N° 2735
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 juin 2024.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi visant à la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse,
Par M. Paul-André COLOMBANI,
Député.
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Voir le numéro : 921.
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SOMMAIRE
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Pages
I. La population corse se trouve dans une situation inÉquitable au regard de l’accÈs aux soins
A. Les spÉcificitÉs de la corse font peser une tension inÉdite sur le systÈme de soins
1. L’insularité et le relief, sources de complexité, de délais et de surcoûts
2. Un profil démographique atypique
3. Une précarité très importante
4. Le système de santé de la Corse n’est pas structuré pour répondre à ces défis
B. Il en rÉsulte une situation grave et injuste pour la population corse
1. La multiplication des transferts médicaux, symptôme des lacunes du système de soins
2. Des pertes de chances et des renoncements aux soins manifestes, bien que difficiles à quantifier
3. Les associations appelées à se substituer aux carences de l’État et de l’assurance maladie
II. Le rÉinvestissement rÉcent n’est pas À la hauteur des dÉfis qui attendent l’ile
A. La rÉcente mobilisation politique doit Être saluÉe
1. Un réinvestissement dans les établissements de santé corses
2. Un engagement dans la formation en santé
3. Le développement de filières hospitalo-universitaires et d’hyperspécialités
B. Des rÉponses encore trop fragiles et ponctuelles
1. Des filières hospitalo-universitaires fragiles
2. Des progrès tributaires des fluctuations de la mobilisation politique
A. Un consensus autour des bÉnÉfices À attendre de la crÉation d’un centre hospitalier universitaire
1. Un facteur d’attractivité médicale
2. Un facteur d’amélioration de l’accès aux soins et de la confiance
B. Un terreau favorable en corse
2. Une dynamique de coopération importante sur le territoire
C. Vers Un modÈle de centre hospitalier universitaire innovant, progressivement dÉployÉ d’ici 2030
1. La création d’un centre hospitalier universitaire de Corse
2. Vers un modèle innovant de centre hospitalier universitaire
3. Une mise en place nécessairement progressive
Article 1er Principe d’au moins un centre hospitalier universitaire par région
Article 2 Mise en œuvre du centre hospitalier universitaire de Corse d’ici 2027
ANNEXE N°1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR Le RAPPORTEUR
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L’égal accès à des soins de qualité pour tous était un principe fondateur de l’assurance maladie, lorsqu’elle a vu le jour en 1945. Ce principe est aujourd’hui mis à mal dans de nombreux territoires en raison, notamment, de la désertification médicale qui prive certains de nos concitoyens de soins dispensés à une distance ou dans des délais raisonnables, et qui précipite l’émergence d’une médecine à deux vitesses.
Il est cependant des territoires où la difficulté est telle que l’injustice en est criante. Incontestablement, de l’aveu général, la Corse en fait partie. Insularité, relief montagneux, précarité, population fluctuante et vieillissante sont autant de spécificités qui mettent fortement en tension un système de santé globalement mal structuré pour répondre à ces défis.
Chaque année, 26 000 patients sont transférés sur le Continent, faute de prise en charge adaptée en Corse. Toutes les familles de l’île, ou presque, sont confrontées à ces transferts qui induisent des difficultés considérables – parfois insurmontables – pour des personnes déjà éprouvées par la maladie. Il en résulte des pertes de chances et des renoncements aux soins, appelés à s’accroître à mesure que la population corse vieillira et perdre en mobilité.
Face à ce constat préoccupant, le fatalisme n’est pas de mise. La Corse a pour elle de nombreux atouts. Au-delà de ses agréments naturels, elle dispose d’acteurs, dans le public et le privé, à l’hôpital et en ville, habitués à coopérer et qui se sentent investis d’une même responsabilité envers la population. Elle a su développer, au sein de ses hôpitaux, des spécialités qui relèvent habituellement des centres hospitaliers universitaires (CHU), avec un même niveau de qualité et de sécurité pour les patients. L’Université de Corse a su prendre en charge, avec succès, la formation des étudiants de première année de médecine, et développer de nouveaux champs de recherche. Ce dynamisme incontestable a été porté, depuis plusieurs années, par une volonté politique qu’il faut saluer, au niveau national comme au niveau local.
Cependant, il manque à la Corse un élément dont disposent toutes les autres régions de France ; un élément qui permettrait de bâtir, sur ce terreau favorable, un système de soins résilient et adapté aux spécificités de l’île. La Corse n’a pas de centre hospitalier universitaire. Elle est rattachée à ceux de Marseille et de Nice, éloignés de 250 kilomètres.
Il est temps de remédier à cette situation profondément inéquitable, qui nuit gravement à l’attractivité médicale et universitaire de l’île. Le travail accompli et les engagements souscrits par la majorité actuelle sont appréciables. Mais une approche de court terme, soumise aux aléas de la vie politique, ne saurait suffire à créer le choc d’attractivité et de confiance dans la Corse a besoin. Il faut désormais, comme cela a été fait dans toutes les régions de France, fixer un cap : celui d’un centre hospitalier universitaire en Corse d’ici 2030.
I. La population corse se trouve dans une situation inÉquitable au regard de l’accÈs aux soins
Certaines spécificités de la Corse viennent aggraver les difficultés rencontrées partout en France par le système de soins, au point que la population locale subit aujourd’hui une situation profondément inéquitable sur le plan de l’accès aux soins.
A. Les spÉcificitÉs de la corse font peser une tension inÉdite sur le systÈme de soins
1. L’insularité et le relief, sources de complexité, de délais et de surcoûts
L’insularité est, à l’évidence, la première spécificité corse qui vient compliquer la problématique de l’accès aux soins. L’île est située à 250 kilomètres du Continent. Si cela ne représente qu’une heure d’avion lorsque les conditions sont réunies, tel n’est pas toujours les cas et les aléas, notamment météorologiques, perturbent régulièrement les transports. Cette insularité suppose que la Corse dispose sur son territoire de l’ensemble des ressources médicales nécessaires, matérielles et humaines, pour faire face aux situations urgentes.
En outre, il faut ajouter à l’insularité le relief : la Corse a le statut « d’île‑montagne » ([1]). L’altitude moyenne de 568 mètres vient considérablement compliquer les déplacements au sein du territoire. Ainsi, si 150 kilomètres seulement séparent Ajaccio de Bastia, il faut compter près de trois heures par la route pour effectuer ce trajet.
Cette double caractéristique géographique a des répercussions importantes en termes financiers. Les surcoûts ont été globalement estimés entre 8 et 9 % pour les établissements de santé corses par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) ([2]). Son rapport relève que ces surcoûts recouvrent principalement « les charges de personnel, les charges à caractère médical, les charges à caractère hôtelier et général (énergie, alimentation), ainsi que les charges immobilières ». Ils résultent par exemple de coûts d’approvisionnement et de stockage, ou encore de la nécessité de rémunérer davantage le personnel médical, dans une situation de faible attractivité.
Cependant, cette estimation des surcoûts ne tient pas compte des effets de seuil liés à la tarification à l’activité (T2A). Du fait de son insularité, la Corse doit entretenir des plateaux techniques complets pour une activité relativement faible, ce qui retarde beaucoup leur amortissement. Comme l’a souligné lors de son audition M. Jean Canarelli, directeur de clinique à Ajaccio, « les quatre cinquièmes de nos activités ont un effet de seuil, et nous sommes toujours en dessous ». M. Canarelli a fourni l’exemple des prothèses de hanche : alors que les établissements du Continent en posent en moyenne 131 par an, ce chiffre tombe à 27 pour les hôpitaux corses, pour des investissements identiques.
Au total, si l’on tient compte de cet effet de seuil, les surcoûts assumés par les établissements de santé corses seraient plutôt de l’ordre de 25 %.
Effets de seuil dans les hôpitaux généraux corses
• L’avis de la chambre régionale des comptes sur la situation du centre hospitalier d’Ajaccio
L’insularité impose des surcoûts à l’établissement, qui justifient l’application d’un coefficient géographique majorant les produits. Par ailleurs, certaines activités, entrant dans le champ de la permanence des soins, ne peuvent trouver un équilibre financier en raison d’un seuil d’activité trop bas. (…)
Le centre hospitalier d’Ajaccio joue le rôle de recours sur son territoire, dépourvu de centre hospitalier universitaire (CHU) de référence, en développant des activités qu’à capacité égale sur le Continent, il n’assumerait pas, et ce afin d’assurer la permanence des soins. Certaines de ces activités peuvent engendrer pour l’établissement des coûts importants au regard du faible nombre d’actes réalisés et des surcoûts liés à l’insularité.
Par exemple, la maternité est classée en niveau 2B, ce qui signifie qu’elle dispose de trois lits de néonatalogie et de trois lits de soins intensifs pour la prise en charge de nouveau-nés présentant des pathologies plus lourdes. Avec seulement 179 séjours en néonatalogie et 52 séjours en soins intensifs en 2019, ces activités se concrétisent par des recettes de tarification à l’activité (T2A) respectivement de 0,56 M€ et 0,17 M€. Ces recettes interviennent en complément des dotations allouées alors que les besoins en personnel sont importants et que des contraintes matérielles sont imposées par la règlementation. (…)
Source : « Centre hospitalier d’Ajaccio, département de la Corse-du-Sud, exercices 2017 et suivants », chambre régionale des comptes, février 2023.
• Les déficits liés à l’effet de seuil au sein du centre hospitalier de Bastia
« Pour l’exercice 2022, il peut être cité au titre des activités dites à effet de seuil, c’est-à-dire qui ne peuvent au regard des contraintes de continuité et de permanence des soins et du bassin de population desservi, atteindre un volume suffisant pour assurer un équilibre budgétaire :
– La neurochirurgie, qui présente un déficit de 437 000 euros ;
– La maternité de niveau 2B : déficit de 3 millions d’euros ;
– La pédiatrie et la néonatologie : déficit de 3 millions d’euros ;
– La cardiologie dont interventionnelle (indispensable à la prise en charge en urgence des activités de coronarographie) : déficit de 1,5 millions d’euros. »
Source : données transmises par le centre hospitalier de Bastia
2. Un profil démographique atypique
Si la Corse compte environ 350 000 habitants actuellement, ce qui en fait la région de France métropolitaine la moins peuplée, sa population présente certaines caractéristiques distinctives.
En premier lieu, elle est particulièrement vieillissante. Selon les statistiques de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) publiées en février 2024, la Corse est la région la région la plus touchée par le vieillissement avec 117 personnes de 65 ans ou plus pour 100 jeunes de moins de vingt ans. Si cette tendance se poursuit, l’île comptera 40 % de seniors à l’horizon 2040.
Dans le même temps, la Corse est la région dont la croissance démographique est la plus dynamique de France métropolitaine, avec une augmentation moyenne de 1 % par an entre 2015 et 2021 ([3]). Cette progression est exclusivement due au solde migratoire, le solde naturel étant nul.
Enfin, la population de Corse se caractérise par une très forte variabilité saisonnière, du fait notamment de l’afflux de touristes au cours du printemps et de l’été. Entre avril et septembre 2023, trois millions de nuitées ont été dénombrées dans les hébergements de l’île ([4]). Au-delà des touristes, la Corse compte une population importante de « semi-résidents » : des habitants qui disposent d’une résidence secondaire sur l’île, où ils passent plusieurs mois de l’année, tout en étant affiliés à une caisse de sécurité sociale sur le Continent.
Ces caractéristiques démographiques ont un impact important sur le système de soins, particulièrement mis en tension l’été, et dont les capacités doivent être suffisamment élastiques pour prendre en charge des besoins nettement supérieurs à ceux des seuls assurés sociaux de Corse. Au total, la population de l’île lissée sur l’année se situerait plutôt aux alentours de 600 000 habitants. Par ailleurs, le vieillissement démographique très prononcé constitue un défi singulier alors que la plupart des seniors corses restent à domicile, et du fait des difficultés de transport susmentionnées.
3. Une précarité très importante
La Corse se singularise également par une précarité supérieure à la moyenne nationale. En 2020, 18 % des ménages y vivent sous le seuil de pauvreté, soit le taux le plus élevé des régions métropolitaines ([5]). Autre spécificité, les personnes de plus de 75 ans sont particulièrement représentées dans cette catégorie. En 2020, près de 9 % des personnes âgées de plus de 62 ans percevaient le minimum vieillesse sur l’île contre 3,3 % sur l’ensemble du territoire français ([6]).
4. Le système de santé de la Corse n’est pas structuré pour répondre à ces défis
Le système de santé de la Corse est globalement mal structuré face à l’ensemble de ces défis. L’île compte deux principaux hôpitaux publics, Bastia et Ajaccio, rayonnant respectivement sur la Haute-Corse et la Corse du Sud. Par ailleurs, le secteur privé à but lucratif représente une part importante des hospitalisations – de l’ordre de 50 % – et certaines activités sont quasi-exclusivement mises en œuvre par le privé.
Si l’île est plutôt correctement dotée en médecins généralistes, elle accuse un déficit important en spécialistes. Le professeur Laurent Papazian, médecin intensiviste-réanimateur au centre hospitalier de Bastia, a ainsi souligné lors de son audition que « des spécialités élémentaires [étaient] dépourvues, ou presque, de praticiens ». Ce défaut de spécialistes est appelé à s’accentuer au cours des prochaines années : 100 % des rhumatologues ont plus de 55 ans, de même que 80 % des gynécologues et 65 % des endocrinologues et des gériatres ([7]).
Ce manque de spécialistes est à mettre en relation avec la faible attractivité du territoire pour les internes en médecine. Si la Corse dispose de 90 agréments hospitaliers pour la formation d’internes, elle n’en accueille généralement qu’une dizaine hors médecine générale.
La Corse est donc particulièrement confrontée à la problématique de la désertification médicale. Les zonages publiés par l’agence régionale de santé de Corse ([8]), définissant des zones d’intervention prioritaire (ZIP) – caractérisées par une faible accessibilité aux soins – ainsi que des zones d’action complémentaire (ZAC), en situation fragile, illustrent les lacunes constatées sur le territoire. Seuls les bassins ajacciens et bastiais apparaissent épargnés.
zones caractérisées par une offre de soins insuffisante
ou par des difficultés d’accès aux soins en corse (Avril 2023)
Source : ARS Corse.
L’île accuse également un déficit en infrastructures médicales de qualité. Si l’hôpital d’Ajaccio a été récemment reconstruit, celui de Bastia, âgé de plus de quarante ans, connaît une vétusté avancée. Certains équipements indispensables au diagnostic, notamment de cancers, continuent à faire défaut. La Corse est, par exemple, dépourvue de TEP‑scan ([9]).
B. Il en rÉsulte une situation grave et injuste pour la population corse
1. La multiplication des transferts médicaux, symptôme des lacunes du système de soins
Le manque de spécialistes et d’équipements adaptés pour répondre aux besoins de santé de la population se traduit par la multiplication des transferts médicaux, souvent à destination de Marseille. En 2019, le taux de recours aux soins hors Corse atteignait 20 % en moyenne ; il était particulièrement élevé pour la rhumatologie (45 %), les soins endocriniens (43,5 %), la neurologie, l’hématologie et les douleurs chroniques ([10]).
On compte environ 26 000 transferts médicaux par an représentant, pour la sécurité sociale, un budget de 30 millions d’euros. Votre rapporteur tient à rapprocher ce chiffre de la population insulaire : 26 000 transferts, cela concerne un résident corse sur huit, soit 26 000 familles touchées. Autrement dit, pratiquement toutes les familles corses sont confrontées à la réalité des transferts médicaux.
Ces transferts engendrent des difficultés considérables. Si la sécurité sociale prend en charge le transport du résident et, dans certaines conditions, d’un ou deux accompagnants, elle ne finance ni l’hébergement ni la restauration. Elle ne résout pas, non plus, lorsqu’un parent doit accompagner son enfant sur le Continent, la question de la garde des frères et des sœurs. Toutes ces questions, qui ont des implications financières difficilement supportables pour des personnes en situation de précarité, viennent ajouter un stress considérable à celui causé par la maladie.
Comme l’a souligné lors de son audition Mme Catherine Riera, présidente de l’association La Marie Do, qui vient en aide aux malades du cancer et à leurs familles, « on s’attend à une meilleure prise en charge dans une France moderne, qui prône l’égalité d’accès aux soins ».
2. Des pertes de chances et des renoncements aux soins manifestes, bien que difficiles à quantifier
Dans un rapport consacré aux déplacements médicaux vers le Continent paru en 2018 ([11]), le conseil économique, social, environnemental et culturel de Corse (Cesec) dénonçait « une rupture d’équité territoriale inacceptable qui entraîne des phénomènes de précarité et de renoncement aux soins ».
Dans la foulée de cette publication, votre rapporteur avait déposé une proposition de loi visant à améliorer la prise en charge de ces déplacements médicaux ([12]). Cette mobilisation a permis de confier à la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam), via un abondement des fonds d’action sanitaire et sociale des deux caisses primaires d’assurance maladie corses, le transport d’un deuxième accompagnant lorsque des enfants doivent bénéficier de soins de longue durée sur le Continent.
Ce petit pas est appréciable. Il sera indispensable de le pérenniser en ouvrant une ligne budgétaire dédiée, qui n’ait pas à être renégociée chaque année. Cependant, cette avancée est encore loin de couvrir les restes à charge associés à ces transports médicaux.
Du fait de cette problématique financière, et aussi en raison du caractère éprouvant d’un déplacement pour des personnes fragiles, des pertes de chances et des renoncements aux soins sont à déplorer. Ce point a été mis en lumière par la thèse présentée en novembre 2023 par le docteur Francesca Ferrandi ([13]). Ce travail de recherche montre que certains patients sont morts plus rapidement, faute d’avoir pu bénéficier d’un TAVI ([14]) en Corse, parce qu’ils étaient trop fragiles pour envisager un déplacement médical en direction de Marseille ou de Nice.
La directrice générale de l’agence régionale de santé de Corse, Mme Marie‑Hélène Lecenne, a souligné lors de son audition que ces renoncements aux soins et pertes de chances risquaient de s’accentuer avec le vieillissement de la population : « Sur certaines filières, les personnes âgées ne vont plus avoir la ressource pour aller se faire soigner sur le Continent ; elles vont de moins en moins pouvoir y avoir recours. »
Au-delà des transferts médicaux, les pertes de chances résultent aussi de l’absence d’essais cliniques en Corse. Lors de son audition, Mme Catherine Riera a souligné qu’il était souvent hors de portée, pour les malades atteints de cancers, de participer à des essais cliniques sur le Continent en raison des déplacements qu’ils impliquent.
Les pertes de chances sont enfin la conséquence des retards diagnostiques induits par des plateaux techniques incomplets. Face à une suspicion de cancer, un patient marseillais aura accès à l’ensemble des examens et débutera son traitement en une semaine quand il faudra, en Corse, plusieurs semaines, ne serait-ce que pour obtenir les résultats de l’examen d’anatomopathologie.
3. Les associations appelées à se substituer aux carences de l’État et de l’assurance maladie
Votre rapporteur salue l’action de plusieurs associations bénévoles qui se mobilisent pour venir en aide aux patients et à leurs familles, pour réduire ces restes à charges et ces pertes de chances liés aux lacunes du système de santé. Il a, à ce titre, auditionné les associations La Marie‑Do et Inseme, qui soutiennent respectivement les malades du cancer et les personnes appelées à se rendre sur le Continent pour raison médicale.
Ces associations ont mis en place des dispositifs variés destinés à pallier les manques de la puissance publique : financement voire achat d’hébergements, de billets pour les accompagnants, d’un dispositif permettant d’envoyer les lames d’anatomopathologie sur le Continent, etc.
Cependant, comme l’ont souligné Mmes Catherine Riera et Laura Ponzevera Franceschini, qui dirigent ces associations, leur action ne saurait se substituer durablement à celle de la puissance publique. Or, si elles disparaissent, il n’y aura plus rien. Comme le formule Mme Riera, « la solidarité ne peut pas remplacer durablement la responsabilité politique. Les pouvoirs publics doivent travailler à structurer le système de santé, il y a trop de trous dans la raquette. »
II. Le rÉinvestissement rÉcent n’est pas À la hauteur des dÉfis qui attendent l’ile
A. La rÉcente mobilisation politique doit Être saluÉe
Votre rapporteur se félicite de la volonté politique marquée, depuis le début de ce quinquennat, pour apporter des réponses aux défaillances du système de santé de la Corse. Plusieurs avancées en découlent.
1. Un réinvestissement dans les établissements de santé corses
Le Gouvernement a engagé depuis plusieurs années une dynamique d’investissement dans les établissements de santé situés en Corse, renforcée dans le cadre du Ségur de la santé, à hauteur de 158 millions d’euros. La construction du nouvel hôpital d’Ajaccio a bénéficié d’une aide financière de l’État de 150 millions d’euros. S’agissant de la reconstruction/rénovation de l’hôpital de Bastia, un projet est en cours d’accompagnement par le Conseil stratégique des industries de santé.
2. Un engagement dans la formation en santé
Depuis 2004, l’Université de Corse dispense la première année de médecine dans le cadre d’un partenariat avec plusieurs universités du Continent. Elle forme actuellement des promotions d’une quarantaine d’étudiants qui poursuivront ensuite leurs études à Aix-Marseille, Paris, Nice ou Montpellier.
Vingt ans après sa création, cette première année en Corse est considérée comme un succès : les étudiants formés ont un niveau comparable à celui des autres universités, avec des taux d’abandon très faibles (de l’ordre de 3 %). En outre, comme le révèle une étude de l’Université de Corse, 80 % des médecins généralistes ayant suivi leur première année d’études dans l’île reviennent y exercer une fois diplômés.
Forte de cette expérience, l’Université de Corse a demandé à pouvoir proposer l’intégralité du premier cycle des études de médecine à compter de la rentrée 2025. Les étudiants corses seraient ensuite tous rassemblés à l’Université d’Aix-Marseille pour y suivre second cycle. Si ce projet doit encore bénéficier d’un agrément officiel, il a fait l’objet d’un engagement oral de la part de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Mme Sylvie Retailleau, à l’occasion de sa venue en Corse le 6 novembre 2023.
Le développement des études médicales en Corse apparaît de nature à favoriser le retour des jeunes médecins sur le territoire. En effet, lors des stages effectués en premier cycle, ils auront l’occasion d’apprendre à connaître les hôpitaux locaux et de tisser des liens avec leurs personnels.
3. Le développement de filières hospitalo-universitaires et d’hyperspécialités
Outre cet investissement sur la formation médicale, le Gouvernement met en avant sa volonté de faire de la Corse un territoire hospitalo-universitaire avec l’appui de professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU‑PH) de l’Assistance publique–Hôpitaux de Marseille (AP‑HM), pour structurer quelques filières hospitalo-universitaires en Corse.
Plusieurs filières d’hyperspécialité ont d’ores et déjà été déployées ou le seront prochainement : le centre de procréation médicalement assistée de Bastia, le centre de ressources et de compétences sclérose en plaques d’Ajaccio, l’activité de neuroradiologie interventionnelle à Bastia et Ajaccio. Elles fonctionnent avec le renfort de médecins très spécialisés déployés en Corse dans le cadre de temps partagés.
B. Des rÉponses encore trop fragiles et ponctuelles
Votre rapporteur estime que les évolutions susmentionnées vont dans la bonne direction. Néanmoins, à défaut de fixer, de manière claire et engagée, l’objectif de création d’un centre hospitalier universitaire (CHU), elles demeurent fragiles et soumises à de nombreux aléas.
1. Des filières hospitalo-universitaires fragiles
Votre rapporteur note la fragilité des filières hospitalo-universitaires, qui reposent sur une ressource externe peu nombreuse. Elles sont souvent dépendantes d’un ou deux praticiens et menacent de s’effondrer à leur départ.
Lors de son audition, le professeur Papazian a partagé ce point de vue, estimant que les filières hospitalo-universitaires étaient « des cas d’exception, du bricolage ». Il a souligné que les médecins déployés dans ce cadre n’étaient là « que dans le cadre d’un passage, pour quelques années ». Il a mis en avant l’absence de statut clair de ces PU‑PH, qui doivent normalement être rattachés à un centre hospitalier universitaire dans le cadre de leurs activités. Lui-même est actuellement mis à disposition du centre hospitalier de Bastia par l’AP‑HM et l’Université d’Aix-Marseille ; cette position est nécessairement limitée dans le temps. Au-delà, rester en Corse impliquerait une démission.
Votre rapporteur partage l’avis exprimé par Mme Bianca Fazi, conseillère exécutive de Corse en charge de la santé et du social, lors de son audition : « Les filières sont importantes mais elles ne doivent pas devenir la règle ; il faut qu’on arrive à modéliser un nouveau système de santé. On a trop souvent fonctionné avec des rustines ; or, il y a toujours une fuite quelque part. Il faut arrêter l’hémorragie médicale et paramédicale, on a besoin de modèles stabilisés. »
2. Des progrès tributaires des fluctuations de la mobilisation politique
Pour appréciables qu’ils soient, les progrès récents reposent sur la bonne volonté de ministres, et ne sauraient être considérés définitivement acquis. De même, en l’absence d’objectif affirmé de manière solennelle, la trajectoire peut sans cesse être remise en question, au gré des fluctuations de la vie politique. Or, la création d’un centre hospitalier universitaire est une œuvre de longue haleine, qui suppose un engagement sur la durée. C’est pourquoi votre rapporteur estime ne pouvoir se satisfaire de paroles et de promesses.
III. il faut aujourd’hui aller rÉsolument vers la crÉation d’un centre hospitalier universitaire en corse
Votre rapporteur partage l’approche de court terme prônée par le Gouvernement et l’agence régionale de santé de Corse à travers le projet régional de santé (PRS), qui vise à faire de la Corse un territoire hospitalo-universitaire et à développer des hyperspécialités. Mais il estime qu’il convient par ailleurs de fixer un cap clair – la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse – et d’en décliner les étapes de manière ambitieuse et réaliste.
A. Un consensus autour des bÉnÉfices À attendre de la crÉation d’un centre hospitalier universitaire
De l’avis général, la création d’un centre hospitalier universitaire permettrait de donner à la Corse un signal positif, à même d’enclencher un cercle vertueux. Il existe à ce sujet un quasi-consensus en Corse et au-delà, parmi les responsables politiques, médicaux et universitaire.
1. Un facteur d’attractivité médicale
La création d’un centre hospitalier universitaire serait le meilleur moyen pour remédier au problème d’attractivité médicale de la Corse vis-à-vis des spécialistes. Actuellement, seuls 30 % des spécialistes ayant suivi leur première année d’études de médecine sur l’île reviennent s’y installer.
Tous les interlocuteurs auditionnés l’ont souligné : les plateaux techniques, les perspectives de carrières ne sont pas les mêmes dans un centre hospitalier universitaire. Or, ce sont là des éléments déterminants pour les jeunes professionnels qui s’installent. Un centre hospitalier universitaire permet en outre d’attirer des internes, du fait de la présence de PU‑PH. Ces internes seront ensuite plus spontanément enclins à s’installer sur le territoire. De même, la formation paramédicale serait également facilitée.
Ainsi, comme l’a souligné lors de son audition le professeur Gilles Capellier, actuellement en exercice au centre hospitalier d’Ajaccio, « la transformation du modèle hospitalier avec une valence universitaire peut bénéficier à l’ensemble de la Corse, avec cet effet d’attractivité ».
2. Un facteur d’amélioration de l’accès aux soins et de la confiance
À l’heure actuelle, les Corses ont une piètre opinion de leur système de santé. Un sondage faisait apparaître en janvier 2018 que 68 % d’entre eux jugeaient l’offre de soins de mauvaise qualité ([15]). Il n’est pas rare, en effet, d’entendre dire sur l’île que « le meilleur médecin c’est l’avion ». Cette perte de confiance nourrit les déplacements médicaux, y compris pour des soins qui pourraient être dispensés en Corse.
Comme l’a souligné Mme Catherine Riera, « ce serait un acte fort de poser le principe d’un CHU, cela recréerait la confiance ».
B. Un terreau favorable en corse
Un centre hospitalier universitaire de Corse ne partirait pas de rien. Il existe un terreau favorable dans lequel ce projet pourrait rapidement prendre racine. Outre l’organisation du premier cycle de médecine à l’Université de Corte dès la rentrée 2025, plusieurs atouts peuvent être soulignés.
1. Les centres hospitaliers généraux de Corse ont déjà des activités de centre hospitalier universitaire
Si les hôpitaux de Bastia et d’Ajaccio ne sont « que » des centres hospitaliers généraux, ils ont déjà été amenés, par la force des choses, du fait de la situation d’insularité et de l’éloignement des centres hospitaliers universitaires de référence, à développer certaines activités qui relèvent normalement de la catégorie supérieure.
Par exemple, la réanimation de l’hôpital d’Ajaccio a mis en place la circulation extracorporelle, et a formé Bastia à le faire. Cette pratique est aujourd’hui déployée dans les établissements avec un même niveau de qualité et de sécurité des soins que dans les grands centres hospitaliers universitaires.
Comme l’a souligné M. Christophe Arnould, directeur du centre hospitalier de Bastia, lors de son audition, le groupe homogène de malades (GHM) « recours CHU » de l’hôpital de Bastia – classification qui permet de distinguer les patients hospitalisés dans le cadre d’une activité de recours – est en réalité similaire à celui des petits centres hospitaliers universitaires, comme Reims ou Nice.
Mme Marie-Hélène Lecenne, directrice générale de l’agence régionale de santé de Corse, a estimé qu’à l’échelle des 350 000 habitants de l’île, il ne serait pas possible de développer, même dans le cadre d’un centre hospitalier universitaire, des plateaux techniques équivalents à ceux du Continent. Votre rapporteur tient néanmoins à souligner qu’il faudrait considérer, pour le recrutement du centre hospitalier universitaire de Corse, non pas les 350 000 habitants permanents, mais plutôt les 600 000 habitants lissés sur l’année. On se situerait alors sur un bassin de population proche de celui des petits centres hospitaliers universitaires.
2. Une dynamique de coopération importante sur le territoire
Autre atout de la Corse dans la perspective de la création d’un centre hospitalier universitaire, il existe déjà une dynamique de coopération importante entre acteurs de la santé sur le territoire. Si l’hospitalisation privée à but lucratif a un poids important, elle a aussi certaines spécificités. En premier lieu, les établissements privés sont essentiellement détenus par des groupes locaux. En outre, comme l’a souligné Mme Lecenne lors de son audition, ces structures « ont une vision équivalente au public de leur responsabilité territoriale et populationnelle ». Établissements publics et privés ont ainsi l’habitude de coopérer et de se relayer.
En outre, s’agissant de l’hospitalisation publique, les deux groupements hospitaliers de territoire (GHT) centrés autour de Bastia et d’Ajaccio sont largement intégrés. De manière générale, l’insularité a induit une interdépendance propice à la coopération.
Il existe un potentiel de recherche important autour de l’Université de Corse. Celle-ci a su prouver sa valeur avec la mise en place réussie de la première année de médecine.
Sur la dimension recherche, l’Université a ouvert un laboratoire de virologie qui a récemment été intégré à l’unité mixte de recherche « virus émergents » de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Elle a aussi accentué son positionnement dans les domaines de la santé et de l’environnement, de la gérontologie et de la médecine numérique. La dimension insulaire et le profil de la population offrent un positionnement intéressant à la recherche dans ces domaines.
Par ailleurs, comme l’a souligné M. Christophe Arnould lors de son audition, la ressource humaine nécessaire à cette recherche est disponible. Mais il importe de la retenir : « Nous avons des profils de médecins qui ont un intérêt pour la recherche, mais nous pouvons les perdre faute de pouvoir aller plus loin dans ce champ. » L’infrastructure du centre hospitalier universitaire apparaît ici indispensable.
C. Vers Un modÈle de centre hospitalier universitaire innovant, progressivement dÉployÉ d’ici 2030
Au bénéfice de l’ensemble de ces observations, votre rapporteur plaide donc, à travers la présente proposition de loi, pour la mise en place d’un centre hospitalier universitaire de Corse d’ici l’année 2030.
1. La création d’un centre hospitalier universitaire de Corse
Avec cette proposition de loi, votre rapporteur vise à réparer une situation injuste pour les Corses, qui sont les seuls à ne pas disposer d’un centre hospitalier universitaire, et qui pâtissent en conséquence d’un accès aux soins dégradé.
L’article 1er pose le principe d’au moins un centre hospitalier universitaire par région française. Son application conduira à reconnaître la nécessité d’un centre hospitalier universitaire en Corse, seule région à ne pas en avoir.
2. Vers un modèle innovant de centre hospitalier universitaire
La présente proposition de loi n’a pas pour objet d’entrer dans les modalités de mise en œuvre du centre hospitalier universitaire de Corse, ni d’en préciser la déclinaison territoriale. Votre rapporteur s’en remet, pour cela, aux travaux conduits par la Collectivité de Corse, en lien avec l’ensemble des acteurs du territoire.
Quelques axes forts font consensus dans ces travaux, que votre rapporteur se bornera à rappeler : le centre hospitalier universitaire de Corse devra être innovant, car il ne pourra pas tout faire comme les autres, et s’adapter aux spécificités locales.
Il n’aura pas vocation à couvrir l’ensemble des filières, y compris celles pour lesquelles la population corse ne permettrait pas d’atteindre les seuils d’activités établis. Par exemple, on peut anticiper l’absence d’un département d’onco-pédiatrie au regard du faible effectif concerné. Il restera ainsi, à terme, un volant incompressible de transferts médicaux vers les centres hospitaliers universitaires partenaires.
Enfin, le centre hospitalier universitaire de Corse sera multisites – il aura vocation à regrouper les établissements de santé corses – et reposera sur une coopération étroite entre public et privé.
3. Une mise en place nécessairement progressive
La mise en place du centre hospitalier universitaire de Corse ne pourra se faire du jour au lendemain. Elle nécessitera l’agrégation de briques successives, dont l’agencement et l’enchaînement ont vocation à être précisés par un décret d’application qui en fixera les principales étapes.
En ce sens, l’article 2 de la présente proposition de loi fixe un terme à 2027 pour la création du centre hospitalier universitaire de Corse, tout en renvoyant au règlement le soin de déterminer le calendrier et les modalités précises. Par réalisme, votre rapporteur proposera de repousser ce délai à 2030 afin de tenir compte des étapes indispensables à franchir pour la constitution d’un centre hospitalier régional, puis d’un centre hospitalier universitaire.
Votre rapporteur souligne un préalable essentiel à la création du centre hospitalier universitaire : l’assainissement financier des différents établissements de santé sur lesquels il aura vocation à s’appuyer. À l’heure actuelle, l’ensemble des établissements corses sont fortement déficitaires pour leurs activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), en raison d’un mode de financement qui ne permet pas de prendre en compte les coûts de structure supérieurs en Corse, du fait d’une moindre activité (« effets de seuil »). Il importera de travailler à un mode de financement pérenne pour ces hôpitaux, afin qu’ils ne soient plus tributaires des aides en trésorerie octroyées au fil de l’eau par les tutelles.
Adopté par la commission avec modification
Le présent article pose le principe selon lequel chaque chef-lieu de région est le siège d’un centre hospitalier universitaire. La commission y a substitué le principe d’au moins du CHU par région, afin de laisser de la souplesse quant à la déclinaison territoriale de cette obligation.
Institués par une ordonnance du 30 décembre 1958 ([16]), les centres hospitaliers universitaires (CHU) sont des centres hospitaliers régionaux (CHR), c’est-à-dire des établissements publics de santé ayant passé une convention avec une université ou plusieurs universités. Ils remplissent une triple mission de soins, d’enseignement et de recherche. Ces structures sont régies par des dispositions spécifiques du code de la santé publique et du code de l’éducation.
La France compte actuellement 31 centres hospitaliers universitaires, dont 3 outre-mer. Après la transformation, en 2023, du CHR d’Orléans en CHU, elle ne compte plus qu’un seul centre hospitalier régional à Metz-Thionville dont la transformation en centre hospitalier universitaire est actuellement à l’étude. Les CHU sont, la plupart du temps, implantés dans les anciennes capitales régionales.
Si l’on excepte le centre hospitalier universitaire d’Orléans, les établissements d’outre-mer ont vu le jour plus récemment, souvent par fusion préalable de plusieurs hôpitaux. Ainsi le centre hospitalier universitaire de Guadeloupe a été créé en 2005, celui de La Réunion en 2012, celui de Martinique en 2013, tandis que le centre hospitalier universitaire de Guyane devrait être opérationnel en 2025.
La loi ne précise aucune règle quant à la localisation et à l’organisation territoriale. Elle se borne à énoncer un ressort régional, un centre hospitalier universitaire étant obligatoirement centre hospitalier régional ([17]).
L’article 1er de la présente proposition de loi dispose que « chaque chef-lieu de région est le siège d’un centre hospitalier universitaire ». En posant ce principe général, il permet, par déduction, d’établir la nécessité de doter la Corse – seule région de France à ne pas en disposer – d’un centre hospitalier universitaire.
L’obligation d’implanter un centre hospitalier universitaire porte spécifiquement sur le chef-lieu de région. Cette formulation dépasse en réalité l’intention du rapporteur et auteur de la présente proposition de loi. D’une part, tous les centres hospitaliers universitaires ne sont pas implantés dans des chefs-lieux de région et, d’autre part, il n’était nullement envisagé de circonscrire l’établissement de Corse à Ajaccio, qui en est le chef-lieu. De l’avis général, le centre hospitalier universitaire corse devrait être multisite et rassembler l’ensemble des établissements de l’île.
À l’initiative de votre rapporteur et de ses collègues Félix Acquaviva, Michel Castellani et Laurent Marcangeli, la commission a adopté un amendement visant à substituer à l’obligation de créer un CHU par chef-lieu de région le principe que chaque région doit être dotée d’au moins un CHU. Cette formulation, qui laisse plus de souplesse quant à la déclinaison territoriale, conduira, de la même manière, à la nécessité de doter la Corse d’un CHU.
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Adopté par la commission avec modifications
Le présent article fixe à 2027 l’échéance à laquelle chaque région devra être dotée d’un centre hospitalier universitaire. Il renvoie à un décret le soin de définir les étapes et les modalités de création de ce centre en Corse. Outre certaines précisions et reformulations, la commission a repoussé cette échéance à 2030.
L’article 2 fixe l’entrée en vigueur de l’article 1er au 1er janvier 2027. À cette date, toutes les régions devront être dotées d’un centre hospitalier universitaire.
Il renvoie à un décret le soin de préciser le calendrier, les étapes et les modalités de mise en œuvre de ce centre. Cela passera nécessairement, comme le formule l’article 2, par la mise en place préalable d’un centre hospitalier régional, qui signera ensuite une convention avec l’Université de Corse pour devenir un centre hospitalier universitaire.
En moyenne, à partir de la mise en place des premières « briques », la création d’un centre hospitalier universitaire requiert une dizaine d’années. La date fixée à l’article 2 peut donc être jugée particulièrement précoce, même si certaines étapes préliminaires peuvent être considérées déjà franchies en Corse.
À l’initiative de votre rapporteur et de ses collègues Félix Acquaviva, Michel Castellani et Laurent Marcangeli, la commission a adopté un amendement visant à repousser l’entrée en vigueur de l’obligation posée par l’article 1er – l’existence d’au moins un CHU par région – au 1er janvier 2030, dans le but de fixer un objectif qui soit à la fois ambitieux et atteignable. Un autre amendement issu des mêmes auteurs a été adopté pour prévoir que le CHU de Corse sera créé au sein de la collectivité de Corse et pas nécessairement de son chef-lieu, en cohérence avec la modification apportée à l’article 1er.
La commission a par ailleurs adopté deux amendements, respectivement du rapporteur ainsi que de MM. Marc Ferracci et Hadrien Ghomi (groupe Renaissance), visant à préciser le contenu du décret d’application prévu par l’article 2 pour la mise en place du CHU de Corse. Ces modifications permettent, d’une part, de clarifier le fait que la création de ce CHU doit être achevée au janvier 2030 et, d’autre part, de garantir que les modalités envisagées tiendront compte des spécificités locales.
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Adopté par la commission sans modification
Le présent article gage les charges créées par la présente proposition de loi, pour l’État et pour la sécurité sociale, par des augmentations d’impôts à due concurrence.
L’article 3 prévoit le gage destiné à assurer la recevabilité financière de la présente proposition de loi. En posant l’objectif d’un centre hospitalier universitaire par région et en prévoyant la mise en place, à l’horizon 2027, d’un centre hospitalier universitaire en Corse, elle sera coûteuse pour l’État et pour la sécurité sociale, du fait des investissements nécessaires, mais aussi de l’activité supplémentaire qui résultera de l’ouverture de ce centre. Pour cette raison, il est proposé de gager les charges induites par cette proposition de loi par une augmentation, à due concurrence, des taxes sur les tabacs.
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Lors de sa seconde réunion du 5 juin 2024, la commission a procédé à l’examen de la proposition de loi visant à la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse (n° 921) (M. Paul-André Colombani, rapporteur) ([18]).
M. Paul-André Colombani, rapporteur. Le texte que je vous présente est tout à fait jacobin. Vous avez l’habitude d’entendre les élus corses demander de déroger au droit commun du fait des spécificités de notre territoire ; la réponse est souvent que ce n’est pas possible, au risque de contrevenir au principe d’égalité. Avec ce texte, la demande est précisément inverse, puisqu’il vise une même obligation légale pour toutes les régions : l’existence d’au moins un centre hospitalier universitaire (CHU) sur leur territoire. Trente et un CHU sont répartis sur l’ensemble du territoire national, auxquels s’ajouteront bientôt le CHU de Guyane et celui de Metz-Thionville, dernier CHR en voie d’universitarisation. La Corse est la grande oubliée de cette répartition territoriale, et la proposition de loi a pour objet de réparer de cette injustice, qui constitue une véritable rupture du principe d’égalité.
Cette situation d’exception sanitaire a de lourdes conséquences. En premier lieu, l’absence de CHU est, de l’aveu de l’ensemble des acteurs auditionnés, un frein indéniable à l’attractivité médicale de l’île. Dans un contexte de dégradation de la démographie médicale, le déficit en infrastructures médicales de qualité se traduit par un manque de spécialistes, qui va gravement s’accentuer au cours des prochaines années. Il se traduit également par une difficulté à attirer des internes pour renouveler les générations : sur les quatre-vingt-dix agréments hospitaliers pour la formation d’internes dont la Corse dispose, elle n’accueille qu’une dizaine de spécialistes ; la faute à l’absence de plateau technique suffisant, à des perspectives de carrière moins avantageuses et à la difficulté à capter des internes déjà installés ailleurs.
La Corse est dépendante de son adossement à des CHU continentaux, comme celui d’Aix-Marseille. La crise sanitaire du covid‑19 a tristement révélé les limites d’un tel fonctionnement : la Corse a dû se débrouiller par elle‑même quand les hôpitaux, saturés, n’ont pas pu prendre en charge ses patients.
La nécessité de renforcer notre système de santé est d’autant plus forte que la Corse est caractérisée par des spécificités défavorables. Spécificité géographique : l’île est isolée ; son relief complique fortement les déplacements – les 150 kilomètres qui séparent Bastia d’Ajaccio ne se parcourent pas comme les 150 kilomètres d’autoroute reliant Bar‑le‑Duc à Metz. Spécificité sociale, avec un taux de précarité parmi les plus élevés de France. Spécificité démographique : la population est très fortement vieillissante ; elle a connu une forte croissance depuis le début des années 2000, passant de 250 000 résidents permanents à 350 000 aujourd’hui – à l’échelle de Paris, c’est comme si la ville avait gagné 3 millions d’habitants ; du fait du phénomène de saisonnalité, elle atteint, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques, un niveau lissé sur l’année de 600 000 habitants – 350 000 résidents permanents, plus les touristes et semi-résidents possédant une résidence secondaire. Vous imaginez, en vingt ans, quelles ont pu être les conséquences pour la Corse, non seulement sur le système de santé, mais aussi sur l’agriculture, les ressources en eau et les infrastructures routières.
L’incapacité de notre système de santé à répondre aux besoins de la population se traduit par deux phénomènes néfastes. Le premier, c’est la multiplication des déplacements médicaux vers le continent pour y être soigné. Les chiffres sont vertigineux : 26 000 transferts médicaux par an entre la Corse et le continent ; un budget pour la sécurité sociale de 30 millions d’euros ; un résident corse sur huit et 26 000 familles touchées. Chaque année, presque toutes les familles corses sont confrontées à cette dure réalité. Je vous laisse imaginer les conséquences humaines et financières dramatiques de ce système : frais colossaux d’hébergement et de restauration, arrêt de l’activité professionnelle, stress et souffrance engendrés par le déplacement, etc.
Conséquemment, on observe un renoncement massif à recourir à des soins, donc une perte de chance pour les patients trop fragiles pour être déplacés. La directrice de l’agence régionale de santé de Corse, Mme Marie-Hélène Lecenne a d’ailleurs souligné que ces phénomènes risquaient de s’accentuer avec le vieillissement de la population dans les prochaines années.
Les carences de l’action étatique sont colmatées depuis plus de quinze ans par l’engagement des associations de bénévoles Inseme et La Marie Do, qui font un travail remarquable pour venir en aide aux patients et à leurs familles. Cependant, comme l’a dit la présidente de La Marie Do, Mme Catherine Riera, la solidarité ne peut pas remplacer durablement la responsabilité politique et les pouvoirs publics doivent travailler à structurer le système de santé.
Reconnaissons tout de même que certaines lignes sont en train de bouger. La possibilité, pour l’université de Corse, de proposer l’intégralité du premier cycle des études de médecine en 2025 et le regroupement des étudiants corses à l’université d’Aix-Marseille pour le deuxième cycle seront des étapes importantes, que l’on doit notamment à l’engagement de Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. En outre, ce gouvernement a mis en avant sa volonté de faire de la Corse un territoire hospitalo-universitaire afin de déployer quelques filières d’hyperspécialités qui fonctionnent avec le renfort de médecins issus du continent, dans le cadre de temps partagés. Cela étant, ces filières hospitalo-universitaires sont fragiles : elles sont souvent dépendantes d’un ou deux praticiens qui sont rattachés à d’autres CHU. En clair, ces praticiens sont par nature de passage et, s’ils s’en vont, tout menace de s’effondrer.
Ces progrès récents, qui reposent largement sur la bonne volonté politique, ne peuvent être considérés comme définitivement acquis. La création d’un CHU est une œuvre de longue haleine, qui requiert de graver dans le marbre une trajectoire, à laquelle nous devrons nous tenir sur la durée. L’objectif de cette proposition de loi est précisément de définir ce cadre, sans toutefois préempter sa future déclinaison territoriale. Sachez qu’il existe déjà un terreau favorable en Corse, dans lequel ce projet pourrait s’épanouir. La collectivité de Corse a déjà créé un comité de pilotage associant l’ensemble des acteurs de la santé de Corse pour bâtir un projet de création de CHU adapté à nos spécificités. À cet égard, je vous proposerai d’amender légèrement les deux premiers articles du texte, afin de ne pas empiéter sur les modalités de déploiement du CHU. Je vous proposerai également de reporter à 2030 l’échéance initialement fixée à 2027, afin d’envisager une temporalité à la fois ambitieuse et réaliste.
La création d’un CHU en Corse est une revendication historique, qui fait l’objet d’un large consensus. En l’actant, nous ferions un acte fondateur ; ce serait un choc de confiance pour des familles corses, depuis trop longtemps confrontées à l’inégalité d’accès aux soins. Nous doterions la Corse d’un outil moderne, à la hauteur des niveaux de compétences et d’attractivité prévalant au plan international. Nous offririons des perspectives d’excellence, en matière de recherche comme de formation, aux futurs médecins de Corse. Nous garantirions, enfin, aux Corses l’accès à un bien fondamental : la santé. C’est une question de justice et d’égalité.
Mme Michèle Peyron, présidente. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.
M. Philippe Frei (RE). La Corse est une exception française, puisque la ville d’Ajaccio est le seul chef-lieu de région de tout le territoire, départements d’outre-mer compris, où il n’existe pas de centre hospitalier régional universitaire. Cette initiative parlementaire vise à réparer cette injustice et à garantir l’égal accès aux soins.
La population corse est en constante augmentation et la densité médicale ne permet pas d’absorber les besoins de santé des habitants, encore moins lorsqu’ils requièrent des soins spécifiques. Si l’opportunité de créer un CHU en Corse est donc indéniable, et si le fond de cette proposition de loi est louable, nous devons toutefois, en tant que parlementaires, faire preuve de lucidité et veiller à choisir les dispositifs les plus adaptés à la situation.
Nous comprenons qu’il s’agit là d’une proposition de loi d’appel, car la création d’un CHU requiert la coordination des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche, des acteurs de santé, des acteurs locaux et de l’exécutif. Le groupe Renaissance déterminera sa position sur cette proposition de loi à l’issue des débats que nous aurons eus en commission et en séance publique.
M. Antoine Villedieu (RN). Cette proposition de loi vient gommer une injustice dont les Corses sont victimes depuis de trop nombreuses années. L’ouverture d’un CHU en Corse a fait l’objet d’un vote à l’unanimité du parlement corse, ce qui souligne l’urgence des besoins.
La Corse ne dispose que de deux centres hospitaliers, dont la majorité des investissements provient d’associations locales fondées sur la solidarité. Cette situation n’est plus tenable. Chaque année 26 000 patients doivent être déplacés loin de chez eux pour recevoir des soins. En Corse, le meilleur médecin, c’est l’avion. L’accès aux soins est un enjeu majeur pour tous les citoyens français ; en Corse, il faut attendre en moyenne trois semaines à un mois pour obtenir un diagnostic de cancer. Les délais de transport pour accéder à des soins spécialisés sont intolérables, surtout pour un territoire dont 40 % de la population aura plus de 60 ans d’ici à 2030.
Les CHU ont clairement pour retombées que 60 % des jeunes médecins qui y ont fait leur internat s’installent dans leurs alentours. Le problème de l’accès aux soins, particulièrement grave en Corse, se fait sentir partout en France, notamment dans les territoires d’outre-mer et les zones rurales. Au Rassemblement National, nous soutenons toutes les initiatives qui visent à augmenter le nombre de centres hospitaliers de formation dans les territoires touchés par les difficultés d’accès aux soins. Nous devons anticiper la fin du numerus apertus en constituant suffisamment de centres de formation et de recherche. Puisqu’il faut dix ans pour construire un CHU pleinement fonctionnel, commençons sans tarder. Nous soutiendrons évidemment cette proposition de loi de bon sens.
M. Ugo Bernalicis (LFI - NUPES). Nous accueillons très favorablement cette proposition de loi, qui n’est pas seulement d’appel. Cela fait trop longtemps que l’on explique aux Corses qu’il n’y a pas besoin d’une nouvelle loi et que des politiques de rééquilibrage suffiront. Résultat, rien n’avance.
Cette proposition de loi, si elle est adoptée, également pour vertu d’empêcher l’éventuel démantèlement de CHU ailleurs en France. Certes, le mouvement de fermeture d’établissements hospitaliers ne s’attaque pas encore aux CHU, mais vu la pente qui est prise, mieux vaut inscrire dans la loi le principe d’un maillage territorial qui permette un accès effectif aux soins, et à tous les soins. Les gens ne doivent pas, parce qu’ils vivent dans une île, être moins bien pris en charge médicalement et subir une perte de chance lorsqu’ils sont gravement atteints.
Adopter cette proposition de loi ne serait que justice. Qui peut être contre l’égalité quand notre devise républicaine est « Liberté, Égalité, Fraternité » ? Si des gens en viennent à douter de la République, c’est parce qu’ils n’en voient pas la traduction dans leur quotidien. C’est notre rôle, en tant que parlementaires, de ne pas laisser d’autre choix à l’exécutif que de faire une politique d’égalité. C’est vrai pour la santé, mais aussi dans bien d’autres domaines, car les pouvoirs publics, en Corse, ne sont pas forcément à la hauteur des promesses.
Mme Sylvie Bonnet (LR). La Corse est unique par sa beauté, par sa situation géographique, mais aussi par les défis qu’elle doit relever, notamment celui de l’accès aux soins. Elle est si unique qu’elle est la seule région de France à n’être dotée d’aucun centre hospitalier régional (CHR), ni d’aucun centre hospitalier régional universitaire. En conséquence, ses habitants rencontrent de nombreuses difficultés pour accéder à une offre de soins adaptée. Faute de pouvoir bénéficier d’une prise en charge sur l’île, 26 000 patients sont transférés chaque année sur le continent. Il en résulte une perte de chance, voire un renoncement aux soins qui est appelé à s’accroître à mesure que la population corse vieillira et perdra en mobilité. La population corse est en effet particulièrement vieillissante – les seniors seront 40 % à l’horizon 2040, si la tendance actuelle se poursuit – et elle connaît également une grande précarité puisque le pourcentage de seniors percevant le minimum vieillesse est près de trois fois supérieur sur l’île que dans le reste du territoire français.
Un autre défi est évidemment le flux de touristes et de semi-résidents. Si la Corse est, en théorie, la région la moins peuplée de France, sa population lissée sur l’année devrait plutôt être estimée à 600 000 habitants. Le système de santé de la Corse n’est pas suffisamment structuré pour les absorber. C’est pourquoi cette proposition de loi visant à créer un CHU en Corse est primordiale. Non seulement un CHU permettra de réduire les inégalités en matière de santé entre la Corse et le reste de la France, mais il permettra aussi de développer localement la formation de professionnels de santé, ainsi que la recherche et l’innovation.
Les Républicains, qui souhaitent faire de l’île de Beauté une île de santé, voteront pour ce texte.
M. Philippe Vigier (Dem). Nous sommes favorables à cette idée de créer un CHU en Corse. Dans mon territoire, nous avons acté en 2021 la création du CHU d’Orléans, après vingt ans de combat, et avec le soutien de la rapporteure générale, Stéphanie Rist.
La création d’un CHU serait un événement considérable pour la Corse. Cette île, comme les territoires ultramarins, a besoin d’un CHU pour améliorer la prise en charge de ses patients – la Guyane en aura un en 2025. À Orléans, ce qui nous a beaucoup aidés, c’est la mission qu’ont menée conjointement les inspections générales des affaires sociales et de l’éducation, du sport et de la recherche : après avoir auditionné tous les acteurs concernés pendant dix-huit mois, elles ont pu tracer le chemin à emprunter.
La collectivité de Corse a démontré sa volonté d’avancer, depuis de longues années, et l’université de Corte fonctionne. Poursuivez dans cette voie, soyez ambitieux et créez dans les délais les plus courts le premier cycle complet des études médicales. Vous donnerez ainsi la possibilité à de jeunes étudiants de se sédentariser et de revenir plus vite. Soyez également audacieux dans la recherche de partenariats avec les CHU qui vous environnent, notamment ceux d’Aix-Marseille et de Nice. Le partenariat avec Tours a vraiment été important pour le CHU d’Orléans.
Notre plus belle récompense, après ces vingt années de combat, a été d’avoir 150 inscriptions en première année de médecine, dès que ce cursus a ouvert. Il n’y a pas de fatalité ; seule compte la volonté politique. Nous serons à vos côtés, car lutter contre la désertification médicale et améliorer l’accès aux soins sont des combats que je mène dans cette maison depuis très longtemps.
M. Laurent Marcangeli (HOR). Pour la plupart d’entre vous, la Corse, c’est loin et proche en même temps. C’est à une heure et demie de vol de Paris et, lorsqu’on fait le voyage dans ce sens, on s’attend à trouver de belles montagnes, de belles plages, du soleil, et à passer un moment agréable. Mais ce que voient les députés de la Corse lorsqu’ils prennent l’avion pour venir à Paris, et ce depuis des années, ce sont des familles, des femmes et des hommes qui partent pour se faire soigner. Le voyage est moins agréable dans ce sens-là ; il est fatigant, coûteux et, surtout, il n’est pas de bon augure. C’est au nom de ces familles que nous soutenons cette proposition de loi, qui s’appuie d’abord sur un consensus. Peu de voix politiques en Corse – et j’en veux pour preuve les votes de l’assemblée de Corse – remettent en question la création d’un CHU.
Ce sur quoi je veux insister, pour prolonger les propos du rapporteur, c’est sur notre maturité en matière universitaire, qui nous rend capables de donner naissance à ce projet. Nous l’avons démontré hier, en nous rendant au ministère de la santé avec des professeurs de médecine. Nous avons besoin de continuer à attirer des médecins, car nous manquons de spécialistes, et ce CHU nous permettra de le faire. Prendre un rendez‑vous chez un dermatologue à Bastia, et même à Ajaccio, est souvent très compliqué.
Le groupe Horizons et apparentés soutient cette proposition de loi, que j’ai d’ailleurs cosignée. Je conclurai en citant un Corse très célèbre : « L’égalité ne doit pas être un vain mot. »
M. Guillaume Garot (SOC). Nous soutiendrons évidemment cette proposition de loi, que notre groupe de travail transpartisan sur la désertification médicale, réunissant des députés de gauche, de droite et du centre, avait d’ailleurs intégrée à celle qu’il a déposée il y a un an.
Ce texte est une avancée pour la Corse mais aussi, plus largement, pour l’accès aux soins dans nos territoires. On oublie trop souvent que l’accès aux soins n’est pas seulement garanti par la loi ; il l’est aussi par la Constitution, et il revient au Gouvernement et au législateur de mettre les moyens nécessaires pour le rendre effectif. Je salue, à ce propos, l’initiative qui a été prise de lancer une commission d’enquête sur les difficultés d’accès aux soins à l’hôpital public, dont Christophe Naegelen est rapporteur. Cette proposition de loi doit être l’occasion d’un débat sur l’accès aux soins et j’espère que nous pourrons avancer ensemble, en laissant de côté nos étiquettes partisanes.
La création d’un CHU en Corse est une première étape, mais nous savons tous que cela ne suffira pas. Il faudra aussi former des soignants, garantir la présence de soignants dans ce CHU et, plus généralement, dans l’ensemble du pays, afin de lutter contre la désertification médicale, aussi bien à l’hôpital qu’en ville. Ce que nous prônons pour ce faire, c’est la régulation de l’installation, qu’un rapport récent de la Cour des comptes recommande également.
M. Jean-Félix Acquaviva (LIOT). En tant que membre du groupe LIOT et en tant que Corse, soutenir cette proposition de loi s’impose comme une évidence au regard du principe de l’égal accès aux soins.
Beaucoup de chiffres ont été rappelés : 26 000 à 30 000 personnes par an obligées de se déplacer pour se soigner, 50 % du service public aérien desservant Nice et Marseille occupés par des malades, 30 millions d’euros de coût de transport pour l’assurance maladie. On ne peut pas continuer ainsi. Il faut trouver un modèle différent dans une île qui connaît une croissance appauvrissante, entre un tourisme qui crée de l’activité économique et des taux de pauvreté et de renoncement aux soins plus importants qu’ailleurs. Il faut garantir l’accès aux soins à l’ensemble de la population, d’autant plus qu’elle est vieillissante.
L’attractivité pour les médecins fait partie du problème. J’entends dire que l’adoption de cette loi ne réglera pas tout et qu’il y aura encore beaucoup à faire. Or il s’agit d’une revendication ancienne, qui a fait l’objet d’une délibération unanime de l’assemblée de Corse à plusieurs reprises et a déjà donné lieu à la constitution d’un groupe de travail réunissant des professeurs, des médecins et des élus. Des ateliers sont en cours, des trajectoires ont été proposées et les étapes de l’universitarisation ont été définies, avec les questions touchant aux infrastructures, à la gouvernance. Si nous en sommes venus à déposer une proposition de loi, c’est parce que les choses ne vont pas assez vite du côté du Parlement et de l’exécutif. Localement, les gens sont prêts et commencent à travailler : ils n’attendent plus qu’une main tendue. J’espère que cette proposition de loi sera largement adoptée.
Mme Michèle Peyron, présidente. Nous en venons aux interventions des autres députés.
M. Christophe Bentz (RN). La caractéristique insulaire de la Corse, la nécessité de répondre aux carences des services de santé sur l’île et le manque criant de personnel médical sont autant d’éléments que la représentation nationale doit prendre en compte. C’est pourquoi je salue le dépôt de cette importante proposition de loi visant à créer un CHU par région.
Pour lutter contre la désertification médicale, le Rassemblement National propose de nombreuses solutions concrètes, à court et à long terme, à commencer par la levée totale du numerus apertus pour former davantage de médecins partout dans le territoire. La métropolisation des services de santé et des lieux de formation, c’est-à-dire leur concentration dans les grandes agglomérations, a pour conséquence de creuser les inégalités territoriales en matière d’accès aux soins, en particulier dans les zones rurales.
Notre groupe avait proposé, dans un premier temps, d’installer un institut universitaire de santé, c’est-à-dire un établissement d’études propédeutiques, dans tous les départements dépourvus de CHU, comme c’est le cas dans certains départements d’outre‑mer et en Corse. Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de cette idée qui permettrait d’augmenter, de décentraliser et de mieux répartir l’offre de formation en santé dans l’ensemble du territoire ? L’installation d’un CHU dans tous les départements qui en sont dépourvus vous semble-t-elle possible et souhaitable, étant donné la désertification médicale accélérée que nous subissons et les besoins significatifs en matière de services de santé de proximité et de personnel soignant ?
Mme Nicole Dubré-Chirat (RE). Il suffit de regarder une carte pour voir qu’il y a effectivement un manque criant de structures hospitalières en Corse. À l’heure où l’on prône la proximité et l’accès aux soins, il est important que le maillage territorial des CHU soit plus équitable. Même si cela nécessitera aussi un effort de formation, il est très important de s’engager plus fortement en faveur de l’implantation d’un CHU sur l’île.
M. Fabien Di Filippo (LR). Cette installation va avoir un coût énorme. Or l’immense majorité des CHU a un déficit abyssal et nombre d’entre eux dysfonctionnent, ferment des lits et ne proposent pas forcément un meilleur accès aux soins. Êtes-vous certain qu’un CHU est le meilleur moyen de faire venir dans l’île des médecins, notamment des spécialistes ? Le coût de fonctionnement d’un CHU étant très important, on en voit beaucoup dans lesquels des blocs opératoires, voire des services entiers, sont fermés. C’est un outil qu’il est déjà très difficile de piloter dans des grandes villes ; en créer un loin des métropoles et des lieux de formation universitaires les plus importants peut soulever des inquiétudes.
M. Philippe Vigier (Dem). Tous les CHU ne sont pas en déficit. Celui de Poitiers, qui n’est pas une très grande ville – 110 000 habitants et 150 000 avec son agglomération –, est très largement excédentaire. Je crois qu’une partie de la réponse réside dans l’articulation entre le public et le privé, qui figure déjà dans le texte.
M. le rapporteur. Je me réjouis que la création d’un CHU en Corse réunisse une quasi-unanimité.
Monsieur Frei, je ne suis pas d’accord avec vous sur le caractère d’appel de cette proposition de loi. Les premières ordonnances créant les CHU datent de 1948. Et si je dépose une proposition de loi aujourd’hui, c’est parce que malgré tous nos appels, il ne s’est rien passé en Corse depuis lors. Il nous faut une réponse adaptée au territoire corse, empreinte de pragmatisme. Je l’ai dit, on sent, depuis le début du quinquennat, que ce gouvernement a la volonté d’aller de l’avant. Mais il arrive que les majorités changent, et la volonté politique se dilue, les engagements passés s’oublient et on n’avance plus.
Deux points sont très importants. Le premier est l’arrivée du premier cycle complet des études de médecine à Corte, grâce à Mme Retailleau. Cela va faire avancer les choses et permettre le retour en Corse des jeunes étudiants qui sont actuellement éparpillés entre Aix‑Marseille, Paris et Nice. Le second point est la création de filières universitaires. Ce sont des dispositifs très compliqués à mettre en place. Il faut parfois déroger au droit commun, et cela demande aux professeurs des universités-praticiens hospitaliers qui veulent s’y investir de sacrifier une partie de leur carrière.
J’aurais aimé ne pas avoir besoin de déposer cette proposition de loi. Mais elle est nécessaire, avec une perspective ambitieuse, mais pas à vingt ans, parce qu’il y a déjà un terreau. Un gros travail a été fait par la région. L’objet de ma proposition de loi n’est pas de parler de la déclinaison territoriale – je ne veux pas préempter le travail en cours. Il y a un terreau, un vivier universitaire, de nombreuses ressources, une diaspora médicale de spécialistes corses sur laquelle on peut s’appuyer pour l’enseignement, pour compléter l’offre de soins. Je suis assez confiant de ce côté.
J’ai entendu une expression qui m’a fait mal, parce que je suis médecin : « Le meilleur médecin en Corse, c’est l’avion. » On l’entend tous les jours, malheureusement. Une amie m’a appelé il y a quelques jours parce qu’elle n’arrivait pas à avoir de rendez‑vous pour sa mère qui avait un diagnostic délicat. Elle avait pris l’avion et était aux urgences de Marseille. C’est le quotidien des Corses. Sa mère attend dans un Airbnb à Marseille un rendez‑vous qu’elle aura dans quelques jours et qu’elle n’aurait eu que dans deux ou trois semaines en Corse.
Nous allons revenir sur la notion de spécificité, qui est très importante, pas seulement dans ce débat. Comprendre les spécificités corses, aussi bien démographiques, géographiques, sociétales que sociales permettrait de débloquer nombre de situations, en matière d’agriculture et de déchets, entre autres.
La formation est un élément essentiel. Notre université est en ordre de bataille. De mémoire, quatorze promotions de première année y sont passées. On sait que 70 % des médecins généralistes reviennent. En revanche, nous ne sommes pas attractifs pour les spécialistes. L’attractivité est l’une des raisons pour lesquelles les territoires se battent pour avoir un CHU. Vous connaissez cela, monsieur Di Filippo, avec le CHR Metz-Thionville et la concurrence du Luxembourg.
Le financement est un problème global dans tous les établissements français et n’est pas spécifique aux CHU.
Monsieur Bentz, à titre personnel, l’échelon départemental ne me semble pas le meilleur. Diminuer le seuil de population complexifie.
Article 1er : Principe d’au moins un centre hospitalier universitaire par région
Amendement AS2 de M. Paul-André Colombani
M. le rapporteur. La formulation habituelle laisse entendre que c’est le chef‑lieu de région qui est susceptible d’héberger le CHU. Cela n’a certes pas empêché certaines régions de bénéficier de deux CHU, mais je ne souhaite pas qu’elle contraigne le déploiement du CHU en Corse.
M. Laurent Marcangeli (HOR). Je voterai cet amendement. Michel Castellani s’est parfois élevé contre le fait que le chef‑lieu de région qui est Ajaccio soit cité. En cosignant cet amendement, j’ai montré qu’il ne saurait y avoir de problème entre Ajaccio et Bastia.
M. Jean-Félix Acquaviva (LIOT). L’amendement rend compte des travaux en cours de la collectivité de Corse, des acteurs politiques et des professeurs de médecine qui travaillent avec des acteurs médicaux. Nous nous sommes penchés sur les autres CHU et nous nous orientons vers une trajectoire par étapes d’un modèle adapté à la Corse : multisites, notamment dans sa gouvernance, avec des partenariats public-privé.
M. Philippe Vigier (Dem). C’est un amendement plein de bon sens. Dans ma région, le CHU n’est pas dans la chef‑lieu, mais à Tours. Le second vient d’arriver dans la capitale régionale. Cet amendement permet de régler tous les problèmes.
La commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 1er ainsi modifié.
Après l’article 1er
Amendement AS11 de M. Antoine Villedieu
M. le rapporteur. Passer de 31 à 101 CHU, comme l’impliquerait le rapport ici demandé, me paraîtrait compliqué à mettre en œuvre. Je ne pense pas que le département soit la bonne unité de mesure pour la création de CHU.
La commission rejette l’amendement.
Article 2 : Mise en œuvre du centre hospitalier universitaire de Corse d’ici 2027
La commission adopte l’amendement rédactionnel AS5 de M. Paul‑André Colombani.
Amendement AS3 de M. Paul-André Colombani
M. le rapporteur. L’objet de cet amendement est de repousser l’échéance de la création du CHU à 2030, car il s’agit d’un processus complexe, qui ne peut être que progressif, avec la création d’un CHR précédant celle du CHU proprement dit.
La création d’un CHU prend dix ans en moyenne. En Corse, on ne part pas de zéro ; plusieurs étapes ont été franchies, avec la possibilité d’organiser le premier cycle d’études de médecine à l’université de Corse dès la rentrée 2025 et l’exercice par les hôpitaux de certaines activités hospitalo-universitaires, notamment dans la filière vasculaire. Toutefois, 2027, c’est pratiquement demain. Si cette échéance semblait réaliste il y a encore quelques mois, je préfère désormais la reporter à 2030.
M. Ugo Bernalicis (LFI - NUPES). Chaque fois que l’on fixe une échéance éloignée, on finit toujours par la repousser. Or 2027, c’est dans trois ans. Cela me semble raisonnable, surtout si des étapes ont déjà été franchies : un vivier de professionnels existe, l’université de Corte assurera le premier cycle d’études – les planètes sont alignées, en quelque sorte !
Je veux bien suivre le rapporteur et voter pour un report à 2030, à condition que la majorité se montre constructive. Si elle ne vote pas le texte, je suis pour en rester à 2027 : je ne vois pas pourquoi on en rabattrait si elle ne fait aucun effort.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS6 de M. Paul-André Colombani
M. le rapporteur. Tel qu’il est rédigé, l’article 2 pourrait laisser penser qu’il faudra commencer à se préoccuper de la création d’un CHU en Corse seulement en 2030. Or il est évident que les étapes que constituent la création d’un CHR puis celle d’un CHU devront être enclenchées dès l’adoption de la proposition de loi, afin que l’État soit en conformité avec l’obligation d’un CHU par région au plus tard en 2030. Je propose donc une légère reformulation de l’article 2 pour lever le doute.
M. Marc Ferracci (RE). Cette reformulation est cohérente avec l’amendement qui vient d’être adopté. Il aurait en effet été un peu acrobatique de prévoir de tels délais à l’horizon 2027.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS4 de M. Paul-André Colombani
M. le rapporteur. Dans la continuité de ce que nous avons voté à l’article 1er, il s’agit d’indiquer que le CHU sera créé au sein de la région, sans qu’il soit fait mention du chef‑lieu de région.
La commission adopte l’amendement.
Amendement AS12 de M. Marc Ferracci et sous-amendement AS13 de M. Paul‑André Colombani
M. Marc Ferracci (RE). Il est proposé que le décret d’application tienne compte des spécificités locales dans l’établissement des modalités de mise en place du CHU. En effet, il peut être opportun d’envisager un CHU multisites. De plus, l’offre de soins en Corse se conçoit dans une relation vertueuse entre le public et le privé afin de répondre aux besoins de la population. Il me semble pertinent d’introduire cette nuance dans le texte, en cohérence avec les amendements déjà adoptés.
M. le rapporteur. Avis favorable sous réserve de l’adoption de mon sous‑amendement rédactionnel. Tout tourne autour des spécificités territoriales, qu’elles soient géographiques ou démographiques : s’il n’y en avait pas, cela fait longtemps qu’il y aurait un CHU en Corse.
La commission adopte le sous-amendement puis l’amendement sous‑amendé.
Amendement AS1 de M. Guillaume Garot
M. Guillaume Garot (SOC). Il s’agit de prendre un peu de hauteur en évaluant les inégalités d’accès aux soins hospitaliers en France. Il est important que le Parlement soit instruit de tout cela pour pouvoir développer une politique publique efficace à l’échelle nationale. Merci aux Corses de nous le permettre !
M. le rapporteur. Vous demandez au Gouvernement de remettre un rapport portant sur un périmètre particulièrement large au regard de l’ambition de ma proposition de loi. Si cet amendement était adopté, nous devrions tout interrompre parce que nous en sommes à l’étape d’après. Il me semble que votre demande de rapport trouverait davantage sa place dans le cadre de la mission d’évaluation en cours concernant les lois « OTSS » et « Rist ».
Avis défavorable.
M. Guillaume Garot (SOC). Je maintiens mon amendement mais nous le retravaillerons pour la séance.
La commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’article 2 modifié.
Après l’article 2
Amendements AS7 et AS8 de M. Ugo Bernalicis
M. Ugo Bernalicis (LFI - NUPES). L’amendement AS7 a pour objet la remise d’un rapport par le Gouvernement portant sur les moyens humains et financiers alloués aux différents centres hospitaliers universitaires, en particulier au futur CHU de Corse. Il s’agit de contraindre l’État à se fixer lui-même sa propre feuille de route pour atteindre le but fixé en 2030. On en a connu, des lois qui n’étaient pas appliquées faute de parution des décrets ! Je ne voudrais pas que le Gouvernement, fort habilement, puisse ne rien faire.
L’amendement AS8 vise à rappeler qu’il ne s’agit pas d’un caprice des Corses mais que la situation actuelle est le résultat d’un déficit volontaire des moyens consacrés à la santé en Corse. Toutefois, le rapporteur ayant brillamment décrit la situation dans sa présentation liminaire, je retire cet amendement.
M. le rapporteur. La question des moyens financiers et humains alloués aux CHU est légitime, mais il faut veiller à ne pas dénaturer la proposition de loi. Votre amendement, en intégrant le CHU de Corse dans l’évaluation que vous souhaitez de l’ensemble des CHU, pose un problème de temporalité et n’est pas opérant.
M. Ugo Bernalicis (LFI - NUPES). Nous allons le retravailler pour la séance, car nous souhaitons savoir comment cette proposition de loi sera traduite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je ne voudrais pas en effet que l’accord auquel nous devrions parvenir ne donne lieu à aucune application concrète.
Les amendements sont retirés.
Article 3 : Gage financier
La commission adopte l’article 3 non modifié.
Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.
M. le rapporteur. Je vous remercie pour ce vote unanime. Nous avions l’habitude de dire que notre ancien collègue François Pupponi était le sixième député de la Corse. Vous êtes beaucoup plus nombreux aujourd’hui, si j’en crois les 125 signataires de cette proposition de loi, et j’en suis particulièrement heureux !
*
* *
En conséquence, la commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
– Texte adopté par la commission : https://assnat.fr/zgbARv
–Texte comparatif : https://assnat.fr/WplLRT
– 1 –
ANNEXE N°1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR Le RAPPORTEUR
(Par ordre chronologique)
Audition conjointe
– Mme Laura Ponzevera Franceschini, directrice de l’association Inseme
– Mme Catherine Riera, présidente de l’association La Marie Do
Mme Bianca Fazi, conseillère exécutive de Corse en charge de la santé et du social, et Dr Nicole Carlotti, directrice de la promotion de la santé à la Collectivité de Corse
Table ronde
– Pr Gilles Capellier
– Pr Laurent Papazian
– Pr Frédéric Collart
Table ronde
– M. Christophe Arnould, directeur du Centre hospitalier de Bastia
– M. Jean-Luc Pesce, directeur du Centre hospitalier d’Ajaccio
– M. Jean Canarelli, président du conseil de l’ordre, directeur de clinique à Ajaccio, et Mme Aurélie Barbot-Azzopardi, juriste de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) Sud-Est
Université de Corse – M. Dominique Federici, président, et M. Éric Leoni, vice-président de la commission de la formation et de la vie universitaire
Agence régionale de santé de Corse – Mme Marie-Hélène Lecenne, directrice générale
– 1 –
Annexe n° 2 :
textes susceptibles d’Être abrogÉs ou modifiÉs À l’occasion de l’examen de la Proposition de loi
Proposition de loi |
Dispositions en vigueur modifiées |
|
Article |
Codes |
Numéro d’article |
1er |
Code de la santé publique |
L. 6141‑2 |
([1]) Art. 8 bis de la loi n° 85‑30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne : « Sans préjudice de la présente loi, et pour l’application et l’interprétation de celle-ci notamment, la spécificité de la Corse, territoire montagneux et insulaire présentant le caractère d’"île-montagne", par suite soumise à un cumul de contraintes, est prise en considération conformément à l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. »
([2]) « Actualisation des coefficients géographiques des départements d’Outre-mer et de Corse – Révision de la méthodologie d’objectivation des surcoûts supportés par les établissements de santé des DROM et de Corse », Drees, novembre 2023.
([3]) Statistiques Insee, 2024.
([4]) Statistiques Insee, 2023.
([5]) Statistiques Insee, 2024.
([6]) « Les retraités et leur retraite », Drees, édition 2020.
([7]) « Projet de création du CHRU de Corse », rapport final, Collectivité de Corse, juillet 2023.
([8]) Arrêté n°2023/123 du 20 avril 2023, ARS Corse.
([9]) Tomographe à émission de positrons.
([10]) « Projet de création du CHRU de Corse », rapport final, Collectivité de Corse, juillet 2023.
([11]) « Déplacements médicaux vers le continent :innover pour supprimer les inégalités territoriales », Cesec, 2018.
([12]) Proposition de loi n° 1346 relative au rétablissement de la continuité territoriale des soins en matière de déplacements médicaux depuis la Corse vers le continent, déposée le 24 octobre 2018.
([13]) « Prise en charge des patients atteints d’un rétrécissement aortique en Corse : efficience et sécurité de la filière TAVI », Dr Francesca Ferrandi, novembre 2023.
([14]) Implantation percutanée d’une prothèse valvulaire aortique.
([15]) Sondage Paroles de Corse-Opinion of Corsica – C2C.
([16]) Ordonnance n° 58‑1373 du 30 décembre 1958 relative à la création des centres hospitaliers et universitaires, à la réforme de l’enseignement médical et au développement de la recherche médicale.
([17]) Article L. 6141‑2 du code de la santé publique.