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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
SEIZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 mai 2023.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
en application de l’article 146 du Règlement
PAR LA COMMISSION DES FINANCES, dE L’Économie gÉnÉrale
et du contrÔLE BUDGÉTAIRE
sur la contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance
ET PRÉSENTÉ PAR
Mme Perrine GOULET,
rapporteure spéciale
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Pages
A. la présentation des différents axes des calpae
a. Le service public de l’insertion
b. La prévention des sorties sèches de l’ASE
2. Les actions d’initiatives départementales
2. Les crédits non consommés ont été reventilés par les commissaires à la lutte contre la pauvreté
C. Des résultats probants pour l’insertion ou la sortie sèche de l’ASE
1. Des résultats probants pour certains
2. D’autres objectifs n’ont pas donné totalement satisfaction
3. Un dialogue quoiqu’il en soit fécond
A. les points positifs des CDPPE
1. Le déclenchement des actions nouvelles
2. Le succès des « projets innovants » et de différents objectifs
3. Un bilan provisoire difficile à établir mais des évolutions positives déjà à noter
B. Les difficultés de mise en œuvre des CDPPE
1. Des relations parfois complexes entre les départements et les Agences régionales de santé (ARS)
2. Un manque de moyens pour suivre les politiques de l’ASE et des PMI par les DDETS
III. Les pistes d’amélioration de la contractualisation avec les collectivités territoriales
A. un pilotage technico-administratif et financier trop lourd pour les départements…
1. La charge trop lourde du reporting
2. Une autonomie de gestion insuffisante pour les départements
3. La nécessité de la pluriannualité pour un meilleur pilotage financier des contrats
B. …QUI NE permet pourtant pas un réel contrôle de leurs actions
1. Un dialogue de performance qui repose sur les données purement déclaratives des départements
2. Un effet de levier à mieux objectiver
3. Une évaluation nationale incomplète
C. Des interrogations sur la gouvernance
1. Un pilotage national insuffisant
2. Un meilleur partage des données attendu
3. Les questionnements sur l’intégration de nouveaux cosignataires
4. Des réflexions à mener sur l’articulation des politiques sociales et territoriales
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE
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La politique de contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales dans le champ de la politique sociale s’est enrichie ([1]) au cours de la dernière législature, par la signature en 2019 des conventions d’appui à la lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi (CALPAE) et, à partir de 2020, des contrats départementaux de prévention et de protection de l'enfance (CDPPE), constituant les volets territorialisés respectifs de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté et de la Stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance.
En soutenant l’action des départements (et des métropoles pour les CALPAE) par des crédits budgétaires dédiés, les objectifs de ces deux contractualisations sont clairs : inciter les départements à renforcer leur action dans leur champ de compétence tout en améliorant la coopération entre les services de l’État d’un côté, représentés par les directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) et les agences régionales de santé (ARS) dans le cas des CDPPE, et les collectivités territoriales et leurs groupements (départements et métropoles) de l’autre. C’est le principe même d’égalité républicaine qui conduit l’État à accompagner les collectivités territoriales en charge des politiques de solidarité, dont le bon exercice est si fondamental pour la cohésion sociale de notre pays : il ne serait pas possible d’accepter les inégalités de traitement quand il s’agit de l’insertion des personnes sans emploi, de la protection maternelle et infantile (PMI) ou de l’aide sociale à l’enfance (ASE). À partir de ce constat simple, la question est de savoir si la contractualisation, souhaitable en théorie, a été réellement efficace dans les faits.
Si des marges de progrès importantes existent en matière de pilotage et de suivi de l’exécution financière comme des indicateurs de performance, en matière d’autonomie de gestion dont les départements pourraient davantage disposer ou d’adéquation des objectifs aux enjeux de chaque territoire, ces deux contractualisations ont rempli les deux objectifs précités : des actions nouvelles ou renforcées ont été mises en œuvre dans le champ des politiques couvertes par les CDPPE et les CALPAE et un dialogue renforcé, voire inédit, s’est instauré entre l’État déconcentré et les collectivités territoriales.
À partir de ce constat, la rapporteure spéciale appelle à la prolongation de ces contractualisations. Elle salue le lancement prochain des pactes locaux de solidarité appelés à prendre la suite des CALPAE dès 2024 et souhaite qu’un prolongement des CDPPE soit proposé après 2024, dernière année de leur mise en œuvre. C’est dans ce contexte que les recommandations de la rapporteure spéciale doivent être analysées.
Recommandation n° 1 : réarmer les services déconcentrés de l’État sur les enjeux de l’ASE, de la PMI et pour le suivi des politiques du champ médico-social en général.
Recommandation n° 2 : limiter le nombre des indicateurs en s’assurant de leur stabilité et lisibilité tout au long des contrats à partir de leur coconstruction entre les services de l’État et les départements.
Recommandation n° 3 : laisser davantage de liberté aux départements dans le choix des politiques à prioriser à partir d’un diagnostic partagé entre les services de l’État et les conseils départementaux.
Recommandation n° 4 : renforcer la fongibilité des enveloppes budgétaires déléguées par l’État aux départements.
Recommandation n° 5 : renforcer la pluriannualité des financements du programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes (action 17 pour les CDPPE et action 19 pour les CALPAE).
Recommandation n° 6 : renforcer la fiabilité et la capacité d’exploitation des indicateurs de performance dont les données sont transmises par les départements.
Recommandation n° 7 : mieux contrôler le financement des contractualisations par les départements en limitant la valorisation des crédits.
Recommandation n° 8 : améliorer le partage des données entre administrations centrales et administrations déconcentrées d’un côté, et entre les opérateurs locaux et les conseils départementaux de l’autre.
I. Les calpae : un effet moteur indéniable pour l’action sociale en faveur de l’insertion et de la lutte contre la pauvreté
Les conventions d’appui à la lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi (CALPAE) s’inscrivent dans la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté (2019-2022). Elles ont pour but de garantir une action coordonnée de l’État et des collectivités territoriales autour de deux priorités nationales appelant un effort à la fois généralisé sur tout le territoire et adapté aux spécificités locales : la lutte contre les inégalités sociales dès le plus jeune âge et l’engagement d’une politique de sortie de la pauvreté par l’insertion et l’emploi. L’accès aux droits et aux soins a également constitué un axe fort pour la poursuite de ces deux grandes priorités.
Les CALPAE ont réuni la signature des préfets, des présidents des 99 conseils départementaux volontaires ([2]), de l’ensemble des 22 métropoles ainsi que des villes d’Amiens et de Perpignan pour les territoires concernés. La cosignature des quelques régions volontaires a été abandonnée en 2021, faute de plus-value réelle constatée par la mission menée par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), proposant une évaluation à mi-parcours des CALPAE. ([3])
Au niveau national, trois directions d’administration centrale ont participé au pilotage des CALPAE. Les circulaires annuelles ([4]) de mise en œuvre ont été ainsi cosignées par le directeur général de la cohésion sociale (DGCS), responsable budgétaire du programme 304 qui contient à son action 19 les crédits alloués aux CALPAE, le délégué interministériel à la prévention et à la lutte contre la pauvreté (DIPLP) qui en a préparé la rédaction et est en charge de l’animation générale du suivi de la mise en œuvre des CALPAE, ainsi que le délégué général à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), dont l’action s’est concentrée sur les enjeux d’insertion. Au niveau local, la négociation, la coordination et le pilotage des CALPAE sont assurés pour l’État par les commissaires à la lutte contre la pauvreté (CLP) nommés et placés auprès des préfets de région depuis 2019, ainsi que les directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) et les directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) placées sous l’autorité du préfet de région et du préfet de département. Avec les services de l’État, les départements ont animé le dialogue de gestion se matérialisant par l’existence d’au moins une réunion annuelle des comités locaux de suivi et d’évaluation préparant la remise du rapport annuel d’exécution rédigé par les départements. Ce rapport annuel d’exécution vérifie l’atteinte des objectifs fixés l’année précédente et prépare la rédaction des avenants précisant le niveau des crédits qui sera effectivement délégué.
A. la présentation des différents axes des calpae
Les CALPAE sont conçues autour d’objectifs socles et d’actions d’initiative départementales.
Les objectifs socles des CALPAE couvraient initialement des thématiques diverses comme l’insertion, la lutte contre les sorties sèches de l’ASE ou l’accès aux droits et à la mobilité.
a. Le service public de l’insertion
L’amélioration de l’insertion des bénéficiaires du revenu de solidarité active (BRSA) a constitué un des axes majeurs des CALPAE, articulée autour de deux objectifs : le renforcement de l’accompagnement des BRSA et de la garantie d’activité.
i. L’accompagnement des BRSA
La mesure socle relative à l’orientation et à l’accompagnement des allocataires du RSA répond à un triple objectif d’orientation rapide de l’allocataire vers son référent unique, d’initialisation d’un parcours d’accompagnement et de rencontre de l’intégralité des allocataires pour initier ces parcours. Ce triple objectif s’est traduit par la mesure de trois valeurs cibles :
– 100 % d’orientations notifiées à tous les nouveaux entrants en moins d’un mois à compter de la date de notification de l’ouverture du droit au département ;
– 100 % de premiers rendez-vous d’accompagnement fixés en moins de deux semaines à compter de la notification de l’orientation ;
– 100 % de contrats d’engagements réciproques (CER) signés en moins de deux mois à compter de la date de notification de l’ouverture du droit au département.
ii. La garantie d’activité
La garantie d’activité est une offre de service d’accompagnement qui s’appuie sur deux actions :
– l’accompagnement global porté par Pôle emploi et les conseils départementaux, certains départements ayant pu engager des dépenses d’ingénierie dans le but d’améliorer la coordination avec Pôle emploi et de renforcer l’animation et le pilotage du dispositif ;
– la garantie d’activité départementale (GAD) pilotée par les départements. Cette mesure a vocation à prendre la forme d’appels à projet, avec pour objectif de renforcer l’offre d’accompagnement par des référents uniques assurant un accompagnement complémentaire sur les volets social et professionnel et mobilisant des moyens et actions spécifiques visant la multiplication des mises en situation professionnelle des personnes.
Les cibles quantitatives de personnes devant bénéficier d’un accompagnement global ou de la GAD ont été définies département par département. Les actions menées ont été diverses : à titre d’exemple, le département du Jura a financé deux associations visant à accompagner les BRSA qui exercent en tant qu’entrepreneurs indépendants afin, soit de permettre aux entrepreneurs de sortir du RSA par un développement de leur entreprise soit, à l’inverse, d’acter l’abandon de leur projet lorsque celui-ci n’est pas jugé viable – les associations passant ainsi le relais à des conseillers professionnels.
L’articulation des objectifs d’insertion des CALPAE avec le SPIE
(service public de l’insertion et de l’emploi)
La mise en œuvre du service public de l’insertion et de l’emploi (SPIE) constitue l’une des mesures de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. Le SPIE a pour ambition de renforcer l’efficacité de l’accompagnement vers l’emploi des personnes qui rencontrent des difficultés sociales et professionnelles, et parmi eux les allocataires du RSA, pour s’insérer sur le marché du travail. Il poursuit les objectifs suivants : simplifier les démarches, mieux coordonner les acteurs, proposer des parcours favorisant le retour à l’emploi tout en levant les difficultés rencontrées, garantir un parcours suivi et sans rupture. Après une expérimentation lancée en 2020, 79 territoires sont aujourd’hui concernés par le déploiement territorial du SPIE.
La complémentarité des deux démarches (CALPAE et SPIE) a permis d’engager la transformation des processus attachés aux parcours (entretien, orientation, forme d’accompagnement plus intensif d’ordre social et professionnel) des BRSA de nature à faire progresser l’efficacité des parcours d’accompagnement.
Le cadre relativement souple de ces contractualisations a permis d’adapter les initiatives aux réalités territoriales, ce qui explique une diversité justifiée des projets et exige à moyen terme, selon le DGEFP, une plus grande égalité de traitement sur les territoires par la garantie d’un socle commun de services. Malgré un investissement financier modeste de l’État, la logique pluri‑partenariale du SPIE est désormais ancrée dans 80 % des territoires autour d’un noyau dur d’acteurs souvent composé du Conseil départemental, de la DDETS et de Pôle emploi.
Source : DGEFP.
b. La prévention des sorties sèches de l’ASE
Élaborée par un groupe de jeunes concernés, l’objectif de prévention des sorties sèches de l’ASE a identifié cinq besoins fondamentaux pour garantir l’autonomie des jeunes sorties de l’ASE : le logement, le revenu, l’insertion sociale et professionnelle, l’accès au soin et la couverture santé, le maintien des liens.
Au regard de la variété des situations territoriales, des marges de manœuvre significatives sont octroyées aux départements dans le déploiement de leurs actions avec des objectifs relatifs au taux de jeunes pris en charge dans le cadre du référentiel. Concernant les thématiques d’accompagnement, l’accès au logement est l’enjeu le plus investi par les départements (20 % des actions) malgré une grande diversité de thématiques traitées.
Les typologies d’actions et de publics visés sont également variées. Bien qu’une part importante des actions consiste à accompagner des jeunes issus de l’ASE devenus majeurs (59 % des actions menées entre 2018 et 2020), des actions ont également été mises en œuvre auprès des mineurs pour mieux les préparer à l’autonomie (27 % des actions menées) ou même auprès de jeunes en errance (5 % des actions menées) pour les repérer et leur permettre d’être accompagnés dans la mesure où des diagnostics locaux ont montré qu’une part importante d’entre eux avait déjà été suivie par l’ASE.
Cet objectif de prévention des sorties sèches de l’ASE a été retiré des CALPAE en 2022 en vue d’intégrer les CDPPE, comme le recommande l’IGAS dans son rapport de 2021. Cette modification de périmètre, jamais confortable en cours d’exécution d’un contrat, est cependant logique aux yeux de l’ensemble des acteurs rencontrés. Du point de vue budgétaire, les crédits alloués à la lutte contre les sorties sèches de l’ASE font l’objet d’une ligne spécifique dans l’action 17 du programme 304 : 50 millions d’euros ont ainsi été alloués aux départements en 2022 pour la poursuite de cet objectif.
c. La refonte du travail social au service des familles (formation ingénierie, premier accueil social, référent de parcours)
La refonte du travail social au service des familles se concentre autour de différents objectifs : la généralisation des démarches de premier accueil social (i), la création d’un référent de parcours (ii) et la formation des travailleurs sociaux (iii).
i. Le point d’accueil social inconditionnel de proximité (PASIP)
La mise en place d’un accueil social inconditionnel de proximité vise à garantir que toute personne rencontrant des difficultés ou souhaitant exprimer une demande d’ordre social bénéficie d’une écoute dans la globalité de ses besoins et préoccupations, à moins de 30 minutes de son lieu de vie. Cette mesure part des points d’accueils existants qui garantissent un accueil neutre, ouvert à tous et facilement accessible.
Les crédits ont permis le financement de dépenses d’ingénierie, d’amélioration des systèmes d’information favorisant l’échange de données et parfois des dépenses de personnel. Plusieurs types d’actions en ont résulté :
– l’amélioration de la coordination entre les différents points d’accueil sociaux – par exemple des partenariats noués entre les points d’accueil départementaux et les unions départementales des centres communaux d’action sociale (CCAS) et centres intercommunaux d’action sociale (CIAS), les caisses de Sécurité sociale, les agences Pôle Emploi, par le biais de conventions partenariales, de formations interprofessionnelles et de travaux collectifs sur les parcours des usagers ;
– le développement de la bonne information des usagers sur les points d’accueil existants en améliorant leur visibilité (au moyen par exemple de cartographies numériques) ;
– le développement de démarches dites d’« aller-vers », par exemple par des délocalisations de permanences ou des visites à domicile de la part d’assistantes sociales des conseils départementaux ;
– l’articulation entre les différents types d’accueil physique, à distance et numérique, par exemple au moyen de la création d’une plateforme de prise de rendez-vous ou un numéro unique.
ii. Le référent de parcours
La démarche de référent de parcours vise une meilleure coordination du parcours des usagers et l’identification d’un interlocuteur privilégié pour la personne accompagnée. Les crédits en provenance de l’État ont permis le financement de formations et de dépenses de personnel.
La pluralité des types de référent de parcours reflète la diversité des approches retenues par les conseils départementaux et les degrés variables d’appropriation par les départements : référent de parcours jeunesse, référent de parcours insertion, référent de parcours enfance famille, référent de parcours situations complexes, référent de parcours sociaux, référent de parcours logement, référent de parcours santé.
iii. La formation des professionnels du travail social
Les objectifs de formation ont concerné deux tiers des départements ayant initialisé la contractualisation.
Le catalogue de formation du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFT) a été enrichi des six thématiques prioritaires définies avec les travailleurs sociaux : la participation des personnes accompagnées, le développement social et travail social collectif, le travail social et numérique, « l’aller vers », le travail social et territorial, l’insertion socio‑professionnelle. Les agents d’accueil, qui constituent la première ligne de l’accompagnement social, ont également bénéficié de ces formations.
Sur le volet numérique, les départements ont également été incités à favoriser le recours aux outils développés dans le cadre de France Relance et par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), qui donnent aux travailleurs sociaux les moyens d’accompagner plus efficacement les usagers dans leur accès aux droits.
d. La mobilité
L’enjeu de la mobilité inclusive a été ajouté aux CALPAE en 2021. Deux actions ont été déployées dans ce cadre.
La première action a visé à couvrir l’ensemble territoire par des plateformes mobilité. Les crédits de l’État ont permis :
– le financement de l’ingénierie initiale ;
– le financement des dépenses d’investissement nécessaires à la mise en place de la plateforme ;
– les dépenses de fonctionnement liées aux coûts de structures et de lancement ;
La deuxième action a consisté à accompagner le public en insertion via la prescription de mesures d’accompagnement à la mobilité. Les crédits ont été fléchés vers le renforcement des prestations d’accompagnement mises en œuvre par les plateformes de mobilité, hors aides financières directes. Cela a pu se traduire par le financement de postes (par exemple de conseillers mobilité) ou d’investissement (achat de véhicules).
Les maraudes mixtes ont réuni des agents des départements et de l’État. Spécialisées dans la protection de l’enfance, ces maraudes ont visé à lutter contre la mendicité de rue. Elles n’ont pas été généralisées sur tout le territoire mais se sont révélées efficaces notamment en Île‑de‑France.
2. Les actions d’initiatives départementales
Le bilan établi par l’IGAS en 2021 estimait que 50 % des actions d’initiatives locales concernait l’insertion sociale et professionnelle, 20 % la petite enfance et la famille, chacun des autres items représentant environ 5 % des actions financées (« hébergement et logement », « santé », « réussite scolaire », « accès aux droits »). La répartition des actions d’initiative locale par thématique en 2021 et 2022 est similaire dans ses grandes lignes à l’estimation de l’IGAS selon les estimations de la DGCS.
Un travail de recensement a été mené en 2021 afin d’établir une cartographie des projets financés dans le cadre des initiatives libres des CALPAE ou des crédits à la main des commissaires à la lutte contre la pauvreté ([5]). En 2023 est laissée la possibilité dans le cadre des CALPAE de porter des actions de lutte contre la précarité énergétique, au travers d’une aide au déploiement de la démarche « SLIME » qui visent au repérage des ménages, à la réalisation de diagnostics sociotechniques et à l’accompagnement vers les solutions adaptées dans ce champ.
B. l’exécution financière souligne l’intérêt des actions d’initiative locale et la priorité de l’insertion
La circulaire du 18 novembre 2018 ([6]) prévoyait un engagement de l’État avec le soutien du fonds de lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi (FAPI) ([7]) devant atteindre 210 millions d’euros en 2022.
plan de financement initial des CALPAE
Source : Circulaire n° DIPLP/2018/254 du 18 novembre 2018 relative à la mise en œuvre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.
Au total, près de 525 millions d’euros auront été effectivement consommés par les départements au titre des CALPAE sur la période 2019-2022, soit moins de 10 % du budget total de la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Les financements pour les objectifs socles ont été alloués aux départements selon des clés de répartition objectives explicitées dans les circulaires adressées aux préfets : critères de répartition relatifs au fonds d’appui aux politiques d’insertion résultant du décret n° 2017-202 du 17 février 2017 relatif au fonds d’appui aux politiques d’insertion pour l’insertion des BRSA, remontée locale des besoins d’accompagnement pour les jeunes de l’ASE en risque de sortie sèche, répartition forfaitaire des crédits selon le niveau de population des départements pour les objectifs relatifs au PASIP ou aux référents de parcours.
Les crédits délégués non consommés ont justifié un niveau de délégation des crédits l’année suivante inférieur au montant des crédits prénotifiés ([8]). Cette « réfaction » de crédits ne s’est jamais fondée sur la performance de l’action départementale et l’atteinte des objectifs fixés mais sur les retards d’exécution des actions mises en œuvre : difficultés d’ingénierie, recrutements non effectués, manque d’offres sur le territoire (en cas de recours à un prestataire) pour réaliser certaines actions. Ces crédits non délégués ont abondé les enveloppes à destination des CLP pour financer des actions d’initiative locale ou d’autres actions ayant trait à la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.
2. Les crédits non consommés ont été reventilés par les commissaires à la lutte contre la pauvreté
Les tableaux ci-dessous retracent l’exécution financière des CALPAE de 2019 à 2022 par objectif (incluant les actions d’initiative sociale) : le premier accueil social, l’insertion des BRSA et la lutte contre les sorties sèches de l’ASE ont concentré la plus grande partie des financements dédiés aux objectifs socles, avec une progression marquée des dépenses d’insertion. Les actions d’initiative locale ont représenté quant à elles près du quart des crédits consommés en 2022. Le financement des actions d’initiative locale a été encadré par le principe de fongibilité asymétrique : les crédits fléchés sur les actions d’initiative locale peuvent être reventilés sur les objectifs socles alors que l’inverse fut impossible tout au long des contrats.
exécution des calpAe de 2019 à 2022 par objectif
(en millions d’euros)
|
2019 |
||||
|
Notification |
Délégation AE |
Délégation CP |
Consommation AE |
Consommation CP |
1er accueil social (PASIP) |
Nc |
9,45 |
9,45 |
10,49 |
10,49 |
Lutte contre les sorties sèches de jeunes de ASE |
Nc |
10,00 |
10,00 |
13,87 |
13,86 |
Formation des travailleurs sociaux |
Nc |
0,00 |
0,00 |
0,18 |
0,18 |
Insertion des BRSA et garantie d’activité/Mobilité |
Nc |
29,07 |
29,07 |
22,22 |
22,22 |
Référents de parcours |
Nc |
6,15 |
6,15 |
4,84 |
4,84 |
Maraudes mixtes |
Nc |
1,97 |
1,97 |
1,58 |
1,58 |
Initiatives locales |
Nc |
16,12 |
16,12 |
20,86 |
20,67 |
Autres |
Nc |
5,11 |
5,11 |
4,4 |
4,4 |
Dont préventions spécialisées |
Nc |
2,61 |
2,61 |
3,87 |
3,87 |
Dont bassin minier |
Nc |
2,50 |
2,50 |
0,00 |
0,00 |
Dont FAPI |
Nc |
0,00 |
0,00 |
0,53 |
0,53 |
TOTAL |
Nc |
77,88 |
77,88 |
78,43 |
78,24 |
|
2020 |
||||
|
Notification |
Délégation AE |
Délégation CP |
Consommation AE |
Consommation CP |
1er accueil social (PASIP) |
9,45 |
9,45 |
9,45 |
8,59 |
8,59 |
Lutte contre les sorties sèches de jeunes de ASE |
10,00 |
10,00 |
10,00 |
15,34 |
15,35 |
Formation des travailleurs sociaux |
7,77 |
5,51 |
5,51 |
6,93 |
6,93 |
Insertion des BRSA et garantie d’activité/Mobilité |
58,75 |
58,75 |
58,75 |
46,70 |
46,52 |
Référents de parcours |
6,15 |
6,15 |
6,15 |
5,32 |
5,32 |
Maraudes mixtes |
1,91 |
2,00 |
2,00 |
1,71 |
1,71 |
Initiatives locales |
56,38 |
56,38 |
65,76 |
49,77 |
49,84 |
Autres |
4,02 |
3,02 |
3,02 |
6,67 |
6,67 |
Dont préventions spécialisées |
3,02 |
3,02 |
3,02 |
3,28 |
3,28 |
Dont bassin minier |
1,00 |
0,00 |
0,00 |
0,84 |
0,84 |
Dont FAPI |
0,00 |
0,00 |
0,00 |
2,55 |
2,55 |
TOTAL |
154,43 |
151,26 |
160,64 |
141,04 |
140,93 |
|
2021 |
||||
|
Notification |
Délégation AE |
Délégation CP |
Consommation AE |
Consommation CP |
1er accueil social (PASIP) |
9,45 |
8,57 |
8,57 |
10,64 |
10,64 |
Lutte contre les sorties sèches de jeunes de ASE |
10,15 |
13,12 |
13,12 |
15,47 |
15,47 |
Formation des travailleurs sociaux |
4,90 |
2,79 |
2,79 |
2,69 |
2,69 |
Insertion des BRSA et garantie d’activité/ Mobilité |
106,27 |
85,46 |
85,46 |
76,45 |
76,63 |
Référents de parcours |
6,15 |
4,39 |
4,39 |
3,80 |
3,80 |
Maraudes mixtes |
1,76 |
1,28 |
1,28 |
1,26 |
1,26 |
Initiatives locales |
47,94 |
42,69 |
42,69 |
41,78 |
41,90 |
Autres |
4,36 |
2,84 |
2,84 |
5,58 |
5,58 |
Dont préventions spécialisées |
3,36 |
2,82 |
2,82 |
4,11 |
4,11 |
Dont bassin minier |
1,00 |
0,01 |
0,01 |
0,87 |
0,87 |
Dont Fonds d’appui aux politiques de l’insertion |
0,00 |
0,01 |
0,01 |
0,60 |
0,60 |
TOTAL |
190,99 |
161,15 |
161,15 |
157,66 |
157,96 |
|
2022 |
||||
|
Notification |
Délégation AE |
Délégation CP |
Consommation AE |
Consommation CP |
1er accueil social (PASIP) |
9,33 |
6,90 |
6,90 |
6,16 |
6,16 |
Lutte contre les sorties sèches de jeunes de ASE* |
0,00 |
0,00 |
0,00 |
0,04 |
0,04 |
Formation des travailleurs sociaux |
4,88 |
2,38 |
2,38 |
2,26 |
2,26 |
Insertion des BRSA et garantie d’activités / Mobilité |
102,95 |
86,93 |
86,93 |
82,55 |
82,50 |
Référents parcours |
6,11 |
3,93 |
3,93 |
3,75 |
3,75 |
Maraudes mixtes |
1,76 |
1,31 |
1,31 |
1,02 |
1,02 |
Initiatives locales |
46,64 |
38,43 |
38,43 |
38,50 |
38,49 |
Autres |
4,27 |
3,50 |
3,50 |
5,2 |
5,2 |
Dont préventions spécialisées |
3,27 |
2,50 |
2,50 |
3,56 |
3,56 |
Dont Bassin minier |
1,00 |
1,00 |
1,00 |
1,00 |
1,00 |
Dont Fonds d’appui aux politiques de l’insertion |
0,00 |
0,00 |
0,00 |
0,64 |
0,64 |
TOTAL |
175,95 |
143,38 |
143,38 |
139,49 |
139,43 |
Source : Commission des finances après retraitement des données départements transmises par la DGCS.
* Les crédits de lutte contre les sorties sèches de l’ASE ont été sortis des CALPAE en 2022.
Ces tableaux appellent plusieurs remarques d’ordre technique : Les données de 2019 et 2020 présentent plusieurs incohérences, la DGCS ne pouvant pas s’assurer de l’exactitude des données transmises contrairement à 2021 et 2022. De plus, l’exécution 2022 semble montrer une baisse faciale des crédits notifiés. En réalité, des « droits de tirages » régionaux, dans le champ de l’insertion et de la mobilité ont bénéficié aux départements ayant les démarches les plus abouties, permettant une augmentation supplémentaire et notable du nombre de bénéficiaires, ou la mise en œuvre de projets innovants. Sur la demande du commissaire à la lutte contre la pauvreté à la DIPLP et la DGCS, ces crédits ont ainsi pu être délégués en surplus des crédits déjà notifiés dans le cadre de la contractualisation mais ne sont pas retracés dans les tableaux transmis à la rapporteure spéciale, issus du logiciel d’extraction « Chorus ». Cette somme représente 10,09 millions d’euros pour l’insertion et 5,84 millions d’euros au titre de la mobilité : au total 193 millions d’euros ont ainsi été prénotifiés en 2022, soit un montant supérieur à 2021, alors même que les crédits dédiés à la lutte contre les sorties sèches de l’ASE ne sont plus comptabilisés dans les CAPAE. De la même manière, le niveau réel des crédits délégués n’est pas de 143,4 millions d’euros mais de 149 millions d’euros.
Les crédits des CALPAE ont pour la plupart été consommés à un niveau inférieur du niveau des crédits délégués. En 2021, seuls huit départements ont bénéficié de délégation de crédits exactement à la même hauteur que les enveloppes plafond prénotifiées et quatre en 2022. Le niveau d’exécution des crédits par département s’avère hétérogène. Les crédits notifiés non alloués aux conseils départements ont été maintenus à 80 % en 2021 et 100 % en 2022 et mis à disposition du commissaire à la lutte contre la pauvreté pour développer des projets de territoire. Ainsi en 2022, c’est une enveloppe de près de 44 millions d’euros qui a ainsi été allouée aux CLP. Certains départements ont jugé l’usage des enveloppes à la discrétion des CLP relativement peu transparent. Le recours par les CLP aux appels à projet hors CALPAE a été parfois regretté même s’il a également permis de financer des actions innovantes. Les crédits budgétaires à la main des CLP n’étant pas délégués aux départements, on peut regretter une perte de lisibilité de la politique globale mise en œuvre par chaque département.
C. Des résultats probants pour l’insertion ou la sortie sèche de l’ASE
Les tableaux ci-dessous retracent les résultats des indicateurs compilés par la DGCS. Les indicateurs pour 2022, devant être remontés par les départements, n’étaient pas encore compilés et disponibles à la date de rédaction du rapport.
résultat des principaux indicateurs au niveau national en 2020 et 2021 ([9])
|
Prévention des sorties sèches de l’ASE |
Maraudes mixtes |
|||||||
|
Taux de jeunes pris en charge dans le cadre du référentiel |
Taux de jeunes ayant pu choisir leur personne lien au moment du passage à la majorité |
Taux de jeunes avec un logement stable |
Taux de jeunes ayant accès à des ressources financières |
Taux de jeunes ayant un parcours professionnel et/ou scolaire |
Nombre de premiers contacts établis |
Nombre de familles et d'enfants suivis |
Nombre de mises à l'abri de familles et d'enfants |
Nombre d'ouvertures de droits pour les enfants et familles |
2020 |
75 % |
55 % |
70 % |
55 % |
67 % |
9 135 |
9 185 |
7 947 |
8 134 |
2021 |
74 % |
58 % |
78 % |
67 % |
74 % |
ND |
ND |
ND |
ND |
|
Premier accueil inconditionnel de proximité |
Accompagnement des BRRSA |
Référent de parcours |
|||||
|
Taux de couverture du premier accueil social inconditionnel accessible à moins de 30 min |
Nombre total de structures engagées dans la démarche du premier accueil |
Nombre total de passages dans une structure de premier accueil |
Pourcentage de nouveaux entrants au RSA accompagnés en 1 mois et moins |
Pourcentage de rendez-vous fixé en moins de 2 semaines parmi l'ensemble des rendez-vous fixés. |
Part des CER signés en moins de 2 mois parmi l'ensemble des premiers CER |
Nombre de personnes formées par des formations CNFPT |
Nombre de personnes formées par des formations CD |
2020 |
92 % |
6 148 |
6 244 339 |
51 % |
51 % |
58 % |
5 618* |
8 030* |
2021 |
95 % |
7 474 |
8 914 728 |
56 % |
59 % |
64 % |
ND |
ND |
|
Garantie d'activité |
Référents de parcours |
||||
Année de contractualisation |
Nombre de BRSA orientés vers la GAD |
Nombre de bénéficiaires du RSA en cours d'accompagnement par la GAD |
Nombre de bénéficiaires du RSA orienté vers l'accompagnement global (PE) |
Nombre de bénéficiaires du RSA en cours d'accompagnement par l'accompagnement global (PE) |
Nombre d'intervenants sociaux formés ou sensibilisés à la démarche du référent de parcours |
Nombre total de personnes accompagnées par un référent de parcours |
2020 |
82 829 |
127 652 |
43 594 |
37 368 |
8 852 |
118 399 |
2021 |
111 120 |
199 968 |
ND |
ND |
12016 |
182 962 |
1. Des résultats probants pour certains
De façon unanime, le bénéfice des CALPAE a été salué au titre de plusieurs objectifs devant être poursuivis :
– en 2021, 57 % des nouveaux entrants au RSA étaient orientés en moins d’un mois contre 46 % en 2019. Pour ceux ayant signé un contrat d’engagement réciproque, 64 % l’ont fait en moins de 2 mois contre 22 % en 2019. Les incitations de l’État ont poussé les départements à développer les systèmes d’information capables de produire ces données faisant partie de leur socle de compétence, ce qui s’est révélé très bénéfique pour ces derniers. La mesure a également permis de faire en sorte qu’après une diminution continue entre 2009 et 2018, les dépenses d’insertion des départements repartent à la hausse. L’Assemblée des départements de France (ADF) salue une très belle dynamique aussi bien pour l’insertion que la garantie d’activité même si elle regrette l’insuffisance des indicateurs (absence d’un marqueur initial pour les indicateurs relatifs à l’orientation).
– plus de 40 000 jeunes de l’ASE ont bénéficié d’un meilleur accompagnement dans le cadre du référentiel pour éviter les sorties sèches. Son déploiement progressif a permis de passer de 50 % de jeunes pris en charge dans le cadre du référentiel en 2019 à 75 % en 2021. Concrètement, ces jeunes ont pu choisir leur « personne lien », avoir un logement stable ou encore avoir accès à des ressources financières au moment de la sortie de l’ASE. Les départements saluent la qualité des référentiels proposés malgré un financement jugé insuffisant ;
– 10 000 familles ont été rencontrées durant l’année scolaire 2020-2021 par des maraudes mixtes État/département spécialisées dans la protection de l’enfance pour aider les familles à la rue et prévenir la mendicité. 1 330 ont bénéficié d’une ouverture de droit, 350 ont été mis à l’abri et 150 enfants ont fait l’objet d’une mesure de protection de l’enfance. L’expérience montre que la mesure est très pertinente dans certaines régions, notamment en Ile-de-France ;
– la généralisation des accueils sociaux inconditionnels de proximité a permis d’assurer qu’en moyenne 95 % des territoires des départements contractualisant aient une structure engagée dans la démarche à moins de 30 minutes. En se restreignant à celles des seuls départements, elles ont reçu près de 8 millions de visites en 2021. Plus de 7 000 structures étaient engagées dans la démarche en 2021. Les départements regrettent cependant que les partenaires locaux (centres communaux d’action sociale, caisses d’allocation familiale, CARSAT) n’aient pas proposé de liaisons facilitées (numéro dédié), malgré l’engagement des structures nationales.
2. D’autres objectifs n’ont pas donné totalement satisfaction
Certains objectifs n’ont pas totalement donné satisfaction :
– Si en 2021, 12 015 travailleurs sociaux avaient été formés ou sensibilisés à la démarche du référent de parcours pour fluidifier et coordonner les parcours d’accompagnement entre les professionnels impliqués, la plupart des acteurs auditionnés admettent les difficultés à atteindre les objectifs. Par ailleurs, les formations proposées par le CNFPT n’ont pas su répondre aux cahiers des charges des référentiels selon plusieurs départements. Enfin, des contraintes de moyens et de ressources humaines chez les travailleurs sociaux au regard des problématiques de temps et de charge de travail préexistantes ont également limité la portée de l’objectif de formation. In fine, les travailleurs sociaux ont peu adhéré aux propositions de formation, appelées à s’inscrire dans une transformation plus globale du métier de travailleur social ;
– la démarche du référent parcours a été limitée par la nécessité de mettre en place des plans d’actions préparatoires engageant un dense et long travail de préparation (ingénierie interne, communication, création de groupes de travail et d’actions de formation, recrutement). Plusieurs départements ont souligné que le principe de référent de parcours ne correspondait pas aux pratiques des personnels et s’est confronté au faible niveau d’adhésion des institutions et des travailleurs sociaux. Cette démarche aurait dû associer les accompagnements dans le champ du handicap et de l’enfance, relevant des ARS. Face à ces constats, l’obligation de « référent de parcours » a été remplacée par un objectif général « 100 % accès aux droits » dans les avenants 2023, les services de l’État et conseils départementaux ayant la mission de s’accorder sur les actions les plus pertinentes à mettre en œuvre pour tendre vers un accès de tous les usagers à l’ensemble de leurs droits.
3. Un dialogue quoiqu’il en soit fécond
Un point positif ressort des échanges avec les différentes parties : les CALPAE ont été l’occasion d’échanges nourris entre les départements et les DDETS dans de nombreux territoires et ce, même dans les territoires où les relations entre collectivités territoriales et administrations d’État peuvent parfois être difficiles. Certains départements regrettent de n’avoir pas clairement identifié le partage des rôles entre les CLP d’un côté et les DDETS de l’autre. Plusieurs ont dû passer par l’échelon national (DGCS et DIPLP) pour interpréter certains points problématiques des circulaires. La rapporteure spéciale constate que les degrés de coconstruction des contrats et d’élaboration des actions mises en œuvre peuvent fortement varier d’un département à l’autre : certains départements ont agi sans prendre en compte l’avis des partenaires, demandant aux DEETS de « valider » a posteriori des orientations définies solitairement, quand d’autres ont initié un véritable travail de partage d’analyses et de coconstruction.
II. LA contractualisation des CDPPE : l’importance du soutien aux départements dans leur politique de la petite enfance
Le rapport de Michèle Peyron publié, en qualité de parlementaire en mission, en mars 2019 Pour sauver la PMI, agissons maintenant ! ([10]) a fait état d’une crise majeure de la protection maternelle et infantile (PMI) : « Délaissée par l’État et par l’Assurance Maladie, qui ne l’ont pas investie d’objectifs explicites en termes de taux de couverture depuis la décentralisation, dépourvue d’une tête de réseau nationale pour se faire entendre, financée par les départements au fil de l’eau de manière hétérogène, et parfois insuffisante, confrontée à un déficit croissant de médecins, la PMI a vu ses obligations non sanitaires s’accumuler, ce qui a conduit à une réduction drastique des activités de prévention en direction des publics fragiles. » La contractualisation tripartite entre les conseils départementaux, les ARS et le préfet de département débutée en 2020 a constitué l’une des réponses aux constats du rapport. Les CDPPE, couvrant une période de trois ans à partir de la signature, se sont déployés progressivement (9 départements engagés en 2020, 95 départements en 2022). Ils s’achèveront tous, au plus tard, en 2024.
carte des départements et territoires signataires des CDPPE
par année de contractualisation
Source : DGS.
Cette contractualisation s’articule également avec la stratégie des 1 000 premiers jours et les principes inscrits à l’article 32 de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, visant à garantir un niveau minimal de réponse aux besoins de la population dans chaque territoire.
Les CDPPE sont fondés sur quatre engagements : agir le plus précocement possible pour répondre aux besoins des enfants et de leurs familles en répondant de manière réactive aux besoins de relayage des parents ; sécuriser les parcours des enfants protégés et prévenir les ruptures en favorisant l’innovation et la diversification des interventions auprès de l’enfant protégé ; donner aux enfants les moyens d’agir et garantir leurs droits en renforçant la participation des enfants aux décisions qui les concernent et en fluidifiant notamment l’accompagnement scolaire des enfants protégés ; préparer l’avenir, pour faciliter l’accès au logement et aux droits des jeunes sortant de l’aide sociale à l’enfance. Ces quatre engagements se déclinent en vingt-neuf objectifs dont six sont obligatoires.
Parmi ces six objectifs obligatoires, cinq relèvent du financement du Fonds d’intervention régional (FIR) à disposition des ARS, en faveur de la protection maternelle et infantile (PMI) :
– atteindre à horizon 2022 un taux de couverture par la PMI d’au moins 20 % des entretiens prénataux précoces au niveau national ;
– faire progresser le nombre de bilans de santé en école maternelle réalisés par la PMI et se rapprocher du contenu de l’examen de santé tel que défini dans le carnet de santé ;
– doubler au niveau national le nombre de visites à domicile pré et postnatales réalisées par des sages-femmes de PMI en faveur des familles vulnérables ;
– permettre qu'à horizon 2022, au niveau national, au moins 15 % des enfants bénéficient de l'intervention à domicile d'infirmières puéricultrices de la PMI, notamment jusqu’aux deux ans de l’enfant et dans les familles vulnérables ;
– permettre qu'à horizon 2022, au niveau national, au moins 20 % des enfants bénéficient de consultations infantiles.
Pour réaliser ces cinq objectifs obligatoires, des moyens différents sont déployés selon les départements : formation des personnels, vacation ou collaboration avec des professionnels libéraux, achat de matériel, investissement dans les systèmes d’information. Les cibles nationales précisées ci-dessous ont été annexées aux instructions annuelles à titre indicatif, les départements restant libres de fixer une cible pour chaque objectif, adaptée à leur situation spécifique.
Un dernier objectif obligatoire, relevant du deuxième engagement, pouvant être financé par l’ONDAM (objectif national de dépenses d’assurance maladie) médico-social ou le FIR vise à garantir l’accompagnement de tous les enfants en situation de handicap. Les 23 objectifs restants étant facultatifs, l’architecture des CDPPE se distingue de celle des CALPAE en proposant un menu d’objectifs, dont certains obligatoires, là où les CALPAE sont fondés sur des objectifs communs avec la possibilité de financer par ailleurs des initiatives départementales.
Le programme 304, qui ne finance que des objectifs facultatifs, soutient les actions en lien avec la protection de l’enfance ou cofinance les mesures portant sur le handicap ou le soutien à la parentalité en accompagnement des actions portées au titre de la PMI. Plusieurs types d’actions peuvent être cités : création d’un lieu d’accueil parental, extension de l’offre de placement éducatif à domicile, mise en place d’un comité des usagers de la protection de l’enfance membre de l’observatoire départemental de la protection de l’enfance (ODPE), renforcement des interventions des techniciens de l’intervention sociale et familiale (TISF) à la sortie de la maternité et au domicile des assistants familiaux, actions de professionnalisation des assistants familiaux, mobilisation de la société civile à travers le parrainage, systématisation des mesures d’accompagnement au retour à domicile en fin de placement, élaboration d’un volet maîtrise des risques et d’un plan de contrôle des établissements, renforcement de la formation des professionnels, structuration d’un service d’accueil d’urgence pour les fratries, mise en place d’un institut de formation permanente en protection de l’enfance, structuration d’un relais parental, expérimentation d’un dispositif alternatif « hors les murs » pour les adolescents refusant le placement, organisation de week-end relais.
L’ONDAM médico-social finance les objectifs ayant trait à prise en charge du handicap chez les enfants protégés.
A. les points positifs des CDPPE
La mise en relation et le renforcement du dialogue entre les départements d’un côté et les ARS et les DDETS de l’autre, justifient à eux seuls l’intérêt des CDPPE. Mais au-delà de ce dialogue renforcé, les départements ont renforcé leur action dans le champ de la PMI et de l’ASE et les CDPPE ont permis l’émergence de solutions nouvelles dans des champs aujourd’hui sinistrés (prise en charge de la souffrance psychologique). L’ADF note également que les CDPPE ont été structurés autour d’objectifs plus précis et plus réalistes que ceux de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.
1. Le déclenchement des actions nouvelles
Le niveau de financement des CDPPE (hors enveloppe de 50 millions d’euros pour lutter contre les sorties sèches de l’ASE), au regard de l’investissement des départements dans les dépenses relatives à la PMI ou l’ASE, peut paraître modeste :
– 133,4 millions d’euros ont été consommés en 2022 par l’ensemble des départements cosignataires contre 78,6 millions d’euros en 2021 au titre du programme 304 ;
– 34,9 millions d’euros ont été consommés au titre du FIR en 2022 dont 25,5 millions d’euros pour les cinq objectifs obligatoires ;
– 14,3 millions d’euros ont été exécutés au titre de l’ONDAM médico-social en 2022.
Mais selon les acteurs auditionnés, la contractualisation a eu un véritable effet de levier sur certaines actions, comme en ce qui concerne les capacités des cellules de recueil des informations préoccupantes. La contractualisation a ainsi permis d’accompagner des mesures mettant en œuvre les recommandations nationales récentes, issues de la démarche de consensus sur les interventions à domicile, et la mise en œuvre du référentiel de la Haute autorité de santé sur l’évaluation des situations de danger ou de risque de dangers.
2. Le succès des « projets innovants » et de différents objectifs
Près de 72 départements ont inscrit dans leur contrat l’objectif 13 « projets innovants », ce qui témoigne de l’appétence des départements pour élaborer des actions les plus adaptées à leur situation locale.
Les projets innovants ont notamment concerné le domaine du soutien à la parentalité et de l’accompagnement des familles (un tiers des 145 actions recensées). Les actions ont pris différentes formes : la diffusion d’outils, la formation des professionnels, l’information des familles autour de thématiques de santé (la prise en compte des troubles du neuro‑développement, la prévention des expositions aux perturbateurs endocriniens ou aux écrans, le risque de surpoids) ainsi que le déploiement d’actions « d’aller vers » en particulier en direction des familles vulnérables (par l’achat par exemple de bus, d’équipements et de matériels destinés à la PMI) pour lutter contre les inégalités d’accès à la santé.
En région Bourgogne-Franche-Comté, la rapporteure spéciale peut citer plusieurs actions spécifiques mises en œuvre par les départements : la Côte-d’Or a déployé une action en 2022 visant à « promouvoir la bientraitance, le bien-être et le répit en établissement », le Jura deux actions visant à « externaliser des visites médiatisées » et à « favoriser l’obtention du permis de conduire pour les jeunes issus de l’ASE » et l’Yonne une action visant à « permettre la spécialisation de structures de protection de l’enfance dans « l’accueil 365 » et de repli vers le placement à domicile d’enfants à profil complexe ».
Parmi les autres objectifs particulièrement investis par les départements, peuvent être signalés :
– l’objectif 19 « Diversifier l'offre en matière de protection de l'enfance à domicile » qui a représenté une consommation de 30,71 millions d’euros en 2021 ;
– 14,56 millions d’euros ont été consommés au titre de l’objectif 18 « Créer 600 nouvelles places d'accueil en fratries au niveau national à horizon 2022 » ;
– 4,1 millions d’euros ont été consommés au titre de l’objectif 25 « Favoriser l'accès aux droits et l'accompagnement vers l'autonomie des anciens MNA » ;
– l’objectif 21 « développer les centres parentaux » a représenté une consommation de 3,8 millions d’euros en 2021.
3. Un bilan provisoire difficile à établir mais des évolutions positives déjà à noter
Il est trop tôt pour tirer le bilan des CDPPE dont les signatures ont été échelonnées de 2020 à 2022. L’exécution des contrats a été percutée par plusieurs phénomènes : baisse d’activité importante liée à la crise sanitaire, difficultés de recrutement dans le champ de la petite enfance, signature parfois tardive des contrats, lenteur de mise en œuvre des objectifs. Les bilans de santé en école maternelle ainsi que les consultations infantiles ont été davantage affectés que le suivi périnatal et des nourrissons par les sages-femmes et infirmières puéricultrices.
On enregistre cependant plusieurs évolutions positives qui méritent d’être signalées d’après les informations transmises par la direction générale de la santé :
– la moitié des départements ont connu une progression supérieure ou égale à 5 % du nombre d’entretiens prénataux réalisés, de celui de bilans de santé et de celui de visites de puéricultrices entre l’année de signature du contrat (2020 ou 2021) et 2022 ;
– 42 % des départements concernés affichent une augmentation supérieure ou égale à 5 % du nombre de consultations infantiles.
B. Les difficultés de mise en œuvre des CDPPE
Les relations avec les ARS comme les faibles moyens mis à disposition des DDETS constituent deux points noirs dans la mise en œuvre des CDPPE.
1. Des relations parfois complexes entre les départements et les Agences régionales de santé (ARS)
Le pilotage tripartite des CDPPE diffère peu de celui des CALPAE (dialogue de gestion, rédaction des avenants) : il convient cependant de noter l’existence de fiches actions relativement précises pour chacun des objectifs choisis, contrairement aux CALPAE. Par ailleurs, le financement à part égale entre le département et l’État (ARS ou DDETS) ne s’impose pas au niveau de l’action mais au niveau des objectifs, là encore contrairement aux CALPAE.
Les ARS comme les départements ont témoigné de la difficulté de leurs relations mutuelles. Certains départements jugent l’action des ARS parfois infantilisante et dépourvue de respect à l’égard de leur autonomie de gestion. Pour reprendre les propos de la représentante de l’ADF, les financements au titre du FIR auraient été accordés aux départements comme peut l’être une subvention à une association. Inversement, plusieurs départements n’auraient pas joué le jeu de la coconstruction des actions mises en œuvre.
Derrière ces relations complexes et parfois conflictuelles, se cachent ainsi plus fondamentalement les difficultés structurelles des politiques de santé dans les territoires, qui dépassent de loin le cadre des CDPPE. Ainsi, les départements notent que même dans les régions où les ARS ont su adopter un positionnement constructif vis-à-vis des départements, les moyens déployés paraissent encore largement insuffisants pour répondre aux défis. De nombreux départements déplorent les carences de l’action de l’État sur ses compétences propres (santé mentale des enfants et pédopsychiatrie, accompagnement d’enfants relevant de la protection judiciaire de la jeunesse) qui limite la portée des politiques départementales de protection de l’enfance. Ainsi, un département a exprimé son étonnement après que l’ARS a tenté de faire peser sur les travailleurs sociaux du département des tâches qui relèvent normalement de la pédopsychiatrie et de l’action des instituts médico-éducatifs.
L’exemple jurassien : des incompréhensions nombreuses entre le département d’un côté
et la DDETSPP et les ARS de l’autre
Le Conseil départemental du Jura regrette dans sa contribution écrite les « revirements » des administrations au moment de la contractualisation : l’ARS de la région Bourgogne Franche-Comté comme la DDETSPP (direction départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations) du Jura auraient validé dans un premier temps le projet de contrat qui comprenait deux actions phares correspondant en priorité aux besoins du conseil départemental : le renforcement de l’équipe mobile de pédopsychiatrique gérée par le centre hospitalier spécialisé de St‑Ylie et la mise en place de vacations d’infirmiers dans les maisons d’enfants à caractère social. Alors que le conseil départemental a adopté ce contrat par délibération du 25 mars 2022, l’ARS aurait exigé le remplacement de ces deux actions pour la mise en place du dispositif DAPEH (dispositif d’appui protection de l’enfance/handicap) qui ne constitue pas une priorité du département. De plus, la DDETSPP aurait imposé après coup l’organisation de formations pour les professionnels sur la prévention de la prostitution des jeunes, qui ne correspondrait pas non plus aux réalités du territoire jurassien. Il a donc fallu que l’assemblée départementale délibère une seconde fois le 3 juin 2022 pour prendre en compte ces deux changements de position des services de l’État.
L’ARS de Bourgogne Franche-Comté et la DDETSPP du Jura regrettent quant à elles, l’absence d’engagement et de dialogue du conseil départemental du Jura. Elles regrettent d’avoir été mises devant le fait accompli pour la conception et le choix des actions mises en œuvre qui ne s’inscrivent pas toujours dans la démarche générale des CDPPE.
Au-delà des relations entretenues entre les ARS et les départements, la rapporteure spéciale regrette le pilotage en silo des ARS et des DDETS, chacune compétente pour les actions qu’elles financent en propre sans que les approches n’aient été vraiment croisées.
2. Un manque de moyens pour suivre les politiques de l’ASE et des PMI par les DDETS
Contrairement à la lutte contre la pauvreté, qui fait l’objet d’une politique publique d’État depuis de nombreuses années, la protection maternelle et infantile (PMI) a été entièrement décentralisée aux départements en 1983 et est depuis, de moins en moins suivie. Certaines DDETS se trouvent dans l’incapacité de suivre convenablement l’action des départements, faute d’effectifs suffisants et compétents pour appréhender les enjeux de la petite enfance. Comme le rappelait le directeur général de la cohésion sociale, de nombreuses DDETS sont actuellement confrontées au départ à la retraite d’agents qui constituaient la mémoire vivante des anciennes DDASS (directions départementales des affaires sanitaires et sociales). Les effectifs actuels des DDETS ne sont, pour certains, plus du tout familiarisés avec les enjeux de la PMI comme avec ceux de l’ASE.
Au-delà des enjeux de formation, la rapporteure spéciale appelle de ses vœux un réarmement des services de l’État concernant les enjeux de la petite enfance et plus généralement du champ médico-social.
Recommandation n° 1 : réarmer les services déconcentrés de l’État sur les enjeux de l’ASE, de la PMI et pour le suivi des politiques du champ médico-social en général.
III. Les pistes d’amélioration de la contractualisation avec les collectivités territoriales
Prise en compte des réalités territoriales dans l’élaboration des objectifs et des indicateurs, allègement des exigences de suivi pour le département, contrôle renforcé de la part des services de l’État concernant l’effet levier de ses contributions, renforcement de la gouvernance, meilleur partage des données : tels les sont les principaux défis à relever pour perfectionner les CALPAE et les CDPPE.
A. un pilotage technico-administratif et financier trop lourd pour les départements…
Les exigences de suivi pour les départements paraissent particulièrement lourdes sans que leur exploitation soit à la hauteur des efforts consentis. La pluriannualité du financement constitue une piste d’amélioration pour rendre plus efficient le pilotage par indicateur et permettrait de donner davantage de visibilité et de sécurité aux départements. Par ailleurs, la contractualisation gagnerait à laisser davantage de marge de manœuvre aux départements dans leurs actions, à partir du moment où les objectifs et les critères de performance ont été clairement définis en lien avec les services de l’État
1. La charge trop lourde du reporting
L’ensemble des départements rencontrés ont fait valoir les difficultés du suivi des deux contrats : la consommation des ressources humaines (jusqu’à 0,5 ETP selon certains départements) et de crédits (investissement dans les systèmes d’information) paraît trop importante au regard des financements modestes de l’État : les CALPAE représentent ainsi 0,2 % des dépenses d’insertion des départements selon les données transmises par l’ADF. Ce poids est d’autant plus lourd que le département est faiblement doté. Les indicateurs, jusqu’à près de soixante pour les CALPAE dans les départements ayant poursuivi l’ensemble des objectifs proposés, sont jugés trop nombreux. Les changements de référentiel – la définition d’un nouvel entrant au RSA a ainsi été modifiée en cours d’exécution des CALPAE – ont complexifié le suivi pour les départements et parfois occasionné des dépenses supplémentaires d’adaptation des systèmes d’information. Certains indicateurs ont fait l’objet d’une interprétation différente selon les territoires, rendant impossible l’agrégation des données au niveau national, comme ce qui concerne l’objectif relatif aux référents de parcours.
La sobriété, la stabilité et la simplicité des indicateurs sont ainsi attendues, à la fois pour limiter la charge de travail des départements mais aussi pour rendre plus exploitables les données obtenues.
L’une des pistes avancées lors des auditions pour alléger la charge du reporting et renforcer la solidité des données recueillies serait de rapprocher les indicateurs des différents dispositifs contractualisés des items des enquêtes de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques). Les départements plaident également pour renforcer la coconstruction des indicateurs. Dans cette perspective, la DIPLP a mené des concertations avec les départements et les métropoles sur les référentiels des actions des futurs pactes locaux des solidarités qui devraient permettre également d’affiner la pertinence des indicateurs par rapport aux informations dont disposent les départements.
Enfin le ministre Jean-Christophe Combe a évoqué, lors de la commission d’évaluation des politiques publiques consacrée au thème de la mission d’information, l’idée que les indicateurs portent moins sur les moyens déployés par les départements que sur les résultats des actions mises en œuvre, afin de responsabiliser les départements et leur garantir une plus grande autonomie.
Recommandation n° 2 : limiter le nombre des indicateurs en s’assurant de leur stabilité et lisibilité tout au long des contrats à partir de leur coconstruction entre les services de l’État et les départements.
2. Une autonomie de gestion insuffisante pour les départements
Plusieurs départements ont regretté les faibles marges de manœuvre aussi bien dans les CALPAE que dans les CDPPE (malgré une souplesse plus importante dans le second cas) pour la définition des actions : les objectifs nationaux reproduits dans chaque département ne correspondraient pas forcément aux réalités territoriales. Par ailleurs, l’absence de fongibilité des crédits des objectifs socles vers les actions d’initiative locale est fortement regrettée par les départements.
Le sentiment de non prise en compte des réalités locales, exprimé par tous les départements, traduit également l’absence d’un diagnostic commun partagé en amont entre l’État et les conseils départementaux, source de difficultés dans certains territoires. Des diagnostics territoriaux doivent ainsi être conduits en amont des futurs pactes locaux de solidarité, à l’échelle départementale, pour avoir une vision plus transversale de ce qui existe en matière de lutte contre la pauvreté dans tous les champs possibles et identifier les manques et zones blanches. La rapporteure spéciale salue les crédits budgétaires dégagés pour accompagner les acteurs locaux dans ce travail de diagnostic préalable à l’élaboration des futurs pactes locaux des solidarités. Ces crédits permettent de financer le recours à des prestataires tiers proposant un regard neuf et non biaisé.
Recommandation n° 3 : laisser davantage de liberté aux départements dans le choix des politiques à prioriser à partir d’un diagnostic partagé entre les services de l’État et les conseils départementaux.
Recommandation n° 4 : renforcer la fongibilité des enveloppes budgétaires déléguées par l’État aux départements.
Les prochains pactes locaux des solidarités appelés à prendre la suite des CALPAE devraient être construits selon une logique différente d’après les informations transmises par la DGCS et la DPLIP : il n’existerait plus de distinction formelle entre des mesures socles obligatoires et des initiatives départementales mais des champs d’action prioritaire identifiés au niveau national (avec des référentiels dédiés) au sein lesquels les collectivités pourront choisir, en fonction des résultats de leurs diagnostics locaux. La rapporteure spéciale juge positivement cette évolution : tout en permettant à l’État de rappeler ses priorités, les actions menées dans les différents territoires devraient être davantage adaptées aux réalités départementales.
3. La nécessité de la pluriannualité pour un meilleur pilotage financier des contrats
Enfin, aussi bien pour les CDPPE et les CALPAE, le renforcement de la visibilité pluriannuelle des engagements de l’État sur le programme budgétaire 304 Inclusion sociale et protection des personnes est prioritaire : il s’agit de ne pas entraver les actions nécessitant un financement sur plusieurs années des départements (contractualisation avec des partenaires tiers, recrutement de nouveaux personnels). Cette exigence de pluriannualité, que les collectivités territoriales expriment pour l’ensemble des dispositifs contractualisés (contrats Action cœur de ville, contrats de ville, contrats de plan État-région), avait été déjà mise en lumière par le rapport IGAS de 2021 pour les CALPAE. La certitude d’obtenir un niveau égal ou supérieur de crédits sur l’ONDAM médico-social constitue un vrai avantage pour les départements, là où le FIR et les crédits du budget opérationnel de programme 304 peuvent être remis en cause chaque année.
Mais la mise en œuvre d’une vraie pluriannualité doit aussi permettre d’alléger les contraintes de suivi pour les départements.
Le pilotage particulièrement complexe des CALPAE
Si les CALPAE ont couvert la période 2019-2022 et ont été prolongés d’un an, les conventions ont fait l’objet d’avenants annuels précisant notamment le niveau de financement des différentes actions mises en œuvre au regard des résultats d’exécution de l’année n‑1.
Le calendrier d’adoption des avenants et de délégation des crédits des CALPAE
Source : Direction générale de la cohésion sociale.
Certains départements ont signalé une délégation des crédits au mois de décembre après une adoption tardive de l’avenant annuel par le conseil départemental à l’automne. Si, cette délégation tardive des crédits par l’État n’a pas empêché l’action des départements en tant que telle, il a pu ralentir le déploiement de certains dispositifs.
Le renforcement de la pluriannualité des CALPAE constituerait ainsi une réponse au pilotage complexe des contrats en assouplissant la contrainte de l’évaluation annuelle, dont les résultats ne sont pas toujours exploitables et représente pourtant un investissement important de la part des départements : pour les futurs pactes locaux des solidarités, la DIPLP porte ainsi l’idée d’une contractualisation pluriannuelle reposant sur des engagements fermes de l’État sur une période supérieure à un an avec une clause de revoyure financière à mi-parcours de la convention. Cette contractualisation s’appuierait sur une évaluation étayée des actions après une période de deux ou trois ans de mise en œuvre. Cette proposition semble très pertinente aux yeux de la rapporteure spéciale.
La pluriannualité des financements du programme 304 doit, en contrepartie, conduire les collectivités à répercuter cette pluriannualité aux prestataires (notamment les associations) dans le cadre, par exemple, de contrats d’objectif et de moyens, qui assurent la mise en œuvre des actions du contrat ou de la convention.
Recommandation n° 5 : renforcer la pluriannualité des financements du programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes (action 17 pour les CDPPE et action 19 pour les CALPAE).
B. …QUI NE permet pourtant pas un réel contrôle de leurs actions
La lourdeur du suivi des CALPAE comme des CDPPE contraste avec le faible niveau de suivi et d’évaluation par les services de l’État.
1. Un dialogue de performance qui repose sur les données purement déclaratives des départements
L’ensemble des données relatives au suivi des CALPAE comme des CDPPE repose entièrement sur les informations transmises par les départements, sans possibilité de contrôle de la part des services d’État. Le risque que des départements de mauvaise foi ne remplissent pas honnêtement les indicateurs paraît aujourd’hui extrêmement faible. Mais l’absence de suivi et d’accompagnement de la part des services de l’État est problématique au regard du nombre d’erreurs (fautes de saisie, mauvaise compréhension des référentiels) par les départements que n’a pu que constater la rapporteure spéciale en prenant connaissance des rapports d’exécution qui lui ont été transmis. Les incohérences et les incomplétudes, concentrées parfois sur certains objectifs et indicateurs, dans les rapports d’exécution transmis à la rapporteure spéciale, rendent d’autant plus complexe la saisie des dynamiques à l’œuvre. Pour les CDPPE, c’est notamment le cas des indicateurs relatifs aux visites des sages-femmes (données manquantes, présentation des visites prénatales et postnatales différente selon les départements).
Limiter le nombre d’indicateurs suivis par les départements pourrait donc avoir comme contrepartie l’obligation de remplir correctement et avec soin les indicateurs des contrats, qu’ils soient définis à l’échelle nationale ou localement. Les différences d’outillages entre les conseils départementaux pour assurer le suivi de la mise en œuvre de leurs politiques et de leurs priorités, appellent en ce sens une amélioration de leurs systèmes d’information (SI), pouvant être soutenus dans le cadre des contractualisations.
Recommandation n° 6 : renforcer la fiabilité et la capacité d’exploitation des indicateurs de performance transmis par les départements.
2. Un effet de levier à mieux objectiver
Un meilleur contrôle des données financières est également nécessaire. Le niveau d’exécution financière des actions par les départements est purement déclaratif. La valorisation de crédits déjà existants n’est pas clairement identifiée dans les rapports d’exécution et ne semble pas toujours être clairement évaluée par les services déconcentrés de l’État.
L’effet de levier incertain des CALPAE et des CDPPE
En l’absence d’évidence chiffrée, l’effet de levier financier des soutiens budgétaires est appréhendé par l’État à partir des échanges à l’échelle locale et des relevés statistiques à l’échelle nationale.
Localement, les acteurs rencontrés constatent des dynamiques dans le renforcement des actions déjà menées ou le lancement de nouvelles actions. Le rapport de l’IGAS de 2021 remarquait que 48 % des actions inscrites dans les CALPAE les premières années relevaient d’actions nouvelles (contre 36 % d’actions renforcées et seulement 10 % d’actions valorisées). Pour les administrations centrales (DCGS et DIPLP), il est certain que les départements déjà engagés avant les CALPAE dans nombreuses actions de lutte contre la pauvreté et disposant d’une ingénierie importante, auraient réalisé un certain nombre d’actions sans les crédits de l’État, sans doute avec une envergure moindre. Pour d’autres, la CALPAE aurait eu un véritable effet de levier sur des actions qui ne se seraient pas mises en place faute d’un apport financier de l’État (majorité des actions nouvelles, modernisation des systèmes d’information).
Concernant la protection maternelle et infantile relevant de la compétence des départements, les acteurs témoignent d’une même remobilisation de l’ensemble des acteurs au sujet de politiques souvent sinistrées. Cependant, pour les actions financées par le FIR, le seul moyen de s’assurer des financements supplémentaires et l’absence de substitution des crédits du département par ceux du FIR a reposé sur l’identification dans les contrats, de cibles en progression sur les objectifs obligatoires, ou à défaut, ne devant pas être diminution vis-à-vis des mesures initiales. La rapporteure spéciale constate ainsi que l’effet levier n’est abordé qu’indirectement alors que ces mêmes indicateurs sont, qualitativement et quantitativement, imparfaitement renseignés. La rapporteure spéciale a ainsi constaté que certaines fiches actions des CDPPE relevaient d’actions normalement obligatoires des départements, qui devaient nécessairement être déjà financées avant la contractualisation des CDPPE.
Au niveau national, le caractère anecdotique des crédits apportés par l’État par rapport aux masses budgétaires consacrées par les départements à la PMI et à l’ASE (8,333 milliards d’euros de dépenses totales d’aide sociale à l’enfance en 2020) rend difficilement visible l’éventuel effet de levier financier des CDPPE. Concernant les CALPAE, la DIPLP remarque un éventuel effet d’éviction de financements du département sur les mesures insertion puisque les dépenses d’insertion des départements n’auraient pas augmenté à hauteur des apports financiers de l’État dans le cadre des CALPAE de 2019 à 2020 – les dépenses brutes en faveur de l’insertion des BRSA sont passées de 838 millions d’euros en 2019 à 848 millions d’euros en 2020 – . La rapporteure spéciale constate cependant une hausse significative de ces dépenses entre 2020 et 2021 (+ 5,2 %) selon les chiffres de la Drees témoignant peut-être des premiers effets financiers tangibles des CALPAE. ([11])
Recommandation n° 7 : mieux contrôler le financement des contrats par les départements en limitant la valorisation des crédits.
3. Une évaluation nationale incomplète
Les directions d’administration centrale ont bénéficié du soutien d’un comité d’évaluation, mis en place au démarrage de la Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté pour l’évaluation ex post des mesures de cette stratégie. France Stratégie qui a assuré la responsabilité du comité d’évaluation, s’est en revanche peu penché sur les crédits fléchés spécifiquement sur les CALPAE qui représentaient environ 15 % des crédits du plan. L’IGAS a réalisé une évaluation à mi-parcours en 2021 qui a permis d’établir un certain nombre de constats suivi d’inflexions : plus grande marge de manœuvre donnée aux départements, sortie de l’objectif de prévention des sorties sèches de l’ASE des CALPAE, arrêt de la contractualisation avec les régions volontaires. Mais il est regrettable que l’année 2023 n’ait pas été mise à profit pour une actualisation finale de cette évaluation, dans une logique de chaînage vertueux avec les futurs pactes locaux des solidarités. France Stratégie ayant considéré qu’il revenait à l’IGAS de réaliser l’évaluation de la contractualisation alors que la DIPLP attendait du dernier rapport d’évaluation de France Stratégie paru en juillet 2022 un bilan de la contractualisation. Or l’essentiel de l’analyse de France Stratégie s’est basé sur l’évaluation de l’IGAS de 2021 et de la documentation fournie par la DIPLP.
C. Des interrogations sur la gouvernance
Plusieurs interrogations et réflexions ont émergé pour améliorer la coordination entre les acteurs des contractualisations et les partenaires extérieurs.
1. Un pilotage national insuffisant
Selon la DIPLP, la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté 2018-2022 a souffert de l’insuffisance d’un pilotage national associant l’État et les représentants de collectivités. Dans le cadre du pacte des solidarités, pourrait être créé une instance ad hoc au niveau politique associant les ministres concernés et des associations d’élus, dont les travaux seraient préparés par un comité technique associant les administrations centrales, territoriales et de la protection sociale.
Cette gouvernance renforcée au niveau nationale pourrait être déclinée dans le cadre des pactes locaux des solidarités, chargés au niveau départemental de développer des gouvernances multipartenariales. Il pourrait aussi être envisagé de renforcer l’implication des préfets en intégrant à leur feuille de route interministérielle des objectifs relatifs aux contrats territoriaux.
2. Un meilleur partage des données attendu
Un meilleur pilotage des données concernant le suivi des politiques sociales est également nécessaire : les valeurs des indicateurs des CALPAE sont remontées aujourd’hui directement des départements à la DGCS, par un formulaire numérique, sans passer par les DDETS qui ne bénéficient d’aucun retour de la DGCS et n’ont pas de droit de regard sur les données transmises par les départements. De leur côté, les collectivités territoriales et leurs groupements (départements et métropoles) regrettent aussi bien pour les CALPAE que les CDPPE l’absence de partage des données territoriales par les opérateurs et administrations d’État (caisses d’allocations familiales, CARSAT, Pôle emploi) sur les politiques couvertes par les contrats : PMI, ASE, protection de l’enfance, insertion des demandeurs d’emploi.
La fluidification du partage de l’information est aujourd’hui au centre des réflexions du SPIE et du déploiement futur de France Travail.
Le projet d’une plateforme de l’inclusion
Soutenus par les équipes de beta.gouv de la direction interministérielle du numérique, des travaux sont menés en collaboration avec la CNAF, Pôle Emploi et les conseils départementaux pour améliorer l’échange de données entre les acteurs, en vue de limiter les demandes de renseignements auprès des usagers sur le modèle du programme « Dites-le nous une fois ». L’objectif est aussi de déployer les outils numériques existants dans le champ de l’insertion pour améliorer les parcours, simplifier les démarches et construire de nouveaux services (un carnet de bord facilitant le suivi du parcours d’insertion et un recensement de l’offre d’accompagnement social et professionnel à l’échelle des territoires, les rendez-vous « insertion », etc.). Cette démarche a été récemment structurée par la création d’un groupement d’intérêt public (GIP) intitulé « Plateforme de l’inclusion », dont la convention constitutive a été publiée au journal officiel le 19 avril 2022 pour pérenniser des services numériques.
L’objectif est de développer des solutions partagées et d’assurer une meilleure circulation des données de parcours pour faciliter la vie des personnes éloignées de l’emploi et de celles et ceux qui les accompagnent. L’ensemble des porteurs de projet dispose désormais d’un bon niveau de connaissance des outils développés au niveau national, participe aux temps d’animation spécifiques à la démarche numérique et est destinataire d’une note d’information semestrielle dédiée. La grande majorité des porteurs de projet a pu bénéficier d’échanges qualifiés avec les équipes de la démarche numérique du SPIE tandis qu’un quart sont concrètement engagés dans l’expérimentation d’au moins un outil développé au niveau national.
Source : DGEFP.
Recommandation n° 8 : améliorer le partage des données entre administrations centrales et administrations déconcentrées d’un côté, et entre les opérateurs locaux et les conseils départementaux de l’autre.
3. Les questionnements sur l’intégration de nouveaux cosignataires
L’enjeu consistant à faire intervenir de nouveaux signataires aux deux contrats a été soulevé par l’ensemble des acteurs auditionnés, avec des avis divergents.
Lors de la CEPP consacrée à la présente évaluation, la secrétaire d’État chargée de l’enfance, Charlotte Caubel, a plaidé pour que le ministère de la justice comme celui de l’éducation nationale soient signataires des CDPPE. Il semble en effet crucial que des acteurs aussi présents dans la petite enfance sur les objectifs couverts par les contrats (bilans de santé à l’école maternelle, protection judiciaire de la jeunesse) puissent être partie prenante des CDPPE et contribuer également à leur financement. Pour les CALPAE, notamment en ce qui concerne les questions d’insertion, la participation d’acteurs comme les CAF, les caisses primaires d’assurance maladie, Pôle emploi, les CARSAT est également évoquée par certains. Le directeur de l’ARS Bourgogne Franche-Comté a également plaidé pour que les ARS soient signataires des CALPAE.
La pertinence de cette association, systématique ou non, des principaux partenaires concernés par les objectifs poursuivis et actions déployées dans le cadre de ces contractualisations doit être évaluée à l’aune de ses avantages et inconvénients : un dialogue renforcé entre tous les acteurs d’un côté, mais aussi le risque de ralentir le processus de contractualisation et d’allonger les délais de signature des contrats (déjà considéré comme long par les partenaires actuels) de l’autre. La participation d’autres acteurs, notamment pour les partenaires qui ne cofinancent pas les contrats, peut aussi prendre la forme d’un renforcement du partage de données ou la participation aux instances de pilotage
En ce qui concerne les CALPAE, le rapport 2021 de l’IGAS a permis de trancher la question de l’intervention de plusieurs échelons de collectivités territoriales ou leurs groupements : les régions ne semblent pas apporter de plus-value particulière mais la participation des métropoles est importante, au regard des délégations de compétences dont elles bénéficient dans le champ des politiques d’accompagnement social. La participation des métropoles peut cependant parfois complexifier le parcours des usagers selon des départements encouragés : au regard de la compétence exclusive des départements pour les bénéficiaires du RSA ou le handicap, le premier accueil social inconditionnel proposé par des métropoles peut complexifier le dispositif d’accompagnement des administrés, avec l’intervention d’un interlocuteur supplémentaire qui ne peut que rediriger l’usager vers les départements. À l’inverse, la métropole de Dijon juge important son rôle « d’ensemblier » permettant de réunir les communes, les intercommunalités et les départements pour donner une cohérence à l’action d’ensemble des acteurs locaux sur les enjeux de politique sociale
4. Des réflexions à mener sur l’articulation des politiques sociales et territoriales
Certains acteurs ont plaidé pour l’élaboration d’un « contrat des contrats », ou méta‑contrat, qui permettrait de formaliser et donner une vision d’ensemble des actions mises en œuvre dans le champ social par les partenaires locaux (collectivités territoriales, CAF, CPAM, Service public de l’emploi) pour proposer ainsi un cadre cohérent à l’ensemble des schémas locaux et des stratégies nationales (prévention et protection de l’enfance, lutte contre la prostitution des mineurs).
Des réflexions ont été menées pour intégrer un volet social aux CRTE (contrats de relance et de transition énergétique). Mais les CRTE, signés à l’échelon intercommunal, n’apportent pas de fonds financiers supplémentaires, mais un appui en termes d’ingénierie pour définir les projets les plus pertinents, planifier les sources de financement et assurer leur coordination entre les différentes communes couvertes par un établissement public de coopération intercommunication (EPCI) et ce même EPCI. Ajouter un volet solidaire aux CRTE aurait donc nécessairement conduit l’État à conventionner avec l’EPCI sans certitude quant aux bénéfices d’une telle contractualisation.
— 1 —
Lors de sa réunion de 9 heures 15, le mercredi 31 mai 2023, la commission des finances a entendu Mme Perrine Goulet, rapporteure spéciale des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances, sur son rapport d’information sur la contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance, présenté en application de l’article 146, alinéa 3, du règlement de l’Assemblée nationale.
Mme Perrine Goulet, rapporteure spéciale. Les politiques sociales de solidarité mises en œuvre par les départements font l’objet d’une contractualisation avec l’État, avec d’un côté les conventions d’appui à la lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi (CALPAE) depuis 2019 et, de l’autre, les contrats départementaux de prévention et de protection de l’enfance (CDPPE) depuis 2020. C’est le principe même d’égalité républicaine qui conduit l’État à accompagner les départements dans leurs compétences, si fondamentales pour la cohésion sociale de notre pays. Ainsi, comment pourrions-nous justifier qu’un enfant de l’ASE dans la Nièvre soit moins bien traité qu’un enfant de l’ASE en Côte d’Or ?
À partir de ce constat simple, la question est de savoir si la contractualisation, logique en théorie, a été réellement efficace dans les faits. Dans sa globalité, le bilan me semble positif, bien que comme pour tout dispositif contractualisé, l’intérêt et l’efficacité de ces contractualisations varient sensiblement selon les départements. Il est important de poursuivre cette démarche de contractualisation à l’avenir, notamment pour les CALPAE qui doivent s’achever en 2023, mais aussi pour les CDPPE.
Les CALPAE et les CDPPE ont permis de rapprocher les services de l’État, à savoir les directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS), des départements. Échange d’informations, regards croisés, partages d’expérience : ce dialogue est bénéfique pour l’État comme pour les départements. Tout ce qui peut renforcer le dialogue entre les collectivités et l’État déconcentré va dans le bon sens.
Un deuxième point positif doit être mentionné : même si les financements apportés par l’État peuvent paraître modestes – 149 millions d’euros ont été consommés en 2022 au titre des CALPAE et 134 millions d’euros au titre des CDPPE sur le programme 304 –, les acteurs rencontrés constatent un effet levier réel, quoiqu’il ne soit pas aisé de l’objectiver. En effet, les crédits budgétaires de l’État ont permis aux départements d’initier de nouvelles actions et d’en renforcer d’autres par exemple dans le champ de l’insertion, de la lutte contre les sorties sèches de l’ASE ou dans l’accompagnement des familles avec des enfants en situation de handicap.
Un troisième point positif peut être relevé : l’existence de résultats positifs pour plusieurs objectifs socles des CALPAE. Les indicateurs d’accompagnement des bénéficiaires du RSA sont tous en hausse : 57 % de nouveaux entrants au RSA ont ainsi été accompagnés en moins d’un mois en 2021 par les départements contre 46 % en 2019. Les indicateurs de prévention des sorties sèches de l’ASE, sortis des CALPAE et ayant intégré les CDPPE en 2022, témoignent également d’une nette progression : à titre d’exemple, le taux de jeunes sortant de l’ASE en parcours professionnel et scolaire atteint ainsi 74 % en 2021 contre 67 % en 2020.
Une fois ces points positifs soulignés, il faut s’attarder sur les limites de ces contrats et les axes de progrès. En ce qui concerne spécifiquement les CDPPE, on ne peut que constater les difficultés de dialogue entre les départements et les ARS, et parfois même entre les ARS et les DDETS. Les départements ont jugé l’action des ARS parfois infantilisante et, a contrario, tous les départements n’ont pas joué le jeu de la co-construction des actions à mener pour poursuivre les objectifs inscrits dans les contrats. En réalité, les difficultés avec les ARS me semblent dépasser le cadre contractuel propre des CDPPE : lorsque les départements regrettent le retrait des ARS sur leurs compétences propres (la santé mentale des enfants par exemple), on sait qu’il s’agit d’un phénomène qui n’est malheureusement pas nouveau, et qui n’est pas spécifiquement lié à la question des CDPPE.
Par ailleurs, du côté de l’État, le travail de coordination sur ces contrats entre DDETS et ARS ne se fait pas correctement, chacun restant dans son silo de compétence. En outre, une vraie question se pose pour les CDPPE : les DDETS sont-elles en mesure de parfaitement accompagner et « challenger » la mise en œuvre de l’action des départements en faveur de la petite enfance ou de l’aide sociale à l’enfance (ASE) ? Contrairement aux politiques de lutte contre la pauvreté et pour l’insertion, l’État a complétement abandonné le champ de la politique de la petite enfance depuis les lois de décentralisation de 1983 : les effectifs des DDETS, déjà peu étoffés, n’ont plus toutes les compétences qui étaient celles des DDASS il y a plusieurs dizaines années. Il est crucial de réarmer l’État déconcentré par des formations renforcées et une augmentation des effectifs, pour réinvestir le champ de la petite enfance et de l’ASE.
Par ailleurs, des critiques communes, qui constituent autant d’axes d’amélioration possibles, sont adressées aux CALPAE comme aux CDPPE. Au regard du niveau modeste des financements apportés par l’État – les CALPAE représentent par exemple 0,2 % des dépenses d’insertion des départements –, les exigences de suivi et de reporting sont très élevées pour les départements, à qui incombent seuls cette charge. Les indicateurs, jusqu’à près de soixante dans certains départements, sont jugés trop nombreux.
Les changements de référentiel – la définition d’un nouvel entrant au RSA a ainsi été modifiée en cours d’exécution des CALPAE – ont complexifié le suivi pour les départements et parfois occasionné des dépenses supplémentaires d’adaptation des systèmes d’information. Certains indicateurs ont fait l’objet d’une compréhension différente selon les territoires, rendant impossible l’agrégation des données au niveau national, comme ce qui concerne l’objectif relatif au référent de parcours.
Cette lourdeur ne s’accompagne pas d’un contrôle réel des services de l’État : l’ensemble des données transmises par les départements sont purement déclaratives et les rapports d’exécution des départements contiennent de nombreuses erreurs et incomplétudes, ce qui rend d’autant plus complexe l’agrégation des résultats au niveau national. La simplification et la réduction du nombre d’indicateurs peut et doit s’accompagner d’une vigilance accrue sur les données renseignées par les départements. Il me semble aussi important d’encadrer la valorisation des crédits et de s’assurer, département par département, que les dépenses en faveur des politiques concernées par les contrats ne diminuent pas avec le soutien des crédits de l’État.
De surcroît, faute d’un diagnostic commun partagé au préalable, les départements ont souvent eu le sentiment, aussi bien pour les CALPAE que les CDPPE, que les objectifs jugés obligatoires au niveau national ne correspondaient pas nécessairement à la réalité du terrain. Il faudrait davantage de souplesse et de fongibilité dans les actions menées par les départements. L’instauration d’objectifs obligatoires identiques sur tout le territoire n’est pas toujours pertinente : la réussite des actions d’initiative départementale pour les CALPAE est plutôt la preuve du contraire.
Ensuite, il est crucial de donner davantage de visibilité pluriannuelle aux départements sur le programme 304, comme les financements de l’objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) le permettent davantage sur les CDPPE. Faute de visibilité pluriannuelle, le montant des crédits délégués dépend du dialogue de gestion aboutissant à un rapport d’exécution, dont la préparation par le département est relativement chronophage, le tout devant nécessairement précéder la signature des avenants. En conséquence, la délégation des crédits, souvent tardive à l’automne, est source d’insécurité pour les départements alors qu’ils engagent certaines actions pour plusieurs années dans le cadre de partenariats avec des associations ou avec des recrutements.
L’analyse annuelle des indicateurs de performance n’est d’ailleurs pas toujours pertinente pour évaluer la qualité de l’action des départements : un recrutement retardé ou un congé maladie peuvent suffire à dégrader certains résultats. La pluriannualité doit permettre aux départements de déployer une action dans la durée et d’évaluer ses résultats à moyen terme. Mais cette souplesse à donner aux départements nécessite également un partage des données « en temps réel » renforcé. Les données mériteraient d’ailleurs d’être mieux partagées entre administrations centrales et déconcentrées d’un côté, et entre les opérateurs de l’État et les départements de l’autre.
Enfin, je me fais l’écho des réflexions des acteurs rencontrés concernant la gouvernance des contrats : Faut-il élaborer un contrat des contrats qui porte sur les politiques sociales afin d’avoir une vision transversale des dispositifs subventionnés ? Faut-il intégrer de nouveaux acteurs aux contrats comme les ministères de la justice et de l’éducation nationale pour les CDPPE d’un côté ; et les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM), Pôle emploi, les caisses d’allocation familiales (CAF), les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) pour les CALPAE d’un autre côté ? Gardons à l’esprit que ces dispositifs doivent rester les plus souples possibles : si la cosignature d’autres acteurs peut alourdir le processus de contractualisation, la participation de nouveaux acteurs peut aussi prendre d’autres formes, par exemple celle d’un meilleur partage des données ou d’une participation aux instances de pilotage.
Monsieur le ministre, nous sommes à la fin d’un cycle. Vous préparez actuellement les futurs pactes locaux de solidarité qui succèderont aux CALPAE. A la lumière des propos que je viens de tenir, pouvez-vous nous faire un point sur ces pactes de solidarité ? Prendrez-vous en considération la demande des départements d’avoir plus de flexibilité et moins d’indicateurs ?
Madame la ministre, concernant les CDPPE, la nécessité de faire participer d’autres acteurs est en réflexion. Pouvez-vous nous faire un point sur ces travaux au regard de l’analyse que je vous ai livré, à savoir que les deux cosignataires actuels travaillent chacun en direct avec les départements sans concertation ? Quelle est votre feuille de route pour redonner la capacité au DDETS de piloter ces contrats ? Bien entendu, il ne me viendrait pas à l’esprit que les CDPPE soient interrompus.
M. Jean-Christophe Combe. Madame la rapporteure spéciale, je vous remercie d’avoir retenu cette année comme thématique d’évaluation La contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales, dans le cadre à la fois de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, sur laquelle j’aurai plaisir à m’exprimer, et de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance, sur laquelle bien sûr je laisserais ma collègue Charlotte Caubel vous répondre.
Si elle est en bien sûr une facette très importante, la contractualisation entre l’État et les collectivités, qu’il s’agisse des départements ou des métropoles, ne résume pas à elle seule l’ambition de la stratégie de lutte contre la pauvreté menée par l’État. Il me semble d’ailleurs important, devant vous, de revenir sur l’exécution budgétaire 2022 de cette stratégie, que j’ai volontairement gardée pour cette seconde prise de parole.
En la matière, 2022 représente une nouvelle année de déploiement des principaux dispositifs de la stratégie. Je pense par exemple au soutien accru à l’alimentation des enfants de familles modestes avec une forte montée en charge de la tarification sociale des cantines. En 2022, cinq fois plus d’élèves ont bénéficié des tarifs à 1 euro ou moins que l’année scolaire précédente. Finalement, notre objectif d’atteindre 1 400 communes fin 2022 a été largement dépassé, puisque 1 888 communes ont bénéficié de ce dispositif. Le même constat de réussite s’applique aux petits-déjeuners gratuits à l’école, avec 245 151 élèves bénéficiaires contre 100 138 en 2021.
J’en viens maintenant au sujet précis de votre rapport thématique : la contractualisation entre l’État et les collectivités locales. L’année 2022 a constitué la dernière itération des contrats entre l’État et les conseils départementaux, les métropoles et quelques régions, en tout cas dans leur forme originelle.
Je rappelle qu’un nombre important des mesures de la stratégie de lutte contre la pauvreté passent par la contractualisation. Je pense notamment aux mesures suivantes :
– la garantie d’activité départementale pour les bénéficiaires du RSA, 200 000 d’entre eux ayant été concernés en 2021 ;
– le développement des plateformes de mobilité pour faciliter l’accès à l’emploi des publics qui en sont les plus éloignés ;
– la prévention des sorties sèches de l’ASE.
Évidemment, s’agissant d’une approche aussi innovante et aussi ambitieuse, l’évaluation a été à la fois indispensable et éclairante. Je retiens d’ailleurs de nombreux éléments de l’évaluation menée par l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la contractualisation, et partage par ailleurs très largement vos recommandations, madame la rapporteure.
Pour l’avenir, je souhaite ainsi refonder la démarche contractuelle afin de conclure de véritables pactes locaux des solidarités, autour des départements et des métropoles. Les précédents contrats ont permis de renouer un dialogue entre l’État et les collectivités, qui s’était fortement distendu sur les politiques sociales. Cette nouvelle dynamique de partenariat s’est construite autour de projets portés en commun et à forte plus-value sociale pour nos concitoyens.
Mais ils souffraient de quelques « défauts de jeunesse » qui en ont rendu la mise en œuvre souvent trop lourde, et le rapport de l’IGAS a sur ce point été éclairant. C’est pourquoi je pense comme vous, madame la rapporteure, que nous devrons nous améliorer sur plusieurs points. Il s’agit tout d’abord de réduire le nombre d’indicateurs. Nous devons nous concentrer au maximum sur la définition d’objectifs partagés plutôt que sur des indicateurs de moyens, car ce sont eux qui peuvent parfois conduire à des relations vécues comme un contrôle trop tatillon qui n’a bien sûr pas lieu d’être.
Je pense ensuite à la visibilité et la robustesse de notre partenariat. Nous devons aller vers une contractualisation pluriannuelle, qui donne de la visibilité à chacun, à l’échelle du quinquennat. Enfin, je souhaite évoquer l’adaptation à la diversité des territoires. Nous devrons trouver le meilleur équilibre entre deux éléments. Il s’agit d’une part de la définition d’éléments de cadrage construits à l’échelle nationale. Nous sommes d’ailleurs en train d’y travailler avec les représentants des collectivités. Il s’agit d’autre part de la nécessité d’élaborer des contrats réellement adaptés à la grande variété des réalités locales. C’est pourquoi les futurs contrats seront fondés sur des diagnostics territoriaux précis, en cours de formalisation. Au-delà du binôme État/collectivités, ils associent l’ensemble des parties-prenantes : caisses de sécurité sociale, Pôle Emploi, ARS, grandes associations de lutte contre la pauvreté, ainsi que d’autres acteurs le cas échéant, comme les entreprises.
Ces diagnostics nous permettront de nous appuyer sur la vision la plus précise et la plus complète des besoins des territoires, et de construire des réponses associant le plus grand nombre d’intervenants. Mon objectif consiste à finaliser ces contrats avant la fin de l’année, afin qu’ils soient applicables à compter du début de l’année 2024, en cohérence avec les calendriers budgétaires des collectivités.
Mme Charlotte Caubel. J’ai décidé la reconduction de la contractualisation dédiée à la protection de l’enfance, pour maintenir les actions ayant débuté et prendre le temps d’évaluer la première vague de contractualisation. Celle-ci a ainsi permis de réunir autour de projets priorisés un certain nombre d’acteurs qui avaient tendance à ne plus se parler. Je pense notamment aux préfets, qui avaient moins investi le champ de la protection de l’enfance.
Nous avons déjà prévu d’inscrire pour 2023 et 2024 un soutien accru aux départements qui expérimentent les CDPPE, pour leur donner des moyens supplémentaires et leur laisser une marge de manœuvre. Madame la rapporteure spéciale, vous avez raison de faire le lien entre gouvernance, moyens et contractualisation, afin que nous agissions vraiment dans le cadre d’une stratégie territoriale.
Un président de département nous a demandé la totale liberté dès lors que les décisions étaient prises dans le cadre du comité départemental de protection de l’enfance (CDPE). Cette question essentielle mérite d’être expertisée. La richesse de la protection sociale de l’enfance tient à la conjonction d’une dimension sociale très importante et d’une dimension régalienne non négligeable, puisque la justice, la santé et l’éducation nationale interviennent. Nous soutenons également les projets interdépartementaux, puisque certains sujets peuvent être pris en compte au-delà des frontières de chaque département. Les départements du Pas-de-Calais et du Nord ont ainsi formulé une proposition en ce sens.
J’ai également la volonté d’élargir ces contractualisations à l’éducation nationale et à la justice, à la fois pour mobiliser d’autres fonds, mais aussi d’autres acteurs et moyens pour résoudre notamment la problématique des « cas complexes », ces jeunes qui passent d’un dispositif à l’autre et pour lesquels nous ne trouvons pas toujours de solutions à leurs difficultés. En résumé, je relance la contractualisation en 2024, en y accordant une priorité plus forte, déterminée notamment dans les CDPE, et un élargissement à tous les acteurs de l’enfance, notamment la CAF et la CPAM sur un certain nombre d’aspects. Vous avez évoqué la fongibilité des enveloppes mais celle-ci est relativement difficile à mettre en œuvre lorsque l’on place dans la même enveloppe l’ONDAM, le PLF et le PLFSS.
La pluriannualisation des financements de l’État est importante pour sécuriser les projets. Les associations demandent elles-mêmes une telle pluriannualisation au niveau des départements. Par ailleurs, il me paraît évident de limiter le nombre d’indicateurs, à l’aide de référentiels plus clairs.
Dans le domaine de la protection de l’enfance, il existe un véritable enjeu en matière de données à disposition des acteurs au niveau du territoire ou de l’État. Telle est l’ambition du groupement d’intérêt public « France enfance protégée ». J’ajoute que la Drees a conservé à notre demande une compétence propre dans ce domaine, qui représente un enjeu d’avenir et constitue une de mes priorités.
Dans la contractualisation sur la protection de l’enfance, nous nous sommes rendu compte que nos financements ont parfois financé des actions qui existaient déjà. Il est donc important que la contractualisation constitue le levier d’une meilleure synergie et une d’meilleure priorisation.
L’ensemble de ces sujets exige de renforcer les DDETS sur les enjeux de contrôle, mais aussi les enjeux de contractualisation avec les départements. Par exemple, on ne peut pas avoir 0,80 équivalent temps plein travaillé (ETPT) dans les Bouches-du-Rhône dédié à l’enfance. Nous avions obtenu des effectifs pour 2023 et j’ai demandé que les DDETS soient renforcées pour les départements volontaires sur le CDPPE. Il existe en outre un enjeu d’articulation sur la place des DDETS, des directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) et des commissaires à la pauvreté. Je veille à les associer aux CDPE. Il nous faut impérativement placer les compétences existantes dans nos services déconcentrés au bon endroit et les renforcer, pour répondre à ces enjeux de contractualisation.
Mme Patricia Lemoine (RE). Je tiens tout d’abord remercier Mme la rapporteure spéciale pour la qualité du rapport qu’elle vient de nous présenter. Afin de territorialiser sa stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et celle de la prévention et de la protection de l’enfance, le gouvernement a souhaité s’appuyer sur deux contrats avec les départements : les conventions d’appui à la lutte contre la pauvreté et l’accès à l’emploi, et les contrats départementaux de prévention et de protection de l’enfance.
Les CALPAE semblent avoir de réels effets positifs sur les objectifs fixés comme l’accompagnement des bénéficiaires du RSA ou le soutien à la mobilité des demandeurs d’emploi. S’agissant du RSA, les actions mises en place via ces contrats portent leurs fruits. À titre d’exemple, 57 % des nouveaux entrants au RSA ont été accompagnés en 2022, contre 49 % en 2019. Concernant les CDPPE, les résultats semblent plus mitigés, même si plusieurs actions ont été développées par les départements, grâce au financement de ces contrats.
Un des écueils concerne le suivi de l’action des départements en matière de protection maternelle et infantile et d’aide sociale à l’enfance confié aux DDETS. Un renforcement de leurs moyens humains est-il à l’ordre du jour pour améliorer le suivi ? De manière générale, les objectifs portés par les CALPAE et les DDETS s’inscrivent dans le temps long. Or les financements ne bénéficient pas d’une visibilité pluriannuelle, ce qui fragilise la réussite des objectifs fixés. M. le ministre, un financement pluriannuel est-il à l’étude ?
Enfin, la réalité varie selon les territoires. Dès lors, les objectifs nationaux devraient pouvoir varier plus librement en fonction des spécificités des départements. Une plus grande flexibilité en la matière est-elle à l’étude ?
M. Fabien di Filippo (LR). Concernant cette mission d’évaluation, mes interrogations porteront sur trois points. La première concerne l’évolution des dépenses sociales et des dépenses de RSA dans les départements. Depuis douze ans, le nombre d’allocataires du RSA a été multiplié par 1,5. Les revalorisations successives décidées par l’État entraînent en outre un surcoût pour les départements et représentent pour certains plus de la moitié de leur budget.
Ensuite, les indicateurs de retour à l’emploi sont très mauvais : sept personnes sur dix ne reviennent pas vers l’emploi bien des années après leur entrée dans le dispositif du RSA. De fait, le RSA se révèle être une prison destructrice en termes d’assistanat. N’y a-t-il pas de conclusions à tirer sur le fait que des générations rentrent dans les dispositifs d’insertion et n’en ressortent jamais ?
Enfin, ma dernière remarque concerne l’ASE. Quand les enfants continuent d’aller dans leur famille d’origine, le lien entre la famille d’accueil et la famille d’origine pose des difficultés, y compris dans les dispositifs d’ASE. Pour peu qu’elles voient l’enfant quelques jours dans l’année, les familles d’origine continuent de toucher un certain nombre de prestations sociales. Ne faudrait-il pas le remettre en cause ?
M. Pascal Lecamp (Dem). Je remercie la rapporteure pour son excellent exposé. Dans le cadre des CDPPE, certaines actions sont obligatoires pour chaque département, alors même qu’elles ne sont pas aussi nécessaires d’un territoire à l’autre. Comment traitez-vous cette réalité dans vos évaluations de mise en œuvre différenciées, département par département ? Comment pouvons-nous mieux territorialiser les missions des départements dans la protection de l’enfance ?
Ensuite, les CALPAE seront bientôt remplacées par les pactes locaux des solidarités. À quels changements peut-on s’attendre dans le périmètre des missions, compte tenu de l’évolution du partenariat avec les collectivités ? Quels seront les cosignataires de ces pactes ?
Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). La stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté lancée en 2018 a pris fin en 2022. Budgétairement, cette transition s’est manifestée par une diminution de 328 millions à 252 millions d’euros des crédits du programme 304 entre 2022 et 2023.
Ce plan entre en effet dans une année de transition, au cours de laquelle les conventions seront renouvelées. Vous aviez annoncé que le pacte des solidarités, initialement annoncé pour janvier, serait publié à la mi-mars. Or nous sous sommes fin mai et aucune nouvelle stratégie n’a été publiée. Que devient le pacte des solidarités ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous confirmer que vous avez pris en compte les voix qui se sont élevées dans le monde associatif pour demander que le pacte gagne en ambition ? Le conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CLNE) a quant à lui demandé à être plus écouté, de même que les personnes directement concernées par la pauvreté.
Enfin, que répondez-vous à Noam Leandri, qui rappelle que les étrangers, les familles monoparentales et les jeunes sont les trois catégories les plus touchées par la pauvreté et qui espère en ce sens que des mesures très favorables aux étrangers puissent être prévus dans le projet de loi sur l’immigration ? Avez-vous travaillé de concert avec le ministère de l’intérieur sur ce sujet, dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi ?
M. Jean-Marc Tellier (GDR-NUPES). Je remercie à mon tour Mme la rapporteure spéciale. La situation de la protection de l’enfance est préoccupante dans notre pays. Je pointe également le manque de places dans l’ASE ainsi que le manque criant d’assistantes familiales et d’éducateurs.
La contribution de l’État à travers le CDPPE et la lutte contre la pauvreté ne règle pas dans l’immédiat les questions d’urgence mais elle permet au moins de réunir les différents acteurs (ARS, éducation nationale, État) autour d’une table. Je souligne également la mise en place des CPDE dans les départements. Enfin, le travail de prévention sur les questions de l’enfance fait défaut dans notre société. Un grand travail de prévention doit être mené, tant au niveau de l’enfance que sur celui de la parentalité, tant les manques sont grands dans ces domaines.
M. Jean-Christophe Combe. Vous m’avez interrogé sur l’avenir de la stratégie de lutte contre la pauvreté et le pacte des solidarités. J’ai effectivement entendu les remarques effectuées par les acteurs (départements et associations de lutte contre la pauvreté), qui nous ont demandé de prendre plus de temps pour pouvoir élaborer ce pacte et travailler à une inclusion et une participation plus fortes des personnes concernées dans son élaboration. En conséquence, nous avons pris quelques semaines supplémentaires, mais je rappelle que l’objectif sera tenu, puisque l’année 2023 est une année de transition. Nous travaillons d’ores et déjà avec les collectivités sur les modalités de déploiement et de mise en œuvre de cette nouvelle stratégie.
Les annonces qui seront faites dans les semaines à venir tiendront bien compte de cette réalité. Il s’agit d’un engagement important du gouvernement, au niveau interministériel. En effet, ce pacte a pour objectif d’assembler les politiques publiques qui vont œuvrer pour lutter contre la pauvreté. Je pense à la mise en place d’un service public de la petite enfance dans la continuité des 1 000 premiers jours, qui comportera une dimension forte de prévention, d’accompagnement et de lutte contre la pauvreté des enfants. Nous allons continuer à lutter de manière méthodique contre la reproduction sociale de la pauvreté et les inégalités de destin.
En outre, nous avons fait du plein emploi un axe majeur de la lutte contre la pauvreté. Dans ce cadre, nous allons continuer de travailler en articulation avec France Travail. Ainsi, la contractualisation que nous porterons avec les collectivités au niveau territorial recoupera aussi le périmètre de France Travail. De plus, le pacte devra spécifiquement lutter contre la très grande pauvreté et à ce titre aller chercher les publics les plus éloignés, qu’il s’agisse des migrants, des jeunes ou des enfants.
Les familles monoparentales constituent en outre une autre de nos priorités et nous avons déjà pris de nombreuses mesures pour les soutenir. Elles représentent aujourd’hui 25 % des familles dans notre pays et 30 % d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté.
Un quatrième axe visera à faire de la transition écologique une transition solidaire en travaillant sur les postes de dépenses contraintes des ménages les plus modestes, comme la mobilité, le logement, l’accès à l’énergie ou l’alimentation, dont je vous ai déjà parlé.
S’agissant de la politique d’accès à l’emploi, les dépenses qui ont augmenté concernent l’accompagnement de bénéficiaires du RSA Dans un marché du travail qui se tend, plus nous allons réduire le nombre de bénéficiaires du RSA, plus nous allons trouver des personnes très éloignées de l’emploi. Notre investissement pour les accompagner vers le retour à l’emploi se poursuivra dans les années à venir.
La relation entre l’État et les départements est parfois difficile. J’ai mis en place un comité des financeurs, pour pouvoir discuter avec les départements en amont des décisions que le Parlement ou le gouvernement sont conduits à prendre. Il s’agit de faire en sorte que chacun puisse, à la hauteur de ses besoins, prendre ses responsabilités Ainsi, la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie participe aujourd’hui au financement d’une compétence exclusive des départements, la politique du maintien à domicile de nos ainés et des personnes en situation de handicap, pour plus d’un milliard d’euros. L’État prend donc sa part.
J’ajoute que d’autres discussions interviendront, notamment dans le cadre du groupe de travail que j’ai institué sur l’avenir du modèle économique des Ehpad. La question des Ehpad est assez compliquée car les capacités contributives sont très divergentes d’un département à l’autre. Ces discussions existent et nous continueront à y travailler.
Les cosignataires des pactes locaux de solidarité relèvent du choix des collectivités. Pour ma part, j’invite à élaborer une contractualisation très large, qui associe les services de l’État, les collectivités, les grandes et petites associations sur le territoire, mais aussi d’autres acteurs comme les entreprises et les entrepreneurs sociaux.
Mme Charlotte Caubel. Nous partageons tous le même objectif, qui allie l’homogénéité d’un certain nombre de priorités et une différenciation territoire par territoire. Tel est l’objet de la contractualisation.
En matière de protection de l’enfance, il y avait trente objectifs mais seulement quatre ou cinq étaient obligatoires, par exemple les rendez-vous médicaux prénataux et post-nataux. Ensuite, les départements devaient en choisir huit sur les trente proposés. Cette souplesse initiale doit être maintenue, tout en affichant des priorités. Le fait d’inscrire le préfet et l’autorité judiciaire aux côtés du président dans les conseils départementaux de protection de l’enfance a permis de transmettre les impulsions de l’État, au plus près des territoires.
M. Di Filippo, vous avez évoqué la sortie des dispositifs de l’ASE. Il s’agit de mon indicateur de performance personnel. Nous avons inscrit 50 millions d’euros pour accompagner les départements. En la matière, je considère qu’un partenariat est essentiel entre les départements et l’État, lequel doit être au rendez-vous sur un certain nombre de thématiques, comme la santé, le logement ou le travail.
Vous avez aussi mentionné le sujet de la juste attribution des différentes allocations aux familles ou aux enfants. Le système actuel, très opaque, est normalement à la main des magistrats pour les enfants suivis par l’autorité judiciaire. Or les magistrats ne se prononcent pas systématiquement, ce qui est un problème en soi. De plus, lorsqu’ils se prononcent, ils ont tendance à privilégier, ce qui est normal, le maintien du lien avec la famille, ce qui entraîne un maintien de l’allocation des ressources à la famille. Je considère que cela pose un problème pour un bon nombre d’enfants. De manière générale, la question des allocations constitue un chantier prioritaire sur lequel nos équipes travaillent, pour effectuer des propositions d’allocations ou de réallocations au plus juste.
Mme Perrine Goulet, rapporteure spéciale. En résumé, les contractualisations constituent de bons dispositifs, qui doivent être maintenus. Du côté des CDPPE, la nécessité d’une coordination est évidente et il me semble pertinent de l’effectuer à travers les CDPE. J’appelle à leur généralisation et à un déploiement plus large.
Je comprends la volonté d’élargir le nombre de signataires. Il me semble utile d’associer tous les acteurs dans un comité de pilotage, mais la cosignature devrait se limiter aux financeurs. Par ailleurs, je souligne à nouveau que les départements manquent de fonctionnaires pour mener bien toutes ces missions.
Enfin, les printemps de l’évaluation sont de bons dispositifs qui doivent se poursuivre. Nous devons continuer à les développer. Je tiens à remercier les acteurs qui ont répondu à nos interpellations, qu’il s’agisse des départements, des métropoles, des services de l’État en administration centrale ou dans les départements.
M. le président Éric Coquerel. J’interroge la commission afin qu’elle autorise la publication de ce rapport d’information sur la thématique d’évaluation du rapporteur spécial.
La commission autorise, en application de l’article 146, alinéa 3, du Règlement de l’Assemblée nationale, la publication du rapport d’information de Mme Perrine Goulet, rapporteure spéciale.
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE
Dijon Métropole : Mme Françoise Tenenbaum, conseillère municipale déléguée en charge de la santé, de l'hygiène et du handicap et vice‑présidente de Dijon métropole, déléguée à la solidarité, aux politiques sociales et à la santé
Agence régionale de santé (ARS) de la région Bourgogne Franche‑Comté : M. Jean‑Jacques Coiplet, directeur général
Audition commune
– Commission à la lutte contre la pauvreté (CLP) : M. Jean‑Philippe Horréard, commissaire de la région Bourgogne Franche Comté
– Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté (DIPLP) : Mme Cécile Tagliana, déléguée interministérielle
Conseil départemental de la Nièvre : Mme Florence Bonneau, directrice de la cohésion sociale et de la santé.
Assemblée des départements de France (ADF) : Mme Emmanuelle Coint, première vice‑présidente chargée des solidarités du Conseil départemental de la Côte‑d'Or
Conseil départemental du Jura : M. Clément Pernot, président
Direction départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations du Jura (DDETSPP39) : Mmes Isabelle Morel, directrice adjointe, chargée du pilotage du pôle emploi insertion solidarités et Aline Roger, cheffe du service des solidarités
Direction départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations de la Nièvre (DDETSPP58) : Mme Sarah Grizard, directrice adjointe et M. Renaud Coutelle, chef de service de protection des personnes vulnérables
Direction générale de la santé (DGS) : M. Patrick Ambroise, adjoint à la sous-directrice santé des populations et prévention des maladies chroniques et Mme Caroline Buissière, cheffe du bureau santé des populations et politique vaccinale
Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) : M. Bruno Lucas, délégué général
Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) : M. Jean-Benoît Dujol, directeur général, Mme Maria Yousfi, chargée de mission
([1]) Un fonds d’appui aux politiques d’insertion (FAPI) avait été créé dès 2017 pour soutenir les départements dans leur politique d’insertion.
([2]) Seuls deux départements (Yvelines et Hauts-de-Seine) n’ont pas souhaité prendre part à cette démarche dès 2019. En 2022, le département du Morbihan et la Gironde n’ont pas poursuivi la contractualisation
([3]) IGAS, Évaluation de la contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, juillet 2021.
([4]) Circulaires relatives à la mise en œuvre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté du 18 novembre 2018, du 19 mars 2021, du 4 février 2019, du 12 février 2020 et du 19 janvier 2022.
([5]) Cartographie disponible à l’adresse suivante : https://cartographie-projets.lutte-pauvrete.gouv.fr
([6]) Circulaire n° DIPLP/2018/254 du 18 novembre 2018 relative à la mise en œuvre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.
([7]) Le FAPI a été fusionné avec les crédits budgétaires dédiés dans le CALPAE au cours des contrats.
([8]) Les crédits prénotifiés correspondent au montant plafond des crédits, connu théoriquement seul par les services de l’État, pouvant être alloués aux départements. Les crédits délégués correspondent aux crédits mis à disposition des responsables de budget opérationnel de programme au niveau régional (Rbop) ventilant eux-mêmes les crédits au niveau départemental aux responsables d’unité opérationnelle (RUO). Les crédits consommés correspondent aux crédits versés aux départements.
([9]) Les données 2022 n’avaient pas encore été compilées par la DGCS lors de la rédaction du rapport et les données de 2019 ne sont pas disponibles en raison de difficultés
([10]) Rapport disponible sur le lien suivant : https://solidarites.gouv.fr/sites/solidarite/files/2023-01/2018-102r-pmi.pdf