les adultes, le ratio est d’un sur sept. Depuis des années, les associations interpellent le Gouvernement sur la pauvreté infantile croissante à la fois en nombre et en intensité. Cet hiver, plus de 2 800 enfants dormaient à la rue – et le chiffre est minoré –, soit une hausse de 20 % par rapport à l’année dernière. La pauvreté des familles a des effets terribles sur les enfants, qu’il s’agisse de mal-logement, de précarité énergétique, de carences ou de déséquilibre alimentaires, sans compter des conséquences psychologiques et sanitaires lourdes.

Contre l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Article 3 Déduire l’allocation de soutien familial et la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants des ressources prises en compte pour le calcul de l’aide personnalisée au logement

La commission adopte successivement les amendements AS21 et AS20 de M. Édouard Bénard.

Amendement AS19 de M. Édouard Bénard

M. le rapporteur. L’article 3 a pour objet de retirer les pensions alimentaires et l’ASF des ressources prises en compte pour le calcul de l’APL. Or l’ASF est, en l’état du droit, déjà exclu du barème. Je propose donc de supprimer cette précision inutile.

Mme Sarah Legrain (LFI - NUPES). L’amendement est pleinement justifié. S’il est bienvenu que l’ASF soit exclue des ressources retenues pour ouvrir droit à l’APL, il est proprement scandaleux qu’elle continue à entrer dans le calcul du RSA ou de la prime d’activité.

Les mères isolées les plus précaires ne peuvent pas dépasser le seuil de pauvreté et sortir de la précarité parce que ce qu’elles perçoivent d’un côté, elles le perdent de l’autre. La question se pose aussi pour les allocations familiales. L’Assemblée doit absolument s’atteler à ce chantier – nous avions déposé des amendements qui ont malheureusement été déclarés irrecevables.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement AS23 de M. Édouard Bénard.

Elle adopte ensuite l’article 3 modifié.

Après l’article 3

Amendement AS16 de M. Victor Catteau

M. Victor Catteau (RN). L’amendement est le fruit d’une rencontre dans ma circonscription avec un père de famille, ayant à sa charge deux enfants, qui est devenu imposable du fait de la pension alimentaire qu’il perçoit.

Il s’agit donc de ne pas soumettre à l’impôt sur le revenu les pensions alimentaires et les contributions pour l’entretien et l’éducation des enfants dans la limite de 3 000 euros par enfant et par an.

Actuellement les pensions alimentaires sont considérées comme des revenus imposables, augmentant ainsi la charge fiscale du foyer au risque de passer dans une tranche supérieure. Cela alourdit les charges financières, qui sont déjà importantes pour une famille monoparentale.

L’amendement permet ainsi de soutenir les parents isolés, d’augmenter le pouvoir d’achat des familles monoparentales et de rétablir un peu de justice fiscale.

M. le rapporteur. Même réponse que précédemment : ce sujet relève du PLF.

Mme Fanta Berete (RE). La mission gouvernementale comporte un important volet fiscal. Il est vrai que pendant des années, la monoparentalité du foyer n’a pas été prise en compte dans divers domaines, dont la fiscalité, faute d’une réflexion holistique sur le sujet.

Depuis 2017, la majorité a tenté de répondre à certaines problématiques. Ce n’est pas parfait – les associations, les sociologues et les parlementaires nous le rappellent tous les jours. Nous aurons à travailler sur la fiscalité à partir des conclusions du rapport.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS9 de M. Jean-Hugues Ratenon

M. Jean-Hugues Ratenon (LFI - NUPES). L’amendement vise à aller plus loin en étendant l’exclusion de la pension alimentaire et de l’ASF du calcul de l’APL à celui du quotient familial.

En effet, cette double exclusion permettrait aux familles monoparentales de bénéficier d’aides plus substantielles. Son impact sur leur pouvoir d’achat et leur capacité à subvenir aux besoins essentiels serait direct. Cette mesure contribuerait à réduire les inégalités entre les familles monoparentales et les autres familles.

En diminuant la pression financière sur les parents célibataires, nous atténuons de fait le stress et améliorons ainsi la qualité et les conditions de vie. Ce faisant, nous offrons aux enfants un environnement familial plus stable, propice à leur développement et à leur réussite scolaire.

M. le rapporteur. Je ne peux que souscrire à votre demande, qui va dans le sens de la proposition de loi.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS24 de M. Édouard Bénard

M. le rapporteur. L’amendement tend à demander un rapport sur l’opportunité d’établir un statut du parent isolé. Il s’agit là d’une revendication récurrente et pressante des associations de mères isolées. Elles estiment que les mesures d’accompagnement actuelles ne sont pas suffisamment protectrices et ne le seront pas tant que n’aura pas été mis en place un statut identifiable et adapté pour répondre aux besoins spécifiques des familles monoparentales.

Cela permettrait une prise en charge globale de ces familles qui viendrait rompre l’isolement dont elles sont victimes. C’est une question importante à laquelle nous devons prendre le temps de réfléchir avec l’appui des services ministériels compétents.

Mme Fanta Berete (RE). C’est la demande numéro un. Elle émane des auditions tenues aussi bien par Sarah Legrain que par Philippe Brun mais également des sénatrices et des collectifs, notamment la Collective des mères isolées.

La mission ne peut évidemment pas faire l’impasse sur la création d’un tel statut. Nous sommes en train d’examiner, avec les différents ministères, de quelle manière formuler une recommandation qui pourrait aboutir à la création de ce statut. Je vous l’ai dit, je suis maman solo depuis vingt ans, j’aurais voulu avoir cette reconnaissance bien avant.

M. Paul Christophe (HOR). Ces amendements sont autant d’amendements d’appel puisqu’ils soulèvent des sujets bien légitimes. Je souscris aux propos de Fanta Berete sur la mission en cours. J’ajoute que, dans la perspective d’une adoption par le Sénat, il serait préférable d’éviter de multiplier les demandes de rapport que celui-ci exècre. Si les amendements de cette nature étaient adoptés, les sénateurs ne manqueraient pas de les supprimer, ce qui modifiera le texte et retardera l’aboutissement du processus législatif.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS5 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI - NUPES). Il s’agit encore d’une demande de rapport. Ne faisons pas semblant de l’ignorer, l’examen d’une proposition de loi dans le cadre d’une niche parlementaire ne laisse guère d’occasions d’amendements et que nombre d’entre eux sont irrecevables. Les demandes de rapport sont donc une façon d’ouvrir le débat. Puisque Mme Berete est chargée d’une mission pour le compte du Gouvernement, ce genre de demandes et, le cas échéant, leur adoption l’obligent à prendre en compte nos questions.

Il s’agit ici de la déconjugalisation de l’ASF, mesure très importante que j’ai portée dans le cadre de notre propre niche et qui a malheureusement été très clairement rejetée, sans abstentions pudiques. Or la situation est tout à fait injuste car cette allocation, qui pour de nombreuses mères isolées se substitue à une pension alimentaire non versée et qui est destinée non pas à la mère, mais au bien de l’enfant, est aujourd’hui conjugalisée : si la mère se remet en couple, elle perd l’allocation. C’est une rupture d’égalité très importante pour les enfants, car l’enfant qui touche une pension alimentaire, que sa mère se remarie ou non, continuera à la percevoir, tandis que, pour celui qui n’a pas la chance d’avoir un père solvable, l’État se désengage dès que la mère retrouve un conjoint – ce qui par ailleurs est tout à fait antiféministe et contribue à accroître la dépendance des femmes envers leurs conjoints. La déconjugalisation est donc une mesure essentielle pour l’égalité entre les enfants et pour mettre fin à l’idée qu’il faudrait que les femmes dépendent d’hommes pour que les besoins des enfants soient satisfaits.

M. le rapporteur. Favorable.

Mme Fanta Berete (RE). Il s’agit là encore d’un sujet d’étude pour nous, et nous l’avons d’ailleurs bien entendu, notamment de la part de l’association Mama Bears, portée par Nathalie Moysan. Nous devons proposer des approches disruptives, compte tenu notamment de tout ce qu’implique le maintien des aides lorsque la personne se remet en couple. J’ai suggéré au ministère compétent de travailler sur une sortie progressive de ce statut, avec un accompagnement dans la durée jusqu’à ce que les parents isolés soient finalement stabilisés dans leur nouvelle situation et cessent de percevoir ce soutien.

À titre indicatif, d’après les calculs du ministère du budget, le maintien de cette aide pendant trois mois après la remise en couple officielle coûterait 60 millions d’euros, et 250 millions pour douze mois. Ce n’est pourtant pas parce que ça coûte cher qu’il ne faut pas le faire, car cette charge financière aurait un impact sociétal en évitant les ruptures entre différentes catégories de français.

Mme Marie-Charlotte Garin (Ecolo - NUPES). Je tiens à soutenir particulièrement cet amendement. La question est de savoir non pas si l’on peut être disruptif ou agile, mais si nous tenons à nos principes féministes et à des principes de bon sens touchant à la parentalité et à l’émancipation des femmes, notamment des mères de famille. Il y a là une vraie question. Maintenir cette aide pendant trois mois avant de considérer que la situation est stabilisée revient à supposer que le nouveau conjoint ou la nouvelle partenaire veuille s’impliquer dans la parentalité. Cette réflexion est figée dans une société qui n’est plus celle que vous pensez qu’elle est. La parentalité et les familles ont changé – ça bouge, c’est évolutif. Je ne vois donc pas pourquoi nous nous acharnerions à maintenir la conjugalisation de l’ASF alors que cela ne correspond plus à la réalité des familles. Si on déconjugalise et que l’on dit que les femmes ne sont pas dépendantes de leur partenaire, il faut aller jusqu’au bout de ce principe et l’appliquer aux familles monoparentales.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS8 de Mme Sarah Legrain

Mme Sarah Legrain (LFI - NUPES). Il s’agit encore d’une demande de rapport. Nous aurions préféré que cette mesure de bon sens soit proposée sous la forme d’un amendement, mais le risque d’irrecevabilité était trop important. L’article 1er de cette proposition de loi proposait d’allonger le congé maternité, conformément à une revendication de nombreuses mères isolées qui, seules avec leur enfant, ont besoin de plus de temps – je n’ose utiliser le terme de « répit » à propos du congé de maternité.

Améliorer les congés pour enfant malade est une évidence car, lorsqu’on est seule et qu’on a un enfant malade, il n’y a pas d’autres options que de s’arrêter pour s’occuper de lui. Il est aberrant que le nombre de jours de congé dont on peut disposer dans l’année pour s’occuper d’un enfant malade, déjà ridicule, soit le même si l’on est en couple – c’est-à-dire si deux personnes sont susceptibles de s’arrêter – ou seule. Il faut au moins que cette question soit étudiée par un rapport et qu’elle ne soit pas éludée dans le cadre de la mission gouvernementale, car l’obligation de s’occuper d’un enfant malade fait de toute évidence partie des charges supplémentaires qui rendent plus difficile la conciliation entre l’emploi et la vie familiale pour les mères isolées, qui sont donc plus susceptibles de plonger dans la précarité.

M. le rapporteur. Ouvrir le débat sur l’attribution de congés supplémentaires aux parents isolés afin qu’ils puissent subvenir pleinement aux besoins de leur enfant est une bonne idée.

Avis favorable à cette demande de rapport.

Mme Fanta Berete (RE). La mission dont je suis chargée comporte également un pilier consacré à l’emploi et cette mesure est l’une des principales demandes des collectifs. La question est à l’étude et je rappelle à ce propos que, dans de nombreuses entreprises, des dispositions conventionnelles permettent d’aller au-delà du minimum légal et que la négociation se fait aussi par branche.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS6 de Mme Martine Etienne

Mme Martine Etienne (LFI - NUPES). L’amendement vise à demander un rapport permettant de connaître l’état de l’accessibilité des crèches pour les familles monoparentales. Il est notamment question de prendre en compte l’ensemble des facteurs qui peuvent rendre plus difficile l’accès aux crèches pour toutes les familles, notamment pour les familles monoparentales. En 2019, en effet, le taux de pauvreté des familles monoparentales était de 19 %, soit plus de deux fois la moyenne nationale.

L’accès à l’emploi est difficile et rendu plus difficile encore par la situation familiale, notamment pour les mères. La raison en est simple : le prix des crèches est trop élevé pour les mères seules, qui ne peuvent donc pas occuper d’emploi et se trouvent en grande difficulté. Pour les places disponibles aussi, les démarches administratives sont longues, les critères sont flous et les mères seules ne sont pas forcément privilégiées dans l’accès aux crèches – question qui fera l’objet d’un autre amendement. Elles sont d’autant plus touchées qu’elles sont seules et doivent souvent renoncer à un emploi pour s’occuper de leurs enfants.

M. le rapporteur. Avis favorable.

Je saisis cette occasion de dire que cet amendement reprend les interrogations soulevées par les deux suivants, dont je demanderai donc le retrait.

Mme Fanta Berete (RE). Pour ce qui est du rapport entre les modes de garde et l’emploi, je rappelle que nous ne partons pas d’une feuille blanche car nous avons instauré les places en crèche à vocation d’insertion professionnelle, proposées pour les enfants de 0 à 3 ans aux parents demandeurs d’emploi et en reprise d’emploi.

Dans le cadre des auditions, nous allons interroger France Travail à propos des textes concernant le plein emploi ou des personnes percevant le RSA. En lien notamment avec les 15 heures d’activité exigées, France Travail devait ainsi proposer des solutions pour faire en sorte que les enfants soient gardés. Je ne pense pas que nous obtiendrons une solution parfaite, mais il faut que ces femmes puissent travailler dans les meilleures conditions sans avoir le souci de la garde de leurs enfants.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS7 de Mme Martine Etienne

Mme Martine Etienne (LFI - NUPES). Dans la ligne de l’amendement précédent, celui‑ci vise à demander qu’un rapport soit remis sur l’opportunité de donner priorité aux familles monoparentales pour l’accès aux crèches. Elles sont en effet plus pauvres que la moyenne nationale des familles et les mères seules, qui sont majoritaires, doivent généralement renoncer à travailler lorsqu’elles n’ont pas de solution de garde pour leurs enfants. Une fois encore, ce sont les femmes qui se trouvent pénalisées dans l’accès à l’emploi. C’est une nouvelle explication des inégalités de salaire et de revenus, ainsi que du « plafond de verre ».

Cette priorité est donc une mesure d’égalité qui tend à résorber autant que possible une partie des difficultés d’accès à l’emploi et des inégalités de revenus entre les femmes et les hommes et, par extension, entre les familles monoparentales et les autres.

L’amendement est évidemment un amendement d’appel. L’idéal serait de proposer une situation de garde adaptée pour chaque enfant et de permettre aux familles monoparentales de pouvoir choisir leur mode de garde. Un rapport de 2016 de la Drees précise en effet que les enfants de mères seules sont confiés plus souvent que les autres enfants à des modes d’accueil collectif ou à leurs grands-parents, et moins souvent accueillis par une assistante maternelle agréée. Les mères célibataires disposent en effet de moins de ressources que les parents en coupe et le coût de l’accueil collectif est moins élevé que celui d’une assistante maternelle, en particulier pour les ménages modestes. Les crèches sont donc l’une des premières solutions de garde pour les familles monoparentales et il convient d’en faciliter l’accessibilité.

M. le rapporteur. À cet amendement d’appel, je préférais la formulation plus globale de la demande de rapport précédente. Cette dernière n’ayant toutefois pas été adoptée, je m’en remets à la sagesse de la commission.

Mme Fanta Berete (RE). On en revient un peu à l’exposé précédent. Cependant, on a presque l’impression que l’amendement vise à la création d’un droit opposable à une place en crèche, alors que le déficit en la matière est connu – nous l’avons souvent évoqué ici, notamment à l’occasion du texte relatif au plein-emploi.

Faire garder ses enfants coûte cher aux couples et plus cher encore aux familles en situation de monoparentalité. C’est la raison pour laquelle nous avons voté l’extension du CMG, qui entrera en vigueur très prochainement afin que les enfants puissent bénéficier d’une réduction des frais de garde jusqu’à l’âge de 12 ans. Le travail engagé autour du service public de la petite enfance doit également avancer, ce qui suppose de former du personnel, et donc de proposer des rémunérations attractives, afin de développer l’offre.

J’ai observé dans le cadre des auditions qu’un rapport d’équité, voire d’égalité, doit être maintenu dans les solutions proposées aux familles monoparentales comme aux couples car, dans les grandes villes notamment, par exemple à Paris, dont je suis élue, la question de l’accès à une place en crèche crée un stress important.

Cette question est à l’étude et, au titre de la stratégie que nous poursuivons en la matière, nous voterons contre cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS12 de Mme Laure Lavalette

M. Emmanuel Taché de la Pagerie (RN). L’amendement vise également à demander un rapport sur l’opportunité d’étendre le bénéfice des places réservées en crèche aux familles monoparentales bénéficiaires de l’ASF. En effet, ces familles subissent déjà la précarité et sont, de surcroît, confrontées à l’absence de politiques et d’acteurs spécifiques dans l’attribution de places dans l’accueil collectif de l’enfant, notamment pour les moins de 3 ans. L’impossibilité de faire garder son enfant revient souvent, pour ces parents, à réduire, voire à cesser, leur activité professionnelle, ce qui les propulse dans une précarité dramatique, sachant que, pour beaucoup d’entre eux, il est impensable de recourir à une assistante maternelle, dont le coût financier n’est pas supportable.

M. le rapporteur. Pour les mêmes raisons que pour l’amendement précédent, je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS10 de Mme Laure Lavalette

M. Emmanuel Taché de la Pagerie (RN). Cet amendement de Mme Lavalette demande lui aussi l’établissement d’un rapport sur la terminologie de la case T, « Parent isolé », de la déclaration de revenus. Ce rapport permettrait notamment d’évaluer les raisons pour lesquelles les contribuables ayant droit aux bénéfices fiscaux accordés aux parents isolés ne cochent pas cette case de leur déclaration de revenus, qui peut procurer des bénéfices non négligeables aux parents seuls, notamment une demi-part supplémentaire. Le rapport proposerait également des terminologies plus lisibles.

M. le rapporteur. Il faut certainement étudier cette question s’il s’agit d’une cause de non-recours. N’étant cependant pas pleinement convaincu que cela nécessite une demande de rapport, je m’en remets encore à la sagesse de la commission.

Mme Fanta Berete (RE). C’est un peu faire un amendement pour faire un amendement... Notre lettre de mission commence en effet par une demande de stabiliser les définitions relatives aux familles monoparentales, car certains travaux récents de sociologues sur l’historique de la terminologie en la matière font véritablement débat. Des définitions insuffisantes nous exposent à des problèmes en termes d’accès aux droits et aux aides et soutiens possibles.

Ce sera l’objet de la première partie de ce rapport, à laquelle nous travaillons et que j’espère bien que nous mènerons à son terme. Quant à la case T de la déclaration de revenus, on constate en effet que les parents solos ne la cochent pas tous.

Parmi ces parents, il faut compter les veufs et veuves de France, et je rends hommage, à leur propos, à la Favec, l’Association des veufs et orphelins de France. Les veufs n’entrant cependant pas dans la catégorie concernée, il est difficile de recouper les données pertinentes à partir des statistiques de l’Institut national de la statistique et des études économiques. Le travail étant en cours, notre avis est le même que précédemment.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS13 de Mme Laure Lavalette

M. Emmanuel Taché de la Pagerie (RN). Je souhaite le meilleur succès à notre collègue Fanta Berete et au sénateur Xavier Iacovelli dans leur mission. Nous sommes attentifs à leurs travaux et attendus.

L’amendement demande encore un rapport, sur l’opportunité de la création d’une carte de parent isolé ouvrant droit à des réductions pour les transports, les loisirs ou la culture. Dans un rapport d’information élaborée au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat publié le 28 mars dernier, les sénatrices Colombe Brossel et Béatrice Gosselin ont défendu la création d’une carte de famille monoparentale, qui figure parmi les dix recommandations visant à lutter contre la précarisation de ces familles. Cette carte, sur le modèle de la carte familles nombreuses, permettrait non seulement de donner une respiration financière aux familles monoparentales, mais aussi de remédier à l’isolement récurrent de ces familles qui ne peuvent pas se permettre des sorties avec leurs enfants et privilégient évidemment les postes de dépenses liés au logement, à l’alimentation et à la santé.

M. le rapporteur. Cette piste étant déjà empruntée, je suis défavorable à cette demande de rapport.

Mme Fanta Berete (RE). La question est déjà posée dans le débat public depuis une vingtaine d’années. L’heure n’est donc plus à un rapport : la question est de savoir s’il est possible de prendre cette mesure. Dans les travaux de M. Brun comme dans ceux des sénatrices ou dans les miens, la carte a vocation à officialiser le statut des parents isolés et, à l’instar de la carte familles nombreuses, à donner droit à diverses prestations et compensations.

Cette carte est également importante parce qu’elle peut permettre une identification plus simple pour les contacts avec les employeurs – qu’il n’est pas toujours facile d’aller voir avec une liasse de documents pour justifier de sa situation. Les employeurs ont, du reste, toute leur place dans le dispositif, ainsi que les collectivités – je pense à cet égard aux mairies de Montreuil et de Marseille qui, sur la base de la reconnaissance de cette situation et avec l’appui de plusieurs collectifs, ont proposé des mesures complémentaires.

J’espère donc que nous pourrons aboutir à la création de cette carte, plébiscitée par l’ensemble des personnes travaillant sur cette question.

La commission rejette l’amendement.

Article 4 : Gage financier

La commission adopte l’article 4 sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

Mme la présidente Charlotte Parmentier-Lecocq. Félicitations, monsieur le rapporteur.

Nos débats ont démontré l’intérêt de la mission gouvernementale confiée à Fanta Berete et Xavier Iacovelli, dont nous attendons avec impatience les conclusions et les propositions.

 

*

*     *

 

En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la proposition de loi figurant dans le document annexé au présent rapport.

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b2645_texte-adopte-commission#


– 1 –

   ANNEXE N°1 :
Liste des personnes entendues par lE rapporteur

(Par ordre chronologique)

       Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) – Mme Hélène Périvier, présidente du conseil de la famille

       Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)  Service des politiques sociales et médico-sociales, bureau familles et parentalité  M. Denis Darnand, sous-directeur du service Inclusion sociale

       Institut national de la statistique et des études économiques (Insee)  Direction des statistiques démographiques et sociales – Mme Sylvie Le Minez, cheffe de l’unité des études démographiques et sociales, et Mme Émilie Raynaud, cheffe de la division études sociales

       Table ronde avec des chercheurs

– Mme Jessica Pothet, maîtresse de conférences en sociologie

– Observatoire de la parentalité de La Réunion  M. Thierry Malbert, directeur scientifique

       Table ronde avec des chercheurs

– M. Antoine Math, économiste, chercheur à l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) et collaborateur scientifique auprès du Haut Conseil de l’enfance, de la famille et de l’âge (HCFEA)

– Mme Clémence Helfter, sociologue, chargée de recherche et d’évaluation à la direction des statistiques, des études et de la recherche de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf)

– Mme Marie-Clémence Le Pape, sociologue de la famille, maîtresse de conférences à l’Université Lumière Lyon 2, collaboratrice extérieure au bureau jeunesse et famille de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)

       Table ronde avec des associations

– Union nationale des associations familiales (Unaf)  Mme Mylène Armando, administratrice, membre du département Parentalité - enfance, et Mme Claire Ménard, chargée des relations parlementaires

– Fédération des acteurs de la solidarité (FAS)  Mme Marine Malberg, chargée de mission Droits des femmes et prostitution

– Confédération syndicale des familles  M. Romain Biessy, secrétaire général, Mme Charlotte Barre et Mme Élodie Fumet, secrétaires confédérales

       Table ronde avec des associations

– Fédération syndicale des familles monoparentales  Mmes Véronique Obe et Olivia Barreau, membres du conseil d’administration

– Collective des mères isolées  Mme Aurélie Gigot, Mme Dorothée Noël et Mme Sarah Margairaz

– Collectif pour une parentalité féministe  Mme Noémie Khenkine-Sonigo

       Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) – M. Nicolas Grivel, directeur général

       Mme Geneviève Gueydan, inspectrice générale des affaires sociales, et M. Frédéric Lavenir, inspecteur général des finances, co-rédacteurs de la Revue des dépenses socio-fiscales en faveur de la politique familiale (2021)

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


– 1 –

   Annexe n° 2 :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi

Proposition de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d’article

1er

Code du travail

L. 1225191 [nouveau]

2

Code de la sécurité sociale

L. 521‑1

3

Code de la construction et de l’habitation

L. 822‑8‑1 [nouveau]

 


([1]) Assemblée nationale, séance unique du vendredi 5 avril 2024, compte rendu n° 171.

([2]) Panorama des familles d’aujourd’hui, HCFEA, 2021.

([3]) Ibid.

([4]) Ibid.

([5]) Loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce.

([6]) Famille et logement, Insee, 2011.

([7]) Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales, rapport (n° 485) de Mmes Colombe Brossel et Béatrice Gosselin au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, 28 mars 2024.

([8]) La situation des familles dans les Drom, HCFEA, 2022.

([9]) Ibid.

([10]) Ibid.

([11]) Les familles en 2020 : 25 % de familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses, A. Algava, K. Bloch, I. Robert-Bobée, Insee, 2021.

([12]) « Environ 2 millions de personnes en situation de grande pauvreté en France en 2018 », Revenus et patrimoine des ménages, J. Blasco, S. Picard, Insee Références, 2021.

([13]) Opinion des familles monoparentales sur les politiques sociales, Drees, 2021.

([14]) Comment mieux prendre en compte la diversité des familles dans les échelles d’équivalence ?, Drees & Insee, 2023.

([15]) Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales, op. cit.

([16]) Les familles en 2020 : 25 % de familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses, op. cit.

([17]) Ibid.

([18]) « Enquête Logement » Insee, 2013.

([19]) Recensement de la population, Insee, 2018.

([20]) Panorama des familles d’aujourd’hui, op. cit.

([21]) Ibid.

([22]) Les familles en 2020 : 25 % de familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses, op. cit.

([23]) Étude sur la situation économique et sociale des parents isolés. Niveau de vie, marché du travail et politiques publiques, H. Périvier et al., Observatoire français des conjonctures économiques, 2020.

([24]) Combien de temps durent les situations de monoparentalité ? Une estimation sur données françaises, Économie et Statistique, 2017.

([25]) Opinion des familles monoparentales sur les politiques sociales, op. cit.

([26]) Le pouvoir d’achat des familles face au choc d’inflation, HCFEA, 2021.

([27]) Panorama des familles d’aujourd’hui, op. cit.

([28]) Dossier CNAF, Les dispositifs de congés parentaux et leur indemnisation en Europe : éléments de synthèse, C. Collombet, 2021.

([29]) Article L. 1225‑20 du code du travail.

([30]) Décret n° 2021‑574 du 10 mai 2021 relatif à l’allongement et à l’obligation de prise d’une partie du congé de paternité et d’accueil de l’enfant.

([31]) 47,6 % des familles monoparentales n’ont qu’un enfant à charge, 33,8 % des familles traditionnelles et 22,6 % des familles recomposées.

([32]) Op. cit.

([33]) Voir le commentaire sous l’article 2 de la présente proposition de loi.

([34])  https://assnat.fr/vM8AHu