N° 2659

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 mai 2024

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’outremer

 

 

 

Président

M. Mansour Kamardine

 

Rapporteur

M. Guillaume Vuilletet

Députés

 

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TOME I

RAPPORT

 

 

 Voir les numéros : 1714 rect et 1899.


La commission d’enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’outremer, est composée de :

– M. Mansour Kamardine, président ;

 M. Guillaume Vuilletet, rapporteur ;

– M. Christian Baptiste, M. Xavier Batut, M. Bruno Millienne, Mme Sophie Panonacle, viceprésidents ;

– Mme Maud Petit, M. Julien Rancoule, Mme Cécile Rilhac, Mme Huguette Tiegna, secrétaires ;

 Mme Nathalie Bassire, M. Elie Califer, Mme Annick Cousin, M. Dominique Da Silva (jusqu’au 20 décembre 2023), M. Sébastien Delogu (jusqu’au 16 janvier 2024), M. Philippe Dunoyer (à compter du 21 décembre 2023 jusqu’au 24 mai 2024), Mme Olga Givernet, Mme. Claire Guichard (jusqu’au 20 décembre 2023 et à compter du 25 mai 2024), Mme Florence Goulet, M. Frantz Gumbs, Mme Mathilde Hignet (jusqu’au 16 janvier 2024), M. Marc Le Fur, Mme Joëlle Mélin, M. Nicolas Metzdorf (à compter du 21 décembre 2023 jusqu’au 24 mai 2024), M. Marcellin Nadeau, M. Jean‑Philippe Nilor (jusqu’au 16 janvier 2024), Mme Béatrice Piron (jusqu’au 20 décembre 2023 et à compter du 25 mai 2024), Mme Sandrine Rousseau, Mme Anaïs Sabatini, Mme Laetitia Saint‑Paul (à compter du 21 décembre 2023), M. Raphaël Schellenberger, Mme Ersilia Soudais (jusqu’au 16 janvier 2024), M. David Valence.

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS DU PRÉSIDENT

introduction

première Partie : Mieux connaître les risques naturels dans le contexte du changement climatique pour mieux les anticiper

I. Des territoires particulièrement vulnérables aux risques naturels majeurs

A. un cumul de facteurs de vulnérabilité

B. Une exposition à des aléas multiples et spécifiques

1. Les aléas météorologiques, climatiques et hydrologiques

a. Aux Antilles, « Irma », « Maria » et « Hugo » ont marqué la mémoire collective

b. À Mayotte et à La Réunion, l’activité cyclonique se conjugue à des épisodes réguliers de fortes pluies et d’orage

c. Dans le Pacifique sud, des épisodes « El Niño » redoutés

2. Les aléas telluriques : sismiques, volcaniques, tsunamigènes

a. Le risque sismique et de tsunamis

b. Le risque volcanique

c. Les mouvements de terrain

II. Le changement climatique, un facteur d’aggravation

A. Une hausse de la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes

1. Aux Antilles, une augmentation de la fréquence des ouragans de catégories 4 et 5

2. Dans l’océan Indien, des risques accrus de sécheresse et de cyclones d’extrême intensité

3. En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, une probable diminution de l’activité cyclonique mais une augmentation des pluies associées

B. Impacts liés à l’élévation du niveau de la mer

a. Les projections du Cerema confirment le risque accru d’érosion côtière en outre-mer à court et à moyen-terme

b. Une mise en œuvre embryonnaire de la loi « climat et résilience » en outre-mer

c. Des solutions adaptatives coûteuses à mettre en œuvre nécessitant des solutions de financement adaptées

C. De nouveaux types de risques : le cas des algues sargasses

1. Améliorer les connaissances scientifiques et les outils de prévision des échouements d’algues sargasses

2. Bilan des plans Sargasses I et II

D. La politique d’adaptation au changement climatique en outre-mer doit mieux prendre en compte les risques naturels majeurs

III. Mieux connaître pour mieux anticiper…

A. Les risques météorologiques et climatiques : rôle et moyens de météo-France

a. Le dispositif « Vigilance »

b. Des modèles de prévision et des équipements d’observation de haut niveau

c. Des moyens et des effectifs à stabiliser dans les services outre-mer de Météo-France

B. Les risques sismiques et volcaniques

1. Des progrès scientifiques réalisés dans la connaissance des phénomènes telluriques

2. Les faiblesses persistantes du système d’observation et de surveillance des aléas volcaniques et sismiques

deuxième partie : Mieux prévenir les risques, réduire la vulnérabilité des territoires

I. Des freins persistants À la mobilisation des outils de prévention des risques

A. Des territoires ultramarins inÉgalement dotÉs en plans de prÉvention des risques naturels actualisÉS

1. L’actualisation des PPRN dans le contexte du changement climatique est nécessaire et attendue

2. Dans les collectivités d’outre-mer, des freins persistants à l’adaptation du dispositif

B. Le fonds barnier demeure difficile À mobiliser et d’un montant insuffisant

1. L’intégration du fonds au budget général de l’État en 2021 a été bénéfique pour l’outre-mer

2. Une répartition biaisée du fonds par type de dépenses et par territoire en outre-mer

3. Des évolutions récentes ayant permis d’améliorer la transparence, la lisibilité et l’accessibilité du fonds

4. D’un fonds de prévention à un fonds d’adaptation ?

II. Le défi de l’adaptation du bâti et de l’habitat aux risques naturels majeurs

A. la persistance de l’habitat informel et indigne dans les zones à risques

1. Une connaissance lacunaire à renforcer dans un contexte d’évolution rapide

2. Les outils de la loi Letchimy concernant les zones à risques sont faiblement mobilisés et n’ont pas fait l’objet d’une appropriation par les acteurs territoriaux

B. le plan séisme antilles (psa) : des dynamiques récentes à conforter

1. Bilan des PSA 1 et 2 (2007-2019) : des travaux d’ampleur restent à mener pour sécuriser la population antillaise

2. Un troisième volet (2021-2027) ambitieux en cours de déploiement

a. Des objectifs ambitieux de réduction de vulnérabilité du bâti public prioritaire

b. Des avancées à conforter pour dynamiser la mise en œuvre du PSA

3. Le PSA 3 ne prévoit pas de stratégie de réduction de la vulnérabilité des bâtiments privés recevant du public

C. Adapter le bâti face au changement climatique

III. la sensibilisation et l’éducation Des populations

A. une « culture du risque » reconnue en outre-mer mais inégalement partagée selon les territoires et les types d’aléas

B. des politiques actives d’information et d’éducation aux risques

1. L’information réglementaire obligatoire sur les risques naturels

2. Au niveau national, des initiatives récentes à conforter

3. Au niveau des territoires, de nombreuses initiales locales à soutenir

troisiÈme PARTIE : Une gestion des risques naturels majeurs en outre-mer robuste mais inégale selon les ALÉAS et leS territoireS concernéS

I. des retours d’expérience INDISPENSABLES À l’amélioration de la gestion des crises futures

A. en 2017, Irma a dépassÉ les pouvoirs publics À saintbarthélemy et SURTOUT À saint-martin par son INTENSITÉ inédite

1. Saint-Barthélemy et Saint-Martin, deux îles au carrefour de nombreuses vulnérabilités

2. Malgré leur action résolue, les pouvoirs publics ont été dépassés par l’ampleur de l’ouragan

a. Les pouvoirs publics se sont préparés et ont anticipé la venue d’un ouragan sur les deux îles

b. Une gestion de crise particulièrement complexe

c. Une mobilisation de grande envergure

3. La mise en œuvre des principaux enseignements d’Irma en matière de gestion de crise

B. en 2024, la gestion du cyclone belal À la rÉunion apparaÎt exemplaire À bien des aspects

1. Un territoire bien préparé au risque cyclonique et en constante adaptation

2. Une gestion de crise exemplaire

a. Une excellente prévision du phénomène

b. Des décisions adaptées et proportionnées, quasi unanimement respectées par la population

i. Les pouvoirs publics

ii. La population

c. Un relatif rapide retour à la normale : l’exemple d’EDF

II. Une organisation de la préparation et de la gestion de crise ÉprouvÉe mais perfectible

A. Des pouvoirs publics inÉgalement prÉparÉs

1. De la connaissance à surveillance

2. Des plans ORSEC essentiels mais inégaux

3. Des plans communaux de sauvegarde à généraliser

4. L’hypothèse d’un « big one » ou d’une conjonction d’événements

5. S’exercer

B. rompus à la gestion des crises, les pouvoirs publics peuvent encore progresser dans la GAMME DES réponseS À Y apportER

1. Une gouvernance de crise qui a fait ses preuves

2. Des moyens mobilisables globalement importants mais localement disparates

a. La sécurité civile en première ligne

i. Des effectifs et moyens inférieurs à ceux déployés dans l’hexagone

ii. Projeter plutôt que prépositionner

iii. En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, une organisation à moderniser ?

b. L’indispensable recours aux forces armées

c. Un système de santé fragile

3. Des coopérations régionales importantes à la coordination complexe

C. Au-delà des pouvoirs publics, d’autres acteurs sont essentiels À la préparation et à la gestion des événements naturels

1. Des opérateurs essentiels à la gestion de la crise et de ses conséquences

a. Des opérateurs de transport indispensables pour répondre à la crise

b. La « mère des batailles » () de l’électricité, dont découle celle de l’eau

c. Les télécommunications

2. Des populations actrices à part entière de la gestion des crises

QUATRIÈME Partie : la pÉriode de reconstruction est marquÉe par la difficile conciliation entre de nombreux impératifs

I. AprÈs Irma, Une reconstruction À deux vitesses

A. D’une île À l’autre, les consÉquences d’irma ont été diffÉrentes

1. Saint-Martin a été davantage touchée que Saint-Barthélemy

2. Une différence qui s’explique en partie par des choix antérieurs

B. une reconstruction en mieux unaniMement souhaitÉe mais inÉgalement mise en œuvre

1. L’appui de l’État aux collectivités a été différent entre les deux îles

2. À Saint-Barthélemy, la reconstruction a été achevée sans que tous les enseignements d’Irma aient été pris en compte

3. À Saint-Martin, une reconstruction inachevée, entre progrès et réitération du passé

II. Une couverture assurantielle insuffisante face à des risques naturels majeurs

A. Le régime « cat nat » est un dispositif national de solidaritÉ ambitieux qu’il convient de prÉserver

B. Un dispositif limitÉ par la faible couverture assurantielle des POPULATIONS ultramarinEs

C. Les assureurs doivent mieux rÉpondre aux besoins des HABITANTS des territoires ultramarins

III. Concilier Les impératifs du build back better avec les caractéristiques socio-économiques des territoires ultramarins

A. Faciliter la reprise de la vie économique

1. L’agriculture

2. Le tourisme

B. Mieux reconstruire

IV. À l’Échelle nationale, RENFORCER LE PORTAGE INTERMINISTÉRIEL DES POLITIQUES DE prévention et De GESTION DES RISQUES NATURELS MAJEURS en outre-mer

1. Reconstituer une délégation interministérielle aux risques naturels outre-mer

2. Le projet de loi sur les risques naturels outre-mer : une occasion manquée ?

les recommandations

examen en commission

contributions des groupes politiques et des députés

liste des personnes auditionnées  DéPLACEMENTS

I. LISTE DES PERSONNES AUDITIONNéES

II. déplacements

 


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« Du moment qu’une catastrophe est susceptible de se produire, elle aura lieu tôt ou tard. »

Haroun Tazieff nous parle... 1986

 

   AVANT-PROPOS DU PRÉSIDENT

Si la France dans son ensemble est confrontée à des risques majeurs, les collectivités ultra-marines présentent trois spécificités. Elles sont exposées à des aléas spécifiques par leur nature (cyclones, volcanisme) ou leur ampleur (séisme, tsunamis, submersion marine). Elles peuvent être exposées à des phénomènes atypiques, comme la prolifération des algues sargasses aux Antilles. Enfin, les risques pour les populations sont exacerbés sous l’effet d’une concentration urbaine sur le littoral et d’une forte vulnérabilité du bâti accentuée par le recul du trait de côte, ce dernier étant amplifié par le changement climatique. Les territoires ultramarins par leur éloignement, leur insularité (à l’exception de la Guyane), leur environnement régional faiblement interconnecté sont plus vulnérables, moins aisés à protéger et à secourir, ce qui place les 2,6 millions de Français vivant en outre-mer face à des périls majeurs. C’est donc naturellement que la Représentation nationale, dans son ensemble, avait vocation à examiner la situation des outre-mer en matière d’exposition aux risques naturels, à exercer ses prérogatives de contrôle et d’évaluation de l’action du Gouvernement et à formuler des propositions d’amélioration de la protection de nos compatriotes ultramarins et de réponse collective en cas de survenue d’une catastrophe naturelle.

À l’initiative du groupe LFI‑NUPES, une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’Outre-mer (n° 1714 rectifiée) a été inscrite à l’ordre du jour par la Conférence des présidents du 8 novembre 2023. Plusieurs amendements ont été adoptés par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, puis en séance publique le 30 novembre 2023. Ils ont eu pour effet d’élargir le champ de la commission d’enquête, en supprimant la référence exclusive à la gestion de l’État dans l’article unique ainsi que dans le titre et de substituer l’expression « d’outre-mer » à celle de « transocéaniques françaises ». L’Assemblée a ensuite adopté la proposition de résolution avec l’appui unanime des groupes d’opposition et les voix partagées des groupes de la majorité.

Le recours à un vote en séance publique, au lieu de l’usage du droit de tirage annuel dont disposent les groupes d’opposition, a permis de solenniser la procédure mais aussi d’établir l’organisation de la commission d’enquête selon les modalités classiques de mise en œuvre de l’article 51‑2 de la Constitution. Le 20 décembre 2023, la commission d’enquête s’est réunie pour constituer son bureau ; elle a ainsi élu M. Guillaume Vuilletet rapporteur, et en application de la règle qui veut que majorité et opposition se partagent la direction des travaux d’une commission d’enquête, elle m’a fait l’honneur de m’élire comme président. Considérant que la règle démocratique de l’élection n’avait de sens que si elle désignait président un de ses membres, les députés du groupe LFI‑NUPES ont décidé de démissionner de la commission, ce que je regrette aussi bien sur la forme que sur le fond compte tenu de l’importance du sujet examiné, notamment pour nos compatriotes des Antilles et de Guyane.

En cinq mois de travaux, nous avons consacré près de 60 heures pour conduire 46 auditions, qui nous auront permis d’entendre 160 personnes. La commission d’enquête a également envoyé une délégation en mission, à Mayotte et à La Réunion, où elles ont pu réaliser de nombreux entretiens et tables rondes.

Je veux ainsi d’abord saluer le travail considérable, réalisé par le rapporteur et les collègues qui se sont mobilisés, notamment les députés ultramarins de l’Atlantique, du Pacifique et de l’océan Indien.

De fait, toutes les auditions de la commission d’enquête ont été ouvertes et retransmises en direct et en différé sur le site de l’Assemblée, dans un souci de transparence et d’information de nos concitoyens ; elle n’a pas eu recours à la possibilité offerte de procéder à des auditions à huis clos, comme les textes applicables lui offrent la possibilité, même si l’examen du projet de rapport doit obligatoirement se faire hors champ des caméras.

Ces auditions ont été complétées par une mission de délégations de la commission d’enquête dans les territoires ultramarins concernés. Ces déplacements ont eu l’immense avantage de permettre une appréhension des réalités au plus près des territoires.

Élu d’un territoire qui a connu l’émergence récente d’un risque naturel majeur avec la découverte du volcan sous-marin Fani Maoré, je mesure l’urgence qu’il y a à renforcer toute la chaîne de prévention et de préparation, en partant de l’observation scientifique qui permet de modéliser les risques jusqu’à la résilience des réseaux qui permet d’assurer la continuité de la vie de nos concitoyens en cas de survenance d’un aléa.

Tout au long de ce travail, j’ai pu observer tant la grande détermination des différents services et des élus en charge de ces sujets, que la nécessaire humilité qu’il convient d’adopter pour faire face à la « force irrésistible » de la nature, « nature qui nous parle mais que nous n’écoutons pas » disait Victor Hugo.

Pour autant l’histoire nous rappelle aussi la nécessité de réagir vite et avec méthode à la suite d’un aléa majeur.

La complexité du sujet est illustrée par la coexistence de plusieurs facteurs spatio-temporels qui s’imposent à nous :

– le temps long des phénomènes volcaniques, les volcans pouvant rester en sommeil pendant plusieurs centaines d’années entre deux éruptions ;

– la récurrence des phénomènes cycloniques dans l’Atlantique nord dont la saison s’étend de juin à novembre ;

– les effets perturbateurs liés au réchauffement climatique et à El Niño.

Il reste toujours impossible de prévoir où, quand et avec quelle intensité un séisme surviendra.

Un des enseignements du travail de la commission réside dans la nécessité de prendre en considération le risque, sans doute plus prégnant avec le réchauffement climatique, de connaître des épisodes de cumul d’aléas naturels (par exemple une submersion après une secousse sismique ou une éruption volcanique) ou l’enchaînement d’un aléa naturel et d’un risque technologique (pollution chimique, déchets toxiques). Il s’agit là d’une lacune dans la préparation des pouvoirs publics concernés qui raisonnent le plus souvent en termes de mono aléa, comme le relève d’ailleurs le rapporteur.

Plus généralement, alors que nous constatons la multiplication des inondations, des tempêtes ou encore le recul du trait de côte dans l’hexagone, il convient de souligner les spécificités des territoires ultramarins qui induisent des effets multiplicateurs quant aux dégâts provoqués. Le manque de foncier qui conduit à construire près du rivage, le déficit d’infrastructures routières et d’entretien des ouvrages d’art, la plus grande fragilité des populations dont une grande proportion vit sous le seuil de pauvreté et explique le développement du logement informel, tous ces éléments, auxquels s’ajoute le plus souvent l’éloignement par rapport aux autres territoires et États voisins, impliquent d’apporter davantage de moyens en personnels, matériels scientifiques et ingénierie logistique à ces territoires.

Alors que le 3ème Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC‑3) est entré dans sa phase de consultation, nous devons également réfléchir sur la stratégie globale à adopter face aux risques naturels majeurs. Le concept de mitigation, c’est-à-dire d’atténuation, qui repose sur la mise en œuvre de mesures destinées à réduire les dommages associés à des risques est désormais associé à celui d’adaptation, qui a pour objectif d’anticiper les impacts à attendre du changement climatique, de limiter leurs dégâts éventuels en intervenant sur les facteurs qui contrôlent leur ampleur.

L’exercice d’une présidence de commission d’enquête a ceci de paradoxal qu’il s’agit d’introduire un rapport dont l’auteur est dans le camp politique opposé au sien. Cela n’empêche pas la qualité du travail commun et des relations personnelles. Je veux à ce titre, remercier tout particulièrement le rapporteur Guillaume Vuilletet qui a conduit nos travaux avec beaucoup de pugnacité et mis sa connaissance des réalités tant géographiques qu’économiques et institutionnelles ultramarines au service de nos collègues.

Je veux en définitive reconnaître le travail que nous avons fait en commun, saluer sa qualité. Nous devons en tant qu’élus de la Nation et en responsabilité, reconnaître l’importance des moyens mis en œuvre tant par les services de l’État, sous la houlette des deux ministres compétents que par les collectivités qui se sont emparées de cette compétence protéiforme, aussi bien que les manques en termes de matériels scientifiques (radars, capteurs), d’observation et de veille et, peut-être, de pilotage, tant la création d’une administration de mission sous la forme d’une délégation interministérielle aux risques majeurs outre-mer avait permis de donner l’impulsion et la réactivité indispensables pour faire face et éviter qu’un risque naturel majeur n’entraîne une catastrophe humaine.

Je me félicite que les recommandations du rapport portent sur l’ensemble du spectre d’action concernant les risques naturels majeurs outre-mer, qu’il s’agisse des connaissances scientifiques, de la prévention, de la planification, du pilotage, de l’encadrement législatif et réglementaire et de la gestion de crise.

Enfin, en marge des travaux, nous avons perçu la nécessité de développer une réflexion, d’une part, sur la coopération et l’intégration régionale en matière de sécurité civile et sur un risque naturel majeur potentiellement dévastateur pour nos territoires ultramarins dans l’effondrement actuel de leur importante biodiversité, d’autre part.

Déjà en 1970, le président Georges Pompidou déclarait que « l’emprise de l’homme sur la nature est devenue telle qu’elle comporte le risque de destruction de la nature elle-même. Il est frappant de constater qu’au moment où s’accumulent et se diffusent de plus en plus les biens dits de consommation, ce sont les biens élémentaires les plus nécessaires à la vie, comme l’air et l’eau, qui commencent à faire défaut ». Assurément la Représentation nationale sera amenée à poursuivre ultérieurement des travaux sur ce point critique.

 

Mansour Kamardine

Député de Mayotte

Président de la commission d’enquête

 


   introduction

L’Assemblée nationale adoptait, le 30 novembre 2023, une proposition de résolution créant la présente commission d’enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’outre-mer. Les inondations qui ont frappé récemment et de façon dramatique Porto Alegre au Brésil illustrent l’actualité de ses travaux à l’heure où le changement climatique et les risques naturels se conjuguent de façon brutale et rapide.

Les risques naturels résultent de l’exposition de personnes, de biens, d’équipements ou d’activités humaines à des phénomènes naturels aléatoires tels qu’un séisme ou un cyclone ; ils sont considérés comme « majeurs » lorsque les dégâts matériels causés sur le territoire et le nombre de victimes humaines sont particulièrement importants. Le volcanologue et ancien secrétaire d’État chargé de la prévention des risques naturels et technologiques majeurs en outre‑mer, M. Haroun Tazieff, définissait le risque majeur comme « [une] menace sur l’homme et son environnement direct, sur ses installations, [une] menace dont la gravité est telle que la société se trouve absolument dépassée par l’immensité du désastre. » Incertains et aléatoires, les risques majeurs peuvent être insuffisamment présents à l’esprit au quotidien, rendant ainsi la sensibilisation des populations et la mise en œuvre régulière d’exercices de simulation absolument nécessaires afin de limiter le plus possible les conséquences de la survenance, ou parfois du surgissement, d’un tel aléa.

Les territoires ultramarins sont spécifiquement concernés par ces évènements, d’une part, du fait de leur forte exposition à des aléas naturels multiples et souvent plus dévastateurs que ceux susceptibles de frapper l’hexagone et, d’autre part, en raison de vulnérabilités accrues en lien avec des facteurs géographiques, environnementaux et socio-économiques, au premier rang desquels la concentration des habitations et des activités essentielles sur les littoraux et la prégnance des situations de mal-logement et de l’habitat informel.

Les trois océans sont en effet régulièrement concernés par des aléas naturels de type météorologique et hydrologique – cyclones en particulier et telluriques – éruptions volcaniques, séismes, tsunamis, mouvements de terrain. Ainsi la période récente en outre-mer a été marquée par les cyclones Irma et Maria en 2017 aux Antilles, Belal à La Réunion en janvier 2024 et Oli en 2010 en Polynésie française. L’activité cyclonique en outre-mer se cumule à des épisodes météorologiques extrêmes fréquents (fortes pluies, orages et phénomènes associés – inondations, submersions, etc.) et des mouvements de terrain, comme cela a été le cas en Martinique dans le Nord‑Atlantique en 2020. Il est également à noter que les quatre volcans français actifs, tous situés outre‑mer, sont actuellement placés en « Vigilance jaune » du fait d’épisodes d’activation récents.

Les travaux de la commission d’enquête ont visé à évaluer l’efficacité des politiques de prévention et de gestion des risques naturels majeurs dans ces territoires particulièrement exposés et vulnérables. Cette problématique s’impose avec d’autant plus d’acuité aujourd’hui, que les conséquences du changement climatique touchent fortement les outre‑mer et constituent des facteurs d’aggravation des dégâts et des coûts potentiels des aléas naturels à venir. Elle est abordée dans le présent rapport en quatre temps que sont la connaissance des risques naturels majeurs, leur prévention, leur gestion opérationnelle et enfin, les enjeux post-crise liés à la reconstruction.

Pour mener à bien ce travail, le rapporteur a auditionné pas moins de 160 personnes au cours de 46 auditions et tables rondes : des experts et chercheurs de diverses disciplines et spécialistes des risques naturels, des représentants des principaux établissements chargés de l’observation et de la surveillance des risques (Météo‑France, Institut physique du globe de Paris, Observatoires volcanologiques et sismologiques, Bureau de recherches géologiques et minières notamment), des associations d’élus, de protection civile (comme la Croix-Rouge française), des représentants des forces armées en outre‑mer, du système de santé (agences régionales de santé, centres hospitaliers), du secteur du logement, du secteur des assurances ainsi que des opérateurs de réseaux.

Les spécificités de chaque territoire ont pu être appréhendées à travers des tables rondes auxquelles ont participé les préfets, les services de l’État, les services d’incendie et de secours ainsi que des représentants des collectivités et d’associations locales. La commission d’enquête a clôturé ses travaux en auditionnant l’ancienne délégation interministérielle aux risques majeurs outre‑mer (Dirmom), les administrations centrales en charge de la gestion et de la prévention des risques naturels, ainsi que les ministres de l’intérieur et des outre-mer, de la transition écologique et de la cohésion des territoires, MM. Gérald Darmanin et Christophe Béchu.

Du 26 au 29 mars 2024, le président et le rapporteur de la commission d’enquête se sont également rendus à Mayotte et à La Réunion pour s’entretenir avec les acteurs locaux et observer la préparation et, le cas échéant, les conséquences des risques naturels. Récemment touchée par un cyclone majeur, Belal, La Réunion s’est imposée comme un déplacement nécessaire. Il a permis au rapporteur de constater qu’avec une préparation et une gestion optimales de la part de l’ensemble des acteurs concernés, les pouvoirs publics locaux étaient en capacité de répondre efficacement à un tel risque naturel. À Mayotte, la naissance d’un volcan sous-marin ressentie à partir du mois de mai 2018 a particulièrement mobilisé l’attention de la commission d’enquête. À l’issue de son déplacement, le rapporteur conclut que la préparation de ce territoire aux risques naturels majeurs et tout particulièrement à ce nouveau risque volcanique doit être renforcée.

Les travaux de la commission d’enquête ont d’abord permis de souligner l’impact du changement climatique sur l’évolution des aléas climatiques ([1]) et de la vulnérabilité des territoires ultramarins. Les projections climatiques disponibles prédisent en effet, en lien avec l’augmentation des températures, des modifications du régime des précipitations, des risques accrus de sécheresse et d’incendie ainsi qu’une augmentation du nombre d’ouragans d’extrême intensité (de catégories 4 et 5) ([2]).

L’élévation du niveau de la mer, particulièrement rapide dans l’océan Indien, majore la vulnérabilité des zones littorales en raison des risques de submersion marine (en cas de cyclone ou de tsunami mais aussi en conditions météorologiques calmes, en Guyane ([3]) et en Polynésie notamment) et en accélérant l’érosion du trait de côte. L’étude récemment publiée par le Cerema confirme le risque accru d’érosion côtière en outre-mer, en particulier en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane ([4]).

Si le recul du trait de côte n’est pas appréhendé dans les politiques publiques actuelles comme un risque naturel majeur, ce phénomène est étroitement lié en outre-mer aux risques de submersion marine ; il est notamment susceptible de majorer les dégâts causés par un ouragan ou un tsunami sur les zones littorales. Dans cette perspective, le rapporteur recommande d’accélérer la mise en œuvre des outils prévus par la loi « climat et résilience » ([5]) en outre-mer et d’intégrer au projet de loi de finances pour 2025 un dispositif financier dédié à la lutte contre l’érosion côtière (recommandations nos 1 et 2). De nouveaux phénomènes, comme les échouements d’algues sargasses aux Antilles, ne sont également pas considérés comme des risques naturels. Le phénomène, dont les causes demeurent méconnues, impacte lourdement les écosystèmes des territoires concernés et nécessite un accompagnement renforcé (recommandations nos 3 et 4).

Historiquement, alors que les politiques d’adaptation au changement climatique ont un rôle à jouer dans la diminution de la vulnérabilité des territoires ultramarins aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux risques associés (à travers par exemple, des projets de relocalisation d’habitats ou de restauration des écosystèmes côtiers), celles‑ci prennent insuffisamment en compte les risques naturels majeurs. Il est absolument nécessaire que la prochaine stratégie nationale d’adaptation au changement climatique (PNACC‑3) intègre un volet ambitieux dédié à la prévention des risques naturels majeurs en outre-mer (recommandation n° 6).

Dans un contexte marqué par l’incertitude liée au changement climatique, les missions de surveillance et de prévision des phénomènes naturels majeurs sont essentielles ; elles sont assurées par un écosystème d’acteurs dont la qualité des travaux, à l’interface de la recherche et des pouvoirs publics, est reconnue. Toutefois, des investissements demeurent nécessaires pour garantir un haut niveau de prévision en outre-mer, en particulier concernant : la fourniture de projections à haute résolution sur le changement climatique (recommandation n° 8), le déploiement des cartes de vigilances « vagues‑submersion » et « canicule » et d’équipements d’observation assuré par Météo‑France (recommandations nos 7 et 9) et les moyens alloués à l’Institut physique du globe de Paris (IPGP) pour l’exercice de ses missions de surveillance des risques sismologiques et volcanologiques (recommandation n° 12).

En matière de prévention des risques naturels majeurs, le rapporteur constate que les politiques publiques concernées se déploient inégalement d’un territoire à l’autre et demeurent trop souvent reléguées au second plan par rapport à d’autres priorités d’aménagement des territoires. Certains territoires ne sont notamment pas, ou trop faiblement, couverts par des plans de prévention des risques naturels (PPRN) ([6]). C’est le cas de la Guyane, de Mayotte, de la Polynésie française (dans l’attente d’une réforme en cours), de Wallis-et‑Futuna et de la Nouvelle‑Calédonie. Dans les territoires les mieux dotés, comme en Guadeloupe et en Martinique, les plans sont en cours d’actualisation mais n’intègrent donc pas encore les évolutions liées au changement climatique ni les données démographiques et socio‑économiques récentes. Leur révision est urgente et doit notamment prendre en compte le vieillissement des populations et l’augmentation des situations de fragilité sociale. Nous verrons dans le développement de ce rapport qu’il y a parfois le sentiment d’un arbitrage entre l’urgence sociale et la réalité des risques naturels.

De manière générale, ces plans sont faiblement appropriés par la population, voire perçus comme excessivement contraignants ; leur efficacité apparaît également limitée dans les quartiers d’habitat informel. Le rapporteur recommande de simplifier les procédures d’élaboration, de modification et de révision des PPRN et de favoriser leur appropriation par la population en les rendant accessible au public en ligne sous un format pédagogique (recommandations nos 13 et 14).

Devenu la principale source de financement de la politique nationale de prévention des risques naturels majeurs, le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM dit « fonds Barnier ») bénéficie inégalement aux territoires ultramarins et demeure sous-mobilisé hors du cadre du plan séisme Antilles (PSA) qui représente plus de 80 % des financements alloués à l’outre-mer. Un rééquilibrage est absolument nécessaire : le fonds Barnier doit intégrer tous les risques naturels et mettre à disposition des territoires ultramarins des financements proportionnels aux enjeux.

Les critères stricts d’éligibilité au fonds, le manque d’ingénierie, la complexité des montages financiers continuent de freiner le recours au fonds par les collectivités ultramarines mais aussi par les particuliers et les entreprises (recommandation n° 24). En particulier, alors même que le développement important de l’habitat informel dans les zones exposées aux risques est susceptible de faire peser des menaces graves pour les vies humaines, le fonds n’est pas mobilisé pour financer ces interventions urgentes. L’accompagnement des services de l’État et des collectivités est nécessaire pour assurer une mise en œuvre effective de la loi « Letchimy » ([7]) ; le rapporteur recommande de mobiliser au moins 5 % des financements du fonds Barnier en outre-mer à l’habitat informel contre moins de 1 % aujourd’hui (recommandation n° 19).

Le rapporteur salue toutefois les évolutions récentes du fonds, en particulier son intégration au budget général de l’État depuis 2021 et l’augmentation de ses ressources - à hauteur de 225 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2024 – qui a globalement bénéficié à l’outre‑mer (20 % des dépenses du fonds entre 2021 et 2023).

Aux Antilles, le fonds Barnier aura permis d’engager des opérations notables pour réduire la vulnérabilité du bâti public prioritaire dans le cadre des plans séismes Antilles 1 et 2 (2007‑2019). Des travaux d’ampleur restent toutefois à mener pour sécuriser la population antillaise : tant en Guadeloupe qu’en Martinique, plus de la moitié des élèves du premier degré et du second degré sont scolarisés dans des établissements ne répondant pas aux normes parasismiques.

La troisième phase du PSA (2021‑2027) fixe des objectifs ambitieux et conforte les moyens alloués au plan. Le soutien à la maîtrise d’ouvrage des projets (recommandation n° 20) ainsi que la formation des professionnels de la construction demandent néanmoins à être confortés pour atteindre les objectifs ciblés. Le rapporteur recommande également d’intégrer activement au plan la nouvelle réglementation paracyclonique en cours de définition (recommandations nos 21 et 22) ainsi qu’une stratégie de réduction de la vulnérabilité du bâti privé (recommandation n° 23).

En matière de prévention par l’information, l’éducation et la sensibilisation des populations, les travaux de la commission d’enquête auront permis de souligner la prégnance d’une « culture du risque » en outre-mer ainsi que la multiplicité des projets et des acteurs engagés dans son développement. Le rapporteur salue à ce titre le succès de la dernière édition de la Journée nationale de la résilience en outre-mer, le déploiement récent d’une première campagne d’information sur les pluies intenses ainsi que les multiples initiatives locales (comme par exemple, le projet « Paré pas Paré » dans les écoles de La Réunion). Ces actions sont essentielles à l’adoption des comportements et des gestes qui sauvent en cas de crise et doivent cibler davantage les publics les plus vulnérables et les plus éloignés des politiques publiques de prévention des risques (recommandation n° 25).

Dans un troisième temps, en matière de gestion des crises liées aux événements naturels majeurs, les travaux de la commission d’enquête ont permis de constater l’existence d’une culture à la fois traditionnelle et partagée de la préparation et de la réponse opérationnelle en outre-mer. Toutefois, le rapporteur note que tous les territoires ne sont pas également préparés à la survenue de telles crises. Si certains territoires semblent aptes à leur apporter une réponse robuste, d’autres apparaissent plus fragiles. Le cas échéant, cette fragilité, accentuée par les vulnérabilités propres et plus ou moins nombreuses de chaque territoire, pourrait entraîner un coût important, tant matériel qu’humain. Pour autant, le rapporteur tient à souligner qu’une égale préparation n’implique pas une préparation uniforme en raison des spécificités propres à chaque territoire et qu’au contraire, les risques naturels requièrent une préparation adaptée à chacun et par conséquent différenciée.

Ainsi, les plans ORSEC comme les plans communaux de sauvegarde se sont avérés hétérogènes d’un territoire à l’autre, rendant nécessaires la transmission de règles de rédaction communes, l’identification et le recrutement d’agents formés et l’appui aux services déconcentrés de l’État et des collectivités (recommandations nos 27, 29, 30 et 31). Le rapporteur souligne aussi l’urgence à mieux intégrer dans ces documents l’hypothèse d’un « big one » ou de la conjonction d’événements et à s’y exercer (recommandation n° 32). De même, les moyens de sécurité civile mobilisables en temps de crise, tout comme ceux du système de santé, restent disparates et, en moyenne, inférieurs à ceux observés dans l’hexagone, qu’il s’agisse des agents disponibles ou des moyens matériels. À ce titre, le rapporteur préconise d’accroître le nombre de sapeurs-pompiers volontaires en outre-mer, en sensibilisant notamment les plus jeunes (recommandation n° 37), ainsi que de poursuivre et, le cas échéant, corriger le déploiement des sirènes ou du dispositif FR‑Alert (recommandation n° 39). De même, il propose que le fonds exceptionnel d’investissement puisse être utilisé pour améliorer l’équipement des services d’incendie et de secours (recommandation n° 38). Le rapporteur souligne également la singularité des territoires du Pacifique en matière d’organisation et de gestion de la sécurité civile. Dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile, des voies d’amélioration pourraient utilement être identifiées (recommandation n° 40).

Au-delà de ces nécessaires améliorations, des éléments robustes ont été constatés au cours des travaux de la commission d’enquête. La gouvernance de la gestion de crise, qui a été saluée par les élus auditionnés, a fait preuve de son efficacité à de nombreuses reprises. Par ailleurs, la doctrine française qui vise à prépositionner des moyens de manière limitée en outre-mer, et à projeter des moyens hexagonaux, en amont ou en aval d’un évènement naturel, apparaît répondre de manière optimale aux exigences de crise. Les forces armées représentent à ce titre un concours indispensable et expérimenté à la gestion des événements naturels majeurs.

De même, malgré une coordination complexe, les coopérations régionales peuvent être d’un grand secours, à l’image des plateformes d’intervention régionale de la Croix-Rouge. Il convient de mieux les formaliser et les animer (recommandation n° 43). Enfin, la gestion des risques naturels majeurs ne se limite pas aux actions et moyens engagés par les pouvoirs publics, les services de l’État comme ceux des collectivités. Elle est, bien au contraire, l’affaire de tous, population, associations, opérateurs, acteurs socio-économiques. À ce titre, le rapporteur tient à souligner la grande qualité des documents et exercices de préparation qu’il a pu observer sur le terrain. Il en va ainsi de la préparation aux risques naturels de l’aéroport de Dzaoudzi ou de la préparation et la réponse à un événement cyclonique d’ampleur d’EDF à La Réunion qui semblent être parfaitement adaptées aux enjeux. Il recommande de les généraliser aux opérateurs de transport, d’énergie ou de télécommunication dans l’ensemble des territoires ultramarins (recommandations nos 44, 45, 46 et 47).

Deux exemples récents de gestion des risques naturels majeurs que sont celles de l’ouragan Irma en 2017 à Saint-Barthélemy et Saint-Martin et du cyclone Belal à La Réunion en 2024 ont été particulièrement étudiés par la commission d’enquête. Parmi les nombreux constats réalisés à l’occasion de ces deux crises, le rapporteur souhaite mettre l’accent sur deux d’entre eux : en 2017, dans le cadre de la gestion d’Irma, malgré une anticipation réelle au regard des précédents disponibles, l’État n’a pu éviter les conséquences majeures de l’ouragan ; en 2024, dans le cadre du cyclone Belal, c’est grâce à une préparation et une adaptation constantes au risque cyclonique, à une prévision extrêmement fiable du phénomène et à des décisions adaptées et proportionnées des services de l’État, sous l’autorité du préfet, que la gestion de cette crise a été exemplaire. À ce titre, le rapporteur rappelle que les retours d’expérience, et particulièrement les enseignements de ces deux crises, sont indispensables à l’amélioration de la préparation et de la gestion des crises futures.

Dans un quatrième temps, le rapporteur a tenu à aborder la période de la reconstruction qui constitue un temps crucial de la gestion d’un événement naturel majeur dès lors que l’urgence absolue est considérée comme terminée. Processus complexe, reposant sur l’histoire du territoire et ses structures sociale, politique, économique et culturelle, la phase de reconstruction nécessite un grand nombre d’actions, qui doivent être mises en œuvre dans un temps très contraint tout en s’efforçant de concilier des impératifs nombreux et parfois contradictoires.

Si les pouvoirs publics, la population et les acteurs économiques aspirent à un retour à la normale le plus rapide possible, le rapporteur invite à intégrer les impératifs du build back better, c’est‑à‑dire de reconstruire en mieux. Les auditions de la commission d’enquête comme le déplacement à La Réunion ont mis en exergue l’importance d’un suivi et d’un soutien aux territoires ultramarins touchés par un événement naturel aussi longtemps que nécessaire, le cas échéant au travers de l’envoi de personnels venus de l’hexagone pour renforcer les cellules interministérielles chargées de la reconstruction (recommandation n° 52). Plus particulièrement, un tel soutien est indispensable aux acteurs économiques sur le temps long, particulièrement aux secteurs essentiels à l’économie des territoires comme le tourisme ou l’agriculture (recommandation n° 51), en ayant recours à des solutions innovantes et vernaculaires. Au-delà de la coordination et de l’appui aux territoires, le rapporteur insiste sur la nécessaire conciliation entre la simplification des procédures pour permettre de reconstruire au plus vite et le respect de normes en matière de préventions des risques naturels. Il appelle ainsi à la mise en œuvre, sous le contrôle du représentant de l’État, d’un droit temporaire à la dérogation aux lois et règlements en vigueur dans certains domaines, comme celui des marchés publics, en le conditionnant au respect desdites normes (recommandation n° 53). Par ailleurs, le transfert temporaire à l’État de certaines compétences dévolues aux départements, régions ou collectivités d’outre-mer peut avoir des effets positifs pour la reconstruction, à condition qu’il s’effectue en concertation avec les collectivités concernées (recommandation n° 54).

Les travaux de la commission d’enquête ont rappelé l’insuffisante couverture assurantielle des territoires ultramarins. En effet, le taux de souscription à l’assurance multirisques habitation s’élève seulement à 6 % à Mayotte, à 68 % à La Réunion, pour un taux hexagonal s’établissant à 97 % en 2017. Problématique pour la couverture des habitants ultramarins face aux risques classiques ainsi qu’à certains risques tels que les tempêtes, ce faible recours l’est d’autant plus qu’il leur interdit l’accès au régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, dit régime Cat Nat. Reposant sur un principe de solidarité nationale au travers d’une surprime payée l’ensemble des assurés, le régime Cat Nat permet aux particuliers, aux entreprises et aux collectivités d’être indemnisés en cas de situation déclarée « catastrophe naturelle ». Face à la multiplication de ces situations et du nombre de sinistres concernés, le rapport insiste sur la nécessité à conforter ce régime. Dans cette optique, l’augmentation du taux de surprime de 12 % à 20 % au 1er janvier 2025 apparaît pertinente. Le rapporteur recommande également, dans la lignée des rapports de l’IGF ([8]) et de la mission Langreney ([9]) d’organiser des concertations à échéances régulières pour identifier les adaptations souhaitables du régime (recommandation n° 48). Il préconise la mise en œuvre urgente d’incitations fortes au recours à l’assurance dans les territoires ultramarins les plus concernés, et ce, de manière concertée entre les pouvoirs publics, les assurances et les tiers intéressés (recommandation n° 50). Dans ce cadre, une attention particulière pourrait être portée à l’universalité de l’offre d’assurance, notamment pour qu’aucun bâtiment légalement construit ne soit ignoré par les assureurs, par exemple en raison de la méconnaissance ou de la fragilité des assurés potentiels. S’agissant des constructions ne respectant pas le cadre légal et réglementaire, un accompagnement des populations concernées par les acteurs de l’assurance et du bâtiment pourrait leur être proposé (recommandation n° 51).

 

Pour établir ces constats et recommandations concernant la période de reconstruction, le rapporteur s’est particulièrement appuyé sur les enseignements tirés de la reconstruction de Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Sept ans après Irma, il n’a pu que constater que la reconstruction s’y était faite différemment d’une île à l’autre et regretter qu’elle n’y était pas toujours achevée.

Enfin, à l’issue de six mois de travaux de la commission d’enquête, l’ensemble des recommandations formulées par le rapporteur appellent, selon le rapporteur, un portage interministériel de haut niveau pour être mises en œuvre. Pour ce faire, le rapporteur préconise de reconstituer une délégation interministérielle aux risques naturels outre-mer (recommandation n° 55). Sa reconstitution permettrait en outre d’assurer la mise en œuvre ou le suivi des dispositions contenues dans le projet de loi qu’avait un temps envisagé le Gouvernement et qui, pour certaines d’entre elles, ont d’ores et déjà été adoptées. Le cas échéant, il pourrait être nécessaire de légiférer.

 


   première Partie : Mieux connaître les risques naturels
dans le contexte du changement climatique
pour mieux les anticiper

  1.   Des territoires particulièrement vulnérables aux risques naturels majeurs

A.   un cumul de facteurs de vulnérabilité

L’existence d’un risque résulte de la conjonction entre la survenue d’un « aléa » d’origine naturelle et la « vulnérabilité » propre d’un territoire et des populations qui y sont exposés. Autrement dit, il n’y a pas lieu de parler de « risque » sur une zone vierge de toute activité humaine qui serait pourtant régulièrement touchée par des événements naturels comme une tempête ou un séisme. Le risque se mesure ainsi autant à la fréquence et l’intensité des aléas naturels potentiels qu’au regard des caractéristiques sociales, géographiques, économiques et environnementales des territoires.

Il est qualifié de majeur lorsque les dégâts causés sur le territoire et le nombre de victimes sont particulièrement importants. Le volcanologue et ancien secrétaire d’État chargé de la prévention des risques naturels et technologiques majeurs en outre-mer, M. Haroun Tazieff, définissait le risque majeur comme « [une] menace sur l’homme et son environnement direct, sur ses installations, [une] menace dont la gravité est telle que la société se trouve absolument dépassée par l’immensité du désastre. » Le risque majeur présente ainsi la spécificité d’être relativement peu fréquent tout en emportant des conséquences particulièrement graves et décisives pour l’avenir d’un territoire et de ses populations. Lointain et incertain, il peut être sous-estimé, négligé et insuffisamment préparé.

Les territoires ultramarins présentent la spécificité de cumuler une forte exposition à tous les types d’aléas naturels majeurs : cyclones, inondations, submersion marine, mouvements de terrain, éruptions volcaniques, séismes, tsunamis, feux de forêts, etc., à l’exception du risque d’avalanches. L’histoire et la mémoire de ces territoires sont marquées par des événements naturels majeurs comme l’éruption de la Montagne Pelée en 1902 et la tempête tropicale Dorothy en 1970 en Martinique, l’éruption de la Soufrière en 1976 en Guadeloupe ([10]), le cyclone Orama en 1983 en Polynésie, l’ouragan Hugo en 1989 et plus récemment le séisme des Saintes en 2004 en Guadeloupe, le cyclone Irma à Saint‑Martin et Saint‑Barthélemy en 2017 ou encore le cyclone Belal à La Réunion en 2024.

Outre leur exposition régulière à des aléas naturels d’ampleur, les territoires ultramarins se caractérisent par des caractéristiques qui majorent d’autant plus leur vulnérabilité. Peuvent être cités de manière générale :

– des facteurs topographiques et géographiques : l’insularité (à l’exception de la Guyane), de petites superficies utiles et un éloignement géographique de l’hexagone voire des pays voisins, des reliefs pouvant être escarpés et contraints ;

– des facteurs humains : de fortes densités de population avec une concentration des habitations, des biens et des activités essentielles (ports, aéroports, axes routiers majeurs, sites de production électrique et d’eau, zones industrielles, centres décisionnels, etc.) dans les zones littorales qui sont également les zones les plus exposées aux aléas naturels majeurs ;

– des facteurs socio-économiques : les situations de précarité, de sous‑assurance ([11]), la prégnance des problématiques de mal-logement, la persistance du développement de l’habitat spontanée, indigne et informel, en particulier à Mayotte et en Guyane, mais aussi en Martinique et en Guadeloupe, dans des zones à risques majorent considérablement la vulnérabilité des populations et des territoires concernés ;

– des facteurs d’équipements et d’aménagement : les bâtiments ne répondent pas toujours aux normes de sécurité face aux aléas naturels et les contraintes topographiques de la plupart des territoires ultramarins concentrent les populations sur un foncier réduit, souvent proche des littoraux ;

– des facteurs environnementaux : l’Office français de la biodiversité (OFB) a rappelé à ce titre la richesse des espèces endémiques présentes en outre‑mer ainsi que la diversité des écosystèmes ultramarins, terrestres et marins (forêts, récifs coralliens, mangroves, etc.) et leur vulnérabilité dans le contexte du changement climatique ([12]).

B.   Une exposition à des aléas multiples et spécifiques

1.   Les aléas météorologiques, climatiques et hydrologiques

Du fait de leur position géographique, leur climat et leur insularité, les territoires ultramarins sont fortement exposés aux aléas météorologiques d’ampleur, en particulier les cyclones et leurs phénomènes associés (vents, houle, pluies torrentielles, inondations, submersion marine et glissements de terrain) ainsi que les épisodes pluvieux et orageux qui engendrent également des risques pour la population (inondations, crues soudaines, ruissellements, glissements de terrain, etc.).

M. Emmanuel Cloppet, directeur interrégional « Antilles-Guyane » à Météo-France, a rappelé qu’à l’échelle mondiale, les cyclones tropicaux constituent l’un des aléas les plus destructeurs ayant causé 780 000 décès et 1 400 milliards de dollars de pertes économiques d’après l’Organisation météorologique mondiale ([13]). Le potentiel dévastateur du risque cyclonique se retrouve dans les données de la sinistralité ([14]) en outre-mer : 91 % de la sinistralité cumulée depuis 1982 y est ainsi due aux vents cycloniques, 6 % aux séismes et 3 % aux mouvements de terrain. Par comparaison, à l’échelle nationale, celle-ci est principalement liée aux inondations (49 %), aux sécheresses et aux risques causés par le retrait-gonflement des argiles ([15]) (42 %).

a.   Aux Antilles, « Irma », « Maria » et « Hugo » ont marqué la mémoire collective

Dans le bassin de l’Atlantique Nord, la saison cyclonique est comprise entre juin et novembre ; chaque année, une quinzaine de systèmes dépressionnaires (tempêtes ou ouragans) y est enregistrée. Les petites Antilles, en particulier le Nord de l’arc antillais, sont particulièrement touchées ([16]) :

– depuis 1995, 21 cyclones dont 11 ouragans sont ainsi passés à moins de 100 kilomètres des côtes de Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Jusqu’à « Irma » en septembre 2017, aucun ouragan de catégorie 5 n’avait cependant traversé une terre habitée des petites Antilles. De par son extrême intensité (rafales de vent supérieures à 350 kilomètres par heure, maintien pendant 75 heures en catégorie 5), « Irma » constitue l’événement de référence pour l’Atlantique Nord et l’ensemble des territoires français qui n’avaient jamais connu d’épisode cyclonique de cette intensité (intensité des vents mais aussi hauteurs de vague jusqu’à 9 mètres, surcote de plus de 3 mètres par rapport au niveau de la mer, pluies extrêmes, inondations, etc.). Le rapporteur a souhaité largement aborder cette crise lors de ses auditions ; le présent rapport en fait le bilan et en tire plusieurs recommandations.

Au cours des trente dernières années, Saint-Martin et Saint-Barthélemy ont également connu d’autres ouragans majeurs et notamment : Luis (septembre 1995, catégorie 4), Georges (septembre 1998, catégorie 3), Lenny (novembre 1999, catégorie 4), Omar (octobre 2008, catégorie 4) et Earl (septembre 2010, catégorie 3) ;

– en Guadeloupe, depuis 1995, 26 cyclones sont passés à moins de 100 kilomètres des côtes dont six ouragans. « Maria » (catégorie 5), en septembre 2017, constitue l’événement de référence sur la période récente avec des rafales de vent supérieures à 200 kilomètres par heure, plus de 400 millimètres de précipitations en 24 heures en Basse-Terre et des submersions importantes. C’est toutefois l’ouragan « Hugo », en septembre 1989, qui a marqué la mémoire collective par l’ampleur des dégâts qu’il a causés sur tout l’archipel.

Plus récemment, la Guadeloupe a connu trois vigilances « rouge » pour fortes pluies et orages en lien avec le passage de systèmes dépressionnaires à côté de l’archipel (Fiona en septembre 2022, Philippe et Tammy en octobre 2023) ;

– la Martinique a été, comparativement aux territoires voisins, moins menacée dans son histoire récente. Depuis 1995, 21 cyclones dont trois ouragans ont été néanmoins enregistrés à moins de 100 kilomètres de ses côtes. Le dernier impact direct d’un ouragan sur l’archipel remonte à septembre 2007 (« Dean ») avec des dégâts considérables estimés à 400 millions d’euros.

Dans l’ensemble des petites Antilles, des épisodes de fortes pluies sont également fréquents en toute saison. Les épisodes récents les plus intenses ont été enregistrés en novembre 2020 en Martinique (522 millimètres à Sainte‑Marie) et le 6 novembre 2022 sur toutes les îles du nord de l’arc antillais.

b.   À Mayotte et à La Réunion, l’activité cyclonique se conjugue à des épisodes réguliers de fortes pluies et d’orage

Douze cyclones tropicaux ont été enregistrés à moins de 300 kilomètres de Mayotte depuis 1976 dont trois épisodes entre 2014 et 2019 (Hellen en 2014, Kenneth en 2019 et Belna en 2019 qui a fait l’objet d’une alerte rouge). Mayotte est également impactée de façon récurrente par des épisodes d’orage et de fortes pluies pouvant être dangereux par effets induits (glissements de terrain) ainsi que plus récemment, dans le contexte du changement climatique, par des phénomènes de submersion marine en période de grandes marées et des épisodes de sécheresses (en 2016-2017 et 2022-2023 notamment).

À La Réunion, la période cyclonique s’étend de décembre à avril. Sur les vingt-cinq dernières années, seize cyclones et tempêtes ont été enregistrés à proximité de l’île ; le dernier en date étant le cyclone « Belal » du 14 au 16 janvier 2024 avec des rafales de vent mesurées entre 150 et 217 kilomètres par heure et un cumul moyen de pluies de 520 millimètres en 24 heures. La Réunion n’avait pas connu de cyclone de cette ampleur depuis « Dina » en 2002. Les épisodes de fortes pluies et d’orage peuvent également prendre des proportions importantes à La Réunion et provoquer des inondations. Le département détient notamment le record mondial de précipitations respectivement pour les périodes de 12 heures et de 15 jours (1 144 millimètres en 12 heures et 6 083 millimètres en 15 jours).

c.   Dans le Pacifique sud, des épisodes « El Niño » redoutés

L’activité cyclonique est plus faible sur le bassin polynésien avec en moyenne moins d’un cyclone par an sur ces cinquante dernières années : depuis 1970, 23 cyclones, 16 dépressions tropicales fortes et 11 dépressions modérées ont été enregistrés ([17]).

L’activité cyclonique est notamment très liée aux épisodes « El Niño » dont les plus intenses se sont produits en 1982-1983 et 1997-1998 (cyclones Osea et Martin). L’événement qui reste en mémoire chez les Polynésiens est le cyclone « Orama » (20 au 28 février 1983) qui a été particulièrement intense (avec un vent moyen maximum de 228 kilomètres par heure et des rafales de vent supérieures à 280 kilomètres par heure). Ce cyclone a causé un décès et cinq disparus dans le naufrage d’une petite goélette. Le dernier cyclone qui a touché les îles polynésiennes est le cyclone « Oli » du 29 janvier au 7 février 2010 qui a notamment occasionné des dégâts importants sur l’île de Tubuai (un décès, 150 à 200 maisons détruites, des coupures des réseaux d’eau et d’électricité et des routes très endommagées).

Outre le risque cyclonique, la Polynésie est également exposée à des épisodes des fortes houles et de fortes pluies. Récemment, du 12 au 14 juillet 2022, les Australes, la Société, les Tuamotu et les Gambier ont été touchés par de fortes houles (jusqu’à 5 à 6 mètres aux Australes avec des déferlantes hautes de plus de huit mètres). Les Australes ont été particulièrement impactées avec des dégâts importants sur la route littorale. De nombreuses habitations du trait de côte ont été inondées à la Société. Sur l’île de Tahiti, le 23 mai dernier, Météo-France a enregistré un record d’intensité en volumes de précipitations en deux heures (159,2 millimètres, soit 90 % de la quantité mensuelle de pluie enregistrée en moyenne en mai) ([18]).

La Nouvelle-Calédonie est régulièrement exposée à des cyclones et des épisodes de vents violents et de pluies, d’orages et de fortes houles. Entre 2020 et 2023, le territoire a été impacté par neuf cyclones et dépressions tropicales majeures, deux événements pluvieux de très forte intensité pendant 48 heures aux mois de janvier et février 2022 ([19]).

Les derniers cyclones et dépressions majeurs ayant causé des destructions majeures à WallisetFutuna sont : Tomas en mars 2010 ; Evan en décembre 2012 ; Amos en avril 2016 ; Ella en mai 2017 et Gita en février 2018.

2.   Les aléas telluriques : sismiques, volcaniques, tsunamigènes

Les territoires ultramarins sont également fortement exposés aux risques dits telluriques : séismes, volcans, tsunamis, mouvements de terrain. À l’exception de la Guyane, il s’agit en effet pour l’essentiel de territoires volcaniques tropicaux insulaires caractérisés par des reliefs jeunes et escarpés, soumis à une érosion importante et situés dans des régions tectoniques actives (en particulier aux Antilles en zone de subduction de la plaque Atlantique) ainsi que des bassins océaniques sujets à des tsunamis d’origine variés.

a.   Le risque sismique et de tsunamis

Les deux territoires ultramarins les plus vulnérables aux risques sismiques et aux tsunamis associés sont les petites Antilles et la Nouvelle‑Calédonie.

L’aléa sismique est majeur aux Antilles. Le réseau de surveillance sismologique de l’Institut physique du globe de Paris (IPGP), via ses observatoires volcanologiques et sismologiques de la Guadeloupe et de la Martinique (OVSG et OVSM), détecte environ 500 séismes chaque année. La plupart ont des magnitudes faibles (inférieures ou égales à 2.0 sur l’échelle de Richter ([20])). Depuis 1950, en moyenne un séisme de magnitude supérieure à 6 est comptabilisé tous les cinq ans.

La Nouvelle-Calédonie est localisée à environ 300 kilomètres au sud de l’arc très actif du Vanuatu où des séismes de magnitude supérieure à 7 se produisent régulièrement. La Direction de la sécurité civile et de la gestion des risques en Nouvelle‑Calédonie a recensé douze épisodes sismiques sur l’année 2022.

Wallis-et-Futuna est également très concerné par le risque sismique du fait de sa proximité avec des zones frontières entre les plaques tectoniques de l’Australie et du Pacifique. Le séisme de magnitude 6.3 survenu le 12 mars 1993 a particulièrement marqué la mémoire collective : cet épisode a provoqué une surélévation du récif sud de Futuna d’environ 50 centimètres et provoqué un tsunami dans la baie de Léava. Le 29 septembre 2009, deux importants séismes ont touché les îles Samoa et engendré un tsunami sur Wallis et Futuna avec une distance maximale d’inondation de 70‑80 mètres à l’intérieur des terres. La Polynésie française est également fréquemment exposées aux risques de tsunami avec 25 à 35 alertes par an en moyenne.

La Réunion se situe dans une zone de faible sismicité (zone de sismicité 2 soit un risque faible mais non négligeable). Mayotte est classée en zone de sismicité 3 soit un niveau d’aléa modéré lié à sa position à proximité de la plaque tectonique de l’Afrique de l’Est.

b.   Le risque volcanique

La période récente a été marquée par une activité volcanique accrue des quatre volcans français actifs en zone habitée, tous situés en outre-mer et actuellement placés en « Vigilance » (couleur « Jaune ») :

– la montagne Pelée dans le nord de la Martinique : en sommeil profond depuis sa dernière éruption en 1929‑1932, le volcan a connu une réactivation préoccupante en 2018-2023. Précédé par une activité sismique anormale dès 2014, ce regain d’activité s’est manifesté par un accroissement rapide du nombre de séismes, une lente mais significative déformation de l’édifice volcanique et l’apparition en surface de zones de dégradation de la végétation due à des émanations diffuses de dioxyde de carbone. Dans ce contexte, le niveau d’alerte a été relevé de « normal » (« vert ») à « vigilance » (« jaune ») le 4 décembre 2020.

D’après les chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) auditionnés, si cette crise semble actuellement en voie d’atténuation voire d’extinction, la vigilance reste de mise ; des études récentes indiquant que les délais de réactivation du système magmatique avant les éruptions passées de la Pelée ont pu être relativement brefs ;

Photographie de la montagne pelée

Observatoire volcanologique et sismologique de la Martinique (OVSM – IPGP)

Source : Observatoire volcanologique et sismologique de la Martinique – IPGP.

– la Soufrière en Guadeloupe : sa dernière éruption magmatique majeure (qui a conduit à la formation du dôme actuel) date du XVIème siècle. Depuis, les éruptions qui se sont produites sont uniquement phréatiques c’est-à-dire non magmatiques ([21]). L’éruption phréatique majeure la plus récente date de 1976‑1977.

Depuis 1992, le volcan est entré dans une phase de réactivation croissante qui se traduit par une augmentation de son activité sismique, de ses émissions gazeuses et la réactivation de nouvelles zones sommitales. La probabilité d’une activité éruptive à court terme reste faible, mais compte tenu du regain d’activité sismique enregistré depuis février 2018 et qui a fait craindre une nouvelle éruption phréatique en avril 2018, le niveau d’alerte du volcan a été élevé au stade « Vigilance » ;

photographie de la soufrière en guadeloupe

Observatoire volcanologique et sismologique de la Guadeloupe (OVSG-IPGP)

Source : Observatoire volcanologique et sismologique de la Guadeloupe – IPGP.

– le Piton de la Fournaise à La Réunion : toujours très actif, le Piton de la Fournaise a produit en moyenne trois éruptions magmatiques par an dans la dernière décennie. Ses coulées de lave restent confinées et les zones habitées, préservées ;

photographie du piton de la fournaise à La réunion

Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise (OVPF-IPGP)

Source : Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise - IPGP

– le volcan sous-marin Fani Maoré au large de Mayotte : à l’origine de la très forte crise sismique qui a touché l’île de Mayotte en mai 2018, l’éruption de ce volcan sous-marin situé à 50 kilomètres à l’est de l’île et à 3 500 mètres de profondeur sur le plancher océanique, constitue un phénomène majeur qui n’avait jamais été enregistré et étudié jusqu’à présent L’éruption sous-marine qui a duré trois ans a été associée à un déplacement de l’île de Mayotte de 24 centimètres vers l’est et une baisse de son altitude de 19 centimètres. Depuis, l’activité sismo‑volanique qui se poursuit à une intensité moindre fait l’objet d’études et d’une surveillance étroite dans le cadre du réseau de surveillance volcanique et sismologique de Mayotte (Revosima) ([22]).

c.   Les mouvements de terrain

Le risque de mouvements de terrain est particulièrement important en outre-mer. Les phénomènes sont d’intensité variable (de quelques mètres cubes à plusieurs millions de mètres cubes) et peuvent résulter d’éléments déclencheurs (fortes pluies, séismes, éruptions volcaniques, actions humaines, etc.) ou non. Il s’agit d’un type d’aléa diffus, « difficile à appréhender et à cartographier » qui se caractérise par « une plus faible occurrence de crises majeures mais par la répétitivité de phénomènes impactant localement les territoires » ([23]). Ses conséquences sur les biens et les populations ne sont pas négligeables. La Martinique et La Réunion y sont tout particulièrement exposées, de même que la Guyane et la Nouvelle-Calédonie.

À La Réunion, la combinaison d’un relief particulièrement accidenté et de conditions météorologiques violentes (fortes pluies pendant la saison cyclonique notamment) favorise des mouvements de terrain réguliers dans les lieux avec de fortes pentes et des escarpements. Le cirque de Salazie, par exemple, est l’un des plus grands glissements de terrain habités dans le monde ; le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a pu y observer des déplacements de maison de l’ordre de dix mètres en dix ans.

En Martinique, les épisodes pluvieux sont également à l’origine de glissements de terrain de grande ampleur, comme par exemple au morne Macroix à Sainte-Marie en 2000, au morne Calebasse à Fort-de-France en 2011 et dans plusieurs communes du Nord-Atlantique en novembre 2020. Ce dernier épisode ayant conduit à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, a endommagé les habitations de plus de 400 foyers et nécessité la mise en œuvre de mesures d’évacuation, de relogement et d’accompagnement des personnes sinistrées.

II.   Le changement climatique, un facteur d’aggravation

D’une manière générale, le changement climatique est un facteur d’aggravation majeur des aléas de type hydro-climatiques et marins (cyclones, inondations, submersion marine, vent, pluviométrie, érosion) qui se traduit par une élévation des températures et du niveau de la mer, et une recrudescence des phénomènes météorologiques extrêmes.

Le changement climatique n’a en revanche pas ou peu d’impact direct démontré sur les risques sismiques et volcaniques. Toutefois, ses manifestations multiples sont un facteur de déstabilisation pour les territoires et sont dès lors susceptibles de majorer leur vulnérabilité à la survenue de tout type d’aléa. Il favorise également les situations de cumul de risques.

A.   Une hausse de la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes

1.   Aux Antilles, une augmentation de la fréquence des ouragans de catégories 4 et 5

D’après le modèle de prévision « Arpege-climat » de Météo-France, le réchauffement attendu serait particulièrement marqué dans la région Caraïbes. Aux Antilles françaises plus précisément, les températures nocturnes en saison sèche augmenteraient d’environ 1,5‑2 degrés Celsius à l’horizon 2055 et 2,5‑3/2,5‑3,5 degrés Celsius à l’horizon 2080. Les vagues de chaleur deviendraient également plus fréquentes, de même que les températures exceptionnelles observées aujourd’hui.

En Guadeloupe et Martinique, les précipitations diminueraient toute l’année sur la quasi-totalité du territoire ; il est notamment anticipé une diminution des précipitations d’environ 10 à 15 % pour la période 2031‑2080 comparativement à 1980‑2013 pendant la saison des pluies. L’assèchement généralisé irait de pair avec une diminution de la fréquence des fortes pluies (mais une augmentation de leur intensité, en particulier en période cyclonique) et une augmentation des épisodes de sécheresse et donc du risque d’incendie.

Si le modèle prédit une diminution du nombre de cyclones aux Antilles (les projections devant néanmoins être prises avec précaution d’après Météo-France, en tenant compte des limites du modèle Arpege-climat), les ouragans les plus intenses (de catégories 4 et 5) seraient en revanche plus fréquents ; en lien avec l’augmentation de la température de l’eau, le « carburant » des cyclones ([24]). Les pluies cycloniques devraient également être amenées à augmenter de 5 à 15 % du fait de l’augmentation de la température de l’air.

 

projections de l’activité cyclonique aux antilles
d’après le modèle arpège-climat de météo-france

<i>Source - Météo-France, 2019</i>

Source : Météo-France, 2019.

Note de lecture : distribution du nombre de cyclones en fonction de leur intensité, vue par Arpege-climat (bleu/vert : historique ; rouge : futur) ; et évolution moyenne des précipitations dans les tempêtes tropicales aux Antilles (contours : valeurs historiques ; points : significativité > 90 %).

 

2.   Dans l’océan Indien, des risques accrus de sécheresse et de cyclones d’extrême intensité

Dans l’océan Indien, les résultats du projet « Building résilience in the indien Ocean » (BRIO) 2021 qui vise à développer des projections climatiques à haute résolution sur le climat de la région jusqu’à l’horizon 2100, montrent :

– un réchauffement de 3 à 5 degrés Celsius à l’horizon 2100 par rapport à la période 1981‑2100 dans le scénario dit pessimiste et de 1 à 2 degrés dans le scénario dit optimiste ;

– une augmentation de 10 à 20 % des précipitations pendant l’été austral et une baisse significative à l’hiver austral jusqu’à – 30 % localement ; cette augmentation des contrastes saisonniers étant susceptible de majorer les risques de sécheresse, d’incendie et les situations de restrictions d’accès à l’eau potable ;

– une probable diminution du nombre total de systèmes dépressionnaires dans le sud-ouest de l’océan Indien, une légère hausse des systèmes intenses ou très intenses et une probable augmentation des cyclones d’intensité maximale. En outre, la latitude où sont observés actuellement les maximums d’intensité cyclonique devrait migrer vers le sud ; ce qui signifierait un risque accru de cyclones d’extrême intensité à La Réunion, Mayotte et Maurice.

3.   En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, une probable diminution de l’activité cyclonique mais une augmentation des pluies associées

Dans la région du Pacifique Sud, le projet « Climat du Pacifique, savoirs locaux et stratégie d’adaptation » (Clipssa) ([25]) prédit :

– une augmentation des températures moyennes de 1,4 degré à 3,1 degrés Celsius à l’horizon 2100 dans la zone Pacifique avec des variations selon les archipels et une augmentation significative des vagues de chaleur ;

– une diminution annuelle globale des précipitations avec des saisons sèches plus longues et sévères, et des saisons des pluies plus intenses ; le risque de feux de végétation étant particulièrement augmenté pour les îles hautes ;

– une diminution de l’activité cyclonique sans signal clair concernant l’évolution de la fréquence des cyclones de catégorie 5. En revanche, les simulations prédisent une augmentation des pluies intenses dans un rayon de 200 kilomètres autour du centre des cyclones.

En Nouvelle-Calédonie, une étude scientifique récente confirme une diminution de moitié du nombre de cyclones mais une hausse des pluies associées de l’ordre de 40 % au cours de ces événements, ce qui augmente les aléas induits (submersion, inondation, glissements de terrain, coulées de boue, etc.) ([26]).

B.   Impacts liés à l’élévation du niveau de la mer

  1.   L’élévation du niveau de la mer est d’ores et déjà alarmante dans l’océan Indien et l’archipel polynésien

Si elle ne constitue pas un risque naturel majeur en tant que tel, l’élévation du niveau de la mer est susceptible de majorer significativement la vulnérabilité des territoires ultramarins à tout type d’aléa. Lors de leur audition, les membres du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) ont rappelé que le niveau de la mer a déjà augmenté de vingt centimètres par rapport à 1900 et augmentera encore de vingt centimètres dans les trente ou quarante prochaines années jusqu’à dépasser un mètre et plus à l’horizon 2100 ([27]).

L’augmentation est plus rapide dans l’océan Indien où l’élévation du niveau de la mer atteint de 4 à 7 millimètres par an, soit un rythme deux à trois fois plus rapide qu’au niveau mondial. À Mayotte, la situation est particulièrement critique car elle se conjugue aux effets de l’activité sismo‑volcanique depuis 2018 liée à l’éruption du volcan sous-marin Fani Maoré. Une augmentation du niveau marin de près de 12,3 millimètres par an à Dzaoudzi a été enregistrée sur la dernière décennie. La route côtière autour de Mamoudzou est régulièrement submergée depuis quelques années ([28]).

Aux Antilles, l’augmentation du niveau marin se situerait dans la moyenne mondiale autour de 3 à 4 millimètres par an. Toutefois, plus récemment, le chiffre a été évalué à 5,2 millimètres par an entre 2006 et 2019 en Martinique. Les études de l’University of Hawaii Sea Level Center (UHSLC) révèlent des tendances à hauteur de 4,5 millimètres par an à Fort‑de‑France jusqu’à 16,5 millimètres par an sur les îles du Salut en Guyane.

Dans le Pacifique, de fortes disparités sont observées par l’UHSLC d’un archipel à l’autre : 4,0 millimètres par an à Nuku‑Iva (Marquises, Polynésie française), 18,4 millimètres par an à Hiva‑Oa (Marquises, Polynésie française), 2,7 millimètres par an à Papeete (Société, Polynésie française), 3,1 millimètres par an à Rikitea (Gambier, Polynésie française), 2,3 millimètres par an à Nouméa (Nouvelle‑Calédonie).

L’élévation du niveau de la mer a pour effet principal de majorer les risques côtiers, en particulier la submersion marine et l’érosion côtière.

  1.   Le risque de submersion marine et d’inondations permanentes ou temporaires

La submersion marine peut être temporaire ou chronique. Dans le premier cas, les inondations du littoral sont dues à une surélévation temporaire du niveau de la mer au-dessus de son niveau normal durant des tempêtes, des cyclones, voire des tsunamis (effet dit de surcote).

Les mécanismes de la submersion marine cyclonique

<i>Source - BRGM</i>

Source : BRGM.

Note de lecture : La chute de pression atmosphérique provoque une « succion » du plan d’eau ; les vents et les vagues poussent les masses d’eau vers la côte.

Les résultats du projet « Changement climatique et conséquences sur les Antilles françaises » (C3AF) ([29]) suggèrent que si des ouragans majeurs comme Hugo (1989) ou Maria (2017) devaient se reproduire à la fin du siècle, la hauteur et donc la force des vagues à la côte seraient plus importantes du fait de l’élévation du niveau de la mer.

En Guadeloupe par exemple, les vagues les plus hautes pourraient croître de 20 à 40 % dans les zones de mangrove autour du Grandculdesacmarin en cas de hausse du niveau de la mer de 80 centimètres ; l’impact serait d’autant plus important que la barrière de corail perdrait une partie de son rôle protecteur.

L’évolution des écosystèmes littoraux devrait en effet jouer un rôle important. En faisant l’hypothèse que les mangroves, les coraux et les herbiers auront perdu leur capacité à atténuer les surcotes, les hauteurs d’inondation à terre pourraient augmenter localement de plusieurs dizaines de centimètres supplémentaires.

Zones concernées par une augmentation supplémentaire
des hauteurs d’inondation en Guadeloupe en 2100 sous l’hypothèSe
d’une dégradation des mangroves, coraux et herbiers (en mètres)

<i>Source - LARGE, 2019</i>

Source : projet C3AF « Changement climatique et conséquences sur les Antilles françaises », Laboratoire de recherche en géosciences et énergie (Large) de l’université des Antilles, 2019.

Dans les cas de submersion dite chronique, les inondations concernent les zones topographiquement basses du littoral lors des périodes de marée haute en conditions météorologiques calmes.

D’après l’étude « Guyaclimat » du BRGM et de Météo-France publiée en 2022, la superficie potentielle exposée au risque de submersion marine chronique à Cayenne et Kourou pourrait doubler à l’horizon 2050 et 2100. Le Cerema a indiqué à la commission d’enquête que cette étude perçue comme très technique, « n’a finalement été partagée que dans un cercle restreint et n’a que peu touché sa cible première : les élus et décideurs du territoire. » À noter que ces évolutions impacteraient également la biodiversité guyanaise avec un risque de disparition des tortues marines.

Les îles polynésiennes sont également exposées à des submersions chroniques lors des marées hautes. Les infrastructures portuaires, aéroportuaires, industrielles ou commerciales sont concernées ; notamment de façon certaine, le port et l’aéroport de Tahiti quel que soit le scénario de référence du Giec, en l’absence de mesures d’adaptation.

Dans le cadre du projet « INSeaPTIOn », soutenu par l’Union européenne au travers du projet « European Research area for climate services » (ERANET‑ERA4CS), le BRGM a identifié les infrastructures critiques exposées au risque de submersion chronique à Tahiti et Moorea :

– la zone portuaire de Papeete ;

– l’aéroport international et ses abords ;

– des tronçons bas de la route territoriale au sud-ouest de l’île (Punaauia, Paéa, Ataiti, jusqu’à Taravao) et la route territoriale 21 qui fait le tour de l’île de Moorea au niveau de plusieurs zones basses où un seul axe de circulation est possible.

  1.   L’érosion du trait de côté : la Guadeloupe est le territoire le plus menacé devant la Martinique et la Guyane

a.   Les projections du Cerema confirment le risque accru d’érosion côtière en outre-mer à court et à moyen-terme

L’érosion côtière s’accélère également avec le changement climatique, principalement du fait de l’élévation du niveau de la mer mais aussi de la modification du régime des tempêtes. Si elle n’est pas considérée par les pouvoirs publics comme un risque naturel majeur en tant que phénomène dont l’évolution serait prévisible et non aléatoire, le recul du trait de côte demeure susceptible de majorer considérablement la vulnérabilité des littoraux ultramarins concernés face à la survenue de tout autre aléa naturel majeur tel qu’un cyclone. L’érosion côtière a également un impact direct sur les phénomènes de submersion marine qui constituent eux-mêmes un risque naturel majeur. Le rapporteur a ainsi souhaité aborder ce sujet dans les travaux de la commission d’enquête.

Dans le cadre des réflexions engagées par le comité national du trait de côte (CNTC) créé le 14 mars 2023 et présidé par la députée Sophie Panonacle, vice‑présidente de la présente commission d’enquête, le Cerema a publié en avril de cette année une série d’études pour mieux appréhender le recul du trait de côte à l’horizon 2100 à l’échelle de l’hexagone et dans les départements et régions d’outre‑mer (DROM) ([30]). Ses principaux résultats sont renseignés dans le tableau suivant.

Nombre de bâtiments potentiellement impactés
par le recul du trait de côté en 2050 et 2100 dans les drom

Territoire

Horizon

Logements

Dont résidences principales

Locaux d’activité économique

Total

Guadeloupe

En 2050

552

333

181

733

En 2100

5 161

2 630

1 812

6 973

Martinique

En 2050

284

150

81

365

En 2100

3 748

2 288

1 386

5 134

Guyane

En 2050

167

104

21

188

En 2100

8 497

5 889

1 356

9 853

La Réunion

En 2050

78

48

37

115

En 2100

276

181

115

391

Mayotte

En 2050

109

42

29

138

En 2100

1 419

1 055

353

1 772

Total DROM

En 2050

1 190

557

349

1 539

En 2100

20 101

12 043

5 022

25 123

Source : d’après le rapport du Cerema, « Projection du trait de côté et analyse des enjeux au niveau national », février 2024.

L’étude identifie 1 539 bâtiments, principalement résidentiels et commerciaux, potentiellement impactés par le recul du trait de côte dans l’ensemble des DROM à l’horizon 2050, et 25 123 à l’horizon 2100. Le scénario à moyen terme repose sur la poursuite tendancielle du recul du trait de côte ainsi que le maintien et l’entretien de tous les ouvrages de protection du littoral. Le scénario de référence en 2100, le plus défavorable, repose sur les estimations du Giec et suppose la disparition complète des structures de défense côtière et l’inondation progressive des zones topographiquement basses du littoral.

Les projections du Cerema confirment le risque accru d’érosion côtière en outre-mer à moyen-terme. À l’horizon 2050, les cinq départements d’outre-mer comptabilisent en effet à eux seuls 23 % des résidences menacées sur l’ensemble du territoire national, avec des enjeux concentrés, à titre principal, sur les trois départements de Guadeloupe, Martinique et Guyane dont les rivages sont largement constitués de zones sableuses soumises à une érosion accélérée pouvant atteindre plusieurs mètres par an.

Le risque est également confirmé à proche échéance : 87 bâtiments en Guadeloupe, 100 en Martinique et 83 à Mayotte sont d’ores et déjà identifiés par l’étude du Cerema comme étant exposés au recul du trait de côte dès 2028.

b.   Une mise en œuvre embryonnaire de la loi « climat et résilience » en outre-mer

Les articles 236 à 251 de la loi n° 2021‑1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « climat et résilience », codifiés aux articles L. 321‑13 A et suivants du code de l’environnement et complétés par l’ordonnance n° 2022‑489 du 6 avril 2022 ([31]), ont mis en place différents outils réglementaires (dont un droit de péremption) et contractuels afin de permettre aux communes et collectivités exposées d’adapter leur politique d’urbanisme et d’aménagement à ces enjeux.

Conformément à l’article L. 321‑15 du code de l’environnement, la liste des communes concernées volontaires (après délibération municipale) a été précisée par le décret n° 2022‑750 du 29 avril 2022 : elle inclut à ce jour neuf communes en Guadeloupe, treize communes en Martinique et trois communes de Guyane (Macouria, Cayenne, Awala-Yalimapo). Cette liste est donc très incomplète et ne reflète qu’imparfaitement le nombre de communes réellement exposées en outre-mer.

Les conclusions de la récente mission IGEDD-IGA sur le financement des conséquences du recul du trait de côte ([32]) ont pu souligner la spécificité du sujet en outre-mer par rapport à l’hexagone du fait de facteurs géologiques et géographiques particuliers, des risques de submersion associés liés aux aléas climatiques ou encore de la prégnance de l’habitat informel et des nécessités de relogement de populations. La situation ultramarine nécessiterait des adaptations quant à la mise en œuvre de la loi « climat et résilience » dans les collectivités ultramarines concernées, ainsi que des solutions de financent spécifiques.

c.   Des solutions adaptatives coûteuses à mettre en œuvre nécessitant des solutions de financement adaptées

Face à l’érosion côtière, les solutions concrètement mises en place varient : certains territoires privilégient la construction de remparts physiques (digues, murs, cordons de pierre, etc.) ; d’autres, la mise en œuvre de « solutions fondées sur la nature » comme la restauration de mangroves, le bouturage de corail ou la replantation d’espèces végétales côtières. Ces écosystèmes naturels rendent en effet un service de protection côtière en capturant les sédiments et en atténuant les effets de la houle sur les aménagements humains.

Le projet « Adaptom » (2022-2024), coordonné par Mme Virginie Duvat, professeure et chercheuse au CNRS de La Rochelle, en partenariat avec le Conservatoire du littoral, a pu recenser 25 projets de solutions d’adaptation côtière fondées sur la nature dont dix aux Antilles, cinq à La Réunion et dix dans le Pacifique. L’étude de ces projets permet d’identifier plusieurs facteurs de réussite à la mise en œuvre de stratégies adaptatives : le recours au savoir-faire technique existant en outre-mer ; le rôle majeur d’acteurs publics locaux en charge de la gestion des espaces naturels (par exemple, l’Office national des forêts) et des associations locales, ainsi que la nécessité d’obtenir des financements variés et pérennes (les projets de restauration écologique nécessitant plusieurs années) et d’impliquer la population locale.

Lors du déplacement à Mayotte, le rapporteur a pu rencontrer des représentants de la commune de Bouéni et constaté le recul du trait de côte qui menace les habitations et populations de cette commune. Pour s’en protéger, la commune a engagé des travaux de construction d’une promenade surélevée et de murs de protection avec cordons d’enrochement (entassement de blocs de pierre) pour un coût total de près de 1,3 million d’euros financé à 80 % par une subvention de l’État, de la région et du département issue du fonds exceptionnel d’investissement (FEI).

Photographie, commune de bouéni à Mayotte, mars 2024

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Comme précédemment indiqué, le phénomène d’érosion côtière n’est pas considéré par les pouvoirs publics comme un risque naturel majeur dans la mesure où il revêt un caractère certain et progressif avec une dynamique d’évolution future connue, y compris à moyen et long terme. Il relève ainsi des politiques d’aménagement des territoires et non des politiques de prévention des risques ([33]). À ce titre, les dommages causés par l’érosion côtière ne sont pas assurables au titre du régime des « catastrophes naturelles » ; les travaux de prévention ne sont également pas éligibles aux financements du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier.

Dans ce contexte, lors de son audition devant la commission d’enquête, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires s’est engagé à intégrer dans le projet de loi de finances pour 2025 un dispositif d’accompagnement dédié à la lutte contre l’érosion côtière ([34]). Suite à la publication des conclusions du Cerema, une mission d’inspection spécifique sur l’érosion côtière en outre-mer a également été annoncée dans la presse.

Recommandation n° 1 : accélérer la mise en œuvre du volet « recul du trait de côte » de la loi « climat et résilience » dans les territoires ultramarins largement impactés par le risque d’érosion côtière ;

Recommandation n° 2 : intégrer au projet de loi de finances pour 2025 un dispositif financier dédié à la lutte contre l’érosion côtière et rendre éligibles au fonds Barnier les opérations de lutte contre l’érosion côtière.

C.   De nouveaux types de risques : le cas des algues sargasses

1.   Améliorer les connaissances scientifiques et les outils de prévision des échouements d’algues sargasses

Les échouements d’algues sargasses constituent un nouveau type de risque naturel émergent aux Antilles dont les causes demeurent encore largement méconnues. Une partie des rivages de la Martinique, de la Guadeloupe, de Saint‑Barthélemy et de la Guyane subissent des échouements de manière irrégulière depuis 2011 ; le phénomène est devenu récurrent depuis 2018.

En plus d’impacter les activités économiques locales, principalement tournées vers le tourisme et la pêche, ainsi que la biodiversité, les échouements de sargasses présentent un risque sanitaire majeur en raison de l’exposition à des gaz toxiques produits par la putréfaction des algues lorsque celles-ci ne sont pas collectées dans les 48 heures suivant leur échouement.

Les sargasses ont plus largement des effets sur l’attractivité des zones impactées et en particulier sur le logement : lors de son audition, M. Brayen Soorana, directeur outre-mer à l’Union sociale pour l’habitat (USH), constatait ainsi que « certains bailleurs font le choix de ne pas construire dans les zones affectées par les sargasses (…) » et que « dans un certain nombre de communes de Martinique et de Guadeloupe, des locataires quittent leur logement en raison des odeurs et des effets des algues sur la santé. » ([35]) La méconnaissance des causes du phénomène et de son évolution contribue à freiner l’adaptation des acteurs qui en subissent aujourd’hui les conséquences.

Échouements de SargasseS, Martinique, 2022

Sargasses / algues

Depuis 2020, Météo-France est chargé de la surveillance et de la prévision des échouements de sargasses. L’établissement public mobilise à ce jour la télédétection à moyenne et haute résolution à partir de données satellitaires ainsi que son modèle de dérive « Mothy » (Modèle océanique de transport d’hydrocarbures) pour prévoir les trajectoires de dérive des radeaux de sargasse. Ses bulletins d’information traduisent le niveau de risque d’échouement dans les prochains jours avec l’indication d’un certain degré de confiance (de 1 à 5). Ces prévisions ne permettent toutefois pas encore d’apprécier finement les volumes d’algues en jeu ni la localisation précise des sites d’échouements.

Des projets de recherche sont actuellement en cours pour améliorer la connaissance du phénomène. Le projet « Sarg’Alert » (2023-2027) soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR) vise notamment à améliorer la prévision des échouements de sargasses (par le recours à l’intelligence artificielle ainsi que des mesures biologiques in situ) et à produire des bulletins d’alerte destinés aux collectivités territoriales et aux populations locales concernés.

Recommandation n° 3 : pérenniser les financements des projets de recherche portant sur les algues sargasses de façon à améliorer la connaissance du phénomène et sa prévisibilité et apporter de la lisibilité aux acteurs impactés.

2.   Bilan des plans Sargasses I et II

Les échouements de sargasses étant considérés comme réguliers et prévisibles, leur prévention et leur gestion n’entrent donc pas dans le champ du fonds Barnier. De la même manière, les dégâts liés aux sargasses ne sont pas assurés au titre du régime des catastrophes naturelles, dit « cat nat ». Les plans nationaux de prévention et de lutte contre les sargasses, mis en œuvre par l’État depuis 2018, constituent ainsi à ce stade, la « seule réponse adéquate pour lutter contre les effets du phénomène d’échouement » ([36]) :

– le plan « Sargasses I » (2018-2021) s’articulait autour de cinq objectifs principaux : le déploiement du réseau de suivi et de prévision des échouements ; la mise en place de solutions de collecte en moins de 48 heures (avant la putréfaction des algues) ; le renforcement de la recherche et de l’innovation notamment pour mieux gérer le ramassage et le traitement ; le développement de la coopération régionale et internationale, et enfin, l’accompagnement des entreprises impactées.

La mise en œuvre de ce premier plan aura notamment permis le déploiement de capteurs de gaz H2S (hydrogène sulfuré) et NH3 (ammoniac) en Guadeloupe et en Martinique, la mutualisation de la surveillance et de la prévision des bancs des échouements à l’échelle des Antilles françaises et le renforcement des communes et des intercommunalités en moyens de collecte (financement d’un parc d’engins constitués de tractopelles, pelles mécaniques, camions, cribleuses, etc.).

Toutefois, le plan n’a pas permis d’achever l’équipement des collectivités. Les moyens acquis, de façon non coordonnée et sans suivi, se sont également retrouvés rapidement obsolètes. Les projets de recherche retenus par l’ANR, cofinancés à hauteur de 8,5 millions d’euros par l’État et les collectivités, ont également rencontré des difficultés à démarrer du fait de modalités de pilotage et de financement qui n’étaient pas stabilisées.

L’expérience acquise et l’analyse des échecs en matière de gestion des sargasses conduisent aujourd’hui à cibler prioritairement les opérations de collecte et d’enlèvement sous 48 heures, de façon à prévenir les risques sanitaires et environnementaux. La Direction générale des outre-mer (Dgom) a indiqué qu’il était indispensable de pouvoir traiter les échouements réguliers selon un « processus de type industriel, rapide, efficace et pérenne », en réservant le mode de « gestion de crise » aux cas de débordements extrêmes ;

– le plan « Sargasses II » a été doté de 36,5 millions d’euros sur la période 2022-2025, dont 6 millions dédiés à la recherche fondamentale et appliquée. Son financement est dispersé entre les budgets des différents ministères concernés (Intérieur et outre-mer, Transition écologique, Travail, Santé et Mer). Pour apporter de la lisibilité et de la souplesse dans la gestion des crédits, une action 13 « Plan sargasses II » dotée de 5 millions d’euros pour 2024 a été créée dans la loi de finances pour 2023 au sein du programme des interventions territoriales de l’État (PITE) ([37]). La Martinique et la Guadeloupe bénéficient de 43 % de l’enveloppe ; Saint-Martin et Saint-Barthélemy, de 14 %.

Les crédits nationaux, principalement gérés par les préfets et les agences régionales de santé, permettront d’appuyer les collectivités dans la durée, en particulier pour prendre en charge le ramassage des algues en mer comme à terre (avec un taux de subvention État porté à 50 % pour les opérations qui étaient auparavant financées à 30 %), et assurer leur transport et leur stockage sécurisé.

Lors de son audition, M. Jean‑Claude Maes, président de l’association des communes et collectivités d’outre-mer, a souligné le coût important que représente la gestion des sargasses pour les communes ultramarines concernées ainsi que les difficultés de répondre au délai de 48 heures : « toutes les communes touchées par les sargasses doivent désormais constituer une ligne budgétaire distincte. Or, les fonds nécessaires pour abonder cette ligne ne sont pas toujours disponibles. [En outre], j’ai été auditionné par la chambre régionale des comptes, qui m’a reproché de recourir trop fréquemment à une entreprise locale [pour le ramassage des sargasses]. Or celle‑ci est la seule qui est en mesure de répondre aux situations d’urgence. » ([38])

Les opérations de collecte liées à des échouements massifs d’algues nécessiteraient tout particulièrement des solutions complémentaires de financement avec une part de solidarité nationale.

L’indemnisation des dommages et préjudices subis liés aux sargasses pose également question. M. Jean‑Paul Fereira, premier vice‑président de la collectivité territoriale de Guyane, a notamment soulevé la question pour les pêcheurs guyanais dont l’activité au large des côtes est directement impactée par la présence des sargasses ([39]). Les circuits électriques et les équipements électroménagers situés dans les habitations sont également détériorés par les gaz émis par les sargasses sans qu’un régime d’assurance ne permette de couvrir avec certitude ces dégâts.

Enfin, il est nécessaire de continuer et d’intensifier les recherches afin de trouver des débouchés à la collecte des sargasses.

Recommandation n° 4 : identifier, par la recherche, des moyens de valorisation des algues sargasses collectées, et accompagner la mise en place de filières associées dans les territoires.

D.   La politique d’adaptation au changement climatique en outre-mer doit mieux prendre en compte les risques naturels majeurs

L’adaptation, telle que définie par les rapports du Giec, vise à limiter les impacts du changement climatique et les dommages associés sur les activités socio-économiques et l’environnement. Elle implique l’ajustement aux conséquences du climat actuel ou attendu de façon à éviter ses effets préjudiciables voire à exploiter des effets bénéfiques potentiels.

Lors de leur audition, les experts auditionnés membres du Giec ont alerté sur le risque de « maladaptation » entendue comme toute action de nature à augmenter la vulnérabilité des territoires et des populations au changement climatique au lieu de la réduire. Les politiques adaptatives doivent permettre au contraire de réduire l’exposition et la vulnérabilité des populations et des activités humaines aux effets du changement climatique.

La France s’est dotée en 2011 de son premier Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC‑1), suivie d’un second (PNACC‑2) pour la période 2018‑2022. Ces plans constituent essentiellement des feuilles de route visant à favoriser la cohérence et l’articulation de différentes politiques publiques sectorielles et thématiques contribuant à l’adaptation au changement climatique. Le PNACC‑2 identifie notamment six domaines d’action : gouvernance ; connaissance et information ; prévention et résilience ; filières économiques (tourisme, pêche, filières agricoles et agroalimentaires, filière forêt bois et secteur financier) ; nature et milieux (avec une priorité attribuée aux solutions fondées sur la nature) ; actions internationales.

Les actions identifiées dans le volet dédié à la prévention des risques naturels apparaissent néanmoins d’une portée limitée. Elles excluent les enjeux spécifiques à l’outre-mer et ciblent uniquement l’augmentation de l’aléa incendie, des risques de sécheresse et du retrait-gonflement des argiles à travers la promotion de campagnes d’information essentiellement ([40]).

Pour justifier ce manque, M. Joseph Hajjar a souligné, lors de son audition, une dissociation historique des enjeux d’adaptation au changement climatique et de gestion des risques naturels du fait d’une tendance « à considérer que la gestion des risques répond à une politique très régalienne et immédiate » par opposition à des politiques d’adaptation inscrites dans le temps long ([41]).

Or, l’enjeu est aujourd’hui de passer « d’une posture de réaction à une stratégie d’adaptation » ([42]) face à l’intensification des risques. L’impact majeur du changement climatique sur l’intensité des aléas hydro-climatiques et marins (cyclones, inondations, submersion marine, érosion, vent, pluviométrie) ainsi que l’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes et des risques associés (tempêtes, sécheresses, feux de forêts, etc.) justifient d’intégrer un volet ambitieux dédié à la prévention des risques naturels majeurs, incluant les enjeux spécifiques à l’outremer, au sein de la prochaine stratégie nationale d’adaptation au changement climatique.

Un exemple d’adaptation face à l’augmentation des risques côtiers (submersion, érosion) et des aléas cycloniques les plus intenses a pu être mis en avant par l’Office français de la biodiversité lors de son audition : celui de la protection et de la restauration des récifs coralliens. Avec près de 60 000 kilomètres carrés de récifs coralliens, soit 10 % de la surface mondiale répartis dans les trois océans, la France est le quatrième pays corallien au monde.

Ces écosystèmes absorbent une grande partie de l’énergie des vagues et réduisent ainsi les effets de l’érosion côtière liée à l’élévation du niveau de la mer et les dommages causés sur les aménagements littoraux lors d’événements météorologiques extrêmes. Le rapport sur l’état de santé des écosystèmes ultramarins, réalisé par l’Ifrecor ([43]) en 2020, évalue la valeur du service de protection côtière rendu par les écosystèmes coralliens à 595 millions d’euros.

Recommandations n° 5 : élaborer un plan de reconstitution des écosystèmes ultramarins et en particulier des récifs coralliens dont la valeur du service rendu de protection côtière a été évaluée à près de 600 millions d’euros par l’Ifrecor.

Les projets de relocalisation ([44]) de populations en outre-mer constituent également un exemple emblématique d’adaptation. Le village de Miquelon (600 habitants), fortement exposé au risque de submersion marine et au recul du trait de côte, fait notamment l’objet d’un projet de réinstallation sur un site plus abrité et en hauteur, situé à environ un kilomètre au sud du village actuel. Ce projet s’inscrit dans le temps long (trente ans au minimum) et repose sur le volontariat des habitants et leur appréciation de l’évolution des risques climatiques. Il bénéficie d’un accompagnement technique et financier de l’État à hauteur de 1,5 million d’euros en 2023 et 2024.

En Martinique également, dans la commune de Prêcheur (1 300 habitants), située au pied de la montagne Pelée et très exposée aux mouvements de terrain, aux effets du recul du trait de côte et aux risques de submersion, un projet de relocalisation fondé sur le recours à des procédés de construction résilients et durables est à l’étude depuis 2016. À terme, un de ses quartiers va être relocalisé sur les hauteurs du Prêcheur et les habitants concernés s’installeront dans des éco-habitats. Les menaces de submersion de l’île d’Ouvéa en NouvelleCalédonie posent également la question de la relocalisation de ses habitants dans un cadre coutumier et un rapport à la terre complexe.


Recommandation n° 6 : intégrer un volet ambitieux dédié à la prévention des risques naturels majeurs (cyclones, inondations, submersion marine, érosion, sécheresses en particulier), incluant les enjeux spécifiques à l’outre-mer, au sein de la prochaine stratégie nationale d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) actuellement en consultation.

III.   Mieux connaître pour mieux anticiper…

Les missions d’observation, de surveillance et de prévision des risques naturels majeurs sont absolument essentielles à une juste appréciation des situations de crise et une adaptation continue des politiques publiques de prévention et d’adaptation. Ces missions sont assurées par un écosystème d’acteurs dont la qualité des travaux, à l’interface de la recherche et des pouvoirs publics, est reconnue : essentiellement Météo‑France pour les risques climatiques ; et l’Institut physique du globe de Paris (IPGP) et son réseau d’observatoires volcanologiques et sismologiques (OVS) pour les risques telluriques. Peuvent être également cités : le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’Institut national des sciences de l’Univers du Centre national de la recherche scientifique (INSU‑CNRS), l’Institut de recherche pour le développement (IRD), l’Ifremer et l’ensemble du réseau universitaire. Leurs moyens doivent être renforcés et pérennisés à plusieurs égards.

A.   Les risques météorologiques et climatiques : rôle et moyens de météo-France

S’agissant des risques météorologiques et climatiques, l’expertise de l’établissement public Météo‑France dans l’exercice de ses missions en outre-mer a été saluée devant la commission d’enquête. Des améliorations, pour partie identifiées à son contrat d’objectifs et de performances 2022‑2026, demeurent néanmoins indispensables à mettre en œuvre pour assurer en outremer, un niveau d’information et de prévision équivalent à celui de l’hexagone.

Les missions de Météo-France en matière de prévision des risques climatiques

Météo-France est un établissement public à caractère administratif sous tutelle du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Ses missions et principes d’organisation sont fixés par le décret n° 93‑861 du 18 juin 1993 portant création de l’établissement public Météo‑France, modifié par le décret n° 2016‑765 du 9 juin 2016.

La mission première de l’établissement est d’assurer la sécurité météorologique des personnes et des biens. Il répond à ce titre aux besoins de la population et des services de l’État par la publication de cartes de Vigilance et de bulletins associés, couvrant aujourd’hui neuf phénomènes météorologiques dangereux en France hexagonale : vents, vagues-submersion, pluie-inondation, crues, orages, neigeverglas, avalanches, canicule et grand froid. L’établissement a également pour mission de conserver la mémoire du climat, de modéliser les évolutions passées et futures du changement climatique (modèles Arpege au niveau global et Arome au niveau régional), de proposer des services climatiques d’aide à la décision et de soutenir les politiques publiques d’adaptation. Météo‑France apporte son expertise technique et scientifique dans le cadre des procédures « catastrophes naturelles » (fourniture de rapports météorologiques permettant l’instruction des dossiers de demande de reconnaissance). Enfin, l’établissement assure une mission d’assistance aux feux de forêts et de végétation sur l’ensemble du territoire métropolitain.

Dans les territoires d’outre-mer, Météo-France assure spécifiquement : des missions en matière de prévision et d’alerte cyclonique ; des prévisions d’échouage de bancs de sargasses dans la région Antilles‑Guyane ; un appui aux cellules de veille hydro‑météorologiques (CVH) (Mayotte, Guadeloupe, La Réunion, Martinique, Guyane) ; la fonction de Centre météorologique régional spécialisé pour les cyclones tropicaux dans le bassin du Sud-ouest de l’océan Indien pour le compte de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) avec la production d’informations cycloniques pour les quinze pays du bassin.

a.   Le dispositif « Vigilance »

Les cartes de Vigilance publiées par Météo-France constituent le principal moyen de diffusion de l’information sur les phénomènes météorologiques dangereux. Lors de son audition, la directrice de la climatologie et des services climatiques à Météo-France, Mme Sophie Martinoni‑Lapierre, a souligné des améliorations récentes apportées à ce dispositif en outre-mer :

– d’une part, l’homogénéisation de la représentation avec un code à quatre couleurs identique en outre-mer et dans l’hexagone (le système était notamment différent pour la Réunion jusqu’en 2022) ;

– d’autre part, le déploiement de Vigilances « vagues-submersion » : celles-ci ont été mises en place aux Antilles, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte et sont en cours de mise en œuvre en Polynésie française pour Tahiti et Moorea, et en prévision pour la Nouvelle‑Calédonie et Saint‑Pierre-et‑Miquelon.

Exemples de cartes de vigilanCe météorologique

Source : Météo-France.

Un travail est également en cours avec la Direction générale de la santé (DGS) et Santé Publique France pour déployer une Vigilance « canicule » qui n’existe pas encore en outre-mer, avec une priorité sur la zone Antilles‑Guyane et l’océan Indien ([45]).

Le déploiement de ces deux Vigilances en outre-mer est indispensable dans un contexte où ces événements sont tout particulièrement amenés à augmenter en fréquence et en intensité avec le changement climatique.

La direction générale de Météo-France a également souligné la nécessité de chercher une meilleure articulation entre la Vigilance et l’alerte cyclonique : « alors que dans certains territoires, l’alerte cyclonique remplace la vigilance quand il y a un cyclone, la vigilance ne peut pas être éteinte en cas d’alerte cyclonique dans les plus grands territoires. » ([46])

Aux Antilles, la question de l’articulation se pose moins car les phénomènes cycloniques y sont gérés uniquement à travers le dispositif de Vigilance ; les dispositifs en vigueur sur les territoires de la zone étant par ailleurs extrêmement similaires ([47]).

Recommandation n° 7 : assurer le déploiement des Vigilances « vagues-submersion » et « canicule » en outre-mer et mieux articuler les dispositifs de Vigilance et d’alerte cyclonique assurés par Météo-France.

b.   Des modèles de prévision et des équipements d’observation de haut niveau

Les territoires ultramarins sont couverts par des modèles de prévision numérique à très haute résolution sans équivalent dans les territoires insulaires tropicaux voisins, en particulier le modèle global « Arpege » et le modèle local « Arome ». Mme Sophie Martinoni‑Lapierre a souligné le fait qu’il s’agit d’outils et de moyens exceptionnels permettant d’assurer aujourd’hui une représentation fine des phénomènes météorologiques locaux et des cyclones, une meilleure qualification de l’incertitude des précisions ainsi qu’une meilleure appréciation de l’influence des reliefs.

M. Emmanuel Cloppet, directeur interrégional « Antilles‑Guyanes » à Météo-France, a également indiqué en audition, que les outils dont disposait sa direction pour prévoir les phénomènes cycloniques, leur intensité et leurs impacts à l’échelle locale, étaient d’un niveau similaire à ceux disponibles en France hexagonale (modèle à la résolution très fine, à maille kilométrique qui prend notamment en compte la topographie de l’île, les effets de relief et les effets d’accélération) ([48]).

L’accumulation de données météorologiques passées et actuelles permet par ailleurs une amélioration continue de la fiabilité de ses modèles de prévision et permet concrètement aujourd’hui à Météo‑France de mieux prédire les trajectoires des cyclones que par le passé ([49]).

Comparaison entre une prévision cyclonique réalisée par un modèle AROME à très haute résolution et un modèle global (modèle du centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme)

Source : Météo-France.

Des améliorations sont néanmoins attendues concernant les projections climatiques. Pour anticiper les impacts du changement climatique, il est en effet nécessaire de disposer de simulations à une échelle fine de l’ordre de dix kilomètres, voire à l’échelle kilométrique. Ces simulations sont disponibles pour l’hexagone mais pas dans tous les territoires ultramarins. Les auditions ont permis de souligner un retard dans ce domaine. Il est à noter que Météo‑France a obtenu, dans le cadre de son schéma d’emploi 2024, douze postes supplémentaires pour permettre la production et l’exploitation de ces simulations régionalisées à haute résolution en outremer ; l’objectif étant d’en disposer d’ici la fin de l’année 2025.

La précision des outils de prévision de Météo‑France est par ailleurs essentielle à la cartographie des zones exposées aux risques et à une délimitation fine des zones inconstructibles et des zones sur lesquels doivent s’appliquer des contraintes de construction particulières.

Recommandation n° 8 : fournir à l’horizon 2025 des projections climatiques à haute résolution à une échelle kilométrique pour l’ensemble des territoires ultramarins, au niveau de celles développées dans l’hexagone, de façon à mieux anticiper les impacts du changement climatique.

S’agissant des équipements d’observation (satellites, radars, stations d’altitude, de surface et embarquées sur navire, etc.), si des moyens ont été mis en place en outre-mer, leur répartition demeure inégale :

– concernant les stations radars qui fournissent une information essentielle sur les volumes et l’intensité des précipitations dans un rayon de 100 à 200 kilomètres : la zone Antilles-Guyane est dotée de trois radars ; La Réunion, deux (dont le radar de Colorado renouvelé en 2022) ; la Nouvelle‑Calédonie, trois (avec un remplacement attendu depuis 2019 et prévu à partir de 2024 ([50]).

Mayotte et Tahiti ne sont toujours dotés d’aucun radar ; des projets ont néanmoins été annoncés pour l’installation de radars dans ces territoires. Le radar à Tahiti est attendu depuis une trentaine d’années ; ce territoire étant l’un des derniers d’outre-mer à ne pas en posséder ([51]). En Guyane, Météo-France ne possède pas de radar ; celui de Kourou appartenant au centre spatial guyanais (CSG) ;

– dix stations d’altitude (qui effectuent des observations en altitude par ballon-sonde) sont actuellement implantées en outre‑mer (dont les îles Kerguelen et les Terres australes) contre cinq en hexagone. Elles présentent un intérêt majeur pour l’initialisation des modèles de prévision numérique et font l’objet de renouvellements réguliers (renouvellement du robot‑sonde de Guyane fin 2023 par exemple) ;

– les stations météorologiques de surface (qui permettent la mesure de paramètres classiques comme la température, les précipitations et le vent) se sont récemment modernisées avec le déploiement de stations automatiques dans la plupart des directions ;

– enfin, dans le domaine de l’observation en mer, Météo‑France exploite un réseau de bouées ancrées aux Antilles et maintient un réseau de six houlographes (trois en Martinique, un à Mayotte et deux en Guadeloupe).

La direction générale de Météo‑France a souligné que certains territoires demeuraient plus difficiles à équiper que d’autres, comme par exemple la Polynésie française ou Mayotte.

Le syndicat « Solidaires-Météo » a relevé un niveau de couverture des territoires ultramarins en bouées, houlographes et stations automatiques insuffisant au regard de l’hexagone. En particulier, un second holographe à Mayotte pourrait être particulièrement utile face aux risques de submersion majorés par l’éruption du volcan sous-marin. Le réseau de stations de mesure de surface serait également à densifier avec des personnels supplémentaires en Polynésie française, Nouvelle‑Calédonie, en Guyane et à Mayotte.

Recommandation n° 9 : renforcer les équipements d’observation de Météo-France en outre-mer, en particulier à Mayotte et à Tahiti qui ne disposent toujours d’aucun radar de précipitations.

c.   Des moyens et des effectifs à stabiliser dans les services outre-mer de Météo-France

Météo-France dispose de quatre directions dans les territoires d’outre-mer : Antilles-Guyane (DIRAG), Océan Indien (DIROI), Polynésie française (DIRPF), Nouvelle‑Calédonie et Wallis‑et-Futuna (DIRNC) auxquelles s’ajoute un service à Saint-Pierre-et-Miquelon. Ces établissements accueillaient 303 agents à la fin de l’année 2023 (soit un agent pour 10 000 habitants contre un agent pour 30 000 habitants dans l’hexagone). Le budget dédié aux directions ultramarines s’élève à 35,5 millions d’euros en 2023 ([52]).

Les effectifs et moyens financiers des directions ultramarines de Météo-France sont en constante diminution depuis plusieurs années. Par comparaison, en 2015, ils s’élevaient respectivement à 352 ETP et 38,8 millions d’euros. Votre rapporteur s’inquiète de ces trajectoires qui font peser des risques sur la capacité des directions ultramarines de Météo‑France à fournir des prestations de qualité dans de bonnes conditions.

Le syndicat « Solidaires Météo » a notamment alerté sur les suppressions de postes dédiés à la communication - pourtant essentielle pour développer le contenu de l’établissement sur les réseaux sociaux à destination du grand public – et à la prévision, notamment aéronautique en NouvelleCalédonie, ainsi qu’en Guyane. En Guyane, le service de prévision est ainsi passé d’un service permanent de sept ETP à un service semi-permanent à quatre ETP entraînant un report de charge sur les prévisionnistes en Martinique. Seuls deux postes de recherche ont été ouverts récemment à la DIROI (océan Indien) et à la DIRPF (Polynésie française) pour couvrir les sujets liés au changement climatique. De manière générale, la réduction des effectifs qui affecte tous les services de Météo‑France augmente la charge et la pénibilité du travail de ses agents et limite les capacités de l’établissement à répondre aux situations de crise, aux besoins et aux attentes nouvelles.


Évolution des effectifs des directions outre-mer de météo-france

Direction

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Antilles-Guyane

110

109

108

101

101

100

95

89

90

90

Réunion, Mayotte

78

78

76

72

72

72

72

70

68

69

Polynésie française

80

80

80

72

72

72

72

72

69

71

Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna

72

71

70

69

68

68

67

64

64

64

Saint-Pierre-et-Miquelon

8

8

8

8

8

8

8

8

8

7

TAAF

4

4

4

4

4

4

4

4

4

4

Total

352

350

346

326

325

323

318

307

303

305

Source : Météo-France.

La direction générale de Météo‑France a reconnu des difficultés pouvant être rencontrées par les équipes pour gérer les événements et aléas successifs (comme par exemple le cyclone Belal à La Réunion qui a été suivi d’autres phénomènes météorologiques majeurs).

Recommandation n° 10 : stabiliser les effectifs et les moyens financiers alloués à Météo‑France au niveau des plafonds adoptés en loi de finances pour 2023 après plusieurs années de coupes budgétaires et pour une période d’au minimum cinq ans.

B.   Les risques sismiques et volcaniques

1.   Des progrès scientifiques réalisés dans la connaissance des phénomènes telluriques

De manière générale, les personnes auditionnées issues du monde académique et scientifique ont souligné les progrès manifestes réalisés dans la connaissance et la surveillance des phénomènes telluriques au cours des dernières décennies. M. Patrick Allard a notamment évoqué l’amélioration de la compréhension du fonctionnement des volcans, des technologies et des instruments utilisés ainsi que des « capacités de détection des signaux précurseurs » de l’activité volcanique ([53]).

Dans le contexte de la crise sismique et volcanique survenue à Mayotte en mai 2018, la mission scientifique constituée dans l’urgence à travers l’observatoire Revosima (Réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte) a su apporter des réponses scientifiques rapides sur ce phénomène méconnu et accompagner efficacement l’État et les collectivités dans la gestion de crise. La nouveauté de ce risque et son ampleur justifient de pérenniser Revosima par la création d’un observatoire permanent de plein exercice.

Recommandation n° 11 : mettre en place un observatoire sismo-volcanique de plein exercice à Mayotte associant les scientifiques mahorais.

Lors de son audition, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a également pu souligner, à titre illustratif, les améliorations apportées aux cartes des aléas « mouvements de terrain » en Martinique dans le cadre d’un projet de recherche récent (2019‑2024) en partenariat avec la Direction de l’environnement, de l’aménagement et de la nature (Deal). La comparaison des cartes réalisées dans les années 1990 et celles reprises et complétées récemment témoignent du gain de précision acquis grâce à des nouvelles méthodes et données ([54]).

cartes d’aléas « mouvements de terrain » en martinique
réalisées dans les annÉEs 1990 et récemment améliorées

Source : BRGM.

 

Le rapporteur souhaite le renforcement des moyens du BRGM à hauteur d’au moins quatre ETP à La Réunion sur la thématique des glissements de terrain.

Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)

Créé en 1959, le BRGM est un établissement public industriel et commercial (EPIC) sous la tutelle principale du ministère de la recherche, mais également sous celle du ministère de la transition écologique et du ministère en charge des mines. Il compte environ 1 000 salariés dont 700 ingénieurs et chercheurs ; son budget annuel s’élève à environ 169 millions d’euros dont 65 millions d’euros de subvention pour charge de service public.

L’établissement est implanté dans six territoires ultramarins (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion, Nouvelle-Calédonie) regroupant une cinquantaine de salariés, dont trente-sept ingénieurs et chercheurs dédiés aux risques. Il y étudie tous les phénomènes liés à la géologie et au sous‑sol : séismes, mouvements de terrain – glissements, éboulements –, érosion côtière, submersion marine, tsunamis et éruptions volcaniques. Il assure sur ces sujets des missions de recherche scientifique, de surveillance et d’alerte, d’appui aux politiques publiques et à la gestion de crise.

2.   Les faiblesses persistantes du système d’observation et de surveillance des aléas volcaniques et sismiques

Les missions d’observation et de surveillance des aléas volcaniques et sismiques ont la particularité en France d’être assurées par l’Institut de physique du globe de Paris (IPGP) créé en 1921 et dont le statut est réglementé par les décrets n° 90-269 du 21 mars 1990 et n° 2019‑209 du 20 mars 2019.

Composante de l’université Paris Cité, l’IPGP est un grand établissement d’enseignement supérieur et de recherche, qui rassemble environ 500 agents et chercheurs autour de quatre grandes thématiques : « Intérieurs de la Terre et des planètes », « Risques naturels », « Système Terre », et « Origines ». Outre ses missions de recherche fondamentale, l’IPGP est en charge de la surveillance des quatre volcans actifs français situés outre-mer, ainsi que de leur sismicité régionale et des risques potentiels associés de formation de tsunamis, à travers ses observatoires volcanologiques et sismologiques (OVS) :

– l’OVS de la Guadeloupe (OVSG-IPGP) en charge de La Soufrière ;

– l’OVS de la Martinique (OVSM-IPGP) en charge de la montagne Pelée ;

– l’Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise (OVPFIPGP) à La Réunion ;

– le Réseau de surveillance volcanologique et sismologique de Mayotte (Revosima) en charge du volcan sous-marin au large de Mayotte (avec le BRGM, l’Ifremer et le CNRS).

Les représentants du CNRS auditionnés ont alerté votre rapporteur sur les faiblesses et les failles intrinsèques soulevées par cette architecture institutionnelle particulière :

– l’IPGP ne dispose pas de financements récurrents à hauteur de ses besoins en personnels et en équipements pour assurer ses responsabilités en matière de surveillance dans ses trois observatoires : sur la période 2017‑2022, seulement 33 % du coût des OVS (1,7 million d’euros par an par observatoire, hors masse salariale) a été assuré par un financement pérenne de l’Institut national des sciences de l’univers (INSU) du CNRS ; les 67 % restants ayant dû être obtenus par le biais de contrats de recherche à l’issue de procédures sélectives, incertaines et chronophages pour les équipes ;

– au plan statutaire, l’IPGP mène des tâches d’« observation » et non de « surveillance » des volcans et de la sismicité associée. Cette ambiguïté, née de la mission de recherche initiale de l’Institut, est aujourd’hui difficilement compatible avec les enjeux sociétaux de la prévision volcanologique : la surveillance implique en effet une mise à disposition permanente des personnels ; ce que l’IPGP ne peut exiger statutairement de ses personnels (l’astreinte n’étant ni reconnue ni financée). Les personnels statutaires appartenant au Corps national des astronomes et physiciens (CNAP) ne sont par ailleurs pas suffisamment nombreux pour répondre aux besoins, d’autant plus qu’un tiers de leur temps est dévolu à des tâches d’enseignement. À défaut, la moitié des tâches d’observation sont ainsi effectuées en France par des chercheurs du CNRS ou des enseignants-chercheurs des universités ;

– les tâches d’observation et de surveillance demeurant par ailleurs moins attractives et valorisées que des travaux scientifiques en recherche fondamentale, l’IPGP rencontre des difficultés pour maintenir des effectifs suffisants dans ses trois observatoires (y compris aux postes de directeur).

Dans ce contexte, de fortes incertitudes pèsent sur la capacité de l’IPGP à gérer des crises volcaniques majeures : « le système français de gestion des aléas sismiques et volcaniques dans les territoires d’outre-mer reste encore fragile du point de vue structurel et opérationnel et trop exposé aux variations de compréhension et de considération des décideurs politiques. » ([55])

Recommandation n° 12 : augmenter la part des financements pérennes aux observatoires sismologiques-volcanologiques et reconnaître leur mission de surveillance impliquant une mise à disposition 24h/24 et 7j/7 de personnels.

 

 


   deuxième partie : Mieux prévenir les risques,
réduire la vulnérabilité des territoires

I.   Des freins persistants À la mobilisation des outils de prévention des risques

A.   Des territoires ultramarins inÉgalement dotÉs en plans de prÉvention des risques naturels actualisÉS

Prévenir les conséquences d’aléas naturels majeurs nécessite de cartographier précisément les zones exposées et des périmètres d’interdiction d’usages des sols, en particulier pour la construction des logements. Ces démarches sont contraignantes pour la population et les acteurs locaux sur des territoires dont la topographie est souvent complexe, dont le foncier utile est très proche des rivages et par ailleurs restreint, et dont l’économie est souvent marquée par le développement touristique. Les contextes locaux peuvent ainsi désinciter les acteurs à actualiser des documents dont l’élaboration nécessite par ailleurs des moyens administratifs, des expertises scientifiques et des ressources humaines conséquentes et coûteuses alors même que ces documents sont absolument nécessaires à la prévention des risques et donc à la résilience des territoires.

1.   L’actualisation des PPRN dans le contexte du changement climatique est nécessaire et attendue

Introduit par la loi n° 95‑101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, dite loi « Barnier », en remplacement du « plan d’exposition aux risques » ([56]), le plan de prévention des risques naturels (PPRN) constitue l’instrument essentiel de l’action de l’État en matière de prévention des risques dans les territoires. Ce document, défini aux articles L. 562‑1 et suivants du code de l’environnement, couvre des risques naturels « prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones ». Un PPRN peut être spécialisé (dédié à un risque) ou « multirisques » s’il couvre plusieurs aléas (ce qui est le plus souvent le cas en outre-mer). Il réglemente l’utilisation des sols en fonction de leur degré d’exposition connu aux risques et délimite ainsi des zones sur lesquels s’appliquent des mesures d’interdiction de construction ou d’exploitation et des prescriptions le cas échéant.

Procédure d’élaboration et contenu des plans de prévention des risques naturels

Le plan de prévention des risques naturels est prescrit par le préfet et élaboré sous son autorité par les services de l’État avec l’association des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) concernés (article L. 562‑3). Une fois approuvé à l’issue d’une période de consultations et d’enquête publique (article L. 562‑3), il vaut servitude d’utilité publique et est annexé au plan local d’urbanisme (PLU) (article L. 562‑4). Il s’impose ainsi à tous les projets de construction notamment lors de la délivrance des autorisations d’urbanisme. La couverture du territoire par un plan ouvre également droit au financement de travaux contribuant à réduire sa vulnérabilité aux risques dans les conditions définies à l’article L. 561‑3 relatif au fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier.

L’article R. 562‑3 précise que le projet de plan contient : une note de présentation ; un ou plusieurs documents graphiques délimitant les zones inconstructibles, constructibles sous réserve d’aménagements particuliers et les zones constructibles ; un règlement décrivant les contraintes de construction et/ou d’urbanisme à respecter dans chaque zone.

Les territoires ultramarins sont inégalement dotés de cet outil qui constitue pourtant une clé de voûte pour assurer la protection des personnes et des biens dans les zones exposées à un ou plusieurs risques naturels majeurs.

Nombre de communes couvertes par un plan
de prévention des risques naturels selon les territoires

Territoire

Nombre total de communes

PPRN opposables

PPRN prescrits

PPRN en cours de révision

Guadeloupe

32

31

7

7

Guyane

22

10

3

3

La Réunion

24

24

5

2

Martinique

34

34

0

0

Mayotte

17

7

17

1

Saint-Barthélemy

1 (collectivité unique)

0

1

0

Saint-Martin

1

1

1

0

Saint-Pierre-et-Miquelon

2

1

0

0

Source : Direction générale de la prévention des risques (DGPR), d’après le système d’information « Gaspar », février 2024.

La Guyane et Mayotte sont les départements les plus faiblement couverts. À Mayotte, seules sept communes sont couvertes par un PPRN approuvé (Acoua, Bandraboua, Dembéni, Dzaoudzi-Labattoir, Koungou, M’tsamboro, Pamandzi) ; 17 demeurent prescrits. En Guyane, moins de la moitié des communes est couverte par un PPRN opposable (10 sur un total de 22 communes).

Dans les autres départements et régions d’outre-mer, la plupart des communes sont couvertes par un PPRN. Si la couverture y apparaît a priori satisfaisante, ces PPRN sont faiblement actualisés et nombre d’entre eux peuvent être considérés comme caducs. Leur révision est aujourd’hui nécessaire pour intégrer les évolutions liées au changement climatique mais également des améliorations techniques dans la cartographie des aléas ainsi que les nouvelles données démographiques et socio-économiques des territoires.

En Martinique, les 34 communes sont couvertes par un plan depuis 2004. Plusieurs programmes de révision de PPRN sont engagés depuis 2019 « afin d’intégrer les éléments de doctrine nouveaux liés au changement climatique et les évolutions techniques permettant une information plus précise » ([57]). Pour apporter ces améliorations, la DEAL a sollicité l’accompagnement de l’Observatoire de l’évolution de l’érosion du trait de côte et du BRGM sur les aléas mouvements de terrain, submersions et inondation. Elle devrait ainsi disposer d’une cartographie complète des aléas d’ici la fin de l’année 2024 pour mener les concertations avec les collectivités.

Une enquête a également été récemment lancée auprès des élus pour recueillir leurs retours d’expérience concernant les plans en vigueur et leurs souhaits de révision. La préfecture souligne une attente forte des acteurs du territoire pour disposer de cartographies actualisées des aléas et de plans révisés ; l’objectif étant de finaliser la mise à jour des PPRN à l’horizon 2026.

En Guadeloupe, si la quasi-totalité des communes est couverte par un PPRN, les plans doivent être mis à jour de façon à intégrer les impacts du changement climatique ainsi que les évolutions de l’aménagement du territoire et de la réglementation.

La DEAL Guadeloupe a indiqué que la phase de révision était engagée avec une période de travaux prévue d’un peu plus de trois ans. Elle souligne les progrès réalisés en termes d’approche par rapport à la première génération des PPRN « qui avait été perçue comme très contraignante » : d’une part, les collectivités seraient plus sensibilisées aux enjeux de la prévention des risques ; d’autre part, les services de l’État mettraient davantage l’accent sur la collaboration avec les élus et l’intégration des préoccupations et des spécificités locales. M. Olivier Kremer a souligné la nécessité de conjuguer « les enjeux fonciers, les enjeux de développement du territoire et la gestion du risque. » ([58])

Les délais de mise à jour étant longs, les PPRN actuellement en vigueur ne peuvent être considérés à court terme comme des outils pertinents sur lesquels s’appuyer d’après la vice-présidente du conseil régional de la Guadeloupe, Mme Sylvie Gustave dit Duflo, qui a également souligné la méconnaissance par la population des plans existants.

Les freins à l’élaboration ou à la révision des PPRN en outre-mer demeurent nombreux. Alors que l’article R. 562‑2 prévoit que le PPRN soit approuvé dans les trois ans suivant sa prescription par arrêté du préfet, ces délais sont généralement beaucoup plus longs. La procédure d’élaboration ou de révision d’un PPRN tend à durer plusieurs années. Elle requiert notamment des études scientifiques approfondies pour identifier précisément les aléas et les risques (par des établissements comme Météo‑France) ainsi que les enjeux du territoire concerné. En outre-mer, le nombre limité de bureaux d’études locaux compétents ainsi que la taille restreinte des services de l’État contraignent fortement l’élaboration de tels plans.

Leur efficacité est par ailleurs limitée sur des territoires concernés par de l’habitat informel et un niveau variable de respect du droit de l’urbanisme. Ces documents annexés aux plans locaux d’urbanisme constituent en effet des contraintes règlementaires à l’usage des sols. Leur application effective suppose que les autorités locales aient les moyens de faire respecter les règlements du PLU et que l’État apporte effectivement son concours. De fait, il convient de souligner que cela ne correspond pas à la réalité d’un certain nombre des territoires ultramarins. La réglementation est particulièrement difficile à mettre en œuvre en présence de nombreux bâtiments construits illégalement et d’habitats spontanés.

À La Réunion, par exemple, le parquet a demandé en 2012 à l’État, constatant la carence des communes à agir face au développement de constructions illégales, d’intervenir en zone agricole, naturelle et à risque dans le cadre d’un protocole d’accord ([59]).

 

Recommandation n° 13 : simplifier les procédures d’élaboration, de modification et de révision des plans de prévention des risques naturels (PPRN) dans les DROM afin d’accélérer leur mise à jour, garantir leur adaptation aux enjeux présents et une meilleure prise en compte des effets du changement climatique.

 

Recommandation n° 14 : favoriser une meilleure appropriation des PPRN par la population en les rendant accessible au public en ligne sous un format pédagogique.

 

Recommandation n° 15 : renforcer les moyens de Météo-France pour fournir les études scientifiques approfondies nécessaires à l’élaboration des PPRN et parvenir à une délimitation fine des zones inconstructibles.

2.   Dans les collectivités d’outre-mer, des freins persistants à l’adaptation du dispositif

En Polynésie française, seules les communes de Punaauia, Rurutu et Rimatara disposent d’un PPRN approuvé sur un total de 48 prescrits (un par commune) depuis 2001. Les représentants de la commune de Punaauia auditionnés ont souligné les difficultés rencontrées pour y associer la population : « La communication a parfois été difficile. Le processus de révision en cours provoque aussi des réactions assez vives chez nos concitoyens, notamment chez ceux dont les terrains sont classés en zone rouge. C’est le problème que nous devons gérer en ce moment : comment rendre ce PPRN acceptable pour tous ? Car les risques sont bien réels » ([60]). Du fait du statut d’autonomie de la Polynésie française, le PPRN de Punaauia n’ouvre par ailleurs pas droit aux fonds « cat nat » et Barnier. Cette absence d’aides publiques associées aux mesures d’interdictions ou prescriptives ne facilite évidemment pas « le travail d’information et de pédagogie à effectuer ».

Au regard de la faible acceptabilité de ce dispositif hexagonal, le Pays a engagé une réflexion en 2019 pour le réformer. D’après le haut-commissariat de la République, l’échec des PPRN s’expliquerait en Polynésie par « une acceptabilité élevée aux risques du quotidien », « une culture de la fatalité face à des risques de grande envergure » et des freins majeurs à l’encadrement du foncier ([61]).

La répartition des compétences en matière de prévention
et de gestion des risques naturels en Polynésie française

La Polynésie française est une collectivité d’outre-mer dite « autonome » qui relève de l’article 74 de la Constitution ; s’y applique le régime de spécialité législative qui implique que les lois et règlements n’y sont applicables que sur mention expresse.

La répartition générale des compétences entre l’État et la collectivité est régie par la loi organique n° 2004‑192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française. La collectivité est compétente dans tous les domaines qui ne sont pas expressément attribués à l’État par la loi organique.

En matière de gestion des risques, la répartition des compétences a été précisée par l’ordonnance n° 2006‑173 du 15 février 2006 portant actualisation et adaptation du droit applicable en matière de sécurité civile en Polynésie finasse. Son article 1er indique que « L’État est garant de la cohérence de la sécurité civile en Polynésie française. Il en définit la doctrine et coordonne tous les moyens. Avec le concours de la Polynésie française dans le cadre de ses compétences ainsi que des communes, il évalue en permanence l’état de préparation aux risques et veille à la mise en œuvre des mesures d’information et d’alerte des populations. La Polynésie française concourt à la prévision des risques de sécurité civile dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues notamment en matière d’urbanisme, de protection de l’environnement, d’aménagement du territoire et de prévention des risques naturels. »

Au regard de cet ordonnance, il est usuellement considéré que les politiques transversales relatives à la prévention des risques naturels relèvent du domaine du Pays tandis que la sécurité civile et la réponse opérationnelle en cas de crise sont de la responsabilité de l’État en Polynésie française.

Pour autant, l’appropriation et l’exercice des compétences du Pays en matière de prévention s’inscrivent dans le temps long et apparaissent limités par un manque de moyens et d’ingénierie. La direction de l’environnement (Diren) et la direction de la construction et de l’aménagement (DCA) seraient notamment à renforcer par rapport aux enjeux de prévention des risques. Lors de son audition, le haut-commissaire de la République a ainsi souligné, dans la limite de leurs attributions et de leurs moyens, la nécessité d’un accompagnement des initiatives du Pays par les services de l’État. C’est par exemple le cas du centre de traitement des appels (CTA) soutenu par l’État via des financements de la Dgom et du haut-commissariat ainsi qu’une mission d’appui de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), afin de favoriser sa structuration et sa montée en puissance.

Au terme de la réforme engagée par le Pays, les PPRN seront remplacés par des schémas de gestion des risques naturels (SGNR) au plan réglementaire et un « Atlas des risques naturels » au plan cartographique :

– à l’échelle de chaque archipel, le SGRN définira des règles d’occupation des sols et de l’espace dans les zones d’aléas identifiés par l’atlas des risques naturels. Il sera prescrit et approuvé par arrêté ministériel après enquête publique, avis des communes et du comité d’aménagement du territoire (CAT). Le SGRN approuvé vaudra servitude d’utilité publique et s’imposera aux documents de planification. Des sanctions pénales sont prévues en cas de non‑respect de ses règles ;

– l’atlas des risques recenserait les risques (inondation, submersion marine, glissement de terrain, incendie de forêt, cyclone, tempête, érosion côtière, séisme, tsunamis) par secteur. Il est prévu que sa mise à jour soit validée par une commission dédiée à cet effet composé de représentants de services du Pays et d’un représentant du haut-commissariat.

Un droit à l’information du public sur les risques naturels a également été introduit dans la réglementation locale à l’occasion de cette réforme. Des cartographies et rapports techniques ont été notamment mis à disposition du public sur le site internet de la direction de la construction et de l’aménagement (DCA) du Pays. La cartographie en ligne distingue les zones d’aléa selon leur intensité (majeure, forte, moyen, faible), et les zones exposées aux risques d’inondation, de mouvements de terrain et de submersion marine ([62]). Des réunions locales d’information sont également organisées dans les communes.

À ce jour, d’après les informations de la Direction générale des outre-mer, l’arrêté du Pays ayant pour objet la réforme des PPRN n’a pas encore été publié. Aucun SGPN n’a encore été établi.

Sollicitée par le rapporteur à ce sujet, la direction du ministère de l’intérieur et des outre-mer a souligné le pragmatisme de la solution retenue par le Pays ; une procédure globalisée par archipel étant probablement plus simple à mettre en œuvre qu’une procédure de type PPRN par commune qui n’a pas fonctionné jusqu’à présent. Elle a également salué la création d’une stratégie de prévention des risques naturels et d’adaptation au dérèglement climatique en Polynésie français : celle-ci fait écho aux préoccupations de l’État dans l’hexagone et dans les autres territoires ultramarins et apparaît particulièrement essentielle en Polynésie face à l’intensification des phénomènes météorologiques et l’élévation du niveau de la mer. Dans la limite de ses attributions et sans préjudice des compétences du Pays, il pourrait être intéressant que le Haut-commissariat puisse formuler un avis sur cette stratégie de façon à mieux prendre en compte ses objectifs dans les politiques qu’il accompagne et les missions de sécurité civile qu’il assure.

À Wallis-et-Futuna, aucun PPRN n’a pu émerger en raison de nombreuses problématiques foncières ; la majorité des constructions (y compris des services de l’État et du Territoire) étant située en bord de mer.

La Nouvelle-Calédonie n’est couverte par aucun PPRN ou document équivalent en raison d’un manque de connaissance et de données sur les différents aléas et les zones exposées. En particulier le zonage sismique de la Nouvelle‑Calédonie est inexistant ; ce qui rend les règles de construction parasismique inapplicables. Suite à une recommandation de la chambre territoriale des comptes ([63]), la DGSCGC en Nouvelle‑Calédonie a indiqué engager en 2024 une étude de faisabilité dans le cadre du plan stratégique 2024-2026 pour la mise en place de ces plans à un horizon encore indéterminé.

Outre les difficultés à cartographier ce territoire immense, l’application d’une réglementation urbaine est également freinée par la prégnance des terres coutumières « inaliénables, incommutables, incessibles et insaisissables (règle dite des « 4 i ») et sur lesquelles l’État, la province ou la commune n’ont pas la compétence puisqu’elles sont régies par les autorités coutumières », ainsi que la présence de l’habitat spontané dans les zones exposées aux risques ([64]).

M. Louis Le Franc a ainsi évoqué, à titre illustratif, la visite du président de la République le 10 juillet 2024 sur les terres coutumières d’une commune confrontée à des problèmes d’érosion des côtes et de relogement des populations : « le maire, le président de la province Nord et l’État n’étant pas compétents, ces problèmes relevaient de l’autorité du chef de clan. Il a fallu reloger les populations dans des constructions nouvelles à l’écart du littoral en collaboration entre le maire et les autorités coutumières, mais l’État et le président de la province ne pouvaient pas s’en mêler alors que le plan d’urbanisme relève de la compétence de la province. » ([65])

De manière générale, la politique de prévention des risques naturels majeurs apparaît encore « en phase embryonnaire » en Nouvelle-Calédonie. Les communes ne sont pas ou peu dotées de plans communaux de sauvegarde (PCS) ni de documents d’information communale sur les risques majeurs (DICRIM).

Recommandation n° 16 : accompagner l’élaboration de plans de zonage des aléas, en particulier du risque sismique, en Nouvelle-Calédonie.

B.   Le fonds barnier demeure difficile À mobiliser et d’un montant insuffisant

1.   L’intégration du fonds au budget général de l’État en 2021 a été bénéfique pour l’outre-mer

Le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), également appelé « fonds Barnier », a été créé par la loi n° 95‑101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement. La création du fonds visait initialement à financer les indemnités allouées en cas d’expropriation de biens exposés à un risque prévisible de mouvements de terrain, d’avalanches, de crues ou de submersion marine menaçant gravement les vies humaines (article L. 561‑1 du code de l’environnement). Jusqu’à son rattachement au budget général de l’État en 2021, il était financé par un prélèvement sur les primes additionnelles versées par les assurés au titre de la garantie des catastrophes naturelles ([66]).

Depuis sa création, ses missions énumérées à l’article L. 5613 du code de l’environnement ont été constamment élargies et le fonds est devenu la principale source de financement de la politique nationale de prévention des risques naturels. Outre les indemnités allouées en cas d’expropriation d’un bien exposé, il peut notamment financer :

– l’acquisition amiable de biens exposés à un risque prévisible ;

– les dépenses de relogement des personnes exposées dont les biens ont été expropriés ou acquis à l’amiable ;

– les études et actions de prévention des collectivités territoriales couvertes par un PPRN approuvé ou prescrit ;

– les études et travaux de prévention du risque sismique dans les services départementaux et territoriaux d’incendie et de secours (SDIS), les bâtiments publics utiles aux gestions de crise, les établissements scolaires et les habitations à loyer modéré (HLM) ;

– les études et actions de prévention mises en œuvre par les Agences des cinquante pas géométriques ;

– les études et travaux de prévention définis et rendus obligatoires par un PPRN approuvé sur des biens à usage d’habitation ou sur des biens utilisés dans le cadre d’activités professionnelles d’entreprises employant moins de vingt salariés ;

– les études d’évaluation menées par l’État et les dépenses engagées pour l’élaboration des PPRN ;

– les actions d’information préventives ;

– les études et travaux de mise en conformité des digues domaniales de protection contre les crues et les submersions marines.

Depuis la loi n° 2011‑725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer, dite loi « Letchimy », le fonds peut également financer les frais de démolition des locaux d’habitations sans droit ni titre situés dans une zone exposée à un risque naturel prévisible qui menacerait gravement des vies humaines, les frais de remise en état des terrains, ainsi que l’aide financière versée aux occupants prévue à l’article 6 de ladite loi.

Dans un référé du 5 décembre 2016, la Cour des comptes critiquait l’élargissement continu du champ d’intervention du fonds ayant mené à la débudgétisation de dépenses ordinaires de l’État (comme des études ou subventions aux collectivités locales). Le rapport d’information sur les risques naturels majeurs dans les outre-mer du Sénat n° 688 publié en juillet 2018 préconisait quant à lui de revenir sur le plafonnement des ressources du fonds.

La loi de finances pour 2021 a intégré le fonds au budget général de l’État avec la création de l’action 14 du programme 181 « Prévention des risques » ([67]). Les ressources du fonds ont également été relevées à 205 millions d’euros par an et 225 millions d’euros en loi de finances initiales pour 2024 (contre 131,5 millions d’euros jusqu’alors).

Cette augmentation du fonds a été favorable à l’outre-mer. En effet, depuis sa création jusqu’en 2020, 15 % des dépenses du fonds ont été attribués en moyenne à des territoires ultramarins. Cette part est en augmentation sur la période récente pour atteindre 20 % entre 2021 et 2023, ce qui témoigne par ailleurs des besoins de financement de ces territoires.

En outre-mer, la mobilisation moyenne du fonds était de 33,5 millions d’euros par an sur la période 2018‑2020. Depuis sa budgétisation, elle s’établit à une moyenne de 44,7 millions d’euros par an (soit une hausse de 33 %).

2.   Une répartition biaisée du fonds par type de dépenses et par territoire en outre-mer

Le fonds bénéficie toutefois inégalement aux territoires ultramarins. Plus de 90 % des financements alloués à l’outre-mer ont ainsi bénéficié à la Martinique et la Guadeloupe, principalement dans le cadre du plan séisme Antilles (PSA) au bénéfice d’opérations et de travaux de mise aux normes parasismiques des établissements scolaires, des SDIS et des HLM.

La Réunion et surtout, Mayotte, bénéficient proportionnellement très peu du fonds. En 2023, la dépense moyenne du fonds Barnier par habitant s’élevait ainsi à 60,88 euros en Guadeloupe, 30,84 euros en Martinique, 65,19 euros à Saint‑Pierre-et-Miquelon (moins de 6 000 habitants), 3,44 euros en Guyane et 3,16 euros à La Réunion ([68]).

rÉpartition des financements du fonds barnier par territoire

(en millions d’euros)

 

Après budgétisation (2021-2023)

Avant budgétisation (1995-2020)

Total

Part par territoire pour l’outre-mer

Guadeloupe

74,4

109,3

183,7

41,6 %

Guyane

2,0

7,9

9,9

2,2 %

Martinique

42,4

162,0

204,4

46,3 %

Mayotte

8,1

5,0

13,0

2,9 %

Réunion

6,8

22,8

29,6

6,7 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

0,5

0,3

0,8

0,2 %

Outre-mer

134,2

307,3

441,5

100 %

National

687,8

2 355,3

3 043,2

ns

Part outre-mer

20 %

13 %

15 %

ns

Source : Direction générale de la prévention des risques.

Certaines dépenses éligibles prévues par la loi ont par ailleurs très peu d’effectivité. C’est le cas en particulier :

– de l’habitat informel : 1,4 million d’euros entre 2021 et 2023 soit 1 % du fonds en outre-mer sur la période ;

– et de l’information préventive : 1,2 million d’euros entre 2021 et 2023.

Le fonds bénéficie assez largement aux collectivités territoriales (50 % des dépenses) et dans une moindre mesure aux services de l’État et aux établissements publics fonciers mais demeure sous-mobilisé par les particuliers et les petites entreprises qui y sont pourtant éligibles pour leurs travaux de réduction de vulnérabilité de leur bâti exposé à un risque d’inondation ou encore un risque sismique.

RÉpartition des financements du fonds barnier
par type de dÉpenses en outre-mer

(en millions d’euros)

Type de dépenses

Après budgétisation (2021-2023)

Avant budgétisation (1995-2020)

Total

Part par type de dépenses

Études et actions des collectivités territoriales (dont confortement des établissements scolaires)

41,6

182,4

224,0

50,7 %

Confortement HLM

44,6

40,9

85,5

19,3 %

Études et travaux sur les SDIS

2,3

19,6

21,8

4,9 %

Confortement de bâtiments de gestion de crise

16,4

8,4

24,8

5,6 %

Habitat informel

1,4

5,05

6,5

1,5 %

Acquisitions amiables

7,2

16,1

23,3

5,3 %

Expropriations

0,2

6,4

6,6

1,5 %

Relogements temporaires

0,7

2,2

2,9

0,7 %

Connaissance des risques dont PPRN

18,4

24,1

42,5

9,6 %

Information préventive

1,2

1,8

3,0

0,7 %

Confortement des digues domaniales

0,3

0,4

0,6

0,1 %

Ensemble outre-mer

134,2

307,3

441,5

100 %

Source : Direction générale de la prévention des risques.

3.   Des évolutions récentes ayant permis d’améliorer la transparence, la lisibilité et l’accessibilité du fonds

Le fonds Barnier fait l’objet de critiques récurrentes depuis sa création. Le rapporteur a toutefois pu constater que des évolutions récentes ont pu être apportées :

– la budgétisation du fonds permet depuis 2021 au Parlement d’exercer pleinement son contrôle sur le montant des ressources allouées et l’exécution des dépenses. Le financement en est également simplifié et facilité ; les crédits du fonds ayant été augmentés en 2021 puis en 2024 ;

– le fonctionnement du fonds Barnier apparaît d’une façon générale plus lisible : l’article 224 de la loi de finances pour 2021 a réécrit l’article L. 561‑3 du code de l’environnement de façon à clarifier et actualiser les interventions du fonds. Le décret n° 2021‑518 du 29 avril 2021 relatif au fonds de prévention des risques naturels majeurs a en particulier précisé les plafonds de financement selon les types de dépenses (et donc les restes à charge pour les collectivités) ([69]) ;

– le fonds vert créé en 2023 peut, dans certaines conditions, aider au financement du reste à charge d’opérations financées par le fonds Barnier. Ce reste à charge peut en effet être conséquent et constituer un frein pour les collectivités : il s’élève généralement à 20 %, à l’exception des expropriations ou des acquisitions amiables financées à 100 % dans la limite de 240 000 euros par unité foncière ;

– la loi de finances pour 2024 permet désormais que les Agences des cinquante pas géométriques soient désignées opérateurs du fonds. Les modalités d’intervention des agences demeurent en cours de définition. Cette mesure fait suite d’une part, au rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (Cgedd) de 2020 ([70]) et d’autre part, aux conclusions du Comité interministériel des outre-mer du 18 juillet 2028 (dont la mesure 68 vise à mettre à l’abri les populations exposées au changement climatique en permettant aux Agences des cinquante pas d’accéder au fonds Barnier). Elle apporte une première réponse au manque d’ingénierie des collectivités qui constitue un frein majeur pour pouvoir recourir au fonds ;

– enfin, si le fonds demeure faiblement mobilisé pour de l’action préventive, en 2023, il a permis le financement d’une première campagne d’information d’envergure sur les pluies intenses en outre-mer.

4.   D’un fonds de prévention à un fonds d’adaptation ?

Les freins à la mobilisation du fonds en outre-mer demeurent importants. Les représentants des territoires auditionnés ont rappelé le manque d’ingénierie des maîtres d’ouvrage, la complexité du montage financier des opérations et les restes à charge élevés. M. Jean-Claude Maes, président de l’Association des communes et collectivités d’outre-mer, rappelle que « de nombreuses communes ne possèdent pas l’ingénierie nécessaire pour mobiliser le fonds Barnier. » ([71])

Les particuliers et les petites entreprises, en particulier, sont peu informés et le cas échéant, ne bénéficient d’aucun accompagnement au montage d’un dossier de demande de financement au titre du fonds Barnier pour la réalisation de travaux de confortement et de réduction de la vulnérabilité de leur bien.

Les critères d’éligibilité stricts au fonds Barnier entravent plus généralement le développement de politiques d’adaptation ambitieuses face au changement climatique dans les territoires les plus vulnérables aux phénomènes climatiques extrêmes, et notamment les zones littorales.

À Mayotte, les critères d’éligibilité au fonds, en particulier la couverture par un plan de prévention des risques, et le défaut de titres fonciers, constituent des freins majeurs à sa mobilisation.

Il est également à noter que le fonds Barnier n’est pas applicable à tous les territoires ultramarins ; notamment à la Polynésie française du fait du statut d’autonomie qui la régit. Il y a de ce fait un manque de moyens pour appuyer le développement d’une véritable politique de prévention des risques naturels majeurs en Polynésie. M. Samuel Étienne, directeur d’études à l’École pratique des hautes études, soulignait à ce titre que : « si la volonté d’assurer la sécurité des biens et des personnes est louable, l’absence de tout dispositif financier pérenne fragilise l’édifice et crée un déséquilibre entre la recherche de la sécurité et les contraintes qui pèsent sur les individus. » ([72])

Enfin, les projets d’aménagement des zones littorales menacées par l’élévation du niveau de la mer et l’érosion côtière ne sont pas à ce jour éligibles au fonds Barnier. Or, s’agissant particulièrement de la gestion de l’érosion côtière, la frontière avec des actions de prévention des submersions marines (éligibles au fonds) peut apparaître ténue, voire incertaine. Le fonds Barnier finance par exemple à ce titre le projet de relocalisation du village de Miquelon.

Le rapporteur recommande d’intégrer un volet « adaptation au changement climatique » au fonds Barnier, prenant notamment en compte les effets de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion côtière sur la vulnérabilité des zones littorales exposées aux risques naturels majeurs (cyclones, submersion, mouvements de terrain, etc.).

Recommandation n° 17 : intégrer un volet « adaptation au changement climatique » au fonds Barnier, en rendant notamment éligibles au fonds les projets d’adaptation des zones littorales subissant les effets de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion côtière.

II.   Le défi de l’adaptation du bâti et de l’habitat aux risques naturels majeurs

A.   la persistance de l’habitat informel et indigne dans les zones à risques

1.   Une connaissance lacunaire à renforcer dans un contexte d’évolution rapide

Le développement de l’habitat informel en outre-mer est un facteur majeur de vulnérabilité en cas de catastrophe naturelle. Cet habitat sans droit ni titre ne respecte pas les règles de construction et d’urbanisme et apparaît surreprésenté dans les zones fortement exposées à des risques naturels majeurs.

L’article 8 de la loi Letchimy (précité) a défini l’habitat informel figurant à l’article 4 de la loi n° 90‑449 du 31 mai 1990 comme étant constitué par « des locaux ou installations à usage d’habitation édifiés majoritairement sans droit ni titre sur le terrain d’assiette, dénués d’alimentation en eau potable ou de réseaux de collecte des eaux usées et des eaux pluviales ou de voiries ou équipements collectifs propres à en assurer la desserte, la salubrité et la sécurité dans des conditions satisfaisantes. » S’il est massivement insalubre et indigne au sens de la définition inscrite au même article ([73]) notamment lorsqu’il est construit en matériaux précaires, l’habitat informel, dit également « spontané », ne se confond pas exactement avec la notion d’habitat indigne. Il peut en effet regrouper une large gamme d’habitats : bidonvilles ou constructions plus diffuses, de l’abri en tôle à la villa en dur. D’une manière générale, les situations de mal-logement en outre-mer ont un caractère protéiforme et évolutif qui rend difficile leur quantification ([74]). Ce parc évolue également rapidement notamment dans le contexte du changement climatique.

Son développement est la conséquence directe du déficit de logements disponibles dans des territoires caractérisés par des contraintes d’aménagement fortes, la faible disponibilité du foncier à des prix abordables, des coûts de construction élevés, une proportion importante de ménages à faibles revenus, et particulièrement, en Guyane et à Mayotte, une pression démographique importante liée à une forte natalité et une immigration massive, et souvent illégale, depuis les pays voisins.

L’habitat informel dans les DROM est estimé à près de 12,5 % du total des logements (soit au moins 110 000 habitats sur un parc total de près de 900 000 logements) ([75]). Le rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre publié en 2023 estime le nombre de logements indignes à environ 150 000.

De manière générale, Mayotte et la Guyane sont concernées par d’importants quartiers d’habitat informel pouvant prendre la forme de bidonvilles. Leur développement est rapide : la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) estime que plus de 1 000 logements informels supplémentaires sont édifiés chaque année dans chacun de ces deux territoires.

À La Réunion, les opérations de résorption de l’habitat insalubre (RHI) ont conduit à la quasi-disparition des phénomènes de bidonvilles bien qu’il subsiste des formes d’habitat spontané ou informel en diffus. Le succès de ces opérations nécessiterait un retour d’expérience et une évaluation de l’État de façon à adapter la politique menée sur ce territoire dans les autres territoires ultramarins.

La Martinique et la Guadeloupe possèdent une part relativement faible de logements sans droit ni titre et précaires ; toutefois, certaines grandes poches informelles perdurent.

Une partie de ces logements est localisée dans des zones exposées à des risques naturels majeurs (zones des cinquante pas géométriques notamment) et nécessite des interventions urgentes. La connaissance de ces logements demeurant parcellaire, leur dénombrement n’est pas stabilisé. Le rapport précité de la Fondation Abbé Pierre avance quelques chiffres indicatifs issus de sources variées :

– 37 287 constructions spontanées en Guyane dont 4 300 en zone à risques inconstructible soit 11 % du bâti spontané d’après un recensement de 2015 ;

– 17 756 bâtis indignes dont 4 500 exposés à un risque naturel élevé à La Réunion ;

– plus de 8 000 cases en tôle exposées à des risques naturels à Mayotte.

En Guadeloupe et en Martinique, les Agences des cinquante pas géométriques ont engagé des travaux pour réaliser différentes cartes de zonage en vue du transfert de la zone des cinquante pas géométriques à la collectivité. Ces cartes doivent notamment délimiter à terme des « zones de menaces graves pour les vies humaines » (ZMVGH). Leurs modalités de définition font actuellement l’objet d’un décret en Conseil d’État en cours d’élaboration d’après les informations transmises par la Dgom :

– en Martinique, les ZMVGH ont été définies en prenant en considération les aléas inondations et rocheux. 488 bâtis à usage d’habitation ont été dénombrés dans ces zones ; toutefois, leur caractère régulier ou dégradé n’est pas référencé à ce stade du diagnostic ;

– en Guadeloupe, les ZMVGH ont été définies en prenant en compte les aléas inondations, rocheux et de submersion marine. 512 bâtiments y ont été recensés dont plus de 340, non titrés. D’après la DEAL, 250 ménages sont concernés.

Recommandation n° 18 : recenser les habitations informelles et/ou indignes situées dans des zones exposées à un ou plusieurs risques naturels majeurs de nature à faire peser une menace grave pour les vies humaines.

2.   Les outils de la loi Letchimy concernant les zones à risques sont faiblement mobilisés et n’ont pas fait l’objet d’une appropriation par les acteurs territoriaux

L’article 6 de la loi n° 2011‑725 du 23 juin 2011, dite « loi Letchimy », a ouvert la possibilité de financer, via le fonds Barnier, la démolition des locaux informels situés dans une zone exposée à un risque naturel prévisible menaçant gravement les vies humaines ainsi que le versement d’une aide financière compensatrice aux occupants à l’origine de l’édification de ces locaux.

L’aide financière est plafonnée à hauteur de 40 000 euros par unité foncière de biens à usage d’habitation et son versement est soumis au respect des conditions suivantes :

– les locaux constituent une résidence principale ;

– les occupants justifient d’une occupation continue et paisible depuis plus de dix ans à la date de l’ouverture de l’enquête publique ;

– les occupants n’ont pas fait l’objet d’une ordonnance d’expulsion au cours de cette même période.

Alors que l’adoption de la loi a marqué un véritable tournant en créant un premier corpus législatif traitant spécifiquement des enjeux de l’habitat informel dans les départements et régions d’outre-mer, plus de douze ans après son adoption, sa mise en œuvre n’a pas répondu aux attentes pour réduire la vulnérabilité de cet habitat et de ses populations dans les zones exposées aux risques naturels majeurs.

Le fonds Barnier est très peu mobilisé ; son utilisation demeure ponctuelle (par exemple en Guyane où une opération majeure a été financée à hauteur de 3,3 millions d’euros). D’après les données communiquées par la DGPR, entre 2021 et 2023, seulement 1,4 million d’euros soit 1 % des financements du fonds Barnier mobilisés en outre-mer a été utilisé pour de l’habitat informel. Les crédits budgétés chaque année au titre de l’article 6, de l’ordre de 5 millions d’euros, sont donc largement sous-mobilisés.

L’évaluation réalisée par la Dgom en 2022 ([76]) souligne, de manière générale, un manque d’accompagnement, d’animation et de moyens humains et financiers dans les territoires. Les outils ouverts par la loi Letchimy font encore l’objet d’une appropriation partielle par les acteurs.

La lutte contre l’habitat indigne constitue plus généralement une politique sensible à mettre en œuvre. Les maires et élus locaux rencontrent des difficultés pour faire prendre conscience et accepter aux habitants des zones exposées aux risques la nécessité d’être relogés. L’attachement à des parcelles occupées de longue date est souvent très fort et certains occupants refusent d’être relogés. Une action administrative plus coercitive demeure très délicate bien que parfois nécessaire.

Des avancées sont néanmoins nécessaires et attendues de la part des services de l’État et des collectivités.

La connaissance de l’habitat informel et dégradé par les services étatiques et territoriaux demeure lacunaire. Il est urgent d’opérer un recensement des habitations informelles situées dans les zones inconstructibles du fait de leur exposition à un ou plusieurs risques naturels majeurs.

Les Agences des cinquante pas géométriques n’ont été reconnues que récemment opératrices du fonds Barnier ([77]) ; le décret visant à définir les modalités de leur intervention est en cours d’élaboration. Celles-ci pourraient mobiliser le fonds pour :

– secourir à l’amiable ou par voie d’expropriation les biens exposés aux risques naturels majeurs ;

– libérer et remettre en état les terrains concernés ;

– contribuer au relogement des personnes exposées ;

– conduire les études et actions de prévention ;

– acquitter l’aide financière prévue à l’article 6 de la loi « Letchimy ».

L’accompagnement des services de l’État et des collectivités dans la mobilisation des outils ouverts par l’article 6 de la loi Letchimy doit être une priorité du plan logement outre-mer 2024-2027 actuellement en cours d’élaboration.

 

Recommandation  19 : accompagner les services de l’֤État et des collectivités dans la mise en œuvre effective de l’article 6 de la loi Letchimy et mobiliser au moins 5 % des financements du fonds Barnier pour l’habitat informel.

B.   le plan séisme antilles (psa) : des dynamiques récentes à conforter

1.   Bilan des PSA 1 et 2 (2007-2019) : des travaux d’ampleur restent à mener pour sécuriser la population antillaise

Engagé en 2007 et prévu pour une durée de trente ans, le plan séisme Antilles (PSA) vise principalement la réduction de la vulnérabilité du bâti public prioritaire existant dans les Antilles via la réalisation de travaux de confortement parasismique et de reconstruction. Les deux premières phases du plan (2007‑2016 ; 2016‑2021) ont ciblé quatre types de bâtiments :

– les bâtiments de gestion de crise (établissements des services départementaux d’incendie et de secours, bâtiments de gestion de crise de l’État) ;

– les établissements d’enseignement ;

– les établissements hospitaliers ;

– les logements sociaux.

Le plan comprend également un volet dédié à l’information préventive et à la sensibilisation des populations et des élus au risque sismique et à la gestion de crise. Entre 2007 et 2019, 12 millions d’euros ont été dépensés pour ce type d’actions en Guadeloupe et 3,25 millions d’euros en Martinique.

Au total, sur la période 2007-2019, environ un milliard d’euros a été engagé par l’État et les collectivités territoriales sur la globalité du programme dont 577 millions d’euros en Martinique et près de 491 millions d’euros pour la Guadeloupe. Les opérations les plus coûteuses ont porté sur les établissements de santé publics (715 millions d’euros) et les établissements scolaires (214 millions d’euros).

Bilan financier des opérations – terminées - réalisées entre 2007 et 2019
dans le cadre du plan séisme antilles au 31 décembre 2019

(En millions d’euros)

 

Martinique

Guadeloupe

Saint-Martin

Total

Établissements scolaires

75,6

138

0,643

214

Logements sociaux

33,3

41

3,95

78,25

Établissements de santé publics

432,3

280

3,2

715,2

SDIS

33,2

20

0

37,79

Autres bâtiments de gestion de crise

0

0

0

0

Actions d’information

3,25

12

0

15,25

Total

577

491

7,79

1 076

Source : Direction générale de la prévention des risques, d’après le bilan du PSA publié par la Dirmom en juin 2021.

Des opérations notables ont ainsi été réalisées ou engagées dans le cadre du plan au cours des deux premières phases. Fin 2019, les opérations terminées concernaient :

– en Martinique : 6 centres hospitaliers (pour un coût de 432,3 millions d’euros), 25 écoles sur 177 à remettre à niveau (48 millions d’euros), 4 collèges (10,4 millions d’euros), 4 lycées (17,2 millions d’euros), 9 sites de SDIS sur 26 à remettre à niveau (33,2 millions d’euros), 5 703 logements sociaux ;

– en Guadeloupe et à Saint-Martin : 7 centres hospitaliers (280 millions d’euros), 33 écoles dont une à Saint-Martin sur 212 à remettre à niveau (100 millions d’euros), 5 collèges (38 millions d’euros), 2 sites de SDIS sur 17 à remettre à niveau (20 millions d’euros), 2 479 logements sociaux.

Le bilan établi par la Délégation interministérielle aux risques majeurs outre-mer (Dirmom) estime que, sur la base des opérations terminées, en cours de réalisation et programmées à la fin de l’année 2019 :

– 50 % de la population était couverte par un centre de secours SDIS aux normes parasismiques en Martinique et 32,5 % en Guadeloupe, la conformité du SDIS à Saint-Martin restant à contrôler ;

– 30,6 % des élèves étaient dans des établissements du premier degré sécurisés en Martinique et 35 % en Guadeloupe ;

– 41 % des élèves étaient dans des collègues sécurisés en Martinique et 34,5 % en Guadeloupe ;

– 42,5 % des élèves étaient dans des lycées sécurisés en Martinique et 33,5 % en Guadeloupe ;

– 60 % des logements sociaux étaient sécurisés en Martinique et 27 % en Guadeloupe.

Ces éléments de bilan soulignent l’ambition des opérations qui ont pu être engagées depuis 2007 tout autant que l’ampleur des travaux qui restent à mener pour sécuriser l’ensemble de la population antillaise, en particulier dans les écoles de premier degré et également au niveau des bâtiments de gestion de crise de l’État et des collectivités territoriales. Tant en Guadeloupe qu’en Martinique, plus de la moitié des élèves du premier degré et du second degré ne sont ainsi toujours pas scolarisés dans un établissement scolaire sécurisé aux normes parasismiques.

La mise en œuvre du plan soulève plusieurs difficultés pouvant expliquer les retards pris dans son déploiement :

– d’abord, sur le plan financier, le coût des opérations de confortement est très élevé et majoré par le contexte ultramarin. Les communes des Antilles ont également des taux d’endettement très élevés ne leur permettant pas toujours d’engager les financements nécessaires aux opérations.

Pour pallier ce manque de financement, deux mesures relatives au fonds Barnier ont notamment été introduites en loi de finances pour 2019 : la hausse du taux de soutien pour les études et les travaux relatifs au confortement parasismique et la reconstruction des établissements scolaires de 50 % à 60 % et la suppression, à compter du 1er janvier 2020, des plafonds financiers sur les mesures de confortement parasismique des différents bâtiments éligibles au financement du fonds Barnier ;

– les collectivités territoriales, en particulier les plus petites, ne disposent pas de l’ingénierie adaptée à ces projets techniques et complexes ni des ressources humaines suffisantes pour assurer leur maîtrise d’ouvrage. L’accompagnement des collectivités s’est révélé insuffisant au cours des deux premières phases du plan ;

– la disponibilité de professionnels de la construction formés aux techniques de construction parasismiques n’est également pas garantie dans les territoires ;

– enfin, la rareté de l’offre foncière disponible pour relocaliser, au moins temporairement, les occupants des bâtiments concernés pas des opérations de destruction et reconstruction, a également été présentée comme un frein par les administrations centrales. Cette difficulté, qui existe aussi sur l’hexagone, prend une dimension particulière en outre-mer compte tenu de la pénurie foncière qui caractérise ces territoires. À cet égard, les dispositions de la loi récemment votée n° 2024‑322 du 9 avril 2024 visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement paraissent indispensables et peuvent nécessiter des adaptations supplémentaires pour l’outre-mer.

2.   Un troisième volet (2021-2027) ambitieux en cours de déploiement

L’élaboration du troisième volet du PSA (2021‑2027) a été confiée en mai 2019 à la Dirmom qui a mis en place à cette fin un comité de pilotage en octobre 2019. Les travaux de ce comité composé de représentants de l’État, de la collectivité territoriale de Martinique, du conseil régional de Guadeloupe, du conseil départemental de Guadeloupe, de la collectivité de Saint‑Martin, de la collectivité de Saint‑Barthélemy, des associations des maires de Martinique et de Guadeloupe ainsi que d’autres partenaires (bailleurs sociaux, Agence française de développement, Caisse des dépôts et de consignation) ont permis aux acteurs concernés de dialoguer et d’identifier des leviers pour dynamiser la mise en œuvre du plan. Lors de son audition, M. Frédéric Mortier, ancien délégué interministériel, a souligné la démarche collégiale et novatrice qui a guidé l’élaboration du plan : « pour la première fois en trente ans, un volet du PSA a été signé par cinq ministres, sept présidents de collectivités territoriales et des maires. Le fait de pouvoir travailler simultanément avec toutes les parties prenantes en circuit court a joué un rôle déterminant. »

Le comité de pilotage a adopté le troisième PSA en avril 2021. Le suivi du PSA est désormais assuré par la mission d’appui aux politiques publiques de prévention des risques majeurs outre-mer (Mappprom).

a.   Des objectifs ambitieux de réduction de vulnérabilité du bâti public prioritaire

Ce troisième plan poursuit l’objectif principal d’accélérer le rythme des chantiers de renforcement et de reconstruction du bâti public prioritaire. Il fixe des objectifs chiffrés de réduction de la vulnérabilité du bâti public et des populations à l’horizon 2027 recensés dans le tableau ci-dessous. Il est ainsi notamment prévu que 66,4 % des élèves soient scolarisées dans des écoles de premier degré confortées en Martinique et 54,10 % en Guadeloupe pour 2027.

objectifs de réduction de la vulnérabilité des populations
en martinique et en guadeloupe (2021-2027) hors bâti de l’État

En pourcentage

 

Martinique

Guadeloupe

 

Fin 2019

Objectifs 2027

Fin 2023

Fin 2019

Objectifs 2027

Fin 2023

SDIS

66,2 %

94 %

nc

32,5 %

71 %

Nc

Écoles

30,6 %

66 %

38 %

35 %

54 %

41 %

Collèges

41 %

61 %

46,5 %

34,5 %

54,5 %

34 %

Lycées

42,5 %

62 %

19 %

45 % (1)

Logements sociaux

60,8 %

96 %

nc

19 %

65 %

nc

Source : Dirmom, « PSA : objectifs de la troisième phase », 3 juin 2021.

(1) Cet objectif correspond à l’achèvement de l’opération de Baimbridge et à la mise aux normes du lycée Gerty Archimède, Paul Lacavé et du lycée Louis Delgrès.

Il conforte les moyens alloués au plan avec un montant global de 1,191 milliard d’euros pour la période 20212027 dont un financement de l’État s’élevant à 654,9 millions d’euros (incluant une enveloppe de 50 millions d’euros issue du plan de relance) et provenant à 85 % du fonds Barnier ([78]).

Les premiers investissements réalisés depuis le lancement du nouveau plan s’inscrivent ainsi en nette hausse par rapport aux deux premières phases et ont permis de poursuivre la mise en sécurité des élèves dans les écoles primaires et secondaires (cf. bilan à la fin de l’année 2023, supra). Pour les établissements scolaires, à la fin 2023, 47,4 millions d’euros (dont 26,2 millions d’euros du fonds Barnier) et 71 millions d’euros ont respectivement été engagés en Martinique et en Guadeloupe dans le cadre du PSA 3 entre 2021 et 2023 ([79]).

Malgré les avancées réalisées dans le cadre du troisième PSA, le niveau de confortement du bâti public prioritaire doit encore pouvoir progresser au regard de la vulnérabilité de la zone Antilles au risque sismique. Le rapporteur rappelle à ce titre l’importance des enjeux humains et économiques. L’occurrence d’un séisme majeur, tel que ceux qui se sont produits au milieu du XIXème siècle, pourrait provoquer plusieurs milliers de victimes et engendrer plusieurs dizaines de milliards de dommages aux Antilles.

b.   Des avancées à conforter pour dynamiser la mise en œuvre du PSA

  1.   Renforcer l’accompagnement des acteurs locaux et des maîtrises d’ouvrages publiques

Dans le cadre du troisième PSA, les représentants de la Martinique et de la Guadeloupe auditionnés ont salué le développement de nouveaux dispositifs et moyens par l’État visant à mieux accompagner les collectivités.

Depuis 2023, le fonds outre-mer (FOM) finance notamment des assistances à maîtrise d’ouvrage (AMO) proposées par l’Agence française du développement (AFD). Ces AMO ont vocation à accompagner les communes de la phase « études » à la phase « travaux » pour les projets de confortement parasismique des établissements scolaires.

D’après les retours de la Dgom, elles ont d’ores et déjà été très sollicitées par les communes ultramarines : ainsi, le 1,5 million d’euros initialement prévu ont été intégralement engagés en milieu d’année 2023. Un financement supplémentaire a été attribué à la fin de l’année 2023, ce qui porte le financement total des AMO à 2,3 millions euros. Ces financements doivent être pérennisés et augmentés pour répondre aux besoins d’accompagnement des collectivités, en particulier les plus petites.

Recommandation n° 20 : augmenter de façon pérenne le financement alloué aux assistances à maîtrise d’ouvrage (AMO) proposées par l’Agence française du développement pour renforcer l’accompagnement des collectivités ultramarines dans leurs projets de confortement parasismique de leur bâti public.

La préfecture de la Martinique souligne le lancement actuel de plusieurs opérations (par exemple, la mise aux normes parasismiques de toutes les écoles de la commune de Rivière Salée, la reconstruction de trois écoles de la commune du Marin) et l’importance de poursuivre l’accompagnement des collectivités pour ne pas freiner l’émergence et la finalisation des projets.

  1.   Mieux former et accompagner les professionnels de la construction

Le troisième PSA cible également la nécessité de mieux former et accompagner les acteurs de l’aménagement et de la construction dans la mise en œuvre des normes parasismiques. Le manque de professionnels formés ainsi que les difficultés d’application des règles par rapport aux contraintes spécifiques des territoires ultramarins constituent en effet des freins à l’atteinte des objectifs du PSA.

Un bilan réalisé par la DEAL de la Guadeloupe en 2017 a permis de constater la récurrence de constructions non-conformes au niveau des matériaux et de la réalisation des structures (absence de liaisons de chaînage vertical et horizontal par exemple ; non-recours à des professionnels ; mauvaise utilisation des matériaux de construction, etc.). 63 % des constructions contrôlées présentaient au moins un défaut grave du point de vue sismique.

La réglementation parasismique

Les exigences réglementaires applicables aux bâtiments varient en fonction de la nature de l’ouvrage (ouvrages dits à risque normal répartis en quatre catégories d’importance ([80]) ou à risque spécial) et sa localisation géographique dans une zone de sismicité de niveau 1 (très faible), 2 (faible), 3 (modérée), 4 (moyenne) ou 5 (forte) ([81]).

L’article L. 563‑1 du code de l’environnement prévoit que « dans les zones particulièrement exposées à un risque sismique ou cyclonique, des règles particulières de construction parasismique ou paracyclonique peuvent être imposées aux équipements, bâtiments et installations. »

Ces règles ont été révisées par les décrets n° 2010‑1254 et n° 20101255 du 22 octobre 2010 et l’arrêté du 22 octobre 2010 relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux bâtiments de la classe dite « à risque normal », entré en vigueur le 1er mai 2011.

Dans le cas général, les règles applicables sont celles définies dans l’Eurocode 8 (normes NF EN 1998‑1, NF EN 1998‑3 et NF 1998‑5). La réglementation permet le recours à des règles simplifiées pour certains bâtiments ; pour les maisons individuelles en zone de sismicité 5, elles sont notamment fixées dans le « guide de construction parasismique des maisons individuelles DHUP CPMI-EC8-zone 5 » (édition 2020) ([82]). Toutes les communes de la Guadeloupe et de la Martinique sont classées en zone de sismicité 5.

Les plans de prévention des risques sismiques (PPRS) peuvent également fixer des règles plus adaptées au contexte local que la réglementation nationale.

Le conseil régional de la Guadeloupe et la collectivité territoriale de la Martinique ont engagé depuis 2018 des travaux pour mieux intégrer les enjeux sismiques dans leurs plans de formation des professionnels du bâtiment. Le rapporteur recommande de développer la communication destinée au public et aux professionnels au sujet de la construction parasismique via le fonds Barnier autour de plusieurs moyens de communication (affichage sur des bus, chez les fournisseurs de matériaux, radio, TV, presse locale, etc.) et de systématiser la mise en place de modules de formation dédiés dans les cursus des professionnels intervenant à tous les stades de la construction aux Antilles.

Le contrôle du respect des règles de construction (CRC), prévu aux articles L. 181-1 et suivants du code de la construction (cf. infra), constitue également un levier pour inciter les professionnels de la construction à mieux respecter les normes parasismiques. En Martinique, la mission a été déployée depuis 2017 dans un esprit de pédagogie avec le souci d’expliquer la réglementation et d’éviter la reproduction des malfaçons éventuellement constatées sur d’autres chantiers.

Le contrôle du respect des règles de construction (CRC) parasismique

Le contrôle du respect des règles de construction (CRD) est une mission de l’État qui vise à vérifier la conformité des constructions aux réglementations en vigueur sur différentes rubriques dont la prévention du risque sismique. L’article L. 181‑1 du code de la construction prévoit un droit de visite de l’administration et de communication des documents techniques pendant les travaux et jusqu’à 6 ans après leur achèvement.

Le contrôle parasismique revêt la spécificité d’être effectué pendant le chantier. Il porte en particulier sur les points suivants : la réalisation des fondations ; la qualité des chaînages verticaux et horizontaux et le respect des dispositions constructives du contreventement. Lors de sa visite, le contrôleur signale les éventuelles non-conformités identifiées vis-à-vis de la réglementation parasismique. Le maître d’ouvrage doit lever les défauts constatés. Le dossier peut, le cas échéant, faire l’objet d’un procès-verbal de constat d’infraction et de suites juridiques. La procédure et les sanctions applicables sont précisées aux articles L. 181-2 et suivants du code de la construction.

Les moyens et les compétences de contrôle en Martinique et en Guadeloupe demeurent néanmoins limités et sont à renforcer en priorisant le contrôle parasismique par rapport aux autres contrôles. Le rapport d’activité de la DEAL de la Martinique pour l’année 2022 fait état de seulement sept logements contrôlés sur le volet sismique. La montée en compétences des contrôleurs est également essentielle ; en octobre 2021, le Cerema Normandie-Centre a assuré en ce sens deux semaines de formation de contrôleurs martiniquais, guadeloupéens et guyanais ([83]). Le recours à des bureaux qualifiés certifiés externes pourrait également être envisagé.

  1.   Vers une approche intégrée des risques sismiques et cycloniques ?

Enfin, le PSA 3 affirme la nécessité d’articuler la prévention des risques sismiques et cycloniques et de sortir d’une « approche en silos » ([84]) par type d’aléa. Les dégâts considérables causés sur le bâti par l’ouragan Irma en 2017 à Saint‑Martin et Saint-Barthélemy ont largement participé à ancrer ce besoin dans les mémoires : « c’est très important de faire du confortement parasismique, mais, à quoi bon le faire si les toits s’envolent au premier ouragan alors que les enfants sont dans les écoles ? » ([85]).

Jusqu’à récemment toutefois, il n’existait pas de réglementation paracyclonique équivalente à celle applicable en zone sismique. Le décret n° 20231087 du 23 novembre 2023 relatif à la prise en compte du risque de vents cycloniques dans la conception et la construction des bâtiments exposés à ce risque constitue un premier pas dans l’élaboration d’un cadre réglementaire spécifique à la construction paracyclonique. Ce décret précise les territoires concernés (Guadeloupe, Martinique, La Réunion et Mayotte), distingue les bâtiments par catégorie d’importance (risque minime, moyen, élevé, majeur) et prévoit que les règles de construction paracyclonique soient définies de façon à assurer la résistance des bâtiments à des pressions découlant « de vents de vitesses au moins égales à la vitesse des vents de référence correspondant à la période de retour de l’épisode cyclonique d’intensité maximale » (nouvel article R. 132‑2‑4 du code de la construction et de l’habitation).

Les périodes de retour et les vitesses de vent de référence utilisées pour le calcul de la résistance des bâtiments, ainsi que les règles particulières de construction applicables par type de bâtiment doivent encore être précisées par arrêté. Il est prévu une entrée en vigueur des nouvelles règles au plus tard le 1er janvier 2026.

La réglementation paracyclonique : un corpus émergent

Au niveau législatif, l’article L. 132‑3 du code de la construction et de l’habitat dispose que « la conception et la construction des bâtiments [exposés à un risque cyclonique prévisible] limitent les dommages qu’ils encourent en cas d’épisode cyclonique. » Les articles L. 112‑18 du même code et L. 563‑1 du code de l’environnement prévoient l’obligation de « règles particulières de construction parasismique ou paracyclonique (…) dans les zones particulièrement exposées à un risque sismique ou cyclonique ».

Suite à l’ouragan Irma en 2017, l’État et la collectivité de Saint-Martin ont publié un guide de bonnes pratiques pour la construction et la réhabilitation de l’habitat en zone cyclonique ([86]) composé de six fiches thématiques (couverture métallique, charpente en bois, fenêtres et baies vitrées, maçonnerie, structure en bois, auvents).

Un pas supplémentaire a été franchi récemment avec la publication du décret n° 20231087 du 23 novembre 2023 relatif à la prise en compte du risque de vents cycloniques dans la conception et la construction des bâtiments exposés à ce risque. Celui-ci définit notamment les territoires exposés au risque cyclonique (la Guadeloupe, la Martinique, La Réunion et Mayotte), les bâtiments concernés ainsi que les principes de calcul de la résistance des bâtiments aux vents. Il est prévu qu’un arrêté précise les règles particulières applicables ; celles-ci entreront en vigueur au plus tard le 1er janvier 2026.

Parallèlement à l’élaboration attendue de l’arrêté, le rapporteur attire l’attention sur la nécessité de mettre à disposition des guides pratiques et de travailler à la mise en place de dispositifs de formation et pédagogiques de façon à assurer la bonne appropriation des nouvelles règles par les professionnels et les particuliers, faciliter leur application et rendre lisible leur articulation avec la réglementation parasismique.

À terme, il pourrait être envisagé que les projets de confortement parasismique qui intégreraient des travaux de confortement paracyclonique bénéficient d’un soutien financier renforcé dans le cadre du fonds Barnier de façon à couvrir les surcoûts éventuels et inciter à la prise en compte des deux risques.

Recommandation n° 21 : assurer une publication rapide de l’arrêté définissant les règles de construction paracyclonique applicables en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte à compter du 1er janvier 2026 et favoriser la bonne appropriation de ces nouvelles règles par la mise en place de dispositifs de communication, de formation et d’accompagnement adaptés.

 

Recommandation n° 22 : étendre les financements du fonds Barnier aux travaux de confortement paracyclonique réalisés dans tous les territoires ultramarins concernés.

3.   Le PSA 3 ne prévoit pas de stratégie de réduction de la vulnérabilité des bâtiments privés recevant du public

Le troisième plan soulève la question de la réduction de la vulnérabilité d’autres types de bâtiments en particulier :

– le parc immobilier des collectivités, autre que les établissements d’enseignement public ;

– le bâti de l’État hors gestion de crise : en Martinique, selon des diagnostics de vulnérabilité réalisés avant 2012, plus de 125 bâtiments de l’État resteraient à remettre à niveau pour un montant compris entre 65 et 85 millions d’euros (hors coûts de relogement provisoire) ;

– les réseaux de transports, d’énergie, de communication, d’eau potable et d’assainissement ;

– le bâti privé qui comprend au sens large des établissements d’enseignement privé, des établissements privés de santé, le bâti des établissements industriels, des bâtiments d’entreprises, des établissements commerciaux (hôtels, restaurants, centres commerciaux…), des centres culturels, des centres de loisirs ou de sports, le logement privé (maisons individuelles), etc. Le coût global des travaux n’est pas évalué précisément mais pourrait être de l’ordre de 5 à 6 milliards d’euros d’après l’estimation de la Dirmom.

Concernant les établissements d’enseignement privé, les diagnostics de vulnérabilité réalisés en 2011 et 2012 estiment par exemple le coût de travaux de confortement ou de reconstruction de ces bâtiments à 26,5 millions d’euros en Martinique et à 180 millions d’euros pour la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Si le troisième volet du PSA invite à engager une réflexion sur la mise aux normes parasismiques de ces bâtiments qui n’étaient pas pris en compte au cours des deux premières phases, il ne prévoit pas de stratégie globale ni de mesures de soutien de nature à inciter à l’engagement des travaux nécessaires.

Recommandation n° 23 : établir une stratégie de réduction de la vulnérabilité du bâti privé, en particulier des établissements scolaires privés et des bâtiments privés recevant du public, dans le cadre de la troisième phase du Plan Séisme Antilles ; réaliser ou actualiser les diagnostics de vulnérabilité du bâti privé.

C.   Adapter le bâti face au changement climatique

Dans tous les territoires ultramarins, les conséquences du changement climatique (hausse des températures, de la fréquence et de l’intensité des cyclones sévères et de vents, baisse des précipitations, intensification des périodes de sécheresse, élévation du niveau de la mer et risque de submersion marine, renforcement des mouvements de terrain, etc.) nécessitent d’ores et déjà d’engager des stratégies ambitieuses d’adaptation du bâti.

En particulier, l’intensification des risques naturels, et notamment de l’activité cyclonique, fait peser un risque majeur sur l’intégrité des bâtiments, tant lors d’événements extrêmes que sur le long terme du fait d’une fatigue structurelle. Le recul du trait de côte menace la sécurité des habitants dans les zones exposées aux risques d’érosion, de glissement de terrain, et à plus long terme, d’inondations dans les zones basses (submersion chronique).

L’application de normes para-cycloniques, en cours de définition, demeure encore embryonnaire dans la plupart des territoires. L’arrêté pris en application du décret n° 2023‑1087 du 23 novembre 2023 devant notamment définir les vitesses de vent de référence utilisées pour le calcul de la résistance des bâtiments, ainsi que les règles particulières de construction applicables par type de bâtiment, est attendu à La Réunion, Mayotte, en Guadeloupe et en Martinique (cf. supra).

De manière générale, l’Union sociale de l’habitat (USH) a pu souligner la nécessité de mettre en place des solutions locales d’adaptation et d’atténuation des bâtiments favorisant notamment :

– l’utilisation de matériaux innovants et locaux (par exemple, le bambou, la terre crue, la fibre de bananier, la fibre de coco, la sargasse aux Antilles, la filière bois) et la structuration de filières locales de matériaux biosourcés ;

– la mise en œuvre de projets de confortement des bords de mer et de lutte contre l’érosion (végétalisation des espaces côtiers avec des espèces endémiques par exemple) ;

– des projets de relogement le cas échéant (exemple à la commune du Prêcheur en Martinique) ;

– la conception d’habitats adaptés à différents types aléas prenant en compte une vision intégrée des risques.

En Polynésie française, les logements sociaux individuels en bois « Fare » développés par l’Office français polynésien (OFP) et construits sur pilotis à plus d’un mètre du sol sur des terrains classés inconstructibles sont conçus pour résister à des vents de forte intensité, des submersions et des inondations. Ils constituent un exemple intéressant d’adaptation à des coûts réduits et au bénéfice de foyers aux revenus très modestes.

Logement social individuel fare oph
(office polynésien de l’habitat)

https://www.oph.pf/uploads/fare2-629ab07f0ed01.png

Source : site de l’OPH.

L’actualisation des PPRN (cf. supra) est également essentielle pour réguler le bâti dans les zones à risque et donner de la visibilité aux acteurs du logement sur l’évolution des risques, en particulier concernant les effets de l’élévation du niveau de la mer.

Le fonds Barnier demeure par ailleurs sous-mobilisé par les particuliers et les entreprises de moins de vingt salariés qui y sont pourtant éligibles depuis 2021. Les travaux individuels de réduction de la vulnérabilité de biens d’habitation exposés à un risque d’inondation ([87]) peuvent ainsi être financés à hauteur de 80 % du coût des travaux dans la limite de 36 000 euros par bien. Les biens à usage professionnels sont limités pour ces mêmes travaux à un financement de 40 % dans la limite de 10 % de la valeur vénale du bien.

Pour bénéficier de cette subvention, les biens doivent être couverts par un contrat d’assurance incluant une garantie « catastrophe naturelle » et les travaux doivent être rendus obligatoires par le plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) en vigueur.

D’après les informations transmises par la DGPR, un arrêté définissant de la même façon les types de travaux de réduction de la vulnérabilité des biens au risque sismique éligibles au fonds Barnier est en cours d’élaboration.

Recommandation n° 24 : informer et accompagner les particuliers et les petites entreprises dans le financement de leurs travaux de confortement et de réduction de la vulnérabilité de leur bien éligible au fonds Barnier.

III.   la sensibilisation et l’éducation Des populations

A.   une « culture du risque » reconnue en outre-mer mais inégalement partagée selon les territoires et les types d’aléas

L’ensemble des personnes auditionnées dans le cadre de la commission d’enquête a souligné la prégnance de la « culture du risque » en outre-mer. À plusieurs égards, celle-ci apparaît plus développée dans les territoires ultramarins qu’en hexagone ; les populations ultramarines sont davantage sensibilisées et mieux préparées à l’occurrence d’un événement naturel majeur. Lors de son audition, la directrice territoriale « Outre-mer » du Cerema, a ainsi évoqué « une résilience outre-mer qu’il n’y a pas forcément ailleurs [en hexagone], une appréhension des phénomènes, une connaissance (…) une vraie culture du risque qui facilite la sensibilisation. » ([88])

La culture du risque cyclonique aux Antilles a été particulièrement saluée. Sa diffusion s’explique en grande partie par l’exposition régulière des populations antillaises aux tempêtes et aux ouragans. M. Emmanuel Cloppet a rappelé à ce titre le fait que chaque année, en moyenne, au moins une tempête tropicale passe à moins de cent kilomètres de la Martinique, de la Guadeloupe et des îles du Nord ([89]). Cette forte exposition favorise une acculturation régulière des populations à ces événements et aux comportements à adopter pour s’en protéger.

À Saint-Barthélemy pendant Irma, M. Bruno Magras a ainsi témoigné : « Si nous n’avons eu à déplorer ni mort, ni blessé [pendant Irma], c’est d’une part, grâce à la discipline des habitants qui respectent les consignes, et, d’autre part, grâce à la qualité du bâti qui respecte les règles de construction et d’urbanisme. » ([90]) L’actuel préfet de Guadeloupe, M. Xavier Lefort, a également salué la forte culture du risque et la grande résilience présente en Guadeloupe : « cette population connaît les consignes, réagit très rapidement, sait se mettre à l’abri et suit les directives qui lui sont transmises par les autorités. Lors des deux derniers événements cités [la tempête tropicale Philippe en septembre 2023 et l’ouragan Tammy en octobre 2023], aucune victime n’a ainsi été à déplorer. » ([91])

Toutefois, ce constat ne saurait être généralisé à l’ensemble des risques naturels et des territoires et doit être nuancé à plusieurs égards :

– Tout d’abord, la mémoire collective des risques naturels comporte des biais. Elle se construit sur la base d’événements singuliers « dont rien ne dit qu’ils soient de bons prototypes des événements à venir », a pu souligner Mme Maud Devès, chercheuse en sciences humaines et sociales ([92]). Le dernier événement naturel majeur vécu par les populations locales aura notamment tendance à être pris pour référence ; ce qui peut conduire à mésestimer et sous-évaluer d’autres formes de risques.

Mme Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS, a notamment alerté sur le risque d’ériger le cyclone Irma, « aussi puissant qu’il ait été », comme unique évènement cyclonique de référence dans la mémoire et la culture du risque des territoires ultramarins : en particulier, « ne garder en mémoire que la dangerosité des vents dans un cyclone peut être un piège, même s’ils sont à l’origine de la majorité des destructions et du coût considérable de la catastrophe » ; les risques de submersion marine et d’inondations autour des cours d’eau représentant un danger tout autant, sinon plus conséquent pour les vies humaines ([93]).

Dans cette perspective, le préfet de La Réunion a souligné l’enjeu de passer « de la mémoire des crises à la culture des crises » ;

– La culture du risque demeure d’une façon générale inégalement partagée selon les territoires, les types d’aléas et les catégories de population considérés.

Si le risque cyclonique apparaît bien connu de la population antillaise du fait de la récurrence des phénomènes cycloniques, c’est moins le cas du risque sismique par rapport auquel les anciennes générations ont été vraisemblablement moins bien formées que les nouvelles ([94]).

À Mayotte, M. Olivier Brahic, directeur général de l’Agence régionale de santé, a souligné la faiblesse de la culture du risque cyclonique par rapport à La Réunion et aux Antilles. L’impréparation des populations en cas de cyclone apparaît d’autant plus inquiétante que d’après lui, « le bilan victimaire pourrait être plus lourd [que pour Irma] du fait de l’importance des bangas et bidonvilles où les tôles qui s’envolent pourraient causer de très gros dégâts. » ([95]) Mayotte doit également se forger une culture nouvelle du risque sismique et volcanique.

En comparaison d’autres territoires, la Guyane aurait également des progrès à réaliser en matière de culture du risque. Le risque y étant plus diffus, l’acculturation des populations apparaît moindre. Par ailleurs, la diversité des langues maternelles parlées sur le territoire guyanais ne favoriserait pas la diffusion de communications relative aux risques naturels ([96]).

– Enfin, la culture du risque n’est pas figée. Elle est largement évolutive et dépend notamment de l’histoire récente et des rapports entre les générations. Certains territoires, comme la Guadeloupe, n’ont par exemple pas été confrontés à des aléas naturels récents.

En Polynésie, les cyclones tropicaux de 1982 et 1983 (Orama, Veena, William, etc.) qui ont causé la mort de seize personnes, fait 200 blessés et entraîné de nombreux dégâts pour un coût estimé à 84 millions d’euros, ont profondément marqué la population et contribué à ancrer une culture du risque chez les polynésiens. Toutefois, les jeunes générations qui n’ont pas vécu ces événements traumatiques peuvent y être aujourd’hui moins sensibles ([97]).

B.   des politiques actives d’information et d’éducation aux risques

Les politiques publiques d’information et de sensibilisation aux risques naturels majeurs jouent un rôle déterminant dans la constitution d’une culture du risque. Elles constituent une clé de voûte des politiques de prévention des risques naturels majeurs : des citoyens bien informés, ayant une bonne connaissance des bons gestes et comportements ainsi que de la signification des moyens et signaux d’alerte de référence, sont en effet plus aptes à agir pour leur propre sécurité et à participer à la sécurité collective.

1.   L’information réglementaire obligatoire sur les risques naturels

Le droit à l’information des personnes sur les risques naturels majeurs prévisibles auxquelles elles sont soumises dans certaines zones du territoire est consacré à l’article L. 125‑2 du code de l’environnement.

Au plan réglementaire, il se traduit notamment par la mise à disposition du public de deux documents d’information : le dossier départemental sur les risques majeurs (DDRM) établi par le préfet, ainsi que le document d’information communal sur les risques majeurs (DICRIM) établi par le maire. Ces documents comprennent notamment « la description des risques et leurs conséquences prévisibles pour les personnes, les biens et l’environnement, ainsi que l’exposé des mesures de prévention et de sauvegarde prévues pour limiter leurs effets » (article R. 125‑11 du code de l’environnement).

Les plans communaux de sauvegarde (PCS), définis à l’article L. 731‑3 du code de la sécurité intérieure, ont également parmi leurs fonctions d’informer les populations sur les consignes à suivre en cas de crise au niveau communal.

Ces documents sont inégalement actualisés selon les territoires mais toutefois mis à disposition dans la plupart des départements et communes ultramarines.

Les auditions ont plus largement permis de souligner la multiplicité des initiatives et des acteurs engagés dans le développement d’une culture du risque en outre-mer.

2.   Au niveau national, des initiatives récentes à conforter

Depuis 2021, le Gouvernement a renforcé ses actions visant à renforcer la culture du risque dans le domaine des risques naturels et technologiques. Les ministères chargés de l’environnement et de l’intérieur ont notamment conjointement porté la mise en place de la « Journée nationale de la résilience » (JNR) à compter de 2022 dont le bilan apparaît très positif en outre-mer.

La Journée nationale de la résilience

Depuis 2009, le 13 octobre a été désigné par l’Assemblée générale des Nations Unies comme date de commémoration de la Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe.

Dans la continuité du plan d’action « Tous résilients face au risque » présenté le 18 octobre 2021 par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, le Gouvernement a instauré une Journée nationale de la résilience tous les 13 octobre. La première édition de cette journée a été organisée le 13 octobre 2022. Elle vise à mobiliser les acteurs publics et privés des territoires via des appels à projet dédiés afin de sensibiliser les populations aux risques naturels et technologiques et préparer à l’adoption des bons comportements en cas de survenance d’une catastrophe.

Elle a été introduite dans le code de la sécurité intérieure à l’article L. 731‑1‑1 par la loi n° 2023‑580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie. Le décret d’application prévu n’a pas encore été publié.

La première édition de la JNR a réuni, en outre-mer, 63 porteurs de projets qui ont proposé 107 actions labellisées. La participation a augmenté pour l’édition 2023 avec 82 porteurs de projets et 249 actions labellisées en outre-mer.

Tous les territoires ultramarins ont bénéficié d’actions de sensibilisation en 2023 ; en particulier, la Polynésie française, Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin qui n’avaient pas participé à la première édition. La Réunion, la Guadeloupe et la Martinique se sont démarquées par leur nombre de projets (respectivement 24, 22 et 20 projets).

Plusieurs initiatives sont à saluer : par exemple, la commune de Saint-Claude en Guadeloupe, en lien avec les forces de sécurité civile sur place, a réalisé un exercice sur le risque sismique impliquant les écoles du territoire. À La Réunion, la Croix-Rouge française a piloté l’installation d’un « village de la prévention des risques » ouvert au grand public. En Polynésie française, la Fédération française de prévention des risques domestiques a contribué à la création d’un outil éducatif diffusé en langues polynésiennes visant à favoriser l’adoption de comportements sécuritaires en cas de tsunami et de cyclone.

Les objectifs du ministère de l’intérieur pour l’édition 2024 sont de ([98]) :

– développer les démarches « d’aller‑vers » afin de cibler les publics les plus vulnérables et les plus éloignés des politiques publiques de prévention des risques. Seulement 5 % des projets de l’édition 2023 ont ciblé ces publics ;

– maintenir et renforcer la mobilisation de l’ensemble des territoires ultramarins avec un accompagnement spécifique des territoires qui ont connu peu d’actions lors de la précédente édition ;

– diversifier les porteurs de projets (actuellement essentiellement des associations) et en particulier, favoriser la participation des entreprises, des établissements scolaires et des collectives territoriales.

Le rapporteur insiste sur la nécessité de cibler les publics les plus fragiles et éloignés des dispositifs d’information traditionnels ; le récent cyclone Belal à La Réunion ayant rappelé que les personnes sans domicile fixe sont les premières victimes de telles catastrophes naturelles malgré l’ouverture de centres d’hébergement.

Recommandation n° 25 : dans le cadre des prochaines éditions de la Journée nationale de la résilience, développer les démarches « d’aller-vers » afin de cibler les publics les plus vulnérables et les plus éloignés des politiques publiques de prévention des risques.

Outre l’instauration de la JNR, le ministère de la transition écologique a mis en place, pour la première fois, en 2023 une campagne d’information sur les pluies intenses pour les territoires d’outre-mer. À La Réunion, elle a par exemple été déclinée en janvier 2024 et sera renouvelée en 2025.

exemples de visuels extraits de la campagne d’information
des populations aux pluies intenses en outre-mer (2023)

Enfin, la loi n° 2022‑217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite « 3 DS », intègre également des dispositions concernant la formation des agents publics ([99]) et la sensibilisation des travailleurs aux risques naturels majeurs ([100]) en outre‑mer ayant fait l’objet de deux décrets parus récemment. La Dgom a indiqué que leur mise en œuvre et notamment l’élaboration des objectifs et du contenu des formations destinées aux agents publics en outre-mer étaient en cours.

3.   Au niveau des territoires, de nombreuses initiales locales à soutenir

Le présent rapport ne saurait dresser une liste exhaustive des projets portés au niveau local en matière d’information et de sensibilisation aux risques. Le rapporteur salue ces initiatives précieuses ainsi que l’implication des acteurs mobilisés (services de l’État, collectivités, associations, entreprises, etc.). Peuvent être cités à titre illustratif :

– les semaines « Replik » en Martinique et « Sismik » en novembre Guadeloupe sur le risque sismique ;

– les « journées japonaises » (3) en Guadeloupe sur les risques telluriques. À l’initiative du préfet de Guadeloupe, ces journées organisées pour la première les 3 et 4 juin 2019 visent à sensibiliser un public, un secteur d’activité particulier à travers des ateliers et des exercices afin de mieux faire face aux situations ;

– les assises régionales des risques naturels à La Réunion ;

– la participation des acteurs locaux antillais à l’exercice tsunami annuel « Caribe Wave » organisé par l’Unesco ;

– la traduction des bulletins d’information du Réseau de surveillance sismaux-volcanique de Mayotte (Revosima) en shimaoré et kibushi (les deux langues régionales de Mayotte) ;

– le projet « Eduseis » développé par la DEAL Guadeloupe, en partenariat avec l’université Côté d’Azur et le rectorat, qui a permis l’installation d’une dizaine de stations sismologiques à vocation éducative et pédagogique ;

– les nombreuses actions proposées par des associations reconnues pour leur expertise, notamment l’Association française pour la prévention des catastrophes naturelles et technologiques (Afpnct) ou la Croix-Rouge française.

À titre illustratif, le projet « Paré pas Paré », porté par la Plateforme d’intervention régionale de l’océan Indien de la Croix-Rouge française (PIROI) depuis 2011 et piloté depuis 2018 par le rectorat de l’académie de La Réunion, vise à sensibiliser dès le plus jeune âge aux sept risques naturels présents à La Réunion.

Il prévoit un enseignement composé de huit modules d’une heure consacrés à chaque risque et vise à initier de façon ludique et pédagogique les élèves dans le cadre scolaire. Ce programme a permis de sensibiliser 130 000 élèves de CM1, CM2 et 6ème depuis 2011. Plus de 350 enseignants ont été formés à l’animation des modules de sensibilisation Paré pas Paré.

Lors de leur déplacement à La Réunion, le président et le rapporteur ont eu l’opportunité d’assister à l’enseignement de Mme Nathalie Rostaing, professeure de sciences de la vie et de la terre dans le cadre de ce programme au collège Plateau Caillou (Saint-Paul). Le rapporteur salue autant la qualité des supports pédagogiques développés entre l’académie de La Réunion et la PIROI que l’engagement et la pédagogie des professeurs impliqués sans lesquels le travail de sensibilisation des plus jeunes ne pourrait avoir lieu.

enseignement sur les risques naturels dans le cadre
du programme « paré pas paré » (La réunion, mars 2024)

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Outre ce projet, la PIROI conduit actuellement à La Réunion une campagne de sensibilisation de masse sur les réseaux sociaux avec des vidéos informatives sur chaque risque naturel. L’Afpnct soutient également le projet « Ansanm Nou Lé Paré » à La Réunion qui vise à encourager la solidarité des associations lors de catastrophe, renforcer les préparatifs d’urgence des associations et sensibiliser les institutions et acteurs de la sécurité sur les capacités du tissu associatif à agir en temps de catastrophe.

S’ils sont d’ores et déjà développés en outre-mer, les projets locaux visant à sensibiliser et préparer les populations aux catastrophes naturelles peuvent encore être renforcés à plusieurs égards.

Le fonds Barnier est notamment très faiblement mobilisé dans le cadre de l’information préventive sous maîtrise d’ouvrage de la collectivité. Les actions de sensibilisation représentent 1,2 million d’euros entre 2021 et 2023, soit moins de 1 % des financements du fonds sur la période, et ont surtout porté au niveau national (campagne d’information sur les pluies intenses).

La sensibilisation auprès des touristes doit également être développée. Des actions spécifiques sont nécessaires pour toucher ce public de passage méconnaissant trop souvent les risques (supports de communication spécifiques, formation des acteurs du tourisme, etc.).

Enfin, lors de son audition, Mme Delphine Grancher a soulevé la question de l’adaptation des programmes scolaires : « si le milieu scolaire apparaît comme un vecteur privilégié d’éducation aux risques (…) aucun chapitre n’aborde spécifiquement la notion de risque majeur, ni la question des risques majeurs en outre-mer et il n’y a pas l’obligation d’y intégrer des cas d’étude locaux. » La sensibilisation aux risques naturels majeurs repose sont largement sur la volonté des enseignements qui ne disposent par ailleurs pas toujours de supports adaptés sur les sites académiques.

L’éducation aux risques majeurs dans le cadre scolaire n’inclut pas non plus de façon systématique une préparation à l’adoption de comportements sûrs. Or, il existerait de nombreuses opportunités d’animer en milieu scolaire, de manière ludique, des ateliers de sensibilisation et des exercices à visée éducative. Si les plans particuliers de mise en sûreté (PPMS) qui décrivent les conduites à tenir face à des risques majeurs ou des menaces sont désormais largement mis en place dans les établissements scolaires, en particulier grâce au coordonnateur académique des risques majeurs (Carm), « des exercices d’évacuation pour faire face aux aléas sismiques et aux tsunamis ne sont pas toujours organisés chaque année » ([101]).

La loi « 3DS » du 21 février 2022 a modifié, dans cette perspective, l’article L. 312-13-1 du code de l’éducation de façon à préciser que « dans les territoires qui y sont exposés, notamment les territoires d’outre-mer, les élèves reçoivent une sensibilisation sur les risques naturels majeurs mentionnés au I de l’article L. 5621 du code de l’environnement. Cette sensibilisation comprend des exercices organisés régulièrement. » La mise en œuvre de cette disposition doit faire l’objet d’une évaluation.

Recommandation n° 26 : évaluer la mise en œuvre de l’article L. 312-13-1 du code de l’éducation, issue de la loi « 3DS », qui prévoit une sensibilisation sur les risques naturels majeurs et l’organisation d’exercices réguliers dans tous les territoires d’outre-mer.


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   troisiÈme PARTIE : Une gestion des risques naturels majeurs en outre-mer robuste mais inégale selon les ALÉAS et leS territoireS concernéS

Les territoires d’outre-mer sont inégalement concernés par le type, l’intensité et la fréquence des risques naturels auxquels ils peuvent être exposés. Face à ces risques, bien qu’il existe le plus souvent une culture à la fois traditionnelle et partagée de la préparation et de la réponse opérationnelle, tous les territoires d’outre-mer ne sont pas également préparés à leur survenue. Si certains territoires semblent aptes à organiser une réponse robuste aux crises, d’autres apparaissent plus fragiles. Le cas échéant, cette fragilité, renforcée par les vulnérabilités propres et plus ou moins nombreuses de chaque territoire, pourrait avoir un coût important, tant matériel qu’humain. Dans ce contexte, si le rapporteur fait sienne la formule du directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises selon laquelle la gestion des crises naturelles reste « une extraordinaire école d’humilité » ([102]), il considère qu’il est urgent de s’appuyer sur les connaissances acquises lors des récents évènements naturels en vue de renforcer la capacité de réponse opérationnelle.

I.   des retours d’expérience INDISPENSABLES À l’amélioration de la gestion des crises futures

La survenance de phénomènes naturels majeurs est fréquente dans les territoires d’outre-mer. Parmi eux, certains marquent durablement les territoires par leur intensité et leurs conséquences sur les conditions d’existence des populations. Deux événements d’ampleur se sont ainsi déroulés récemment, il s’agit d’une part de l’ouragan Irma à Saint-Barthélemy et Saint-Martin en 2017, et, d’autre part, du cyclone Belal à La Réunion en 2024. Bien que tout phénomène soit par nature singulier, le retour d’expérience de ces deux événements est primordial pour améliorer la connaissance et donc la préparation et les réponses à apporter en cas de survenance d’un tel risque. La gestion de ces événements récents mais largement dissemblables illustre l’idée que « la préparation d’une crise repose également sur les leçons des crises précédentes, c’est-à-dire le retour d’expérience. Chaque crise, sans exception, nous permet d’identifier des nouveautés et d’affiner le dispositif » ([103]).

A.   en 2017, Irma a dépassÉ les pouvoirs publics À saint‑barthélemy et SURTOUT À saint-martin par son INTENSITÉ inédite

Le 6 septembre 2017, l’ouragan Irma a frappé les îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin et causé sur cette dernière la mort de onze personnes côté français et quatre côté hollandais ([104]). Ouragan de catégorie 5 sur l’échelle de Saffir-Simpson, Irma a atteint des vitesses de vents moyens supérieurs à 285 kilomètres par heure pendant plus de 37 heures, le classant parmi les ouragans les plus violents jamais enregistrés selon Météo‑France. Il s’est accompagné de rafales de vent dépassant 300 kilomètres par heure et de vagues d’une douzaine de mètres de haut ([105]). Dans le sillage d’Irma, les ouragans José et Maria ont respectivement touché les Antilles les 10 et 18 septembre 2017. D’une intensité moindre et d’une trajectoire plus favorable à Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin, cette conjonction d’événements météorologiques, d’ampleur inédite, a dépassé les pouvoirs publics qui s’y étaient pourtant préparés.

1.   Saint-Barthélemy et Saint-Martin, deux îles au carrefour de nombreuses vulnérabilités

Distantes de 35 kilomètres, Saint-Barthélemy et Saint-Martin sont des territoires français au sein des petites Antilles situés à plus de 200 kilomètres de la Guadeloupe. Outre cette double insularité, l’île de Saint-Martin est divisée en deux parties, l’une française et l’autre néerlandaise. Les auditions conduites ont permis de confirmer le caractère embryonnaire des coopérations entre les parties française et néerlandaise qui ont toutefois connues des avancées en lien avec cet évènement. L’organisation administrative des deux îles se caractérise par une préfecture déléguée sur place, rattachée à la préfecture de la Guadeloupe, dont le préfet est le représentant de l’État pour les deux collectivités. Malgré cette organisation, il ressort des auditions que la structuration et la maturité administratives de la préfecture déléguée ne lui permettaient pas, avant 2017, de disposer de l’ensemble des moyens nécessaires pour accompagner les deux collectivités en matière de sécurité civile et de préparation aux risques majeurs. En effet, Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin sont, depuis 2007, deux collectivités d’Outre-mer (Com) disposant d’une assemblée délibérante unique et régies par l’article 74 de la Constitution.

Toutes deux significativement dépendantes de l’activité touristique, Saint‑Barthélemy et Saint-Martin présentent toutefois des différences sur le plan socio‑économique. Selon le ministère de l’intérieur et des outre‑mer, Saint‑Martin compte plus de 40 000 habitants contre seulement 10 000 habitants à Saint‑Barthélemy. Plus nombreuse, la population saint‑martinoise est également socialement plus vulnérable. À titre d’exemple, si le logement s’est largement développé sur le littoral au sein des deux îles, l’habitat informel sans respect des prescriptions d’urbanisme et de construction aux normes anticycloniques est davantage présent à Saint-Martin ([106]), notamment dans les quartiers de Sandy‑Ground et de Quartier d’Orléans qui sont fortement exposés aux risques d’inondation et de submersion.

Associés à leurs vulnérabilités socio-économiques, l’isolement, la singularité de l’organisation locale de l’État tout comme l’appréhension récente de leurs compétences par les deux collectivités dans la préparation et l’organisation de la réponse aux risques faisaient de Saint-Barthélemy et Saint-Martin deux territoires fragiles dans le cas d’un événement naturel d’ampleur.

2.   Malgré leur action résolue, les pouvoirs publics ont été dépassés par l’ampleur de l’ouragan

a.   Les pouvoirs publics se sont préparés et ont anticipé la venue d’un ouragan sur les deux îles

Les ouragans ne constituent pas un phénomène rare aux Antilles. L’ensemble des responsables politiques, administratifs et associatifs auditionnés par la commission ont souligné l’expérience des populations pour faire face à de tels évènements, rappelant notamment l’épisode de l’ouragan de catégorie 4 Luis, survenu les 5 et 6 septembre 1995. De ce fait, les pouvoirs publics, au premier rang desquels l’État au travers de la préfecture, se tiennent régulièrement prêts à faire face à de tels évènements. La préfecture avait ainsi « participé à des exercices » au cours des années précédentes et le dispositif d’organisation de la réponse de sécurité civile (ORSEC) était au moment d’Irma « à jour » pour le risque cyclonique ([107]). De plus, préfecture et collectivités organisaient annuellement une préparation à la saison cyclonique. Le rapporteur, qui a exercé son droit de contrôle sur pièces, a pris connaissance des dispositions spécifiques relatives aux cyclones au sein du plan ORSEC, arrêtées le 23 juin 2016, en vigueur au moment d’Irma.

L’alerte d’un événement météorologique majeur a été donnée le 1er septembre 2017 et l’alerte jaune a été déclenchée le 3 septembre. Le même jour, la cellule interministérielle de crise (CIC) a été activée pour suivre l’évolution de l’ouragan. Dans le même temps, et en sus des centres de crise mis en place par chaque collectivité, un centre opérationnel départemental (COD) est organisé sous l’autorité de la préfète déléguée, associant des représentants de deux collectivités. Par ailleurs, en amont de l’arrivée de l’ouragan, des moyens humains et matériels, y compris nationaux, ont été déployés, dont notamment 57 personnes des formations militaires de la sécurité civile (FORMISC), 64 sapeurs‑pompiers en appui du centre saint‑martinois ainsi que trois militaires en appui du commandant de la compagnie de gendarmerie.

Si des interrogations sur l’impréparation de l’État ont pu se faire jour à la suite du passage de l’ouragan, l’ensemble des auditions conduites, notamment celles des présidents des deux collectivités au moment et à la suite d’Irma, ont confirmé que tant l’anticipation de la vitesse des vents – dont la classification a évolué défavorablement, de la catégorie 3 à 5 « dans les derniers jours » ([108]) avant l’ouragan – que celle des conséquences réelles d’un ouragan d’une telle puissance étaient délicates. Chacun semble s’accorder sur le fait que l’État n’a pas sous-estimé les conséquences de l’ouragan au regard des précédents disponibles qui se sont, in fine, avérés beaucoup moins violents, constat que le rapporteur partage à l’issue des auditions conduites.

b.   Une gestion de crise particulièrement complexe

Au-delà de l’événement météorologique lui-même, plusieurs facteurs ont complexifié la gestion de crise :

 d’une part, 90 % des bâtiments ont été endommagés et 20 à 25 % d’entre eux ont été détruits ([109]). Parmi eux, des bâtiments administratifs dédiés à la gestion de crises et au secours des populations ont été concernés, qu’ils appartiennent à l’État ou à des collectivités. Il convient de rappeler que la préfecture déléguée a été détruite alors qu’elle abritait le COD. La gestion de crise a ainsi été empêchée par la mise en danger même des acteurs de l’État et des collectivités chargés de la conduire. Par ailleurs, la caserne des pompiers de Saint‑Barthélemy a été inondée par des vagues submersion et l’hôpital de Saint‑Martin a été touché par les vents, rendant inaccessible des secteurs entiers d’hospitalisation ;

 d’autre part, la quasi-totalité des télécommunications a été mise hors d’état d’usage, soulevant « pendant quelques jours, de nombreuses difficultés » ([110]), isolant notamment les deux îles, leurs habitants et les autorités dans leur gestion de la crise et des secours. Si la résilience des autres réseaux apparaît tout aussi essentielle, voire dans le cas de l’eau par exemple, vitale, l’importance stratégique des télécommunications pour les pouvoirs publics comme pour la population a été rappelée au cours des auditions, soulignant qu’il était parfois « mieux (supporté) de ne pas avoir d’eau que de ne pas avoir de téléphone » ([111]) ;

 enfin, en parallèle de la gestion des secours, des ruptures d’approvisionnement en électricité, en eau ou en alimentation, les autorités ont eu à intervenir pour rétablir l’ordre public face à la multiplication de troubles. D’une part, des pillages ont eu lieu et ont durablement marqué les habitants des deux îles, pillages pas toujours commis pour des raisons de besoin d’eau ou alimentaire comme le soulignait la ministre des Outre‑mer, Mme Annick Girardin ([112]). Ces troubles ont nécessité la mobilisation des forces de l’ordre, par ailleurs investies sur d’autres missions de secours. Ils ont contraint l’État à mobiliser un pôle judiciaire ayant procédé à 170 interpellations pour 139 pillages ([113]). D’autre part, de nombreuses rumeurs et fausses informations ont circulé ([114]), suscitant beaucoup d’inquiétudes au sein de la population. L’un et l’autre aspect sont apparus au cours des auditions comme des éléments de retour d’expérience à ne pas négliger. Ils soulignent le caractère essentiel d’une communication officielle fréquente, intelligible et accessible à tous.

Sur ce point, la gestion de la crise à Saint-Barthélemy et Saint‑Martin n’apparaît pas exempte de critiques. La préfète déléguée de l’époque, assumant « volontiers (sa) part de responsabilité » ([115]), a elle-même identifié la communication comme disposant de « marges de progrès », pointant notamment la nécessaire mise en place « plus vite et plus fortement, (d’) une communication locale » ([116]).

c.   Une mobilisation de grande envergure

À la suite de cet événement d’une ampleur inédite, l’État a mobilisé des moyens de grande envergure. En effet, 780 gendarmes, 262 militaires du régiment du service militaire adapté (RSMA) venus de Martinique et de Guadeloupe, 180 personnels des moyens nationaux de la sécurité civile ont été déployés sur site. En outre, des effectifs complémentaires d’agents de douanes et de police aux frontières ont été engagés ([117]). Cet afflux important de renforts a constitué en lui-même un défi logistique pour loger et nourrir ces personnels, estimés au total à 3 000 personnes ([118]).

Au-delà des personnels, un pont aérien mobilisant deux avions et trois hélicoptères militaires, trois hélicoptères du ministère de l’intérieur et quatre avions civils réquisitionnés ([119]) a été mis en œuvre afin d’acheminer sur les deux îles des renforts humains, des denrées et équipements de toutes sortes. Symétriquement, le pont aérien a également permis d’évacuer 7 300 personnes devant ou souhaitant quitter les deux îles ([120]). Outre les moyens aériens, un bâtiment de la Marine nationale a également été mobilisé ([121]).

3.   La mise en œuvre des principaux enseignements d’Irma en matière de gestion de crise

Les retours d’expérience sont essentiels à la préparation et à la gestion des risques naturels majeurs. L’ouragan Irma représente à ce titre de riches enseignements pour les collectivités de Saint-Barthélemy et Saint‑Martin et, plus largement, pour l’ensemble des territoires ultramarins et hexagonaux.

En exerçant ses prérogatives de contrôle sur pièces, le rapporteur a pris connaissance des dispositions générales ORSEC de la préfecture de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, approuvées par arrêté du 9 juin 2020. Il en résulte que la préfecture y a intégré le retour d’expérience d’Irma, tant à travers d’un retour d’expérience sur l’événement à proprement parler en son sein, qu’en intégrant les éléments constitutifs de l’expérience concrète de la gestion d’Irma dans les différents chapitres du plan. Ainsi, la possibilité d’une cellule d’information du public déportée vers les préfectures de la Martinique, de la Guadeloupe ou de Guyane, à l’image des actions menées en septembre 2017, est explicitement évoquée. Par ailleurs, la préfecture a confirmé au cours des auditions avoir « beaucoup progressé dans (sa) capacité à répondre aux événements majeurs » ([122]). Toutefois, le rapporteur n’a pas été destinataire des modifications concrètes, organisationnelles ou doctrinales, intervenues au sein des dispositions spécifiques ORSEC cyclone, lui permettant d’évaluer ces révisions.

B.   en 2024, la gestion du cyclone belal À la rÉunion apparaÎt exemplaire À bien des aspects

Du 14 au 16 janvier 2024, l’île de La Réunion a été touchée par le cyclone Belal, dont les rafales de vents ont été mesurées entre 150 et 217 kilomètres par heure et le cumul de précipitations à 520 millimètres de pluie en 24 heures. La Réunion n’avait pas connu de tel cyclone depuis Dina en 2002. Il a causé la mort de quatre personnes, trois sans-abri et une autre intoxiquée par le monoxyde de carbone généré par son groupe électrogène, et blessé gravement une personne. Au regard de l’ampleur du phénomène météorologique et de sa trajectoire, « le bilan humain, qui n’est certes pas nul, demeure limité » ([123]). Les auditions conduites par le rapporteur et le déplacement réalisé à La Réunion du 27 au 29 mars 2024 ont permis de comprendre les raisons d’une gestion de crise considérée comme exemplaire.

1.   Un territoire bien préparé au risque cyclonique et en constante adaptation

La préfecture de La Réunion est une préfecture de région, La Réunion est une région monodépartementale, et de zone, pour l’ensemble des territoires français dans l’océan Indien. Elle dispose à ce titre d’un état-major de zone et de protection civile qui assure « les missions dévolues, à la fois, à un état-major de zone de défense et de sécurité (Réunion, Mayotte, Terres australes et antarctiques françaises) et à un service interministériel de défense et de protection civile (un niveau départemental) » ([124]). Cet état-major est le « bras armé » ([125]) du préfet pour la préparation des documents de référence, les entraînements, la gestion de crise et les retours d’expérience.

Une réponse adaptée aux risques naturels majeurs et aux crises qu’ils engendrent repose sur une préparation optimale. La saison des cyclones qui débute à La Réunion au mois de novembre est lancée chaque année par un séminaire réunissant l’ensemble des acteurs impliqués. Il existe un plan ORSEC, qui comprend des dispositions spécifiques « cyclones » actualisées sur la base du retour d’expérience de chaque événement. Ce plan précise « de manière synthétique le rôle et les responsabilités de chacun dans la gestion d’une alerte cyclonique » ([126]). En outre, en ce qui concerne la forme, le plan ORSEC de La Réunion est apparu au cours des auditions comme un « modèle du genre », évitant l’écueil des plans « trop détaillés et rapidement obsolètes » ([127]).

Cette bonne préparation repose sur une anticipation et une actualisation de chaque instant. Ainsi, lors du passage du cyclone Freddy à 200 kilomètres au nord de l’île en 2023, les services de l’État se sont « fait peur » ([128]) à l’idée que la trajectoire du cyclone traverse l’île. À ce titre, alors que la dernière modification de dispositions spécifiques ORSEC « cyclones » était intervenue le 15 février 2023 ([129]), le préfet a souhaité engager des travaux préparatoires basés sur l’hypothèse de la trajectoire d’un cyclone d’ampleur directement sur La Réunion. Ils ont fait l’objet d’une note intitulée « Engager un processus de planification afin de préparer La Réunion à l’impact direct d’un cyclone très intense » et de documents de restitution dont le rapporteur a pu prendre connaissance. La démarche a été présentée et travaillée dans le cadre du séminaire annuel Cyclonex de préparation à la saison cyclonique en novembre 2023. L’engagement de ces travaux dès 2023 a bénéficié à la gestion de Belal et sont désormais menés de concert avec le retour d’expérience sur celui-ci.

2.   Une gestion de crise exemplaire

Outre une préparation optimale, la gestion de crise de Belal elle-même a été unanimement saluée au cours des auditions.

a.   Une excellente prévision du phénomène

La gestion de Belal a permis de mettre en exergue l’importance de la connaissance et de la surveillance scientifiques pour éclairer la décision publique en matière de gestion des risques naturels. En effet, à la différence d’autres risques naturels, les cyclones peuvent être anticipés, ce qui est essentiel pour limiter autant que faire se peut leurs conséquences, tant sur les personnes que les biens.

Sur ce point, les prévisions de Météo-France se sont avérées d’une « grande fiabilité » ([130]) et le phénomène s’est déroulé comme Météo-France l’avait anticipé, y compris la déviation de sa trajectoire. Outre les prévisions, la collaboration entre les services de Météo-France et la préfecture a été « remarquable » ([131]). Elle a permis l’évolution du dispositif d’alerte sur la base des prévisions de Météo France, du déclenchement de la préalerte jaune cyclonique le 12 janvier 2024 à la levée de l’alerte rouge avec le passage à la phase de sauvegarde le 16 janvier.

Trajectoire du cyclone belal et Évolution des alertes

Source : Préfecture de la Réunion, réponse écrite à la commission d’enquête.

 

 

b.   Des décisions adaptées et proportionnées, quasi unanimement respectées par la population

Parmi les éléments positifs du premier retour d’expérience de Belal,
« le professionnalisme » ([132]) des acteurs locaux de la gestion de crise a été largement souligné, mais également le sens des responsabilités des Réunionnais.

i.   Les pouvoirs publics

Le cyclone Belal a permis aux autorités préfectorales de mettre en œuvre le dispositif de gestion de crise cyclonique tel que prévu par le plan ORSEC. Celui‑ci s’articule autour d’un dispositif de commandement territorialisé qui se décline en un échelon communal (24 postes de commandement communal), un échelon d’arrondissement (quatre postes de commandement opérationnel) et un échelon départemental – le centre opérationnel de préfecture, aussi appelé centre opérationnel départemental (COD) – sous l’autorité du préfet. Le COD est enrichi de cellules transversales spécifiques pour assurer le suivi de certaines fonctionnalités telles que les télécommunications ou la distribution de l’eau. En outre, il est en lien étroit avec les centres de traitement des appels d’urgence de la police nationale, de la gendarmerie nationale, du service départemental d’incendie et de secours (SDIS), du service d’aide médicale urgente (SAMU) et du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS). Enfin, cette organisation assure un partage d’information rapide et optimal entre tous les acteurs ainsi qu’une centralisation de la communication avec la population.

organisation de la gestion d’un cyclone majeur à la rÉunion

Source : Préfecture de la Réunion, réponse écrite à la commission d’enquête.

 

Outre la qualité de la préparation et de l’organisation de la gestion de crise, trois éléments semblent avoir été gérés de manière optimale lors de la crise :

 d’une part, le dispositif d’alerte cyclonique décomposé en plusieurs niveaux a été particulièrement bien utilisé de la pré-alerte à la phase de sauvegarde. Le préfet a eu le souci de calibrer chaque phase de l’alerte, notamment la période de confinement de l’alerte rouge et de l’alerte violette, afin de trouver « l’optimum entre l’ensemble des contraintes » ([133]). En effet, à l’issue de son déplacement à La Réunion et des auditions conduites, le rapporteur tient à souligner que chaque phase a été déclenchée au bon moment et pour la bonne durée, rendant les décisions publiques non seulement efficaces mais compréhensibles pour la population. En outre, le déclenchement de l’alerte violette qui au-delà du confinement de la population impose celui des services de secours semble avoir été particulièrement bien appréhendé. Le préfet, en concertation avec le SDIS, a analysé au cas par cas chaque situation et, par exemple, permis le sauvetage d’un homme en fin d’alerte violette, témoignant de la capacité d’adaptation en temps réel des autorités ;

 d’autre part, la bonne utilisation du dispositif d’alerte a été doublée de la mise en place d’une communication « adaptée et pertinente » au moyen des médias traditionnels et des réseaux sociaux, permettant de « parfaitement » diffuser les messages et consignes comportementales ([134]). Outre ces moyens de communication, la préfecture a eu recours au dispositif FR‑Alert le dimanche 14 janvier à 17h00, soit trois heures avant le début de l’alerte rouge et le confinement de la population. FR‑Alert permet d’informer en temps réel toute personne présente dans une zone de danger et détentrice d’un téléphone portable des comportements à adopter au travers d’une notification et d’un signal sonore, y compris lorsque le téléphone portable est placé en mode silencieux ([135]) ;

 enfin, des renforts zonaux et nationaux ont été rapidement déployés sur place pour renforcer les effectifs locaux, dont ceux des armées qui ont été mobilisés. La Réunion a d’abord bénéficié de l’envoi d’une équipe venue de Mayotte, avant de bénéficier de renforts hexagonaux, notamment de moyens militaires de la sécurité civile. Au total, ce sont 50 sapeurs‑pompiers, dont 10 venus de Mayotte, et 85 militaires des FORMISC qui ont rejoint l’île de La Réunion durant deux semaines à compter de la levée de l’alerte rouge ([136]).

Le rapporteur tient à souligner que ce bilan positif de la gestion de crise de Belal a été largement partagé au cours des auditions et de son déplacement, notamment par les élus nationaux et locaux.

ii.   La population

À la suite du passage de Belal, le bilan humain s’est élevé à quatre morts. Trois d’entre eux étaient des personnes vulnérables aux conditions d’habitat précaires et que ne s’étaient pas mises à l’abri, malgré l’ouverture de 158 centres d’hébergement ayant accueilli 749 personnes et six centres de vie. La quatrième victime est décédée des suites d’une intoxication au monoxyde de carbone liée à l’utilisation d’un groupe électrogène. L’épouse de la victime a été grièvement blessée pour les mêmes raisons.

Au regard de l’ampleur du cyclone, le bilan humain semble avoir été contenu par les mesures prises par les pouvoirs publics. Toutefois, le déplacement à La Réunion réalisé par le rapporteur a permis de souligner non seulement la résilience de la population au risque cyclonique mais également le respect scrupuleux des consignes dont elle a fait preuve. Le rapporteur retient ainsi la formule du préfet lors de son déplacement sur l’île : « il y a eu 880 000 gestionnaires de crise à La Réunion pendant le cyclone Belal » ([137]).

c.   Un relatif rapide retour à la normale : l’exemple d’EDF

Dès la sortie de l’alerte rouge et le début de la phase de sauvegarde, le dispositif de gestion de crise a été réorganisé afin de gérer l’ensemble des conséquences de l’événement. Quatre pôles ont ainsi été constitués par la préfecture : le suivi des opérations ; le soutien opérationnel auprès des collectivités et de la population ; le soutien économique et social ; la mise en œuvre des dispositifs d’indemnisation. Le pôle suivi des opérations s’est concentré sur le suivi de la remise en état des réseaux électriques, de télécommunication, des routes et de l’alimentation en eau potable. La forte mobilisation de l’État, des collectivités et des opérateurs a permis de rétablir au plus vite le réseau à la suite des coupures occasionnées par le Belal et, ainsi, la reprise de la vie normale de la population et des acteurs économiques.

À titre d’illustration, le rapporteur a souhaité rencontrer lors de son déplacement à La Réunion la direction régionale d’EDF. À l’occasion de cette rencontre, il a pu constater l’importante mobilisation qui a suivi Belal pour rétablir au plus vite l’électricité, dont 35 % de la population avait été privée au plus fort de la crise. En une journée, à la suite de la levée de l’alerte rouge, EDF a rétabli l’électricité à plus de la moitié des foyers touchés ([138]). Si les réseaux de haute tension, largement enfouis à La Réunion, ont été remis en service dans les trois jours suivant le cyclone, les réseaux de basse tension ont, quant à eux, nécessité deux semaines d’intervention et la venue de près de 100 techniciens de l’hexagone. En outre, malgré la destruction de la prise d’eau de la centrale hydroélectrique de la rivière de l’Est, que le rapporteur a pu visiter, EDF n’a effectué de coupure préventive qu’un soir par blocs de deux heures afin de passer le pic de consommation électrique de la fin de journée.

prise d’eau de la centrale hydroÉlectrique de la riviÈRe de l’est
avant et après le passage du cyclone belal

Source : Réponse écrite de la direction régionale d’EDF à la commission d’enquête.

Cette centrale, qui représente 15 à 20 % de la production électrique réunionnaise, ne fonctionne à ce jour qu’à 20 % de ses capacités. Au total, 1,5 million d’euros ont été d’ores et déjà été engagés par EDF pour les opérations post Belal ([139]).

II.   Une organisation de la préparation et de la gestion de crise ÉprouvÉe mais perfectible

Au regard de la fréquence des risques naturels dans les territoires d’outre-mer, l’ensemble des acteurs locaux, État, collectivités, opérateurs et population, se préparent et se tiennent prêts à répondre à la survenue d’événements majeurs. Selon le type d’événement mais également le territoire d’outre‑mer considéré, le rapporteur a pu constater au cours des auditions et de son déplacement à Mayotte et La Réunion que le niveau d’organisation de la préparation et de la gestion de crise était inégal et, par conséquent, perfectible.

A.   Des pouvoirs publics inÉgalement prÉparÉs

Inégalement concernés par le type, la fréquence et l’intensité des risques naturels majeurs, les territoires d’outre-mer et les pouvoirs publics locaux préparent néanmoins tous la survenue de risques naturels majeurs. En effet, tous ont été confrontés à des événements naturels plus ou moins récents voire fréquents, qui s’inscrivent tant dans la mémoire collective des populations que dans celle des pouvoirs publics locaux. Cependant, la préparation aux risques naturels apparaît inégale selon les territoires d’outre-mer considérés.

En préambule, le rapporteur tient à souligner qu’une égale préparation n’implique pas une préparation uniforme en raison des spécificités propres à chaque territoire. Au contraire, les risques naturels impliquent une préparation adaptée à chacun et par conséquent différenciée. Outre la répartition des compétences entre l’État et la ou les collectivités en matière de préparation aux risques naturels, il convient également de prendre en considération la géographie, qui revêt une grande importance en matière de préparation. En effet, les territoires d’outre-mer sont plus ou moins éloignés de l’hexagone et, par voie de conséquence, de renforts potentiels. Plus ou moins éloignés, les territoires d’outre‑mer sont également plus ou moins accessibles selon les infrastructures portuaires et aéroportuaires dont ils disposent.

Ainsi, Saint-Pierre-et-Miquelon, qui n’est pas le territoire le plus éloigné de l’hexagone, compte sans doute parmi les moins accessibles. Par ailleurs, les caractéristiques géographiques propres à chaque territoire sont également essentielles dans la préparation aux risques naturels majeurs. Par exemple, la Guyane est un territoire continental, dont la superficie est égale à celle du Portugal et dont la circulation entre Cayenne et Saint-Laurent-du‑Maroni est rendue complexe par la géographie et l’état des infrastructures. De même, la Polynésie française est un archipel au sein de l’océan Pacifique, qui s’étend sur un territoire grand comme l’Europe. Enfin, les caractéristiques socio-économiques des territoires semblent également fondamentales, comme par exemple la présence d’habitations informelles.

1.   De la connaissance à surveillance

Les territoires d’outre-mer bénéficient de l’appui d’organismes scientifiques qui étudient et observent les risques naturels qui les concernent. En outre, ils sont chargés d’une mission de surveillance afin de donner l’alerte – immédiate ou a priori – aux pouvoirs publics locaux. Cette organisation est essentielle et traduit la dichotomie française entre expertise scientifique et décideur ([140]). Pour être optimale, cette dichotomie doit reposer sur une fiabilité des prévisions, lesquelles doivent être suffisamment précises, mais également sur la surveillance constante, c’est‑à‑dire à toute heure, quel que soit le jour de l’année.

Les organismes scientifiques auditionnés présentent tous un haut niveau d’expertise et de connaissances des phénomènes naturels qu’ils sont chargés d’étudier. Leur « grande fiabilité » a été rappelée à plusieurs occasions, par exemple l’exactitude des prévisions de Météo‑France dans le cadre de la gestion de Belal ([141]). Cependant, les risques naturels, pour autant qu’ils soient prévisibles, doivent l’être avec le plus fort niveau possible de précision afin de permettre aux pouvoirs publics de prendre des décisions adaptées et proportionnées. Les auditions de la commission ont permis de faire émerger ce besoin pour un certain nombre de territoires d’outre-mer. Par exemple, à Saint-Pierre-et‑Miquelon, les services de l’État ont rappelé qu’il serait utile « de disposer d’un maillage plus fin. La taille infime de l’archipel ainsi que sa position, à la jonction de deux mailles radars, complexifie grandement les prévisions » ([142]). Si l’essentiel des auditions conduites a permis de saluer les moyens engagés par l’État pour la surveillance des principaux risques naturels, par exemple dans le cadre de l’apparition d’un nouveau volcan à Mayotte ([143]), le rapporteur rappelle l’importance de continuer d’investir dans des équipements de pointe et de maintenir un niveau d’effectifs formés suffisant, desquels dépendent à la fois la bonne utilisation et la maintenance de ces équipements et donc, in fine, la précision et la fiabilité des prévisions réalisées.

Par ailleurs, la surveillance diffère de l’observation et de l’étude scientifiques par l’importante disponibilité horaire qu’elle implique. En effet, pour tenir les autorités informées chaque jour de l’année et à n’importe quel moment de la survenue d’un risque, et plus généralement pour observer et recueillir les données scientifiques, les organismes scientifiques doivent s’organiser pour assurer une continuité de service. Or, il est apparu au cours des auditions que la surveillance ne faisait non seulement pas partie des missions officielles de certains organismes scientifiques, mais que l’organisation des astreintes des personnels rendues nécessaires n’était pas prévue dans un cadre formel donnant lieu à rétribution. C’est notamment le cas des activités de surveillance volcanique et sismique en outre-mer, dans la mesure où « actuellement, ces astreintes (pour les personnels chargés de la surveillance) ne sont pas financées et aucun agent des observatoires n’a pour tâche d’assurer un lien avec les gestionnaires de crise. Si l’on veut améliorer la surveillance, il faut reconnaître ce rôle et le pérenniser, avec un cadre plus général, interministériel » ([144]).

2.   Des plans ORSEC essentiels mais inégaux

Aux termes de l’article L. 741‑1 du code de la sécurité intérieure tel que modifié par l’ordonnance n° 2012‑351 du 12 mars 2012 relative à la partie législative du code de la sécurité intérieure, « l’organisation des secours revêtant une ampleur ou une nature particulière fait l’objet, dans chaque département, dans chaque zone de défense et de sécurité et en mer, d’un plan dénommé plan ORSEC ». Il « détermine, compte tenu des risques existant dans le département, l’organisation générale des secours et recense l’ensemble des moyens publics et privés susceptibles d’être mis en œuvre. Il définit les conditions de leur emploi par l’autorité compétente pour diriger les secours » ([145]). Le plan ORSEC se subdivise en deux catégories, d’une part « des dispositions générales applicables en toute circonstance » et d’autre part « des dispositions propres à certains risques particuliers » ([146]) dont font partie les risques naturels majeurs. Ils « sont élaborés et révisés au moins tous les cinq ans dans les conditions définies par décret en Conseil d’État » ([147]). Par conséquent, les plans ORSEC constituent des documents essentiels à la gestion des risques naturels.

Pourtant, les territoires d’outre-mer sont inégalement dotés dans ce domaine. En premier lieu, tous les territoires ne disposent pas de dispositions spécifiques ORSEC pour l’ensemble des risques auxquels ils sont exposés. Par exemple, le rapporteur relève que Mayotte ne dispose pas, à ce jour, de dispositif spécifique pour le risque sismo-volcanique ([148]), lequel est, selon la préfecture de Mayotte, en cours de rédaction depuis 2023. De la même manière, les plans ORSEC ne sont pas toujours actualisés régulièrement, y compris lorsque des événements appelleraient une telle actualisation. Encore à Mayotte, à la suite de la découverte du nouveau volcan sous-marin Fani Maoré en mai 2019, les dispositions spécifiques ORSEC pour le risque tsunami n’ont pas été mises à jour. L’actuel document, adopté le 10 février 2016, est en cours d’actualisation depuis 2023 selon la préfecture de Mayotte. De plus, le rapporteur note que la préparation optimale à l’égard d’un ou de plusieurs risques au sein d’un territoire ne signifie pas pour autant une préparation optimale pour faire face à tous les risques. Autrement dit, qu’un territoire soit préparé à la gestion d’un cyclone ne signifie pas qu’il l’est, par exemple, pour une éruption volcanique ou un tsunami.

Par ailleurs, les dispositions spécifiques ORSEC produites et adoptées par les préfectures ne semblent pas toujours opérationnelles. En louant les qualités des dispositions spécifiques ORSEC cyclones de La Réunion qui évitent l’écueil de plans « trop détaillés et rapidement obsolètes » ([149]), le directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises a, en creux, décrit ce que sont un certain nombre des plans et dispositions spécifiques ORSEC des territoires ultramarins ou hexagonaux. Au-delà de la forme, il est important que les plans ORSCE reposent sur une connaissance solide tant des risques naturels que des territoires auxquels ils s’appliquent. Or, différentes données semblent encore faire défaut. Par exemple, « en Nouvelle-Calédonie, faute d’une cartographie suffisante des risques comportant un zonage sismique et des données topographiques, il est difficile de cartographier le risque de tsunami et d’avoir une idée plus précise des hauteurs des vagues potentielles » ([150]). De même, les incertitudes relatives au recensement de la population à Mayotte ne facilitent pas la préparation d’une éventuelle évacuation et plus largement l’organisation des secours aux populations. Enfin, si les organismes scientifiques, tels que les observatoires, « sont régulièrement sollicités pour participer à la mise à jour des plans ORSEC » ([151]), certains auditionnés ont regretté l’absence de « lien entre les chercheurs et les autorités » et les difficultés d’intégration des travaux scientifiques aux réponses opérationnelles des gestionnaires de crise ([152]). Par ailleurs, s’agissant des travaux scientifiques, le rapporteur note qu’il s’agit tant des travaux et recherches en sciences fondamentales qu’en sciences humaines, lesquelles ont apporté au cours des auditions la preuve de leur intérêt pour la préparation aux risques naturels majeurs et de leurs apports en ce domaine. Par ailleurs, le rapporteur souligne également le caractère « complémentaire » du savoir vernaculaire, « même lorsqu’on travaille sur des aléas naturels » ([153]). Il rejoint ainsi le Retex de l’ouragan Irma effectué dans le cadre du projet TIREX qui souligne que « l’anticipation de l’évènement prend également une dimension individuelle dans laquelle les populations s’organisent à partir de recommandations officielles et des savoirs vernaculaires » ([154]).

Recommandation n° 27 : transmettre par voie de circulaire à l’ensemble des services de l’État d’outre-mer des consignes de forme pour l’actualisation des plans ORSEC et de leurs dispositions spécifiques afin de disposer de plans synthétiques et opérationnels et inciter à une plus large mobilisation des savoirs scientifiques et locaux.

Enfin, au-delà des seuls plans ORSEC, au regard de « l’importance et de la complexité de gestion des risques naturels majeurs » mais également « du nombre des interlocuteurs qui participent à sa définition », le rapporteur salue la désignation par le préfet de la Martinique d’une sous-préfète, « référent territorial chargé de coordonner et d’impulser cette politique sous (son) autorité directe » ([155]). À sa connaissance, il s’agit d’un exemple unique dans les territoires d’outre-mer qui pourrait être reproduit pour assurer un pilotage optimal de la préparation aux risques naturels majeurs, le cas échéant avec l’état-major interministériel de zone.

Recommandation n° 28 : désigner dans chaque préfecture ou Haut-commissariat un membre du corps préfectoral chargé du pilotage de la politique de prévention des risques naturels.

3.   Des plans communaux de sauvegarde à généraliser

Aux termes de l’article L. 742‑1 du code de la sécurité intérieure, le maire est l’autorité qui, en temps de crise, assure en première intention la direction des opérations sur le territoire de sa commune. Il est ainsi essentiel que les communes se préparent à la survenue de ces risques.

Comme le plan ORSEC, le plan communal de sauvegarde est régi par le livre VII « Sécurité civile » du code de la sécurité intérieure. Aux termes de l’article L. 731‑3 du code de la sécurité intérieure tel que modifié par la loi n° 2021‑1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, le plan communal de sauvegarde « prépare la réponse aux situations de crise et regroupe l’ensemble des documents de compétence communale contribuant à l’information préventive et à la protection de la population. Il détermine, en fonction des risques connus, les mesures immédiates de sauvegarde et de protection des personnes, fixe l’organisation nécessaire à la diffusion de l’alerte et des consignes de sécurité, recense les moyens disponibles et définit la mise en œuvre des mesures d’accompagnement et de soutien de la population ». Il est obligatoire, notamment, pour chaque commune « reconnue, par voie réglementaire, comme exposée au risque volcanique », située « dans les territoires régis par l’article 73 de la Constitution ou les territoires de Saint-Martin et Saint-Barthélemy et exposée au risque cyclonique » ou concernée « par une zone de sismicité définie par voie réglementaire ». En outre, il doit faire l’objet tous les cinq ans au moins « d’un exercice associant les communes et les services concourant à la sécurité civile » ([156]).

En matière de plans communaux de sauvegarde, les territoires d’outre-mer ne semblent pas être également préparés. Sans pouvoir procéder à une évaluation qualitative de chaque plan communal de sauvegarde, le rapporteur a interrogé l’ensemble des territoires ultramarins sur l’adoption ou non de tels plans au sein de leurs communes. Si dans certains territoires, toutes les communes sont dotées d’un plan communal de sauvegarde, à l’image par exemple de la Martinique ([157]), cela s’avère plus hétérogène dans d’autres. En Guadeloupe, toutes les municipalités en sont dotées « à l’exception de deux ou trois » ([158]). Autre situation à Saint-Pierre-et-Miquelon, où le plan communal de sauvegarde de Saint-Pierre est « rédigé, mais n’a pas encore été présenté au conseil municipal, tandis que celui de Miquelon-Langlade est en cours de rédaction » ([159]).

Les collectivités d’outre-mer ont exprimé à plusieurs reprises des difficultés pour recruter de manière pérenne des agents en capacité d’élaborer et de mettre en œuvre de tels plans. Ces difficultés sont également rencontrées par les services de l’État. À l’image de la préfecture déléguée de Saint-Barthélemy et Saint‑Martin au moment d’Irma, toutes les préfectures ne sont pas « carrossées comme telle et dotées de services, des moyens humains (et) des compétences » ([160]). En guise d’illustration, le rapporteur souligne que le chef de service interministériel de sécurité civile de la préfecture de Saint-Pierre-et-Miquelon est l’unique sapeur-pompier professionnel de l’archipel ([161]). De même, à Mayotte, la direction de l’environnement, de l’aménagement, du logement et de la mer dénombre actuellement 25 postes vacants sur près de 300 agents ([162]). Malgré ces difficultés, le rapporteur souhaite rappeler qu’il appartient au préfet de « challenger » les collectivités et, lorsqu’elles éprouvent des difficultés, « par manque de moyens, notamment d’ingénierie », de les aider « à élaborer ces plans » ([163]).

Recommandation n° 29 : doter les préfectures des effectifs nécessaires et d’agents formés en matière de préparation et de réponse aux risques naturels majeurs.

Recommandation n° 30 : réaffirmer la vocation des préfectures en matière d’offre de service et d’accompagnement auprès des communes pour la réalisation des plans communaux de sauvegarde.

Recommandation n° 31 : constituer un pôle d’agents et d’experts pouvant être mobilisé en appui des territoires ultramarins pour la rédaction et l’actualisation des plans.

4.   L’hypothèse d’un « big one » ou d’une conjonction d’événements

L’ensemble des territoires d’outre-mer se préparent, certes inégalement, aux risques naturels majeurs. Toutefois, le rapporteur a constaté au cours des auditions que deux hypothèses étaient insuffisamment anticipées par les pouvoirs publics :

 la première hypothèse est celle d’un « big one » ou d’un « cygne noir » : il s’agit d’un événement naturel rare, non par sa nature mais par son ampleur tel qu’un cyclone ou une éruption particulièrement violents et peu fréquents. Si leur probabilité est certes faible, la survenue d’un tel événement engendrerait un important bilan, notamment en terme de victimes ;

 la seconde hypothèse est celle de la conjonction d’événements, qu’il s’agisse de deux événements naturels qui se succèdent ou d’un événement naturel causant une autre crise, par exemple industrielle.

Les pouvoirs publics semblent avoir conscience de la probabilité de tels évènements. Par exemple, en Polynésie française, « la concomitance de plusieurs phénomènes naturels n’est pas à exclure tant statistiquement certains risques sont prégnants » ([164]). En 2022, un tsunami d’ampleur a ainsi été annoncé, à la suite de l’explosion du volcan Hunga Tonga, durant une alerte rouge pour forte houle. Les conséquences de tels événements sont également envisagées par les services de l’État. En Polynésie française, ils notent que « la gestion du risque industriel est, elle aussi, balbutiante » et qu’« un évènement naturel entraînerait vraisemblablement des incidents de nature industrielle, dont les conséquences concomitantes renforceraient indéniablement les effets délétères sur les populations, les biens et l’environnement » ([165]). De même, lors du déplacement à Mayotte du rapporteur, le préfet a qualifié la survenue d’un événement sismique suivi d’une vague de grande taille sur l’île de « catastrophe absolue » ([166]).

Pourtant, les pouvoirs publics ne semblent pas ou peu s’y préparer, comme l’ont mis en lumière les auditions : « à l’issue d’une étude exploratoire sur la gestion multirisque, nous avons mis en évidence la non-prise en compte des scénarios multi-aléas dans la politique de réduction des risques de catastrophes – qu’il s’agisse d’une succession d’événements du même type, comme les cyclones Irma, José et Maria en 2017, ou du passage d’un cyclone pendant une crise volcanique comme en Guadeloupe en 1976. Cette situation n’est pas envisagée dans les exercices de crise, qui sont toujours mono-aléa » ([167]). À titre d’illustration, le rapporteur relève que le confinement de l’ensemble de la population tel qu’il a été mis en place à La Réunion dans le cadre de la gestion du cyclone Belal poserait de nombreux enjeux s’il était concomitant à une crise volcanique. Au-delà de la préparation de ces événements à l’échelle territoriale au travers des plans ORSEC, il apparaît ainsi nécessaire que ces hypothèses soient anticipées à l’échelle nationale.

Recommandation n° 32 : intégrer aux plans ORSEC l’hypothèse de la survenance d’un évènement de type « big one » ou de la conjonction d’événements et réaliser sur cette base des exercices multirisques.

Recommandation n° 33 : élaborer au niveau national un plan de réaction rapide, par territoire, en cas de survenue d’un évènement de type « big one », avec calibrage d’une force de réaction rapide et d’un état-major opérationnel prédéfini.

5.   S’exercer

En complément des retours d’expérience effectués à la suite de chaque crise, la conduite d’exercice associant les services et la population est primordiale pour se préparer, a fortiori lorsque les derniers événements naturels majeurs connus sont anciens. Selon le ministère de l’intérieur, « les exercices sont conçus pour révéler les dysfonctionnements afin que, lors de la crise, les dispositifs fonctionnent plus ou moins correctement ». Dans cet esprit, un bon exercice est « un exercice raté », dans la mesure où « un exercice au cours duquel tout se déroule comme prévu n’a sans doute pas été bien pensé ». Par conséquent, « un grand nombre d’exercices nationaux et locaux » est réalisé. Ils font l’objet d’un suivi par le bureau de la planification, des exercices et des retours d’expérience de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, qui s’assure « qu’en complément des exercices nationaux, les exercices locaux conduits par les préfectures sont suffisamment nombreux et variés » ([168]).

Le rapporteur a pu constater la réalisation de ces exercices par les services de l’État, en lien avec l’ensemble des acteurs. Par exemple, à la Martinique, « sept à huit exercices par an » sont réalisés en essayant d’associer « toute la chaîne des acteurs, y compris l’autorité judiciaire, pour tester la circulation des informations » ([169]). De même, à Saint-Pierre-et-Miquelon, « quatre et six exercices de sécurité civile annuels » sont réalisés « à la fois sur table et sur le terrain » ([170]). Tout en laissant une grande autonomie aux autorités locales pour déterminer les types d’exercice les mieux adaptés aux risques de chaque territoire, il importe que les exerces réalisés dans les territoires ultramarins soient suivis sur le plan quantitatif et qualitatif par l’administration centrale du ministère de l’intérieur.

B.   rompus à la gestion des crises, les pouvoirs publics peuvent encore progresser dans la GAMME DES réponseS À Y apportER

Lorsqu’une crise liée à un événement naturel survient, les pouvoirs publics ultramarins sont conduits à répondre rapidement afin de protéger les personnes et les biens. Pour ce faire, ils disposent d’une organisation, de moyens matériels et humains et peuvent également avoir recours à des formes de coopération à l’échelon régional.

1.   Une gouvernance de crise qui a fait ses preuves

En matière de gestion de crise par les services de l’État, l’organisation administrative repose sur deux échelons :

– d’une part, le représentant de l’État dans le département : aux termes de l’article 11 du décret n° 2004‑374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l’organisation et à l’action des services de l’État dans les régions et départements tel que modifié par le décret n° 2010‑146 du 16 février 2010, il a « la charge de l’ordre public et de la sécurité des populations » et est responsable de « l’exécution des mesures de sécurité civile ». À l’échelon départemental, un service interministériel de défense et protection civile appuie le préfet dans ces missions ;

– d’autre part, le représentant de l’État dans la zone de défense et de sécurité : aux termes de l’article R*122‑2 du code de la sécurité intérieure, il s’agit du représentant de l’État du département où se trouve le chef-lieu de la zone. En matière de sécurité civile, « il assure la coordination des actions » ([171]), comprenant la répartition des moyens opérationnels, matériels, véhicules et effectifs lorsque nécessaire. Pour réaliser ses missions, le représentant de l’État de zone de défense et de sécurité dispose d’un état-major interministériel de zone, lequel est chargé, en matière de réponse aux crises, de recueillir les informations, d’évaluer les situations et de proposer des réponses opérationnelles ([172]).

Dans les territoires d’outre-mer, les zones de défense et de sécurité sont réparties de la façon suivante ([173]) :

Les zoneS de défense et de sécuritÉ dans les territoires d’outre-mer

Zone

Territoires

Haut-fonctionnaire de zone
de défense et de sécurité

Antilles

Guadeloupe, Martinique, Saint‑Barthélemy, Saint-Martin

Préfet de la Martinique

Guyane

Guyane

Préfet de la Guyane

Sud de l’Océan Indien

La Réunion, Mayotte, Terres australes et antarctiques françaises

Préfet de La Réunion

Nouvelle-Calédonie

Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna

Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie

Polynésie française

Polynésie française

Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie

Aux termes de l’article L. 742‑2 du code de la sécurité intérieure, « en cas d’accident, sinistre ou catastrophe dont les conséquences peuvent dépasser les limites ou les capacités d’une commune, le représentant de l’État dans le département mobilise les moyens de secours relevant de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics. En tant que de besoin, il mobilise ou réquisitionne les moyens privés nécessaires aux secours. Il assure la direction des opérations de secours. Il déclenche, s’il y a lieu, le plan ORSEC départemental ». Par ailleurs, « lorsque le représentant de l’État prend la direction des opérations de secours, il en informe les maires des communes dont le territoire est concerné par ces opérations », ce qui est en matière de gestion des risques naturels généralement le cas. Malgré le cadre juridique spécifique applicable dans les territoires du Pacifique, une organisation similaire y prévaut, à l’exemple de la Polynésie française où en temps de crise « le haut-commissaire de la République coordonne les opérations de secours excédant le territoire d’une commune ou dont l’ampleur excède les moyens de la commune » ([174]).

Pour diriger les opérations, le représentant de l’État dispose d’un COD, qu’il décide d’activer ou non et dont la composition, de nombreuses auditions l’ont souligné, est laissée à sa main. Le rapporteur note ainsi que d’un territoire à l’autre ou d’un directeur des opérations à l’autre la composition du COD varie, par exemple en ce qui concerne la présence de scientifiques, d’élus ou de représentants de la population disposant d’un savoir spécifique tel que la connaissance fine du territoire ou des langues locales. En outre, sur le plan immobilier, il importe que les services de l’État identifient des espaces pouvant servir de COD de repli en cas de destruction ou de dysfonctionnement des espaces qui y sont normalement consacrés.

Recommandation n° 34 : inviter par voie de circulaire les représentants de l’État dans les territoires d’outre-mer à identifier des acteurs locaux, scientifiques, élus ou représentants de la population, en capacité d’intégrer un centre opérationnel départemental lorsqu’un évènement naturel majeur survient.

Recommandation n° 35 : prévoir dans chaque préfecture ou haut-commissariat de la République un lieu de repli pour l’installation du COD si les infrastructures prévues à cet effet ne peuvent être utilisées.

Cette organisation des services de l’État et de la prise de décision durant les crises a été saluée au cours des travaux de la commission d’enquête, notamment quant à « la fluidité de la gestion de crise entre l’État et les communes » ([175]) qui a été saluée par l’association des maires de France. Pour autant, le rapporteur souligne l’importance du phénomène de turnover parmi les membres du corps préfectoral dans les territoires d’outre-mer, également identifié pour d’autres fonctionnaires de l’État et relevé à plusieurs reprises au cours des auditions. De ce fait, « les personnes qui arrivent ne connaissent pas nécessairement le territoire, les phénomènes naturels qui le caractérisent » ([176]). De plus, « certains des gestionnaires (…) rencontrés nous ont dit n’avoir jamais connu de cyclone » ([177]).

 

Recommandation n 36 : dispenser aux membres du corps préfectoral une formation, adaptée à leur territoire d’affectation, à la gestion des risques naturels majeurs, tant sur le plan théorique que pratique au travers de la réalisation d’exercices.

2.   Des moyens mobilisables globalement importants mais localement disparates

Pour assurer une réponse opérationnelle à la hauteur des risques naturels majeurs, les pouvoirs publics disposent de moyens de sécurité civile qu’ils soient humains, matériels ou technologiques. D’autres acteurs, publics comme privés, sont conduits à apporter leur concours. Si ces moyens sont importants, ils peuvent s’avérer inégaux d’un territoire ultramarin à l’autre.

a.   La sécurité civile en première ligne

i.   Des effectifs et moyens inférieurs à ceux déployés dans l’hexagone

Pour répondre aux risques naturels majeurs, les moyens dont dispose chaque territoire ultramarin sont cruciaux. Il s’agit en premier lieu des moyens humains et matériels des services d’incendie et de secours (SDIS). Le rapporteur a sollicité ces données auprès de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. Toutefois, celle-ci ne dispose que des données intéressant les départements d’outre-mer et non les autres collectivités. La raison en est que « les autres collectivités ultramarines bénéficiant de législations différentes ne sont pas tenues de fournir leurs statistiques » ([178]).

Ainsi, parmi les départements d’outre-mer, les SDIS de Guadeloupe et de La Réunion sont classés en catégorie B (entre 400 et 900 000 habitants) et ceux de Martinique, de Guyane et de Mayotte sont classés en catégorie C (moins de 400 000 habitants). Pour autant, certains territoires ultramarins comme Mayotte ou la Guyane connaissent une immigration illégale massive, dont la prise en compte dans le recensement de la population – par nature complexe – pourrait modifier la catégorisation de leur SDIS.

Leurs effectifs, comparés à la moyenne nationale constatée dans la catégorie équivalente, se répartissent comme suit :

effectifs des sdis des départements d’outre-mer

 

Sapeurs-pompiers professionnels

Sapeurs-pompiers volontaires intégrés

Total

Guadeloupe

354

1 297

1 651

La Réunion

866

1 459

2 325

Moyenne nationale des SDIS de catégorie B

403

2 006

2 588

 

 

Sapeurs-pompiers professionnels

Sapeurs-pompiers volontaires intégrés

Total

Martinique

268

1 174

1 442

Guyane

288

739

1 027

Mayotte

243

334

577

Moyenne nationale des SDIS de catégorie C

151

1 222

1 447

Source : Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.

S’agissant des moyens matériels, comparés à la moyenne nationale observée dans la catégorie équivalente, ils se répartissent comme suit, sans couvrir l’ensemble du parc d’engins de chaque département (les véhicules destinés aux interventions diverses, les engins particuliers ou très spécialisés ne sont pas recensés) :

moyens matériels des sdis des départements d’outre-mer

 

Engins de secours

Engins d’extinction

Moyens élévateurs

Guadeloupe

43

33

4

La Réunion

70

89

6

Moyenne nationale des SDIS de catégorie B

81

97

12

 

 

Engins de secours

Engins d’extinction

Moyens élévateurs

Martinique

46

32

2

Guyane

36

29

2

Mayotte

19

11

1

Moyenne nationale des SDIS de catégorie C

49

59

6

Source : Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.

En définitive, sapeurs-pompiers volontaires et professionnels confondus, de moindres effectifs et un sous-équipement sont constatés dans bon nombre de territoires ultramarins alors même qu’ils sont particulièrement soumis aux aléas naturels. Ce constat se confirme également en observant le nombre de sapeurs-pompiers et d’engins pour 100 000 habitants, plus encore selon le nombre d’habitants officiellement retenu et sans doute sous-estimé, par exemple dans le cas de Mayotte :

Nombre de sapeurS-pompiers et d’engins pour 100 000 habitants
dans les départements d’outre-mer

 

Population

SP / 100 000 habitants

Écart à la moyenne

Engins/100 000 habitants

Écart à la moyenne

Guadeloupe

405 873

407

– 0,8 %

24

– 35,7 %

La Réunion

872 121

267

– 35,0 %

25

– 33,3 %

Moyenne nationale des SDIS de catégorie B

631 396

410

 

37

 

Martinique

377 987

381

– 29,6 %

24

– 54,8 %

Guyane

284 045

362

– 33,3 %

27

– 49,2 %

Mayotte

270 511

213

– 60,7 %

14

– 73,3 %

Moyenne nationale des SDIS de catégorie C

266 820

542

 

53

 

Source : Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.

En matière d’équipement, il a été rappelé au cours des auditions que les SDIS sont des établissements publics autonomes financés par des collectivités, « qui sont pour la plupart exsangues financièrement » ([179]). En conséquence, par exemple en Guadeloupe, « le budget d’investissement est bien plus faible qu’il y a une dizaine d’années, ce qui se traduit immédiatement par des difficultés opérationnelles au quotidien » ([180]). Malgré l’absence de mécanisme de péréquation s’agissant des contributions de l’État à leur financement, le rapporteur souligne l’appui de l’État aux services d’incendie et de secours ultramarins. Par exemple, ils ont bénéficié d’un soutien financier de l’État dans le cadre des pactes capacitaires. Au total, les projets retenus au bénéfice des territoires ultra-marins représentent un montant estimé de 12,35 millions d’euros hors taxes. L’État contribue à hauteur de 7,8 millions d’euros permettant de cofinancer l’acquisition de 58 véhicules et matériels au profit des services d’incendie et de secours ultra-marins ([181]).

En matière d’effectifs, outre les éventuels enjeux budgétaires, les services sont également confrontés à des difficultés d’attractivité. Par exemple, à Mayotte, plusieurs postes de direction sont vacants au SDIS, notamment celui de directeur. De même, Mayotte ne dispose pas à ce jour de jeunes sapeurs-pompiers ([182]).

Recommandation n° 37 : mieux faire connaître les fonctions de sapeur-pompier volontaire dans les territoires d’outre-mer, particulièrement auprès des plus jeunes au travers de dispositifs comme les jeunes sapeurs-pompiers.

Recommandation n° 38 : encourager l’utilisation du fonds exceptionnel d’investissement aux fins de l’amélioration et de l’augmentation des équipements des services d’incendie et de secours ultramarins.

Au‑delà des effectifs et équipements des services d’incendie et de secours, des évolutions technologiques récentes ont été réalisées au sein des territoires ultra‑marins à l’initiative de l’État et des collectivités :

– le déploiement des sirènes du système d’alerte et d’information des populations (SAIP) : 23 sirènes ont été installées à Mayotte en juillet 2021, de même que douze aux Antilles entre mai et juillet 2022 (cinq en Martinique, quatre en Guadeloupe et trois à Saint-Martin). Parallèlement à la poursuite de ce déploiement dans les territoires ultramarins, le rapporteur note la nécessité de compléter ou d’améliorer le maillage existant. En effet, il a constaté au cours de son déplacement à Mayotte des positionnements de sirènes perfectibles. Par exemple, l’aéroport de Dzaoudzi ne dispose pas de sirène et sa situation géographique ne lui permet pas d’entendre la sirène la plus proche ([183]) ;

– le déploiement du dispositif FR‑Alert : le dispositif FR‑Alert permet de prévenir en temps réel toute personne présente dans une zone de danger et détentrice d’un téléphone portable, des comportements à adopter au travers d’une notification et d’un signal sonore, y compris lorsque le téléphone portable est placé en mode silencieux ([184]). À la suite de l’hexagone, ce dispositif a commencé à être déployé dans les territoires d’outre-mer. Il est opérationnel à Mayotte et à La Réunion depuis décembre 2022 et doit l’être depuis la fin du mois de mars 2024 dans les Antilles et en Guyane. D’autres territoires devront encore être inclus dans le dispositif, comme Saint‑Pierre‑et‑Miquelon ([185]) ;

– des initiatives des collectivités ultramarines méritent également d’être saluées, comme par exemple le conseil régional de la Guadeloupe qui a déployé dans les îles du Sud des téléphones satellitaires qui, en période de cyclone, « permettent de maintenir le contact avec les maires » ([186]).

Recommandation n° 39 : poursuivre et, le cas échéant, corriger le déploiement des sirènes et du dispositif FR-Alert dans l’ensemble des territoires d’outre-mer.

ii.   Projeter plutôt que prépositionner

Outre les moyens des SDIS ultramarins, des moyens nationaux de sécurité civile sont disponibles. Certains sont prépositionnés dans les territoires d’outre-mer. Ainsi, des soldats des FORMSIC sont présents dans les états-majors interministériels des zones Antilles, Guyane et océan Indien. De même, certains éléments de la flotte de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises y sont prépositionnés : un groupement d’hélicoptères de la sécurité civile est implanté en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane et dispose de pilotes et mécaniciens. Un groupement d’avions de la sécurité civile intervient à La Réunion au moyen d’un Dash 8. De même, les Antilles disposent de matériels de la réserve nationale stockés en Martinique et en Guadeloupe. Des discussions sont actuellement en cours afin de stocker de telles réserves à La Réunion et en Guyane. Toutefois, la plupart des moyens nationaux sont stationnés dans l’hexagone, notamment les militaires des FORMISC qui représentent au total 1 323 ETPT en 2023 ([187]).

La question d’un prépositionnement pérenne de moyens et d’effectifs dans les outre-mer s’est à plusieurs reprises posée au cours des travaux de la commission d’enquête. À cet égard, le rapporteur estime que la doctrine actuelle du ministère de l’intérieur est la bonne. Le prépositionnement pérenne ne paraît pas devoir être recommandé, et ce pour plusieurs raisons. Les personnels ont tout d’abord besoin d’un entraînement régulier, que l’encadrement et les structures dans l’hexagone permettent d’assurer. Par ailleurs, prépositionner ces unités sur les lieux mêmes des risques pourrait les exposer et mettre en péril leur capacité de réponse opérationnelle. Enfin, le ministère de l’intérieur préfère, si le risque est prévisible, prépositionner des moyens en urgence dans un lieu à proximité du site potentiellement touché ou les déployer en réponse en moins de 24 heures. Une telle doctrine implique que les territoires d’outre-mer soient en capacité de tenir, sans renfort, les 24 ou 48 premières heures. Cela est vrai pour les populations qui doivent apprendre « à répondre à leurs propres besoins pendant les 48 premières heures » ([188]) mais également pour les acteurs économiques tels que les supermarchés ou, naturellement, les services de l’État et les collectivités. À ce titre, le rapporteur se félicite de la création, par la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOPMI), « à l’horizon 2025 aux Antilles et à l’horizon 2027 dans l’océan Indien, de moyens en personnel et en matériel nommés « harpons ». Il s’agit d’une dizaine d’équivalents temps plein (ETP) provenant des FORMISC qui seront prépositionnés de manière permanente dans les territoires précités. Ces ETP auront pour mission de contribuer à la gestion des réserves nationales existantes et à leur projection, ainsi qu’à la formation et à l’entraînement des acteurs locaux à la gestion des crises. En cas de crise ou de catastrophe majeure, ces ETP avancés seront chargés de préparer l’arrivée des renforts. Ce schéma vient compléter le dispositif existant de prépositionnement, dans certains territoires ultramarins, de moyens de la réserve nationale et de moyens nationaux » ([189]).

iii.   En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, une organisation à moderniser ?

Les collectivités du Pacifique disposent d’une organisation spécifique en matière de sécurité civile.

D’une part, aux termes de l’ordonnance n° 2006‑173 du 15 février 2006 portant actualisation et adaptation du droit applicable en matière de sécurité civile en Polynésie française et de la loi du pays n° 2012‑1 du 20 janvier 2012 relative au transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences de l’État en matière de sécurité civile, la compétence de sécurité civile relève des gouvernements locaux en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Si les collectivités se sont saisies de cette compétence, cette répartition n’est pas sans poser de difficultés en pratique comme l’ont montré les auditions conduites avec les services de l’État et des collectivités des territoires du Pacifique.

D’autre part, en Nouvelle-Calédonie comme en Polynésie française, le modèle des services d’incendie et de secours repose sur une organisation communale. L’organisation qui prévaut aujourd’hui dans les deux collectivités est équivalente à celle qui existait à la fin des années 1990 dans l’hexagone. Or la réponse communale, quand elle existe, est très disparate d’une ville à l’autre. Par exemple, en Polynésie française, il existe 34 centres de secours pour 48 communes, réparties sur 76 îles habitées sur 118 existantes. Lorsqu’elle est nécessaire, si les maires en sont d’accord, la mutualisation de la réponse de secours est possible. Toutefois, il est fréquent que les communes correctement dotées en sapeurs-pompiers rechignent à les mobiliser au profit de communes n’ayant pas réalisé cet effort ([190]). En effet, « les secours sont souvent directement proportionnels à la richesse de la commune », loin du modèle hexagonal « où la charge est répartie sur l’ensemble des collectivités du département, ce qui permet un lissage de la réponse opérationnelle » ([191]). De ce fait, plusieurs des auditions conduites ont permis d’arriver à la conclusion que les territoires du Pacifique arrivaient « au bout du système communal » en matière de sécurité civile ([192]).

Recommandation n° 40 : conduire une réflexion sur l’organisation de la sécurité civile dans les collectivités du Pacifique afin de construire un modèle en adéquation avec leurs enjeux, le cas échéant dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile.

b.   L’indispensable recours aux forces armées

Les armées françaises sont présentes outre-mer au travers des forces armées en Guyane, des forcées armées aux Antilles, des forces armées dans la zone‑sud de l’océan Indien, des forces armées en Nouvelle‑Calédonie ainsi que des forces armées en Polynésie française.

En outre-mer comme dans l’hexagone, ces forces armées répondent à leurs missions parmi lesquelles figurent la défense des intérêts français, la protection du territoire français et la protection de la population ([193]). À ce titre, elles apportent un concours indispensable dans la réponse aux risques naturels majeurs auxquels sont confrontés les territoires d’outre-mer, lorsque « les structures ordinaires de l’État ne sont pas capables de remplir correctement leurs missions ». En cohérence avec la doctrine du ministère de l’intérieur, leur rôle est, de manière extrêmement réactive, « d’absorber le premier choc » dans l’attente de « l’envoi de renforts de l’hexagone, tels que les FORMISC » ([194]). De ce fait, les forces armées en outre-mer se tiennent prêtes à être mobilisées. Par exemple, aux Antilles, les armées ont conçu un plan catastrophes naturelles, « qui prévoit différentes situations et différents modes d’actions, en s’appuyant sur des retours d’expérience » ([195]). De même, elles procèdent à des entraînements et participent aux exercices organisés par les services de l’État à l’exemple de l’exercice annuel Cyclonex organisé à La Réunion ([196]).

L’intervention des forces armées lors d’un événement naturel majeur se fait par réquisition ou sur demande de concours du représentant de l’État. Elle s’intègre ainsi parfaitement dans la gouvernance de crise que le préfet dirige. Il importe ainsi que s’établisse une bonne coordination entre les autorités civiles et militaires, laquelle doit reposer sur des « liens de confiance forts avec tous les services de l’État et sur une connaissance mutuelle fine » ([197]), ce que les auditions conduites ont permis de confirmer.

Si le rapporteur souhaite vivement saluer le concours des forces armées à la gestion des risques naturels majeurs en outre-mer, il souhaite toutefois rappeler que les moyens des forces armées ne sont pas spécifiquement « conçus pour un tel emploi » ([198]). Il convient également d’être conscient du fait que la mobilisation des forces armées face aux risques naturels peut les conduire « à renoncer ponctuellement à certaines de (leurs) missions » ([199]). De ce fait, il apparaît essentiel que la gestion des risques naturels en outre-mer soit suffisamment robuste pour que le recours aux forces armées reste autant que faire se peut exceptionnel dans des zones du monde où les armées réalisent d’ores et déjà de nombreuses missions pour la sécurité et la défense des intérêts des Français.

c.   Un système de santé fragile

Aux côtés des acteurs de la sécurité civile, le système de santé est un maillon essentiel mais fragile de la gestion des conséquences des événements naturels majeurs, à l’hôpital principalement pour porter secours aux victimes, mais aussi en ville comme à l’hôpital pour assurer la permanence et la continuité des soins, somatiques ou non.

En premier lieu, afin de rester fonctionnelles en cas de crise, les infrastructures du système de santé doivent absolument être construites dans le respect des normes de construction applicables aux risques qui les concernent. Les dernières constructions de bâtiments hospitaliers semblent effectivement les respecter. Ainsi, le projet du nouveau centre hospitalier universitaire (CHU) de la Guadeloupe bénéfice « d’une très haute technologie antisismique » ([200]). À La Réunion, les bâtiments du CHU « les plus récents sont conformes aux dernières normes » ([201]). Toutefois, le rapporteur rejoint les interrogations émises lors des auditions sur « la capacité de résistance des (bâtiments les) plus anciens » ([202]). De la même manière, si le nombre de lits de soins critiques du nouveau CHU de la Guadeloupe est en augmentation, tirant les leçons de la crise sanitaire du Covid‑19, il est permis de s’interroger sur les capacités des plus anciens bâtiments hospitaliers pour répondre à un afflux soudain de patients.

En outre, une partie seulement du système de santé ultramarin apparaît dotée de moyens adaptés pour appréhender une crise. À La Réunion, le SAMU s’est vu doter d’un hélicoptère il y a cinq ans, de même le SAMU de Mayotte en possède un depuis trois ans. Par ailleurs, l’un et l’autre disposent de postes sanitaires projetables mobilisables en temps de crise et constituent des stocks pharmaceutiques. Pour autant, tous les territoires ultramarins ne disposent pas des mêmes capacités. Par exemple, le « manque de vecteurs aériens » ([203]) est revenu à plusieurs reprises au cours des auditions comme un « facteur limitant » ([204]) pour de nombreux territoires, à l’image de la Guadeloupe ou de la Guyane. Par ailleurs, les difficultés d’accessibilité des territoires ultramarins en cas de crise pourraient rendre compliquées voire temporairement impossibles les évacuations sanitaires fréquemment réalisées à partir de ces territoires.

Plus généralement, le rapporteur note que les problèmes auxquels est confronté le système de santé français dans son ensemble concernent de manière plus aigüe encore les territoires ultramarins et les rend plus vulnérables. Les difficultés de recrutement et d’attractivité, de même que l’important turn-over des professionnels ne facilitent pas le développement de la connaissance des risques naturels et, plus directement, l’ouverture d’un capacitaire adapté aux besoins de la population, plus encore en temps de crise. C’est ainsi que le système de santé mahorais, « déjà très déficitaire, aurait le plus grand mal à faire face à un événement majeur » ([205]). La venue de renforts venus de l’hexagone serait dès lors également nécessaire sur le plan sanitaire. D’autres difficultés courantes fragilisent le système de santé telles que les difficultés d’accès à l’eau potable ou « des problèmes d’approvisionnement » ([206]).

Enfin, au-delà des structures hospitalières, les acteurs de santé en ville sont indispensables à la permanence et à la continuité de soins. Par exemple, à La Réunion, 50 000 personnes seraient prises en charge par des infirmiers libéraux, lesquels peuvent être empêchés dans leurs déplacements lors d’une crise ([207]). Le recensement, la mise à l’abri des personnes concernées, et plus généralement des personnes vulnérables, dans des lieux adaptés et dotés de personnels soignants représente ainsi un enjeu important, comme le cyclone Belal l’a montré. Ils nécessitent la mobilisation de tous les acteurs sanitaires et sociaux en lien avec les services de l’État et les collectivités.

Recommandation n° 41 : systématiser le recensement des personnes vulnérables et isolées et bâtir des annuaires pouvant être transmis aux services de secours ou d’assistance. Lorsque nécessaire, assurer un accompagnement ou une campagne face à l’illectronisme.

3.   Des coopérations régionales importantes à la coordination complexe

Les événements naturels majeurs auxquels font face les territoires ultramarins ne se limitent pas aux frontières françaises. Ils sont bien souvent des événements régionaux, qui peuvent par leur ampleur et leur gestion par les autorités locales avoir des conséquences différentes d’un territoire à l’autre. De ce fait, la conduite de coopérations régionales ambitieuses est essentielle pour répondre aux risques naturels majeurs.

Tout d’abord, pour bâtir des coopérations régionales pérennes, le rapporteur a pu constater que la France avait investi leur dimension diplomatique. Trois ambassadeurs de France chargés de la coopération régionale dans les bassins océaniques atlantique, indien et pacifique ont été nommés, dont la mission est de renforcer la coopération des territoires d’outre-mer avec leurs pays voisins ([208]). Outre ces ambassadeurs, les préfets de région, dans l’hexagone comme en outre-mer, doivent désormais disposer d’un conseiller diplomatique pour renforcer « le partenariat entre l’État et les collectivités territoriales françaises en matière d’action extérieure » ([209]). Or il s’avère que ces postes ne seraient pas pourvus à ce jour. Faisant siens les propos du préfet de la Martinique, le rapporteur souhaite ainsi souligner « l’urgence de nommer un conseiller diplomatique auprès des préfets de la Martinique, de la Guadeloupe et la Guyane pour faciliter ce travail de conventionnement avec nos voisins caribéens, et développer nos relations régionales à tous points de vue, mais particulièrement en matière de lutte contre les événements majeurs » ([210]). L’accord frontalier signé le 26 mai 2023 entre la France et les Pays-Bas est une illustration récente des besoins de coopération, y compris en matière de gestion des catastrophes ([211]), entre Saint‑Martin et Sint Maarten.

Recommandation n° 42 : nommer des agents aux postes de conseiller diplomatique auprès des préfets en outre-mer et inscrire les coopérations en matière de risques naturels majeurs sur la feuille de route des ambassadeurs chargés des coopérations régionales d’une part et des conseillers diplomatiques d’autre part.

Pour autant, les auditions conduites ont fait état de coopérations souvent déséquilibrées au regard de l’environnement proche des territoires ultramarins, la France étant généralement perçue comme « le territoire disposant du plus grand nombre de moyens (et) de la plus grande capacité d’intervention » ([212]). Il n’en reste pas moins nécessaire de formaliser ces coopérations, soit lorsqu’il s’agit d’un appui à un territoire désireux de recevoir une expertise à l’image de Maurice qui a bénéficié de l’appui du BRGM en matière de retrait du trait de côte ([213]), soit lorsqu’il s’agit de développer la vente de prestations de services à l’image de Météo France International ([214]). Par ailleurs, des conventions de coopération entre les États doivent également pouvoir formaliser l’appui réciproque, comme par exemple entre les deux États frontaliers de la Guyane que sont le Brésil et le Surinam et ce même si la France s’attend davantage à « les aider que la situation inverse » ([215]).

Par ailleurs, le rapporteur note que des coopérations plus équilibrées existent telles que l’accord FRANZ entre la France, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, signé en 1992, qui consiste en « une coordination opérationnelle trilatérale pour le déploiement d’aides humanitaires d’urgence en réponse aux catastrophes naturelles » ([216]). Cet accord est régulièrement mobilisé. De nombreuses autres initiatives au plan multilatéral ont été évoquées au cours des auditions. Sans sous‑estimer leur importance, elles sont parfois apparues au rapporteur comme difficilement coordonnables au regard de leur multiplicité, mais également au regard de la différence de statuts et de compétences entre les États et collectivités des régions concernées, particulièrement dans le Pacifique. Dans l’intérêt de tous, il apparaît ainsi nécessaire de prioriser et coordonner l’action de ces différentes structures.

Recommandation n° 43 : construire, formaliser et animer des coopérations opérationnelles, y compris commerciales, entre États, collectivités ou institutions dans l’ensemble des territoires ultramarins.

Il convient par ailleurs de souligner le fait que certaines coopérations portées par des acteurs non gouvernementaux remplissent leur rôle avec succès, comme par exemple les plateformes d’intervention régionales de la Croix‑Rouge, en lien notamment avec l’agence française de développement. En 1999, la Croix‑Rouge française a en effet implanté une première plateforme d’intervention régionale pour l’océan Indien (PIROI) à La Réunion « afin de développer un programme pluriannuel de préparation et de réponse aux désastres, en partenariat avec les sociétés nationales de Croix-Rouge ou de Croissant‑Rouge des Comores, de Madagascar, de l’île Maurice, des Seychelles, du Mozambique, de Tanzanie, ainsi que sur nos territoires d’outre-mer (La Réunion et Mayotte) » ([217]). Les mêmes types de plateformes ont par la suite vu le jour, en 2005 la plateforme d’intervention régionale Amérique Caraïbes (PIRAC) et en 2007 la plateforme d’intervention régionale océan pacifique Sud (PIROPS). Ces plateformes travaillent sur le cycle complet de la gestion des risques naturels en lien avec les pouvoirs publics. Par exemple, elles disposent de capacités de stockage et conduisent de nombreuses opérations de formation, que le rapporteur a pu observer lors de son déplacement à La Réunion en étroite coopération avec les services de l’éducation nationale. Cependant, toutes les plateformes ne disposent pas encore du même niveau de maturité et certaines d’entre elles méritent d’être renforcées comme le sera prochainement la PIROPS. En tout état de cause, ces initiatives méritent d’être saluées et soutenues au regard des activités d’intérêt général qu’elles conduisent.

C.   Au-delà des pouvoirs publics, d’autres acteurs sont essentiels À la préparation et à la gestion des événements naturels

Si la gouvernance de la gestion de crise est en matière de risques naturels une prérogative de l’État, en coordination étroite avec les élus locaux, les pouvoirs publics ne peuvent à eux seuls y répondre.

1.   Des opérateurs essentiels à la gestion de la crise et de ses conséquences

Outre les acteurs de l’État et des collectivités, d’autres agents économiques et gestionnaires de réseaux contribuent par leur action à la gestion même de la crise, l’organisation des secours et au retour progressif à la normale. Essentiels, ils sont aussi interdépendants les uns des autres.

a.   Des opérateurs de transport indispensables pour répondre à la crise

Deux types d’infrastructures de transports peuvent être différenciées en matière de gestion des risques naturels. D’une part, celles qui permettent les déplacements au sein du territoire comme les routes ou les ouvrages d’art comme les ponts. D’autre part, celles qui permettent aux territoires d’être reliés avec l’hexagone et plus immédiatement avec les États et territoires ultramarins français de la région, comme les ports ou les aéroports. Naturellement ces derniers sont également essentiels pour permettre les déplacements au sein de territoires principalement insulaires voire multi-insulaires et, pour la Guyane comme pour les autres territoires ultramarins, des territoires très étendus et se caractérisant par des reliefs, forêts ou fleuves rendant leur accessibilité peu aisée.

Essentielles, ces infrastructures n’en sont pas moins particulièrement vulnérables. En effet, selon le constat du Haut-commissariat de la République en Polynésie française – généralisable à la plupart des territoires ultramarins –, « les principaux axes de circulation sont très souvent exposés en raison de leur proximité avec la mer. De nombreuses routes situées sur le littoral ou le long des rivières sont très régulièrement détruites entraînant de fait leur isolement » ([218]), conduisant lors d’évènements naturels à une véritable « bataille des routes » ([219]). De plus, les ponts ne sont pas toujours construits aux normes pour résister aux événements naturels. Par exemple, en Guadeloupe, « seuls deux ponts respectent les normes, à la différence de tous les autres ». Ainsi, « les autres ponts risquent de s’effondrer en cas de séisme », isolant de nombreuses parties de la région ([220]). Il en va de même pour les infrastructures portuaires et particulièrement aéroportuaires. En effet, l’accessibilité des pistes d’aéroport, souvent uniques, a été à plusieurs reprises soulevée au cours des auditions, par exemple à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Martinique ou à Mayotte. De plus, à l’image des infrastructures routières, elles cumulent d’ores et déjà des fragilités, comme par exemple à Mayotte où la piste, trop courte, ne permet pas le décollage et l’atterrissage de tous types d’appareil ou, par exemple, ne permet pas à ce jour de relier Mayotte vers Paris sans escale.

Dès lors, assurer le bon fonctionnement de ces infrastructures passe par leur préparation aux événements naturels majeurs. D’une part, la réalisation des travaux de consolidation ou de mise aux normes semble nécessaire au renforcement de la résilience des territoires ultramarins. Par exemple, l’aéroport de Grand‑Case à Saint‑Martin fait « l’objet de travaux de reprise structurelle afin d’améliorer la résistance de la piste » ([221]). Dans la même dynamique, le conseil départemental de La Réunion a engagé un plan de sécurisation des radiers sur les routes dont il a la charge. À ce jour, 40 radiers ont fait l’objet de travaux sur les 80 identifiés comme présentant des risques ([222]).

D’autre part, la réponse des gestionnaires d’infrastructures réside également dans leur préparation aux événements naturels majeurs. À ce titre, le rapporteur a rencontré la direction de l’aéroport de Dzaoudzi lors de son déplacement à Mayotte. Si l’aéroport connaît des vulnérabilités structurelles bien connues, le rapporteur salue la préparation exemplaire aux risques naturels réalisée par sa direction. En effet, le rapporteur a pu prendre connaissance des nombreuses fiches réflexes synthétiques et opérationnelles constituant le plan local d’urgence et répondant à nombre des risques auxquels Mayotte est confrontée. Outre l’évidente protection des usagers et des personnels, le plan local d’urgence prend en compte la protection des biens, comme celle des camions de la sécurité incendie spécifiques à l’aéroport et indispensables au fonctionnement régulier de l’infrastructure. En outre, le rapporteur souligne la véritable culture de crise de l’administration de l’aéroport, travaillant avec la préfecture comme les forces armées et développant des scenarios de crise avec les autorités scientifiques. Par exemple, plusieurs scenarios liés « à la récente activité sismo‑volcanique mais également à la sismicité de tout l’océan Indien ont été modélisés » ([223]) par le BRGM, l’IPGP et le CEA.

Ces actions sont essentielles pour la gestion de crise, l’organisation des secours mais également pour les autres acteurs, car sans accessibilité aux infrastructures d’électricité, d’eau ou de télécommunication, les opérateurs ne peuvent intervenir.

Recommandation n° 44 : recenser, prioriser et effectuer les travaux de renforcement et de mise aux normes des principales infrastructures de transport des territoires ultramarins.

Recommandation n° 45 : s’assurer que les opérateurs de transports routiers, portuaires et aéroportuaires ont élaboré des plans locaux d’urgence opérationnels répondant aux principaux risques naturels, le cas échéant avec l’appui des services de l’état et des institutions scientifiques.

b.   La « mère des batailles » ([224]) de l’électricité, dont découle celle de l’eau

Indispensables, tant pour la population que pour le fonctionnement de l’ensemble des services concourant à la gestion de crise, les installations électriques sont particulièrement vulnérables dans les territoires d’outre-mer. D’abord car elles ne sont pas, contrairement à l’hexagone, interconnectés à d’autres territoires qui permettraient d’assurer une continuité de service. Ensuite, à la manière des infrastructures de transports, car leur implantation en proximité immédiate des côtes ou dans des vallées, les expose particulièrement ([225]).

De ce fait, au regard de leur importance en cas de crise mais également de leur vulnérabilité, les installations électriques doivent faire l’objet d’un entretien accru. En effet, selon l’expérience d’EDF, « quand le matériel est régulièrement remplacé, il résiste beaucoup mieux aux aléas climatiques » ([226]). De même, l’entretien concerne l’ensemble du réseau au travers, notamment, d’opérations d’élagage. En la matière, s’il est difficile d’évaluer les opérations d’entretien dans l’ensemble des territoires, le rapporteur rappelle l’importance du dernier kilomètre qui connecte le réseau électrique à l’habitat privé, que l’opérateur lui-même ne peut entretenir. Au‑delà de l’entretien et de la maintenance, les choix d’investissements réalisés lors d’opérations de renouvellement sont essentiels. Ainsi, dans les territoires ultramarins dans lesquels EDF est présent, soit l’ensemble d’entre eux à l’exception de Mayotte et des collectivités du Pacifique, EDF mène une politique d’enfouissement des lignes électrique. Pour les lignes à moyenne et basse tension, le niveau d’enfouissement est similaire à celui observé dans l’hexagone, respectivement de 70 et 50 % ([227]). Toutefois, l’enfouissement n’est pas toujours souhaitable, ou possible, du fait de risques de glissements de terrain ou d’inondation. D’autres solutions existent alors, comme l’automatisation, l’important étant alors de trouver « un équilibre technique et économique » ([228]).

Par ailleurs, lorsqu’un risque naturel survient, l’action curative de l’opérateur s’avère cruciale. Pour ce faire, deux aspects sont complémentaires. En premier lieu, la capacité d’intervention rapide de l’opérateur permet de remettre en état de marche le réseau. Par exemple, EDF a créé, après la tempête de 1999, une force d’intervention rapide électricité dénommée Fire, qui a encore montré son efficacité à la suite du cyclone Belal. En outre, l’efficacité de l’opérateur réside également dans sa capacité à disposer des pièces et machines nécessaires à la remise en état du réseau électrique. C’est ainsi qu’EDF a développé dans chaque territoire une plateforme logistique Serval « afin de disposer de stocks cycloniques » ([229]). Pour autant, ces capacités de résilience ne semblent pas observées sur l’ensemble des territoires d’outre-mer : en Polynésie française, notamment, elles « ne sont pas complètement garanties en raison de l’absence de stock de matériel de remplacement » ([230]).

Naturellement, si ces constats sont particulièrement vrai pour la distribution d’électricité, ils le sont également pour sa production. Par exemple, à La Réunion, EDF dispose de réserves pour les centrales de production nécessitant des ressources telles que le charbon ou des carburants. En seconde intention, pour adapter la consommation à la production possible, des coupures peuvent être organisées ([231]).

Enfin, du rétablissement de l’électricité dépend celui de la distribution de l’eau potable. En effet, « il est impossible de traiter l’eau portable ou usée, ni de la pousser dans les tuyaux sans électricité » ([232]). Les distributeurs d’eau potable sont dès lors non seulement tributaires du rétablissement de l’électricité, mais assujettis aux mêmes prescriptions et contraintes qu’un opérateur d’électricité en amont et durant une crise : entretien et maintenance du réseau, capacité d’intervention rapide, capacité de stockage des outils, machines et, le cas échéant, groupes électrogènes nécessaires à la reprise du traitement et de la distribution de l’eau. À ce titre, le rapporteur souligne que les territoires ultramarins qu’il a étudiés font montre d’un faible niveau de renouvellement de leur réseau d’eau. Il est par exemple inférieur à 1 % du réseau à La Réunion, à l’instar de l’hexagone ([233]). La multiplication des crises de l’eau dans les territoires ultramarins témoigne de la nécessité d’agir.

c.   Les télécommunications

Les télécommunications sont elles aussi primordiales en cas de crise, à plusieurs titres. D’abord, les pouvoirs publics doivent en disposer pour communiquer entre eux, organiser la réponse opérationnelle localement et maintenir un lien avec l’hexagone pour l’organisation de la venue de renforts. Ensuite, elles sont nécessaires au lien entre les pouvoirs publics et la population, afin que celle-ci soit tenue informée mais qu’elle puisse également les alerter, que ce lien soit direct ou se réalise par l’intermédiaire des médias. Enfin, elles sont nécessaires à la population comme aux renforts qui souhaitent légitiment rassurer leurs proches.

Les opérateurs de télécommunication, qu’il s’agisse de la téléphonie fixe ou mobile comme d’internet, font donc également face à des impératifs de préparation et de réponse opérationnelle similaires à ceux des opérateurs de transport ou d’énergie. À l’issue des auditions, leur singularité semble résider, plus encore que pour d’autres opérateurs, dans le fait qu’il n’y pas « d’opérateur historique sur ces marchés » et qu’ils sont « un opérateur télécom parmi d’autres » ([234]). Les pouvoirs publics sont donc confrontés à une multiplicité d’acteurs qui, comme le soulignait le préfet Philippe Gustin sur la base de ses actuelles fonctions, peut complexifier la gestion de crise et le rétablissement des communications. Pourtant, les opérateurs de télécommunication n’en demeurent pas moins importants. Ils doivent en ce sens s’y tenir prêts et y être sensibilisés.

Recommandation n° 46 : rehausser les niveaux d’entretien et de maintenance des réseaux électrique, d’eau et de télécommunication et procéder à des investissements résilients face aux risques naturels.

Recommandation n° 47 : s’assurer que les opérateurs d’électricité, d’eau et de télécommunication disposent de plans de crise et de moyens associés pour se tenir prêts en cas d’événement naturel majeur.


2.   Des populations actrices à part entière de la gestion des crises

L’action des services de l’État, des collectivités comme de l’ensemble des acteurs de la gestion de crise vise en premier lieu à protéger les populations des risques naturels. Toutefois, leur action serait vaine sans son appropriation par les populations elles-mêmes.

Les auditions ont confirmé que les populations d’outre-mer jouissent en moyenne d’une forte culture du risque. Mais pour être véritablement actrices, « les populations réclament non d’être rassurées mais d’être informées avec transparence, précision, simplicité, compassion et cohérence. Elles ont aussi besoin d’être accompagnées dans les démarches qu’elles entreprennent spontanément » ([235]). Le retour d’expérience du cyclone Belal l’a montré : en matière de risques naturels, une communication publique réussie est gage d’un bon respect des règles par la population. Pour ce faire, la communication doit être accessible, c’est-à-dire diffusée par des canaux généralement utilisés par la population, mais également intelligible. En matière de canaux, les médias locaux notamment radiophoniques mais également télévisuels s’avèrent particulièrement suivis en outre-mer, à l’image des journaux du soir d’Outre-mer La Première détenue par France Télévisions qui représentent par exemple 80,7 % de parts de marché en Guadeloupe et 74 % en Nouvelle-Calédonie ([236]). En matière d’intelligibilité, si la forme du message est importante, le rapporteur souhaite également insister sur la langue employée et relayer le « besoin de pouvoir communiquer en créole » ([237]) ou en toute autre langue locale communément employée. Une telle communication permet de mieux faire connaître les comportements à adopter et les actions mises en place par les pouvoirs publics. Par exemple, le rapporteur a constaté lors de son déplacement à Mayotte que le plan EVATSU, répertoriant des sites refuges en cas de tsunami, était largement méconnu localement.

Par ailleurs, la population est également actrice des crises en ce qu’elle fait également vivre des associations, telles que la Croix‑Rouge ou la protection civile. Le rapporteur a souhaité auditionner plusieurs des antennes locales de l’une et l’autre association et a pu constater « un tissu particulièrement dense et dynamique en outre-mer » ([238]). Elles sont autant de relais et d’appui des pouvoirs publics lors d’événements naturels majeurs avec qui il convient de collaborer et de soutenir.

 


1

 

   QUATRIÈME Partie : la pÉriode de reconstruction
est marquÉe par la difficile conciliation
entre de nombreux impératifs

La phase qui suit la survenue d’un événement naturel, communément appelée reconstruction, « démarre lorsque l’urgence absolue est considérée comme terminée », c’est‑à‑dire « quand l’intégrité physique des personnes n’est plus en danger ». Il s’agit d’un « processus long » et qui ne « démarre ni sur une page blanche ni sur un territoire vierge ». De fait, il repose sur l’histoire du territoire, c’est-à-dire sur sa « structure sociale, politique, économique et culturelle ». Dans cette période, un « grand nombre d’actions sont à mettre en œuvre dans un temps très contraint » ([239]) tout en conciliant des impératifs, parfois contradictoires. Cette phase traversée par l’urgence à répondre à la détresse des populations et la volonté de tirer les enseignements des évènements est complexe par nature. L’analyse des processus de reconstruction observés à Saint‑Barthélemy et à Saint‑Martin, à la suite de l’ouragan Irma, invite à en repenser la mise en œuvre.

I.   AprÈs Irma, Une reconstruction À deux vitesses

Près de sept ans après la catastrophe qu’a constitué le passage de l’ouragan Irma à Saint-Barthélemy et à Saint‑Martin, les auditions conduites par la commission d’enquête ont confirmé un constat plusieurs fois réalisé depuis 2017 : les reconstructions ont été différemment conduites. Elles sont aujourd’hui inégalement achevées, au sein de deux îles structurellement différentes.

A.   D’une île À l’autre, les consÉquences d’irma ont été diffÉrentes

1.   Saint-Martin a été davantage touchée que Saint-Barthélemy

Si la reconstruction s’est dès le départ déroulée différemment entre les deux îles de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, c’est notamment car les conséquences de l’ouragan n’y ont pas été identiques.

Tout d’abord, en matière de victimes, les onze personnes décédées ont toutes été dénombrées sur l’île de Saint-Martin.

 

 

Par ailleurs, en matière de destructions, comme le souligne la Cour des comptes, « la violence de l’ouragan a été du même ordre sur l’ensemble des trois territoires des îles du Nord » mais « son impact a été variable selon les types d’immeubles, leur conception, la qualité des constructions et leur emplacement » ([240]). Ainsi, alors que 84 % des bâtiments de Saint-Barthélemy ont été peu ou pas endommagés, ce ne sont que 47 % des bâtiments de Saint-Martin qui se sont retrouvés dans ce cas de figure. Plus encore, parmi les bâtiments endommagés, seuls 3 % d’entre eux ont été détruits à Saint-Barthélemy contre 20 % d’entre eux à Saint-Martin.

Repérage de l’État des bâTIments de saint-barthélemy par satellite (2017)

Bâtiments détruits

Bâtiments sévèrement endommagés

Bâtiments modérément endommagés

Bâtiments peu ou pas endommagés

 

206 bâtiments

(3 % du parc)

 

157 bâtiments

(2 % du parc)

832 bâtiments

(11 % du parc)

6 389 bâtiments

(84 % du parc)

Source : DEAL Saint-Martin d’après les données du programme Copernicus dans le rapport public thématique de la Cour des comptes « La reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma », juillet 2021.

repérage de l’état des bâtiments de saint-martin par satellite (2017)

Bâtiments détruits

Bâtiments sévèrement endommagés

Bâtiments modérément endommagés

Bâtiments peu ou pas endommagés

2 525 bâtiments

(20 % du parc)

 

1 350 bâtiments

(11 % du parc)

 

3 000 bâtiments

(23 % du parc)

6 824 bâtiments

(47 % du parc)

Source : DEAL Saint-Martin d’après les données du programme Copernicus dans le rapport public thématique de la Cour des comptes « La reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma », juillet 2021.

2.   Une différence qui s’explique en partie par des choix antérieurs

Ce bilan différencié entre Saint-Barthélemy et Saint-Martin s’explique en partie par la différence de bâti entre les deux îles. Comme le soulignait l’ancien président de la collectivité de Saint-Barthélemy lors de son audition devant la commission d’enquête, « il n’y a pas d’habitat fragile à Saint-Barthélemy ». Selon lui, la qualité du bâti et le respect des consignes ont fait que Saint-Barthélemy n’a eu à déplorer aucune victime.

En tout état de cause, ces différences structurelles entre Saint-Barthélemy et Saint-Martin précédaient, les auditions semblent avoir fait émerger un consensus à ce sujet, la survenance d’Irma. En effet, la collectivité de Saint-Martin était « en difficulté dès avant le cyclone. Financièrement fragile, elle avait eu du mal à prendre le virage de l’évolution statuaire, à la différence de Saint-Barthélemy » ([241]). De plus, « la collectivité de Saint-Barthélemy s’en est tenue à l’application des grands principes de la loi, notamment en matière d’urbanisme, de protection des populations et de réseaux. À Saint‑Martin, l’une des grandes difficultés, outre l’urbanisme chaotique, était l’état subcomateux des réseaux, d’eau comme d’électricité » ([242]). Toutefois, si la compétence en matière d’urbanisme a été transférée aux deux collectivités à partir du 1er janvier 2008, la problématique de l’urbanisme « ne date pas de 2008 » ([243]). Le rapporteur rejoint ainsi le constat selon lequel, « fondamentalement, le respect de la réglementation en matière d’urbanisme, comme les questions concernant la zone des cinquante pas géométriques ou les questions patrimoniales autour du foncier, n’a pas été une priorité ». Sans nier l’extrême complexité de ces sujets, eu égard notamment aux enjeux économiques et sociaux, le rapporteur rappelle que ces situations n’ont pu s’installer de manière pérenne sans « une forme de laisser faire de l’État » ([244]).

En définitive, l’expérience d’Irma à Saint-Barthélemy et Saint‑Martin semble confirmer « le lien entre niveau de développement et impact des catastrophes » lequel caractérise Saint‑Barthélemy comme disposant d’un « faible niveau de vulnérabilité » ([245]).

B.   une reconstruction en mieux unaniMement souhaitÉe mais inÉgalement mise en œuvre

1.   L’appui de l’État aux collectivités a été différent entre les deux îles

Immédiatement après le passage d’Irma et avant même que la phase de reconstruction formelle n’ait commencé, l’état a envisagé la reconstruction des deux îles. Un délégué interministériel chargé de la reconstruction de Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin a ainsi été nommé, dès le 14 septembre 2017, en conseil des ministres par le président de la République. Son rôle consistait à « concevoir et coordonner, en lien étroit avec les deux collectivités, les politiques publiques nécessaires au développement de ces territoires et à leur résilience face aux risques naturels et au changement climatique » ([246]). Disposant d’une équipe de six agents, le délégué interministériel a mis en place un réseau de référents dans 17 ministères et secrétariats d’État ayant à connaître de la reconstruction ([247]). Ainsi, les auditions ont permis de souligner que « la structuration - interministérielle - de la gouvernance en post-catastrophe a permis un gain de temps et d’efficacité en ce que cette capacité à répondre rapidement et de manière coordonnée a permis de limiter le nombre et la durée des situations d’extrême précarité » ([248]).

À Saint-Barthélemy, en cohérence avec les propos du président de la collectivité qui déclarait immédiatement après l’ouragan « ne pas avoir besoin de l’état » ([249]), la collectivité « a supervisé et pris en charge sa reconstruction ». Selon M. Bruno Malgras, « nous avons pris nos responsabilités en devenant une collectivité d’outre-mer autonome. Nous devons donc être en mesure d’y faire face, avec, bien entendu, le coup de main de l’État lorsque c’est nécessaire » ([250]). Quatre ans après l’ouragan, la Cour des comptes a confirmé ce positionnement « volontariste », soulignant que la collectivité de Saint-Barthélemy avait « supervisé et pris en charge sa reconstruction, l’État n’intervenant que ponctuellement pour assurer la continuité financière » ([251]).

Au contraire, la collectivité de Saint-Martin a bénéficié « d’un soutien important de l’État et de ses opérateurs, tant en termes de financement que de renforcement de ses capacités humaines et de gestion et d’ingénierie » ([252]). Pour autant, les auditions ont été l’occasion d’interroger l’accompagnement mis en œuvre par l’État au regard des moyens à sa disposition, relevant du « droit commun (…) sur un territoire qui (n’en) relevait pas ». Si le choix d’un transfert provisoire de compétences, notamment en matière d’urbanisme, n’a pas été retenu au moment d’Irma ([253]), la Cour des comptes a néanmoins relevé que « compte tenu des fragilités de son organisation administrative et technique et de la complexité des opérations à mener, il apparaît a posteriori qu’une administration directe par l’État de la reconstruction aurait pu se justifier ».

À la suite des auditions de la commission d’enquête et après avoir pris connaissance des différents rapports et recherches réalisés sur la reconstruction de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, le rapporteur s’interroge lui aussi sur le maintien du droit commun, s’agissant notamment de la répartition de compétences entre l’État et un département ou une collectivité d’outremer, dans des circonstances qui peuvent justifier des dérogations temporaires décidées de manière concertée.

Enfin, si le rapporteur se félicite de « l’amélioration significative de la collaboration (entre) la préfecture et les différents services de l’État » ([254]) et la collectivité de Saint-Martin, il relève que les relations plus difficiles entre l’État et la collectivité durant la phase de reconstruction ont pu nuire à son efficacité.

2.   À Saint-Barthélemy, la reconstruction a été achevée sans que tous les enseignements d’Irma aient été pris en compte

Moins affectée et plus résiliente, la collectivité de Saint-Barthélemy s’est relativement rapidement relevée à la suite de l’ouragan. En effet, en mars 2018, soit sept mois après Irma, « 19 % du bâti était reconstruit ». De même, moins de deux ans après l’ouragan, 40 % du bâti fortement endommagé était reconstruit sur l’île. En 2021, la Cour des comptes notait ainsi que la reconstruction du patrimoine détruit à Saint-Barthélemy était « quasi‑terminée », s’accompagnant « d’un effort important d’adaptation des bâtiments et des équipements afin de tirer les enseignements de l’expérience d’Irma » ([255]).

Malgré cet effort, et tout en comprenant une fois encore les impératifs économiques de l’île, le rapporteur s’inquiète de constater que certaines reconstructions ont été réalisées « à l’identique » ([256]). En effet, de « nombreuses villas et hôtels ont rapidement été reconstruits, à l’identique, par exemple à Baie Lorient et anse des Flamands ». De plus, « le tourisme haut de gamme de Saint‑Barthélemy nécessite des constructions de haut standing, lesquelles ne répondent pas forcément à une architecture adaptée aux risques cycloniques (par exemple, la construction de logements avec de grandes baies vitrées) ». Si l’État a estimé nécessaire de reconstruire de manière durable, « la collectivité de Saint‑Barthélemy argue en faveur de la mise en sécurité des populations face aux événements extrêmes mais ne saurait stopper le développement territorial » ([257]).

 

 

 

 

Dynamique de reconstruction du patrimoine bâti
fortement endommagé À Saint-Barthélemy

 

 

Source : Defossez Stéphanie, Rey Tony, Leone Frédéric et al., « Capacités de relèvement d’un territoire insulaire français face à un ouragan extrême : Retour d’expérience sur l’ouragan Irma à Saint‑Barthélemy (Petites‑Antilles) », Les Cahiers d’Outre-Mer, 2021/2 (n° 284), p. 471-508.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3.   À Saint-Martin, une reconstruction inachevée, entre progrès et réitération du passé

Près de sept ans après Irma, une partie importante de la reconstruction a été effectuée à SaintMartin sans que tout soit encore achevé. Dès 2021, la Cour des comptes notait que « le mode de reconstruction choisi (…) n’(avait) pas encore permis, près de quatre ans après l’ouragan, d’achever une reconstruction qui se voulait exemplaire » ([258]), et les auditions conduites par la commission d’enquête ont confirmé ce constat. Bien que la préfecture a estimé au cours de son audition que « la reconstruction (était) largement derrière nous » ([259]), le rapporteur note, s’agissant des services publics, que « deux des trois collèges de l’île », « la médiathèque » ou bien encore la future « cité administrative » ([260]) sont encore en travaux ou en cours de construction. S’agissant des habitants, « un certain nombre de familles habitent toujours dans des maisons sans toiture, ravagées par la violence des vents » ([261]). Plus vulnérable et plus atteinte que Saint-Barthélemy, la capacité de relèvement de
Saint-Martin a ainsi été moins forte. À ce titre, le rapporteur tient à souligner les difficultés qu’ont rencontrées les élus locaux pour procéder à une reconstruction rapide des structures indispensables, dans le respect des procédures habituelles d’appel d’offres.

Au-delà des facteurs d’ores et déjà évoqués, d’autres éléments permettent d’expliquer la plus lente reconstruction constatée à Saint-Martin :

 socialement plus vulnérable que celle de Saint-Barthélemy, la population de Saint-Martin n’était pas davantage assurée : 60 % de la population ne disposait pas d’une assurance habitation. Si les propriétaires assurés ont pu « bénéficier du soutien des assureurs et faire des travaux assez vite », « trop nombreuses sont (les familles) qui ne l’ont pas fait » ([262]), ce qui a créé « au moment de la reconstruction, un important ralentissement par rapport à Saint‑Barthélemy, où très peu d’habitations n’étaient pas assurées » ([263]) ;

 contrairement à Saint-Barthélemy, une révision du PPRN a été engagée à Saint-Martin mais a suscité au cours de l’année 2019 de vives oppositions, dans certains cas des émeutes, au sein de l’île. Sujet récurrent de conflits sociaux à Saint-Martin, l’aménagement du territoire par les services de l’État au travers de ce projet de révision du PPRN a pu être vécu, selon de nombreux entretiens conduits par des chercheuses que la commission d’enquête a auditionnées, comme une forme « d’ingérence » dans la stratégie de développement territorial. Des efforts ont par la suite étaient fournis pour « que le PPRN fasse vraiment l’objet d’une collaboration avec le territoire » ([264]), permettant au second document proposé et concerté d’être approuvé en novembre 2021. Outre la méthode, le rapporteur souligne que l’esprit du PPRN finalement adopté, s’agissant notamment des zones de submersion marine, est sensiblement différent de celui initialement proposé. C’est ainsi que l’exposait l’ancien président de la collectivité de Saint‑Martin, M. Daniel Gibbs : « nous n’étions pas contre la consolidation et contre un certain nombre de préconisations au travers du nouveau PPRN. En revanche, nous étions contre ce qui était proposé de manière radicale. Clairement, ce premier PPRN interdisait de construire sur le littoral. Quand vous connaissez la configuration de Saint-Martin, cela signifie qu’il faut construire dans les montagnes où la plupart des parcelles sont non constructibles. Il fallait rester en adéquation avec notre territoire » ([265]).

Pour autant, certains progrès ont pu être conduits à Saint-Martin en matière de préparation aux événements naturels majeurs mais également de reconstruction. Par exemple, les collèges 600 à Quartier d’Orléans et 900 à La Savane ont été conçus pour faire face aux risques naturels et pourront servir d’abris anticycloniques, doublant ainsi la capacité existante. De même, la construction de l’hôtel Beach Plaza à Marigot prévoit de ne pas aménager de chambres au rez‑de‑chaussée.

Toutefois, comme à Saint-Barthélemy, des reconstructions se sont faites à l’identique ou, pensant se prémunir contre le risque cyclonique, en s’exposant à d’autres risques. Ainsi, pour se prémunir contre le risque cyclonique, « sous le toit de tôle d’un grand nombre d’habitations, une dalle de béton » ne respectant pas les normes antisismiques a été placée, faisant courir un danger à leurs occupants en cas de survenance d’un séisme ([266]).

En définitive, la reconstruction durable et exemplaire souhaitée par tous et annoncée par le président de la République s’est heurtée à la difficile conciliation d’injonctions économiques, juridiques, politiques ou populaires nombreuses faisant écho aux propos tenus par Mme Annick Girardin, ancienne ministre des outre-mer, à propos de Saint-Martin : « Après Irma, on avait rêvé, avec la reconstruction, d’en faire une île d’exception, un exemple pour tous les territoires ultramarins. Cela ne s’est pas fait, car je pense qu’on avait sous-estimé la détresse, la pauvreté présente sur l’île aussi » ([267]).

II.   Une couverture assurantielle insuffisante face à des risques naturels majeurs

Au cours des auditions conduites par la commission d’enquête mais également au cours du déplacement à La Réunion, les acteurs auditionnés ou rencontrés se sont accordés sur le fait que les « compagnies d’assurances (jouaient) leur rôle » ([268]) en post‑crise. Malgré certains « retards d’indemnisation », liés dans le cas d’Irma « aux conditions très complexes dans lesquelles les experts ont travaillé » ([269]), l’action des assurances a permis « une reprise rapide des constructions et la rénovation de ce qui avait été plus ou moins endommagé » ([270]). Le récent cyclone Belal a permis de tirer de premières conclusions similaires, soulignant notamment une « bonne réactivité » ([271]) des assureurs à la suite d’une déclaration de sinistre, laquelle doit désormais intervenir, le rapporteur salue cette avancée, au plus tard 30 jours (et non plus 10 jours) après la publication de l’arrêté de catastrophe naturelle au Journal officiel. À ce jour, à la suite de Belal, les assurances gèrent 40 000 dossiers de sinistre « dommages », nombre équivalent à deux années de gestion courante à La Réunion, pour des dégâts estimés à 100 millions d’euros ([272]).

Ainsi, face aux risques naturels, la couverture assurantielle des territoires ultramarins apparaît essentielle. Grâce au régime d’assurance des risques liés aux catastrophes naturelles, dit régime « Cat nat », la France dispose d’un dispositif de solidarité nationale ambitieux mais encore limité dans ces territoires au regard de la faible couverture assurantielle en outre-mer.

Sur la base des auditions conduites par la commission d’enquête et de deux récents rapports, tant celui de l’inspection générale des finances (IGF) Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outremer, que le rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, le rapporteur appelle à prendre l’ensemble des mesures nécessaires à l’adaptation et à la préservation du régime Cat nat, de même qu’à encourager un plus fort recours à l’assurance dans les départements et collectivités d’outre-mer.

 

A.   Le régime « cat nat » est un dispositif national de solidaritÉ ambitieux qu’il convient de prÉserver

Le régime Cat Nat est régi par les articles L. 125‑1 et suivants du code des assurances. Ainsi, les contrats d’assurance garantissant les dommages d’incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France « ouvrent droit à la garantie de l’assuré contre les effets des catastrophes naturelles » ([273]). Dans le régime Cat Nat, les effets des catastrophes naturelles sont entendus comme « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel ou également, pour les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols, la succession anormale d’événements de sécheresse d’ampleur significative, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises » ([274]). Après constatation de l’état de catastrophe naturelle par arrêté interministériel, le régime peut s’appliquer au sein de l’hexagone et des territoires ultramarins à l’exception de la Nouvelle‑Calédonie et de la Polynésie française qui disposent de leur propre code des assurances.

Pour fonctionner, le régime Cat Nat repose sur le principe de la solidarité nationale. Il est financé par une surprime identique pour les particuliers comme pour les entreprises et indépendante de l’exposition effective au risque de catastrophes naturelles, permettant « de couvrir les périls naturels à un tarif abordable pour tous » ([275]). Le rapporteur, qui rappelle son attachement à ce régime, souhaite faire sien le constat du rapport de mission Langreney : « cette mission défend la conviction que la mutualisation entre tous les assurés des périls climatiques couverts par le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles constitue un modèle très protecteur – et donc précieux – pour garantir une couverture assurantielle large, y compris dans les zones les plus exposées aux périls climatiques » ([276]).

À ce titre, le rapporteur soutient l’augmentation de la surprime de 12 % à 20 % à compter du 1er janvier 2025 qui a été annoncée par le Gouvernement. L’augmentation de ce taux, qui n’avait plus évolué depuis 1999, lui semble à court‑terme nécessaire pour assurer la pérennité du régime sans pour autant que cela soit suffisant à moyen et long termes. La pérennité de ce régime est d’autant plus cruciale pour les territoires ultramarins qu’ils bénéficient légitimement de cette solidarité nationale face aux événements naturels. Sur la période allant de l’an 2000 à 2022, la sinistralité moyenne des territoires ultramarins est de 145 millions d’euros par an. Dans le même temps, les primes Cat Nat moyennes collectées représentent 35 millions d’euros par an. À titre comparatif, l’hexagone fait montre d’une sinistralité moyenne de 1,5 milliard d’euros par an et représente 2 milliards d’euros de primes collectées. En définitive, le coût des événements en outre-mer représente « 9,7 % du montant de la sinistralité du marché français pour seulement 1,7 % des cotisations du régime sur la période 2000-2022 » ([277]).

Par ailleurs, les auditions et le déplacement à La Réunion de la commission d’enquête ont permis d’interroger le périmètre actuel du régime Cat Nat et ses éventuelles adaptations futures :

 sur la nature des événements naturels couverts par le régime : le régime Cat Nat couvre l’essentiel des risques naturels auxquels les territoires français, particulièrement d’outre-mer, sont exposés : inondations, sécheresse, mouvements de terrain, cyclones, séismes, avalanches, éruption ou tsunami. Outre les épisodes de tempête, grêle et neige, couvertes par les assureurs en dehors du régime Cat Nat, celui-ci ne couvre pas les dommages liés au retrait du trait de côte ou l’échouement des algues sargasses auxquels les territoires d’outre-mer sont particulièrement confrontés. Sans opter à ce stade en faveur d’une évolution du panier des événements naturels couverts, le rapporteur a entendu les situations problématiques dans lesquelles se retrouvent particuliers, collectivités comme entreprises confrontés à ces évènements que les pouvoirs publics ne pourront ignorer à moyen-terme ;

 sur l’intensité des événements naturels couverts par le régime : à la suite du cyclone Belal à La Réunion, l’état de catastrophe naturelle a été reconnu pour deux critères que sont les inondations et coulées de boue d’une part, les vagues et submersions marines d’autre part. L’arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle publié au Journal officiel du 23 janvier 2024 n’a ainsi pas retenu le critère des vents cycloniques. Cette décision, qui se fonde sur la vitesse des vents et leur durée, a surpris les habitants et les collectivités locales. Là encore, si le rapporteur n’appelle pas nécessairement de ses vœux la révision des critères de vitesse et de durée actuellement retenus, un meilleur déploiement des capteurs sur les territoires ainsi qu’un effort de pédagogie lui semblent nécessaires pour que le régime Cat Nat soit mieux compris et approprié par les assurés.

Enfin, s’agissant de la Nouvelle‑Calédonie et de la Polynésie française, si le régime Cat nat n’y est pas applicable, le rapporteur regrette de n’avoir pu évaluer de manière satisfaisante les conséquences concrètes qu’emporte cette situation, considérée par certains comme un « problème majeur » ([278]).

 

 

 

Recommandation n° 48 : sur la base des recommandations du rapport de l’IGF Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer et du rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques de décembre 2023, organiser des concertations à échéances régulières pour évaluer les adaptations à apporter à ce dispositif (taux de prime, articulation avec la prévention, communication, périmètre, etc.).

B.   Un dispositif limitÉ par la faible couverture assurantielle des POPULATIONS ultramarinEs

Pour pouvoir bénéficier du régime Cat Nat, il est nécessaire de disposer d’une assurance multirisques habitation. Or les populations ultramarines font montre d’un faible recours à l’assurance. Dans les départements d’outre‑mer, les taux de recours sont en effet les suivants :

TAUX de recours en % à l’assurance mulitirisques habitation
dans les dÉpartements d’outre-mer

 

2006

2011

2017

Guadeloupe

44

53

59

Guyane

52

42

49

Martinique

50

52

62

La Réunion

59

62

68

Mayotte

-

6

6

France hexagonale

96

96

97

Source : Pôle Science des données de l’IGF, d’après Budget de famille, Insee. Sur la résidence principale. L’échantillon pour la France métropolitaine est constitué de 10 342 ménages et l’échantillon Drom est constitué de 5 455 ménages, cité dans Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre‑mer, rapport IGF, janvier 2020.

Pas plus que l’IGF dans son rapport de janvier 2020, le rapporteur n’a obtenu de chiffres précis relatifs au recours à l’assurance dans les collectivités du Pacifique et à Saint-Pierre-et-Miquelon. Toutefois, la dynamique à l’œuvre semble être similaire à celle observée dans les autres territoires ultramarins, à l’exception de Saint-Pierre-et-Miquelon où le taux de souscription à l’assurance habitation est élevé. Ainsi, il serait « très faible à Wallis-et-Futuna » et se situerait « aux alentours de 50 % en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française » ([279]).

Au regard des risques naturels auxquels les territoires d’outre-mer sont exposés, tout en constatant la croissance progressive du taux de recours à l’assurance, le rapporteur considère qu’il y a urgence à améliorer la couverture assurantielle dans ces territoires. À ce titre, les auditions ont largement validé l’hypothèse selon laquelle le « manque de ressources ne constitue pas à cet égard la totalité de l’explication, quelle que soit la réalité de l’écart entre revenus moyens outre-mer et en métropole et malgré la corrélation qui apparaît clairement outre-mer entre niveau de vie et taux de souscription » ([280]). En effet, la « capacité des personnes à faire construire des maisons ou des appartements suffisamment aux normes pour bénéficier d’une assurance » ([281]) semble essentielle pour rehausser le taux de la population effectivement assurée outre-mer. Par ailleurs, si la dimension culturelle du non‑recours à l’assurance en outre-mer a souvent été avancée comme un élément d’explication, conduisant à ce que « la prévention, l’entretien et le recours au système contractuel, privé ou public, ne (soient) pas spontanés » ([282]), le rapporteur souhaite mettre l’accent sur les entraves pratiques qui peuvent encore exister pour souscrire une telle police d’assurance. En effet, une partie de la population est constituée de personnes fragiles et isolées qui ne disposent pas des connaissances nécessaires pour bénéficier des offres assurantielles, lesquelles ne sont du reste pas toujours adaptées au territoire concerné. Le rapporteur considère, dans la lignée des récents rapports produits en matière d’assurance dans les territoires d’outre-mer, qu’« il y a un enjeu d’intérêt général à favoriser une progression de la couverture assurantielle outre-mer » ([283]).

Pour ce faire, le rapporteur souligne la nécessité de mobiliser l’ensemble des acteurs en faveur de la promotion de l’assurance. Il doit s’agir d’un objectif partagé entre les pouvoirs publics, les assureurs et les « tiers intéressés » ([284]), tels que les bailleurs, notamment les bailleurs sociaux.

Recommandation n° 49 : sur la base des recommandations du rapport de l’IGF Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer et du rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, développer le recours à l’assurance dans les départements et collectivités d’outre-mer, de manière partenariale entre les pouvoirs publics, les assurances et les tiers intéressés. À Mayotte et, le cas échéant, dans les autres territoires ultramarins, mettre en place un comité de pilotage réunissant l’ensemble de ces acteurs visant à augmenter le recours à l’assurance des biens.

C.   Les assureurs doivent mieux rÉpondre aux besoins des HABITANTS des territoires ultramarins

Pour que les habitants des territoires ultramarins aient davantage recours à l’assurance, il apparaît nécessaire que les assureurs eux-mêmes proposent des produits adaptés à leurs besoins spécifiques.

Certes, les assureurs sont présents outre-mer au travers de « 1 300 points de vente répartis de manière cohérente selon les zones d’activité économique, les contraintes géographiques et les dynamiques démographiques » ([285]).

Mais, il se développe dans ces territoires « très exposés aux risques climatiques » un « désengagement » des assureurs ([286]). Dans la même dynamique, une proportion supérieure à la moyenne nationale de biens immobiliers non assurables est constatée en outre-mer, sans qu’elle puisse toutefois être quantifiée ([287]). Ces constats sont inquiétants tant en raison de l’absence de couverture assurantielle de nombreux citoyens ultramarins, que de l’exclusion du régime Cat Nat qu’elle engendre. Tout en ayant conscience que le marché « ultramarin est complexe à appréhender pour les assureurs », et « qu’il peut être difficile d’y connaître précisément la nature des risques qu’ils couvrent et donc de les tarifier de façon pertinente » ([288]), le rapporteur alerte sur les pratiques de certains assureurs en outre-mer. Il a été ainsi porté à la connaissance de la commission d’enquête des pratiques consistant à ne pas assurer les biens « situés à moins de 100 ou 150 mètres du rivage ». De ce fait, « 80 % des biens de la ville de Gustavia (Saint‑Barthélemy) ne peuvent être assurés par le secteur privé. Il en va de même à Pointe‑à‑Pitre (Guadeloupe), située en zone inondable et de submersion marine, puisqu’elle est construite au niveau de la mer, avec une légère dépression, et de Jarry, la zone industrielle qui lui fait face » ([289]). Il paraît ainsi nécessaire de garantir l’accès à l’assurance de tous les habitants résidants dans des bâtiments situés en zone constructible et obéissant aux normes de construction. Cette garantie doit être assurée par la profession elle-même mais les pouvoirs publics doivent pouvoir accompagner les résidents à qui un refus d’assurance serait opposé.

À ce sujet, France assureurs, qui rassemble les entreprises d’assurance et de réassurance opérant en France n’a apporté aucune réponse à la commission d’enquête, se bornant à déclarer « ne pas avoir connaissance de la politique de souscription de (ses) membres ». Tout en regrettant ce manque d’informations, le rapporteur rappelle à France assureurs les devoirs qui incombent à ses membres en matière de continuité territoriale. Sans souhaiter imposer à tout assureur l’obligation d’être présent dans les territoires ultramarins, le rapporteur rejoint les constats émis dans le récent rapport de l’IGF : « le système Cat Nat se situe au point de contact de l’assurance privée et d’une forme particulière de la solidarité nationale organisée par l’État et fondée sur la mutualisation du risque à l’échelle nationale, au bénéfice des assureurs comme des assurés. L’État apparaît donc fondé à exiger des sociétés d’assurance bénéficiaires de cette réassurance une contrepartie, ne serait‑ce que dans l’universalité de l’offre d’assurance proposée à nos concitoyens, où qu’ils vivent dans l’espace géographique relevant du régime Cat Nat. » ([290]).

Recommandation n° 50 : sur la base des recommandations du rapport de l’IGF Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer et du rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, assurer l’universalité de l’offre d’assurance sur l’ensemble du territoire français et accompagner les personnes non assurées résidant dans une zone constructible, le cas échéant quand la pratique des assureurs ne respecte pas le cadre légal et réglementaire.

III.   Concilier Les impératifs du build back better avec les caractéristiques socio-économiques des territoires ultramarins

L’exemple d’Irma à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin l’a montré, la période de reconstruction se caractérise par des injonctions parfois contradictoires. En effet, les pouvoirs publics, la population et les acteurs économiques aspirent à un retour à la normale le plus rapide possible. Mais cette temporalité peut s’avérer incompatible avec le temps de la reconstruction, « un temps charnière de la trajectoire de vie des sociétés et individus qui emporte de nombreux espoirs et attentes, au premier rang desquels celui de se relever moins vulnérable et plus résilient » ([291]). Il s’agit du concept de build back better ([292]) dans la fenêtre d’opportunité que constitue la période post-crise. Outre les enjeux assurantiels qui peuvent constituer un facteur limitant, la reprise rapide de la vie économique peut être synonyme de reconstruction à l’identique, aux antipodes du build back better, dans un contexte où l’articulation entre les compétences et actions de l’État et des collectivités s’avère souvent complexe.

Si les auditions de la commission d’enquête ont davantage porté sur la gestion des risques naturels majeurs dans leur dimension de connaissance, de préparation, d’adaptation, de gestion de crise et d’immédiate urgence, le rapporteur a tenu à aborder le sujet de la reconstruction en tant que continuité et enjeu primordial de la gestion des risques naturels.

A.   Faciliter la reprise de la vie économique

La reprise de la vie économique est un facteur essentiel de la période de reconstruction. Elle permet également d’apprécier la capacité de « relèvement d’un territoire » ([293]). En la matière, le déplacement à La Réunion et les auditions conduites par la commission d’enquête ont sensibilisé le rapporteur sur deux secteurs économiques particulièrement importants outre‑mer et qui illustrent les difficultés et enjeux de cette période : l’agriculture et le tourisme.

Au-delà de ces deux secteurs, le rapporteur souligne que la vie économique dans son ensemble nécessite un suivi fin des services de l’état, en coordination avec l’ensemble des acteurs. À titre d’exemple, à la suite du cyclone Belal, un pôle de soutien économique et social a été mis en place par la préfecture de La Réunion. De telles initiatives, dont la durée, le périmètre et les effectifs doivent être adaptés au cas par cas, apparaissent nécessaires au soutien de la vie économique locale.

1.   L’agriculture

L’agriculture est une activité importante au cœur des territoires ultramarins ([294]) tant du point de vue économique que du point de vue de l’autonomie alimentaire qui peut être un objectif poursuivi par les pouvoirs publics locaux ([295]). Si l’agriculture est un secteur dont le poids économique peut être plus ou moins fort d’un territoire à l’autre, elle mérite une attention particulière des pouvoirs publics au cours de la phase de reconstruction.

En 2020, dans les départements et régions d’outre-mer, l’agriculture représentait 26 000 exploitations pour 40 000 actifs permanents. Hors Guyane, la surface agricole représentait 16 à 19 % de ces territoires. Par ailleurs, en 2019, l’industrie agroalimentaire employait 7 700 personnes en outre-mer, dont 50 % d’entre elles à La Réunion ([296]).

À titre d’exemple, à la suite du cyclone Belal, 1 404 dossiers ont été déposés pour le volet calamité agricole au titre du fonds de secours outre-mer (FSOM). Ces dossiers représentent 42 millions d’euros de perte pour les exploitants ([297]) et ont fait l’objet d’une attention particulière des services de l’État. Au-delà des indemnisations à la hauteur des pertes, le rapporteur a été sensible au concept de build back better appliqué en matière agricole. Ainsi, le développement de serres anticycloniques dans les territoires particulièrement exposés au risque de cyclone s’inscrit résolument dans cette dynamique que les collectivités locales appellent de leurs vœux ([298]). De plus, le rapporteur encourage le financement d’actions de résilience sur la filière agricole, à l’image des actions entreprises en Guadeloupe par l’Ademe et la Banque des territoires ([299]).

Enfin, comme dans d’autres secteurs d’activité, la répartition des compétences entre l’État et les collectivités peut être source de difficultés. Comme l’a expliqué le Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie lors de son audition, « dans le domaine de l’environnement, un service de l’État assume une compétence partagée concernant l’agriculture, la forêt et l’environnement. L’environnement est une compétence provinciale, tandis que l’agriculture et la forêt sont des compétences territoriales, selon la loi » ([300]). Le rapporteur souligne ainsi l’importance d’une articulation fine entre l’État et les collectivités durant la période de reconstruction, particulièrement au sein des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution.

2.   Le tourisme

Le tourisme est un secteur essentiel dans bon nombre de territoires ultramarins. À l’image de l’agriculture, le tourisme pèse plus ou moins fort au sein des économies ultramarines. Au total, en 2021, au sein de l’ensemble des territoires d’outre-mer, le tourisme a généré 2 milliards d’euros de recettes, représentant 1,72 million de touristes. Si le secteur représente 6 % des emplois à La Réunion ou 8 % aux Antilles, ce taux passe à 17 % en Polynésie française. Le tourisme se trouve au carrefour de l’ensemble des enjeux induits par un événement naturel majeur, de la gestion de crise à la reconstruction.

D’une part, la reprise de l’activité touristique est dépendante des actions entreprises par les services de l’état et les opérateurs de réseaux, qu’ils soient routiers, énergétiques ou de télécommunication. Par exemple, à la suite du cyclone Belal, la reprise de l’activité touristique à La Réunion n’aurait pas été possible sans la reprise d’activité de l’aéroport Roland-Garros dès le mardi 16 janvier 2024 ([301]).

D’autre part, lorsque l’événement naturel a pour conséquence la destruction ou l’endommagement de bâtiments, parmi lesquels ceux dédiés à l’accueil et l’hébergement des touristes, la reprise de l’activité touristique dépend de leur reconstruction ou de leur réhabilitation. Tout en considérant la nécessité économique de la reprise de cette activité, le rapporteur appelle à ne pas se précipiter dans des reconstructions à l’identique lorsque des constructions plus durables et résilientes sont possibles.

Au-delà du souhait d’une concrétisation réelle du build back better, il s’agit d’un impératif de cohésion sociale. Après Irma, les populations « ont confié ressentir un fort sentiment d’injustice. Dans des quartiers populaires et prioritaires comme Orléans ou Sandy Ground, où l’on trouve de l’habitat informel et des logements sociaux, les habitants n’ont pas eu le droit de reconstruire leur maison. Ils ont eu le sentiment que le PPRN faisait planer sur un certain nombre d’entre eux la menace d’une expulsion. Dans d’autres quartiers, en partie voués au tourisme, qui abritent de grands hôtels en bord de mer, la reconstruction a été autorisée » ([302]).

Recommandation n° 51 : en post-crise, mettre en place aussi longtemps que nécessaire une mission de soutien économique et social pour apporter un appui aux différents secteurs économiques, le cas échéant aux secteurs agricole et touristique.

B.   Mieux reconstruire

Si l’action de l’État durant les crises liées aux événements naturels majeurs a été unanimement saluée au cours des auditions, notamment par les collectivités, la période de la reconstruction est une période plus complexe, durant laquelle les liens entre les collectivités et l’État peuvent pâtir d’un manque de fluidité ([303]).

Pour pallier les difficultés observées dans les phases de reconstruction que les territoires ultramarins ont récemment pu connaître, le rapporteur souhaite mettre en avant trois aspects particuliers :

 en matière de gouvernance de la reconstruction, il est primordial qu’un « décloisonnement » s’opère. Pour ce faire, la mise en place de cellules ou missions interministérielles « permettent de sortir d’une gestion en silos. Leur objectif est d’administrer la reconstruction et de rendre plus rapides et plus fluides les prises de décisions impliquant une dépense d’argent public » ([304]). Elles peuvent être décomposées en différents pôles pour répondre aux besoins principaux des populations, collectivités et acteurs économiques, à l’image de la relance de la vie économique. Enfin, elles peuvent nécessiter l’envoi de renforts administratifs venus de l’hexagone. Pour ce faire, il convient d’identifier en amont des personnels au sein des différents ministères pouvant être projetés en outre-mer et disposant des compétences attendues pour composer de telles cellules. Un tel travail pourrait être réalisé par la direction générale des outre-mer ;

Recommandation n° 52 : en post-crise, installer des cellules interministérielles chargées de la coordination de la reconstruction. Centraliser auprès de la DGOM la gestion des personnels pouvant être envoyés sur place lorsque nécessaire pour soutenir ces cellules.

 en matière de temporalité de la reconstruction, il apparaît nécessaire que les règles et procédures qui lui sont applicables puissent faire temporairement l’objet d’adaptions. Les auditions conduites par la commission d’enquête ont pointé des temporalités inadaptées. Ainsi, les élus auditionnés ont pu estimer qu’ils étaient « confrontés à un certain carcan administratif qu’il convient de simplifier, soit à travers le code général des collectivités territoriales, soit à travers aussi le code de la commande publique. En effet, ces codes ne semblent pas adaptés à des situations de crise aussi intenses que celles que nous vivons depuis cinq ou six ans » ([305]). De même, certains élus en charge de la reconstruction ont fait part d’une forme d’insécurité juridique ressentie. En effet, « la protection juridique n’est pas toujours à l’œuvre », or « dans certains cas, la gestion de l’urgence visant à sauver des vies et des populations peut conduire à ne pas respecter le code, ce qui peut être reproché à l’élu quelques années après » ([306]). Il apparaît ainsi nécessaire de pouvoir autoriser, « par dérogation, une souplesse vis-à-vis de certaines lois et règlements » ([307]).

Recommandation n° 53 : en vue de la reconstruction immobilière, simplifier pour les collectivités et établissements publics, notamment pour les structures d’intérêt majeur, la possibilité au droit en vigueur (notamment en matière de commande publique), pour une période déterminée et sous le contrôle du représentant de l’État, en la conditionnant au respect de certaines normes en matière de préventions des risques naturels.

Toutefois, le rapporteur insiste sur le fait qu’il ne doit pas s’agir d’un moyen de reconstruire plus vite à l’identique. Au contraire, le gain de temps devrait permettre de reconstruire d’une façon plus résiliente. Ces dérogations au droit en vigueur pourraient dès lors être conditionnées au respect de normes en matière de prévention des risques naturels ;

 comme l’a montré la reconstruction à Saint-Martin, certaines situations post-crise peuvent nécessiter des dérogations temporaires en ce qui concerne la répartition des compétences entre l’État et les collectivités. Le rapporteur souligne ainsi que l’exercice par l’État de certaines compétences normalement dévolues au département, à la région ou à la collectivité peut se justifier pour une période définie. Cependant, il insiste sur le fait qu’une telle dérogation temporaire en matière de répartition des compétences implique une concertation, recueillant l’assentiment de toutes les parties prenantes.

Recommandation n° 54 : lorsque la situation le justifie, permettre l’exercice par l’État, de manière temporaire, de certaines compétences normalement dévolues aux départements, régions ou collectivités d’outre-mer, en concertation et accord avec celles‑ci.

Outre ces enjeux, le rapporteur souligne que certaines problématiques structurelles propres aux territoires d’outre-mer, telles que les tensions sur le foncier disponible, les droits de propriété ou l’habitat informel complexifient significativement la période de reconstruction en comparaison avec les situations rencontrées dans l’hexagone.

IV.   À l’Échelle nationale, RENFORCER LE PORTAGE INTERMINISTÉRIEL DES POLITIQUES DE prévention et De GESTION DES RISQUES NATURELS MAJEURS en outre-mer

1.   Reconstituer une délégation interministérielle aux risques naturels outre-mer

Le décret n° 2019‑353 du 24 avril 2019 a créé un délégué interministériel aux risques naturels majeurs outre-mer. La délégation interministérielle a été créée « par la volonté du Président de la République, désireux de dynamiser la prévention et la gestion des risques outre-mer, en particulier mais non exclusivement à la suite du déferlement de l’ouragan Irma aux Antilles » ([308]).

Sur la base d’une lettre de mission du Premier ministre, la délégation a, durant deux ans, non seulement engagé « les actions les plus urgentes » mais également conduit « une animation dynamique du travail interministériel » et entretenu « un dialogue régulier avec les collectivités locales » ([309]). Selon l’ancien délégué interministériel, la délégation a pu « de façon collégiale et avec le concours de tous, atteindre (ses) objectifs et même les dépasser » ([310]). En juillet 2021, il a été mis fin à la délégation interministérielle et ses missions ont été reprises par la mission de pilotage des politiques publiques de prévention de gestion des risques naturels en outre-mer (MAPPPROM) placée auprès du directeur général de la prévention des risques, délégué aux risques majeurs au sein du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Si la délégation avait été initialement mise en place « pour une durée volontairement restreinte à deux ans » ([311]), le rapporteur a pu s’interroger sur les raisons qui ont conduit à sa non reconduction. En effet, outre le bilan positif de l’action de la délégation interministérielle qui lui a été présentée, le rapporteur note que d’autres travaux parlementaires, ainsi que certaines des personnes auditionnées, appelaient de leurs vœux sa pérennisation. À titre d’exemple, le président de l’université populaire et de la prévention de Martinique a regretté qu’elle ne soit pas reconduite. De même, plusieurs rapports parlementaires ont pu recommander la pérennisation de cette délégation, qu’il s’agisse du rapport d’information sur les risques naturels majeurs dans les outre-mer des sénateurs MM. Guillaume Arnell, Abdallah Hassani et Jean‑François Rapin, au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer ([312]) ou du rapport pour avis au nom de la commission des lois sur le programme sécurité civile du député Mansour Kamardine ([313]).

Au regard du caractère résolument transversal des risques naturels majeurs et du besoin d’un suivi interministériel de haut niveau, le rapporteur préconise de rétablir la délégation interministérielle aux risques naturels majeurs outre-mer pour une nouvelle durée initiale de deux ans afin de piloter et mettre en œuvre les politiques publiques de prévention et de réponse aux risques naturels majeurs et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations du présent rapport d’enquête.

Recommandation n° 55 : rétablir la délégation interministérielle aux risques naturels majeurs outre-mer pour une durée initiale de deux ans.

2.   Le projet de loi sur les risques naturels outre-mer : une occasion manquée ?

Dans sa lettre de mission adressée au délégué interministériel aux risques majeurs outre-mer en date du 28 mai 2019, le Premier ministre l’informait que les « mesures les plus structurantes identifiées (…) (avaient) vocation à constituer un prochain projet de la loi, qui améliorera sensiblement la prévention et la gestion des risques majeurs outre-mer, en particulier sur les trois aspects suivants : faciliter la gestion post-crise et accélérer la reconstruction et le redémarrage des activités, accroître la couverture assurantielle, développer la culture du risque ».

La lettre de mission reprenait ainsi un engagement du président de la République formulé lors de son déplacement à Saint-Barthélemy et Saint‑Martin en octobre 2019, selon lequel « un plan d’action spécifique pour les risques naturels sera traduit dans un projet de loi » pour l’ensemble des outre-mer.

Pour ce faire, de larges consultations ont été conduites par le délégué interministériel et les services de l’État dans les territoires d’outre-mer au travers d’une consultation citoyenne organisée autour de deux axes ([314]) :

  1. Dynamiser la prévention des risques naturels, par :

– l’instauration de journées de prévention ;

–  l’adaptation de l’offre assurantielle et des modalités d’indemnisation ;

– la promotion et l’intégration des mesures parasismiques et paracycloniques.

  1. Améliorer l’efficacité des pouvoirs publics au moment de la crise et après, par :

– la création d’une procédure instaurant un « état de calamité naturelle exceptionnelle » ;

– l’instauration d’une obligation pour les opérateurs de prévoir des équipements et compétences techniques pour rétablir une version minimale des réseaux le temps de la remise en état ;

– l’obligation de remise en état d’une copropriété après un aléa majeur ;

– l’adaptation du droit du travail en cas d’évènement exceptionnel ;

– l’exonération de l’octroi de mer en cas d’aléa dû sur certains types d’équipements.

La synthèse des consultations produite en janvier 2020, dont le rapporteur a pu prendre connaissance, fait écho à certains des constats et recommandations de la commission d’enquête. Ils ont été traduits dans un projet de loi, qui n’a jamais été déposé au parlement, dont le rapporteur a pu également prendre connaissance sous la forme d’un document de travail. Comme l’a rappelé le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, M. Christophe Béchu, « l’engagement avait été pris que les recommandations de la délégation interministérielle seraient reprises dans la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale » ([315]). Toutefois, le rapporteur rejoint le constat effectué par le ministre en ce que « toutes les recommandations n’ont pas été transférées en droit positif » ([316]).

S’il est vrai qu’une « bonne partie de ces préconisations ont été mises en œuvre, parfois au niveau réglementaire, parfois sur le plan budgétaire, parfois par quelques évolutions législatives » ([317]), le rapporteur regrette que certaines d’entre elles ne l’ont pas été. Par ailleurs, au-delà de la non-instauration de ces préconisations par voie d’instruction, réglementaire ou législative, le rapporteur déplore que toutes les recommandations qui ont bel et bien été portées par le Gouvernement ne soient pas toujours mises en œuvre dans l’ensemble des départements, régions et collectivités d’outre-mer.

À l’issue de ses travaux, le rapporteur constate que certaines de ses recommandations sont similaires aux dispositions contenues dans le projet de loi qui avait été annoncé. D’autres de ses recommandations vont, quant à elles, plus loin ou couvrent des champs qui n’étaient pas abordés dans le projet de loi. Enfin, certaines de ses recommandations visent à assurer le suivi, l’application et le pilotage de ses recommandations et celles précédemment portées par le Gouvernement et dont la mise en œuvre lui semble perfectible.

 

 


   les recommandations

Recommandation n° 1 : accélérer la mise en œuvre du volet « recul du trait de côte » de la loi « climat et résilience » dans les territoires ultramarins largement impactés par le risque d’érosion côtière ;

 

Recommandation n° 2 : intégrer au projet de loi de finances pour 2025 un dispositif financier dédié à la lutte contre l’érosion côtière et rendre éligibles au fonds Barnier les opérations de lutte contre l’érosion côtière.

 

Recommandation n° 3 : pérenniser les financements des projets de recherche portant sur les algues sargasses de façon à améliorer la connaissance du phénomène et sa prévisibilité et apporter de la lisibilité aux acteurs impactés.

 

Recommandation n° 4 : identifier, par la recherche, des moyens de valorisation des algues sargasses collectées, et accompagner la mise en place de filières associées dans les territoires.

 

Recommandations n° 5 : élaborer un plan de reconstitution des écosystèmes ultramarins et en particulier des récifs coralliens dont la valeur du service rendu de protection côtière a été évaluée à près de 600 millions d’euros par l’Ifrecor.

 

Recommandation n° 6 : intégrer un volet ambitieux dédié à la prévention des risques naturels majeurs (cyclones, inondations, submersion marine, érosion, sécheresses en particulier), incluant les enjeux spécifiques à l’outre-mer, au sein de la prochaine stratégie nationale d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) actuellement en consultation.

 

Recommandation n° 7 : assurer le déploiement des Vigilances « vagues-submersion » et « canicule » en outre-mer et mieux articuler les dispositifs de Vigilance et d’alerte cyclonique assurés par Météo-France.

 

Recommandation n° 8 : fournir à l’horizon 2025 des projections climatiques à haute résolution à une échelle kilométrique pour l’ensemble des territoires ultramarins, au niveau de celles développées dans l’hexagone, de façon à mieux anticiper les impacts du changement climatique.

 

Recommandation n° 9 : renforcer les équipements d’observation de Météo-France en outre-mer, en particulier à Mayotte et à Tahiti qui ne disposent toujours d’aucun radar de précipitations.

 

Recommandation n° 10 : stabiliser les effectifs et les moyens financiers alloués à Météo-France au niveau des plafonds adoptés en loi de finances pour 2023 après plusieurs années de coupes budgétaires et pour une période d’au minimum cinq ans.

 

Recommandation n° 11 : mettre en place un observatoire sismo-volcanique de plein exercice à Mayotte associant les scientifiques mahorais.

 

Recommandation n° 12 : augmenter la part des financements pérennes aux observatoires sismologiques-volcanologiques et reconnaître leur mission de surveillance impliquant une mise à disposition 24h/24 et 7j/7 de personnels.

 

Recommandation n° 13 : simplifier les procédures d’élaboration, de modification et de révision des plans de prévention des risques naturels (PPRN) dans les DROM afin d’accélérer leur mise à jour, garantir leur adaptation aux enjeux présents et une meilleure prise en compte des effets du changement climatique.

 

Recommandation n° 14 : favoriser une meilleure appropriation des PPRN par la population en les rendant accessible au public en ligne sous un format pédagogique.

 

Recommandation n° 15 : renforcer les moyens de Météo-France pour fournir les études scientifiques approfondies nécessaires à l’élaboration des PPRN et parvenir à une délimitation fine des zones inconstructibles.

 

Recommandation n° 16 : accompagner l’élaboration de plans de zonage des aléas, en particulier du risque sismique, en Nouvelle-Calédonie.

 

Recommandation n° 17 : intégrer un volet « adaptation au changement climatique » au fonds Barnier, en rendant notamment éligibles au fonds les projets d’adaptation des zones littorales subissant les effets de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion côtière.

 

Recommandation n° 18 : recenser les habitations informelles et/ou indignes situées dans des zones exposées à un ou plusieurs risques naturels majeurs de nature à faire peser une menace grave pour les vies humaines.

 

Recommandation  19 : accompagner les services de l’֤État et des collectivités dans la mise en œuvre effective de l’article 6 de la loi Letchimy et mobiliser au moins 5 % des financements du fonds Barnier pour l’habitat informel.

 


 

Recommandation n° 20 : augmenter de façon pérenne le financement alloué aux assistances à maîtrise d’ouvrage (AMO) proposées par l’Agence française du développement pour renforcer l’accompagnement des collectivités ultramarines dans leurs projets de confortement parasismique de leur bâti public.

 

Recommandation n° 21 : assurer une publication rapide de l’arrêté définissant les règles de construction paracyclonique applicables en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte à compter du 1er janvier 2026 et favoriser la bonne appropriation de ces nouvelles règles par la mise en place de dispositifs de communication, de formation et d’accompagnement adaptés.

 

Recommandation n° 22 : étendre les financements du fonds Barnier aux travaux de confortement paracyclonique réalisés dans tous les territoires ultramarins concernés.

 

Recommandation n° 23 : établir une stratégie de réduction de la vulnérabilité du bâti privé, en particulier des établissements scolaires privés et des bâtiments privés recevant du public, dans le cadre de la troisième phase du Plan Séisme Antilles ; réaliser ou actualiser les diagnostics de vulnérabilité du bâti privé.

 

Recommandation n° 24 : informer et accompagner les particuliers et les petites entreprises dans le financement de leurs travaux de confortement et de réduction de la vulnérabilité de leur bien éligible au fonds Barnier.

 

Recommandation n° 25 : dans le cadre des prochaines éditions de la Journée nationale de la résilience, développer les démarches « d’aller-vers » afin de cibler les publics les plus vulnérables et les plus éloignés des politiques publiques de prévention des risques.

 

Recommandation n° 26 : évaluer la mise en œuvre de l’article L. 312-13-1 du code de l’éducation, issue de la loi « 3DS », qui prévoit une sensibilisation sur les risques naturels majeurs et l’organisation d’exercices réguliers dans tous les territoires d’outre-mer.

 

Recommandation n° 27 : transmettre par voie de circulaire à l’ensemble des services de l’État d’outre-mer des consignes de forme pour l’actualisation des plans ORSEC et de leurs dispositions spécifiques afin de disposer de plans synthétiques et opérationnels et inciter à une plus large mobilisation des savoirs scientifiques et locaux.

 

 

Recommandation n° 28 : désigner dans chaque préfecture ou Haut-commissariat un membre du corps préfectoral chargé du pilotage de la politique de prévention des risques naturels.

 

Recommandation n° 29 : doter les préfectures des effectifs nécessaires et d’agents formés en matière de préparation et de réponse aux risques naturels majeurs.

 

Recommandation n° 30 : réaffirmer la vocation des préfectures en matière d’offre de service et d’accompagnement auprès des communes pour la réalisation des plans communaux de sauvegarde.

 

Recommandation n° 31 : constituer un pôle d’agents et d’experts pouvant être mobilisé en appui des territoires ultramarins pour la rédaction et l’actualisation des plans.

 

Recommandation n° 32 : intégrer aux plans ORSEC l’hypothèse de la survenance d’un évènement de type « big one » ou de la conjonction d’événements et réaliser sur cette base des exercices multirisques.

 

Recommandation n° 33 : élaborer au niveau national un plan de réaction rapide, par territoire, en cas de survenue d’un événement de type « big one », avec calibrage d’une force de réaction rapide et de l’état‑major opérationnel prédéfini.

 

Recommandation n° 34 : inviter par voie de circulaire les représentants de l’État dans les territoires d’outre-mer à identifier des acteurs locaux, scientifiques, élus ou représentants de la population, en capacité d’intégrer un centre opérationnel départemental lorsqu’un évènement naturel majeur survient.

 

Recommandation n° 35 : prévoir dans chaque préfecture ou haut-commissariat de la République un lieu de repli pour l’installation du COD si les infrastructures prévues à cet effet ne peuvent être utilisées.

 

Recommandation n° 36 : dispenser aux membres du corps préfectoral une formation, adaptée à leur territoire d’affectation, à la gestion des risques naturels majeurs, tant sur le plan théorique que pratique au travers de la réalisation d’exercices.

 

Recommandation n° 37 : mieux faire connaître les fonctions de sapeur-pompier volontaire dans les territoires d’outre-mer, particulièrement auprès des plus jeunes au travers de dispositifs comme les jeunes sapeurs-pompiers.

 

Recommandation n° 38 : encourager l’utilisation du fonds exceptionnel d’investissement aux fins de l’amélioration et de l’augmentation des équipements des services d’incendie et de secours ultramarins.

 

Recommandation n° 39 : poursuivre et, le cas échéant, corriger le déploiement des sirènes et du dispositif FR-Alert dans l’ensemble des territoires d’outre-mer.

 

Recommandation n° 40 : conduire une réflexion sur l’organisation de la sécurité civile dans les collectivités du Pacifique afin de construire un modèle en adéquation avec leurs enjeux, le cas échéant dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile.

 

Recommandation n° 41 : systématiser le recensement des personnes vulnérables et isolées et bâtir des annuaires pouvant être transmis aux services de secours ou d’assistance. Lorsque nécessaire, assurer un accompagnement ou une campagne face à l’illectronisme.

 

Recommandation n° 42 : nommer des agents aux postes de conseiller diplomatique auprès des préfets en outre-mer et inscrire les coopérations en matière de risques naturels majeurs sur la feuille de route des ambassadeurs chargés des coopérations régionales d’une part et des conseillers diplomatiques d’autre part.

 

Recommandation n° 43 : construire, formaliser et animer des coopérations opérationnelles, y compris commerciales, entre États, collectivités ou institutions dans l’ensemble des territoires ultramarins.

 

Recommandation n° 44: recenser, prioriser et effectuer les travaux de renforcement et de mise aux normes des principales infrastructures de transport des territoires ultramarins.

 

Recommandation n° 45 : s’assurer que les opérateurs de transports routiers, portuaires et aéroportuaires ont élaboré des plans locaux d’urgence opérationnels répondant aux principaux risques naturels, le cas échéant avec l’appui des services de l’état et des institutions scientifiques.

 

Recommandation n° 46: rehausser les niveaux d’entretien et de maintenance des réseaux électrique, d’eau et de télécommunication et procéder à des investissements résilients face aux risques naturels.

 

Recommandation n° 47 : s’assurer que les opérateurs d’électricité, d’eau et de télécommunication disposent de plans de crise et de moyens associés pour se tenir prêts en cas d’événement naturel majeur.

 

Recommandation n° 48 : sur la base des recommandations du rapport de l’IGF Le phénomène de nonassurance dans les départements et collectivités d’Outremer et du rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques de décembre 2023, organiser des concertations à échéances régulières pour évaluer les adaptations à apporter à ce dispositif (taux de prime, articulation avec la prévention, communication, périmètre, etc.).

 

Recommandation n° 49 : sur la base des recommandations du rapport de l’IGF Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer et du rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, développer le recours à l’assurance dans les départements et collectivités d’outre-mer, de manière partenariale entre les pouvoirs publics, les assurances et les tiers intéressés. À Mayotte et, le cas échéant, dans les autres territoires ultramarins, mettre en place un comité de pilotage réunissant l’ensemble de ces acteurs visant à augmenter le recours à l’assurance des biens.

 

Recommandation n° 50 : sur la base des recommandations du rapport de l’IGF Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outremer et du rapport de mission Langreney Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, assurer l’universalité de l’offre d’assurance sur l’ensemble du territoire français et accompagner les personnes non assurées résidant dans une zone constructible, le cas échéant quand la pratique des assureurs ne respecte pas le cadre légal et réglementaire.

 

Recommandation n° 51 : en post-crise, mettre en place aussi longtemps que nécessaire une mission de soutien économique et social pour apporter un appui aux différents secteurs économiques, le cas échéant aux secteurs agricole et touristique.

 

Recommandation n° 52 : en post-crise, installer des cellules interministérielles chargées de la coordination de la reconstruction. Centraliser auprès de la DGOM la gestion des personnels pouvant être envoyés sur place lorsque nécessaire pour soutenir ces cellules.

 

Recommandation n° 53 : en vue de la reconstruction immobilière, simplifier pour les collectivités et établissements publics, notamment pour les structures d’intérêt majeur, la possibilité au droit en vigueur (notamment en matière de commande publique), pour une période déterminée et sous le contrôle du représentant de l’État, en la conditionnant au respect de certaines normes en matière de préventions des risques naturels.

 

Recommandation n° 54 : lorsque la situation le justifie, permettre l’exercice par l’État, de manière temporaire, de certaines compétences normalement dévolues aux départements, régions ou collectivités d’outre-mer, en concertation et accord avec celles‑ci.

 

Recommandation n° 55 : rétablir la délégation interministérielle aux risques naturels majeurs outre-mer pour une durée initiale de deux ans.

 

 

 


   examen en commission

Au cours de sa réunion du 4 juin 2024, la commission a procédé à huis clos, à l’examen du projet de rapport.

M. Mansour Kamardine, président. Cette dernière réunion de notre commission d’enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’outre-mer est consacrée à l’examen du projet de rapport et au vote sur son adoption.

Si l’ensemble de la France est confronté à des risques majeurs, les collectivités ultramarines présentent trois spécificités. Leur nature les expose à des aléas particuliers – cyclones, volcanisme – de grande ampleur – séismes, tsunamis, épisodes de submersion marine. Elles peuvent également être exposées à des phénomènes atypiques, comme la prolifération des algues sargasses aux Antilles. Enfin, les risques pour les populations sont exacerbés par la concentration urbaine sur le littoral et la forte vulnérabilité du bâti accentuée par le recul du trait de côte, ce dernier phénomène étant amplifié par le changement climatique. Les territoires ultramarins par leur éloignement, leur insularité, à l’exception de la Guyane, et leur environnement régional faiblement interconnecté sont plus vulnérables et moins aisés à protéger et à secourir, ce qui place les 2,6 millions de Français qui y vivent face à des périls majeurs. L’ensemble de la représentation nationale avait naturellement vocation à examiner l’exposition des outre-mer aux risques naturels, à exercer ses prérogatives de contrôle et d’évaluation de l’action du Gouvernement, et à formuler des propositions d’amélioration de la protection de nos compatriotes ultramarins et de la réponse collective apportée aux catastrophes naturelles.

À l’initiative du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (LFI-NUPES), une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la gestion par l’État des risques naturels majeurs dans les territoires transocéaniques de France, dits d’outre-mer, a été inscrite à l’ordre du jour par la conférence des présidents du 8 novembre 2023. Les amendements adoptés par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, puis en séance publique le 30 novembre 2023, ont eu pour effet d’élargir le champ de la commission d'enquête, en supprimant la référence exclusive à la gestion de l'État dans l’article unique et dans le titre, et de substituer l’expression « d’outre-mer » à celle de « transocéaniques français ». L’Assemblée a ensuite adopté la proposition de résolution avec l’appui unanime des groupes d’opposition et les voix partagées de ceux de la majorité.

Le recours à un vote en séance publique, au lieu de l’usage du droit de tirage annuel dont disposent les groupes d’opposition, a permis de solenniser la procédure mais aussi d’organiser la commission d’enquête selon les modalités classiques de mise en œuvre de l’article 51-2 de la Constitution. Le 20 décembre 2023, la commission d’enquête s’est réunie pour constituer son bureau : elle a désigné M. Guillaume Vuilletet rapporteur et, en application de la règle qui veut que majorité et opposition se partagent la direction des travaux d’une commission d’enquête, elle m’a fait l’honneur de m’élire comme président, ce dont je la remercie une fois de plus. Considérant que la règle démocratique de l’élection n’avait de sens que si elle nommait président l’un de ses membres, le groupe LFI-NUPES a décidé de démissionner de la commission, choix que je regrette aussi bien sur la forme que sur le fond compte tenu de l’importance du sujet examiné, notamment pour nos compatriotes des Antilles et de Guyane.

En cinq mois de travaux, nous avons consacré près de soixante heures à quarante-six auditions, au cours desquelles nous avons entendu 160 personnes. La commission d’enquête a envoyé une délégation en mission à Mayotte et à La Réunion pour de nombreux entretiens et tables rondes. Je veux saluer le travail considérable réalisé par le rapporteur et par les collègues qui se sont mobilisés, notamment les députés ultramarins de l’Atlantique, du Pacifique et de l’océan Indien. Toutes les auditions de la commission d’enquête ont été publiques et retransmises en direct sur le site de l’Assemblée, dans un souci de transparence et d’information de nos concitoyens ; elle n’a pas organisé d’auditions à huis clos comme les textes applicables lui en offrent la possibilité, même si l’examen du projet de rapport doit obligatoirement se faire hors champ des caméras. Ces auditions ont été complétées par des déplacements qui ont permis d’appréhender les réalités au plus près des territoires.

Élu d’un territoire qui a récemment connu l’émergence d’un risque naturel majeur avec la découverte du volcan sous-marin Fani Maoré, je mesure l’urgence qu’il y a à renforcer toute la chaîne de prévention et de préparation, en partant de l’observation scientifique qui modélise les risques jusqu’à la résilience des réseaux qui assure la continuité de la vie de nos concitoyens en cas de survenance d’un aléa.

Tout au long de ce travail, j’ai pu observer la grande détermination des différents services et des élus, ainsi que la nécessaire humilité qu’il convient d’adopter en face de la force irrésistible de la nature, nature qui parle mais que « le genre humain n’écoute pas », comme l’écrivait Victor Hugo.

Pour autant, l’histoire nous rappelle aussi la nécessité de réagir vite et avec méthode à la suite d’un aléa majeur. La complexité du sujet tient à la coexistence de plusieurs facteurs spatiotemporels qui s’imposent à nous : le temps long des phénomènes volcaniques, les volcans pouvant rester en sommeil pendant plusieurs centaines d’années entre deux éruptions ; la récurrence des phénomènes cycloniques dans l'Atlantique Nord, dont la saison s'étend de juin à novembre ; les effets perturbateurs liés au réchauffement climatique et à El Niño ; enfin, il reste impossible de prévoir où, quand et avec quelle intensité un séisme surviendra.

L’un des enseignements du travail de la commission réside dans la nécessité de prendre en considération le risque, sans doute plus prégnant avec le réchauffement climatique, de cumul d’aléas naturels ou d’enchaînement d’un aléa naturel et d’un risque technologique. L’approche des pouvoirs publics présente des lacunes dans ce domaine, car ceux-ci raisonnent, comme le relève le rapporteur, aléa par aléa.

Alors que nous constatons la multiplication des inondations et des tempêtes ainsi que le recul du trait de côte dans l’Hexagone, il convient de souligner les spécificités des territoires ultramarins, lesquelles multiplient les dégâts provoqués par les aléas naturels. Les constructions près du rivage, induites par le manque de foncier, le déficit d’infrastructures routières et d’entretien des ouvrages d’art, la plus grande fragilité des populations, dont une grande proportion vit sous le seuil de pauvreté et se tourne vers le logement informel, et l’éloignement des autres territoires et États voisins rendent indispensable l’octroi de davantage de moyens en personnels, matériel scientifique et ingénierie logistique à ces territoires.

Alors que le troisième plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) est entré dans sa phase de consultation, nous devons réfléchir à la stratégie globale à adopter face aux risques naturels majeurs. Le concept de mitigation, c’est-à-dire d’atténuation, qui repose sur le déploiement de mesures destinées à réduire les dommages associés à des risques, est désormais associé à celui d’adaptation, lequel a pour objectif d’anticiper les impacts prévisibles du changement climatique et de limiter leurs dégâts éventuels en intervenant sur les facteurs qui influent sur leur ampleur.

L’exercice d’une présidence de commission d’enquête a ceci de paradoxal qu’il consiste, entre autres, à introduire un rapport dont l’auteur appartient à un camp politique opposé. Cela n’empêche pas la qualité du travail commun et des relations personnelles. Je tiens, à ce titre, à remercier tout particulièrement le rapporteur Guillaume Vuilletet, qui a conduit nos travaux avec beaucoup de pugnacité et a mis sa connaissance des réalités géographiques, économiques et institutionnelles des territoires ultramarins au service de nos collègues.

Nous devons, en tant qu’élus responsables de la nation, reconnaître l’importance des moyens déployés par les services de l’État, sous la houlette des deux ministres compétents, et par les collectivités, mais aussi pointer les manques en termes de matériel scientifique d’observation et de veille, comme les radars et les capteurs, et, peut-être, de pilotage, tant la création d’une administration de mission sous la forme d’une délégation interministérielle aux risques majeurs outre-mer avait apporté l’impulsion et la réactivité indispensables pour éviter qu’un risque naturel majeur n’entraîne une catastrophe humaine.

Je me félicite que les recommandations du rapport portent sur l’ensemble du spectre des actions concernant les risques naturels majeurs outre-mer, qu’il s’agisse des connaissances scientifiques, de la prévention, de la planification, du pilotage, de l’encadrement législatif et réglementaire, et de la gestion de crise.

Enfin, en marge des travaux, nous avons perçu la nécessité de développer une réflexion sur la coopération et l’intégration régionales en matière de sécurité civile et sur le risque naturel majeur, potentiellement dévastateur pour nos territoires ultramarins, qu’est l’effondrement actuel de leur importante biodiversité. Déjà en 1970, le président de la République, Georges Pompidou, déclarait que l’emprise de l’homme sur la nature était devenue telle qu’elle comportait « le risque de destruction de la nature elle-même » ; et le chef de l’État d’ajouter qu’il était frappant de constater qu’au moment où s’accumulaient et se diffusaient de plus en plus les biens dits de consommation, c’étaient les biens élémentaires les plus nécessaires à la vie, comme l’air et l’eau, qui commençaient à faire défaut. Assurément, la représentation nationale sera amenée à poursuivre ultérieurement des travaux sur ce point critique.

Je vous indique que ceux qui souhaitent apporter une contribution au rapport peuvent le faire jusqu’au mercredi 29 mai à dix-huit heures.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je vous remercie, monsieur le président, pour l’écoute et la convivialité avec lesquelles vous avez présidé la commission d’enquête ; ce fut un plaisir de travailler sous votre présidence au cours des six mois écoulés.

Tout le monde connaît l’histoire singulière de cette commission d’enquête : la proposition de résolution ayant abouti à son installation a été adoptée par l’Assemblée nationale, ce qui lui a donné une force symbolique particulière ; néanmoins, comme pour toutes les commissions d’enquête parlementaires créées par cette voie, il n’y avait ni droit de tirage ni priorité donnée au groupe ayant déposé la proposition de résolution pour l’attribution des postes de président et de rapporteur – seule la règle prévoyant que la majorité obtienne l’un des deux postes et l’opposition l’autre, prévalait. Les députés du groupe LFI-NUPES, frustrés par la répartition retenue, ont choisi de démissionner de la commission d’enquête alors qu’ils auraient pu l’intégrer dans leur droit de tirage : ils ne peuvent pas s’offusquer du respect des règles de fonctionnement de l’Assemblée nationale.

Une commission d’enquête n’est ni l’élaboration d’une liste d’évidences, ni la conduite d’un procès systématique, elle est l’occasion de dresser un constat lucide sur une réalité ; l’objectif est que l’Assemblée nationale formule des propositions destinées à améliorer la situation et à servir l’intérêt général. Nous avons travaillé de manière approfondie pendant six mois, sous la présidence de M. Kamardine. Tout au long de notre enquête, l’actualité nous a régulièrement rappelé l’importance et la gravité du sujet, que l’on pense au cyclone Belal survenu en janvier 2024 à La Réunion, dont la gestion fut exemplaire à plus d’un titre, aux récentes inondations qui ont touché le sud du Brésil ou au glissement de terrain qui vient de faire 2 000 victimes en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Certains risques naturels, autrefois faibles, ne cessent d’augmenter, conséquence du changement climatique.

Les territoires ultramarins sont concernés de longue date par des événements naturels extrêmes qui sont spécifiques et souvent plus dévastateurs que ceux susceptibles de frapper l’Hexagone : cyclones, séismes, éruptions volcaniques, tsunamis, mouvements de terrain, submersions, inondations, etc. Les outre-mer sont exposés à tous les types d’aléas majeurs à l’exception du risque d’avalanche.

À plusieurs égards, la culture du risque y est bien plus développée que dans l’Hexagone : la mémoire collective et l’exposition régulière à des situations de crise préparent les populations à adopter les bons gestes et comportements et à faire preuve de résilience quand il s’agit de reconstruire. De multiples initiatives locales sont également déployées pour informer les publics des risques et les y sensibiliser. Il y a beaucoup à apprendre de la façon dont sont appréhendés les risques naturels majeurs dans ces territoires.

Mais nos travaux soulignent également qu’il y a encore beaucoup à faire pour réduire leur vulnérabilité particulière et améliorer l’efficacité des politiques publiques de prévention et de gestion des risques qui y sont menées. C’est un enjeu majeur alors que le changement climatique augmente déjà la fréquence et l’intensité de certains aléas naturels et va aggraver les dégâts et coûts des crises à venir.

Les conclusions que je vous présente reposent sur des échanges nourris avec l’ensemble des acteurs concernés à tous les niveaux : nous avons auditionné pas moins de 160 personnes au cours de 46 auditions et tables rondes – des experts, des chercheurs, les établissements scientifiques chargés de l’observation et de la surveillance des risques, des associations d’élus, de protection civile, des représentants des forces armées, du système de santé, du secteur du logement, du secteur des assurances ainsi que des opérateurs de réseaux, sans oublier les ministères concernés. Les spécificités de chaque territoire ont pu être appréhendées avec les préfets, les services de l’État, les services d’incendie et de secours, les collectivités locales et les associations locales. Je remercie les personnes auditionnées pour la qualité des échanges et des informations qui ont été transmises à notre commission d’enquête.

Du 26 au 29 mars 2024, le président et moi-même sommes également allés à Mayotte et à La Réunion. Ces déplacements étaient rendus nécessaires dans le premier cas par la naissance d’un jeune volcan sous-marin en mai 2018, dans le second par la survenue récente du cyclone Belal. Nous y avons rencontré les services de l’État et des collectivités, des élus, des opérateurs et réalisé des visites de terrain pour évaluer la préparation ou les conséquences des risques naturels. Je souhaite remercier l’ensemble de celles et ceux qui nous ont reçus.

Dans mon rapport, je commence par alerter sur les effets du changement climatique sur l’évolution des aléas climatiques outre-mer. Météo-France confirme, en lien avec la hausse des températures, l’augmentation des épisodes météorologiques extrêmes, comme les pluies intenses et les ouragans d’extrême intensité – de catégorie 4 et 5 – dans tous les bassins océaniques, ainsi que des risques accrus de sécheresse et d’incendie.

L’élévation du niveau de la mer a également déjà pour effet d’accélérer l’érosion côtière et d’aggraver la vulnérabilité des zones littorales face aux risques de submersion marine, notamment en cas de cyclone. L’étude récemment publiée par le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) à l’initiative de notre vice-présidente, Mme Panonacle, confirme l’exposition de nombreux bâtiments au recul du trait de côte outre-mer, en particulier en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane.

Il est urgent d’agir et d’appréhender ce nouveau risque : les outils prévus par la loi « climat et résilience » doivent être davantage mis en œuvre dans ces territoires. Je recommande également d’intégrer au projet de loi de finances pour 2025 un dispositif financier dédié à la lutte contre l’érosion côtière.

Dans un contexte marqué par l’incertitude liée au changement climatique, il est absolument nécessaire de doter les établissements chargés de la surveillance et de la prévision des risques naturels de moyens à la hauteur des enjeux. Je pense à Météo-France, dont les effectifs et les moyens outre-mer diminuent alors que des investissements sont requis pour y assurer un niveau de prévision équivalent à celui atteint dans l’Hexagone. Sont attendus, en particulier, la fourniture de projections à haute résolution sur le changement climatique outre-mer, le déploiement des cartes de vigilance vagues-submersion et canicule et l’équipement en radars de précipitations à Mayotte et à Tahiti.

Alors que nos volcans sont tous placés en vigilance jaune, les observatoires volcanologiques et sismologiques ultramarins ne disposent pas de financements pérennes pour assurer une mission de surveillance. Je recommande également l’installation d’un observatoire de plein exercice à Mayotte pour mieux appréhender le nouveau risque sismique et volcanologique lié à l’éruption du volcan sous-marin.

Concernant nos politiques de prévention dans les outre-mer, absolument essentielles, je regrette, d’une manière générale, qu’elles soient trop souvent reléguées au second plan par rapport à d’autres priorités d’aménagement et de développement des territoires.

Je pense en particulier aux plans de prévention des risques naturels (PPRN) et à la délimitation de zones exposées et inconstructibles. L’élaboration de ces plans soulève toujours des difficultés, en particulier à Mayotte, en Guyane et en Nouvelle-Calédonie. Dans les territoires les mieux dotés, comme en Guadeloupe et en Martinique, ils sont anciens et leur révision, urgente, est actuellement menée par les services de l’État en partenariat avec les collectivités concernées. L’émergence d’une nouvelle réglementation en Polynésie française, pour adapter l’outil aux contraintes de l’archipel, est également à souligner.

Une réflexion doit être menée sur les procédures d’élaboration et de révision des plans de prévention des risques dans les territoires d’outre-mer, ainsi que sur les moyens de favoriser leur appropriation par les populations, par exemple en assurant leur publication en ligne dans un format pédagogique.

S’agissant du fonds Barnier, principale source de financement de la politique nationale de prévention des risques naturels majeurs, je salue les améliorations récentes, en particulier son intégration au budget général de l’État et l’augmentation de ses ressources depuis 2021. Toutefois, il continue de bénéficier très inégalement aux territoires ultramarins : le plan séisme Antilles (PSA) représente plus de 80 % des financements alloués à l’outre-mer dans ce cadre. Un rééquilibrage est absolument nécessaire.

Je regrette également la sous-mobilisation du fonds pour traiter les situations urgentes liées à la présence d’habitations informelles dans les zones exposées aux risques. La mise en œuvre de l’article 6 de la loi Letchimy du 23 juin 2011 est embryonnaire ; les collectivités doivent être accompagnées sur ce volet et au moins 5 % du fonds Barnier devrait être mobilisé pour l’habitat informel, contre moins de 1 % aujourd’hui.

Aux Antilles, le fonds Barnier aura toutefois permis d’engager des opérations notables dans le cadre du plan séisme Antilles déployé depuis 2007, bien que des travaux d’ampleur restent à mener pour sécuriser le bâti public, en particulier dans les écoles du premier et du second degré.

S’agissant de la gestion des crises liées aux événements naturels majeurs, j’ai pu constater l’existence d’une réelle culture partagée de la préparation et de la gestion opérationnelle outre-mer. Toutefois, l’ensemble des territoires ultramarins ne sont pas également préparés à la survenue de crises, ce qui pourrait entraîner des coûts importants, tant matériels qu’humains. Cela dit, une égale préparation n’implique pas une préparation uniforme : du fait des spécificités de chaque territoire, les risques naturels requièrent une préparation adaptée à chacun, donc différenciée.

Parmi les éléments hétérogènes dont les auditions ont fait état ou que j’ai pu observer, je retiens particulièrement les plans Orsec (organisation de la réponse de sécurité civile) et les plans communaux de sauvegarde. Hétérogènes sur la forme, ces plans le sont également sur le fond et intègrent trop peu souvent l’hypothèse d’un « big one » ou d’une conjonction d’événements. À ce sujet, notre président nous soumettra une proposition d’ajout au rapport que je soutiendrai.

De même, les moyens humains et matériels disponibles restent disparates d’un territoire à l’autre et, en moyenne, inférieurs à ceux observés dans l’Hexagone. Pour cette raison, je recommande notamment le développement des sapeurs-pompiers volontaires et la mobilisation du fonds exceptionnel d’investissement pour améliorer les équipements. Je retiens également l’organisation singulière de la sécurité civile dans les territoires du Pacifique. À cet égard, le Beauvau de la sécurité civile représente l’occasion d’identifier des voies d’amélioration.

Au-delà des progrès à faire, je tiens à souligner les éléments robustes que nos six mois de travaux ont mis en évidence en matière de préparation et de gestion des crises. Je pense notamment à la gouvernance de crise, qui a fait ses preuves, ou à la doctrine française visant à prépositionner des moyens de manière limitée outre-mer et à projeter des moyens hexagonaux en amont ou en aval d’un événement naturel.

Par ailleurs, malgré une coordination complexe, les coopérations régionales telles que les plateformes d’intervention régionale de la Croix-Rouge sont essentielles à la préparation et à la gestion des crises. Je recommande d’améliorer leur formalisation et leur animation.

Enfin, la préparation et la gestion des crises est l’affaire de tous : autorités, population, opérateurs, acteurs économiques. En la matière, j’ai pu observer des comportements optimaux. Je tiens par exemple à saluer le travail d’EDF à La Réunion ou de l’aéroport de Dzaouzdi à Mayotte. Je recommande que leur préparation et leur capacité de réponse soient étendues à d’autres acteurs, dans d’autres territoires.

Ces constats et recommandations reposent également sur l’étude approfondie de deux crises majeures récentes : Irma, en 2017 à Saint-Barthélemy et Saint-Martin, et Belal, en 2024 à La Réunion. S’agissant d’Irma, compte tenu des précédents disponibles et malgré une anticipation réelle, il nous est apparu que l’État n’avait pu éviter les conséquences majeures de l’ouragan. S’agissant de Belal, c’est grâce à une préparation et à une constante adaptation au risque cyclonique, à une prévision extrêmement fiable du phénomène et à des décisions adaptées et proportionnées des services de l’État, sous l’autorité du préfet, que la gestion de la crise a été exemplaire.

Enfin, les travaux de la commission d’enquête ont porté sur la période de reconstruction, moment crucial de la gestion d’un événement naturel majeur dès lors que l’urgence absolue est considérée comme terminée. Impliquant la mise en œuvre, dans un temps contraint, d’impératifs nombreux et parfois contradictoires, la reconstruction ne débute pas sur une feuille blanche. Au contraire, elle repose sur l’histoire du territoire, ses structures sociale, politique, économique et culturelle. Pour étudier cette période, je me suis particulièrement intéressé à la reconstruction de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

La période de reconstruction est marquée par un vif souhait de la population et des acteurs économiques de revenir à la normale le plus rapidement possible. Cependant, il est nécessaire de prendre en compte les impératifs du build back better – « reconstruire en mieux ». Pour ce faire, je recommande la constitution de cellules de soutien, interministérielles ou sectorielles, bénéficiant au besoin de renforts hexagonaux.

Par ailleurs, pour accélérer la reconstruction tout en l’inscrivant dans une démarche durable, je préconise la mise en œuvre, sous le contrôle du représentant de l’État, d’un droit temporaire de déroger aux lois et règlements en vigueur dans certains domaines, comme les marchés publics. Il pourrait être subordonné au respect des normes en matière de prévention des risques.

De même, le transfert temporaire à l’État de certaines compétences dévolues aux départements, régions ou collectivités d’outre-mer me semble susceptible d’avoir des effets positifs sur la reconstruction, à condition de s’effectuer en concertation avec les collectivités concernées.

Dans cette période de reconstruction, le rôle des assurances est crucial. Or les travaux de la commission d’enquête ont rappelé l’insuffisante couverture assurantielle des territoires ultramarins, allant de 6 % à Mayotte à 68 % à La Réunion quand le taux hexagonal s’établit à 97 % en 2017. Cette faible couverture, problématique face aux risques classiques ainsi qu’à certains risques tels que les tempêtes, l’est d’autant plus qu’elle interdit l’accès au régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, dit régime Cat nat. Pour ces raisons, je recommande la mise en œuvre urgente d’incitations fortes au recours à l’assurance dans les territoires ultramarins, à l’initiative conjointe des pouvoirs publics, des assurances et des tiers intéressés. Il convient aussi d’accompagner les plus fragiles, qu’ils disposent d’une habitation légalement construite ou non. En outre, j’appelle à des concertations à échéance régulière pour adapter le régime Cat nat, essentiel pour nos compatriotes et que bon nombre de pays nous envient. Il s’agit là d’un euphémisme pour dire l’importance de motiver les assurances à ce sujet.

L’ensemble de mes recommandations nécessitent un portage interministériel de haut niveau pour être mises en œuvre. À cette fin, la reconstitution de la délégation interministérielle aux risques naturels outre-mer me semble indispensable. Elle permettrait en outre d’assurer l’application ou le suivi des dispositions contenues dans le projet de loi qu’avait un temps envisagé le Gouvernement. Le cas échéant, il pourrait être nécessaire de légiférer pour pourvoir aux dispositions non encore adoptées.

Ce rapport est une pierre à l’édifice que représente l’amélioration de la résilience des territoires ultramarins face aux risques naturels. Je vous invite à l’adopter.

Mme Cécile Rilhac (RE). Je suis plus que favorable aux cinquante-quatre recommandations de notre rapporteur, particulièrement à trois d’entre elles.

J’approuve la proposition de renforcer le fonds Barnier, que ce soit sur le plan budgétaire ou sur celui de l’information des particuliers et des entreprises.

Je suis également très sensible à la recommandation n° 17, relative à l’intégration d’un volet « adaptation au changement climatique ».

Enfin, étant membre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, j’ai évidemment envie d’appuyer les recommandations en faveur de Météo-France et de la recherche. Il faut en effet renforcer les moyens de vigilance, notamment les radars d’observation, compte tenu des différents phénomènes à l’œuvre dans l’océan Pacifique et l’océan Indien, qui affectent notamment Tahiti et Mayotte : vagues de submersion, retrait du trait de côte, évolution de la pluviométrie, montée des eaux. La recherche en sismologie est primordiale, de même que celle qui nous permettra d’appréhender le phénomène des sargasses et de lutter contre ce fléau écologique qui sévit aux Antilles.

Mme Joëlle Mélin (RN). J’approuve les conclusions de ce rapport et je félicite le rapporteur de son travail.

J’aurais aimé davantage de recommandations concernant les agences régionales de santé (ARS). En cas de crise sanitaire, la capacité à délivrer les soins adéquats dépend d’infrastructures matérielles, mais aussi des moyens humains dont elles disposent. Or les hôpitaux et cliniques de certains territoires sont déjà en surcharge, notamment à Mayotte, où l’éruption du volcan découvert récemment pourrait aggraver la situation – je parle sous votre contrôle, monsieur le président. Il serait utile de compléter la recommandation n° 40 sur le recensement des personnes vulnérables et isolées en proposant de renforcer les plans de préparation aux crises sanitaires.

Je ne m’attarde pas sur le problème de l’eau, qui se répercute dans différents domaines.

Outre le fonds Barnier, qui fonctionne de mieux en mieux, j’aurais apprécié que soient mentionnés les fonds européens qui interviennent directement dans les travaux de prévention ou par le biais de la réserve européenne de ressources (RescEU). Quelle que soit notre vision de l’Europe, nous ne pouvons qu’approuver cette coopération entre les pays en cas de crise sanitaire. Au sein de la commission des affaires européennes, je me suis intéressée au recours aux fonds européens en cas de catastrophe météorologique ou climatique, d’où ma suggestion, même s’ils ne relèvent pas directement du périmètre de nos travaux.

M. Guillaume Vuilletet, rapporteur. Je suis d’accord avec Cécile Rilhac concernant l’utilité de Météo-France et son influence sur les décisions prises. Il faut faire en sorte que les populations acceptent les règles de prévention imposées au nom de l’intérêt général et de leur propre sauvegarde. Mais quand on a le choix entre faire l’autruche et quitter sa maison en raison d’un risque qui pourrait se concrétiser dans les quarante ans à venir, on peut être tenté par la première option. Il faut donc veiller à ce que les cartes soient élaborées avec une extrême rigueur, ce qui passe souvent par l’expertise de Météo-France, dont les équipements et les moyens doivent être renforcés.

En matière de recherche, notamment au sujet des sargasses, il faut miser sur une innovation capable de s’inspirer de la tradition et des savoirs locaux. Reconstituer les mangroves parce qu’elles permettent d’absorber une partie des aléas, c’est tenir compte d’un savoir local très ancien. Le raisonnement vaut pour les matériaux : il faut choisir ceux qui sont non seulement biosourcés, mais aussi maîtrisés par les populations locales qui savent les utiliser pour leur résistance aux aléas.

S’agissant de l’importance de la culture du risque, je voudrais rappeler le projet « Paré pas paré », destiné aux élèves de CM1, CM2 et sixième de La Réunion. Il permet aux enfants de s’approprier complètement la gestion du risque et, comme dans d’autres domaines, de devenir prescripteurs.

Madame Mélin, les ARS interviennent dans le cadre du plan Orsec. En cas d’aléa majeur, on est projeté dans un autre monde, régi par ses propres règles. Nous avons réfléchi aux renforts potentiels et à l’opportunité de prépositionner des moyens. On nous a répondu – et je fais confiance aux professionnels sur ce point – qu’il était préférable de laisser des moyens à distance pour éviter qu’ils ne soient eux-mêmes affectés par les aléas.

Il est vrai que nous nous sommes peu intéressés aux fonds européens – mais les contributions des groupes peuvent pallier ce manque. Le principal d’entre eux est le Fonds de solidarité de l’Union européenne, intervenant a posteriori, dont les règles ont été beaucoup assouplies. Le Fonds européen de développement régional (Feder) et le Fonds social européen (FSE) allouent 1,7 million d’euros, gérés par les services déconcentrés de l’État, aux régions ultrapériphériques (RUP) et à la Plateforme d’intervention régionale de l’océan Indien (Piroi). L’Europe laisse la prévention aux acteurs locaux et se concentre sur la réparation, ce qui est sage. En revanche, le débat reste ouvert sur le choix des nouvelles constructions, plus adaptées aux risques : doit-il être fait au niveau national ou européen ? Ma préférence va au niveau national, dont l’expertise me semble plus précise et plus solide.

Quoi qu’il en soit, je vous remercie pour vos commentaires sur le travail accompli.

M. le président Mansour Kamardine. J’ai déposé un amendement à la recommandation n° 32, ayant reçu un avis favorable du rapporteur, ainsi rédigé : « Élaborer au niveau national un plan de réaction rapide, par territoire, en cas de survenue d’un événement du type “big oneˮ, avec calibrage d’une force de réaction rapide et d’un état-major opérationnel prédéfini. » Il s’agit de pouvoir réagir au niveau national en cas d’aléa ou de sinistre sur tel ou tel territoire.

La commission adopte l’amendement.

M. le président Mansour Kamardine. Avant de passer au vote sur le rapport, je vous rappelle que ceux qui souhaitent y apporter une contribution peuvent le faire jusqu’au mercredi 29 mai, dix-huit heures.

La commission adopte le rapport modifié à l’unanimité et autorise sa publication.

 

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   contributions des groupes politiques et des députés

Contribution du Rassemblement National sur le rapport de la commission d’enquête relative à la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d’outre-mer

Les députés du Rassemblement national tiennent à saluer l’organisation des travaux et remercient le Président et son rapporteur pour leur sérieux et leur implication. Ils remercient également les services de l’État, des secours et tous ceux collaborant avec les pouvoirs publics (EDF, Véolia) qui, par leur réactivité, ont permis d’atténuer les dégâts lors du passage du cyclone Belal sur l’île de la Réunion en janvier 2024. Les auditions représentatives de l’hétérogénéité des territoires ultra-marins et de leurs propres spécificités ont permis d’établir une vision panoramique sur une situation qui nous concerne tous : la protection des populations, de l’environnement, de notre économie. Au-delà de protéger, les conséquences représentent un coût annuel d’au moins 10 milliards d’euros selon le CNRS.

Alors que la France des Outre-mer contribue peu au dérèglement climatique, elle est la première touchée à cause de l’augmentation de l’intensité des phénomènes climatiques : risques volcaniques, sismiques, cycloniques, la montée des eaux ou encore la destruction de la richesse et la diversité des écosystèmes. Par leur situation géographique, ces territoires sont par nature plus exposés aux catastrophes naturelles. Cependant, cela ne peut être la seule cause des dégâts importants, comme l’illustre le cyclone Irma de 2017, touchant particulièrement les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. En effet, la partie française a subi des détériorations bien plus conséquentes que celle néerlandaise. Ce sinistre s’explique par plusieurs facteurs cumulatifs présents dans l’ensemble des territoires ultra-marins. Le Gouvernement, en concertation avec les autorités locales compétentes, peut considérablement améliorer la prévention des catastrophes naturelles.

Bien que des efforts soient déjà engagés, ils doivent être considérablement amplifiés. Les infrastructures étant vulnérables et inadaptées aux risques amplifient les dégâts matériels, entraînant des difficultés d’accès pour les services de secours. Au-delà de fluidifier l’assistance pour les victimes, la prise en compte des phénomènes climatiques dans la construction permet de développer l’économie, sans avoir sans cesse à tout reconstruire. La France ne doit pas s’interdire de s’inspirer de ce qui fonctionne à l’étranger, notamment au Japon. Malgré son exposition à plusieurs failles sismiques et la fréquence des chocs, les pertes humaines et matérielles sont faibles. Les constructions devraient obéir à des règles et normes strictes et adaptées afin de limiter les dommages en cas de risques naturels majeurs. Cependant, avec l’hétérogénéité des territoires ultra-marins, le Gouvernement, en partenariat avec les autorités locales compétentes, doit avoir une politique d’urbanisme et de construction dans l’anticipation et liée à une approche territoriale. Par ailleurs, à plusieurs reprises au cours des auditions, il est fait état d’une disparité́ entre la France métropolitaine et celle des territoires d’Outre-mer concernant l’assurance des habitations individuelles et des entreprises. Cette faible couverture assurantielle retarde la reconstruction.

L’État se doit de repenser sa stratégie en changeant de paradigme en développant celle de l’interaléas. Par cette approche, l’anticipation permettra une meilleure prise en compte de l’ensemble des risques. En lien avec les autorités locales, la communication et l’éducation sont essentielles pour que la population puisse avoir les réflexes adaptés. Développer une véritable « culture du risque » peut permettre à des vies d’être sauvées.

Lorsqu’une crise survient, les autorités gestionnaires de crise sont opérationnelles au niveau local par des communications régulières et la réactualisation des plans ORSEC. En revanche, elles ont peu de lien avec l’ensemble des ministères. Les relations étant bilatérales avec les ministères, il y a une perte d’efficacité.

L’utilisation des fonds, qu’ils soient nationaux ou européens, doit être revue en termes de simplification. À titre d’exemple, le fonds Barnier, créé en 1995, a pour objectif d’améliorer la sécurité des personnes face aux risques naturels et de réduire les dommages aux biens. Or, celui-ci est d’une complexité sans nom. Sa modernisation devient impérative. Enfin, avec la contribution conséquente de la France à l’Union européenne, il est tout à fait légitime que cette dernière octroie davantage de fonds européens aux territoires français d’Outre-mer dans le cadre du régime des Régions Ultrapériphériques de l’Union européenne (RUP).

Dans un certain nombre de départements, les hôpitaux atteignent un état de dénuement alarmant. À Mayotte, la situation est ingérable alors que cette île a de forts risques sismiques et cycloniques (voire tsunamiques). De l’aveu-même du directeur de l’ARS, en cas d’événement majeur, le bilan humain serait catastrophique. Mayotte disposant d’un système de santé « extrêmement déficitaire (...) et aura beaucoup de mal à répondre à des crises majeures », accentuée par la démographie explosive, un taux de pauvreté extrêmement haut, une immigration hors de contrôle et la présence de nombreux bidonvilles.

Aux Antilles, les infrastructures se portent mieux, bien qu’elles restent fragiles. L’un des problèmes principaux relève de l’accès à l’eau. Il n’est malheureusement pas à exclure le risque de priver d’eau potable une partie de la population au profit des patients en cas de catastrophe naturelle.

En Guyane, bien que les catastrophes naturelles soient limitées, il existe des risques connectés à l’environnement. Par exemple, les saisons sèches peuvent provoquer des crises hydriques, aggravées par le défaut d’entretien des canalisations, imputable à un manque de ressources des collectivités. Bien que le système de santé semble plus adapté, l’expansion démographique complique la mise à niveau de l’accueil dans ces infrastructures en raison d’un fort déficit de personnel. Depuis plusieurs années, les Antilles françaises sont confrontées au phénomène des algues Sargasses. Elles entraînent des conséquences pour la santé de l’Homme, de la faune et de la flore. Le gouvernement a fait se défausser l’état de ses responsabilités sur les collectivités locales. Au regard de la convention internationale de Montego Bay, signée par l’ONU en décembre 1982, les eaux territoriales sont de la responsabilité de l’état qui se doit d’y mettre les moyens financiers (comme ce fut le cas en Bretagne avec la création d’une mission interministérielle pour lutter contre les ravages des algues vertes) et d’amplifier la coopération internationale. Il conviendrait par ailleurs de réfléchir à une procédure d’étude de méthanisation de ces algues, les transformant ainsi en énergie verte.

Pour terminer, les associations de protection civile ont fait état d’un phénomène ubuesque. En effet, la Fédération nationale de protection civile explique qu’il peut y avoir du retard dans leur intervention à cause des demandes d’autorisations, des avions indisponibles, du matériel intransportable. Par ailleurs, les frais d’octroi de mer affectent financièrement les protections civiles.


Le Rassemblement national propose :

– Créer un grand ministère de Etat de la France des Outre-mer et de son domaine maritime

– Reconfigurer l’octroi de la mer

– Développer une politique de construction avec des règles et normes strictes et adaptées afin de limiter les dommages en cas de risques naturels majeurs et liée à une approche territoriale

– Changer de paradigme en passant d’une stratégie de réaction à une stratégie de prévention

– Développer la « culture du risque » dès le plus jeune âge

– Simplifier l’accès aux fonds nationaux et aux fonds européens

– Développer des infrastructures sanitaires (hôpitaux)

– Développer des infrastructures pour mener une politique d’accès à l’eau potable notamment à Mayotte et aux Antilles

– Lutter contre les algues Sargasses par la création d’une mission interministérielle destinée à faire prendre ses responsabilités à l’État

– Augmenter la couverture assurantielle des administrés et des entreprises

– Pallier au manque d’ingénierie (technique, administrative, financière) par le développement d’une offre de formation dans les universités des territoires ultramarins et créer des filières de métiers spécifiques.

 

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   liste des personnes auditionnées – DéPLACEMENTS

I.   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNéES

Les comptes rendus des auditions sont consultables à l’adresse suivante :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/organes/autres-
commissions/commissions-enquete/ce-risques-naturels-
outre-mer/documents?typeDocument=crc

Les auditions sont présentées dans l’ordre chronologique des réunions de la commission d’enquête.

1er février 2024

– Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC groupe 2) : M. Gonéri Le Cozannet, direction risques et prévention, Unité risques côtiers et changement climatique, Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et Mme Annamaria Lammel, professeur émérite à l’Université Paris 8, directrice de recherche au laboratoire Paragraphe (EA 3898)

– Institut de recherche pour le développement (IRD) : MM. Philippe Charvis, directeur délégué à la science et Frédéric Ménard, conseiller scientifique Outre‑mer

– Institut de physique du globe de Paris (IPGP), Université Paris Cité : M. Jean‑Christophe Komorowski, responsable scientifique des Observatoires volcanologiques et sismologiques, et responsable du Service national d’observation en volcanologie (CNRS‑INSU), Mme Anne le Friant, directrice adjointe en charge des observatoires, M. Arnaud Lemarchand, directeur adjoint en charge de l’instrumentation et Mme Jordane Corbeau, directrice adjointe, Observatoire volcanologique et sismologique de Martinique

– Centre national de recherche scientifique (CNRS) : MM. Alain Schuhl, directeur général délégué à la science, Stéphane Guillot, directeur‑adjoint scientifique de l’Institut national des Sciences de l’Univers du CNRS, Domaine Terre Solide, Patrick Allard, directeur de recherche CNRS émérite à l’Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP), Thomas Borel, responsable des affaires publiques

– Office français de la biodiversité (OFB) : M. Jean‑Michel Zammite, directeur des Outre‑mer


8 février 2024

– Centre d’études et d’expertise sur les risques, la mobilité et l’aménagement (CEREMA) : M. Sébastien Dupray, directeur risques eaux et mer, et Mme Séverine Bes de Berc, directrice territoriale outre‑mer

– Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) : MM. Christophe Poinssot, directeur général délégué, directeur scientifique, Karim Ben Slimane, directeur risques et prévention et Jean‑Marc Mompelat, directeur des actions territoriales

– Météo‑France : Mme Sophie Martinoni‑Lapierre, directrice de la climatologie et des services climatiques

 Audition conjointe

● Croix-Rouge française* : M. Florent Vallée, directeur délégué de l’urgence et des opérations, Mme Gaëlle Nebard, directrice nationale outre‑mer, et M. Alain Rissetto, administrateur, président de la commission « mobilisation face aux crises »

● Fédération nationale de protection civile (FNPC) : MM. François Richez, président national et François‑Xavier Volot, directeur général

12 février 2024

 Table ronde « Préparation et réponse du système de santé aux risques naturels majeurs en outre-mer » :

● Agence régionale de santé de la Guyane : M. Dimitri Grygowski, directeur général

● Agence régionale de santé de Mayotte : M. Olivier Brahic, directeur général

● CHU de la Guadeloupe : M. Éric Guyader, directeur général et Dr Bruno Jarrige, chef de pôle et chef de service du RISSQ (service qualité, gestion des risques, vigilances)

● CHU de La Réunion : M. Richard Rouxel, directeur général adjoint et Dr Frédéric Nativel, chef de service du SAMU

 Table ronde d’opérateurs de réseaux

● Électricité de France (EDF)* : M. Jean-François Finck, directeur de cabinet d’EDF-SEI

● VEOLIA* : M. Olivier Grunberg, directeur général délégué, secrétaire général Veolia Eau France

● France Télévisions* : Mme Sylvie Gengoul, directrice du pôle outre‑mer et M. Thierry Jacob, directeur des moyens et du développement du pôle outre‑mer

● ORANGE* : MM. Philippe Roquelaure, délégué régional Antilles, Daniel Ramsamy, délégué régional Mayotte‑Réunion, Luc Bestory, directeur de la sécurité, de la privacy et de l’infogérance sur Antilles‑Guyane et Mme Claire Chalvidant, directrice adjointe des affaires publiques

*

– Banque des territoires : M. Hervé Tonnaire, directeur délégué aux outre‑mer, directeur régional Pacifique, Mmes Giulia Carre, directrice des relations institutionnelles et Selda Gloanec, conseillère relations institutionnelles

15 février 2024

 Table ronde « Bilan de la gestion de l’ouragan Irma et de la reconstruction à SaintMartin et SaintBarthélemy »

● Croix-Rouge* de Saint-Martin : Mme Ketty Karam, présidente de la délégation territoriale

● M. Bruno Magras, ancien président de la collectivité de Saint‑Barthélemy (2007‑2022)

 Table ronde « Coopération avec le voisinage  Océan Indien »

● Ambassade de France à Maurice : M. Marc Mertillo, Premier Conseiller

● Agence française de développement (AFD)*, direction régionale Océan Indien : Mme Patricia Aubras, directrice régionale

● Commission de l’océan Indien (COI) : M. Vêlayoudoum Marimoutou, secrétaire général

● Plateforme d’intervention régionale de l’Océan Indien (PIROI) : M. Christian Pailler, chef de délégation régionale Amériques‑Caraïbes

 Table ronde « Coopération avec le voisinage  Océan Atlantique »

● Agence française de développement (AFD) : M. Marc Dubernet, directeur régional océan Atlantique

● Croix-Rouge française* - Plateforme d’intervention régionale pour la zone Amérique Caraïbes (PIRAC) : M. Jérémie Sibeoni, chef de délégation régionale

● M. Roland Dubertrand, ambassadeur chargé de coopération régionale dans la zone Atlantique

22 février 2024

 Table ronde Saint-Martin et Saint-Barthélémy  Volet État

● Préfecture de Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin : M. Fabien Sésé, secrétaire général

● Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL) de Saint-Barthélemy et Saint-Martin : Mme Sabrina d’Habit, adjointe au chef d’unité territoriale

● Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL) de la Guadeloupe : Mme Catherine Perrais, directrice adjointe

● Service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de Guadeloupe – M. le contrôleur général Félix Anténor‑Habazac, directeur

● Service territorial d’incendie et de secours (STIS) de Saint‑Barthélemy : M. le lieutenant-colonel Christophe Laurens, responsable

 Table ronde « SaintMartin et SaintBarthélémy  Volet collectivités »

● Collectivité de Saint-Martin : M. Louis Mussington, président et Mme Mélodie Illidge, directrice des risques majeurs

● Collectivité de Saint-Barthélemy : M. Xavier Lédée, président

 Table ronde d’universitaires

● Mme Stefanie Defossez, maître de conférences en géographie à l’université Paul-Valéry-Montpellier 3

● M. Tony Rey, professeur de géomorphologie à l’université Paul Valéry Montpellier 3, membre du laboratoire de géographie et d’aménagement de Montpellier.

 Collectivité de Saint Martin

● M. Daniel Gibbs, ancien président de la collectivité de Saint‑Martin (2017‑2022)


26 février 2024

 Tableronde « Assurer face aux risques naturels en outremer »

● Fédération nationale des syndicats d’agents généraux d’assurance (AGÉA)* : Dr. Julien Arnoult, responsable des études et des relations institutionnelles et secrétaire du groupe de travail sur le climat

● Caisse centrale de réassurance (CCR) : M. Édouard Vieillefond, directeur général, M. Antoine Quantin, directeur des réassurances, conseil et modélisation et Mme Rose‑Marie Tunier, directrice de la communication et des affaires publiques

 Table ronde « Le logement face aux risques naturels en outre-mer »

● Union sociale pour l’habitat (USH)*: M. Jérémy Ferrari, responsable de département transition et résilience du parc, MM. Brayen Sooranna, directeur outre‑mer et Alban Charrier, directeur adjoint, direction de la maîtrise d’ouvrage et des politiques patrimoniales

● Action logement*, direction outre-mer : MM. Ibrahima Dia, directeur et Vincent Bretin, directeur Territoire

● Union sociale pour l’habitat outre‑mer (USHOM) : Mme Sabrina Mathiot, directrice

● Fédération française du bâtiment (FFB)* : M. Stéphane Brossard, président de la commission technique de la Fédération réunionnaise du bâtiment et des travaux publics

 Table ronde « Bilan de la gestion d’Irma et de la reconstruction à SaintMartin et SaintBarthélemy »

● Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée (2015–2018)

● M. Philippe Gustin, préfet, ancien délégué interministériel pour la reconstruction des îles de Saint‑Barthélemy et de Saint‑Martin (2018‑2019)

29 février 2024

 Table ronde « Coopération avec le voisinage  Océan Pacifique »

● Mme Véronique Roger‑Lacan, ambassadrice de France pour le Pacifique, à Nouméa

● Agence française de développement (AFD), direction régionale océan Pacifique : Mme Virginie Bleitrach, directrice

● Communauté du Pacifique, Mme Anne‑Claire Goarant : responsable de projets, programme durabilité environnementale et changement climatique

● Bureau des nations unies pour la rééducation des risques de catastrophes (UNDRR) : Mme Gabrielle Emery, cheffe de la sous‑antenne du Pacifique, Mme Diana Mosquera Calle, cheffe adjointe du bureau régional Asie‑Pacifique (traduction) et Mme Vanessa Buchot, chargée des relations extérieures

 Table ronde « Connaissance, surveillance et identification des risques les Antilles »

● Méteo‑France, direction interrégionale : M. Emmanuel Cloppet, directeur Antilles‑Guyane

● Observatoire volcanologique et sismologique de Martinique et de Guadeloupe (OVSM‑OVSG) : M. Ivan Vlastelic, directeur en Guadeloupe et M. François Beauducel, ancien directeur par intérim en Martinique

● Bureau de recherche géologiques et minières (BRGM) : M. Jean‑Marc Mompelat, directeur des actions territoriales

 Table ronde « Guadeloupe  Volet État »

● M. Xavier Lefort, préfet de Guadeloupe

● Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Guadeloupe (DEAL 971) : M. Olivier Kremer, directeur

● Service territorial d’incendie de secours de Guadeloupe (SDIS 971) : Colonel Frédéric Lhomme, directeur‑adjoint et Lieutenant‑colonel Joël Condo, responsable opérationnel

4 mars 2024

 Table ronde « Martinique  Volet État »

● Préfecture de la Martinique : M. Jean‑Christophe Bouvier, préfet et Mme Amélie de Sousa, sous‑préfète en charge de la prévention des risques

● État‑major interministériel de la zone de défense et de sécurité des Antilles (EMIZA) : Lieutenant-colonel Daniel Polinacci, chef de l’état‑major interministériel de la zone Antilles

● Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de la Martinique (DEAL 972) : Mme Véronique Lagrange, directrice‑adjointe

● Service départemental d’incendie et de secours de la Martinique (SDIS 972) : Colonel Patrick Tyburn, directeur et Colonel Christophe Digirolamo, directeur adjoint


 Table ronde « Martinique  Volet élus et associatif »

● Collectivité territoriale de la Martinique : M. Fernand Odonnat, président de la commission aménagement du territoire, grands travaux, transports, infrastructures et risques majeurs

● Association départementale de protection civile : Mme Line Rose Arrouvel, présidente et M. Gregory Gevar, secrétaire général

● Université populaire et de la prévention : M. Albéric Marcelin, président et Mme Marise Vallée, vice‑présidente

● Croix-Rouge française de Martinique : Mme Olympe Francil, directrice régionale

7 mars 2024

 Table ronde « Guyane »

● M. Antoine Poussier, Préfet de la Guyane

● M. Ludovic Marcelius, chef du service prévention des risques et industries extractives, direction générale des territoires et de la mer

● Service départemental d’incendie et de secours de la Guyane (SDIS 973) : Colonel Jean‑Paul Levif, chef du corps des sapeurs-pompiers

● Collectivité territoriale de Guyane : MM. Jean‑Paul Fereira, premier vice‑président et Frédéric Blanchard, directeur biodiversité

11 mars 2024

 Table ronde « Forces armées »

● Forces armées en Guyane (FAG) : Général de division aérienne Marc Le Bouil, commandant supérieur, commandant de la base de défense de Guyane

● Forces armées aux Antilles (FAA) : Contre‑amiral Nicolas Lambropoulos, commandant supérieur

● Forces armées dans la Zone-sud de l’océan Indien (FAZSOI) : Général de brigade Jean‑Marc Giraud, commandant supérieur


 Table ronde « La recherche en sciences humaines et les risques naturels »

● Mme Maud Devès, chercheuse, Université Paris Cité

● M. Samuel Étienne, directeur d’études, École pratique des hautes études, (EPHE)‑Université PSL

 Table ronde des syndicats de MétéoFrance

● Syndicat national des ingénieurs et techniciens de la météorologie (SNITM‑FO) : M. Serge Taboulot, membre de la commission exécutive

● Solidaires-Météo : MM. Camille Cordeau, prévisionniste à Météo‑France, direction Antilles‑Guyane Centre météorologique du Raizet, Guadeloupe et Tarik Kriat, prévisionniste‑cyclone à la DIROI au centre météorologique de la Réunion, au Chaudron à Sainte‑Clotilde

 Table ronde « Polynésie française – Volet État »

● Haut-commissariat de la République en Polynésie-française : Mme Emilia Havez, directrice de cabinet

● Direction de la protection civile rattachée au cabinet du Haut‑commissaire, direction de la défense et de la protection civile en charge des services d’incendie et de secours : M. Cédric Rigollet, directeur adjoint de la protection civile

● Météo‑France Polynésie française : MM. Alain Soulan, directeur général adjoint et Philippe Frayssinet, directeur interrégional Polynésie Française

● Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) : M. Jean‑Marc Mompelat, directeur délégué à l’outre-mer, direction des actions territoriales


14 mars 2024

– Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), Ministère de l’Intérieur : M. Julien Marion, directeur général, Mmes Catherine Haller, cheffe du bureau de la planification des exercices et des retours d’expérience, Clémence Lecoeur, directrice de cabinet, Colonel Sébastien Jaudon, conseiller sécurité intérieure, Mme Marilie Tison‑Grosrichard, bureau de la planification des exercices et retours d’expérience

 Table ronde d’associations d’élus

● Association des communes et collectivités d’outre-mer (ACCD’OM) : M. Jean‑Claude Maes, président, Mme Laetitia Malet, déléguée générale adjointe

● Association des maires de France (AMF) : M. Ferdy Louisy, maire de Goyave, Mmes Pauline Delaere-Papin, conseillère outre-mer et ruralité, Stéphanie Bidault, chargée de mission prévention des risques, Charlotte De Fontaines, chargée des relations avec le Parlement et Valérie Sene, directrice du Parc National de la Guadeloupe

● Départements de France : Mme Sophie Arzal, vice‑présidente du département de La Réunion et présidente du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours, MM. Jean‑Baptiste Estachy, conseiller sécurité DF et Brice Lacorieux, conseiller relations avec le Parlement et M. Frédéric Guhur, directeur général‑adjoint, pôle développement du département de La Réunion

*

– Direction générale de la prévention des risques (DGPR), Mission de pilotage des politiques publiques de prévention et de gestion des risques naturels en outre-mer (MAPPPROM) : M. Cédric Bourillet, directeur général de la prévention des risques et délégué aux risques majeurs

18 mars 2024

 Table ronde « NouvelleCalédonie  Volet gouvernement et élus locaux »

● Direction de la sécurité civile et de la gestion des risques (DSCGR), Gouvernement calédonien : Général Frédéric Marchi‑Leccia, directeur

● Service départemental d’incendie et de secours (SDIS) : Commandant Géraldine Bourgoin, directrice

● Association française des Maires de Nouvelle‑Calédonie (AFM‑NC) : M. Pascal Vittori, maire de Bouloupari

● Association des maires de Nouvelle­Calédonie (AMNC) : Mme Prisca Holero, maire de Sarraméa, commune adhérente au SIVM SUD, secrétaire de l’AMNC et M. Wilfried Weiss, maire de Koumac, président du SIVM NORD

 Table ronde « NouvelleCalédonie  Volet État »

● Haut‑commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie : M. Louis Le Franc, haut‑commissaire

● État-major interministériel de zone de défense et de sécurité (EMIZ) : Lieutenant‑colonel Alexandre Carrat, chef de bureau

● Direction du service de l’État de l’agriculture, de la forêt et de l’environnement (DAFE) : M. Pragash Eganadane, directeur

● Météo‑France, direction interrégionale, Nouvelle-Calédonie et Wallis et Futuna : M. Frédéric Atger, directeur

*

– Direction générale des outre-mer (DGOM), Ministère de l’Intérieur et des outre-mer : Préfet Olivier Jacob, directeur général

– Mmes Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS et Mme Annabelle Moatty, géographe et chercheuse au CNRS

– France Assureurs : Mme Florence Lustman, présidente, Mme Marie‑Anne Ballotaud, directrice de cabinet de la présidente et M. Arnaud Giros, responsable Affaires parlementaires et gouvernementales

21 mars 2024

 Table ronde « SaintPierreetMiquelon »

● Préfecture de Saint-Pierre-et-Miquelon : Mmes Hélène Hargitai, sous‑préfète et Sandrine Montané, directrice des services du cabinet du Préfet

● Service territorial d’incendie et de secours (DIS 975) : Capitaine Guillaume Geay, directeur, chef du service interministériel de sécurité civile

● Direction des territoires, de l’alimentation et de la mer (DTAM 975) : Mme Patricia Bourgeois, directrice et M. Philippe Testard, directeur adjoint

● Collectivité territoriale de Saint‑Pierre‑et‑Miquelon : M. Yannick Abraham, 1er vice‑président du conseil territorial

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– M. Frédéric Mortier, ancien délégué interministériel aux risques majeurs outre‑mer

 Table ronde « Polynésie française  Volet Collectivité et Élus »

● Gouvernement de la Polynésie française : M. Virau Tuterai, chargé d’affaires de la cellule Eau, direction de l’environnement (DIREN)

● Mairie de Punaauia : MM. Simplicio Lissant, maire, Nicolas Bertholon, 2ème adjoint au maire, Taimana Ellacott, directeur de cabinet du maire, Raimoana Anding, directeur du développement urbain (DST) et Mme Nanihi Bertrand, cheffe du service études et aménagements (SEA)

4 avril 2024

– Mmes Sylvie Gustave Dit Duflo, vice‑présidente du Conseil régional de la Guadeloupe, Monique Apat, directrice générale adjointe des infrastructures et du cadre de vie, Maeva Govindin, cheffe du service biodiversité et risques majeurs

– Secrétariat général à la planification écologique : M. Joseph Hajjar, directeur de programme climat

– M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

11 avril 2024

– M. Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre‑mer

 

 

 

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


II.   déplacements

Du 26 au 29 mars 2024

Déplacement d’une délégation de la commission d’enquête

à Mayotte et La Réunion

 

Composition de la délégation :

– M. Mansour Kamardine, président

– M. Guillaume Vuilletet, rapporteur

 

Déplacement à Mayotte

26 mars 2024

– Entretien avec les services de l’État :

● M. François-Xavier Bieuville, préfet de Mayotte

● M. Aurélien Diouf, directeur de cabinet

● M. Bruno Jean-Elie, directeur par intérim du SDIS

● M. Christophe Trolle, directeur adjoint de la DEALM

 

– Entretien et visite de la commune de Bouénie :

● M. Mouslim Abdourahaman, maire

● M. Hadel Laou Madi, directeur général des services

● M. Abdoulatuf Abaine, directeur de cabinet

● M. Omar Abdou, responsable des services techniques

● Mme Raoudhoiti Said Ali, chargée d’opération

● Fédération mahoraise des associations environnementales (FMAE)


27 mars 2024

– Entretien et visite avec Mme Ludivine Sadeski, directrice régionale Mayotte du BRGM

– Entretien avec M. Sandou Atoumani, conseiller départemental de Mayotte

– Entretien avec la direction de l’aéroport de Dzaoudzi :  M. Jonathan Lacombe, directeur de l’aéroport et Mme Solène Boucharinc, directrice support et RCC

Déplacement à La Réunion

28 mars 2024

– Entretien avec les services de l’État :

● M. Jérôme Filippini, préfet

● Mme Parvine Lacombe, directrice de cabinet

● Contrôleur général Éric Faure, chef d’état-major interministériel de zone

● M. Michael Mathaux, sous‑préfet de Saint‑Benoît

● M. Dominique Charzat, directeur régional d’EDF

● M. Gérard Cotellon, directeur général de l’ARS

● Mme Céline Jauffret, directrice interrégionale de Météo-France pour l’océan Indien

● Colonel Frédéric Leguillier, directeur du SDIS

● M. Nicolas Miramond, responsable du service développement et aménagement du territoire à la direction régionale de l’ONF

● M. Julien Renzoni, chef du service prévention des risques naturels et routiers de la DEAL

● Direction de l’alimentation de l’agriculture et de la forêt

Avec la participation de Mme Nathalie Bassire, députée de la 3ème circonscription de La Réunion, membre de la commission d’enquête.


– Entretiens et visite au collège Plateau Caillou :

● M. Jean Bernard Bonne, principal

● M. Emmanuel Ménard, inspecteur d’académie, inspecteur pédagogique régional de SVT

● Mme Nathalie Rostaing, professeure de SVT

● Mme Zoé Trévisan, responsable risques et catastrophes à la PIROI

● Mme Claire‑Marie Villevieille, chargée de mission à la PIROI

En présence de Mme Karine Lebon, députée de la 2ème circonscription de La Réunion

 

– Entretien avec M. Fabrice Hoarau, vice-président du conseil régional chargé de l’environnement

– Entretien avec M. Cyrille Melchior, président du conseil départemental de La Réunion

 

29 mars 2024

– Entretien et visite de la centrale hydraulique EDF de la rivière de l’Est à SainteRose :

● M. Dominique Charzat, directeur régional

● M. Rémi Ganière, chef du service production

● Déjeuner de travail sur le volcanisme à La Réunion

● M. Michael Mathaux, sous-préfet de Saint‑Benoît

● Mme Aline Peltier, directrice de l’observatoire volcanique du Piton de la Fournaise

● M. Philippe Kowalski, directeur adjoint de l’observatoire volcanique du Piton de la Fournaise


– Entretien et visite à Salazie :

● Mme Sidoleine Papaya, maire

● M. Michael Mathaux, sous‑préfet de Saint‑Benoît

● M. Julien Renzoni, chef du service prévention des risques naturels et routiers de la DEAL

● Mme Ingrid Girardeau, directrice régionale du BRGM à La Réunion

● M. Bertrand Aunay, chef de projet à la direction régionale du BRGM de La Réunion

 

 

*

*     *

 


([1]) Le changement climatique n’a pas d’impact démontré sur les risques sismiques et volcaniques.

([2]) D’après le modèle de prévision « Arpege-Climat » de Météo-France.

([3]) Longueville et al., « Impacts du changement climatique sur différents paramètres physiques en Guyane : caractérisation et projection – GuyaClimat », BRGM, 2022.

([4]) Rapport d’étude du Cerema, « Projection du trait de côte et analyse des enjeux au niveau national », février 2024.

([5]) Articles 236 à 251 de la loi n° 2021‑1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

([6]) Articles L. 562‑1 et suivants du code de l’environnement. Ces plans réglementent l’utilisation des sols en fonction de leur degré d’exposition connu à un ou plusieurs risques naturels majeurs.

([7]) Article 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer.

([8]) Rapport de l’Inspection générale des finances, « Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’outre-mer », janvier 2020.

([9]) Langreney et al. « Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques », avril 2024.

([10]) Même si cette éruption phréatique n’a pas entraîné de dégâts particuliers, elle est à l’origine d’une vive polémique entre le volcanologue Haroun Tazieff et le directeur de l’IPG, Claude Allègre, qui illustre les incertitudes scientifiques entourant un tel phénomène. Si l’éruption n’eut pas de conséquences sur la population, il en va différemment de l’évacuation de 70 000 personnes ordonnée par le préfet sur les conseils de Claude Allègre, à savoir la paupérisation totale de la région autour de Basse-Terre, avec le déplacement de la préfecture sur Pointe-à-Pitre. https://www.liberation.fr/societe/1998/02/06/duel-au-dessous-de-la-soufriere_229081/.

([11]) Rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et de l’Inspection générale des finances (IGF), « Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’outre-mer », janvier 2020.

([12]) M. Jean-Michel Zammite, directeur « Outre-mer » de l’OFB, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([13]) Organisation météorologique mondiale, « Atlas de la mortalité et des pertes économiques dues à des phénomènes météorologiques, climatiques et hydrologiques extrêmes (19702019) », 2021.

([14]) Les données de la sinistralité sont rassemblées par la Caisse centrale de réassurance ; elles couvrent les dommages liés aux événements qui ont fait l’objet d’une reconnaissance en tant que « catastrophe naturelle ».

([15]) Voir le rapport d’information déposé en application de l’article 146‑3 du règlement, par le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la prise en compte du retrait-gonflement des argiles (Mmes Sandra Marsaud et Sandrine Rousseau).

([16]) M. Emmanuel Cloppet, directeur Antilles-Guyane, Météo‑France, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([17]) La différence entre un cyclone et une dépression se mesure à l’intensité du vent : plus de 118 kilomètres par heure en moyenne sur dix minutes près du centre de la dépression pour un cyclone.

([18]) MM. Alain Soulan, directeur général-adjoint et Philippe Frayssinet, directeur interrégional à Météo-France Polynésie française, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([19]) M. Louis Le Franc, haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([20]) L’importance d’un séisme est généralement caractérisée par sa magnitude mesurée par l’échelle de Richter. Cette échelle a été établie en 1935 par le géologue américain Charles Francis Richter. Elle traduit l’énergie libérée par le séisme. Un séisme de magnitude inférieur à 2 n’est pas ou peu ressenti par les humains. À partir de 4, le séisme est nettement ressenti mais ne cause généralement pas de dégâts matériels. À partir de 5, les tremblements sont fortement ressentis et peuvent causer de premiers dégâts selon la nature des terrains et les modes de construction des habitations.

([21]) Les phénomènes associés à l’activité non-magmatique dite phréatique incluent des explosions verticales et latéralement dirigées, des retombées de cendres et de blocs, des écoulements pyroclastiques non-magmatiques, des coulées de boue, du dégazage acide pouvant contaminer l’environnement. Les éruptions non-magmatiques majeures peuvent également engendrer des effondrements partiels de l’édifice et la mise en place d’avalanche de débris sur quelques kilomètres de distance. Source : site de l’Observatoire volcanologique et sismologique de la Guadeloupe (OVSG-IPGP).

([22]) Ce réseau est opéré par l’IPGP avec le soutien du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et est sous la responsabilité de l’observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise (OVPF-IPGP) et de la direction régionale du BRGM à Mayotte.

([23]) Revue du BRGM, « Les géosciences au cœur des enjeux de demain », octobre 2019.

([24]) D’après M. Emmanuel Cloppet, directeur Antilles-Guyane, Météo-France, audition du jeudi 29 février.

([25]) Projet porté par l’IRD, l’AFD et Météo-France visant à produire des simulations climatiques à haute résolution pour l’ensemble du Pacifique Sud avec un focus sur trois fenêtres spatiales spécifiques (Vanuatu et Nouvelle‑Calédonie, Wallis‑et‑Futuna, Polynésie française).

([26]) C. Dutheil et al. « Fine-scale rainfall over New Caledonia under climate change », Clim Dyn, volume 56, 2021.

([27]) M. Gonéri Le Cozannet, membre du Giec, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([28]) M. Stéphane Guillot, directeur-adjoint scientifique au CNRS, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([29]) Projet de recherche collaboratif du programme opérationnel FEDER&FSE 2014‑2020, porté par un consortium d’experts du monde scientifique et opérationnel (Université des Antilles, Université Paul Valéry Montpellier 3, CNRS, IRD, Météo-France, BRGM).

([30]) Rapport d’étude du Cerema, « Projection du trait de côte et analyse des enjeux au niveau national », février 2024.

([31]) Ordonnance n° 2022‑489 du 6 avril 2022 relative à l’aménagement durable des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte.

([32]) Rapport IGEDD‑IGA, « Financement des conséquences du recul du trait de côte. Comment accompagner la transition des zones littorales menacées ? », novembre 2023.

([33]) Direction générale de la prévention des risques, réponse écrite à la commission d’enquête.

([34]) M. le ministre Christophe Béchu, audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024.

([35]) M. Brayen Soorana, directeur outre-mer à l’Union sociale pour l’habitat (USH), audition de la commission d’enquête du 26 février 2024.

([36]) Direction générale des outre-mer (Dgom) du ministère de l’Intérieur, réponse écrite à la commission d’enquête.

([37]) Le PITE (programme 162) met à la disposition des acteurs locaux une enveloppe budgétaire unique, elle-même financée par plusieurs programmes ministériels, qui ont vocation à concourir à la mise en œuvre de l’action. Certaines mesures du plan Sargasses II ne sont pas incluses dans l’action du PITE car elles sont gérées par des entités spécifiques ; c’est le cas du fonds d’intervention maritime (FIM), de la dotation d’équipement des territoriaux ruraux (DETR) ou de l’Agence nationale de la recherche (ANR).

([38]) M. Jean-Claude-Maes, président de l’association des communes et collectivités d’outre-mer, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([39]) M. Jean-Paul Fereira, premier vice‑président de la collectivité territoriale de Guyane, audition de la commission d’enquête du jeudi 7 mars 2024.

([40]) M. Joseph Hajjar, directeur du programme climat au Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024.

([41]) Évaluation à mi-parcours du PNACC‑2 (2018‑2021), Ministère de la transition écologique.

([42]) M. Frédéric Ménard, conseiller scientifique outre-mer à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([43]) Créée en 1999, l’Ifrecor est la déclinaison nationale de l’Initiative internationale pour les récifs coralliens (ICRI).

([44] Tramis et al. « La relocalisation, une stratégie d’adaptation aux risques côtiers : les leçons tirées des projets aux Antilles françaises », Études caribéennes, 53, décembre 2022.

([45]) Mme Sophie Martinoni-Lapierre, directrice de la climatologie et des services climatiques à Météo‑France, audition de la commission d’enquête du jeudi 8 février 2024.

([46]) Ibid.

([47]) Table ronde « Connaissance, surveillance et identification des risques dans les Antilles », jeudi 29 février 2024.

([48]) Ibid.

([49]) M. Patrick Allard, directeur de recherche CNRS émérite à l’Institut de physique du globe de Paris (IPGB), audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([50]) Le radar de Tiebaghi, dans le nord de la Grande Terre, a été détruit en 2019 par le cyclone Oma.

([51]) Le radar actuellement installé sur l’île de Moorea en Polynésie française fournirait un niveau de services très insuffisant.

([52]) Le syndicat Solidaires‑Météo a indiqué qu’il n’existait pas de budget propre à chaque direction interrégionale, hormis des budgets de fonctionnement qui ne prennent pas en compte la masse salariale, les achats et les coûts d’entretien des équipements.

([53]) M. Patrick Allard, directeur de recherche CNRS émérite à l’Institut de physique du globe de Paris (IPGB), audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([54]) BRGM, audition de la commission d’enquête du jeudi 8 février 2024.

([55]) Centre national de la recherche scientifique (CNRS), réponse écrite à la commission d’enquête.

([56]) Instauré par la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 relative à l’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles qui a également créé le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, dit « cat nat ».

([57]) Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL) de la Martinique, audition de la commission d’enquête du lundi 4 mars 2024.

([58]) DEAL de la Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([59]) Protocole d’accord portant sur le contrôle des règles de construction signé entre le Préfet de la Réunion et les Procureurs de la République de Saint-Denis et Saint-Pierre, le 23 août 2012.

([60]) Mairie de Punaauia, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([61]) Pour aller plus loin : L. Stahl, « Les défis présents et à venir des plans de prévention des risques naturels polynésiens », Études caribéennes, 43, décembre 2018.

([62]https://experience.arcgis.com/experience/ac657f4c4a034a25b3aa962e15ad14de/?draft=true.

([63]) Rapport d’observations définitives de la chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie, « La politique de sécurité civile dans le domaine des risques climatiques majeurs », mars 2024.

([64]) M. Louis Le Franc, haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([65]) Ibid.

([66]) Ce prélèvement était défini au II de l’article L. 561‑3 du code de l’environnement ; ces dispositions ont été abrogées par la loi n° 2020‑1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

([67]) Le décret n° 2021-516 du 29 avril 2021 portant abrogation de certaines dispositions relatives à la prévention des risques naturels majeurs en a tiré les conséquences en supprimant les articles R. 561‑1 et R. 561‑10 du code de l’environnement relatifs au caractère extrabudgétaire du fonds, lesquels prévoyaient notamment que sa gestion comptable et financière était assurée par la caisse centrale de réassurance.

([68]) La donnée n’est pas disponible pour Mayotte.

([69]) Le décret n° 2021-516 du 29 avril a également apporté des simplifications à la procédure d’expropriation des biens exposés à un risque naturel prévue à l’article L. 561-1 du code de l’environnement en chargeant le préfet de la piloter et en supprimant l’obligation d’en référer aux autorités ministérielles.

([70]) Conseil général de l’environnement et du développement durable, rapport n° 012883‑01 « Rapprocher légitimité et légalité : vers l’abolition des cinquante pas géométriques aux Antilles », janvier 2020.

([71]) Table ronde d’associations d’élus, jeudi 14 mars 2024.

([72]) M. Samuel Étienne, directeur d’études à l’École pratique des hautes études, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([73]) Article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 : « Constituent un habitat indigne les locaux ou les installations utilisés aux fins d’habitation et impropres par nature à cet usage, ainsi que les logements dont l’état, ou celui du bâtiment dans lequel ils sont situés, expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé. »

([74]) Fondation Abbé Pierre, « Agir contre le mal-logement dans les départements et territoires d’outre-mer », 2023.

([75]) Cour des comptes, « Le logement dans les départements et régions d’outre-mer », Rapport public thématique, septembre 2020.

([76]) Évaluation commandée par la direction générale des outre-mer sur la mise en œuvre de la loi n° 2011‑725 du 23 juin 2011, juillet 2022.

([77]) Article 227 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

([78]) L’action 2 du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » contribue également au PSA à hauteur de 6,6 millions d’euros depuis 2020 ; depuis 2023, le fonds outre-mer (action 9 du programme 123) est également mobilisé via l’Agence française du développement (AFD).

([79]) Direction générale des outre-mer, réponse écrite à la commission d’enquête.

([80]) L’article 2 de l’arrêté du 22 octobre 2010 relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux bâtiments de la classe dite « à risque normal » précise ces quatre catégories d’importance.

([81]) La répartition des communes entre les cinq zones de sismicité est notamment précisée à l’article D. 563-8-1 du code de l’environnement.

([82])https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Guide%20CPMI%20EC8%20-%20Z5-min.pdf.

 

([83]) https://www.cerema.fr/fr/actualites/cerema-forme-futurs-controleurs-regles-construction.

([84]) M. Frédéric Mortier, ancien délégué interministériel aux risques majeurs outre-mer, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([85]) Ibid.

([86])  https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/GP-Guide%20de%20bonnes%20pratiques_IRMAV03_24.05.2018_VF_BD.pdf

 

([87]) Les types de travaux concernés sont précisés par l’arrêté du 23 septembre 2021 établissant la liste des types de travaux de réduction de la vulnérabilité aux inondations éligibles au fonds de prévention des risques naturels majeurs, dans le cadre d’un programme d’action de prévention des inondations.

([88]) Mme Séverine Bès de Berc, directrice territoriale « Outre-mer » au Centre d’études et d’expertise sur les risques, la mobilité et l’aménagement (Cerema), audition de la commission d’enquête du jeudi 8 février 2024.

([89]) M. Emmanuel Cloppet, directeur Antilles-Guyane, Météo-France, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([90]) M. Bruno Magras, ancien président de la collectivité de Saint-Barthélemy, audition de la commission d’enquête du jeudi 15 février 2024.

([91]) M. Xavier Lefort, préfet de Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([92]) Mme Maud Devès, maître de conférences à l’Université Paris Cité, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([93]) Mme Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([94]) Ibid.

([95]) M. Olivier Brahic, directeur général de l’ARS Mayotte, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([96]) M. Antoine Poussier, préfet de Guyane et M. Jean-Paul Fereira, premier vice-président de la collectivité territoriale de Guyane, audition de la commission d’enquête du jeudi 7 mars 2024.

([97]) Table ronde d’élus et de représentants de collectivités de la Polynésie française, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([98]) Direction générale de l’outre-mer, réponse écrite à la commission d’enquête.

([99]) Article 241 de la loi « 3DS » ;décret n° 2023-272 du 14 avril 2023 relatif à la formation de sensibilisation aux risques naturels dont bénéficient les agents publics exerçant en outre-mer.

([100]) Articles L. 4823‑1 et L. 4823‑2 du code du travail ; décret n° 2023‑333 du 3 mai 2023 relatif à la sensibilisation des travailleurs aux risques naturels majeurs en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna.

(3) Au Japon, une journée des catastrophes naturelles est organisée annuellement, depuis le dévastateur et meurtrier tremblement de terre du Kanto, le 1er septembre 1923.

([101]) Mme Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([102]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([103]) Ibid.

([104]) Annabelle Moatty, Delphine Grancher, Clément Virmoux and Julien Cavero, « Bilan humain de l’ouragan Irma à Saint-Martin : la rumeur post-catastrophe comme révélateur des disparités socioterritoriales », Géocarrefour [Online], 93/2 | 2019. https://tirex.univ-montp3.fr/publi/geocarrefour-12918_rumeur.pdf

([105]) « Irma, l’ouragan le plus puissant jamais enregistré dans l’Atlantique », Le Monde, 6 septembre 2017 https://www.lemonde.fr/planete/article/2017/09/06/irma-l-ouragan-le-plus-puissant-jamais-enregistre-dans-l-atlantique_5181793_3244.html

([106]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 févier 2024.

([107]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, réponse écrite à la commission d’enquête.

([108]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 févier 2024.

([109]) M. Philippe Gustin, ancien délégué interministériel à la reconstruction de Saint-Barthélemy et de Saint Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([110]) M. Bruno Magras, ancien président du conseil territorial de Saint-Barthélemy, réponse écrite à la commission d’enquête.

([111]) M. Philippe Gustin, ancien délégué interministériel à la reconstruction de Saint-Barthélemy et de Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([112]) https://www.vie-publique.fr/discours/203699-interview-de-mme-annick-girardin-ministre-des-outre-mer-lci-le-15-se

([113]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, réponse écrite à la commission d’enquête.

([114]) M. Xavier Ledée, président du conseil territorial de Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024. Voir également article précité, Géocarrefour [Online], 93/2|2019.

([115]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 févier 2024.

([116]) Ibid.

([117]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, réponse écrite à la commission d’enquête.

([118]) M. Philippe Gustin, ancien délégué interministériel à la reconstruction de Saint‑Barthélemy et de Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([119]) Plan ORSEC de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint‑Martin, 9 juin 2020.

([120]) Ibid.

([121]) Ibid.

([122]) M. Fabien Sésé, secrétaire général de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([123])  M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([124]) Site internet de la préfecture de La Réunion, https://www.reunion.gouv.fr/Services-de-l-Etat/Prefecture-et-sous-prefectures/La-prefecture-de-La-Reunion/Le-cabinet-du-prefet/Etat-major-de-Zone-et-de-Protection-Civile-de-l-Ocean-Indien-EMZPCOI2/Etat-major-de-Zone-et-de-Protection-Civile-de-l-Ocean-Indien-EMZPCOI.

([125]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([126])  M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([127]) Ibid.

([128]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([129]) Préfecture de La Réunion, réponse écrite à la commission d’enquête.

([130]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([131]) M. Stéphane Guillot, directeur adjoint scientifique de l’institut national des sciences de l’univers du CNRS, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([132]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([133]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([134]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([135]) Site du dispositif FR-Alert, https://fr-alert.gouv.fr/.

([136])  M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([137]) Ibid.

([138]) M. Dominique Charzat, directeur régional d’EDF, réunion de travail sur le site de Sainte‑Rose lors du déplacement le vendredi 28 mars 2024.

([139]) Ibid.

([140]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([141]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([142]) Mme Hélène Hargitai, secrétaire générale de la préfecture de Saint-Pierre-et‑Miquelon, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([143]) Mme Ludivine Sadeski, directrice régionale du BRGM à Mayotte, réunion de travail lors du déplacement, le mercredi 27 mars 2024.

([144]) Mme Anne Le Friant, directrice adjointe chargée des observatoires volcanologiques et sismologiques de l’Institut de physique du globe de Paris, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([145]) Article L. 741‑2 du code de la sécurité intérieure.

([146]) Ibid.

([147]) Article L. 741‑5 du code de la sécurité intérieure.

([148]) Préfecture de Mayotte, réponse écrite à la commission d’enquête.

([149]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([150]) M. Philippe Charvis, directeur délégué à la science de l’institut de recherche pour le développement, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([151])  Mme Jordane Corbeau, directrice adjointe de l’observatoire volcanologique et sismologique de Martinique de l’Institut de physique du globe de Paris, audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([152]) M. Jean‑Christophe Komorowski, responsable scientifique des Observatoires volcanologiques et sismologiques et responsable du Service national d’observation en volcanologie (CNRS‑INSU), audition de la commission d’enquête du jeudi 1er février 2024.

([153]) M. Samuel Étienne, directeur d’études à l’École pratique des hautes études, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([154]) https://tirex.univ-montp3.fr/publi/Previrma.pdf.

([155]) M. Jean-Christophe Bouvier, préfet de la Martinique, audition de la commission d’enquête du lundi 4 mars 2024.

([156]) Article L.731‑3 du code de la sécurité intérieure.

([157]) M. Jean-Christophe Bouvier, préfet de la Martinique, audition de la commission d’enquête du lundi 4 mars 2024.

([158]) Mme Sylvie Gustave Dit Duflo, vice‑présidente de la conseil régional de Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024.

([159]) Capitaine Guillaume Geay, chef de service interministériel de sécurité civile à la préfecture de Saint‑Pierre‑et‑Miquelon, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([160])  Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint‑Barthélemy et Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 févier 2024.

([161]) Capitaine Guillaume Geay, chef de service interministériel de sécurité civile à la préfecture de Saint‑Pierre‑et‑Miquelon, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([162]) M. François-Xavier Bieuville, préfet de Mayotte, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le mardi 26 mars 2024.

([163]) M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer, audition de la commission d’enquête du jeudi 11 avril 2024.

([164]) Haut-commissariat de la République en Polynésie-française, réponse écrite à la commission d’enquête.

([165]) Ibid.

([166]) M. François‑Xavier Bieuville, préfet de Mayotte, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le mardi 26 mars 2024.

([167])  Mme Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([168])  M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du 14 mars 2024.

([169]) M. Jean-Christophe Bouvier, préfet de la Martinique, audition de la commission d’enquête du lundi 4 mars  2024.

([170]) Capitaine Guillaume Geay, chef de service interministériel de sécurité civile à la préfecture de Saint‑Pierre‑et-Miquelon, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([171]) Article R*122‑4 du code de la sécurité intérieure.

([172]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([173]) Les dispositions de l’article R*122‑2 du code de la sécurité intérieure ne sont pas applicables à Saint‑Pierre-et‑Miquelon.

([174]) Réponse écrite du Haut-commissariat de la République en Polynésie française transmise à la commission d’enquête.

([175])  M. Ferdy Louisy, maire de Goyave et représentant de l’association des maires de France, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([176])  Mme Stéphanie Defossez, maître de conférences en géographie à l’université Paul-Valéry-Montpellier-III, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([177]) Ibid.

([178]) Réponse écrite de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises à la commission d’enquête.

([179]) Colonel Fréderic Lhomme, directeur adjoint du SDIS de Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([180]) Ibid.

([181]) Réponse écrite de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises à la commission d’enquête.

([182]) M. François-Xavier Bieuville, préfet de Mayotte, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement, mardi 26 mars 2024.

([183]) M. Jonathan Lacombe, directeur de l’aéroport de Mayotte, réunion de travail lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([184]) Site du dispositif FR-Alert, https://fr-alert.gouv.fr/

([185]) Réponse écrite de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises à la commission d’enquête.

([186]) Mme Sylvie Gustave Dit Duflo, vice-présidente de la conseil régional de Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024.

([187]) Réponse écrite de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises à la commission d’enquête.

([188]) Capitaine Guillaume Geay, chef de service interministériel de sécurité civile à la préfecture de Saint‑Pierre‑et‑Miquelon, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([189]) M. Julien Marion, directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([190]) Réponse écrite du Haut-commissariat de la République en Polynésie française transmise à la commission d’enquête.

([191]) Général Frédéric Marchi-Leccia, directeur de la direction de la sécurité civile et de la gestion des risques, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([192]) Commandante Géraldine Bourgoin, directrice du service d’incendie et de secours de Nouméa, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([193]) Général Marc Le Bouil, commandant des forces armées de Guyane, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([194]) Général Jean-Marc Giraud, commandant supérieur des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([195]) Contre-amiral Nicolas Lambropoulos, commandant supérieurs des forces armées aux Antilles, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([196]) Général Jean‑Marc Giraud, commandant supérieur des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([197]) Contre-amiral Nicolas Lambropoulos, commandant supérieurs des forces armées aux Antilles, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([198]) Général Marc Le Bouil, commandant des forces armées de Guyane, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([199]) Général Jean-Marc Giraud, commandant supérieur des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([200]) M. Bruno Jarrige, directeur général du CHU de la Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([201]) M. Richard Rouxel, directeur général adjoint du CHU de La Réunion, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([202]) Ibid.

([203]) Dr Frédéric Nativel, chef de service du SAMU du CHU de La Réunion, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([204]) M. Dimitri Grygowski, directeur général de l’ARS de la Guyane, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([205]) M. Olivier Brahic, directeur général de l’ARS de Mayotte, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([206]) M. Bruno Jarrige, directeur général du CHU de la Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([207]) M. Gérard Cotellon, directeur général de l’ARS de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement à La Réunion le jeudi 28 mars 2024.

([208]) Site internet du ministère de l’intérieur et des outre-mer, https://www.outre-mer.gouv.fr/acteurs-des-outre-mer/les-ambassadeurs-de-cooperation-regionale.

([209]) Site internet du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/action-exterieure-des-collectivites-territoriales/la-delegation-pour-les-collectivites-territoriales-et-la-societe-civile-dctciv/article/les-conseillers-diplomatiques-aupres-des-prefets-de-region.

([210]) M. Jean-Christophe Bouvier, préfet de la Martinique, audition de la commission d’enquête du lundi 4 mars 2024.

([211]) Déclaration commune du 16 juin 2023 des Pays-Bas et de la France à l’issue de la cinquième réunion quadripartite du 15 juin 2023.

([212]) Colonel Frédéric Lhomme, directeur adjoint du SDIS de la Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([213]) M. Karim Ben Slimane, directeur risques et prévention du BRGM, audition de la commission d’enquête du jeudi 8 février 2024.

([214]) M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, audition du jeudi 4 avril 2024.

([215]) M. Antoine Poussier, préfet de la Guyane, audition de la commission d’enquête du jeudi 7 mars 2024.

([216]) Mme Véronique Roger‑Lacan, ambassadrice de France pour le Pacifique, audition de la commission d’enquête du jeudi 29 février 2024.

([217]) Site internet de la Croix-Rouge, https://www.croix-rouge.fr/journee-internationale-de-la-prevention-des-catastrophes-naturelles2/les-plateformes-d-intervention-regionale-pir-1214.

([218]) Haut-commissariat de la République en Polynésie-française, réponse écrite à la commission d’enquête.

([219]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement, jeudi 27 mars 2024.

([220]) Mme Sylvie Gustave Dit Duflo, vice-présidente de la conseil régional de Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024.

([221]) M. Fabien Sésé, secrétaire général de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([222]) M. Cyrille Melchior, président du conseil départemental de La Réunion, réunion de travail lors du déplacement, jeudi 27 mars 2024.

([223]) Mme Solène Boucharinc, directrice support et responsable du contrôle de la conformité de l’aéroport de Mayotte, réunion de travail lors du déplacement à Mayotte le mercredi 26 mars 2024.

([224]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement, jeudi 27 mars 2024.

([225]) Haut-commissariat de la République en Polynésie-française, réponse écrite à la commission d’enquête.

([226]) M. Jean-François Finck, directeur de cabinet à la direction systèmes énergétiques insulaires d’EDF, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([227]) Ibid.

([228]) M. Jean‑François Finck, directeur de cabinet à la direction systèmes énergétiques insulaires d’EDF, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([229]) Ibid.

([230]) Haut-commissariat de la République en Polynésie-française, réponse écrite à la commission d’enquête.

([231]) M. Dominique Charzat, directeur régional d’EDF, réunion de travail sur le site de Sainte-Rose, vendredi 28 mars 2024.

([232]) M. Olivier Grunberg, directeur général délégué de Véolia, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([233]) Ibid.

([234]) Mme Claire Chalvidant, directrice adjointe des affaires publiques d’Orange, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([235]) Mme Maud Devès, maîtresse de conférences à l’université Paris Cité, audition de la commission d’enquête du lundi 11 mars 2024.

([236]) Mme Sylvie Gengoul, directrice du pôle outre-mer de France Télévisions, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([237]) M. Ferdy Louisy, maire de Goyave et représentant de l’association des maires de France, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([238]) Mme Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([239]) Mme Annabelle Moatty, géographe et chercheuse au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([240]) Cour des comptes, La reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma, juillet 2021.

([241]) M. Philippe Gustin, ancien délégué interministériel à la reconstruction de Saint‑Barthélemy et de Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([242]) Mme Anne Laubies, ancienne préfète déléguée de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, réponse écrite à la commission d’enquête.

([243]) Ibid.

([244]) Ibid.

([245]) Defossez Stéphanie, Rey Tony, Leone Frédéric et al., « Capacités de relèvement d’un territoire insulaire français face à un ouragan extrême : Retour d’expérience sur l’ouragan Irma à Saint‑Barthélemy (Petites‑Antilles) », Les Cahiers d’Outre‑Mer, 2021/2 (n° 284), p. 471-508.

([246]) Site du Gouvernement, https://www.info.gouv.fr/organisation/reconstruction-des-iles-de-saint-barthelemy-et-saint-martin/reconstruction-des-iles-de-saint-barthelemy-saint-martin-le-role-de-la-delegation.  

([247]) M. Philippe Gustin, ancien délégué interministériel à la reconstruction de Saint-Barthélemy et de Saint Martin, réponse écrite à la commission d’enquête.

([248]) Mme Annabelle Moatty, géographe et chercheuse au CNRS, et Mme Delphine Grancher, ingénieure de recherche au CNRS, réponse écrite à la commission d’enquête.

([249]) France Info, le 13 septembre 2017, https://www.francetvinfo.fr/meteo/cyclone-ouragan/ouragan-irma/ouragan-irma-il-n-y-a-pas-besoin-de-l-etat-a-saint-barthelemy-assure-le-president-de-la-collectivite_2370113.html.

([250]) M. Bruno Magras, ancien président du conseil territorial de Saint-Barthélemy, audition de la commission d’enquête du jeudi 15 février 2024.

([251]) Cour des comptes, La reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma, juillet 2021.

([252]) Ibid.

([253]) M. Philippe Gustin, ancien délégué interministériel à la reconstruction de Saint-Barthélemy et de Saint Martin, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([254]) M. Louis Mussington, président de la collectivité de Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([255]) Cour des comptes, La reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma, juillet 2021.

([256]) Mme Stéphanie Defossez, maître de conférences en géographie à l’université Paul-Valéry, Montpellier‑III, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([257]) Defossez Stéphanie, Rey Tony, Leone Frédéric et al., « Capacités de relèvement d’un territoire insulaire français face à un ouragan extrême : Retour d’expérience sur l’ouragan Irma à Saint‑Barthélemy (Petites‑Antilles) », Les Cahiers d’Outre‑Mer, 2021/2 (n° 284), p. 502.

([258]) Cour des comptes, La reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma, juillet 2021.

([259]) M. Fabien Sésé, secrétaire général de la préfecture de Saint-Barthélemy et Saint‑Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([260]) Ibid.

([261])  M. Louis Mussington, président de la collectivité de Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([262]) M. Louis Mussington, président de la collectivité de Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([263]) M. Daniel Gibbs, ancien président de la collectivité de Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([264]) Mme Catherine Perrais, directrice adjointe de la DEAL de la Guadeloupe, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([265]) M. Daniel Gibbs, ancien président de la collectivité de Saint-Martin, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([266]) Mme Stéphanie Defossez, maître de conférences en géographie à l’université Paul-Valéry-Montpellier-III, audition de la commission d’enquête du jeudi 22 février 2024.

([267]) Rémi Barroux, «Après l’ouragan Irma, l’île de Saint-Martin toujours vulnérable », Le Monde du 30 septembre 2023.

([268]) M. Bruno Magras, ancien président du conseil territorial de Saint-Barthélemy, audition de la commission d’enquête du jeudi 15 février 2024.

([269]) Mme Florence Lustman, présidente de France Assureurs, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([270]) M. Bruno Magras, ancien président du conseil territorial de Saint-Barthélemy, audition de la commission d’enquête du jeudi 15 février 2024.

([271]) M. Jérôme Filippini, préfet de La Réunion, réunion de travail à la préfecture lors du déplacement le jeudi 27 mars 2024.

([272]) Préfecture de La Réunion, réponse écrite à la commission d’enquête.

([273]) Article L. 125‑1 du code des assurances.

([274]) Ibid.

([275]) Caisse centrale de réassurance, réponse écrite à la commission d’enquête.

([276]) Langreney, Le Cozannet, Merad, Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, décembre 2023.

([277]) Rapport annuel de la Caisse centrale de réassurance sur le bilan des catastrophes naturelles 1982‑2022, 2023.

([278]) Mme Nanihi Bertrand, cheffe du service étude et aménagement de la mairie de Punaauia, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([279]) Rapport IGF, Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer, janvier 2020.

([280]) Ibid.

([281]) M. Édouard Vieillefond, directeur général de la Caisse centrale de réassurance, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([282]) M. Julien Arnoult, responsable des études et des relations institutionnelles et secrétaire du groupe de travail sur le climat de la Fédération nationale des syndicats d’agents généraux d’assurance, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([283]) Rapport IGF, Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer, janvier 2020.

([284]) Ibid.

([285]) Mme Florence Lustman, présidente de France Assureurs, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([286]) Langreney, Le Cozannet, Merad, Adapter le système assurantiel français face à l’évolution des risques climatiques, décembre 2023.

([287]) Rapport IGF, Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre‑mer, janvier 2020.

([288]) Ibid.

([289]) M. Julien Arnoult, responsable des études et des relations institutionnelles et secrétaire du groupe de travail sur le climat de la Fédération nationale des syndicats d’agents généraux d’assurance, audition de la commission d’enquête du lundi 26 février 2024.

([290]) Rapport IGF, Le phénomène de non-assurance dans les départements et collectivités d’Outre-mer, janvier 2020.

([291]) Mme Annabelle Moatty, géographe et chercheuse au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([292])« La récurrence des catastrophes, parfois sur les mêmes territoires, interroge l’efficacité des logiques préventives et curatives. Face à ce constat et au nom d’une rationalité économique, le concept de reconstruire mieux (traduction du Build Back Better – BBB) fut développé à l’échelle internationale et érigé en injonction dans le Cadre d’Action de Sendai pour la période 2015 – 2030 [UNISDR, 2015]. La reconstruction peut être saisie comme une « fenêtre d’opportunité » [Christoplos, 2 006] pour réduire les vulnérabilités et améliorer la résilience des sociétés et territoires. » Annabelle Moatty, Freddy Vinet, Stéphanie Defossez, Jean-Philippe Cherel, Frédéric Grelot. Intégrer une ” éthique préventive ” dans le processus de relèvement post‑catastrophe : résilience, adaptation et ” reconstruction préventive ”. La Houille Blanche ‑ Revue internationale de l’eau, 2018, 5-6, pp.11‑19. ff10.1051/lhb/2018046ff. ffhal-02518278  https://hal.science/hal-02518278/document

([293]) Defossez Stéphanie, Rey Tony, Leone Frédéric et al., « Capacités de relèvement d’un territoire insulaire français face à un ouragan extrême : Retour d’expérience sur l’ouragan Irma à Saint‑Barthélemy (Petites‑Antilles) », Les Cahiers d’Outre‑Mer, 2021/2 (n° 284), p. 471-508.

([294]) M. Cyrille Melchior, président du conseil départemental de La Réunion, réunion de travail lors du déplacement, jeudi 27 mars 2024.

([295]) Conseil économique, social et environnemental de Mayotte, L’agriculture mahoraise dans la dynamique de l’autonomie alimentaire, juin 2023.

([296]) Site du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, infographie, L’agriculture outre-mer, https://agriculture.gouv.fr/infographie-lagriculture-outre-mer

([297]) Préfecture de La Réunion, réponse écrite à la commission d’enquête.

([298]) M. Cyrille Melchior, président du conseil départemental de La Réunion, réunion de travail lors du déplacement, jeudi 27 mars 2024.

([299]) M. Hervé Tonnaire, directeur délégué aux outre(mer, Banque des territoires, audition de la commission d’enquête du lundi 12 février 2024.

([300]) M. Louis Le Franc, Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([301]) Préfecture de La Réunion, réponse écrite à la commission d’enquête.

([302]) Defossez Stéphanie, Rey Tony, Leone Frédéric et al., « Capacités de relèvement d’un territoire insulaire français face à un ouragan extrême : Retour d’expérience sur l’ouragan Irma à Saint‑Barthélemy (Petites‑Antilles) », Les Cahiers d’Outre-Mer, 2021/2 (n° 284), p. 471-508.

([303]) M. Ferdy Louisy, maire de Goyave et représentant de l’association des maires de France, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([304]) Mme Annabelle Moatty, géographe et chercheuse au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([305]) M. Ferdy Louisy, maire de Goyave et représentant de l’association des maires de France, audition de la commission d’enquête du jeudi 14 mars 2024.

([306]) Ibid.

([307]) Mme Annabelle Moatty, géographe et chercheuse au CNRS, audition de la commission d’enquête du lundi 18 mars 2024.

([308]) M. Frédéric Mortier, ancien délégué interministériel aux risques majeurs-outre-mer, audition de la commission d’enquête du jeudi 21 mars 2024.

([309]) Lettre de mission du Premier ministre au délégué interministériel aux risques majeurs outre-mer, le 28 mai 2019.

([310]) Ibid.

([311]) Lettre de mission du Premier ministre au délégué interministériel aux risques majeurs outre-mer, le 28 mai 2019.

(1) Rapport d’information n° 122 (2019‑2020), tome I, déposé le 14 novembre 2019, recommandation n° 40

([313])Avis n° 4525 au PLF pour 2022 (4482), 7 octobre 2021, page 31

([314]) Communiqué de la préfecture de la Guadeloupe, le 10 décembre 2019.

([315]) M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024.

([316]) Ibid.

([317]) M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, audition de la commission d’enquête du jeudi 4 avril 2024. (L’article 239 de la loi n° 2022‑217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale prévoit une expérimentation relative à l’état de calamité naturelle exceptionnelle qui prévoit que cet état peut être déclaré dans une collectivité mentionnée à l’article 72‑3 de la Constitution, via un décret, dès lors qu’un aléa naturel d’une ampleur exceptionnelle est constaté et qu’il a des conséquences de nature à gravement compromettre le fonctionnement des institutions.)