N° 2719

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 juin 2024.


RAPPORT D’INFORMATION

déposé

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES ([1]),

sur le développement de la pratique féminine du sport

 

par

Mme Véronique RIOTTON,

M. Stéphane VIRY

Députés

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La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de :

 

Mme Véronique Riotton, présidente ; Mme Virginie Duby-Muller, Mme Marie-Charlotte Garin, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Sandrine Josso, viceprésidents ; Mme Julie Delpech, Mme Anne-Cécile Violland, secrétaires ; Mme Emmanuelle Anthoine ; Mme Marie-Noëlle Battistel ; Mme Soumya Bourouaha ; Mme Céline Calvez ; Mme Émilie Chandler ; Mme Mireille Clapot ; M. Jean-François Coulomme ; Mme Béatrice Descamps ; Mme Christine Engrand ; Mme Agnès Firmin Le Bodo ; Mme Géraldine Grangier ; Mme Catherine Jaouen ; Mme Fatiha Keloua Hachi ; Mme Amélia Lakrafi ; Mme Élise Leboucher ; Mme Julie Lechanteux ; Mme Sarah Legrain ; Mme Delphine Lingemann ; Mme Marie-France Lorho ; Mme Pascale Martin ; Mme Graziella Melchior ; Mme Frédérique Meunier ; Mme Sophie Panonacle ; Mme Josy Poueyto ; Mme Ersilia Soudais ; M. Emmanuel Taché de la Pagerie ; Mme Sarah Tanzili ; M. Jean Terlier ; M. Stéphane Viry.

 


SOMMAIRE

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Pages

Synthèse des RECOMMANDATIONS

introduction

PREMIÈRE PARTIE : Le sport fÉminin amateur et professionnel fait face À DE MULTIPLES obstacles

I. L’histoire et la culture du sport mettent en avant la pratique sportive des hommes au détriment des femmes

A. Historiquement le sport s’adresse à un public principalement masculin

B. LE SPORT, vecteur de stéréotypes de genre dont les sportives peinent encore à se débarrasser

1. Les tenues des sportives : une mainmise sur le corps des femmes ?

2. Une répartition sexuée de la pratique sportive entre hommes et femmes

II. Le sport féminin (amateur comme professionnel) est confronté à de nombreux obstacles qui limitent la pratique

A. Dans le sport amateur, des sportives occasionnelles dont la pratique s’interrompt tout au long de la vie

1. Des freins qui apparaissent à chaque étape de la vie et s’accumulent

a. Petite enfance : point de départ d’une inégalité de long terme

b. Adolescence : un décrochage des filles bien identifié

c. Grossesse, maternité et parentalité : une difficile conciliation entre la vie active et la vie familiale affectant la pratique sportive

d. Sport adulte/sport senior : l’enjeu du bien vieillir

2. L’accumulation de freins conduit à un nombre moins élevé de pratiquantes et de manière peu intensive

B. Pour les sportives de haut niveau, une faible reconnaissance de leurs mérites et des conditions matérielles d’entraînement difficiles

1. Une reconnaissance limitée sous tendue par des stéréotypes de genre exacerbés

2. Malgré des premières évolutions, des conditions de travail qui demeurent difficiles sans garantie de reconversion professionnelle

a. Des écarts de rémunération persistants malgré des avancées disparates

b. Des conditions matérielles et d’encadrement peu enviables

c. Un désintérêt pour la santé des sportives en attente d’être comblé

d. De faibles perspectives de reconversion professionnelle

DeuxiÈmE PARTIE : DES leviers clés pour consolider la place des femmes dans le monde sportif

I. changer les mentalités en misant sur l’éducation et la visibilité du sport féminin

A. donner le goût du sport dès le plus jeune âge pour accroître la pratique tout au long de la vie

1. Dès le plus jeune âge, inciter les jeunes filles à aimer le sport

i. La formation du personnel encadrant

ii. Un aménagement du temps et des infrastructures scolaires

iii. Faciliter la pratique sportive des filles sur leur temps libre

2. Inciter les femmes à faire du sport tout au long de la vie

a. Dans le sport amateur, communiquer régulièrement sur les bienfaits du sport tout au long de la vie

b. Dans le sport de haut niveau, faciliter la maternité des sportives

B. encourager les sportives à s’approprier l’espace public et sportif

1. Accroître le recours au design actif dans l’espace public

2. Mettre en place un « plan Marshall » des vestiaires et des sanitaires

C. renforcer la visibilité du sport féminin dans les médias sous le regard attentif de l’ARCOM

1. Une faible visibilité du sport féminin pourtant plébiscité par les spectateurs

2. Une faible valorisation des femmes journalistes de sport trop souvent ramenées à leur genre

II. RÉFORMER LA GOUVERNANCE

A. Les lois de 2000, 2014 et 2022 ont clarifié et amélioré la place des femmes dans les instances de gouvernance sportives

1. Depuis les années 2000, le cadre légal favorise l’accès des femmes à des postes à responsabilité

a. Les lois du 6 juillet 2000 et du 4 août 2014 posent les premiers jalons d’une gouvernance du sport paritaire

b. La loi du 2 mars 2022 s’inscrit dans le chemin tracé par les lois de 2000 et 2014

2. Malgré ces initiatives courageuses de réforme, un bilan en demi-teinte dans un milieu réfractaire au changement

a. Une organisation structurelle reposant sur des biais de genre plus favorable aux hommes

b. Des stratégies de contournement de la règle pour maintenir un statu quo

i. Des stratégies de contournement diverses et efficaces pour écarter les femmes

ii. Une préférence pour le statu quo à peine voilée

B. Ces avancées doivent être prolongées pour garantir aux femmes une place dans le monde du sport

1. « Imposer l’égalité par le sommet » en renforçant les dispositions législatives existantes

a. Préciser à qui s’applique l’exigence de parité réelle et contrôler son respect

i. Préciser l’exigence de parité réelle

ii. Contrôler le respect de la parité réelle

b. Limiter le cumul des mandats

c. Repenser les règles électorales

2. Accroître le vivier des femmes candidates à des postes techniques ou officiels

a. Dépasser l’auto censure grâce à des formations et des facilités pour mieux concilier sport et vie familiale

i. Des formations dès le plus jeune âge et jusqu’à l’âge adulte

ii. Le « chantier du bénévolat » : faciliter la conciliation entre vie associative et vie familiale

b. Un plus grand contrôle de la progression de la féminisation

c. Une politique de quotas dans l’encadrement technique

III. REPENSER LE FINANCEMENT DU SPORT FEMININ

A. Une nécessaire contribution des financements privés au développement du sport féminin

1. Au niveau des fédérations et des clubs, un soutien conditionné à la promotion du sport féminin

2. Pour les sponsors, des incitations à soutenir le sport féminin

B. Une plus grande vigilance lors de l’attribution des financements publics

1. Lier le versement de subventions à la mise en place de mesures concrètes en faveur du sport féminin

2. À l’ANS, renforcer l’attention accordée au sport féminin

3. Dans les collectivités territoriales, introduire la budgétisation intégrant l’égalité pour favoriser le sport féminin

ConClusion

TRAVAUX DE LA Délégation

I. Auditions de la délégation

II. Évènement sur la mixité dans le sport

III. Examen du rapport par la délégation

annexe

Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

 


   Synthèse des RECOMMANDATIONS

Axe n° 1 : à travers l’éducation, inciter les jeunes filles à prendre goût au sport

 

Recommandation

Support

Page

1

Renforcer le module d’enseignement sur le sport dans la formation initiale des enseignants du premier degré afin d’y inclure une sensibilisation aux enjeux de la parité et de la mixité de la pratique sportive, dès le plus jeune âge.

Formation

36

2

Créer un nouveau module de formation axé sur la déconstruction des stéréotypes de genre et la promotion d’une culture de l’égalité dans la formation diplômante des éducateurs sportifs et dans les licences de Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS).

Formation

37

3

À l’école, expérimenter des projets d’école ou d’établissement, prévus à l’article L. 401-1 du code de l’éducation, ménageant plus de temps à l’activité physique.

Législatif

37

4

À travers l’Association des maires de France (AMF), informer les collectivités territoriales sur le design actif dans les cours d’école afin de le développer.

Communication/ information

38

5

Au collège et au lycée, enjoindre les établissements à réserver le mercredi après-midi pour une pratique sportive.

Circulaire

38

6

Renforcer les liens entre les établissements scolaires, l’Union nationale du sport scolaire du secondaire (UNSS) et les clubs de sport à travers une semaine du sport féminin.

Évènementiel

38

7

Systématiser et généraliser l’intervention de l’UNSS et des clubs sportifs dans les établissements scolaires, au moins une fois par an, pour inciter les jeunes filles à s’inscrire.

Communication/ information

38

8

Proposer des licences à 1 euro pour les enfants dans les fédérations comptant moins de 10 % de femmes ou d’hommes

Fédérations

39

9

Pour le Gouvernement, au moyen d’un rapport remis au Parlement, recenser les sections mixtes et féminines sur l’ensemble du territoire.

Rapport du Gouvernement

39

10

En partant de l’état des lieux fourni par le Gouvernement, inciter les clubs à maintenir des sections mixtes et féminines en particulier dans les zones où l’offre est faible.

Clubs et associations sportives

39

11

Pour les clubs et associations sportives, coupler les horaires des cours pour enfants et pour adultes afin d’accroître la pratique sportive de toute la famille.

Clubs et associations sportives

39

 

 

Axe n° 2 : inciter les femmes à faire du sport tout au long de la vie

 

Recommandation

Support

Page

12

À travers une campagne institutionnelle annuelle, promouvoir l’activité physique pour les femmes tout au long de la vie.

Campagne d’information institutionnelle

40

13

Lors des consultations médicales gratuites aux trois âges clés de la vie, informer les patients sur les bienfaits du sport.

Information

40

14

Modifier l’article R. 221-8 du code du sport et ainsi porter à deux ans, à compter de l’annonce de la grossesse, l’inscription sur la liste des sportifs de haut niveau.

Réglementaire

41

15

Pour les collectivités, adopter le design actif dans l’espace public promu par le plan « 5 000 équipements – Génération 2024 ».

Collectivités territoriales grâce au plan 5 000 équipements – Génération 2024

42

16

Pour le Gouvernement, effectuer un état des lieux des infrastructures sportives, en particulier des vestiaires et des sanitaires avant de mettre en place un « plan Marshall des vestiaires et des sanitaires » assurant aux femmes un confort minimal lors de la pratique sportive.

Rapport du Gouvernement

43

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Axe n° 3 : renforcer la visibilité du sport féminin

 

Recommandation

Support

Page

17

En élargissant le décret sur les Évènements sportifs d’importance majeure (EMI), instaurer des quotas de diffusion du sport féminin à des heures de grande audience pour les chaînes de la Télévision numérique terrestre (TNT).

Décret

45

18

Afin de résorber l’écart de diffusion entre sport masculin et féminin, sanctuariser la part du fonds de soutien à la production audiovisuelle consacrée au sport féminin jusqu’à ce que la part de sport féminin diffusée dans les médias atteigne 40 % du total du contenu sportif diffusé.

Fonds de soutien à la production audiovisuelle

45

19

Conditionner l’agrément des fédérations à la mise en œuvre d’une politique publique du sport inclusive, mesurée à l’aide d’indicateurs tels qu’une composition mixte des lots de retransmission des compétitions sportives.

Agréments des fédérations

46

20

Dans les rédactions sportives, organiser des sessions de prévention du sexisme ordinaire chaque année.

Formation

47

21

Étoffer la politique d’accompagnement des femmes journalistes de sport victimes de sexisme en communiquant davantage sur les infractions existantes et en ouvrant des dispositifs d’accompagnement psychologique lorsque nécessaire.

Chaînes de télévision

48

22

Pour l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), inclure la charte de l’association des journalistes sportifs dans les conventions des chaînes de la TNT et évaluer les chaînes à l’aune du respect de cette charte.

Conventions des chaînes de la TNT

48

23

Dans les médias, privilégier la mixité des rédactions avec des mesures incitatives. Lorsqu’elle constate des plateaux non mixtes dans les programmes sportifs, l’ARCOM prend des sanctions financières contre les chaînes mises en cause.

ARCOM

48

 

 

 

 

 

Axe n° 4 : réformer la gouvernance du monde sportif et accroître le nombre de femmes dirigeantes

 

Recommandation

Support

Page

24

Préciser dans la loi la définition du terme « d’instances dirigeantes » soumises à la parité pour mettre fin aux stratégies de contournement.

Législatif

55

25

Si les Alpes françaises remportent l’organisation des Jeux d’hiver de 2030, instaurer la parité dans le comité d’organisation et pour les athlètes participants.

Statuts constitutifs du comité organisateur

56

26

Pour le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), veiller au respect de la parité réelle dans les instances dirigeantes des fédérations sportives.

CNOSF et fédérations

56

27

Pour le Parlement, effectuer en 2025, un contrôle de l’application de la loi du 2 mars 2022 afin de vérifier si l’exigence de parité dans les instances dirigeantes du sport est effectivement respectée.

Législatif

56

28

Limiter le cumul des mandats des instances dirigeantes du sport à trois mandats consécutifs.

Législatif

57

29

Redéfinir les règles électorales en élargissant le corps électoral aux clubs afin de favoriser le renouvellement des dirigeants à l’échelle territoriale et nationale.

Législatif

57

30

Pour le Gouvernement, recenser le coût des campagnes électorales dans les fédérations afin, à terme, en plafonner le coût.

Rapport du Gouvernement

58

31

Mettre en place un dispositif de contrôle du mouvement sportif permettant de faire respecter l’éthique dans le sport à travers des règles minimales et un pouvoir de sanction.

Législatif

59

32

Au moyen du programme des jeunes officiels de l’UNSS, inciter les jeunes filles à exercer des postes à responsabilité dans le monde sportif.

Fédérations

60

33

Sur le modèle du club des 300 du CNOSF, accroître l’offre de formation tout en la renforçant à travers le doublement horaire des enseignements dispensés.

CNOSF et fédérations

60

34

En s’appuyant sur un rapport du Gouvernement concernant les bénévoles du sport, lancer une réflexion sur la rémunération des personnes exerçant des responsabilités dans les instances sportives locales pour lever l’obstacle financier.

Rapport du Gouvernement

61

35

Instaurer une décharge horaire pour les personnes occupant des postes de direction dans les instances sportives locales afin d’inciter les femmes à se porter candidates.

Instances sportives locales

61

36

Dans les contrats de développement des fédérations sportives, imposer la création de cellules de féminisation et de mixité au niveau national et local.

Contrats de développement des fédérations

61

37

Pour le ministère des sports, contrôler davantage la mise en œuvre des plans de féminisation des fédérations et des clubs à travers des indicateurs objectifs.

Ministère des sports

62

38

À travers un système de quotas, tendre vers la parité dans l’encadrement technique sportif à long terme. À court et moyen terme, fixer une part de femmes dans l’encadrement (technique, médical et paramédical) proportionnel au nombre de femmes dans les fédérations.

Fédérations

63

 

 

Axe n° 5 : repenser le financement du sport féminin

 

Recommandation

Support

Page

39

Pour les fédérations, associer l’attribution de labels qualité et de badges mixité au respect d’un cahier des charges précis soumis à une évaluation annuelle.

Fédérations

66

40

Pour les clubs, conditionner les financements reçus à un score élevé de l’index égalité professionnelle.

Clubs

66

41

Au moyen d’un rapport du Gouvernement, étudier l’opportunité de recourir à des leviers incitatifs (crédits d’impôt, Sociétés anonymes sportives professionnelles (SASP)) pour attirer les sponsors vers le sport féminin.

Rapport du Gouvernement

67

42

Avant le versement de toute subvention publique, vérifier que l’entité bénéficiaire respecte effectivement les lois en matière de parité dans le monde sportif. 

Agence Nationale du Sport (ANS), collectivités territoriales

68

43

Lier le versement de subventions publiques à la mise en place de mesures concrètes en faveur du sport féminin.

ANS, collectivités territoriales

69

44

Dans le cadre de la nouvelle convention d’objectifs entre la direction des sports et l’ANS, renforcer le mandat de l’ANS sur la promotion du sport féminin.

Convention d’objectifs de l’ANS

69

45

Consacrer 20 % du budget de l’ANS au sport féminin à l’horizon 2030.

ANS

69

46

Pour l’ANS, recourir à la Budgétisation intégrant l’égalité (BIE) afin de mieux évaluer les dépenses et à terme atteindre un financement paritaire du sport féminin et du sport masculin.

ANS

70

47

Pour l’ANS, exercer un contrôle a posteriori sur les subventions attribuées aux fédérations.

ANS

70

48

Dans les collectivités territoriales, au moyen de la BIE, accroître la part des financements accordés au sport féminin.

Collectivités territoriales

71

 

 


   introduction

En 2024, pour la première fois de leur histoire, les Jeux olympiques et paralympiques (JOP), organisés à Paris, seront strictement paritaires. Une décision qui s’inscrit dans la volonté de la France de promouvoir le sport féminin, souvent marginalisé au profit du sport masculin.

Le sport revêt plusieurs fonctions : il constitue un puissant outil d’émancipation et de promotion de l’égalité et se pose comme un reflet de la société, qui a trait à de nombreuses problématiques liées aux inégalités de genre (les représentations sociales, l’usage des espaces publics, l’éducation, le rapport au corps). En outre, en cette année olympique, la mise en lumière du sport féminin de haut niveau doit avoir un effet d’entraînement sur la pratique amateur.

De plus, le sport comporte de nombreux bienfaits sur la santé physique et mentale. Sur le plan physique, l’activité sportive permet de maintenir une bonne condition et atténue les risques de certaines maladies (cardiovasculaires, diabète, obésité) ainsi que certains types de cancers, par exemple les cancers du sein ou de l’endomètre chez la femme. En termes de santé mentale, le sport aide à lutter contre le stress, la dépression ainsi que les troubles anxieux.

Or, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), environ une femme sur trois (contre un homme sur quatre) ne pratique pas assez de sport pour se maintenir en bonne santé et ce alors que « les personnes ayant une activité physique insuffisante ont un risque de décès majoré de 20 % à 30 % par rapport à celles qui sont suffisamment actives » ([2]).

C’est pourquoi, la Délégation aux droits des femmes a souhaité créer une mission d’information sur les femmes et le sport.

Bien que la lutte contre les Violences sexistes et sexuelles (VSS) soit la condition sine qua non d’un monde sportif inclusif des femmes, cette thématique a déjà été adressée par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale relative à l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif qui a rendu ses conclusions le 19 décembre 2023.

Outre le rapport la commission d’enquête, le présent rapport s’inscrit dans la continuité et en complémentarité des travaux récemment publiés sur le monde sportif par le Comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport ([3]), l’association 2GAP ([4]) et la mission actuellement menée par la commission parité du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE).

Dans ce contexte, vos rapporteurs font le choix de se concentrer sur la place des femmes dans le sport amateur et professionnel. Dans le sport amateur, alors que les hommes sont 62 % à pratiquer du sport au moins une fois par semaine, seules 58 % des femmes en font de même ([5]). La pratique sportive des femmes est, en outre, moins tournée vers la compétition que celle des hommes : seulement 38 % des licenciés sont des licenciées ([6]).

Au terme de leurs travaux au cours desquels ils ont entendu plus de soixante-dix acteurs du monde sportif, les rapporteurs dressent un bilan mitigé de la pratique sportive des femmes et de leur place dans le sport.

Dans le sport amateur, à tous les âges de la vie, la pratique sportive des femmes diffère de celle des hommes : le premier écart de pratique sportive entre les filles et les garçons se manifeste entre cinq et neuf ans, les garçons sont près de 1,5 million à être inscrits dans des activités sportives contre environ 980 000 filles de la même tranche d’âge ([7]).

Cet écart se creuse à l’adolescence où la pratique sportive des filles décroche et ne rattrape celle des garçons qu’à l’âge de la retraite où le temps libre des femmes augmente. Les raisons de ces écarts de pratique sont multifactorielles : une persistance de stéréotypes de genre dévalorisant la pratique féminine et un sous-investissement chronique dans le sport féminin (infrastructures, moyens humains, activités proposées) éloignent les femmes du sport notamment amateur.

De la même manière, dans le sport de haut niveau, les femmes subissent encore des stéréotypes de genre et s’entraînent dans des conditions matérielles souvent difficiles. De plus, on constate une faible représentation des femmes dans l’encadrement technique et les instances dirigeantes en dépit d’une volonté politique d’asseoir la place des femmes dans le sport comme en attestent les lois du 4 août 2014 et du 2 mars 2022.

Partant du constat que le sport féminin, amateur et professionnel, fait encore face à de multiples obstacles (I), vos rapporteurs identifient des leviers d’actions majeurs : l’éducation et la visibilité, la gouvernance et le financement du sport, pour consolider la place du sport féminin (II).


 


   PREMIÈRE PARTIE : Le sport fÉminin amateur et professionnel fait face À DE MULTIPLES obstacles

I.   L’histoire et la culture du sport mettent en avant la pratique sportive des hommes au détriment des femmes

La massification de la pratique sportive intervenue au cours du XIXe siècle a principalement concerné les hommes au détriment des femmes (A) longtemps tenues à l’écart du monde sportif du fait de stéréotypes de genre (B).

A.   Historiquement le sport s’adresse à un public principalement masculin

Trouvant son origine dans l’Antiquité grecque, l’Histoire des compétitions sportives est essentiellement liée à la pratique masculine, particulièrement valorisée ([8]). Le sport était simultanément considéré comme un entraînement à la guerre et comme un hommage religieux, réservé aux hommes. A contrario, les femmes qui disposaient d’un statut similaire à celui des étrangers et des esclaves et n’étaient pas considérées comme des citoyennes à part entière, n’étaient pas autorisées à prendre part aux différentes compétitions organisées, ni même à les regarder. Elles ne participaient qu’à une seule compétition féminine, organisée en l’honneur d’Héra et composée d’une unique épreuve, le sprint.

À l’époque, à travers le culte du corps, le sport promeut la virilité et la masculinité. Ainsi, les sculptures héritées dans l’Antiquité grecque montrent souvent des corps harmonieux réalisant un effort physique intense. Le public répond et encourage ces images guerrières, les vainqueurs étant traités en héros et couverts de cadeaux.

Par la suite, le sport demeure la chasse gardée des hommes que seules quelques femmes issues des sphères les plus privilégiées peuvent expérimenter, à travers des sports comme l’équitation par exemple. À partir du XIXe siècle, alors que le sport s’impose comme un loisir, les femmes pratiquant des activités sportives font face à des obstacles.

Si elles sont autorisées à pratiquer du sport, les femmes doivent le faire avec modération, étant constamment renvoyées à leur fonction reproductive et à leur rôle de mères. Ainsi, en 1967, lorsque que Kathrine Switzer s’inscrit pour courir le marathon de Boston, celui-ci est considéré comme trop extrême pour les femmes car pouvant avoir des effets délétères sur l’utérus et la fertilité. De ce fait, de nombreuses disciplines sont longtemps interdites aux femmes, à l’instar du 800 mètres qui est réservé aux hommes jusqu’en 1960 ([9]).

De plus, la pratique sportive des femmes devait être discrète, les exploits féminins ont longtemps été ignorés voire niés : en 1928, alors que le record en athlétisme sur 800 mètres est battu par une Linda Radke, la presse préfère mettre en avant l’extrême fatigue des autres concurrentes. Selon Anita DeFrantz, ancienne athlète et membre du Comité international olympique (CIO), « les administrateurs, les membres du CIO et les médias avaient apparemment décidé une fois pour toutes que les femmes étaient trop fragiles pour courir une distance aussi longue » ([10]) , ce qui les a poussés à « dénaturer les comptes rendus » et à « falsifier le déroulement réel » de la course pour répandre de fausses rumeurs sur la fatigue des participantes. En conséquence, le 800 mètres est exclu du programme olympique pour les femmes jusqu’en 1960.

Dans ce contexte, il n’est donc pas étonnant que nous redécouvrions tardivement le rôle des sportives pionnières, à l’image d’Alice Milliat. Alors que Pierre de Coubertin estimait qu’« une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte » ([11]), Alice Milliat s’est battue pour valoriser les sportives en organisant les premiers jeux mondiaux féminins en 1922.

B.   LE SPORT, vecteur de stéréotypes de genre dont les sportives peinent encore à se débarrasser

Dans ce cadre traditionnel peu propice à la participation des femmes, le milieu sportif véhicule, consciemment ou non, des stéréotypes de genre ([12]) qui éloignent les femmes de la pratique sportive.

Selon les Nations unies, un stéréotype de genre est « une opinion généralisée ou un préjugé quant aux attributs ou caractéristiques que les femmes et les hommes possèdent ou doivent posséder et aux rôles qu’ils jouent ou doivent jouer » ([13]). Ainsi, alors que les petits garçons sont souvent « culturellement prêts » pour le sport en portant par exemple des joggings, les petites filles portent plus souvent des tenues sophistiquées dans lesquelles il leur est difficile de pratiquer une activité sportive. Un instituteur qui peinerait à remarquer cette distinction ferait donc l’application de stéréotypes de genre.

La transmission de stéréotypes de genre provient souvent d’une méconnaissance presque inconsciente de la part des adultes. Nicole Abar le montre dans son documentaire La conquête de l’espace à travers une institutrice prenant conscience que recourir à une image de « Monsieur propre » comme figure d’autorité auprès de ses élèves contribue à segmenter les rôles entre hommes et femmes. En ce sens, la déconstruction des stéréotypes de genre est donc un travail collectif devant mobiliser activement les femmes et les hommes, à tous les âges de la vie.

1.   Les tenues des sportives : une mainmise sur le corps des femmes ?

Les tenues de sport par exemple, illustrent les biais de genre auxquels sont confrontées les femmes, qu’ils soient prévus dans les règlements sportifs ou bien ancrés dans les habitudes des sportives.

Initialement, les tenues sportives des femmes sont encadrées dans l’objectif de préserver la « pudeur des femmes ». Dès le XIXe siècle, les règlements sportifs prévoient que les femmes doivent porter des jupes longues et dans certains sports comme le football, leur tête doit également être couverte. Ces règles limitent l’agilité des femmes pourtant essentielle dans la pratique sportive et entravent donc leurs performances.

A contrario, à partir des années 1960, le corps des femmes est conçu comme un outil permettant d’accroître l’intérêt d’un public masculin pour le sport féminin. Ainsi, en 1970, la Martini Rosso Cup est organisée par des hommes d’affaires italiens pariant sur l’intérêt du public masculin pour le corps des sportives. Un raisonnement longtemps prédominant dans le football : en 2004, Sepp Blatter alors président de la fédération internationale de football (FIFA), se prononçait en faveur de tenues « plus sexy, des shorts moulants » ([14]) pour les sportives afin d’attirer davantage de sponsors.

De la même manière, dans les sports de souplesse et de grâce et les beach sports, la sexualisation à outrance a longtemps été prégnante. Si depuis 2012, les joueuses de beach-volley n’ont plus l’obligation de porter un bikini, en 2021, les joueuses norvégiennes de beach handball ont été sanctionnées d’une amende de 1 500 euros pour avoir porté un short lors d’une compétition en lieu et place d’un bikini.

De plus, les tenues exigées ne tiennent pas toujours compte de spécificités féminines. Ainsi, dès sa création en 1877 et jusqu’en 2022, le tournoi de Wimbledon exigeait le port d’une tenue blanche aux athlètes. Or, cette règle engendre un stress supplémentaire pour les sportives lorsque les menstruations arrivent en période de compétition, comme l’ont souligné dans des interviews récentes, Alicia Barnett et Qinwen Zheng ([15]), des joueuses internationales de tennis.

Progressivement, alors que la contrainte vestimentaire disparaît des règlements, elle laisse place à une contrainte de fait, intériorisée par les joueuses. Ainsi, en gymnastique où le justaucorps n’est plus imposé, il reste souvent privilégié par les sportives. Le règlement de la gymnastique artistique autorise par exemple le port d’une combinaison pantalon, l’académique. Cependant, aux championnats d’Europe de 2021, mais seule une athlète allemande avait osé porter cette tenue. L’équipe française justifie le choix du justaucorps pour des raisons esthétiques ([16]).

En dépit de ces évolutions, le corps des femmes est encore trop souvent utilisé comme un outil de promotion du sport féminin, là où la performance devrait primer. Ainsi, en avril 2024, les athlètes américaines qui participeront aux Jeux olympiques de Paris se sont vues proposer, par leur équipementier, une tenue particulièrement échancrée, peu adaptée à la compétition. En réponse, l’ancienne sportive américaine, Lauren Fleshman a dénoncé des « tenues qui ne sont plus bienvenues ni nécessaires pour attirer l’attention sur les sports féminins » ([17]) en rappelant que « les athlètes professionnelles devraient être capables de concourir sans (…) se demander si elles risquent de révéler une partie vulnérable de leur corps » ([18]).

Dans le documentaire Toutes Musclées ([19]), la championne d’arts martiaux mixtes (MMA) Témy Say, revenant sur cette difficulté pour les sportives de faire prévaloir un corps efficace face aux impératifs esthétiques imposés aux femmes, exprimait le souhait que « le corps ne soit pas qu’un décor ».

2.   Une répartition sexuée de la pratique sportive entre hommes et femmes

Cette « sexuation des corps » qui dure « depuis 150 ans » selon Catherine Louveau, favorise la segmentation de la pratique sportive, certains sports étant étiquetés comme des sports féminins et d’autres masculins. En effet, en 2014, une personne sur deux adhérait à l’idée selon laquelle « certains sports conviennent mieux aux filles qu’aux garçons » ([20]).

Les sports perçus comme féminins, tels que le twirling bâton, les sports de glace, la danse, l’équitation et la gymnastique demeurent les disciplines qui regroupent le plus de femmes. A contrario, les sports particulièrement intenses comme la pêche sportive en apnée ou dangereux comme le planeur ultraléger motorisé sont presque exclusivement pratiqués par des hommes.


Une réalité difficile à dépasser alors qu’en 2023, sur les 85 fédérations olympiques et non olympiques en France, environ la moitié comptait moins de 20 % de femmes ([21]), parmi lesquelles les fédérations de rugby et de cyclisme.

Le graphique ci-dessus présente les fédérations en fonction de leur fréquentation soit par les hommes soit par les femmes.

II.   Le sport féminin (amateur comme professionnel) est confronté à de nombreux obstacles qui limitent la pratique

Dans ce contexte, pour le sport amateur, il apparaît qu’à chaque étape de la vie, les femmes sont confrontées à des obstacles qui entravent leur pratique sportive (A). Le sport féminin professionnel, où ces nombreux obstacles sont exacerbés par la compétition, illustre la difficile réalité qu’affrontent les femmes dans le monde sportif (B).

A.   Dans le sport amateur, des sportives occasionnelles dont la pratique s’interrompt tout au long de la vie

1.   Des freins qui apparaissent à chaque étape de la vie et s’accumulent

Le schéma présente les différents freins auxquels les femmes sont confrontées, tout au long de la vie, dans leur pratique sportive


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Le graphique ([22]) ci-dessous illustre ce décrochage progressif de la pratique sportive féminine aux différents âges de la vie.

Le premier constat, et sans doute le plus important, est que la petite enfance constitue le point de départ d’une inégalité pérenne face au sport qui ne se résorbe qu’à l’âge de la retraite.

a.   Petite enfance : point de départ d’une inégalité de long terme

Si entre 0 et 4 ans, les enfants sont inscrits dans des proportions équivalentes dans les fédérations sportives et occupent l’espace de la même manière, les premiers écarts dans la pratique sportive apparaissent chez les enfants entre cinq et neuf ans, selon Marie-Carmen Garcia et Cécile Ottogalli-Mazzacavallo ([23]).

Comme le souligne Nicole Abar, ancienne footballeuse professionnelle aujourd’hui engagée pour la pratique sportive des filles dès le plus jeune âge, cet écart résulte d’une construction sociale inculquée par les adultes. Au premier rang, les parents et les éducateurs qui reproduisent les biais de genre avec lesquels ils ont été élevés : les jeunes filles sont incitées à être moins actives, à rester sages là où les jeunes garçons sont encouragés à être aventureux et à s’approprier l’espace. En conséquence, comme l’a expliqué Nicole Abar lors de son audition, les enfants finissent par intérioriser « une vision genrée de la pratique sportive ».

Ces biais de genre sont d’autant plus problématiques qu’ils sont renforcés par l’école et les infrastructures scolaires. Édith Maruéjouls, géographe spécialiste du genre, explique le rôle des cours d’école dans l’enracinement de la pratique sportive. L’essentiel des cours d’école est aujourd’hui construit autour du terrain de football. Il constitue le noyau central de la cour, dans les faits et dans l’imaginaire des enfants. Ce faisant, les jeunes garçons s’approprient cet espace dans lequel ils se sentent particulièrement à l’aise, étant par ailleurs encouragés à le faire, ce qui relègue les filles aux marges de la cour de l’école.

Selon Édith Maruéjouls, « l’organisation, très répandue, des cours avec un terrain de foot contribue grandement à cette ségrégation : les garçons occupent une place centrale, alors que les filles sont reléguées aux coins. Elles sont invisibilisées ; même si elles sont nombreuses, on ne les voit pas. Sur les dessins des enfants, les filles sont souvent représentées dans les toilettes, donc un endroit privé » ([24]).

Comme le montre Nicole Abar dans son documentaire La conquête de l’espace, une fois ces habitudes prises, à l’école primaire, les jeunes filles, même les sportives d’entre elles, ont tendance à fuir le ballon et suivent passivement les consignes des garçons lors des sports collectifs, et ce malgré les encouragements des enseignants. À ce si jeune âge, il est déjà difficile de « sortir les filles des coins » ([25]).

Cette situation est aggravée par la faible prise en compte de cette problématique par les personnes encadrant les enfants dans le temps scolaire et périscolaire. Selon la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) ([26]), les enseignants sont peu sensibilisés à l’égalité dans le sport entre les filles et les garçons. Leur formation initiale consacre peu de temps au sport et n’évoque pas la sensibilisation des filles à la pratique sportive.

b.   Adolescence : un décrochage des filles bien identifié

Les freins constatés dès l’enfance s’accumulent et se cristallisent à l’adolescence, souvent perçue comme le moment clé du décrochage de la pratique sportive des enfants. Selon Santé Publique France, en 2016, seuls 65,2 % des adolescents déclaraient avoir effectué une activité sportive dans au moins un club de sport au cours des douze derniers mois, une baisse de 17 % par rapport à la classe d’âge 11-14 ans ([27]). De l’avis général, ce décrochage est plus marqué chez les jeunes filles. Selon Santé Publique France, parmi les 15-17 ans, seules 15,7 % des filles atteignent la recommandation de 60 minutes d’activité physique par jour (contre 40,1 % des garçons) ([28]).

Différents facteurs explicatifs extérieurs au genre peuvent être avancés, par exemple une volonté d’autonomie sur le choix des loisirs, à un âge où les adolescents préfèrent se réunir entre pairs plutôt qu’à travers une activité organisée par une institution.

Toutefois, la littérature scientifique sur le sujet et les différentes personnes entendues par vos rapporteurs s’accordent à dire que les causes liées au genre jouent un rôle déterminant : en premier lieu, depuis l’enfance, les filles portent un sentiment d’incompétence vis-à-vis de l’activité physique dans un contexte où le sexisme et la pression du corps qui change sont exacerbés. Selon une enquête de 2021, une fille sur quatre abandonnerait le sport à l’adolescence, en particulier de peur de perdre du sang et de tâcher ses vêtements ([29]).

À l’adolescence, l’essentiel des activités sportives collectives deviennent non mixtes, entraînant par là même des difficultés pratiques pour les jeunes filles, en particulier dans les zones rurales. L’offre d’activités y dépend à la fois des « logiques locales et sportives » ainsi que de l’engagement des parents selon Yaëlle Amsellem-Mainguy ([30]). Dans ces milieux souvent modestes, les filles sont peu nombreuses à avoir pratiqué des activités en club et donc des sports collectifs.

Toutes zones confondues, le faible nombre de pratiquantes conduit les clubs à réduire voire fermer les sections féminines. Les filles doivent alors trouver une solution de transport pour les amener dans la ville voisine ou bien changer de sport. De la même manière, les classes sport études sont peu prisées par les filles : pour l’année 2023-2024, la fédération française de football (FFF) dénombre 33 000 élèves en sections sportives scolaires et licenciés FFF dont seulement 5 100 sont des filles ([31]) . Ce cursus spécifique suppose souvent une scolarité en internat peu prisée par les filles. Ainsi, à la rentrée 2018, seules 3,3 % des filles scolarisées dans le second degré étaient internes (contre 3,9 % des garçons) ([32]).

À cet âge et dans ces conditions, les filles sont nombreuses à abandonner le sport. Une décision qui a des conséquences néfastes puisque chez les femmes en particulier, un faible niveau d’activité physique à l’adolescence se poursuit à l’âge adulte. Toutefois, ce constat ne se limite pas à la France et est même plus grave dans d’autres pays. Au Canada par exemple, 62 % des adolescentes ne pratiquent aucun sport et elles sont près d’une sur trois à avoir abandonné le sport à l’adolescence.

c.   Grossesse, maternité et parentalité : une difficile conciliation entre la vie active et la vie familiale affectant la pratique sportive

À l’âge adulte, la conciliation entre la vie professionnelle et familiale est difficile et les obstacles pratiques pour faire du sport se multiplient.

Lorsqu’elles tombent enceintes, en raison de la croyance populaire que le sport pourrait nuire à la santé de l’enfant et du fait de la fatigue engendrée par certaines caractéristiques de la grossesse (nausées, rétention d’eau, mouvements du bébé), les femmes ont tendance à réduire leur activité physique en particulier à partir du troisième mois. Ainsi, moins de 25 % des femmes en cours de grossesse effectuent les 30 minutes de marche par jour préconisées ([33]).

Pourtant, selon la Haute autorité de santé (HAS), pour les femmes enceintes en bonne santé générale, une activité physique régulière d’intensité modérée et d’une durée de 150 à 180 minutes par semaine est recommandée. Certains sports tels que la marche, la natation ou le vélo stationnaire sont même particulièrement indiqués. Selon la HAS, l’action physique a des effets bénéfiques tant sur la santé maternelle que fœtale et néonatale ([34]). En d’autres termes, le sport contribue à la bonne santé de la mère et de l’enfant.

En effet, outre les bienfaits généraux du sport, une pratique sportive modérée pendant la grossesse apporte de nombreux bienfaits sur le plan physique (mobilité, prise de poids, prévention de douleurs, facilitation de l’accouchement) et sur la santé mentale puisque le sport atténue l’anxiété ([35]). Après la naissance, le sport facile la récupération physique (diminution des douleurs lombaires, renforcement de la ceinture musculaire abdominale) et mentale (réappropriation du corps, amélioration du sommeil, limitation des troubles anxieux et symptômes dépressifs liés au post-partum).

Par la suite, particulièrement investies dans la vie familiale, les femmes sont contraintes de réduire, voire d’abandonner leur pratique sportive, faute de temps. Les femmes se chargent de la supervision des enfants, de l’organisation de leur temps et continuent d’assurer l’essentiel des tâches ménagères ([36]).

Dans leur vie professionnelle, les femmes bénéficient moins des dispositifs d’aide à la pratique sportive en entreprise que les hommes : seulement 18 % des femmes contre 25 % des hommes ([37]). Selon une enquête de l’association 2GAP, les femmes l’expliquent par l’absence d’infrastructures de type douches ou sanitaires pourtant nécessaires après le sport. L’absence de dispositifs de garde d’enfants en entreprise est également identifiée comme un obstacle ([38]).

À ce frein du temps disponible, s’ajoute un frein mental pour certaines femmes, c’est-à-dire une réticence à s’accorder du temps pour soi et de maintenir des loisirs en dehors de la vie familiale. Comme le signale Catherine Louveau, « ce qui importe est donc moins la quantité de temps disponible que le fait de prendre du temps pour soi… ce à quoi la majorité des femmes ne sont guère habituées, les représentations dominantes de la division du travail les amenant à s'occuper d'abord de la famille, mari, enfants, et des tâches domestiques et parentales » ([39]).

Dans ces conditions, les femmes ayant des enfants, en particulier en bas âge, n’ont pas le temps de s’investir dans la vie d’un club sportif, qui représente une charge mentale et une logistique supplémentaire. En effet, le sport amateur s’appuie fortement sur la bonne volonté et la passion des bénévoles. Comme le résume Doriane Domenjo, arbitre internationale française de rugby, le bénévolat, « c’est ce qui fait tenir le sport amateur ». Or pour les femmes, ce surinvestissement peut aboutir à une forme d’épuisement qui les pousse, à terme, à se désengager du monde sportif.

d.   Sport adulte/sport senior : l’enjeu du bien vieillir

Les femmes ne renouent avec le sport qu’à l’âge de la retraite. L’écart de pratique sportive entre les hommes et les femmes tend alors à se réduire. Le sport revêt alors une dimension d’émancipation et de sociabilité et permet de rompre l’isolement dans lequel se trouvent certaines personnes âgées.

Néanmoins, à cet âge, « le mal est déjà fait », les femmes étant nombreuses à souffrir de maladies dégénératives ou articulaires, résultat d’une pratique sportive peu intensive voire inexistante dans la jeunesse et la vie adulte. Concernant la maladie de Parkinson par exemple, une étude, menée par des chercheurs de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), a montré que plus les femmes « avaient une activité physique importante, moins elles risquaient de développer la maladie de Parkinson et ce, même lorsque l’activité physique était évaluée plus de 20 ans avant le diagnostic » ([40]).

Le sport comme un chemin vers la guérison

Pour les femmes ayant souffert d’affections graves telles que le cancer du sein, le sport peut être une voie vers l’acceptation et la guérison. Il participe également à la réduction des risques de récidive. En effet, selon l’oncologue Bruno Cutili qui se fonde sur des études américaines, l’activité physique régulière à hauteur de deux à trois heures par semaine peut réduire le risque de rechute de 20 % à cinq ans ([41]).

Dans ce contexte, l’association Drôles de Rames installée à Annecy par exemple, aide les femmes atteintes de cancer à se reconstruire sur le plan physique et émotionnel en les réunissant autour du dragon boat, embarcation composée de vingt pagayeurs, sur le lac d’Annecy.

  1.   L’accumulation de freins conduit à un nombre moins élevé de pratiquantes et de manière peu intensive

Dans ce contexte, différents freins s’accumulent et limitent la pratique des femmes. Si 84 % des femmes pratiquent une activité physique (contre 87 % des hommes ([42])), cette pratique sportive est souvent occasionnelle : seulement 59 % des femmes pratiquent du sport au moins une fois par semaine contre 69 % des hommes ([43]). De ce fait, seuls 38 % des licenciés sportifs en 2018 étaient des licenciées ([44]).

Plus grave encore, Santé Publique France estime que l’activité physique des femmes est en elle-même moins intensive puisque souvent liée aux tâches domestiques dans un contexte où les femmes portent encore une grande part de la charge mentale ([45]). Cette dernière est, à présent, bien identifiée par les femmes qui y voient une réelle limite à la pratique sportive : en 2021, 43 % des femmes estimaient que le rythme de vie notamment familial les empêchait de pratiquer  du sport, une hausse de cinq points par rapport à 2018 ([46]).

Selon cette même étude, d’autres freins sont également identifiés par les femmes, 43 % d’entre elles évoquent le manque de motivation et d’intérêt s’expliquant par la faible incitation des jeunes filles à faire du sport. En parallèle, 31 % des femmes interrogées justifient leur désintérêt pour le sport par les activités proposées qui ne correspondent pas à leurs recherches.

B.   Pour les sportives de haut niveau, une faible reconnaissance de leurs mérites et des conditions matérielles d’entraînement difficiles

Les constats dressés pour le sport amateur se trouvent confirmés et même exacerbés dans le sport féminin professionnel. Les sportives de haut niveau qui jouent pourtant un rôle essentiel de modèle pour les plus jeunes générations, doivent encore composer avec une faible reconnaissance de leur mérite dans un milieu où les stéréotypes de genre persistent (1), et avec des conditions de travail difficiles malgré quelques améliorations (2).

1.   Une reconnaissance limitée sous tendue par des stéréotypes de genre exacerbés

Plus encore que dans le sport amateur, les sportives de haut niveau sont confrontées à une persistance des stéréotypes de genre sous diverses formes, par exemple une attribution de leurs exploits à leur entourage masculin. Ainsi, dans les années 2000, lorsque Laure Manaudou remporte différents titres de championne du monde et championne olympique de natation, de nombreux reportages insistent sur le rôle de son entraîneur allant jusqu’à dire : « bien évidemment, ce n’est pas Philippe Lucas qui nage (...) mais il est clair que Laure doit beaucoup à son entraîneur » ([47]).

De plus, les exploits sportifs féminins même lorsqu’ils dépassent le sport masculin ne sont pas reconnus à leur juste titre. Ainsi, à l’occasion de différentes interviews, le joueur de tennis Andy Murray, a dû rappeler aux journalistes que les exploits des sœurs Serena et Vénus Williams ont souvent précédé ceux des sportifs masculins ([48]).

Il arrive également que les sportives féminines, pourtant prometteuses, soient sacrifiées au profit de leurs homologues masculins. Ainsi, l’équipe féminine d’Orléans évoluant en deuxième division, équivalant à la ligue 2 masculine, devrait prochainement disparaître. Le club fait le choix de concentrer ses ressources sur développement de l’équipe masculine, actuellement en troisième division. Le président du club, Cyril Courtin, aurait ainsi déclaré à ses joueuses « non, on ne repartira pas en D2 la saison prochaine. Vous nous coûtez trop cher et vous ne rapportez rien » ([49]).

Loin d’être anecdotiques, ces exemples illustrent une vision limitée et sexiste du sport féminin. Dans une étude de 2016 sur le langage ([50]), l’université de Cambridge relève que les hommes ont deux à trois fois plus de chances d’être mentionnés dans des programmes sportifs que les femmes. Le terme homme est souvent associé à une sémantique liée à la compétition avec des mots tels que « battre », « dominer » ou encore « fort », « grand » alors que le terme femme est accolé à des mots plus neutres tels que « participer » ou « aspirer ». La même étude souligne que les athlètes féminines sont interrogées de « manière disproportionnée » sur l’apparence, les vêtements et la vie personnelle. Une infantilisation et une sexualisation qui trouve son pendant dans les images diffusées. Il a ainsi été démontré que lors des Jeux olympiques d’Athènes en 2004, 20 % des plans montraient les poitrines joueuses et environ 17 % les fessiers ([51]).

Ces situations sexistes ont régulièrement été dénoncées par les joueuses. Ainsi, en 2013, lorsqu’elle gagne le tournoi de Wimbledon, Marion Bartoli fait face à une vague de commentaires sur son apparence de la part des journalistes sportifs, auxquels elle répond en déclarant : « Oui je ne suis pas blonde. C’est un fait. Est-ce que j'ai rêvé de devenir mannequin ? Non, désolée. Mais est-ce que j'ai rêvé de gagner Wimbledon ? Oui, absolument » ([52]).

2.   Malgré des premières évolutions, des conditions de travail qui demeurent difficiles sans garantie de reconversion professionnelle

a.   Des écarts de rémunération persistants malgré des avancées disparates

La faible reconnaissance symbolique accordée aux sportives trouve un écho sur le plan financier.

Dans le sport de haut niveau, les femmes gagnent en général moins que les hommes tant en termes de salaire que de prize money, c’est-à-dire la prime financière attribuée aux vainqueurs lors des compétitions. Pour les sportifs et les sportives inscrits dans les listes de haut niveau, en 2023, le salaire minimum de croissance (SMIC) était de 1 783 euros bruts mensuels pour un temps plein et de 800 euros pour un temps partiel plafonné à 17,5 heures par semaine.

De plus, le niveau de rémunération fluctue en fonction des disciplines, des fédérations et des échelles (national ou international) et les écarts entre les femmes et les hommes sont d’autant plus forts que la discipline est lucrative. Ainsi, en 2019, selon Nathalie Boy de la Tour, présidente de la ligue de football professionnel, « la joueuse la mieux payée en D1 ([53]) gagne environ cent fois moins que son homologue masculin » ([54]) tandis qu’en moyenne, les footballeurs de la ligue 1 gagnent douze fois plus que les joueuses de D1 ([55]).

La faiblesse de ces rémunérations contraint souvent les sportives à une véritable précarité financière comme en témoignait il y a seulement quelques semaines l’équipe féminine de Brest dans une lettre ouverte ([56]) à la direction du club. Les joueuses y dénonçaient leurs mauvaises conditions de travail ainsi que des écarts entre le salaire annoncé et celui effectivement versé voire même des cas de joueuses jouant sans contrat.

Ce faisant, de nombreuses sportives doivent mener une double carrière pour subvenir à leurs besoins, en particulier dans les sports peu médiatisés. Dans ce contexte, des athlètes talentueuses comme la cycliste Typhaine Laurance ([57]), font le choix d’arrêter le haut niveau qui ne leur permet pas de vivre décemment.

Toutefois, des premières avancées apparaissent : ainsi, au volley ball, un salaire minimal de 1 330 euros a été mis en place pour tenter de réduire l’écart de rémunération entre les joueurs et les joueuses ([58]). Dans d’autres sports comme le football ou le basket, des accords sectoriels ont pu être trouvés récemment afin d’améliorer la protection sociale des joueuses.

Les ligues professionnelles féminines

Depuis quelques années, certains pays européens mettent en place des ligues professionnelles féminines afin de développer le sport féminin de haut niveau. Ainsi, au football, la Liga F a été fondée dès 1988, et la Women's Super League anglaise créée en 2010 a adopté un modèle entièrement professionnel depuis 2018.

Ce statut de ligue professionnelle répond à plusieurs objectifs :

- accroître la visibilité du sport féminin en s’appuyant sur des bonnes performances internationales et une meilleure couverture médiatique ;

- rendre plus égalitaires les conditions de travail plus égalitaires entre les femmes et les hommes (niveau de rémunération notamment) ;

- développer le sport féminin professionnel, dès le plus jeune âge grâce à un système d’académies et de programmes de formations permettant de former un vivier de jeunes pratiques d’élite.

S’inspirant d’exemples étrangers, la structuration professionnelle du sport féminin devrait aller dans le sens d’une égalité salariale nécessaire. La création d’une ligue féminine de football dotée d’un budget de soixante-dix millions d’euros sur cinq ans témoigne de cette volonté, « d’assurer l’essor du football féminin, accompagner la professionnalisation des clubs et rayonner sur la scène européenne et internationale » ([59]) selon Philippe Diallo, président de la FFF.

b.   Des conditions matérielles et d’encadrement peu enviables

La même logique prime sur le plan matériel à un degré presque caricatural. Ainsi, dans son rapport sur la coupe du monde de football féminine organisée en France en 2019, le Délégation aux droits des femmes du Sénat déplorait « vivement le fait que, une semaine à peine avant le début de la Coupe du monde et pendant cette période décisive de leur préparation, les Bleues aient été contraintes de quitter leurs chambres de Clairefontaine pour laisser la place à l'équipe de France masculine, au motif que les joueurs devaient préparer un match amical contre la Bolivie » ([60]).  De la même manière, dans le documentaire Toutes Musclées, Mélissa Plaza explique que les chaussettes inutilisées par les joueurs sont parfois proposées aux joueuses reflétant le peu de considération accordée aux sportives de haut niveau.

De leur côté, les femmes arbitres subissent une situation similaire y compris au haut plus niveau. Ainsi, selon Doriane Domenjo, lors de la coupe du monde de rugby féminine en Nouvelle-Zélande en 2022, outre leur travail sur le terrain, les arbitres femmes étaient contraintes de s’organiser entre elles et par elles-mêmes pour l’alimentation et même le transport. On imagine mal que des conditions similaires soient proposées aux arbitres hommes.

Les enjeux de l’arbitrage au féminin

-          Des inégalités structurelles dans l'arbitrage multisport féminin

L'Association française du corps arbitral multisport (AFCAM) met en évidence un déséquilibre de représentation entre hommes et femmes dans l'arbitrage : les femmes arbitres tous niveaux confondus ne représentent que 30,5 % des arbitres. Une disparité encore plus marquée dans le haut niveau où les femmes ne représentent que 20,3 % des effectifs ([61]), révélant ainsi des barrières d'accès et de progression pour les femmes dans cette profession.

Comme les joueuses de haut niveau, les arbitres font face aux stéréotypes de genre persistants. Ils se traduisent par des comportements déplacés de la part des supporteurs, de l’encadrement technique et même des joueuses. Au cours de sa carrière, Stéphanie Frappart, première arbitre femme à arbitrer une finale de coupe du monde de football masculin, a par exemple dû faire face à des joueurs refusant de lui serrer la main avant un match.

Les femmes arbitres subissent également des conditions de travail difficiles. Ainsi, Charlotte Girard-Fabre, arbitre internationale de hockey sur glace et secrétaire générale de l’AFCAM, prenait en charge tous les frais de déplacement pour les tournois internationaux en lieu et place de sa fédération. Un engagement sans faille pour le sport peu valorisé par les fédérations alors qu’il pèse lourdement sur la vie personnelle des arbitres.

Lucie Le Tiec, ancienne arbitre de football au niveau fédéral, signale un « double processus d’exclusion » ([62]). D’une part, les arbitres féminines sont « écartées des postes les plus valorisés » et d’autre part, elles sont « cantonnées aux domaines réputés féminins », c’est-à-dire qu’elles sont affectées soit à des compétitions strictement féminines soit à des ligues inférieures. A contrario, les arbitres masculins, même moins expérimentés, sont privilégiés au sein des championnats et compétitions masculines d’élites, au détriment des arbitres féminines.

-          Des évolutions en cours qu’il convient de soutenir

À l’image de Stéphanie Frappart au football, Aurélie Groizeleau au rugby ou Charlotte Girard-Fabre au hockey sur glace, la visibilité croissante d’arbitres féminines menant une carrière exemplaire participe directement au développement de la pratique féminine de l’arbitrage.

Parallèlement, des mesures d’accompagnement se mettent progressivement en place pour améliorer les conditions de travail des femmes arbitres. Concernant la grossesse, les femmes arbitres étaient souvent déclassées au retour de leur congé maternité. Heureusement ces pratiques semblent changer : en effet, à partir de 2021, la fédération internationale de basketball a par exemple mis en place un congé maternité spécifique aux arbitres. La fédération française de handball, de son côté, a développé un plan « grossesse et maternité » destiné à pérenniser les effectifs féminins.

Pour aller dans le sens d’une véritable égalité des sexes dans l'arbitrage, des initiatives telles que des programmes de professionnalisation, l’ouverture des ligues masculines aux arbitres féminines ou encore la mise en place de mesures de mixité sont nécessaires.

Néanmoins, en matière d’encadrement au football, un premier rééquilibrage s’opère pour les femmes arbitres, sous l’égide de Stéphanie Frappart. Elle y a impulsé un renforcement des équipes techniques et médicales entourant les arbitres.

c.   Un désintérêt pour la santé des sportives en attente d’être comblé

Ce désintérêt pour les sportives de haut niveau a également des répercussions sur le plan de la santé. En effet, les athlètes de haut niveau sont confrontées à des injonctions et à une méconnaissance des encadrants, en particulier sur les règles.

Or, du fait d’une pratique sportive de haut niveau, certaines athlètes sont confrontées à une absence de règles, aménorrhée, jusqu’au début de l’âge adulte. Pour d’autres, la préoccupation d’avoir ses règles pendant les phases de compétition est réelle mais peu comprise par l’encadrement sportif ([63]). Ainsi, selon une enquête interne menée en 2021 par l’Institut national du sport (INSEP), 84 % des sportives de haut niveau déclaraient vivre la menstruation comme une difficulté dans le cadre de la pratique sportive ([64]). De la même manière, l’encadrement sportif est peu sensibilisé aux problématiques de l’endométriose et des symptômes du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK).

Plus grave encore, la contraception y demeure un tabou, le gynécologue Thierry Adam décrit « un déficit d’information énorme » ([65]), en particulier concernant la pilule qui peut engendrer une variation du poids, source d’angoisse pour certaines sportives. Selon la gynécologue Carole Maître, « certaines demandes de contraception nous arrivent trop tardivement à cause de cela (…) c’est la plus nocive des idées reçues. Parfois, certaines sportives arrêtent la pilule parce qu’elles ont pris du poids alors que ce n’est pas la pilule qui en est la cause » ([66]).

Au-delà des règles, cette méconnaissance des spécificités féminines s’étend à tout le corps féminin. Il est par exemple démontré qu’en faisant du sport, le risque de rupture du ligament croisé antérieur est entre deux à six fois plus élevé pour les femmes. Une blessure particulièrement douloureuse qui peut mettre un terme à une carrière de haut niveau, en particulier au football.

Parmi les facteurs explicatifs, une des hypothèses suppose que les femmes commencent le sport plus tardivement que les hommes, celles qui souhaitent s’orienter vers le haut niveau doivent donc intensifier leur pratique à l’adolescence à un moment où les os se consolident, elles sont de ce fait, plus susceptibles de se blesser à cet endroit.

Or, ce n’est qu’en 2023 que l’Union des associations européennes de football, s’est inquiétée de cette problématique en lançant une enquête sur les ligaments croisés dans le football féminin ([67]).

Toutefois, vos rapporteurs saluent des premières avancées pour une meilleure information des sportifs et de l’encadrement technique sur la santé des femmes. L’INSEP a par exemple développé un livret pédagogique à destination des sportives de haut niveau sur la problématique des règles. Surtout, le pôle performance de l’INSEP en collaboration avec des fédérations sportives mène un programme nommé Exploring Menstrual Periods of Women athletes to Escalate Ranking (Empow’her) dont l’objectif est de mieux connaître la physiologie féminine et d’adapter la pratique sportive en conséquence. 

d.   De faibles perspectives de reconversion professionnelle

Lorsqu’elles arrivent en fin de carrière, les sportives de haut niveau se trouvent dans une situation encore plus délicate. Peu de mécanismes de reconversion professionnelle sont prévus par les fédérations, et ils sont d’une intensité variable.

Les passerelles pour devenir entraîneuse ou dirigeante sportive n’existent pas réellement.

En outre, les conditions de travail et les rémunérations proposées aux entraîneuses et éducatrices sportives sont instables, supposent parfois un éloignement géographique d’autant que peu de dispositifs d’accueil des enfants sont prévus pour les joueuses et les équipes techniques. De plus, dans ces corps de métiers, les femmes sont souvent moins bien rémunérées qu’en tant que joueuses. Elles tendent donc à s’orienter vers une autre voie, en général vers la carrière professionnelle qu’elles mènent en parallèle du sport.

Comme l’a résumé Thibault Dagorne, co-secrétaire général de la fédération des entraîneurs professionnels (FEP) auprès de vos rapporteurs « des femmes qui ont été au sommet de leur activité sportive n’ont pas les conditions pour rester dans ce secteur et transmettre leur expérience ». Aujourd’hui, dans les 128 équipes professionnelles des deux premières divisions de football, de basket, de rugby, de handball et de volleyball, seulement 20 % des encadrants sont des femmes ([68]).

Par ailleurs, si certains sportifs se voient proposer des postes comme commentateurs sportifs ou de consultants pour des chaînes, les sportives de haut niveau à ces postes, sont rares.

 


   DeuxiÈmE PARTIE : DES leviers clés pour consolider la place des femmes dans le monde sportif

Renforcer la place des femmes dans le monde sportif est un « combat » mené de longue date par les pouvoirs publics, comme l’ont rappelé en réunion plénière de la Délégation, trois anciennes ministres des sports, Marie-George Buffet, Najat Vallaud-Belkacem et Roxana Maracineanu.

Saluant leur engagement, vos rapporteurs identifient trois leviers majeurs pour prolonger leur action et consolider la place des femmes dans le monde sportif, à savoir : à travers l’éducation, donner le goût du sport dès le plus jeune âge, pour accroître le nombre de pratiquantes (I), réformer la gouvernance pour mieux inclure les femmes (II) et utiliser les financements publics comme un moyen de développer le sport féminin (III).

I.   changer les mentalités en misant sur l’éducation et la visibilité du sport féminin

Si la place des femmes dans le monde sportif, amateur et professionnel, demeure fragile, vos rapporteurs relèvent des avancées en matière de visibilité du sport féminin que ce soit à travers l’éducation des plus jeunes, l’appropriation de l’espace public ou la visibilité du sport féminin dans les médias. Vos rapporteurs effectuent des recommandations pour consolider ces avancées. 

A.   donner le goût du sport dès le plus jeune âge pour accroître la pratique tout au long de la vie

1.   Dès le plus jeune âge, inciter les jeunes filles à aimer le sport

Partant du constat que l’écart de pratique sportive entre les filles et les garçons commence dès l’âge de cinq ans, vos rapporteurs voient en l’éducation le premier levier de transmission du goût du sport aux jeunes filles.

Vos rapporteurs sont favorables à toutes les mesures permettant de rapprocher les jeunes filles du sport et de déconstruire les stéréotypes de genre trop souvent transmis aux enfants de manière inconsciente par les adultes, du fait d’un manque de connaissances sur cette question. Comme l’a expliqué Claire Pontais, représentante du Syndicat national de l’éducation physique – Fédération syndicale unitaire (SNEP-FSU), « c’est parfois à l’école que les filles se voient confier un ballon pour la première fois et où les garçons s’essaient à la danse ».

i.   La formation du personnel encadrant

En premier lieu, la formation des enseignants du premier degré semble être un levier clé. Or, elle accorde peu de temps au sport : sur les 800 heures de formation pour les enseignants du premier degré, seulement quarante heures sont consacrées au sort dont deux à quatre heures sur la mixité dans le sport ([69]).

C’est pourquoi, dans le cadre de la réforme à venir sur la formation des enseignants du premier degré, vos rapporteurs suggèrent de renforcer ce module d’enseignement pour y inclure une sensibilisation aux enjeux de parité et de pratique sportive mixte dès le plus jeune âge. De manière concrète, puisque la formation devrait se dérouler sur cinq ans (contre deux actuellement), le module consacré au sport devrait augmenter en conséquence pour atteindre cent heures. Dans le cadre de ce module sport, des séances spécifiques seraient consacrées aux enjeux de la parité et de la mixité à l’école.

En sensibilisant les futurs professeurs, vos rapporteurs espèrent accroître la place accordée au sport à l’école primaire où en fonction des enseignants, le temps scolaire réservé au sport fluctue.

Recommandation n° 1 : renforcer le module d’enseignement sur le sport dans la formation initiale des enseignants du premier degré afin d’y inclure une sensibilisation aux enjeux de la parité et de la mixité de la pratique sportive, dès le plus jeune âge.

De la même manière, les formations des encadrants sportifs telles que le Brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport (BP JEPS) ou la licence STAPS souvent suivie par les professeurs d’Éducation physique et sportive (EPS) devrait être renforcée sur les enjeux de parité et de sport féminin.

Trop souvent, les encadrants peinent à accompagner pleinement les jeunes filles soit parce qu’ils ne perçoivent pas les difficultés auxquelles elles font face ou par manque de formation, par exemple sur les règles. De la même manière, la question des VSS est peu abordée ce qui a pu aboutir à des dérives dans un monde favorisant l’entre-soi et la résolution en interne des problèmes.

Il semble donc nécessaire de proposer une meilleure formation aux encadrants sportifs. Pour ce faire, vos rapporteurs proposent, au sein des modules de formation dits Unités capitalisables (UC), la création d’un cycle d’enseignements sur les spécificités du sport féminin et les enjeux de parité et de mixité du sport. Cette formation doit permettre d’accroître le niveau de connaissance des éducateurs sur la physiologie du corps féminin et déconstruire les stéréotypes de genre.

Recommandation n° 2 : créer un nouveau module de formation axé sur la déconstruction des stéréotypes de genre et la promotion d’une culture de l’égalité dans la formation diplômante des éducateurs sportifs et dans les licences STAPS.

Dans le même objectif, vos rapporteurs proposent un aménagement du temps scolaire pour y inclure des plages horaires réservées au sport. Dans les années 1990, la ville d’Épinal a par exemple expérimenté dans les établissements volontaires, un aménagement du temps scolaire : en raccourcissant les vacances, les cours étaient concentrés sur le matin permettant de libérer trois demi-journées par semaine pour des activités sportives. Cette mesure innovante incitait les enfants à jouer en mixité et tester différents sports permettant in fine d’enraciner la pratique sportive dans leurs habitudes.

En s’appuyant sur les dispositions de l’article L. 401-1 du code de l’éducation tel que modifié par la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance et sur les travaux du Conseil national de la refondation (CNR), vos rapporteurs proposent une expérimentation dans les établissements volontaires permettant de renforcer l’éducation sportive des enfants.

Concrètement, les écoles et établissements scolaires en lien avec les représentants de la communauté éducative, élaboreraient un projet d’école ou d’établissement consacrant plus de temps à l’activité physique, sur le modèle de l’expérimentation menée à Épinal. Cette mesure devrait permettre aux filles de prendre au goût au sport et de trouver l’activité sportive qui leur convient le plus tout en ayant des effets bénéfiques sur les autres enfants.

Recommandation n° 3 : à l’école, expérimenter des projets d’école ou d’établissement, prévus à l’article L. 401-1 du code de l’éducation, ménageant plus de temps à l’activité physique.

ii.   Un aménagement du temps et des infrastructures scolaires

En outre, vos rapporteurs saluent la transformation de 1 500 cours d’école, à l’horizon 2026, en des espaces communs mixtes favorisant la pratique sportive des enfants, dans le cadre des plans 5 000 équipements sportifs du ministère des sports.

Grâce au design actif ([70]), la cour d’école n’est plus construite autour du terrain de football, les marquages au sol prévoient des terrains de différents sports en cohabitation avec des espaces plus calmes, comme des cercles de méditation par exemple. Ces cours d’école de nouvelle génération déconstruisent les stéréotypes de genre auxquels sont soumis les enfants en leur proposant une cohabitation mixte et plus libre de l’espace.

À ce stade, 170 cours d’écoles actives et non genrées sont déjà prêtes. Vos rapporteurs saluent la pleine mobilisation du ministère des sports, de l’ANS et de Paris 2024 qui a donné l’exemple. À travers l’AMF, les municipalités devraient être informées de ce dispositif.

Recommandation n° 4 :  à travers l’AMF, informer les collectivités territoriales sur le design actif dans les cours d’école afin de le développer.

Par la suite, à l’adolescence où de nombreuses filles abandonnent le sport. Sacraliser le temps le mercredi après-midi pour la pratique sportive semble donc nécessaire ; d’autant plus que ce créneau est de plus en plus utilisé pour du temps scolaire. Vos rapporteurs enjoignent donc les établissements scolaires à respecter le temps du mercredi après-midi historiquement consacré au sport. Au moyen d’une circulaire, le ministère de l’Éducation pourrait rappeler aux rectorats l’objectif premier de ce temps libre, c’est-à-dire d’avoir un temps dédié à la pratique sportive.

Recommandation n° 5 : au collège et au lycée, enjoindre les établissements à réserver le mercredi après-midi pour une pratique sportive.

De plus, les liens entre les établissements scolaires, l’UNSS et les clubs de sport gagneraient à être renforcés. Sur le modèle de la semaine du numérique portée par l’Économie, vos rapporteurs plaident pour l’organisation d’une semaine du sport féminin sous le haut patronage du ministère des sports. Sur le terrain, elle serait organisée par les établissements scolaires en collaboration avec l’UNSS et les clubs de sport.

Recommandation n° 6 : renforcer les liens entre les établissements scolaires, l’UNSS et les clubs de sport à travers une semaine du sport féminin.

Cette collaboration pourrait également prendre la forme d’une intervention régulière, au moins une fois par an, des clubs sportifs et de l’UNSS dans les établissements scolaires pour inciter les jeunes filles à faire du sport.

Recommandation n° 7 : systématiser et généraliser l’intervention de l’UNSS et des clubs sportifs dans les établissements scolaires, au moins une fois par an, pour inciter les jeunes filles à s’inscrire.

iii.   Faciliter la pratique sportive des filles sur leur temps libre

En dehors de l’école, sur le temps libre, la stimulation sportive des enfants doit se poursuivre dans un cadre mixte. C’est pourquoi, vos rapporteurs suggèrent que dans les fédérations comptant majoritairement des femmes ou des hommes, des mesures en faveur de la parité soient prises. De manière concrète, les frais d’inscriptions aux activités sportives pour les enfants débutant une activité sportive, devraient être portés à 1 euro.

Recommandation n° 8 : proposer des licences à 1 euro pour les enfants dans les fédérations comptant moins de 10 % de femmes ou d’hommes.

De plus, il semble nécessaire des sections mixtes aussi longtemps que possible dans l’ensemble des clubs. Dans les zones rurales, il est fondamental de maintenir des sections féminines ([71]). C’est pourquoi, vos rapporteurs sollicitent du Gouvernement un rapport en forme d’état des lieux sur le nombre de sections mixtes et de sections féminines existant en France afin de disposer des données nécessaires sur le sujet.

Recommandation n° 9 : pour le Gouvernement, au moyen d’un rapport remis au Parlement, recenser les sections mixtes et féminines sur l’ensemble du territoire.

Ainsi, en partant du constat du Gouvernement, des leviers incitatifs pourraient être mis en place pour aider les clubs à maintenir des sections mixtes ou féminines dans les zones où l’offre est faible.

Recommandation n° 10 : en partant de l’état des lieux fourni par le Gouvernement, inciter les clubs à maintenir des sections mixtes et féminines en particulier dans les zones où l’offre est faible.

En outre, comme l’a suggéré l’ANS à vos rapporteurs, il pourrait être judicieux de coupler les horaires de cours pour les adultes et pour les enfants. En offrant cette solution de garde aux parents, il serait ainsi possible d’accroître la pratique sportive de toute la famille.

Recommandation n° 11 : pour les clubs et associations sportives, coupler les horaires des cours pour enfants et pour adultes afin d’accroître la pratique sportive de toute la famille.

2.   Inciter les femmes à faire du sport tout au long de la vie

a.   Dans le sport amateur, communiquer régulièrement sur les bienfaits du sport tout au long de la vie

Conscients que les obstacles au sport augmentent tout au long de la vie, vos rapporteurs estiment nécessaire de mettre en place des mesures permettant de rappeler régulièrement aux femmes les bienfaits du sport.

S’inspirant des résultats positifs de la campagne This girl can menée au Royaume-Uni depuis 2015, vos rapporteurs promeuvent l’idée d’une campagne de communication institutionnelle incitant les femmes à faire du sport.

La campagne anglaise met par exemple en scène des femmes de tout âge et de toute condition physique s’adonnant à une pratique sportive. Les photos sont accompagnées de slogans amusants à l’instar de « Take me as I am or watch me go » ([72]) pour une femme portant une prothèse à la jambe ou « I am acting my age » ([73]) pour une femme âgée jouant un sport collectif avec des jeunes. Entre son lancement en 2015 et 2017, cette campagne aurait permis de toucher environ 2,8 millions de femmes qui auraient repris une activité physique grâce à celle-ci ([74]).

Une campagne similaire pourrait être menée en France également déclinée sur tous les âges de la vie. Dans ce cadre, plusieurs étapes de la vie devraient être ciblées :

-         la grossesse pendant laquelle de nombreuses femmes réduisent leur activité sportive alors qu’une activité physique modérée est vivement recommandée ;

-         l’âge adulte où les femmes réduisent leur temps de loisir personnel au profit de la vie familiale. L’objectif serait de déculpabiliser les mères de famille et les inciter à prendre du temps pour soi ;

-         les seniors, en particulier ceux souhaitant maintenir une activité sportive, gagneraient à être mieux informés sur le rôle des maisons sport santé dont les professionnels de santé peuvent aiguiller les patients vers les sports les plus adaptés.

Recommandation n° 12 : à travers une campagne institutionnelle annuelle, promouvoir l’activité physique pour les femmes tout au long de la vie.

De la même manière, l’activité physique devrait également être mentionnée lors des trois consultations médicales gratuites aux trois âges clés de la vie (25, 45, 65 ans) introduites par la loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023. Les praticiens devraient insister sur les bienfaits du sport tout au long de la vie.

Recommandation n° 13 : lors des consultations médicales gratuites aux trois âges clés de la vie, informer les patients sur les bienfaits du sport.

b.   Dans le sport de haut niveau, faciliter la maternité des sportives

À ce stade, les sportives de haut niveau qui souhaitent être mères, bénéficient d’un maintien d’une année supplémentaire sur la liste des sportifs de haut niveau (SHN) à compter de la déclaration de la grossesse.

Cette mesure bienvenue doit néanmoins être complétée, comme l’a annoncé, à plusieurs reprises, la ministre des sports. En effet, une fois déduit le temps de la grossesse, les sportives n’ont en réalité que trois à quatre mois pour renouer avec le haut niveau. De ce fait, une modification de l’article R. 221-8 du code du sport s’impose pour porter à deux ans l’inscription sur la liste SHN à compter de l’annonce de la grossesse.

Si le ministère des sports a annoncé être favorable à cette mesure, elle ne s’est pas encore concrétisée. C’est pourquoi, vos rapporteurs appellent le Gouvernement à modifier, dans les meilleurs délais, le code du sport afin que les sportives de haut niveau puissent gérer le plus facilement possible la transition entre la grossesse et le retour au haut niveau.

Recommandation n° 14 : modifier l’article R. 221-8 du code du sport et ainsi porter à deux ans, à compter de l’annonce de la grossesse, l’inscription sur la liste des sportifs de haut niveau.

B.   encourager les sportives à s’approprier l’espace public et sportif

1.   Accroître le recours au design actif dans l’espace public

Le recours au design actif dans l’espace public permet d’accroître le nombre de pratiquantes et la visibilité du sport féminin.

Concept venu d’Amérique du Nord, le design actif consiste à « aménager l’espace public et les bâtiments afin d’inciter l’activité physique ou sportive, de manière libre et spontanée, pour tous » ([75]). Il se structure autour de cinq principes clés que sont la libre utilisation, la mixité et l’inclusion, l’incitation, l’approche usager et la qualité urbaine. Les couleurs, les formes, le mobilier ou encore la lumière sont étudiés pour inciter à la pratique sportive ([76]).

Son déploiement est actuellement facilité par le plan « 5 000 terrains de sport » et son prolongement par le plan « 5 000 équipements – Génération 2024 ». Annoncé en 2021, le « plan 5 000 terrains de sport » prévoyait la construction ou la requalification de 5 000 équipements sportifs de proximité et l’acquisition d’équipements mobiles pour un coût total de 200 millions d’euros répartis sur trois ans. Il visait en priorité les quartiers politique de la ville ainsi que les milieux ruraux et ultra marins. En 2023, ce plan a été prolongé pour atteindre 5 500 équipements sportifs supplémentaires dans les trois ans, grâce à un budget de 300 millions d’euros.

Dans la pratique, ces plans s’adressent aux collectivités territoriales ; elles peuvent candidater pour obtenir des subventions allant de 5 000 à 25 000 euros afin de financer l’aménagement, selon les principes du design actif, des cours d’école allant de la maternelle à l’université et des équipements sportifs et du matériel (arbres à basket, trampolines, modules de fitness) dans l’espace public.

De nombreuses collectivités y ont déjà eu recours, par exemple le terrain multisport des Halles à Paris dispose d’un marquage au sol de type design actif. De la même manière, grâce au mobilier urbain ainsi qu’à des animations ludiques et sportives, la ville de Biarritz a créé un parcours nommé « les chemins de la forme ».

Vos rapporteurs encouragent vivement les collectivités territoriales à recourir à ce plan qui permet de rénover les infrastructures et de créer des terrains dans la ville incitant les usagers à faire du sport.

Recommandation n° 15 : pour les collectivités, adopter le design actif dans l’espace public promu par le plan « 5 000 équipements – Génération 2024 ».

En effet, les femmes sont nombreuses à recourir à la pratique libre qui leur permet une gestion autonome de leur temps, ces infrastructures de nouvelle génération viendraient donc combler un besoin d’autant qu’en 2021, 32 % d’entre elles estimaient les infrastructures proposées n’étaient pas adaptées aux femmes ([77]).

Il faut dire que les infrastructures actuelles se limitent souvent à des barres de tractions monopolisées par un public masculin. L’association Amunanti, entendue par vos rapporteurs, considère que de ce fait, l’espace public se résume à « un lieu de passage pour les femmes ».

2.   Mettre en place un « plan Marshall » des vestiaires et des sanitaires

Il semble également souhaitable que tous les aménagements sportifs publics soient équipés de sanitaires et de vestiaires confortables pour les femmes, ce qui fait cruellement défaut aujourd’hui dans certains territoires. Les installations actuelles sont souvent vieillissantes et ne prévoient pas ces deux infrastructures pourtant essentielles pour les femmes. De ce fait, les joueuses mais aussi les arbitres sont contraintes de se changer dans « placards à balais » ([78]).

C’est pourquoi, vos rapporteurs demandent au Gouvernement un rapport sur l’état des lieux des infrastructures existantes afin d’identifier au mieux les besoins par territoire. Ce travail permettrait ensuite de déployer un financement massif de type « plan Marshall des vestiaires et des sanitaires » assurant un confort minimal aux femmes dans leur pratique sportive.

Sur le modèle des plans 5 000 équipements sportifs, ce plan serait porté par l’État pour aider les collectivités territoriales à financer ces nouvelles infrastructures.

Recommandation n° 16 : pour le Gouvernement, effectuer un état des lieux des infrastructures sportives, en particulier des vestiaires et des sanitaires avant de mettre en place un « plan Marshall des vestiaires et des sanitaires » assurant aux femmes un confort minimal lors de la pratique sportive.

C.   renforcer la visibilité du sport féminin dans les médias sous le regard attentif de l’ARCOM

Partant du constat que la visibilité du sport et même l’économie du sport repose, en grande partie sur la médiatisation, vos rapporteurs estiment essentiel d’améliorer la visibilité du sport féminin dans les médias.

Dans ce sens, l’ARCOM, pour les médias et l’Autorité de régulation de la publicité (ARPP), doivent maintenir une vigilance active sur les contenus diffusés, sous peine de l’édiction de sanctions.

En effet, comme en témoigne le documentaire Je ne suis pas une salope, je suis journaliste ! ([79]), le journalisme sportif a très longtemps exclu les femmes journalistes. Un constat qui se reflète à l’antenne où le sport féminin a longtemps été ignoré. C’est pourquoi, vos rapporteurs plaident aujourd’hui pour une vigilance stricte de l’ARCOM qui sanctionne lourdement les programmes sportifs discriminants à l’encontre des femmes, que ce soit par une infantilisation ou une sexualisation à outrance des sportives notamment.

1.   Une faible visibilité du sport féminin pourtant plébiscité par les spectateurs

Si le sport féminin est effectivement plus présent dans les médias, les retransmissions de compétitions sportives féminines ayant augmenté de 50 % entre 2018 et 2021 ([80]), le sport masculin reste seize fois plus diffusé (en volume horaire) que le sport féminin ([81]). Selon l’ARCOM, entre 2018 et 2021, le sport masculin représentait 71,5 % du contenu sportif diffusé à la télévision contre seulement 4,5 % pour le sport féminin et 24 % pour le sport mixte.

De plus, la diffusion du sport féminin est principalement portée par les chaînes du service public : près de la moitié du contenu en sport féminin diffusé entre 2018 et 2021 diffusé sur les chaînes de la TNT provenait de France télévisions ([82]).

Les diffuseurs justifient les écarts entre le sport féminin et masculin en avançant que le sport féminin reste encore peu rentable. Une logique si prépondérante dans les médias qu’en 2019, le ministère des sports a été contraint d’intervenir pour imposer la médiatisation de la coupe du monde de football féminin organisée en France, comme l’a expliqué Brigitte Deydier à vos rapporteurs. Pourtant, cette compétition a réuni plus d’un milliard de téléspectateurs à l’échelle mondiale ([83]) et a même engendré une contribution, directe ou indirecte, d’environ 284 millions d’euros au produit intérieur brut de la France ([84]).

Le public est en effet de plus en plus enclin à regarder du sport féminin. L’infographie ci-dessous présente les principales réponses des français sur l’intérêt qu’ils portent au sport féminin et sa diffusion dans les médias.

Source : ARCOM, « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - Rapport sur l'exercice 2023 », mars 2024.

Selon l’ARCOM, plus de six français sur dix regardent des contenus en lien avec du sport féminin en particulier les hommes, premiers consommateurs de contenus sportifs ([85]). Une habitude qui s’enracine, 35 % des français estiment qu’ils suivent, à la télévision ou à la radio, plus de compétitions féminines qu’avant. Huit français sur dix estiment que le sport féminin n’est pas assez diffusé et 64 % des français seraient disposés en regarder davantage s’il était diffusé.

S’appuyant sur ces données, vos rapporteurs considèrent que l’argument sur la rentabilité du sport féminin est caduc et plaident pour une plus grande diffusion du sport féminin, conformément aux attentes des téléspectateurs.

Tenant compte du retard du sport féminin dans la part de diffusion de contenus sportifs et du sport en général par rapport aux autres contenus, vos rapporteurs recommandent donc d’instaurer des quotas de diffusion du sport féminin à des heures de grande audience pour les chaînes de la TNT. Cette mesure pourrait prendre pour modèle le décret n° 2004-1392 obligeant la télévision publique à diffuser les EMI. Considérées comme des EMI, les finales de compétitions sportives féminines des principaux championnats sont aujourd’hui diffusées grâce à ce décret. Vos rapporteurs proposent de construire sur cet acquis et d’élargir la diffusion du sport féminin au-delà des finales. Ainsi, certaines compétitions de sport féminin seraient diffusées intégralement, par exemple les championnats du monde de handball ou de natation.

Recommandation n° 17 : en élargissant le décret sur les EMI, instaurer des quotas de diffusion du sport féminin à des heures de grande audience pour les chaînes de la TNT.

De la même manière, vos rapporteurs sont favorables au maintien d’un soutien à la production autour du sport féminin. En effet, la diffusion d’un évènement sportif de type compétition engendre des coûts de production conséquents pouvant atteindre au moins entre 30 000 et 50 000 euros ([86]).

Créé en 2014, le fonds de soutien à la production audiovisuelle facilite la retransmission d’évènements sportifs ou de reportages consacrés à des disciplines peu médiatisées ou émergentes. Son budget a été doublé en 2023 afin de soutenir la diffusion du sport féminin, grâce à une enveloppe de 1,5 million d’euros dont 1 million provient du ministère des sports.

Vos rapporteurs appellent à la pérennisation de ce fonds jusqu’à ce que le sport féminin représente 40 % du contenu sportif (masculin, mixte, féminin) diffusé dans les médias contre 4,5 % entre 2018 et 2021. Ce fonds permettrait d’améliorer la qualité des images proposées et donc renforcer l’attractivité du sport féminin pour les téléspectateurs.

Recommandation n° 18 : afin de résorber l’écart de diffusion entre sport masculin et féminin, sanctuariser la part du fonds de soutien à la production audiovisuelle consacré au sport féminin jusqu’à ce que la part de sport féminin diffusée dans les médias atteigne 40 % du total du contenu sportif diffusé.

Par ailleurs, cet effort pourrait être prolongé par les acteurs privés dans le cadre des négociations de retransmission des compétitions sportives. Pour ce faire, lors des appels d’offres, les fédérations devraient proposent des lots réunissant des compétitions masculines et féminines.

Pour les inciter à entreprendre cette démarche, vos rapporteurs proposent que la composition des lots mixtes soit un critère d’attribution clé de l’agrément aux fédérations. En effet, la diffusion du sport féminin participe de la mise en œuvre d’une politique publique du sport paritaire et inclusive. C’est pourquoi, usant de son pouvoir discrétionnaire dans l’examen des agréments, le ministère des sports devrait refuser d’agréer les fédérations ne prenant pas ce type de mesures.

Recommandation n° 19 : conditionner l’agrément des fédérations à la mise en œuvre d’une politique publique du sport inclusive, mesurée à l’aide d’indicateurs tels qu’une composition mixte des lots de retransmission des compétitions sportives.

2.   Une faible valorisation des femmes journalistes de sport trop souvent ramenées à leur genre

Un constat similaire s’impose pour les femmes journalistes de sport. Bien que la part des femmes dans les plateaux sportifs soit passée de 12 % en 2019 à 18 % en 2020 ([87]), ce chiffre semble stagner depuis lors.

Le graphique ci-dessous présente l’évolution de la présence en plateau en télévision et à la radio pour chaque type de programme.

Source : ARCOM, « Analyse du poids des retransmissions de compétitions sportives féminines à la télévision entre 2018 et 2021 », janvier 2023.

On constate que par rapport aux autres contenus, le sport est particulièrement en retard concernant la présence de femmes journalistes : là où le divertissement, l’information et les documentaires atteignent une moyenne de 40 % environ, le sport se trouve très en retard à environ 20 %.

Selon l’ARCOM, les plateaux de compétitions sportives sont souvent peu mixtes, dans 60 % des cas, le plateau est même exclusivement masculin. La configuration inverse, c’est-à-dire un plateau exclusivement féminin, ne se produit que dans 1 % des cas ([88]). Si la télévision est souvent citée, la situation à la radio est particulièrement inquiétante, les femmes journalistes de sport ne représentent que 6 % du personnel ([89]).

Si un changement de mentalité semble opérer, les journalistes sportives interrogées par Marie Portolano dans son documentaire, dénoncent une ambiance de « boys club » longtemps prégnante dans les rédactions sportives. Les femmes y recevaient des commentaires sur leur apparence, étaient parfois qualifiées de « potiches » et leur légitimité était remise en cause ([90]). Une des journalistes interrogées dans le documentaire explique par exemple avoir été remplacée par une plante verte lorsqu’elle s’était absentée du programme temporairement.

Malgré l’évolution des comportements à la faveur de l’arrivée d’une nouvelle génération de journalistes, vos rapporteurs plaident pour la mise en place de formations annuelles sur le sexisme ordinaire, à caractère obligatoire, dans les rédactions sportives.

Recommandation n° 20 : dans les rédactions sportives, organiser des sessions de prévention du sexisme ordinaire chaque année.

En outre, les programmes sportifs se distinguent comme ceux qui donnent le moins la parole aux femmes (11 % en 2023). De plus, comme l’a constaté l’ARCOM, les femmes sont plus souvent assignées à commenter du sport féminin (perçu comme moins prestigieux dans l’écosystème journalistique) que du sport masculin. Une observation confirmée par les journalistes sportives : lors de son passage dans l’émission stade 2, la journaliste de sport, Clémentine Sarlat, a remarqué que pour certaines émissions, le conducteur du programme ne lui indiquait aucun temps de parole ([91]).

Toutefois, les journalistes sportives ne sont pas toujours désireuses d’animer des émissions à la télévision. Comme l’a expliqué Laurie Delhostal, co-présidente du collectif des Femmes journalistes de sport (FJS), à vos rapporteurs, à l’issue des diffusions, les femmes présentatrices de contenu sportif subissent un cyber harcèlement violent et traumatisant. Elles sont nombreuses à décrire des flots d’insultes souvent sexistes et concentrés sur leur apparence physique. Charlotte Namura, journaliste sportive, souligne le décalage qui en résulte au sein des rédactions puisque seules les femmes sont soumises à ce type de commentaires ([92]).

Vos rapporteurs incitent donc les chaînes de télévision à mieux faire connaître, à leurs employés, les infractions d’outrage sexiste et de cyber harcèlement en meute récemment crées. Des dispositifs d’accompagnement psychologiques devraient également être mis en place par les chaînes de télévision pour les femmes journalistes qui en effectueraient la demande.

Recommandation n° 21 : étoffer la politique d’accompagnement des femmes journalistes de sport victimes de sexisme en communiquant davantage sur les infractions existantes et en ouvrant des dispositifs d’accompagnement psychologique lorsque nécessaire.

Dans ce contexte, alors que l’ARCOM s’apprête à négocier le renouvellement des conventions de quinze chaînes de TNT pour 2025, vos rapporteurs l’invitent à inclure en annexe la charte rédigée par l’association des journalistes sportives. Déclinée en trois piliers, à savoir recruter, accompagner et promouvoir, cette charte liste des actions concrètes pouvant être entreprises par les rédactions. Vos rapporteurs appuient l’idée de recevoir toutes les candidatures féminines en entretien pour chaque poste ouvert voire de leur réserver un recrutement sur deux tant qu’elles seront sous-représentées dans le milieu. Pour aller plus loin, ils suggèrent que pour chaque poste, le binôme finaliste soit paritaire.

Cette charte a déjà été signée par au moins soixante et une rédactions, son inclusion dans les conventions lui donnerait une valeur supplémentaire, l’ARCOM serait susceptible de la prendre davantage en compte lors de l’examen d’éventuelles sanctions pour les chaînes.

Recommandation n° 22 : pour l’ARCOM, inclure la charte de l’association des journalistes sportives dans les conventions des chaînes de la TNT et évaluer les chaînes à l’aune du respect de cette charte.

Vos rapporteurs sont également favorables à toutes les mesures permettant de renforcer la mixité dans les rédactions sportives de radio et de télévision afin, d’à terme, atteindre la parité. D’un point de vue incitatif, elle pourrait par exemple se concrétiser à travers la mise en place de binômes de journalistes sportifs. Sur le volet correctif, vos rapporteurs plaident pour un pouvoir de sanction financière de l’ARCOM lorsqu’elle constate des plateaux non mixtes, au moins pour les programmes de sport qui n’ont pas montré leur volonté de tendre vers la parité.

Recommandation n° 23 : dans les médias, privilégier la mixité des rédactions avec des mesures incitatives. Lorsqu’elle constate des plateaux non mixtes dans les programmes sportifs, l’ARCOM prend des sanctions financières contre les chaînes mises en cause.

 


II.   RÉFORMER LA GOUVERNANCE

La gouvernance des instances sportives constitue un autre pan dans lequel des avancées, portées par le législateur, sont à saluer. À présent, vos rapporteurs plaident pour leur approfondissement afin de consolider la place des femmes dans les instances de gouvernance du sport.

A.   Les lois de 2000, 2014 et 2022 ont clarifié et amélioré la place des femmes dans les instances de gouvernance sportives

1.   Depuis les années 2000, le cadre légal favorise l’accès des femmes à des postes à responsabilité

a.   Les lois du 6 juillet 2000 et du 4 août 2014 posent les premiers jalons d’une gouvernance du sport paritaire

En inaugurant les premières Assises nationales, « Femmes et Sport » en 1999, Marie-George Buffet en tant ministre des sports déclarait : « cette action est motivée par le constat du grand décalage entre, d'un côté, le nombre de pratiquantes, les performances des femmes, leur désir de faire du sport et, la persistance de discriminations » ([93]). Un constat similaire pourrait être dressé aujourd’hui malgré les politiques volontaristes menées depuis près de vingt-cinq ans.

En effet, la tenue de ces assises a abouti à la loi du 6 juillet 2000 relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives dite « loi Buffet » dont l’article 5 prévoit que l’agrément accordé aux fédérations doit, entre autres, tenir compte de l’égal accès des femmes et des hommes aux instances dirigeantes. Ce faisant, la loi de 2000 pose les premiers jalons de la représentation des femmes dans les instances de gouvernance.

Par la suite, le décret n° 2004-22 du 7 janvier 2004 instaure un principe de proportionnalité (et non de parité) pour la représentation des femmes dans les instances dirigeantes, perçu comme un problème pour les fédérations très féminisées. Ainsi, à la demande de la fédération de gymnastique qui entendait instaurer la parité dans les instances dirigeantes ce décret a finalement été abrogé.

Le vide laissé a été comblé par la loi du 4 août 2014 relative à l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. À une époque où seules douze fédérations sportives se rapprochent de la parité dans leurs instances de direction, Najat Vallaud-Belkacem alors ministre des Droits des femmes, décrit « un bras de fer » avec le monde sportif à propos de la nouvelle obligation prévue par la loi.

Sous peine d’un retrait de leur agrément, celle-ci impose aux fédérations sportives d’assurer une représentation minimale de 40 % de femmes et des hommes dès lors que l’un des sexes compte plus de 25 % des licences ou si l’un des deux sexes compte moins de 25 % des licences, de lui assurer une représentation minimale de 25 %.

Selon Annabelle Caprais, sociologue du sport et spécialiste de la gouvernance des fédérations sportives, le nombre de femmes dirigeantes a de ce fait augmenté d’environ 8 % à chaque élection ce qui lui permet d’atteindre aujourd’hui environ 40 % ([94]). Ainsi, à la suite des dernières élections fédérales, les bureaux directeurs comptent 32,3 % de femmes à des postes de trésorières, 44,1 % à des postes des secrétaires générales et 42,3 % à des postes de vice-présidentes ([95]).

De plus, la loi de 2014 ([96]) impose aux fédérations de se doter de plans globaux de féminisation concernant les joueuses, les arbitres, les entraîneuses et les dirigeantes.

b.   La loi du 2 mars 2022 s’inscrit dans le chemin tracé par les lois de 2000 et 2014

En complément de la loi de 2014, la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France pose une nouvelle obligation de parité stricte mais progressive dans les instances dirigeantes du sport. En 2024, au niveau national, le comité national olympique sportif française (CNOSF), le Comité paralympique sportif français (CPSF) ainsi que les fédérations nationales doivent atteindre la parité dans les instances dirigeantes. Les fédérations régionales ont quant à elle jusqu’en 2028 pour se conformer à cette exigence.

Dans un souci de renouvellement des postes d’encadrement, la loi limite à trois le nombre de mandats possibles pour les dirigeants de fédérations sportives de ligues professionnelles.

Ce cadre légal est complété par les initiatives de ces instances, à l’image du club des 300 ([97]) crée par le CNOSF dans l’objectif de former les femmes à occuper des postes d’encadrement.

2.   Malgré ces initiatives courageuses de réforme, un bilan en demi-teinte dans un milieu réfractaire au changement

S’ils saluent la volonté politique qui a impulsé ces évolutions positives, vos rapporteurs dressent un bilan en demi-teinte de la mise en œuvre de ces premières avancées législatives.

S’il y a effectivement une progression du nombre de femmes à la tête de fédérations sportives, elle se fait lentement. En 2022, Béatrice Barbusse, vice-présidente de la fédération de handball et sociologue du sport, dénombrait dix-neuf femmes présidentes de fédération sportives contre quatre-vingt-huit hommes ce qui l’amenait à estimer que « à ce rythme, il faudra attendre encore 5 à 10 olympiades pour espérer approcher d’une représentation paritaire » ([98]).


Le graphique ci-dessous présente l’évolution de la proportion de femmes présidentes de fédérations sportives en France. Si entre 2001 et 2004, elle était d’environ 5,20 %, elle n’atteignait que 17,75 % vingt ans plus tard, en 2021.

Source : Béatrice Barbusse, Du sexisme dans le sport, Anamosa, 2022

Ces résultats mitigés s’expliquent par une multitude de facteurs différents principalement liés au comportement des dirigeants du monde sportif. À chaque nouvelle avancée législative, ils déploient des « stratégies de contournement » ([99]) limitant, de fait, la portée des avancées.

a.   Une organisation structurelle reposant sur des biais de genre plus favorable aux hommes

En premier lieu, avant d’arriver au niveau national, les femmes dirigeantes ont souvent exercé des fonctions au niveau régional. Or, avant la loi de 2022, ce niveau n’était pas concerné par les exigences de parité. De ce fait, les organisations déconcentrées telles que les ligues régionales ou les comités départementaux demeurent dominés par des hommes.

Dans ces milieux, la cooptation est activement pratiquée et les femmes qui arrivent à se hisser aux postes de direction sont souvent appuyées par un mentor occupant des responsabilités importantes au niveau local et national. En d’autres termes, « la loi sur les quotas (…) n’a pas changé les modalités de recrutement qui restent très largement dominées par des pratiques informelles et un entre-soi masculin » ([100]).

Béatrice Barbusse souligne, de plus, le rôle de mécanismes socio-culturels qu’elle ampute à du sexisme ordinaire ([101]) dans l’organisation de la direction, prenant la forme de « réunions en soirée » ou « d’humour graveleux ». Les femmes sont bien souvent « invisibles » dans ce monde masculin et en général, elles n’osent critiquer ces agissements que lorsqu’elles assez nombreuses dans les instances dirigeantes, c’est-à-dire au moins un tiers, selon Béatrice Barbusse.

De plus, une division genrée du travail persiste dans les fédérations, y compris au plus niveau de direction. Elle se traduit par des femmes dirigeantes occupant plus souvent à des postes de secrétaire tandis que les hommes accaparent les postes de trésorier ou de président comportant un niveau de responsabilité supérieure. Selon Egal Sport, les femmes accèdent plus facilement au poste de secrétaire générale, elles sont actuellement treize femmes contre dix-neuf hommes ([102]). A contrario, seules trois femmes occupent des postes de présidente (dont une de manière temporaire) dans des fédérations olympiques, c’est-à-dire les fonctions les plus prestigieuses.


Source : Egal Sport, « L’œil d’Egal Sport : 2024 – le défi de la parité pour les fédérations sportives », 2024.

Le graphique ci-dessus présente la répartition des femmes et des hommes aux postes de directions des fédérations sportives telle qu’estimée par l’association Egal Sport.

De la même manière, si les femmes occupent aujourd’hui des postes de vice-présidentes, elles sont souvent en charge de dossiers considérés comme secondaires, par exemple la mixité ou les ressources humaines, alors que les hommes ont en charge les portefeuilles stratégiques comme la performance ou les compétitions, par exemple.

Par ailleurs, lorsqu’elles arrivent à occuper effectivement des postes de présidente, il s’agit souvent de fédérations multisports, particulièrement féminisées, moins médiatisées et moins financées. Les enjeux y sont considérés comme moins intéressants que dans les fédérations olympiques.

b.   Des stratégies de contournement de la règle pour maintenir un statu quo

i.   Des stratégies de contournement diverses et efficaces pour écarter les femmes

Parallèlement, les directions des fédérations déploient différentes stratégies de contournement des règles pour maintenir un statu quo favorable aux hommes. Profitant de l’absence de définition légale du terme « instances dirigeantes », les fédérations jouent sur ce flou pour limiter la présence des femmes.

Une partie d’entre elles crée ainsi des instances informelles ex nihilo et donc non encadrées par la loi où les décisions sont véritablement prises. De ce fait, l’obligation de quota ne s’y applique pas et les femmes y sont peu représentées. Dans sa thèse, Annabelle Caprais explique que la fédération de basket-ball disposait par exemple d’un « comité de concertation », une instance non statutaire, permettant aux plus hauts dirigeants de s’entendre en amont sur les sujets clés. Toutefois, au sein même de ce comité de concertation existait un deuxième organe encore plus restreint où aucune femme n’était représentée. En sens inverse, d’autres fédérations élargissent les instances de direction pour accueillir davantage de femmes, comme le prévoit la loi, pour éviter d’écarter les hommes déjà présents.

ii.   Une préférence pour le statu quo à peine voilée

Comme l’a rappelé M. Pierre-Alain Raphan, co-rapporteur de la loi de 2022, à la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, le CNOSF et certaines fédérations sportives ont mené un lobbying intense contre les dispositions en faveur de la parité. Il a souligné que certaines grandes fédérations, comme le football, le judo ou encore le tennis « ne voulaient absolument pas bouger sur les sujets relatifs à la gouvernance » ([103]).

Plus grave encore, lorsqu’il travaillait sur une proposition de loi visant à imposer la parité aux instances d’organisation des Jeux olympiques, il relate les faits suivants : le « CNOSF nous a alors transféré une réponse du Comité international olympique (CIO) qui était assez étonnante. Ces derniers nous expliquaient que le fait d’imposer la parité relevait d’une ingérence législative, ce qui mettait en risque le maintien de l’organisation des JOP en France » ([104]).

En somme, malgré les nouvelles exigences législatives, le statu quo demeure. Selon Annabelle Caprais, l’argument quantitatif des quotas peut même se retourner contre les femmes. Il peut être invoqué par les fédérations comme une raison de ne pas mettre en œuvre des efforts supplémentaires de formation et des changements structurels pourtant nécessaires.

B.   Ces avancées doivent être prolongées pour garantir aux femmes une place dans le monde du sport

Partant de ces constats, vos rapporteurs plaident pour un approfondissement des dispositions législatives existantes (1) et un accroissement du vivier de femmes candidates, souvent désigné comme une limite majeure à la participation des femmes à la gouvernance du sport (2).

1.   « Imposer l’égalité par le sommet » en renforçant les dispositions législatives existantes

Vos rapporteurs défendent une réforme de la gouvernance du monde sportif qui s’appuierait sur les dispositions existantes, comme le font également d’autres organes institutionnels ayant travaillé sur la gouvernance du sport dans la période récente.

En décembre 2023, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale ainsi que le Comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport, présidé par Marie-George Buffet et Stéphane Diagana, dressaient en effet un constat similaire. Ces derniers défendaient une réforme d’ampleur à travers une loi-cadre sur le sport et la mise en place d’une autorité indépendante, sur le modèle de l’agence de lutte contre le dopage, pour veiller à l’éthique dans le sport. De plus, la commission parité du Haut conseil à l’égalité qui devrait rendre son rapport dans les prochains mois, effectue des observations semblables.

Cette convergence des diagnostics extérieurs ne peut avoir qu’un sens : les dysfonctionnements dans la gouvernance du sport sont trop nombreux et trop évidents. Ils sont, à présent, bien documentés. Il est donc temps d’agir.

a.   Préciser à qui s’applique l’exigence de parité réelle et contrôler son respect

i.   Préciser l’exigence de parité réelle

Pour ce faire vos rapporteurs proposent, en premier lieu, de préciser, à l’article L. 131-8 du code du sport, quelles « instances dirigeantes » sont soumises à la règle de parité imposée par la loi de 2022. Cette mesure permettrait de mettre fin au flou juridique qui profite aux fédérations pro statu quo et leur permet de développer des stratégies de contournement.

Le Comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport, pour sa part, défend l’inscription dans la loi d’un principe de parité réelle dans tous les organes dirigeants du mouvement sportif français, c’est-à-dire le CNOSF, le CPSF, fédérations, ligues professionnelles, organes déconcentrés et leurs commissions régaliennes ([105]).

Recommandation n° 24 : préciser dans la loi la définition du terme « d’instances dirigeantes » soumises à la parité pour mettre fin aux stratégies de contournement.

Par ailleurs, alors que les JOP de Paris se présentent comme les premiers jeux paritaires de l’Histoire, vos rapporteurs suggèrent d’aller plus loin pour les JOP de 2030, dans l’éventualité où la candidature des Alpes françaises serait retenue. Outre la parité chez les sportifs participants, vos rapporteurs plaident pour l’instauration d’une exigence de parité dans la gouvernance du comité organisateur.

 Recommandation n° 25 : si les Alpes françaises remportent l’organisation des Jeux d’hiver de 2030, instaurer la parité dans le comité d’organisation et pour les athlètes participants.

ii.   Contrôler le respect de la parité réelle

Le CNOSF en tant qu’instance principale du monde sportif et interlocuteur premier des pouvoirs publics devrait être responsable du bon respect de l’exigence de parité dans les fédérations sportives. Une attention particulière devrait être portée aux postes de président. Avant une évaluation du Parlement, celle-ci devrait suivre activement la féminisation des fédérations.

Recommandation n° 26 : pour le CNOSF, veiller au respect de la parité réelle dans les instances dirigeantes des fédérations sportives.

Si, selon le baromètre de l’application des lois de l’Assemblée nationale, 100 % des décrets d’application de la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France ont été publiés, cette loi devrait faire l’objet d’un contrôle sur son application par le Parlement en 2025, soit trois ans après sa promulgation.

Cette évaluation confirmerait si, comme le prévoit la loi, les fédérations sportives atteignent bien la parité dans leurs instances dirigeantes, au niveau national. Elle permettrait également de vérifier qu’au niveau local, où la parité doit être atteinte en 2028, les fédérations avancent effectivement vers cet objectif.

Pour les fédérations réfractaires et/ou particulièrement en retard sur le respect de ces exigences, vos rapporteurs préconisent le recours au name and shame, utilisé avec succès dans d’autres domaines, pour inciter les fédérations à respecter les objectifs fixés par la loi.

Recommandation n° 27 : pour le Parlement, effectuer en 2025, un contrôle de l’application de la loi du 2 mars 2022 afin de vérifier si l’exigence de parité dans les instances dirigeantes du sport est effectivement respectée.

b.   Limiter le cumul des mandats

De plus, afin de limiter l’entre-soi qui caractérise les instances dirigeantes du monde sportif, il semble indispensable de limiter le cumul simultané des mandats locaux avec des mandats nationaux et des mandats de dirigeants de club.

Comme l’a souligné Greg Décamps à vos rapporteurs, de nombreux présidents de fédération travaillent, soit en parallèle de leurs fonctions soit quelques années plus tard, au CNOSF, à l’inspection générale du sport ou au sein d’autres instances sportives. En instaurant une limite au cumul des mandats, les phénomènes de cooptation qui ont cours notamment au niveau régional seront drastiquement réduits. Le HCE et le Comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport évoquent une limite fixée à trois mandats ([106]).

Dans le même temps, une limite au cumul des mandats dans le temps, de l’ordre de trois mandats consécutifs, devrait engendrer un nécessaire renouvellement des instances dirigeantes. Il y a de fortes chances pour qu’il profite davantage aux femmes, comme ce fût le cas pour la politique.

Recommandation n° 28 : limiter le cumul des mandats des instances dirigeantes du sport à trois mandats consécutifs.

c.   Repenser les règles électorales

Pour aller plus loin, vos rapporteurs plaident en faveur d’une réforme des règles électorales fondée sur deux principes : un élargissement du collège des grands électeurs et un plafonnement des dépenses de campagne.

Le système actuel d’élection des présidents dans les fédérations est basé sur un système de grands électeurs. Ces derniers siègent souvent aux comités régionaux et départementaux en tant que représentants des licenciés. Certains d’entre eux sont également présidents de clubs. Pour chacun des grands électeurs, le vote est pondéré en fonction du nombre de licenciés sur son territoire. Il arrive donc que les représentants de certaines régions pèsent davantage que d’autres.

Les candidats, quant à eux, sont choisis en fonction de leur capacité à apporter des voix. C’est là que le système de cooptation se met en place, les candidats sont souvent identifiés dans l’écosystème et sollicités pour se présenter à l’élection. Selon Annabelle Caprais ([107]), dans ce contexte, l’élection se joue avant même le début de la campagne.

Pour réduire les risques de cooptation et de copinage souvent défavorables aux femmes, vos rapporteurs proposent d’élargir le collège des grands électeurs afin de sortir de cet entre-soi. Les clubs pourraient par exemple prendre part à cette élection.

Recommandation n° 29 : redéfinir les règles électorales en élargissant le corps électoral aux clubs afin de favoriser le renouvellement des dirigeants à l’échelle territoriale et nationale.

En outre, dans certaines fédérations olympiques, ces élections donnent lieu à l’engagement de sommes monétaires importantes, la campagne du président de la fédération de rugby aurait ainsi coûté près de 100 000 euros par exemple ([108]). Dans d’autres fédérations, ces campagnes s’accompagnent du recrutement de cabinets de conseil pour mener la campagne. Dans les deux cas, ce type de comportements dénature les campagnes fédérales.

Surtout, ce dévoiement des règles pénalise particulièrement les femmes à deux titres : les hommes étant plus nombreux à être grands électeurs, le basket par exemple ne compte que 20 % de femmes grandes électrices ([109]), les femmes sont souvent exclues de ces systèmes de cooptation et de copinage. D’autre part, la plupart des femmes candidates sont souvent des anciennes sportives qui ne disposent des moyens financiers ([110]) pour assumer le coût exorbitant des campagnes dans certaines fédérations.

Pour mieux appréhender le coût des campagnes électorales selon les fédérations, vos rapporteurs demandent un rapport du Gouvernement recensant le coût des campagnes électorales dans les fédérations sportives afin de mieux évaluer le niveau de plafonnement nécessaire.

Recommandation n° 30 : pour le Gouvernement, recenser le coût des campagnes électorales dans les fédérations afin, qu’à terme, en plafonner le coût.

Comme le Comité national consultatif pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport et la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, vos rapporteurs sont favorables à un dispositif de contrôle externe du mouvement sportif qui veillerait au respect de l’éthique dans le monde sportif.  Indépendamment de la structure responsable, comme le suggère la commission d’enquête, le dispositif de contrôle devrait :

-         élaborer des règles minimales devant figurer dans les chartes éthiques et déontologiques des fédérations, du CNOSF et du CPSF en matière de prévention de la corruption et des conflits d’intérêts ainsi que sur la transparence financière ;

-         sanctionner les fédérations récalcitrantes à mettre en œuvre ces normes ;

-         réguler les procédures disciplinaires internes des fédérations et de leurs ligues professionnelles, du CNOSF et du CPSF sur le modèle des pouvoirs de l’Autorité française de lutte contre le dopage.

Recommandation n° 31 : mettre en place un dispositif de contrôle du mouvement sportif permettant de faire respecter l’éthique dans le sport à travers des règles minimales et un pouvoir de sanction.

2.   Accroître le vivier des femmes candidates à des postes techniques ou officiels

En complément, il semble judicieux de s’attaquer à l’autre versant du problème, c’est-à-dire au faible vivier de candidates, souvent invoqué comme argument d’autorité ([111]). Vos rapporteurs présentent donc une série de recommandations pratiques visant à accroître le nombre de femmes candidates à des postes officiels ou techniques.

a.   Dépasser l’auto censure grâce à des formations et des facilités pour mieux concilier sport et vie familiale

Or, comme dans d’autres domaines, dans le sport, les femmes tendent parfois à s’autocensurer et craignent le risque de l’échec. Comme le résume Béatrice Barbusse, « si les femmes n’osent pas c’est qu’elles ne pensent pas forcément que cela est possible, tant, durant toute leur enfance et adolescence, elles ont intériorisé que ces fonctions ne sont pas pour elles. Par ailleurs, pour oser, encore faut-il que l’environnement en laisse la possibilité. Or, en la matière, il s’agit de fonctions dont l’exercice se fait dans l’espace public, espace souvent réservé aux hommes. Enfin, qui a envie « d’oser » sachant qu’il ou elle va devoir rester pendant plusieurs années dans un environnement hostile et inconfortable psychologiquement ? » ([112]).

i.   Des formations dès le plus jeune âge et jusqu’à l’âge adulte

Vos rapporteurs proposent de lutter contre cette autocensure à la racine en incitant les adolescentes, à travers l’UNSS, à occuper des postes à responsabilité. Le programme des jeunes officiels de l’UNSS permettant aux adolescents de suivre des formations pour être dirigeants, organisateur, arbitre, juges ou encore reporters, pourrait servir d’inspiration.

Il pourrait être complété par des passerelles entre l’UNSS et les fédérations pour permettre aux jeunes de poursuivre leur engagement au-delà du secondaire. De manière plus ambitieuse, il pourrait être envisagé de réserver certaines places, environ 5 % par exemple, dans les instances de gouvernance des fédérations à des jeunes licenciés.

Recommandation n° 32 : au moyen du programme des jeunes officiels de l’UNSS, inciter les jeunes filles à exercer des postes à responsabilité dans le monde sportif.

Par la suite, à l’âge adulte, les fédérations et/ ou le CNOSF devraient être en mesure de prendre le relais et proposer des formations aux femmes, sur le modèle du club des 300 du CNOSF.

Le club des 300 du CNOSF

Le Club des 300 est un programme d’accompagnement des femmes pour faciliter leur ascension à des fonctions dirigeantes dans le monde sportif, créé à la suite d’une enquête réalisée par le CNOSF en 2021. Celle-ci faisait le constat que pour atteindre la parité dans les instances sportives, rendue obligatoire par la loi du 2 mars 2022, 300 postes devaient être occupés par des femmes dans le monde sportif français.

Or, en 2021, seules 38 % de femmes siégeaient dans les conseils d’administrations des fédérations sportives françaises. En d’autres termes, pour y atteindre la parité, il manquait alors 252 femmes ([113]) .

Le club des 300 a donc été pensé comme une solution à cette problématique à l’horizon 2024. Il se traduit concrètement par un programme d’accompagnement sur deux ans, à travers des sessions de formation et de cas pratiques. Les enseignements dispensés portent sur le management et la connaissance du secteur sportif.

Vos rapporteurs souhaitent que ce dispositif puisse être élargi au-delà de 300 bénéficiaires. Ils suggèrent également que le rythme horaire, d’environ cinquante heures par an, soit doublé afin de maximiser l’utilité de la formation.

Recommandation n° 33 : sur le modèle du club des 300 du CNOSF, accroître l’offre de formation tout en la renforçant à travers le doublement horaire des enseignements dispensés.

ii.   Le « chantier du bénévolat » : faciliter la conciliation entre vie associative et vie familiale

De plus, à l’âge adulte où la contrainte de temps joue à plein pour les femmes et les contraint souvent à réduire voire à arrêter le sport et à mettre fin à leur engagement dans le monde sportif, il semble important de les aider à mieux concilier la vie familiale avec le sport.

Or, le monde sportif exige un investissement fort de la part des bénévoles. Les réunions des comités nationaux par exemple ont souvent lieu à Paris parfois même en semaine. Il arrive même que dans certaines fédérations, les frais de déplacement et de logement ne puissent pas pleinement être pris en charge par les fédérations ajoutant un obstacle financier à la contrainte de temps.

Pour lever cet obstacle financier et inciter les femmes à se porter candidates, vos rapporteurs sollicitent du Gouvernement un rapport sur la place des bénévoles et en particulier des femmes, dans le monde sportif (nombre total, proportion de femmes bénévoles dirigeantes au niveau local, temps consacré, niveau de rémunération). À partir de ces données, une réflexion devra être engagée sur la possibilité de rémunérer les personnes exerçant des responsabilités dans les instances sportives locales, sur le modèle des maires adjoints.

Recommandation n° 34 : en s’appuyant sur un rapport du Gouvernement concernant les bénévoles du sport, lancer une réflexion sur la rémunération des personnes exerçant des responsabilités dans les instances sportives locales pour lever l’obstacle financier.

Pour faciliter la conciliation entre vie privée et vie familiale, vos rapporteurs plaident pour davantage de souplesse dans l’organisation interne des fédérations afin que les bénévoles puissent occuper des postes d’encadrement. Suivant les préconisations de Marie-George Buffet, vos rapporteurs sont favorables à la mise en place d’une décharge horaire pour les personnes occupant des postes de direction au niveau local dans des instances sportives.

Recommandation n° 35 : instaurer une décharge horaire pour les personnes occupant des postes de direction dans les instances sportives locales afin d’inciter les femmes à se porter candidates.

b.   Un plus grand contrôle de la progression de la féminisation

En outre, vos rapporteurs proposent, à travers les contrats de développement des fédérations sportives, d’imposer la création de cellules de féminisation et de mixité dans toutes les fédérations sportives tant au niveau national que local. Ces cellules pourraient également prendre en charge la lutte contre les VSS. Elles serviraient de vigie sur l’évolution de la place des femmes dans le monde sportif.

Recommandation n° 36 : dans les contrats de développement des fédérations sportives, imposer la création de cellules de féminisation et de mixité au niveau national et local.

Une politique plus ambitieuse se traduirait également par un plus grand contrôle des plans de féminisation des fédérations et des clubs par le ministère des sports. S’ils sont obligatoires pour les fédérations depuis 2019 dans le cadre du projet sportif fédéral, aucune véritable évaluation ne permet de contrôler leur déploiement.

En premier lieu, vos rapporteurs suggèrent d’y inclure des programmes dédiés à la féminisation du corps arbitral où les femmes ne représentent, à ce stade, que 20,3 % des arbitres.

De la même manière, les plans de féminisation des fédérations pourraient inclure le déploiement de programmes de recherche sur la physiologie des sportives de haut niveau, un domaine encore trop méconnu. Ils pourraient pour prendre pour exemple le programme Empow’her développé par l’INSEP en partenariat avec des fédérations sportives.

De plus, comme l’a suggéré le syndicat des activités physiques et sportives (SNAPS) à vos rapporteurs, il serait pertinent de développer des indicateurs, par exemple sur l’évolution du nombre de licenciées, la place des femmes dans l’encadrement sportif, la proportion de sections mixtes et féminines, évaluant les plans de féminisation tant au niveau national que local.

Recommandation n° 37 : pour le ministère des sports, contrôler davantage la mise en œuvre des plans de féminisation des fédérations et des clubs à travers des indicateurs objectifs.

c.   Une politique de quotas dans l’encadrement technique

Ces différentes mesures devraient être complétées par une plus grande place réservée aux femmes dans l’encadrement technique. En effet, ce sont souvent les anciennes sportives ou encadrantes qui par la suite accèdent à des postes de dirigeantes. Le vivier de femmes candidates à des postes de direction se nourrit donc du vivier de femmes présentes dans la fédération comme joueuses ou dans l’encadrement technique.

Selon vos rapporteurs, l’encadrement technique doit tendre vers la parité indépendamment du nombre de femmes licenciées dans le sport. Pour faciliter cette transition, un système de jalons pourrait être déployé à court et moyen terme, selon les paliers suivants :

-         au-dessus de 40 % de femmes licenciées dans la fédération, l’encadrement technique doit être paritaire ;

-         lorsque la proportion de femmes représente entre 20 % et 40 % des membres, des postes techniques (entraîneurs, éducateurs, arbitres) doivent être réservés aux femmes ;

-         lorsque la proportion de femmes est inférieure à 20 %, des binômes mixtes pourraient être mis en place.

Cette mesure permettrait d’atteindre deux objectifs majeurs : en premier lieu, les femmes pourraient accéder à des corps techniques, médicaux et paramédicaux trop souvent monopolisés par les hommes De plus, ces postes réservés offriraient un nouveau débouché professionnel aux sportives de haut niveau en fin de carrière pour lesquelles la reconversion professionnelle demeure un enjeu majeur. La mise en œuvre de cette politique pourrait s’accompagner de mesures incitatives ([114]).

Recommandation n° 38 : à travers un système de quotas, tendre vers la parité dans l’encadrement technique sportif à long terme. À court et moyen terme, fixer une part de femmes dans l’encadrement (technique, médical et paramédical) proportionnel au nombre de femmes dans les fédérations.

Concernant la fin de carrière, il semble indispensable que les fédérations et les clubs facilitent les reconversions professionnelles des sportives ([115]). Il serait par exemple intéressant que les formations pour rejoindre le corps technique soient soumises à un quota de femmes candidates d’au moins 10 %, ce qui permettrait simultanément d’offrir une voie de reconversion aux sportives et de féminiser un corps de métier encore fermé aux femmes.

 


III.   REPENSER LE FINANCEMENT DU SPORT FEMININ

L’économie du sport est en expansion, elle devrait atteindre cette année environ 4 600 milliards d’euros au niveau mondial avec une progression d’environ 8 % par an ([116]). Avec 1,16 milliard d’euros de chiffre d’affaires cette année ([117]), le sport féminin n’en représente qu’une infime part. Toutefois, le rendement du sport féminin progresse rapidement, avec une augmentation de 300 % en 3 ans.

Dans ce contexte, le sport féminin est à la recherche d’un modèle économique pérenne pour s’enraciner dans l’économie du sport. Pour l’instant, l’essentiel du chiffre d’affaires du sport féminin (55 % au niveau mondial ([118])) provient du volet commercial, c’est-à-dire du sponsoring, des partenariats, de la vente de marchandises.

L’objectif pour le secteur est donc d’accroître la part du chiffre d’affaires provenant de la médiatisation et des retransmissions (seulement 27 % à ce stade ([119]) soit 340 millions de dollars) et progressivement augmenter les revenus issus des matchday ou jours de matchs, c’est-à-dire la billetterie pour les matchs qui atteint seulement 12 % aujourd’hui, c’est-à-dire 240 millions de dollars ([120]).

Il semble donc opportun d’orienter les financements accordés au monde sportif afin qu’ils bénéficient au sport féminin.

A.   Une nécessaire contribution des financements privés au développement du sport féminin

1.   Au niveau des fédérations et des clubs, un soutien conditionné à la promotion du sport féminin

Au niveau des fédérations, un premier outil indirect serait de mieux contrôler l’attribution de labels de qualité et des badges mixité aux clubs. Ces labels donnent en effet davantage de visibilité aux clubs et les rendent plus attractifs.

Or, comme en témoigne Stéphanie Daval, secrétaire générale de la fédération française des sports de glace (FFSG), il arrive régulièrement que les clubs multiplient les efforts pour obtenir le label mais une fois la commission d’évaluation passée, ils ne respectent pas leurs engagements. De la même manière, certains clubs dévoient le sens de la labellisation en créant une section féminine pour les petites filles sans prévoir de continuité du parcours pour les adolescentes.

C’est pourquoi, l’accès aux labels qualité devrait être soumis à un cahier des charges mesurant des éléments objectifs tels que la présence de vestiaires pour la section féminine, la mise à disposition de matériel adéquat (vêtements adaptés à la taille des joueuses) ou encore une supervision assurée par des encadrants diplômés formés aux stéréotypes de genre et à la culture de l’égalité.

Le respect de ce cahier des charges serait soumis à une évaluation annuelle assurée par la fédération en lien avec sa cellule de féminisation évoquée plus haut et le non-respect avéré du cahier des charges aboutirait à une perte systématique du label.

Recommandation n° 39 : pour les fédérations, associer l’attribution de labels qualité et de badges mixité au respect d’un cahier des charges précis soumis à une évaluation annuelle.

De manière plus directe, les financements par des clubs pourraient être modulés en fonction des investissements effectués dans le sport féminin. L’index égalité professionnelle entre les femmes et les hommes pourrait, dans ce cadre, servir d’outil de mesure. Ainsi, tous les clubs n’atteignant pas un certain score verraient leurs subventions réduites.

Une modulation de ce type contraindrait, de fait, les clubs à améliorer leur score de l’index égalité. Les externalités seraient particulièrement positives sur les niveaux de rémunérations des femmes en particulier des joueuses.

Dans son récent rapport d’évaluation sur l’efficacité de l’index égalité ([121]), le HCE préconise d’ajouter des indicateurs supplémentaires, l’un d’entre eux pourrait être relatif aux temps partiels et aux bas salaires. Vos rapporteurs sont favorables à son introduction puisque dans le monde sportif, les sportives de haut niveau se voient souvent proposer des temps partiels qui les placent, de fait, en situation de précarité financière.

Recommandation n° 40 : pour les clubs, conditionner les financements reçus à un score élevé de l’index égalité professionnelle.

2.   Pour les sponsors, des incitations à soutenir le sport féminin

Avançant des arguments de rentabilité, les sponsors ont longtemps délaissé le sport féminin. Progressivement, grâce à de grandes championnes comme Serena Williams, les sponsors ont commencé à soutenir les athlètes féminines les plus populaires, en particulier aux États-Unis.

Comme l’explique le cabinet Deloitte, pour une grande marque, soutenir le sport féminin, signifie associer son image à des thèmes tels que l’empowerment ou encore l’égalité de genre, bien perçus par le public. Selon le Women’s Sport Trust anglais, 29 % des consommateurs ont une image particulièrement positive des entreprises ou des marques soutenant le sport féminin à travers le sponsoring ([122]). Des résultats qui se vérifient en France où 8 français sur 10 déclarent avoir une bonne image des marques soutenant le sport féminin, un constat particulier vrai pour les jeunes âgés de 25 à 34 ans ([123]). Dans une logique de congruence, vos rapporteurs sont attachés à ce que les entreprises sponsorisant leur sport féminin mettent en œuvre des mesures promouvant effectivement l’égalité.

Conscients que les sponsors constituent un maillon indispensable pour le développement du sponsor féminin, vos rapporteurs demandent au Gouvernement un rapport étudiant la création de leviers incitatifs pour les entreprises finançant du sport féminin. Pour une courte période et sous de conditions strictes, celles-ci pourraient par exemple bénéficier de crédits d’impôt.

Dans le même ordre d’idées, le recours aux SASP pourrait par exemple être facilité. Créées en 1999, les SASP rapprochent les statuts des sociétés sportives de ceux des sociétés de droit commun. Concrètement, elles facilitent l’investissement financier d’entités extérieures qui peuvent progressivement acquérir une part plus importante du capital du SAPS. En ce sens, à l’heure de structurer le sport féminin de haut niveau à travers des compétitions telles que la ligue féminine de football, les SAPS peuvent constituer un outil de développement pour les clubs.

Recommandation n° 41 : au moyen d’un rapport du Gouvernement, étudier l’opportunité de recourir à des leviers incitatifs crédits d’impôt, SASP pour attirer les sponsors vers le sport féminin.

B.   Une plus grande vigilance lors de l’attribution des financements publics

Vos rapporteurs considèrent qu’une plus grande vigilance dans l’attribution des financements publics accordée au sport permettrait de développer le sport féminin. Cette mesure se traduirait, dans tout le secteur public par une conditionnalité des subventions reposant sur le respect de l’égalité femmes hommes (1). À l’ANS, en particulier, il s’agirait d’accorder une plus grande attention au sport féminin en augmentant le budget qui y est consacré (2). Enfin, dans les collectivités territoriales, vos rapporteurs défendent l’instauration de budgets intégrant l’égalité (BIE), un outil promu de longue date par la Délégation ([124]) (3).

1.   Lier le versement de subventions à la mise en place de mesures concrètes en faveur du sport féminin

Sur le modèle de la recommandation proposée par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur la conditionnalité des aides publiques aux entreprises ([125]), vos rapporteurs plaident pour que toute aide publique versée soit précédée d’une vérification du bon respect des lois en faveur de la parité dans le monde sportif, en particulier la loi du 2 mars 2022.

Recommandation n° 42 : avant le versement de toute subvention publique, vérifier que l’entité bénéficiaire respecte effectivement les lois en matière de parité dans le monde sportif. 

Cette vérification pourrait se faire à travers un mécanisme d’égaconditionnalité, autrement dit, « il ne faut pas donner un euro d'argent public (…) sans contrepartie d'égalité hommes-femmes » ([126]).

De manière concrète, les fédérations et les clubs qui souhaiteraient bénéficier de subventions publiques qu’elles soient distribuées par l’État ou les collectivités territoriales devraient démontrer qu’elles agissent en faveur de l’égalité hommes-femmes en mettant en place des mesures concrètes, à savoir :

-         dans le sport amateur, le maintien des sections mixtes aussi longtemps que possible et la mise en place de sections féminines en particulier en zone rurale ;

-         dans le sport de haut niveau, les fédérations et les clubs devront mettre en œuvre des mesures facilitant la reconversion professionnelle des sportives ;

-         dans les fédérations, le respect des quotas sur les postes de direction et d’encadrement technique, voire médical et paramédical. 

L’égaconditionnalité pourrait être associée à un système de bonus-malus. Concrètement, les entités proactives en matière de sport féminin pourraient bénéficier d’un bonus tandis que celles peu mobilisées seraient sanctionnées par un malus, sous la forme d’une réduction des subventions attribuées.

Recommandation n° 43 : lier le versement de subventions publiques à la mise en place de mesures concrètes en faveur du sport féminin.

2.   À l’ANS, renforcer l’attention accordée au sport féminin

Parallèlement, tout comme l’a défendu la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les fédérations sportives ([127]), vos rapporteurs sont favorables à un contrôle renforcé de l’ANS sur les subventions attribuées.

Pour ce faire, il convient, tout d’abord, de renforcer son mandat sur le sport féminin. La direction des sports et l’ANS travaillant actuellement sur la nouvelle convention d’objectifs de l’ANS pour les quatre prochaines années, c’est-à-dire son mandat et son axe d’actions, le moment est donc opportun pour y inscrire le sport féminin comme axe de travail prioritaire.

Recommandation n° 44 : dans le cadre de la nouvelle convention d’objectifs entre la direction des sports et l’ANS, renforcer le mandat de l’ANS sur la promotion du sport féminin.

Si l’ANS souligne une augmentation du budget consacrée à la pratique féminine qui atteint aujourd’hui 14 millions d’euros, ce montant demeure largement insuffisant, il ne représente que 5 700 des 44 000 actions financées par l’ANS, soit un total de 13 % ([128]). Selon vos rapporteurs, le niveau d’ambition doit être revu à la hausse en augmentant considérablement la part du budget de l’ANS consacrée au sport féminin, celle-ci devrait au moins atteindre 20 % du budget de l’ANS à l’horizon 2030.

Recommandation n° 45 : consacrer 20 % du budget de l’ANS au sport féminin à l’horizon 2030.

Dans le même temps, pour atteindre la parité dans les financements à long terme, vos rapporteurs plaident pour que l’ANS ait recours à la BIE. Cet outil permettrait d’évaluer les mesures financées par l’ANS à l’aune de leur impact sur l’égalité et donc à terme atteindre un financement paritaire du sport féminin et du sport masculin.

Recommandation n° 46 : pour l’ANS, recourir à la BIE afin de mieux évaluer les dépenses et à terme atteindre un financement paritaire du sport féminin et du sport masculin.

Par la suite, les subventions distribuées par l’ANS devraient faire l’objet d’un suivi attentif de sa part. Pour l’instant, celle-ci favorise une politique incitative, conformément à son mandat, laissant plus de liberté et d’autonomie aux fédérations. Or, le sous financement du sport féminin persiste. Vos rapporteurs, ainsi que l’avait fait la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, préconisent donc un recours à des mesures contraignantes. Il serait demandé à l’ANS de poursuivre l’accompagnement en amont des fédérations et d’y ajouter un contrôle a posteriori des subventions versées.

 

Recommandation n° 47 : pour l’ANS, exercer un contrôle a posteriori sur les subventions attribuées aux fédérations.

 

 

 

3.   Dans les collectivités territoriales, introduire la budgétisation intégrant l’égalité pour favoriser le sport féminin

Pour faciliter la mise en place de ce suivi et dans la continuité de recommandations déjà effectuées par la Délégation, vos rapporteurs proposent d’avoir recours à la BIE.

Ce mécanisme innovant déjà utilisé en matière écologique avec le budget vert, consiste pour les entités à construire leur budget « en chaussant les lunettes » de l’égalité. Concrètement, pour chaque dépense, il convient de s’interroger sur son impact sur l’égalité femmes-hommes (neutre, favorable, défavorable). Cet outil permet de regarder les dépenses sous un angle nouveau et de favoriser les politiques renforçant l’égalité entre les femmes et les hommes.

Par ailleurs, sur une recommandation du rapport de Céline Calvez et Sandrine Josso sur la BIE, le ministre des comptes publics a confié à l’Inspection générale des affaires sociales et de la santé (IGAS), l’Inspection générale des finances (IGF) et au Service des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes (SDFE) une mission conjointe sur la méthode à mettre en œuvre pour déployer le budget intégrant l’égalité. Une fois les conclusions de ces travaux connus, vos rapporteurs appellent à une large diffusion auprès des collectivités territoriales.

Ce faisant, les collectivités pourraient s’emparer davantage de la BIE et identifier plus facilement les lignes budgétaires relatives au sport féminin. Elles pourraient alors prévoir et retracer un volume de financement dédié au sport féminin.

Recommandation n° 48 : dans les collectivités territoriales, au moyen de la BIE, accroître la part des financements accordés au sport féminin.

 


   ConClusion

À un mois des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, vos rapporteurs dressent un bilan mitigé de la place des femmes dans le monde sportif.

Si les femmes ont longtemps été tenues à l’écart du sport pour des raisons tant historiques que culturelles, l’écart de pratique sportive entre les femmes et les hommes persiste encore aujourd’hui. Dans le sport amateur, à chaque étape de leur vie, les femmes font face à des obstacles qui les maintiennent éloignées du sport. Dans le sport professionnel, malgré des améliorations, la situation n’est guère plus enviable : l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes est colossal et les conditions matérielles demeurent largement en-deçà de celles du sport masculin.

Face à ce constat, vos rapporteurs identifient des leviers d’action clés pour consolider la place des femmes dans le sport, à savoir l’éducation et la visibilité, la gouvernance et le financement. En s’appuyant sur l’éducation et les médias, vos rapporteurs espèrent améliorer la visibilité du sport et encourager davantage de femmes à adopter une pratique sportive. Parallèlement, si des avancées législatives ont permis d’ouvrir les instances de directions aux femmes, celles-ci sont encore trop souvent écartées dans un monde où règne l’entre-soi. C’est pourquoi, vos rapporteurs préconisent une réforme de grande ampleur de la gouvernance sportive afin d’y instaurer une parité réelle. Enfin, alors que l’économie du sport et en particulier du sport féminin est en plein boom, il semble opportun d’encourager les acteurs privés à investir dans ce secteur tout en contrôlant davantage les financements publics attribués au sport afin qu’ils participent au développement du sport féminin.

Par ailleurs, au sortir des JOP de Paris 2024, se posera la question de leur héritage pour le monde sportif et pour les domaines émergents tels que l’e-sport ou encore le sport promu à travers les réseaux sociaux par les créateurs de contenus. En ce sens, bien qu’elle n’ait pas fait la démonstration de son efficacité, la conférence permanente du sport féminin créée 2017 pourrait être relancée avec une ambition renouvelée. Outre la réunion annuelle, elle pourrait prendre la forme de missions d’évaluation sur la progression du sport féminin, tant sur le nombre de pratiquantes que sur sa visibilité.

 


 


   TRAVAUX DE LA Délégation

I.   Auditions de la délégation

Dans le cadre de cette mission d’information, le 14 mai 2024, la délégation a entendu, en réunion plénière, trois anciennes ministres des sports : Mmes Marie-George Buffet, Najat Vallaud-Belkacem et Roxana Maracineanu.

Mme la présidente Véronique Riotton. Mes chers collègues, nous avons l’honneur d’accueillir aujourd’hui des femmes qui ont marqué leur ministère par leurs initiatives. Nous sommes particulièrement fiers de les recevoir dans le cadre de cette mission et tenons à leur exprimer notre gratitude pour leur disponibilité. Nous souhaitons aujourd’hui échanger sur la thématique du développement du sport féminin, un sujet auquel nous accordons une grande attention, particulièrement en cette année olympique.

Cette mission d’information, consacrée à la pratique sportive des femmes, rendra ses conclusions d’ici au 4 juin prochain. Au cours de nos soixante-dix auditions, nous avons pris conscience des progrès réalisés, mais également du chemin restant à parcourir afin que les femmes prennent pleinement leur place dans le monde du sport. Nous envisageons de proposer des recommandations pratiques susceptibles d’être mises en œuvre rapidement. Les trois grands axes de travail identifiés sont l’éducation, la gouvernance et le financement.  L’objectif de cette audition est de vous entendre sur vos expériences, la place des femmes à votre arrivée à la tête du ministère des sports, les mesures que vous avez mises en place pour augmenter la pratique féminine et permettre aux femmes d’accéder à des postes de direction, mais également sur votre perception de ce qui doit encore être accompli.

Ma question porte sur l’éducation, un sujet qui me tient particulièrement à cœur. Nous avons constaté que l’écart de pratique sportive entre les filles et les garçons commence dès l’âge de cinq ans. Les garçons sont encouragés à pratiquer un sport, à bouger, à s’approprier l’espace, à organiser les équipes, contrairement aux filles. Cet écart ne cessant de s’accentuer avec le temps, il me semble essentiel d’encourager les filles à prendre goût au sport dès l’école primaire. Quels sont, selon vous, les meilleurs moyens d’y parvenir ? Le design actif, fréquemment évoqué dans les cours de récréation, peut-il être un levier ? Nous pensons qu’il devrait être complété par une sensibilisation accrue des enseignants du premier degré à cette problématique. Qu’en pensez-vous ?

Mme Marie-George Buffet, ancienne ministre de la jeunesse et des sports.  Je souhaite partager avec vous les mots de Béatrice Hess, la Française la plus titrée de l’histoire des Jeux olympiques en paranatation, qui disait : « dans une piscine, mon corps est libre. Je prenais le contrôle de mon corps. Il pouvait enfin s’exprimer. J’étais libre ». Ces propos illustrent parfaitement le combat des femmes pour un accès libre à toutes les pratiques sportives. En effet, rappelons-nous, à quelques semaines de l’ouverture des JOP de Paris, que ces jeux, dont nous vantons les valeurs, n’ont pas toujours été ouverts aux femmes. Aujourd’hui encore, en France et dans le monde, des filles et des femmes sont exclues des stades. Des progrès ont néanmoins été réalisés puisque nous aurons, aux JOP 2024, une quasi-parité entre les athlètes, alors qu’en 1968, seules 38 % de femmes figuraient dans les délégations. Ce combat pour l’égalité est toujours d’actualité à travers le monde, en raison du rôle assigné aux femmes dans les sociétés, à l’image de nos sœurs afghanes et iraniennes. À l’approche des JOP, de nombreuses associations et collectifs se mobilisent, dont une grande marche le 23 juin, pour obtenir du Comité exécutif olympique (CEO) une véritable mixité dans toutes les délégations ainsi que l’exclusion des délégations provenant de pays interdisant la pratique sportive féminine.

En France, seuls 39 % des licenciés sont aujourd’hui des femmes. Concernant les postes de présidence des clubs et des fédérations, seuls 16 % sont occupés par des femmes. En revanche, elles sont 26,9 % à être trésorières et 36,5 % secrétaires. Seules 18 fédérations agréées sur 119 sont présidées par une femme, et on dénombre seulement trois présidentes de fédérations olympiques. Je rappelle le bref passage de Brigitte Henriques en tant que présidente du CNOSF, première femme élue à ce poste.

Les travaux du Comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport ont mis en lumière l’absence de démocratie et de renouvellement dans les instances sportives, conduisant à la perpétuation de comportements non respectueux de l’intégrité des pratiquantes ou des dirigeantes. Le Comité a donc proposé de nouvelles règles électorales, avec l’installation d’un scrutin sur liste, la représentation de toutes les listes, y compris dans les bureaux exécutifs des fédérations, et la généralisation de la parité pour 2024 et 2028. Afin de permettre un accroissement du nombre de femmes dans les organes de direction, il a également suggéré des mesures d’aide et d’incitation au bénévolat, telles que l’indemnisation des bénévoles occupant des postes de direction ou les décharges horaires.

Nous avons besoin d’une refonte des formations des encadrants du mouvement sportif, des entraîneurs et des conseillers techniques sportifs, qui peinent aujourd’hui à comprendre les missions qu’ils doivent remplir au nom de l’État. Ces formations doivent prendre en compte la préservation de l’intégrité physique et psychique des pratiquants, mais également la spécificité de la pratique sportive des filles, qui quittent encore massivement les clubs au moment de leur puberté. Les questions des règles, des cycles et des changements du corps féminin doivent être prises en compte afin d’améliorer le bien-être des femmes. Le comité a également proposé de revoir les comités d’éthique en leur confiant davantage de pouvoir et en renforçant leur indépendance, et de créer un comité d’éthique suprafédéral au niveau du CNOSF, pour permettre le signalement de toute atteinte à l’intégrité physique ou psychique des sportives. Nous estimons également nécessaire de mettre en place une agence indépendante chargée des délits sexistes et des crimes sexuels. Si le monde du sport est une belle famille, il est encore trop refermé sur lui-même, freinant ainsi la libération de la parole des victimes au sein des fédérations.

Nous devons également donner de la visibilité aux femmes dans toutes les pratiques. C’était le sens des Assises nationales « Femmes et sport » en 1999, ainsi que de la loi du 6 juillet 2000 qui réaffirme la nécessité d’un accès égal des femmes à la pratique comme aux responsabilités. Aujourd’hui encore, le fait que le sport féminin soit seize fois moins retransmis dans les médias que le sport masculin joue sur les représentations du sport chez les filles et leurs parents. Il serait souhaitable de revenir sur le décret relatif aux conditions de retransmission des événements sportifs pour l’élargir et permettre une meilleure visibilité du sport féminin. À titre d’exemple, la retransmission télévisuelle du Tournoi des six nations de rugby féminin a eu d’importantes conséquences sur l’adhésion des filles aux clubs. Je pense également qu’il est nécessaire de poursuivre le combat contre tous les effets de la domination patriarcale. Un autre enjeu est celui de l’enseignement, avec un élargissement du nombre d’heures d’EPS dans le secondaire, et la question de l’enseignement du sport à l’école primaire qui mérite d’être débattue. Il est en outre nécessaire de poursuivre le combat pour appliquer les règles olympiques, notamment la règle relative à l’interdiction de la propagande politique, religieuse ou raciale au sein des compétitions sportives. Ainsi que l’a rappelé Mme la ministre, la délégation française aux JOP ne comportera aucun signe religieux. Je pense enfin qu’il faut aider à la prise de parole des athlètes et libérer la parole des pratiquantes et pratiquants. Les organisations existantes, qui sont aujourd’hui peu visibles et peu audibles, pourraient par exemple tenir des assises afin de se faire entendre des instances fédérales comme du ministère et de l’État.

En conclusion, je pense que nous avons besoin d’un grand débat citoyen sur les enjeux du développement du sport et sur l’accès de tous et toutes à la pratique sportive dans notre pays. Les JOP pourraient en fournir l’occasion idéale.

Mme la présidente Véronique Riotton. Le fait que les assises remontent à 1999 témoigne de l’ancienneté de cette question.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre de la jeunesse et des sports. Je souhaite revenir en arrière afin d’examiner ce qui a été réalisé et ce qui a été difficile à mettre en œuvre. En 2012, lorsque j’étais ministre des droits des femmes, la question de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport s’est rapidement posée. Les chiffres parlaient alors d’eux-mêmes, puisque seules douze fédérations sportives approchaient la parité dans leur comité directeur, tandis que les clubs féminins étaient scandaleusement sous-financés, tant par les sponsors privés que par les subventions publiques. La couverture médiatique du sport féminin était également déséquilibrée, avec 85 % du temps médiatique consacré au sport masculin et seulement 9 % des articles de presse sportive signés par des journalistes femmes.

Face à cette situation, nous avons élaboré une feuille de route transversale pour tenter de résoudre ces difficultés. Afin de tendre vers l’égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine sportif, nous avons identifié trois axes : celui du terrain, avec une pratique sportive paritaire, celui des écrans et de la médiatisation, et enfin celui des instances dirigeantes du monde sportif. Sur le terrain, le nombre de femmes pratiquant un sport ou s’impliquant dans la vie d’un club par des fonctions d’arbitrage ou d’encadrement était clairement insuffisant. Les pratiques sportives étant largement genrées, avec par exemple 80 % de femmes en équitation et 95 % d’hommes en rugby, nous avons demandé aux fédérations sportives de nous présenter des plans de féminisation. Un an plus tard, 65 % de ces plans avaient été adoptés.

Le sujet de la médiatisation du sport féminin est essentiel, en ce qu’elle contribue à renforcer l’appétence et les projections du public. Nous avons ainsi acté la révision de la directive européenne dite « Télévision sans frontières », qui liste les EMI devant être diffusés gratuitement, afin d’y introduire davantage de sport féminin. Nous avons également organisé, pour la première fois, les 24 heures du sport féminin, un événement devenu depuis récurrent et visant à donner davantage de visibilité au sport féminin. Ce travail nous a conduits à renforcer, dans la loi du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, les pouvoirs du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) en matière de respect de l’équilibre dans la représentation femmes-hommes à la télévision, et de vigilance en matière de discours sexistes.

Nous avons, enfin, travaillé sur l’égalité par le sommet, en renforçant la présence des femmes dans les instances dirigeantes du monde sportif. À ce moment-là, les fédérations sportives devaient respecter uniquement le principe de proportionnalité entre le nombre de femmes licenciées et le nombre de dirigeantes, et seules un tiers d’entre elles le respectait en pratique. Nous avons donc étendu, dans la loi de 2014, l’objectif de parité à d’autres domaines que celui de la politique, y compris aux fédérations sportives. Nous avions fixé des objectifs à atteindre avant 2020, avec par exemple, pour les fédérations où la proportion de femmes est inférieure à 25 % de licenciées, l’obligation d’accueillir au moins 25 % de femmes dans leurs instances dirigeantes, et 50 % dans celles qui comptent une part de licenciées supérieure à 25 %. En cas de non-atteinte de ces objectifs, les fédérations encouraient le risque d’un retrait de leur agrément.

Je suis convaincue du lien direct entre ces trois axes d’action. En changeant la représentation au sommet, nous changeons la pratique sur le terrain et l’appétence pour la couverture médiatique du sport féminin.

Mme Roxana Maracineanu, ancienne ministre de la jeunesse et des sports. Je tiens à souligner l’importance de cette audition, qui permet d’insister sur la continuité de notre action.

Selon moi, le sport s’inscrit dans la société et en est le reflet. Les sportifs et sportives peuvent jouer un rôle de modèle et véhiculer l’image de l’égalité entre les femmes et les hommes. Mon expérience d’athlète m’a permis de constater que, malgré une pratique paritaire, l’encadrement et la gouvernance sont majoritairement masculins. À la fin de ma carrière sportive, j’ai créé une association pour promouvoir la pratique sportive chez les femmes, notamment après l’accouchement, un moment où elles ont besoin de sport et de se retrouver entre elles. Le monde du sport peut en effet favoriser le rapprochement entre les femmes, le partage et la sororité, qui sont encore trop peu proposés au sein du monde sportif fédéral. Je suis ainsi convaincue que la diversification de l’offre sportive et une plus grande féminisation de la gouvernance des fédérations peuvent contribuer à accroître l’offre et à attirer davantage de femmes.

L’égalité entre les femmes et les hommes a été l’un des fils conducteurs de mon mandat de quatre années au sein du ministère des Sports. J’ai eu la chance de pouvoir m’inscrire dans une dynamique porteuse en termes d’égalité femmes-hommes, grande cause du quinquennat du Président de la République et objectif affiché pour les organisateurs des JOP. Nous sommes parvenus à inscrire dans la loi une parité réelle, à 50 %, entre les femmes et les hommes dans les organes exécutifs des fédérations et des ligues sportives, au niveau national et régional, à partir de 2024 et à horizon 2028. Nous avons également réussi, grâce à la loi de 2022, à limiter le nombre de mandats à trois, brisant ainsi le plafond de verre pour les femmes à la tête des fédérations et des ligues. J’étais, à titre personnel, favorable à la proposition d’une alternance entre femmes et hommes pour les mandats des dirigeants, qui pourrait être reprise et expérimentée dans le cadre des travaux de cette délégation. Nous avons en outre élargi le système de vote, pour que la moitié des voix proviennent des clubs et l’autre des grands électeurs. En complément des plans de féminisation précédemment évoqués, la loi de 2021 acte, plutôt qu’un retrait de l’agrément, la possibilité de ne pas le renouveler en cas de non-respect des objectifs fixés.  Nous avons par ailleurs inclus, au sein des contrats d’objectifs et de financement, un plan de prévention des violences, un plan d’engagement pour le développement durable, un plan de lutte contre toutes formes de discrimination et de violence.

Nous avons également travaillé sur l’inclusion du sport dans le système de santé. Certains sports, tels que la natation ou le vélo, sont désormais inclus dans le code de l’éducation en tant que savoirs fondamentaux, afin de contribuer à la lutte contre les difficultés rencontrées par les femmes dans l’accès au système de santé. Certains sports sont ainsi proposés en prévention ou dans leur dimension curative ou réparatrice, et pris en compte par les mutuelles et le système de sécurité sociale. La loi prévoit la possibilité d’une prescription de sport sur ordonnance pour un plus grand nombre d’affections de longue durée, qui concernent également les femmes. Nous avons mis en place des référents sport au sein des établissements accueillant des personnes en situation de handicap, afin de garantir un meilleur accès à la pratique sportive. Nous avons également travaillé sur un guide relatif à la maternité pendant la carrière sportive.

Pour terminer, la lutte contre les VSS a été un volet prépondérant de mon action, et nous sommes passés de quelques cas à 2 000 cas traités aujourd’hui. J’estime qu’il s’agit d’un aspect fondamental de l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous ne pouvons pas souhaiter que les femmes s’engagent dans le monde du sport sans commencer par les protéger. C’est pour cela que la loi de 2014, renforcée par la loi de 2022, qui impose la formation des éducateurs sportifs à ce sujet des violences, va nous être très utile. J’occupe actuellement un poste au sein de la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof), chargée de produire des outils de formation pour les professionnels de première ligne. J’ai mené un combat de quatre ans pour libérer la parole et combattre les VSS dans le monde du sport, que ce dernier doit encore s’approprier. Tous les corps de l’État sont aujourd’hui présents et engagés sur ce sujet de longue haleine, qui nécessite de poursuivre la formation et l’information.

Mme la présidente Véronique Riotton. Je tiens à précise que nous avons décidé de concentrer cette mission sur le développement de la pratique féminine du sport. Nous souhaitons donc nous pencher davantage sur les questions d’éducation, de gouvernance et de financement. Mais la question de la lutte contre les VSS est évidemment essentielle. Nous avons fait le choix de ne pas l’aborder dans le rapport car elle avait été traitée dans d’autres cadres, notamment au sein de la commission d’enquête parlementaire dont nous rejoignons les préconisations. 

M. Stéphane Viry, co-rapporteur de la mission d’information sur les femmes et le sport. Je tiens à exprimer ma gratitude envers vous, mesdames les ministres, pour vos interventions, vos témoignages, et pour avoir rappelé l’exercice du pouvoir qui était le vôtre. Un chemin a été tracé, qui emporte la nation sur ce sujet et qu’il nous appartient de poursuivre en l’élargissant et en accélérant la cadence. Vos contributions nourrissent notre mission d’information, particulièrement à ce stade des recommandations. Vous avez toutes utilisé les termes d’engagement et de combat, soulignant qu’il s’agit d’une lutte à poursuivre.

Je souhaite revenir sur deux aspects de ces recommandations, qui concernent la gouvernance et le financement du sport. Au cours de votre mandat, vous avez toutes pris des mesures pour renforcer la place des femmes au sein des instances dirigeantes du sport français. Il semble cependant que le monde des hommes reste réfractaire à l’inclusion des femmes. La loi du 2 mars 2022 impose la parité dans les instances dirigeantes du CNOSF et du Comité paralympique et sportif français (CPSF), ainsi que pour les fédérations sportives. Elle laisse aux instances régionales jusqu’en 2028 pour se conformer à cette exigence, mais nous avons entendu, lors de nos auditions, que celles-ci ne seraient probablement pas prêtes à atteindre cet objectif, faute de candidates. Partagez-vous cette analyse sur le déficit de ressources humaines pour porter les responsabilités au sein des instances dirigeantes ? Selon vous, ce problème est-il dû à un vivier insuffisant de candidates ? Quelles recommandations pourriez-vous nous donner pour inciter les femmes à se porter candidates ?

Nous avons également entendu, lors de l’audition des sociologues du sport Mmes Béatrice Barbusse et Annabelle Caprais, qu’à chaque nouvelle norme succèdent des stratégies de contournement. Par exemple, le CNOSF, pour lequel l’exigence de parité porte notamment sur son bureau, compte actuellement 16 femmes pour 33 hommes au sein de son conseil d’administration. Cela démontre qu’en dépit des normes, des difficultés subsistent. Il a été rappelé que les femmes dirigeantes occupent souvent des postes de secrétaires ou de vice-présidentes sur des sujets considérés comme secondaires. Les hommes sont également plus nombreux à être trésoriers, laissant à penser que les finances d’un club doivent être gérées par des hommes. Dans ce contexte, pensez-vous qu’il soit nécessaire de revoir les règles d’élection ? Les prescriptions législatives devant être perpétuellement revisitées et remises à jour, pensez-vous que les textes que vous avez donnés à la France doivent être revus ? Le cas échéant, quels seraient les axes d’une réforme complémentaire ?

Je souhaite enfin aborder le sujet du financement, qui apparaît central dans cette question de la place des femmes dans le sport. Le chiffre d’affaires du sport féminin devrait dépasser le milliard d’euros au niveau mondial cette année. Vous aviez mis en place, madame Buffet, une taxe pour financer le sport amateur. Mesdames, pensez-vous qu’un dispositif similaire, portant sur le sport professionnel masculin et/ou féminin, mais qui inclurait un financement spécifique pour le sport féminin, serait souhaitable et aisément applicable dans notre pays ?

Mme Émilie Chandler (RE). Mesdames, votre détermination et votre engagement ont permis de faire avancer significativement la cause des femmes dans le sport et de briser les stéréotypes de genre persistants. Cette année, les Jeux olympiques de Paris sont une opportunité de mettre en lumière les progrès accomplis pour le sport féminin. Je me permets de rappeler une citation d’Alice Milliat, pionnière du sport féminin ayant contribué à imposer les premières olympiades féminines en 2022, qui affirmait que « le sport féminin mérite une place équivalente à celle du sport masculin dans la vie sociale, et devrait même passer au premier plan des préoccupations d’un gouvernement ». Ces propos, tenus en 1917, sont toujours d’actualité cent ans plus tard. Depuis 2017, le Président Emmanuel Macron a fait de l’égalité entre les femmes et les hommes la grande cause de son deuxième quinquennat. Récemment, les ministres Amélie Oudéa-Castéra et Aurore Bergé ont annoncé un plan d’action comportant dix-huit mesures concrètes autour de trois axes prioritaires : développer la pratique féminine à tous les âges de la vie, mieux accompagner les sportives professionnelles de haut niveau en matière de protection sociale, notamment en cas de maternité, et accroître la médiatisation afin de renforcer le modèle économique du sport professionnel féminin.

Cependant, malgré ces avancées, les stéréotypes de genre et les préjugés sexistes continuent d’entraver la progression des femmes dans le sport. Les femmes sont toujours sous-représentées dans les instances dirigeantes des fédérations sportives et les écarts de rémunération entre les athlètes féminines et masculins demeurent importants. Par ailleurs, le milieu sportif est encore sujet à d’importantes polémiques, notamment en ce qui concerne les comportements répréhensibles. Les violences sexuelles persistent dans de nombreux sports et de trop nombreux cas restent impunis. Un grand nombre de personnes, amateurs comme professionnels, subissent ces violences, et la voix des victimes n’est toujours pas entendue. Mesdames les ministres, quelles mesures concrètes peuvent être mises en place pour prévenir et lutter contre les violences sexuelles dans le sport ? Comment encourager les victimes à briser le silence et à dénoncer les agresseurs ? Comment garantir que les auteurs de ces actes soient poursuivis et sanctionnés de manière appropriée ? Votre travail a été une source d’inspiration pour de nombreuses personnes et nous sommes toutes et tous reconnaissants pour les progrès que vous avez contribué à réaliser.

Mme Pascale Martin (LFI-NUPES). Malgré les réformes que vous avez chacune initiées, beaucoup reste à faire. Vous avez mentionné certaines pistes d’amélioration, comme le statut des bénévoles ou les décharges horaires, en soulignant que la charge mentale pèse toujours sur les femmes. J’ai découvert, grâce à la commission d’enquête sur les fédérations sportives, que ce monde est celui de l’entre-soi et de l’omerta. Les auditions menées dans ce cadre m’ont profondément choquée et m’ont amenée à prendre conscience de la situation, dans ce milieu comme dans tant d’autres.

Il est aussi essentiel de promouvoir la place des femmes dans tous les sports, leur implication, et de donner de la visibilité aux sportives dans les médias. En tant que militante féministe, je me souviens avoir lutté pour que l’audiovisuel retransmette suffisamment les événements de sport féminin, et suis fière que nous ayons remporté cette bataille.

J’estime également qu’il est essentiel de changer le sommet en changeant la pratique du terrain. Je souhaite citer deux sportives de haut niveau dont l’engagement m’a profondément impressionnée : Laurence Fischer, triple championne de karaté, qui participe à la reconstruction des femmes, et Paoline Ekambi, joueuse internationale de basketball, autrice du livre « Ma promesse en héritage », dans lequel elle raconte comment le sport l’a aidée à échapper aux violences familiales. Ces modèles sont inspirants et nous montrent la voie à suivre. Cependant, pourquoi les femmes ne sont-elles pas candidates à ces postes ? Comment faire en sorte que les hommes laissent un peu de place aux femmes ? Il me semble que tout cela est une question d’éducation, et que nous devons, par nos politiques publiques, participer à cette éducation dès le plus jeune âge.

Mme Katiana Levavasseur (RN). Nous sommes aujourd’hui réunis pour parler d’égalité, de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, et plus particulièrement des droits des femmes. Comme le rappelait Simone de Beauvoir : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » Or, il semble que nous soyons actuellement entrés dans l’une de ces crises, qui est culturelle. Madame Maracineanu, en tant qu’ancienne ministre ayant œuvré pour la défense et la protection des femmes, notamment contre toutes formes de violence, et plus particulièrement dans le domaine sportif, je m’interroge sur l’inclusion des personnes transgenres dans les compétitions sportives.

En mars 2022, vous avez plaidé pour renforcer la place et les rôles des femmes dans le monde sportif, et avez également œuvré pour faciliter l’accès des femmes au sport. Madame Buffet, en 2005, vous aviez interpellé la garde des Sceaux sur la nécessité de faciliter le changement d’identité des personnes transgenres, ce qui pourrait potentiellement faciliter leur accès aux compétitions féminines. N’y a-t-il pas une contradiction ici ? Nous observons aujourd’hui une multiplication des cas où des personnes nées hommes, avec une stature et une musculature masculine, se présentent comme des femmes et remportent des victoires aux dépens de femmes qui se sont entraînées toute leur vie pour finalement se voir disqualifiées. Alors que le Comité d’experts sur la transidentité a été installé, de fortes pressions sont aujourd’hui exercées pour que les personnes transgenres puissent accéder aux compétitions sportives de haut niveau en France. Quelle est votre opinion sur ce sujet ? Céder à ces revendications ne signerait-il pas la fin des femmes dans le sport ? Cela n’irait-il pas à l’encontre des combats que vous menez ?

Mme Delphine Lingemann (Dem). Je souhaite aborder la question de la difficulté, pour les sportives de haut niveau, à vivre de leur sport. Les chiffres sont éloquents, puisqu’un joueur de rugby du Top 14 gagne en moyenne 20 000 euros par mois, tandis qu’une joueuse de rugby de Fédérale 1 ne reçoit qu’une prime de match d’une centaine d’euros en cas de victoire. Le football présente le même constat, bien que la professionnalisation des femmes soit un peu plus avancée. Le salaire moyen d’un joueur de Ligue 1 est d’environ 94 000 euros par mois, soit 40 fois plus que celui d’une joueuse de Division 1, qui est d’environ 2 500 euros par mois. Un autre levier de professionnalisation des sportifs de haut niveau est le sponsoring. Là encore, de grandes disparités existent entre hommes et femmes, en raison de l’audience des retransmissions. À titre d’exemple, la finale de la Coupe du monde de football masculin 2022 a été regardée par 1,5 milliard de personnes, contre 82 millions pour la finale de la Coupe du monde féminine 2019, soit vingt fois moins. En conséquence, la compétition masculine a généré 6,5 milliards de dollars, contre 570 millions pour la compétition féminine, ce qui entraîne des revenus de sponsoring beaucoup moins importants pour les femmes que pour les hommes.

Mesdames les ministres, quel levier peut-on activer pour accélérer la professionnalisation des femmes dans le sport et atteindre une égalité, ou du moins une quasi-égalité, entre hommes et femmes ? D’autre part, en tant qu’ancienne accompagnatrice d’étudiantes sportives de haut niveau, je suis particulièrement préoccupée par les difficultés financières que rencontrent certains de ces étudiants. Quels sont les leviers ou les accompagnements que nous pourrions mettre en place pour soutenir ces étudiantes sportives de haut niveau ?

Mme Fatiha Keloua Hachi (SOC). Je souhaite aborder la question de la place des femmes et des filles dans les espaces publics sportifs. Les citystades, skateparks ou équipements de musculation en libre accès sont majoritairement utilisés par des garçons et des hommes, laissant peu de place aux filles et aux femmes.

Cette situation est due à plusieurs facteurs, tels que la peur du harcèlement de rue, la charge mentale, qui repose sur les femmes et laisse donc moins de place à la pratique d’une activité sportive, ou encore la reproduction de phénomènes observés dans les cours de récréation. En moyenne, 80 % de ces espaces sont utilisés par les garçons. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de garantir l’égal accès de toutes et tous aux lieux publics sportifs. Le plan des 5 000 équipements sportifs a permis l’installation de nombreux citystades et skateparks dans nos circonscriptions.

Mais si ces équipements favorisent la pratique sportive, notamment des enfants et des adolescents, ils ont rapidement été monopolisés par les garçons et les hommes. Je vous invite donc à partager votre expertise sur la question de la place des filles et des femmes dans l’espace public sportif. Quelles réflexions pouvons-nous avoir en amont du choix des équipements sportifs sélectionnés ? Quelles politiques publiques devraient être mises en place pour favoriser la présence des filles et des femmes dans ces lieux ? Je tiens à préciser que je suis députée de Seine-Saint-Denis et que cette question est particulièrement pertinente dans ce département. Les filles et les femmes que nous rencontrons souhaitent pratiquer du sport, mais se heurtent à une barrière, car l’espace public est dominé par les hommes et les jeunes hommes.

Mme Marie-Charlotte Garin (Écolo-NUPES). Je souhaite tout d’abord réagir aux propos de notre collègue du RN. Critiquer les personnes transgenres tout en citant Simone de Beauvoir est un exercice périlleux. Suggérer que l’inclusion des femmes transgenres signerait la fin des femmes dans le sport manque cruellement de dignité. Il aurait été plus pertinent d’évoquer les enfants victimes de violence dans les clubs sportifs, les inégalités entre les femmes et les hommes aux postes à responsabilité, ou encore les inégalités économiques.

Je suis députée de Lyon, un territoire d’excellence sportive où l’OL féminin et l’ASVEL féminin font notre fierté. Ces clubs sont constitués de joueuses généreuses qui s’impliquent sur le territoire, notamment en coachant des femmes pour l’accès à l’emploi ou en accompagnant des bénéficiaires du RSA. Le sport, lorsqu’il véhicule de belles valeurs, est le reflet d’un projet de société. Il est à cet égard important de souligner le projet social que portent certains clubs. Ma collègue, Pascale Martin, a mentionné Laurence Fisher et son projet Fight for Dignity, qui aide les femmes victimes de violence à se reconstruire. Au-delà de l’exemple spécifique des femmes victimes de violences, la place du sport amateur est un véritable sujet, notamment pour les filles et les jeunes filles. Nous constatons en effet un important décrochage, alors même que nous savons combien le sport peut changer la vie et transformer les femmes, en favorisant l’émancipation, en changeant le rapport au corps et à la confiance en soi. Mesdames les ministres, avez-vous des propositions sur la manière de lutter contre le décrochage des filles et des jeunes filles dans le sport amateur ? Ces propositions auront nécessairement une influence sur les femmes qu’elles deviendront.

Mme Roxana Maracineanu. Je suis particulièrement touchée par l’engagement de Laurence Fischer, qui nous a conduits à lui proposer de rejoindre le ministère des affaires étrangères. Elle a occupé le poste d’ambassadrice du sport pendant plusieurs années, ce qui lui a permis de promouvoir ses actions, en France comme à l’international. Aujourd’hui, le sport est en lien avec tout l’écosystème associatif de protection des femmes et est de plus en plus utilisé pour la reconstruction des femmes victimes de violences. Son exemple a donc déjà eu un impact.

Le sujet de la recherche de femmes pour occuper les postes de direction m’intéresse tout particulièrement. Tant que ce problème, qui se retrouve dans de nombreux autres domaines, ne sera pas résolu au sein des entreprises ou des administrations, il ne pourra pas l’être dans le sport. Nous avons dû, avec l’aide des parlementaires, mener un bras de fer contre le mouvement sportif pour parvenir à inclure des mesures sur la parité et l’égalité des femmes et des hommes dans la loi. Ce combat doit être mené en gardant à l’esprit que le sport fait partie intégrante de la société, et qu’il ne doit pas être laissé de côté. J’espère ainsi que l’héritage des Jeux olympiques sera d’intégrer pleinement le sport à tous les sujets de société, y compris la discrimination envers les personnes homosexuelles ou transsexuelles. J’ai mis en place un groupe de travail dédié à l’inclusion des personnes homosexuelles ou transsexuelles dans la pratique sportive, qui poursuit aujourd’hui son travail et donne aux mouvements sportifs la possibilité de s’exprimer, sous l’œil attentif de l’État qui veille en permanence au respect et à l’inclusion de chacun dans la pratique sportive.

Trouver des femmes nécessite de mener un véritable chantier sur le bénévolat, notamment en prêtant une attention particulière à la manière dont les bénévoles sont recrutés au sein des associations. Il est également nécessaire de faciliter l’engagement des femmes, afin qu’elles puissent, en plus de leur vie de famille et professionnelle, s’investir dans le sport et dans l’associatif. Cela permettra à des femmes de monter petit à petit à la présidence des associations, puis des comités départementaux, des ligues et enfin des fédérations. Il existe déjà un certain nombre de dispositifs, financés conjointement par le ministère et le CNOSF, qui permettent à des femmes et à des sportives de gagner en confiance pour postuler et accéder à des postes de présidentes. Les femmes, principalement celles qui prennent la parole pour l’égalité, ou qui occupent des postes d’adjointes ou de présidentes de commissions, doivent oser postuler et se lancer. Le chemin d’accès à ces postes doit être facilité depuis la base, que sont les associations, jusqu’aux fédérations.

Mme Najat Vallaud-Belkacem. Afin de provoquer un changement significatif, les politiques publiques doivent adopter une approche de sédimentation plutôt que de constante alternance. Cela a été clairement illustré par Roxana qui a expliqué comment elle a renforcé et développé des dispositifs que nous avions précédemment envisagés ou impulsés. Cela m’a rappelé la récente constitutionnalisation de l’IVG. Ce progrès, majeur pour notre pays, a été rendu possible par l’accumulation de dispositifs légaux qui ont renforcé la place de l’IVG dans notre système. Majorité après majorité, nous avons renforcé l’IVG et corrigé les problèmes associés. Ce droit s’est finalement normalisé, jusqu’à sa constitutionnalisation qui n’a pas été source de scandale ou de tensions exagérées.

En ce qui concerne l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport, il est crucial de partir des acquis et de les améliorer. C’est dans cette optique que je réponds aux questions concernant l’occupation majoritairement masculine de l’espace public sportif et le sous-financement, public ou privé, des activités sportives féminines. Je pense que la solution réside dans l’acceptation d’une forme de discrimination positive en faveur de la pratique sportive féminine. Je serais notamment favorable à une taxe spécifique pour le financement du sport féminin, similaire à la taxe Buffet. Il me semble que les progrès accomplis nous permettent désormais d’envisager ce type de mesures.

Concernant la question du vivier de talents, l’analogie avec d’autres domaines où la parité est appliquée est pertinente. Lors de l’instauration de la parité en politique, nous avions été averties du risque de ne pas trouver suffisamment de femmes. L’expérience a toutefois démontré que les sanctions financières peuvent inciter les partis politiques à préparer, en amont, leurs viviers de talents féminins. C’est une leçon dont nous pourrions nous inspirer concernant le monde sportif, en l’incitant par la pression à constituer ses forces vives. Cependant, constituer un vivier de femmes ne suffit pas à assurer leur place au sein des instances dirigeantes. Il faut également prendre en compte, tout comme en politique, les conditions d’exercice de ces responsabilités, qu’elles soient pratiques, comme l’accompagnement de la maternité, ou psychologiques. Je suis consternée par la violence que subissent les femmes qui exercent des responsabilités politiques. L’expérience d’une femme en politique est différente de celle d’un homme, et cette situation se retrouve malheureusement dans le sport. Le cas de Brigitte Henriques, à la tête du CNOSF, est particulièrement révélateur, et j’estime que nous n’aurions pas dû accepter que son mandat se termine de manière aussi brutale et violente. Ces situations, que les femmes observent et s’approprient, peuvent les dissuader d’exercer des responsabilités. Il appartient donc aux pouvoirs publics de veiller à ce que ces responsabilités puissent être exercées dans des conditions sereines et confortables.

Je souhaite enfin souligner l’importance de l’école dans l’apprentissage de la pratique sportive, qu’il s’agisse des cours d’EPS ou des licences de l’UNSS. Les pouvoirs publics devraient par exemple réduire le coût de la licence UNSS pour les populations les plus défavorisées, afin d’encourager la pratique des garçons comme des filles. Par ailleurs, toutes les mesures favorisant une pratique sportive étendue, telles que la réforme des rythmes scolaires, sont bénéfiques pour le sport féminin.

Mme Marie-George Buffet. Si le mouvement sportif a récemment été sous le feu des projecteurs pour divers problèmes et scandales, ceux-ci sont le reflet des maux de la société dans son ensemble. Le mouvement sportif, majoritairement géré par des bénévoles, est certainement moins bien outillé que d’autres secteurs pour y faire face. Cependant, la majorité des clubs sportifs en France, qui comptent plus de 150 000 membres et plus de 3 millions de bénévoles, sont des lieux d’éducation populaire et de bien-être pour les enfants et pour tous les pratiquants. Nous devons être particulièrement exigeants en matière d’éthique dans le mouvement sportif, car il concerne également les enfants et les jeunes, et contribue au bien-être et au développement physique et psychique des individus. Un discours uniquement négatif envers le mouvement sportif ne l’aiderait pas à se saisir des problèmes qu’il rencontre et à y faire face.

Cela renvoie à un autre exemple, qui est celui de la place des femmes. Lorsque je suis arrivée à l’Assemblée nationale dans les années 1990, les femmes représentaient moins de 20 % des députés. Ce constat se traduisait dans les débats, teintés de propos sexistes. J’ai pu constater, en tant que députée, que la parité a permis de transformer positivement ce rapport de force, non seulement au sein de l’Assemblée, mais également au niveau des conseils municipaux, régionaux et départementaux. Mais, en raison des freins qui subsistent, et malgré la parité au sein des listes, seules 19 % des communes élisent une femme comme maire. Il est donc nécessaire, au-delà de l’adoption de lois, de mener un combat permanent pour transformer les mentalités et expliquer que les femmes sont tout aussi compétentes et disponibles que les hommes. Le Comité national pour le renforcement de l’éthique et de la vie démocratique propose d’établir la parité, pour toutes les instances du mouvement sportif et pour chacune des élections. Nous proposons ainsi une modification des règles électorales, avec une proportionnelle sur liste. Mais si la loi est nécessaire, en ce qu’elle permet d’avancer et d’établir des droits, des mesures concrètes le sont également, afin que chacun, homme ou femme, puisse s’engager bénévolement à tous les niveaux. C’est pourquoi nous proposons l’indemnisation des dirigeants bénévoles, de la même façon qu’un maire ou un adjoint est indemnisé pour le temps qu’il consacre à sa fonction. Il est également nécessaire de réfléchir à des mesures permettant aux femmes de dégager du temps pour l’engagement bénévole, comme la prise en compte de cet engagement dans le calcul des trimestres de retraite. Le combat pour le partage des tâches domestiques doit également se poursuivre, car le poids des responsabilités familiales dissuade toujours les femmes de s’engager ou de prendre des responsabilités dans le mouvement sportif ou d’autres mouvements associatifs. Il faut donc des mesures et des lois, mais également un combat constant pour changer les mentalités, qui commence dès le plus jeune âge. Il est encore courant, en effet, de penser que le sport est plus important pour les garçons que pour les filles.

Sur le sujet du financement, je suis d’accord avec la proposition d’une taxe. J’estime également qu’il serait nécessaire de réfléchir au statut des ligues professionnelles. Actuellement, les fédérations sont des associations, au sein desquelles des entités appelées ligues professionnelles sont notamment chargées de gérer d’importantes sommes d’argent. Il y a peut-être également lieu de revoir le fonctionnement du sport professionnel dans son intégralité, non pour le remettre en cause, mais pour en étudier la gestion. Chez les présidents de ligues professionnelles, le concept de parité est, aujourd’hui encore, tourné en dérision, aucune femme n’étant aujourd’hui présidente de club.

En ce qui concerne les violences sexuelles, je pense qu’il est nécessaire de prendre une décision forte en créant une agence indépendante. C’est grâce à une décision similaire que nous avons pu progresser dans le domaine de la lutte contre le dopage. Des présidents expliquent que certaines méthodes d’entraînement appartiennent à la culture de leur fédération. Des points d’appui extérieurs au mouvement sportif me paraissent donc nécessaires, ainsi qu’un plus grand pouvoir donné aux comités d’éthique.

Sur les terrains de proximité, un encadrement associatif est nécessaire pour éviter la reproduction de la domination patriarcale, en accueillant les filles comme les garçons et en diversifiant les pratiques sportives. Il est, enfin, essentiel de développer l’EPS à l’école et de soutenir les associations sportives scolaires, qui sont aujourd’hui en grande difficulté faute de bénévoles. Nous pourrions par exemple créer une semaine du sport dans les collèges et les lycées, au cours de laquelle les clubs locaux pourraient présenter leurs activités et échanger avec les élèves. Il s’agit de donner envie aux jeunes d’aller vers les clubs, à travers un moment fort de partage entre l’éducation nationale et le sport.

Pour conclure, je souhaite souligner l’importance de donner au ministère des sports les moyens humains nécessaires pour exercer un suivi et un contrôle des fédérations. Des moyens humains et financiers sont nécessaires pour accompagner le mouvement sportif et assurer le droit à la pratique sportive dans notre pays.

Mme Roxana Maracineanu. Je tiens à souligner à Madame Buffet que nous partageons toutes les trois, en tant qu’anciennes ministres des sports, l’objectif de renforcer ce ministère, particulièrement après les Jeux olympiques. S’il est crucial de maintenir l’égalité entre les femmes et les hommes au cœur de nos préoccupations, il est également essentiel de conserver une cohérence. Si nous souhaitons un ministère des sports fort, nous devons lui permettre d’assumer pleinement ses missions régaliennes, notamment l’éthique, l’intégrité et l’égalité entre les sexes. Il est impératif de doter ce ministère des ressources nécessaires pour accomplir ses missions. Grâce à nos efforts conjoints et aux missions de l’Assemblée nationale, le ministère des sports a retrouvé une certaine pertinence dans ses missions régaliennes, qu’il serait contre-productif de confier à des agences externes. Il serait également souhaitable d’inclure la prévention des violences au sein notre discussion sur l’égalité entre les sexes. La protection des femmes est une condition préalable à leur accès à des postes de direction et à d’autres rôles importants, tels qu’entraîneuses ou dirigeantes. C’est pourquoi il est nécessaire de considérer le ministère comme l’entité responsable de la gestion de ce sujet d’importance capitale.

Mme Véronique Riotton, présidente. Mesdames, votre présence parmi nous est un honneur et je vous en remercie sincèrement. Vous avez été des sources d’inspiration, et j’espère que nous saurons apporter des réponses à vos interrogations et propositions. Nous souhaitons faire honneur à la continuité en travaillant sur la gouvernance, le financement, l’éducation et la médiatisation. Nous nous engagerons fermement à défendre la culture de l’égalité dans le sport dès le plus jeune âge.

 

 


II.   Évènement sur la mixité dans le sport

 

Mardi 19 mars 2024

Colloque à l’occasion de la journée internationale

des droits des femmes

 

https://assnat.fr/dH4VT6

 

 

 


III.   Examen du rapport par la délégation

 

  Les débats sont accessibles sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante :

 

https://assnat.fr/pX6pNm

 

 

 

 


 

   annexe

  
Liste des personnes auditionnées par les rapporteurs

M. Frédéric Sanaur, directeur général de l’Agence nationale du sport (ANS).

Mme Astrid Guyart, secrétaire générale et Mme Marie-Françoise Potereau, vice-présidente du Comité national olympique et sportif français (CNOSF).

M. Jean Hubac, chef du service de l'accompagnement des politiques éducatives à la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO)

Mme Fabienne Bourdais, directrice des sports au Ministère des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.

M. François Beck, directeur de la prévention et de la promotion de la santé et Mme Anne-Juliette Serry, responsable de l’unité nutrition et activité physique de Santé publique France.

M. Olivier Girault, directeur national de l’Union nationale du sport scolaire (UNSS).

Mme Marie Barsacq, directrice exécutive Impact et l’héritage de Paris 2024.

Mme Anne Barrois-Chombart, directrice générale adjointe de l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP).

Mme Laurence Pécaut-Rivolier, membre du collège et présidente du groupe de travail « protection des publics et diversité de la société française » de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM).

 

M. Abel Badji, maire adjoint en charge des sports et relations avec les clubs sportifs à la Ville de Pantin.

M. Karim Ziady, conseiller de Paris délégué au Sport de proximité chargé du sport, des Jeux Olympiques et Paralympiques.

Mme Louise Pahun, vice-présidente Sports solidaires et responsables et Myriam Bigeard, conseillère départementale, responsable de la mission égalité femmes-hommes du Département de Loire-Atlantique.

M. Philippe Lafrique, vice-président de la Région Nouvelle-Aquitaine, en charge des sports et de la vie associative.

 

Mme Frédérique Quentin, présidente de la commission mixité à la Fédération française d’athlétisme.

Mme Sylvie Pascal-Lagarrigue, directrice technique nationale adjointe de la Fédération française de handball.

Mme Magali Baton, secrétaire générale et Mme Frédérique Jossinet, vice-présidente en charge du haut niveau et de la haute performance de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées.

Mme Myriam Antoine, directrice générale adjointe de la Fédération française de montagne et d’escalade.

Mme Dominique Cupillard, secrétaire générale de la Fédération française de natation.

M. Eric Tanguy, président, et Mme Axelle Guiguet, directrice technique nationale de la Fédération française de volleyball.

M. Florian Grill, président et Mme Brigitte Jugla, vice-présidente en charge de rugby féminin au sein de la Fédération française de rugby.

Mme Marie-Lise Rovira, secrétaire générale et Mme Elisabeth Alonso, conseillère technique nationale et responsable féminisation et sport santé au sein de la Fédération française de boxe.

Mme Marie-Françoise Potereau, vice-présidente en charge du plan de féminisation au sein de la Fédération française de cyclisme.

Mme Caroline Divies, présidente de la commission Femmes au sein de la Fédération française du sport automobile.

M. Charles Ferreira, président de la Fédération française de danse.

Mme Sophie Dubourg, directrice technique nationale de la Fédération française d’équitation.

Mmes Stéphanie Daval, secrétaire générale et Géraldine Zimmermann, directrice technique nationale adjointe de la Fédération française des sports de glace.

M. James Blateau, président de la Fédération française de gymnastique.

M. Jean-Michel Aulas, vice-président, M. Paul-Hervé Douillard, responsable du service coordination administrative DTN et coordinateur de la création de la Ligue professionnelle du football féminin et Mme Elisabeth Bougeard-Tournon, responsable du service football féminin, bénévolat et mixité à la Fédération française du football.

 

Mme Brigitte Deydier, championne du monde de judo et ancienne directrice nationale technique à la Fédération française de judo.

Mme Mélissa Plaza, footballeuse professionnelle, docteure en psychologie du sport et auteur du livre Pas pour les filles ?

Mme Nicole Abar, footballeuse professionnelle, particulièrement engagée en faveur de l’égalité dans le sport dès le plus jeune âge et réalisatrice du film « la conquête de l’espace ».

Mme Stéphanie Frappart, arbitre internationale de football et directrice technique déléguée à l’arbitrage féminin à la Fédération française de football.

Mme Doriane Domenjo, arbitre à la Fédération française de rugby.

Mme Béatrice Barbusse, sociologue du sport et vice-présidente déléguée de la Fédération française de handball.

Mme Charlotte Girard-Fabre, ex-arbitre internationale de hockey sur glace, secrétaire générale de l’Association française du corps arbitral multisports (AFCAM) et secrétaire générale de la Fédération internationale des corps arbitraux (IFSO).

Mmes Marie-George Buffet, ancienne ministre des sports.

Mme Najat- Vallaud-Belkacem, ancienne ministre des sports.

Mme Roxana Maracineanu, ancienne ministre des sports.

 

Mme Jacqueline Ortiz, fondatrice et coordinatrice générale d’Amunanti.

Mme Marie-Pierre Badré, présidente du Centre Hubertine Auclert.

Mme Emmanuelle Ducrot, directrice générale et M. Yves Paret, président de Femix’Sports.

Mme Aurélie Bresson, présidente, M. Eric Florand, secrétaire général et Mme Tess Harmand, directrice du développement de la Fondation Alice Millat.

Mme Mathilde Castres, présidente de Sine qua non.

 

Mme Annabelle Caprais, sociologue du sport, enseignante-chercheuse à l’Université de Bretagne occidentale.

M. Greg Décamps, enseignant chercheur en psychologie du sport et de la santé à l’Université de Bordeaux.

Mme Sandy Montañola, maîtresse de conférences à l'Université de Rennes 1, spécialiste des médias.

 

M. Pierre Ferracci, président et Mme Marie-Christine Terroni, présidente de la section féminine du club Paris FC.

M. Philippe Herbette, président-directeur général de Fitness Park.

M. Fabien Rouget, directeur de Basic fit France.

M. Nicolas Lovera, directeur de Playgones.

Mme Marie-Hélène Patry, déléguée générale de Foot Unis, employeurs du football.

M. Mathieu Sidokpohou, directeur général Europe du sud d’Adidas.

M. Gilles Galinier, directeur de la communication et Virginie Guérin, directrice des relations institutionnelles du groupe Arkema ;

M. Charles Lantieri, directeur général délégué du groupe Française des jeux ;

Mme Francesca Rossi, présidente, et Anne-Laure Matecat, Paris social community impact director de Nike.

M. Nicolas Godet, directeur de Point P.

M. Nicolas Martin, responsable des partenariats sportifs et gestion des athlètes de haut niveau du groupe RATP.

 

M. Florent Houzot, directeur de la rédaction de BeIN sport.

M. Jérôme Saporito, directeur de la chaîne l’Équipe.

Mme Laurie Delhostal, journaliste pour France Info et l’Équipe, vice-présidente de l’Union nationale des journalistes sportifs et co-fondatrice de l’association Femmes journalistes de sport.

 

M. José Ruiz, président, Mme Marion Pelissie et M. Thibault Dagorne, co-secrétaires généraux de la fédération des entraîneurs professionnels.

M. Jacques Thamin, chargé de mission pour la confédération nationale des éducateurs sportifs.

Mmes Karine Chambonneau et Ezzate Cursaz, secrétaires nationales du syndicat national des activités physiques et sportives (SNAPS).

Mme Nathalie Sevilla, directrice de l’INSPÉ de Lorraine ;

Mme Claire Pontais, responsable du 1er degré au Syndicat national de l’éducation physique – Fédération syndicale unitaire (SNEP-FSU).


([1]) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.

([2]) OMS, Activité physique, octobre 2022.

([3])  Le Comité a remis son rapport « Pour un sport plus démocratique, plus éthique et plus protecteur » le 7 décembre dernier.

([4])  L’association 2GAP a présenté son livre blanc pour 2024 « Femmes, sport et gouvernance » le 14 mars dernier.

([5])  Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP), «  les chiffres clés du sport 2023 – Pratiques sportives des français », 2023.

([6])  Libération, « En France, seuls 38% des licenciés sportifs sont des licenciées », octobre 2018.

([7])  Marie-Carmen Garcia et Cécile Ottogalli-Mazzacavallo, « la féminisation du sport fédéral : une affaire de petites et jeunes filles ? », Éditions Presses de Sciences Po, 2022.

([8])  Louvre Lens, « les Jeux olympiques dans l’Antiquité grecque ».

([9])  Le saut à ski a été la dernière discipline à s’ouvrir aux femmes, aux Jeux olympiques de 2014.

([10]) CIO, « À Amsterdam en 1928, Lina Radke est la première championne olympique du 800 m, mais… », novembre 2019.

([11])  Geo, « Alice Milliat, la grande oubliée du sport féminin », mars 2024.

([12]) Nations unies, Haut-commissariat aux droits de l’homme, « Stéréotypes liés au genre : le HCDH, les droits des femmes et l'égalité des genres ».

([13])  Nations unies, Haut-commissariat aux droits de l’homme, « Stéréotypes liés au genre : le HCDH, les droits des femmes et l'égalité des genres ».

([14])  Le Nouvel Obs, « Sepp Blatter veut des footballeuses plus sexy », janvier 2004.

([15])  Huffington Post, « Lors de leurs règles, ces sportives veulent jouer sans shorts blancs », juillet 2022.

([16])  Le Point, « Sport féminin : le long combat des athlètes pour faire évoluer leur tenue », avril 2023.

([17])  Le Point, « JO Paris 2024 : trop échancrées, scandale autour des tenues Nike des athlètes américaines », avril 2024.

([18])  Le Parisien, « JO Paris 2024 : jugées trop échancrées, les tenues Nike des athlètes américaines vivement critiquées », avril 2024.

([19])  Camille Juza et Mathias Vaysse, Toutes Musclées, Haut et Court Doc, France, 2022.

([20])  Carine Burricand et Sébastien Grobon, « Quels stéréotypes sur le rôle des femmes et des hommes en 2014 ? », Études et résultats, Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), n° 907, mars 2015.

([21])  Catherine Louveau, « Où en est l'égalité femmes hommes dans le sport ? », Vie publique, juillet 2023.

([22])  Tel qu’extrait de Marie-Carmen Garcia et Cécile Ottogalli-Mazzacavallo, « la féminisation du sport fédéral : une affaire de petites et jeunes filles ? », Éditions Presses de Sciences Po, 2022.

([23]) Idem

([24])  Le Monde, « Dans les cours de récréation, les filles sont invisibilisées », septembre 2018.

([25])  Selon la terminologie employée par Édith Maruéjouls et Nicole Abar.

([26])  Selon les informations fournies par la DGESCO à vos rapporteurs.

([27])  Selon les données fournies aux rapporteurs par Santé Publique France.

([28])  Idem

([29])  Radio France, « Adidas lance une legging pour faire du sport pendant ses règles », juin 2021.

([30])  Yaëlle Amsellem-Mainguy , « Les filles du coin. Vivre et grandir en milieu rural », Presses de Sciences Po, 2021.

([31]) FFF, Sections sportives scolaires, chiffres clés 2023-2024.  

([32])  Ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse, Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), « 201 500 du second degré sont internes à la rentrée 2018 », Note d’information n° 19.31, juillet 2019.

([33]) Hospices civils de Lyon, Sport et grossesse, novembre 2023.  

([34])  Haute autorité de santé (HAS), « Prescription d’activité physique et sportive : pendant la grossesse et en post-partum ».

([35])  Ministère chargé des sports, guide de la pratique sportive pendant la maternité ; « Je peux pratiquer des activités physiques et sportives pendant ma grossesse et après l’accouchement », mars 2021.

([36])  En 2024, 54 % des femmes déclarent qu’elles prennent majoritairement en charge les tâches ménagères contre 7 % des hommes selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et de la statistique (DREES), « Des stéréotypes de genre encore très ancrés, notamment chez les hommes », février 2024.

([37]) INJEP, Notes & Rapports, rapport d’étude, « Baromètre national des pratiques sportives 2020 », février 2021.  

([38])  2GAP, Livre blanc, « Femmes, sport et gouvernance : observatoire de la gouvernance partagée. Les propositions 2GAP 2024 », mars 2024.

([39])  Catherine Louveau, « Où en est l'égalité femmes hommes dans le sport ? », Vie publique, juillet 2023.

([40])  Inserm, « Maladie de Parkinson : chez les femmes, l’activité physique serait déjà bénéfique plus de vingt ans avant le diagnostic », mai 2023.

([41])  Le Monde, « Nous irons à Venise », mars 2011.

([42])  Étude Kantar réalisée pour Française des jeux et Paris 2024, « Le sport au féminin », 2021.

([43])  Idem

([44])  Libération, « En France, seuls 38% des licenciés sportifs sont des licenciées », octobre 2018.

([45])  Concept sociologique développé par Monique Haicault à partir 1984, la charge mentale est définie comme « le travail d’organisation et de gestion de l’ensemble des activités essentielles à la vie domestique d’une famille, au quotidien et sur le moyen terme » selon Monique Haicault. « La charge mentale, son émergence et ses transformations, un cadre conceptuel d’analyse », 2021.

([46])  Étude Kantar réalisée pour Française des jeux et Paris 2024, « Le sport au féminin », 2021.

([47])  Ina sport, France 2, reportage du 25 juillet 2005 sur les Championnats du monde de natation à Montréal.

([48])  France Info, « Andy Murray, tennisman et féministe », juillet 2017.

([49])  RTL, « Orléans: une équipe de foot féminin va disparaître en faveur de l’équipe masculine », mai 2024.

([50]) Université de Cambridge, « Aesthetics over athletics when it comes to women in sport », août 2016.

([51])  Bissell, K. L., & Duke, A. M., “Bump, Set, Spike: An Analysis of Commentary and Camera Angles of Women’s Beach Volleyball During the 2004 Summer Olympics”, Journal of Promotion Management, 2007.

([52])  Europe 1, « Bartoli "pas canon", la BBC s'excuse », juillet 2013.

([53])  La D1 est le championnat de football féminin français de plus haut niveau. Elle est l’équivalent de la compétition masculine Ligue 1.

([54])  Sénat, Délégation aux droits des femmes, rapport d’information, « Mondial 2019 : Vive les footballeuses ! Un mois qui fera progresser l’égalité femmes-hommes », Mmes Annick Billon, Céline Boulay-Espéronnier, Victoire Jasmin et Christine Prunaud rapporteures, juin 2019.

([55])  France culture, « Football : les femmes valent-elles moins que les hommes », juin 2019.

([56]) France Info sport, « Lettre ouverte de l'équipe féminine de Brest pour dénoncer leur mauvais traitement : la direction va "mener un audit », avril 2024.

([57])  Typhaine Laurance a été championne de France dans la catégorie junior en 2015 et championne de France de poursuite par équipes en 2017. En octobre 2023, elle a annoncé arrêter sa carrière de cycliste à 25 ans, entre autres, pour des raisons économiques. Elle témoignait en ces termes : « Je n’ai jamais vraiment gagné ma vie. Au maximum j’étais à un petit Smic » auprès de Ouest France, « Cyclisme. Typhaine Laurance arrête le vélo : « J’avais mal au cœur, peur de décevoir mes proches », octobre 2023.

([58])  Selon les informations communiquées par les fédérations d’athlétisme et de volley ball aux rapporteurs.

([59])  FFF, Tout sur la Ligue féminine de foot professionnel, avril 2024.

([60])  Sénat, Délégation aux droits des femmes, rapport d’information, « Mondial 2019 : Vive les footballeuses ! Un mois qui fera progresser l’égalité femmes-hommes », Mmes Annick Billon, Céline Boulay-Espéronnier, Victoire Jasmin et Christine Prunaud rapporteures, juin 2019.

([61])  Selon les données de l’AFCAM.

([62])  Lucie Le Tiec, «  Les arbitres féminines sur la touche ? Conditions d’entrées et de déroulement de carrières des femmes arbitres de football », Marché et Organisations, l’Harmattan, 2016.

([63])  Ouest France, « TÉMOIGNAGES. Contraception et sport féminin : « On avait peur de prendre du poids avec la pilule », octobre 2021.

([64])  INSEP, « Sport au féminin : sportives de haut niveau : les cycles, les règles, la contraception et la performance », janvier 2022.

([65])  Idem

([66])  Ibid

([67])  Ouest France, « Football. L’UEFA lance une enquête sur les ligaments croisés dans le football féminin », décembre 2023.

([68])  Selon les données communiquées par la FEP à vos rapporteurs.

([69])  Selon les données communiquées par le réseau national des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation  à vos rapporteurs.

([70])  Voir page 43 pour plus de détails.

([71])  Sur ce point, voir page 70 pour plus de détails

([72])  Pouvant être traduit en français par : « accepte moi comme je suis ou regarde-moi partir ».

([73])  Pouvant être traduit en français par : « je me comporte comme une femme de mon âge ».

([74])  Campaign, “This girl can' moves from advertising to activism”, février 2017.

([75])  Agence nationale de la cohésion des territoires et Paris 2024, Guide du design actif, décembre 2021.

([76])  Idem

([77])  Étude Kantar réalisée pour Française des jeux et Paris 2024, « Le sport au féminin », 2021.

([78])  Selon les termes employés par l’arbitre de rugby Doriane Domenjo pour décrire les vestiaires qui lui sont régulièrement proposés.

([79])  Marie Portolano et Guillaume Priou, « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste », Canal + Sport, 2021.

([80])  ARCOM, « Analyse du poids des retransmissions de compétitions sportives féminines à la télévision entre 2018 et 2021 », janvier 2023.

([81])  Idem

([82])  ARCOM, « Analyse du poids des retransmissions de compétitions sportives féminines à la télévision entre 2018 et 2021 », janvier 2023.

([83])  Fédération internationale de football association (FIFA), Étude sur l’impact environnemental et socio-économique de la Coupe du Monde Féminine de la FIFA™ France 2019, février 2020.

([84])  Idem

([85])  ARCOM, « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - Rapport sur l'exercice 2023 », mars 2024

([86])  Selon les données communiquées par BeIN Sport à vos rapporteurs.

([87])  ARCOM, « Analyse du poids des retransmissions de compétitions sportives féminines à la télévision entre 2018 et 2021 », janvier 2023.

([88])  ARCOM, « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - Rapport sur l'exercice 2023 », mars 2024.

([89])  ARCOM, « La représentation des femmes à la télévision et à la radio - Rapport sur l'exercice 2023 », mars 2024.

([90])  Marie Portolano et Guillaume Priou, « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste », Canal + Sport, 2021.

([91])  Comme elle l’explique dans le documentaire de Marie Portolano et Guillaume Priou, « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste », Canal + Sport, 2021.

([92])  Idem

([93])  Marie-George Buffet, Discours lors des Assises nationales « Femmes et sport » en sa qualité de ministre de la jeunesse et des sports, Paris, mai 1999.

([94])  Selon les données communiquées par Annabelle Caprais aux rapporteurs.

([95])  Egal Sport, « L’œil d’Egal Sport : 2024 – le défi de la parité pour les fédérations sportives », 2024.

([96])  Par ailleurs, la loi de 2014 confie au Conseil supérieur de l’audiovisuel, ancêtre de l’ARCOM, la mission de lutter contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes et pose de nouvelles obligations pour les chaînes de télévision et de radio. Les chaînes doivent notamment transmettre des indicateurs quantitatifs et qualitatifs sur la représentation des femmes dans les antennes. Ce sont précisément ces éléments, analysés dans la partie précédente, qui nous permettent de confirmer la faible visibilité du sport féminin dans les médias.

([97])  Voir page 62 pour plus de détails

([98])  Béatrice Barbusse, Du sexisme dans le sport, Anamosa, 2022.

([99])  Terme employé par Béatrice Barbusse et Annabelle Caprais.

([100])  Béatrice Barbusse, Du sexisme dans le sport, Anamosa, 2022.

([101]) Selon l’article L ; 1142-2-1 du code du travail, l’agissement sexiste se définit comme « tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».  

([102])  Egal Sport, « L’œil d’Egal Sport : 2024 – le défi de la parité pour les fédérations sportives », 2024.

([103])  Assemblée nationale, Rapport de la commission d’enquête relative à l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif en tant qu’elles ont délégation de service public, Mme Béatrice Bellamy présidente et Mme Sabrina Sebaihi rapporteure, tome I, décembre 2023.

([104])  Assemblée nationale, Rapport de la commission d’enquête relative à l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif en tant qu’elles ont délégation de service public, Mme Béatrice Bellamy présidente et Mme Sabrina Sebaihi rapporteure, tome I, décembre 2023.

([105])  Proposition n° 9 du rapport « Pour un sport plus démocratique, plus éthique et plus protecteur » du Comité national pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport, Mme Marie-George Buffet et M. Stéphane Diagana, présidents, décembre 2023.

([106])  Idem, proposition n° 10.

([107])  Annabelle Caprais, « La place et le rôle des femmes dans la gouvernance des fédérations sportives françaises », Université de Bordeaux, 2020.

([108])  Selon les données fournies par Annabelle Caprais à vos rapporteurs.

([109])  Selon les données fournies par Annabelle Caprais à vos rapporteurs.

([110])  Voir page 30 sur le faible niveau de rémunération des sportives de haut niveau

([111])  Vos rapporteurs signalent un biais ponté par Annabelle Caprais dans sa thèse : l’essentiel des travaux scientifiques de sociologie du sport se concentre sur les femmes ayant effectivement exercé des postes à responsabilité dans le monde sportif. De ce fait, il existe peu de données sur les femmes s’étant simplement porté candidates. Il serait donc intéressant de disposer de davantage de données sur le parcours de ces femmes et les circonstances de leurs défaites afin d’accroître leurs chances de réussite.

([112])  Béatrice Barbusse, Du sexisme dans le sport, Anamosa, 2022.

([113])  Vos rapporteurs notent toutefois que le CNOSF ne donne pas l’exemple : sur les 49 membres du conseil d’administration, seuls 16 sont des femmes.

([114])  Voir page 70 pour plus de détails

([115])  Voir page 70 pour plus de détails

([116])  Le Monde, « Le rebond attendu des fonds sports », mars 2024.

([117])  Deloitte Insights, « Women’s elite sports: Breaking the billion-dollar barrier », novembre 2023.

([118])  Idem

([119])  Ibid

([120])  Ibid

([121])  Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, « Salaires : 5 ans après l’index, toujours pas d’égalité. Des propositions pour améliorer l’outil », mars 2024.

([122])  Tel que cité par Deloitte Insights, « Women’s elite sports: Breaking the billion-dollar barrier », novembre 2023.

([123])  Sporsora, Baromètre du sport féminin - Rôles modèles & marques partenaires, avril 2024.

([124])  Pour plus de détails, voir : Assemblée nationale, Délégation aux droits des femmes et à l’égalité entre les hommes et les femmes,

([125])  Assemblée nationale, rapport de la mission d’information commune sur la conditionnalité des aides publiques aux entreprises, M. Stéphane Viry, président, M. Saïd Ahamada, Mme Barbara Bessot Ballot, M. Dominique Da Silva et Mme Laurianne Rossi, rapporteurs, mars 2021.

([126])  France Inter, « Qu'est-ce que « l'égaconditionnalité », concept promu pour atteindre l'égalité femmes-hommes ? », juin 2022.

([127])  Recommandation n° 6 de l’Assemblée nationale, Rapport de la commission d’enquête relative à l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif en tant qu’elles ont délégation de service public, Mme Béatrice Bellamy présidente et Mme Sabrina Sebaihi rapporteure, tome I, décembre 2023.

 

([128])  Selon les données communiquées par l’ANS à vos rapporteurs.