N° 2737

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 mai 2024.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, dE L’Économie gÉnÉrale
et du contrÔLE BUDGÉTAIRE

 

sur le crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo

 

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Denis MASSÉGLIA,
rapporteur spécial

 

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SOMMAIRE

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Pages

Synthèse du rapport et des principales préconisations

Liste des PrÉconisations

Introduction

I. Le crÉdit d’impÔt jeux vidÉo : un outil efficace et adaptÉ pour soutenir la crÉation et le dÉveloppement des entreprises de jeux vidÉo en France

A. Le crÉdit d’impÔt jeux vidÉo permet aux entreprises de crÉation de dÉduire de leur impÔt une partie de leurs dÉpenses de production

1. Le crédit d’impôt jeux vidéo est un dispositif fiscal de soutien des dépenses de création et de production des jeux vidéo

2. L’obtention du crédit d’impôt est conditionnée par le respect de différents barèmes, sur validation d’un comité d’experts

B. Le crÉdit d’impÔt jeux vidÉo s’insÈre dans un ensemble complÉmentaire d’aides au bÉNÉfice de la crÉation française de jeux vidÉo sur l’ensemble du territoIRE

1. Le crédit d’impôt jeux vidéo soutient l’activité économique du secteur et renforce la localisation des dépenses sur le territoire

2. Le crédit d’impôt jeux vidéo s’insère dans un ensemble d’aides complémentaires en faveur de la filière française de jeux vidéo

II. Une pÉRENnisation du crÉdit d’impÔt est indispensable pour maintenir la compÉTITIVITÉ française À condition de LE faire Évoluer pour l’adapter aux nouvelles rÉALITÉs du secteur

A. La PROLONGATION au-delÀ de 2026 du crÉdit d’impÔt est nÉcessaire pour permettre la consolidation d’une filiÈre française attractive

1. La pérennisation du crédit d’impôt au-delà de 2026 doit permettre de poursuivre la consolidation d’une filière française d’excellence sans hausse de pression fiscale

2. La concurrence internationale reste particulièrement forte dans le secteur, justifiant le maintien du dispositif : les cas particuliers du Canada, du Royaume-Uni et de l’Allemagne

B. La NÉCESSITÉ de faire Évoluer le crÉdit d’impÔt pour tenir compte des nouvelles rÉALITÉs de la crÉation et du dÉveloppement de jeux vidÉo

1. Une évolution des modalités d’application du plafond et de la durée d’éligibilité sont nécessaires pour permettre aux entreprises de faire face à l’augmentation des coûts et de la durée de production

2. La prise en compte de certaines dépenses de promotion, de prototypage et de l’émergence des games as a service pourraient également être envisagée

Conclusion

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Annexe  1 : Liste des personnes auditionnÉes  par le Rapporteur spÉcial

ANNEXE  2 : DÉPLACEMENT À BORDEAUX DU 16 MAI 2024 VISITE DES STUDIOS SHIRO GAMES ET ASOBO

 

 

 

 


   Synthèse du rapport et des principales
préconisations

Le crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo (CIJV), créé initialement en 2007 et profondément réformé en 2017, constitue aujourd’hui le principal dispositif de soutien à la création de jeux vidéo en France, la réforme de 2017 ayant multiplié le montant de la dépense fiscale de 13 millions d’euros en 2016 à 66 millions d’euros en 2023. Le nombre de jeux vidéo bénéficiant du CIJV a aussi considérablement augmenté, atteignant 144 jeux vidéo soutenus en 2023, soit presque le quadruple du nombre recensé en 2016. Cette dynamique est également illustrée par l’augmentation substantielle du budget total des jeux vidéo éligibles, qui est passé de 95 millions d’euros en 2016 à 348 millions d’euros en 2023.

Le CIJV est par ailleurs très largement réparti sur l’ensemble du territoire avec l’émergence de véritables pôles régionaux du jeu vidéo. En dehors de l’Île-de-France, les régions les plus dynamiques sont l’Auvergne-Rhône-Alpes (31,5 millions d’euros de dépenses sur son territoire en 2023), la Nouvelle-Aquitaine (13,1 millions d’euros de dépenses en 2023) et l’Occitanie (7,0 millions d’euros de dépenses en 2023). D’après l’Observatoire de l’emploi du jeu vidéo édité en 2023 par l’Agence française pour le jeu vidéo (AFJV), ce sont également ces régions (hors Île-de-France) qui accueillent le plus d’entreprises de l’industrie du jeu vidéo (13 % de la filière pour l’Auvergne-Rhône-Alpes, 9 % pour l’Occitanie et 8 % pour la Nouvelle-Aquitaine).

Cette dynamique positive sur l’ensemble du territoire a ainsi permis à la France de se positionner comme un acteur compétitif et innovant sur la scène internationale du jeu vidéo : selon le bilan annuel du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL), le chiffre d’affaires du jeu vidéo représente 6,1 milliards d’euros en 2023. La France est ainsi devenue une terre de studios de développement avec 600 studios et 1 257 jeux en cours de production selon le baromètre 2023 du Syndicat national des jeux vidéo (SNJV). Ce dernier révélait que 85 % des entreprises interrogées considèrent que la France est un territoire attractif pour l’industrie du jeu vidéo, et que les facteurs d’attractivité les plus fréquemment cités sont en premier lieu les dispositifs fiscaux (31 %), puis la qualité des formations (23 %) et la qualité de vie française (22 %).

Dans ce contexte, le présent rapport s’est attaché à évaluer les retombées économiques du CIJV dans un contexte de forte concurrence internationale, à examiner les conditions fiscales de sa mise en œuvre et les propositions formulées par les parties prenantes visant à optimiser son efficacité. Elle s’inscrit dans une démarche objective d’évaluation en vue, le cas échéant, d’une nouvelle prolongation du CIJV au-delà de 2026 et d’une adaptation de ce dernier aux nouvelles réalités économiques et industrielles du secteur.

I. Le crédit d’impôt jeux vidéo est un dispositif fiscal de soutien des dépenses de développement des jeux vidéo, dont l’obtention et le versement sont assurés par l’administration

Le CIJV bénéficie aux développeurs de jeux vidéo sur console, téléphone mobile, ordinateur, qu’ils soient des filiales ou des studios indépendants, et plus généralement toute entreprise productrice du jeu vidéo au titre des dépenses pour la création de jeux vidéo. Le crédit d’impôt est égal à 30 % du total des dépenses éligibles dans la limite de 6 millions d’euros par exercice et par entreprise. Les dépenses éligibles englobent l’intégralité des dépenses de développement d’un jeu vidéo pour une entreprise. Elles sont prises en compte à partir de la date de réception d’une demande d’agrément provisoire et pour les dépenses exposées au cours d’une période de trente-six mois précédant la date de délivrance de l’agrément définitif.

Pour bénéficier du CIJV, les jeux vidéo doivent faire l’objet d’un agrément provisoire puis définitif délivré par un comité d’experts constitué notamment du Centre national du cinéma et de l’imagine animée (CNC) et de la Direction générale des entreprises (DGE). L’enjeu de cet agrément est tout particulièrement d’assurer le respect des barèmes relatifs aux « auteurs et collaborateurs de création », à la « contribution au développement de la création » et à la « contextualisation de la violence ». L’agrément définitif doit être délivré dans un délai de trente-six mois ou, pour les jeux dont le coût de développement est supérieur à 10 millions d’euros, de soixante-douze mois à compter de la délivrance de l’agrément provisoire et après l’achèvement du jeu, sous réserve que les conditions de création du jeu vidéo respectent toujours les conditions d’éligibilité.

Si la réforme du CIJV – en 2017 – et celle du barème permettant de délivrer l’agrément – en 2022 – sont globalement bien acceptées par le secteur des jeux vidéo, le rapporteur spécial note que plusieurs studios ont évoqué être confrontés à des délais de versement du crédit d’impôt par l’administration fiscale parfois très importants. En effet, celle-ci est chargée de faire appliquer le crédit d’impôt sur les résultats imposables de l’entreprise et de verser les sommes éventuellement dues. Le rapporteur spécial préconise dès lors de créer un guichet unique du CIJV au sein de l’administration fiscale qui permettrait de réduire les délais en regroupant les services compétents sous une seule entité nationale.

II. La pérennisation au-delà de 2026 jusqu’en 2031 du crédit d’impôt est indispensable pour maintenir la compétitivité française

La loi de finances pour 2023 a procédé au « bornage » temporel du CIJV en limitant ce dernier aux dépenses engagées jusqu’au 31 décembre 2026, sans revenir sur les engagements déjà pris. Le rapporteur spécial rappelle qu’il ne s’agit en rien d’une date d’extinction différée du crédit d’impôt, mais davantage d’une obligation d’évaluation préalable du CIJV par rapport à ses objectifs initiaux, comme c’est le cas pour d’autres crédits d’impôt culturels.

Bien que la mesure de l’impact structurel du CIJV depuis sa mise en place soit difficile, elle peut être objectivée à travers un faisceau d’indices depuis la réforme importante de 2017, en observant une conjonction de facteurs dont le CIJV n’est pas l’unique cause, mais qu’il peut expliquer en partie : développement des studios et de l’emploi, émergence de studios de taille intermédiaire, développement en France de grands projets internationaux et reconnaissance du savoir-faire français à l’international. Plusieurs études viennent conforter et objectiver cette analyse :

– l’étude PIPAME, publiée en 2021, conduite par la DGE, le CNC, le SELL et le SNJV, et portant sur le tissu économique et la compétitivité de l’industrie du jeu vidéo en France, met en avant le fait que le poids de l’industrie a été multiplié par 2,5 en dix ans, correspondant à un taux de croissance annuelle moyen de 9 %, et que le nombre d’entreprises (studios et éditeurs) est passé de 224 en 2008 à 550 en 2018. L’étude estime que le chiffre d’affaires de l’industrie (studios et éditeurs) est passé de 2,4 milliards en 2010 à 3,9 milliards d’euros en 2018 (830 millions d’euros pour les studios – soit un doublement en dix ans) ;

– l’étude commandée par le CNC et publiée en 2023 estime qu’entre 2012 et 2021, plus de 5 600 ETP ont été créés dans le secteur du jeu vidéo, correspondant à plus de 7 000 effectifs, ce qui porte l’ensemble des emplois direct et indirect du secteur à 10 068 ETP, soit 13 800 effectifs salariés, en 2021 (multiplication par presque deux des effectifs en dix ans) ;

– l’étude commandée par le SNJV et le SELL en 2023 sur l’impact direct du CIJV sur l’emploi de l’industrie du jeu vidéo met en avant le fait que la réforme de 2017 a permis de créer ou de sauvegarder environ 2 500 emplois en France, ce qui représente 32 % des emplois dans le secteur en 2020 (emploi estimé à 8 000 en 2020 selon les données Eurostat, en hausse de 260 % depuis 2016, alors que, sur la même période, l’emploi dans le secteur a crû de 67 % en moyenne dans les autres pays européens).

Par ailleurs, le secteur du jeu vidéo a la particularité d’être très fortement exposé à la concurrence internationale, avec des effets rapides de délocalisation des productions et d’expatriation des talents dans le cas où le territoire français perdrait en attractivité. La concurrence est particulièrement forte avec le Québec où le taux du crédit d’impôt pour des titres multimédias atteint 37,5 % des dépenses de main-d’œuvre pour une production disponible en version française, sans aucun plafond applicable sur le montant attribué. Le Royaume-Uni a mis en place cette année un nouveau dispositif qui prendra la forme d’un crédit d’impôt à hauteur de 34 % des dépenses éligibles. De l’autre côté du Rhin, depuis 2020, l’Allemagne a instauré un fonds fédéral de subvention qui permet de couvrir entre 25 % et 50 % des dépenses des prototypes ou de production de jeux vidéo.

Aussi, au regard du contexte de très forte concurrence internationale ainsi que des effets positifs du dispositif fiscal pour l’économie et la création françaises, le rapporteur spécial estime qu’il est impératif de prolonger le crédit d’impôt jeux vidéo au-delà de 2026, au moins jusqu’en 2031. Cette extension substantielle fournira une visibilité et une sécurité financières aux studios de jeux vidéo, essentiels pour cette industrie aux cycles de production longs et aux besoins en capital importants.

III. La nécessité de faire évoluer le crédit d’impôt pour tenir compte des nouvelles réalités de la création et du développement de jeux vidéo

Le secteur du jeu vidéo évolue au rythme des innovations technologiques qui touchent très directement les processus créatifs ainsi que les modèles de commercialisation des jeux. Parmi l’ensemble des industries culturelles et créatives, le secteur du jeu vidéo est sans doute le plus innovant, tant la capacité d’anticiper ou de s’adapter aux évolutions stratégiques, d’usage ou de marché, conditionne son existence même. Dans ce contexte, le rapporteur spécial préconise plusieurs modifications du dispositif dans le cadre de sa prolongation :

 l’allongement de la durée d’éligibilité de 3 à 5 ans pour les projets dont le budget est supérieur à 5 millions d’euros, du fait de l’augmentation de la durée de développement des jeux vidéo. En effet, alors qu’un jeu mobile peut être développé en quelques mois seulement, le développement de la plupart des jeux vidéo modernes pour ordinateurs ou consoles prend de trois à cinq ans. L’intégralité des acteurs rencontrés estime aujourd’hui la durée du CIJV en déconnexion avec la réalité du temps de production dans l’industrie du jeu vidéo, conduisant les acteurs à se mettre en difficulté et à s’exposer au risque de commercialiser des jeux incomplets ;

 l’augmentation du plafond actuel du crédit d’impôt de 6 à 10 millions d’euros par entreprise et par exercice afin de renforcer l’attractivité du territoire, avec un plafond calibré sur les budgets des plus grandes productions internationales, et d’encourager le passage à l’échelle supérieure de studios proches du plafond actuel par entité juridique ;

 la possibilité de déposer une demande d’agrément complémentaire de 2 ans à l’issue de la période applicable à la demande initiale du crédit d’impôt pour prendre en compte le développement depuis quelques années du « jeu vidéo en tant que service » (game as a service). Contrairement aux biens culturels classiques, le développement des jeux vidéo se poursuit bien souvent au-delà de leur date de sortie initiale. Cette demande complémentaire ferait l’objet d’une instruction spécifique du CNC pour en assurer la pertinence en fonction du modèle économique du jeu, du développement de contenu additionnel et du respect des barèmes applicables ;

 l’élargissement de l’assiette du crédit d’impôt jeux vidéo aux dépenses de prototypage réalisées au cours des six mois précédant la demande d’agrément provisoire. Ces coûts sont essentiels au développement du jeu et aident à présenter un dossier solide, respectant les critères culturels du CNC. Cela donnerait aux studios plus de flexibilité et de temps pour déposer des projets aboutis.


   Liste des PrÉconisations

Recommandation  1 : Créer un guichet unique pour le crédit d’impôt au sein de l’administration fiscale pour simplifier et accélérer les paiements aux studios de jeux vidéo. Cela permettrait de réduire les délais, parfois supérieurs à 18 mois, en regroupant les services compétents sous une seule entité nationale.

Recommandation  2 : Prolonger le crédit d’impôt jeux vidéo au-delà de 2026 au moins jusqu’en 2031. Cette extension substantielle fournirait une visibilité et une sécurité financières aux studios de jeux vidéo, essentiels pour cette industrie aux cycles de production longs et aux besoins en capital importants.

Recommandation  3 : Élever le plafond actuel du crédit d’impôt de 6 à 10 millions d’euros par entreprise et par exercice pour attirer davantage de productions « AAA ». Il s’agit de renforcer l’attractivité du territoire avec un plafond calibré sur les budgets des plus grandes productions internationales et d’encourager le passage à l’échelle supérieure de studios proches du plafond actuel par entité juridique.

Recommandation  4 : Étendre la période du crédit d’impôt de 3 à 5 ans, le cas échéant uniquement pour les jeux dont le budget est supérieur à 5 millions d’euros, reflétant ainsi la durée accrue du développement des jeux vidéo.

Recommandation  5 : Permettre le dépôt d’une demande d’agrément complémentaire de 2 ans à l’issue de la période applicable à la demande initiale du crédit d’impôt. Cette demande ferait l’objet d’une instruction spécifique du CNC pour en assurer la pertinence en fonction du modèle économique du jeu, du développement de contenu additionnel et du respect des barèmes applicables. La mesure permettrait d’adapter le CIJV à la tendance du marché où la production d’un jeu peut se poursuivre après la date de commercialisation initiale.

Recommandation  6 : Permettre aux entreprises d’inclure dans l’assiette du crédit d’impôt jeux vidéo les dépenses de prototypage des six mois précédant la demande d’agrément provisoire. Ces coûts sont essentiels au développement du jeu et aident à présenter un dossier solide, respectant les critères culturels du CNC. Cela donnerait aux studios plus de flexibilité et de temps pour déposer des projets aboutis.

 

 

 


   Introduction

Dans le cadre des travaux du « Printemps de l’évaluation » de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, le rapporteur spécial s’est vu confier une mission d’évaluation spécifique sur le crédit d’impôt en faveur des entreprises de création de jeux vidéo (CIJV). Si ce dernier est officiellement rattaché au programme 134 Développement des entreprises et régulations de la mission Économie, ses objectifs sont pleinement complémentaires des actions mises en œuvre dans le cadre de la mission Médias, livres et industries culturelles. Cette dualité budgétaire, entre ministère de l’économie et ministère de la Culture, entre outil d’attractivité économique et outil de création artistique, constitue d’ailleurs l’une des spécificités de ce crédit d’impôt, piloté à la fois par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) et par la direction générale des entreprises (DGE).

Le CIJV, créé initialement en 2007 et profondément réformé en 2017, constitue aujourd’hui le principal dispositif de soutien à la création de jeux vidéo en France, la réforme de 2017 ayant multiplié le montant du dispositif de 13 millions d’euros en 2016 à 66 millions d’euros en 2023. Le nombre de jeux vidéo bénéficiant du CIJV et générant des dépenses éligibles au cours de l’année a aussi considérablement augmenté, atteignant 144 jeux vidéo soutenus en 2023, soit presque le quadruple du nombre recensé en 2016. Cette dynamique est également illustrée par l’augmentation substantielle du budget total des jeux vidéo éligibles, qui est passé de 95 millions d’euros en 2016 à 348 millions d’euros en 2023. Depuis la création du CIJV, le total des budgets de production des jeux ayant bénéficié d’un agrément provisoire au titre du CIJV est de près de 2,6 milliards d’euros.

Au-delà de ces chiffres, il convient de mettre en perspective le coût pour les finances publiques de ce dispositif fiscal par rapport à ses objectifs de développement économique et culturel de l’industrie des jeux vidéo en France, favorisant par ce biais la création de nouvelles entreprises et l’implantation de studios étrangers sur le territoire. Cette dynamique positive a ainsi permis à la France de se positionner comme un acteur compétitif et innovant sur la scène internationale du jeu vidéo : selon le bilan annuel du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL), le chiffre d’affaires du jeu vidéo représente 6,1 milliards d’euros en 2023 (à comparer aux 5,5 milliards d’euros en 2022 et aux 5,6 milliards d’euros de 2021). La France est ainsi devenue une terre de studios de développement avec 600 studios et 1 257 jeux en cours de production selon le baromètre 2022 du Syndicat national des jeux vidéo (SNJV). Ce dernier révélait que 85 % des entreprises interrogées considèrent que la France est un territoire attractif pour l’industrie du jeu vidéo, et que les facteurs d’attractivité les plus fréquemment cités sont les dispositifs fiscaux (31 %), la qualité des formations des organismes de formation (23 %) et la qualité de vie française (22 %).

Si ces chiffres remarquables reposent sur des bases structurelles solides et illustrent l’importance du CIJV pour le secteur du jeu vidéo en France, ce dernier fait remonter des signaux d’incertitude conjoncturelle pour 2024. En effet, la période postérieure à la crise sanitaire a été bénéfique à la production de jeux vidéo, probablement en raison de la dynamique de consommation et de l’abondance de capitaux disponibles. Toutefois, un effet correctif se fait observer depuis 2023, comme en témoignent les nombreux plans de licenciement observés à l’échelle mondiale.

Dans ce contexte, le présent rapport s’est attaché à évaluer les retombées économiques et sociales du CIJV dans un contexte de forte concurrence internationale, à examiner les conditions fiscales de sa mise en œuvre et les propositions formulées par les parties prenantes et visant à optimiser son efficacité. Elle s’inscrit dans une démarche objective d’évaluation en vue, le cas échéant, d’une nouvelle prolongation du CIJV au-delà de 2026 et d’une adaptation de ce dernier aux nouvelles réalités économiques du secteur.

 


I.   Le crÉdit d’impÔt jeux vidÉo : un outil efficace et adaptÉ pour soutenir la crÉation et le dÉveloppement des entreprises de jeux vidÉo en France

Le crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo (CIJV) visait lors de sa création en 2007 non seulement à améliorer l’attractivité et la compétitivité des studios français en réduisant les coûts de production dans un secteur facilement délocalisable (principalement pour faire face à la concurrence nord-américaine du Canada), mais aussi à stimuler la production de jeux européens ambitieux, tant d’un point de vue culturel qu’industriel. Ces deux objectifs gardent encore toute leur pertinence aujourd’hui. Avec un soutien financier annuel qui oscille entre 40 et 60 millions d’euros, le CIJV s’impose désormais comme le principal dispositif de soutien à la filière, de manière complémentaire avec le fonds d’aide aux jeux vidéo (FAJV) et les aides régionales.

A.   Le crÉdit d’impÔt jeux vidÉo permet aux entreprises de crÉation de dÉduire de leur impÔt une partie de leurs dÉpenses de production

1.   Le crédit d’impôt jeux vidéo est un dispositif fiscal de soutien des dépenses de création et de production des jeux vidéo

Le CIJV a été initialement créé par la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur ([1]), à la suite de l’adoption en séance publique à l’Assemblée nationale d’un amendement déposé par MM. Frédéric Soulier et Patrick Ollier ([2]). Il visait, selon les auteurs de l’amendement, à « défendre une politique de soutien à l’industrie des jeux vidéo qui s’inscrit dans le cadre du maintien de la diversité culturelle » en créant « un mécanisme de crédit d’impôt spécifique à la production des jeux vidéo afin, d’une part, de maintenir et de développer les entreprises en particulier les PME et les TPE de ce secteur, qui sont les meilleurs gisements d’emplois et de diversité culturelle et, d’autre part, de favoriser la diversité et la richesse de l’offre ».

Pour justifier l’existence d’une telle mesure, les auteurs de l’amendement soulignaient, d’une part, l’existence d’une « concurrence accrue dans un marché mondial en fort développement » dans lequel « l’industrie française des jeux vidéo doit pouvoir reprendre sa place de premier rang » et, d’autre part, un secteur subissant une crise inquiétante du fait d’une hausse « de 50 % des coûts de production » : « par rapport à 1994, il y a en 2005 deux fois moins d’emplois (12 000 contre 25 000) et quatre fois moins de studios ». Le crédit d’impôt a ainsi été créé en réponse à une situation critique de l’industrie française du jeu vidéo fortement fragilisée après l’explosion de la bulle internet et par la concurrence internationale. En pratique, la filière ne parvenait pas à enrayer la dynamique de destruction d’emplois (le CNC estime que 2 emplois sur 3 ont disparu au tournant des années 2000), conduisant à une véritable fuite des talents et à un affaiblissement de la capacité de production et d’innovation des studios.

Afin de mettre le dispositif en cohérence avec les résultats des discussions du Gouvernement français avec la Commission européenne, la loi de finances rectificative pour 2007 ([3]) a par la suite modifié le dispositif pour en renforcer la dimension culturelle : pour être éligible, un projet doit désormais « contribuer au développement de la création française et européenne en matière de jeux vidéo ainsi qu’à sa diversité en se distinguant notamment par la qualité, l’originalité ou le caractère innovant de son concept ». Le texte, adopté par amendement d’origine parlementaire au Sénat, prévoit que « ces modalités reposeront sur une grille de critères assortie d’un barème de points et validée par la Commission européenne » ([4]).

Cet objectif culturel est d’autant plus important car il conditionne en effet l’acceptation par la Commission européenne d’une dérogation au titre des aides d’État au sens de l’article 107 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Sur ce point, la Commission européenne estime que « les autorités françaises ont élaboré des critères nationaux vérifiables permettant de garantir que le contenu des jeux vidéo éligibles au titre du crédit d’impôt est véritablement culturel et que la mesure d’aide remplit donc un objectif réel de promotion de la culture ». Elle précise également « que le barème mis en place est très sélectif et met l’accent sur des éléments de création culturelle originelle » et « que le crédit d’impôt, tel qu’il a été conçu, permet effectivement de diriger le soutien public vers les jeux à contenu culturel et qu’à ce titre, il apparaît comme étant un outil approprié » ([5]) qui respecte les règles du marché intérieur.

Le dispositif prévoyait alors une réduction fiscale à hauteur de 20 % des dépenses éligibles (soit directement affectées à la création d’un jeu), dans la limite de 3 millions d’euros par entreprise et par an, ainsi qu’un encadrement des jeux éligibles au moyen de deux barèmes de points : d’une part, un barème dit « européen » permettant de s’assurer que la majorité de la production s’effectue avec des collaborateurs européens et, d’autre part, un barème dit « culturel » évaluant la dimension créative du jeu sur la base de critères relatifs à la narration, à l’innovation ou encore au patrimoine européen. Du fait de l’application de ces critères, le CNC estime que 10 à 20 % de la production annuelle de jeux vidéo bénéficiaient alors du dispositif.

En continuelle évolution dans un environnement fortement compétitif, le CIJV a connu trois grandes réformes successives :

– à compter de 2015, la loi de finances rectificative pour 2013 ([6]) a abaissé le budget de production minimum d’éligibilité de 150 000 euros à 100 000 euros, allongé les délais maximums d’agrément à trente-six mois tout en élargissant le crédit d’impôt aux jeux classés « PEGI 18+ ». Cette mesure a permis de faire entrer dans le champ du dispositif des jeux qui font partie des productions les plus ambitieuses telles que Assassin’s Creed d’Ubisoft ou Dishonored d’Arkane. Les jeux « comportant des séquences à caractère pornographique ou de très grande violence » et « spécifiquement destinés à un public d’adultes » sont désormais soumis à un nouveau « barème de contextualisation de la violence » ;

– à compter de 2017, la loi de finances pour 2017 ([7]) a augmenté le taux de défiscalisation de 20 à 30 %, le plafond du crédit d’impôt de 3 à 6 millions d’euros par entreprise et par an et le montant maximal de sous-traitance européenne annuelle éligible de 1 à 2 millions d’euros. Ces revalorisations très significatives visaient pour les auteurs des amendements à réduire l’écart de compétitivité avec certains pays qui renforçaient ou lançaient des dispositifs fiscaux particulièrement attractifs (Canada, Royaume-Uni, Singapour). Les auteurs de l’amendement, adopté à l’Assemblée nationale, affirmaient en effet qu’il « apparaît que le crédit d’impôt jeux vidéo n’est plus aujourd’hui compétitif au regard des autres pays producteurs, qu’ils soient dotés ou non de dispositifs de soutiens (coûts de production de + 20 à 30 % par rapport aux USA et au Canada, + 25 % par rapport au Royaume-Uni) » et que « le renforcement de la compétitivité du CIJV apparaît donc nécessaire afin de préserver le dynamisme de ce secteur porteur de croissance et d’emploi » ([8]) ;

– enfin, à compter de 2022, le barème culturel a été révisé par décret ([9]) dans le sens d’une modernisation des critères artistiques et des critères d’innovation. Cette réforme visait à permettre de mieux correspondre aux caractéristiques actuelles des jeux vidéo, de simplifier son mode de fonctionnement (barème sur 20 points au lieu de 24 points) et d’accroître la lisibilité et la prévisibilité du dispositif par la reformulation de critères parfaitement objectivables et bien définis.

Ainsi, à la suite de l’ensemble de ces modifications successives, l’article 220 terdecies du code général des impôts (CGI) dispose désormais que le CIJV bénéficie aux développeurs de jeux vidéo sur console, téléphone mobile, ordinateur, qu’ils soient des filiales ou des studios indépendants, et plus généralement toute entreprise productrice du jeu vidéo, soumise à l’impôt sur les sociétés au titre des dépenses pour la création de jeux vidéo.

Pour être éligible, le projet doit avoir un coût de développement supérieur ou égal à 100 000 euros et le jeu doit être destiné à une commercialisation effective auprès du public. Il ne devra également pas comporter de séquences à caractère pornographique ou de très grande violence, susceptibles de nuire gravement à l’épanouissement physique, mental ou moral des utilisateurs (sauf pour les jeux destinés à un public d’adultes et qui sont commercialisés comme tels, dès lors que leur contribution au développement et à la diversité de la création française et européenne présente un niveau particulièrement significatif). Les jeux éligibles seront sélectionnés sur la base de critères culturels et d’originalité (barème « contribution au développement de la création »), ainsi que sur le degré de participation de collaborateurs de création européens (barème « auteurs et collaborateurs de création »).

Le crédit d’impôt est égal à 30 % du total des dépenses éligibles, dans la limite de 6 millions d’euros par exercice et par entreprise (le montant et le plafond du crédit d’impôt sont calculés au niveau de chaque société membre d’un groupe). Les dépenses éligibles sont larges et englobent l’intégralité des dépenses de développement d’un jeu vidéo pour une entreprise : les dotations aux amortissements des immobilisations (et non des immeubles) ; les rémunérations versées aux auteurs ayant participé à la création du jeu vidéo ; les dépenses de personnel relatives aux salariés de l’entreprise affectés directement à la création du jeu vidéo et les dépenses salariales des personnels techniques et administratifs qui y concourent ; les autres dépenses de fonctionnement (achats de matières, fournitures et matériels, loyers des immeubles, frais d’entretien et de réparation, frais de voyage et de déplacement, frais de documentation technique ; frais de communication électronique) ; les dépenses de sous-traitance réalisées par des organismes européens, dans la limite de 2 millions d’euros par exercice. Les dépenses éligibles sont toutes celles engagées à compter de la date de réception d’une demande d’agrément provisoire et dans la limite de trente-six mois.

2.   L’obtention du crédit d’impôt est conditionnée par le respect de différents barèmes, sur validation d’un comité d’experts

Pour bénéficier du CIJV, les jeux vidéo doivent faire l’objet d’un agrément provisoire puis définitif délivré par un comité d’experts constitué notamment du Centre national du cinéma et de l’imagine animée (CNC) et de la Direction générale des entreprises (DGE). L’enjeu de cet agrément est tout particulièrement d’assurer le respect des barèmes relatifs aux « auteurs et collaborateurs de création », à la « contribution au développement de la création » et à la « contextualisation de la violence ».

À cette fin, le CNC a la responsabilité de délivrer aux entreprises de création de jeux vidéo deux agréments :

– un agrément provisoire attestant que le jeu vidéo devrait satisfaire toutes les conditions d’éligibilité lui permettant de bénéficier du crédit d’impôt, notamment au regard du barème de points ;

– un agrément définitif, délivré dans un délai de trente-six mois ou, pour les jeux dont le coût de développement est supérieur à 10 millions d’euros, de soixante-douze mois à compter de la délivrance de l’agrément provisoire et après l’achèvement du jeu, sous réserve que les conditions de création du jeu vidéo respectent toujours les conditions d’éligibilité. En cas de dépassement du délai de trente-six mois pour l’obtention de l’agrément définitif pour les jeux dont le coût de développement est supérieur à 10 millions d’euros, le crédit d’impôt est calculé au titre des dépenses exposées antérieurement à la période de trente-six mois qui précède la date de délivrance de l’agrément définitif (article 220 X du CGI).

C’est à l’occasion de la demande par l’entreprise de son agrément définitif que le CNC va être amené à contrôler à deux niveaux la réalisation du projet et sa conformité :

– l’ensemble des documents administratifs (notamment justifiant les dépenses) sont fournis par l’entreprise et vérifiés : cela permet de vérifier également si certains critères du barème liés à des montants de dépenses ont été respectés (pourcentage de dépense artistique, hauteur du budget de la création musicale originale, etc.) ;

– le jeu respecte les conditions prévues par la loi (et notamment qu’il s’agit bien d’une première version commercialisable) et les points obtenus dans le cadre du barème culturel au moment de l’agrément provisoire sont bien conformes au résultat final. L’ensemble des critères du barème (création originale, innovations, etc.) sont donc réexaminés à cette occasion.

Le jeu vidéo pour lequel le bénéfice du crédit d’impôt est demandé est évalué par un comité d’experts qui s’assure uniquement du respect des différents barèmes en vigueur, afin de s’assurer que le jeu vidéo :

– est réalisé principalement avec le concours d’auteurs et de collaborateurs de création qui sont soit de nationalité française, soit ressortissants d’un autre État européen. Les étrangers, autres que les ressortissants européens, ayant la qualité de résidents français, sont assimilés aux citoyens français ;

– contribue au développement de la création française et européenne en matière de jeux vidéo ainsi qu’à sa diversité en se distinguant notamment par la qualité, l’originalité ou le caractère innovant du concept et le niveau des dépenses artistiques ;

– ne comporte pas de séquences à caractère pornographique ou de très grande violence, sauf pour les jeux vidéo spécifiquement destinés à un public adulte dès lors que la contribution du jeu vidéo au développement et à la diversité de la création française et européenne présente un niveau particulièrement significatif.

Le comité d’expert chargé de délivrer, sur la base du respect des critères d’éligibilité, l’agrément provisoire est constitué du CNC (2 voix), de la DGE (1 voix) et du contrôle général économique et financier (CGefi) (1 voix). Pour être éligible au crédit d’impôt, le jeu vidéo doit avoir obtenu cumulativement au moins 11 points au titre du barème des collaborateurs de création et au moins 12 points au titre du barème culturel.

BarÈme des collaborateurs de création utilisÉ pour la sÉlection
des jeux vidÉo Éligibles au CIJV

(nombre de points)

Critères de sélection

Nombre de
points

Directeur créatif ou réalisateur

3

Responsable de la conception des mécanismes du jeu vidéo

3

Scénariste

2

Directeur artistique

2

Compositeur de la musique ou créateur de l’environnement sonore

1

Membres de l’équipe de création comprenant notamment :

• les artistes conceptuels et environnementaux

• les infographistes

• les concepteurs de niveau

• les personnels responsables du son

• les concepteurs des mécaniques du jeu vidéo

• les programmeurs

* les points sont obtenus lorsque les 2/3 des dépenses salariales sont réalisées en France ou dans l’Union européenne

9

Note : les points sont attribués lorsque le poste est occupé par une personne de nationalité française (ou résident français) ou ressortissante d’un autre État membre de l’Union européenne.

Source : Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

Le rapporteur spécial note que la réforme de simplification menée en 2022 sur le barème culturel est globalement bien acceptée par l’ensemble des acteurs auditionnés, en particulier par les entreprises du secteur et leurs représentants, qui souhaitent désormais sa stabilisation plutôt qu’une nouvelle modification.

BarÈme cultureL utilisÉ pour la sÉlection
des jeux vidÉo Éligibles au CIJV

(nombre de points)

Critères de sélection

Nombre de
points

Création d’origine patrimoniale : jeu vidéo inspiré du patrimoine historique, artistique et scientifique européen OU jeu vidéo adapté d’une œuvre cinématographique, audiovisuelle, littéraire, musicale ou d’un

jeu vidéo dont la dernière version a été éditée il y a plus de quinze ans

2

Originalité de la création

2

Contenus culturels :

 Création visuelle : le jeu vidéo repose sur un univers visuel créé spécifiquement

 Création narrative : le jeu vidéo repose sur une trame narrative détaillée

 Création musicale originale : une ou plusieurs musiques ont été créées spécifiquement pour le jeu vidéo et le coût de cette création représente au moins 20 % du budget musical global ou un minimum de 50 000 euros

 Édition du jeu dans trois langues en vigueur dans l’Union européenne dont le français

1 à 7

2

2

 

2

 

1

 

Localisation des dépenses et nationalité des auteurs et collaborateurs de création :

• Au moins 80 % des dépenses de développement sont réalisées sur le territoire de l’Union européenne

• Auteurs et collaborateurs de création européens

4 à 5

 

3

 

1 ou 2

Innovations technologiques et éditoriales : interface homme-machine, intelligence artificielle, technologies de modélisation, de rendu, de simulation, sciences des données, technologies immersives, technologie de réseaux ou tout autre domaine pertinent.

1 à 4

Source : Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

En revanche, le rapporteur spécial note que plusieurs studios ont évoqué être confrontés à des délais de versement par l’administration fiscale du crédit d’impôt parfois très important, pouvant parfois atteindre près de 18 mois. En effet, si le CNC a la responsabilité de délivrer les agréments provisoires et définitifs relatifs aux jeux vidéo, c’est à l’administration fiscale que revient la charge de faire appliquer le crédit d’impôt sur les résultats imposables de l’entreprise, et de verser les sommes éventuellement dues. Or, les modalités particulières de mise en œuvre de ce dispositif et les montants parfois importants conduisent à de nombreuses vérifications complémentaires, voire à des contrôles systématiques de la part des services fiscaux, et à des délais importants de traitement, au détriment de la trésorerie des entreprises concernées.

Afin de faciliter le traitement de ces dossiers complexes et d’accélérer les procédures de versement pour les entreprises, qui nécessitent la mobilisation d’agents formés sur ces sujets, le rapporteur spécial préconise la création d’un guichet unique du CIJV au sein de l’administration fiscale. Ce dernier pourrait s’inspirer du guichet unique mis en place par l’URSAAF pour le règlement des cotisations et des contributions sociales du régime social des artistes auteurs, avec la désignation d’une implantation de référence à compétence nationale à Limoges.

Recommandation  1 : Créer un guichet unique pour le crédit d’impôt au sein de l’administration fiscale pour simplifier et accélérer les paiements aux studios de jeux vidéo. Cela permettrait de réduire les délais, parfois supérieurs à 18 mois, en regroupant les services compétents sous une seule entité nationale.

B.   Le crÉdit d’impÔt jeux vidÉo s’insÈre dans un ensemble complÉmentaire d’aides au bÉNÉfice de la crÉation française de jeux vidÉo sur l’ensemble du territoIRE

1.   Le crédit d’impôt jeux vidéo soutient l’activité économique du secteur et renforce la localisation des dépenses sur le territoire

Sur la base des informations transmises par le CNC, le rapporteur spécial constate les conséquences significatives de la réforme du CIJV de 2017 sur le dispositif (augmentation du taux de défiscalisation de 20 à 30 % et du plafond du crédit d’impôt de 3 à 6 millions d’euros par entreprise et par an) : le montant des dépenses engagées en France par les studios de jeux vidéo a été multiplié par 4,6 en passant de 70 millions d’euros en 2016 à 324 millions d’euros en 2023.

Le nombre de jeux vidéo agréés ayant généré des dépenses éligibles dans l’année atteint 144 jeux en 2023, soit une multiplication par près de 3,7 par rapport à 2016. Alors que le nombre de jeux bénéficiaires du CIJV s’était stabilisé ces dernières années, il a fortement augmenté en passant de 78 jeux en 2021 à 144 jeux en 2023. Avec de surcroît quelques jeux aux budgets exceptionnellement élevés réalisant des dépenses de production en 2023, la somme des budgets des jeux agréés dépensant dans l’année passe ainsi de 234 millions d’euros en 2021 à 348 millions d’euros en 2023, dont 324 millions d’euros de dépenses prévues en France (soit un taux de localisation de 93 %).

C’est le cas du jeu Star Wars Eclipse du studio français Quantic Dream, agréé en 2021 avec un devis prévisionnel de près de 100 millions d’euros et dont les 73 millions d’euros de dépenses en France sont étalés de 2022 à 2025 ; ou encore d’un jeu du studio français Ubisoft, agréé en 2020 avec un devis prévisionnel de près de 78 millions d’euros, dont 59 millions d’euros de dépenses en France, étalés de 2020 à 2023. Cette dynamique devrait se poursuivre au regard des jeux ambitieux agréés depuis 2023, à l’image d’un nouveau jeu produit par Arkane Studios agréé en 2023 à plus de 94 millions d’euros de budget pour 91 millions d’euros de dépenses en France de 2023 à 2026.

Évolution du crÉdit d’impÔt en faveur des entreprises
de jeux vidÉo de 2016 À 2023

(en millions d’euros ou nombre de projets)

 

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Jeux agréés dans l’année (projets)

26

34

40

41

36

38

55

67

Budget total (M€)

95 M€

282 M€

179 M€

364 M€

140 M€

234 M€

349 M€

348 M€

Dépenses en France (M€)

70 M€

154 M€

142 M€

278 M€

115 M€

174 M€

207 M€

324 M€

Jeux dépensant dans l’année (projets)

39

53

74

81

99

78

105

144

Dépenses éligibles de l’année (M€)

64 M€

79 M€

140 M€

163 M€

209 M€

145 M€

122 M€

220 M€

Montant de CIJV (1) (M€)

13 M€

24 M€

42 M€

49 M€

63 M€

43 M€

37 M€

66 M€

(1) Sont renseignés les montants de CIJV octroyés pour l’année fiscale en question (n+1). Les jeux ont pu être agréés l’année concernée ou antérieurement.

Source : centre national du cinéma et de l’image animée (CNC).

La vision dynamique du dispositif sur plusieurs années renseigne également sur la variabilité importante de la dépense fiscale d’une année sur l’autre. Bien que le tendanciel reste croissant, des variations importantes sont constatées d’une année sur l’autre en raison principalement des capacités de production des jeux dits « AAA » (jeux à grand budget) limitées à quelques studios, dont le budget de développement peut parfois dépasser 100 millions d’euros sur plusieurs années. Cette forte variabilité du CIJV d’une année à l’autre en raison de l’impact des jeux « AAA » rend difficile une analyse par année pertinente.

En effet, le CIJV est fortement concentré en volume sur quelques grands jeux : ainsi, en 2023, 40 millions d’euros (60 %) du montant du CIJV étaient mobilisés au bénéfice de jeux dont le budget est supérieur à 10 millions d’euros. La même année, seuls 6 jeux de plus de 10 millions d’euros de budget ont été agréés, sur un total de 67 jeux agréés dans l’année. Ces éléments traduisent une forte concentration du CIJV vers les grands projets, même si les dernières années ont vu augmenter le nombre de studios français à même de les prendre en charge (exemples de Flight Simulator du studio Asobo ou de Dead Cells du studio Motion Twin).

Ainsi, la tendance est à la hausse de la taille moyenne des projets agréés, et au développement de grands projets en France, particulièrement depuis 2017 : près de 90 % des projets agréés pour un budget de plus de 50 millions d’euros l’ont été à partir de 2017 et 100 % des projets agréés pour un budget de plus de 90 millions l’ont été à partir de 2017.

Montant du crÉdit d’impÔt en faveur des entreprises de jeux vidÉo
par catÉgorie de budget du jeu de 2016 À 2023

(en millions d’euros)

Montant du CIJV*

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Jeux dont le budget est inférieur ou égal à 1 M€

1

2

1

2

2

3

4

3

Jeux dont le budget est supérieur à 1 M€ et inférieur ou égal à 10 M€

7

11

14

13

14

15

17

24

Jeux dont le budget est supérieur à 10 M€

11

23

12

25

38

41

31

40

Source : CNC.

Contrairement à d’autres activités économiques internationales fortement concentrées en Île-de-France, le CIJV est très largement réparti sur l’ensemble du territoire avec l’émergence de véritables pôles régionaux du jeu vidéo. Cette réalité économique s’illustre par les informations transmises par le CNC sur la répartition par région du crédit d’impôt.

En dehors de l’Île-de-France, les régions les plus dynamiques sont l’Auvergne-Rhône-Alpes (31,5 millions d’euros de dépenses sur son territoire en 2023), la Nouvelle-Aquitaine (13,1 millions d’euros de dépenses en 2023) et l’Occitanie (7,0 millions d’euros de dépenses en 2023). D’après l’Observatoire de l’emploi du jeu vidéo édité en 2023 par l’Agence française pour le jeu vidéo (AFJV), ce sont également ces régions – hors Île-de-France – qui accueillent le plus d’entreprises de l’industrie du jeu vidéo (13 % de la filière pour l’Auvergne-Rhône-Alpes, 9 % pour l’Occitanie et 8 % pour la Nouvelle-Aquitaine). Ces entreprises s’appuient sur les soutiens complémentaires de certaines régions et des réseaux d’écoles prestigieuses dont les formations sont reconnues au niveau international.

La région Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, accompagne ses entreprises par le biais d’un fonds régional d’aide à la création de jeu vidéo et d’une aide financière à la mise en œuvre d’un plan de développement des compétences. Plusieurs écoles reconnues y sont établies, telles que l’école Émile-Cohl (Lyon), GameSup (Lyon) ou les écoles Brassart (Annecy, Grenoble, Lyon). L’association Game Only regroupe plus de 110 entreprises du jeu vidéo de la région et accompagne les studios dans leur croissance.

DÉpenses en rÉgion des entreprises DE jeux vidÉo bÉNÉficiant du crÉdit d’impÔt en faveur des entreprises de jeux vidÉo

(en millions d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Auvergne-Rhône-Alpes

5,1

2,4

5,1

9,3

7,3

8,3

31,5

Bourgogne–Franche-Comté

0

0

0

0

0

0

0,7

Bretagne

0,3

0,5

0,1

0

0,4

0,7

1,4

Centre-Val de Loire

0

0

1,1

0

0

0,2

0,1

Grand Est

0

0

0

0

0,4

0,5

0,2

Hauts-de-France

1,1

1,2

2,4

1,2

0,7

2,8

4,3

Île-de-France

20,8

46,2

39,3

42,3

61,4

45,4

88,4

Normandie

0

0,3

0

0

0,6

0

1,0

Nouvelle-Aquitaine

3,5

14,0

11,8

12,9

9,0

2,0

13,1

Occitanie

1,0

1,2

0,8

2,1

3,0

4,5

7,0

Pays de la Loire

0,5

0

0

1,6

0,5

1,7

0,3

PACA

0,8

6,5

2,5

3,1

3,6

1,2

2,2

Studios implantés dans plusieurs régions

46,8

53,4

68,7

83,3

57,9

54,6

69,5

TOTAL

79,8

125,8

131,8

155,8

144,8

121,9

219,9

Note : les estimations de dépenses en région sont réalisées chaque année sur la base des données les plus récentes alors en possession du CNC. Il se peut que les dépenses au niveau national ne recoupent pas totalement celles du bilan quantitatif, certains projets ayant été actualisés depuis la production de ces différentes estimations.

Source : CNC.

Par ailleurs, la région des Hauts-de-France fait preuve d’un important et récent dynamisme dans le secteur du jeu vidéo. Elle concentre 6 % des entreprises françaises de l’industrie vidéoludique, soit la quatrième région en nombre d’entreprises après l’Île-de-France. La filière génère de nombreux emplois directs dans la région, avec, parmi les grands employeurs, Ankama Studio (Roubaix) et Bigben Interactive (Lesquin). Près de 80 % des acteurs du jeu vidéo de la région ont élu domicile à La Plaine Images (Tourcoing), un pôle européen dédié aux industries culturelles et créatives, incubateur et accélérateur de plusieurs entreprises locales. Cet écosystème regroupe l’ensemble des acteurs clés de l’industrie – des studios de développement, des écoles prestigieuses telles que Rubika et Le Fresnoy, ainsi que des associations et des entreprises. En conséquence, en 2023, cinq jeux ont été agréés dans la région pour un montant total de 8,7 millions d’euros de dépenses en France. Le jeu The Last Spells, développé par le studio Ishtar Games (filiale de la société Nacon appartenant au groupe lillois Bigben Interactive) et agréé en 2019, est sorti en version définitive en 2023. Il est un succès commercial avec plus de 500 000 ventes sur PC.

Enfin, la région Nouvelle-Aquitaine fait preuve d’un fort dynamisme avec 13,1 millions d’euros de dépenses en 2023 et 8 % des entreprises de l’industrie du jeu vidéo. Ainsi, le rapporteur spécial a effectué un déplacement à Bordeaux qui est devenue une place importante du jeu vidéo avec des productions comme Assassin’s Creed (Ubisoft), Flight simulator (Asobo) et Dune Spice Wars (Shiro Games).

2.   Le crédit d’impôt jeux vidéo s’insère dans un ensemble d’aides complémentaires en faveur de la filière française de jeux vidéo

Au total, avec un soutien financier annuel compris entre 40 et 60 millions d’euros, le CIJV s’impose comme le principal dispositif de soutien à la filière. À titre de comparaison, le FAJV du CNC ne dispose que d’un budget annuel de 5 millions d’euros. Bien que ce fonds ait connu une progression constante ces dernières années, il n’a pas vocation à changer de dimensionnement dans la mesure où il poursuit un objectif de politique publique différent du CIJV. Le CNC relève au soutien de cette analyse que le FAJV ne fait pas non plus l’objet d’un financement dédié par une contribution affectée (à l’inverse de la taxe spéciale sur le prix des places de cinéma permettant de financer le secteur de la création cinématographique).

Sur ce point particulier, le rapporteur spécial estime que l’éventuelle création d’une taxe spécifique au secteur du jeu vidéo, visant à financer les actions menées par le CNC, doit impérativement s’insérer dans un débat plus global autour du financement et de l’accompagnement du secteur. La création d’une taxe dédiée, sans objectifs précis autre que budgétaire, nuirait à l’image d’attractivité de la France à l’international et serait très défavorablement perçue par le secteur.

Compte tenu de ses moyens d’investissement limités, le FAJV cible actuellement en priorité les jeunes studios et les projets en phase d’amorçage, en accompagnant la prise de risque créative. Le CNC estime ainsi que le dispositif présente un positionnement très différent du CIJV, et a vocation à intervenir de manière complémentaire en orientant une partie significative des investissements vers la création en amont (aide aux auteurs, aide à la préproduction).

Le rapporteur spécial estime que le FAJV doit conserver sa spécificité en soutenant en priorité les projets de plus petite dimension à l’étape de l’amorçage, afin de soutenir la création artistique française et l’émergence de nouvelles pépites européennes.

Il convient également de souligner que la plupart des régions françaises ont mis en place des aides à la création de jeux vidéo (souvent sur la base du modèle du CNC pour leur fonctionnement, même si généralement limitées aux préproductions). Ces aides restent soumises aux règles européennes au titre des aides d’État (règles de minimis) et sont parfois constituées pour partie d’avances remboursables. Elles sont, au même titre que le FAJV, complémentaires au CIJV en contribuant à financer les étapes amont de la création des jeux. Le total cumulé des aides régionales s’élève selon le CNC à environ 3 millions d’euros par an.

Parallèlement à ces dispositifs de soutien à la création, le CNC continue de développer son soutien à la compétitivité des entreprises à travers des programmes de formation destinés aux dirigeants (« accélérateur jeu vidéo » avec Bpifrance), le renforcement de ses aides à l’innovation (aide aux moyens techniques de production et de diffusion) et l’élargissement de ses actions visant à promouvoir l’attractivité du territoire et des filières de l’image. Ces dispositifs ont pu être complétés au cours des dernières années par les interventions de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) en prêts participatifs et garanties de prêt, ainsi que de Bpifrance qui investit notamment en fonds propres dans des entreprises de jeux vidéo.

Par ailleurs, dans le cadre du plan d’investissement France 2030, le secteur du jeu vidéo a bénéficié de l’appel à projets « La grande fabrique de l’image » en accompagnant 6 studios de développement à hauteur de 11,4 millions d’euros, et 16 organismes de formation initiale ou continue aux métiers de la création numérique (graphisme, game design, programmation) à hauteur de 35,6 millions d’euros. Le jeu vidéo figure aussi parmi les secteurs culturels ciblés par l’appel à projets « Culture immersive et métavers » qui vise à faire émerger des projets d’investissement ambitieux dans ce domaine.

Enfin, les dispositifs financiers ne sont pas les seuls leviers de politique publique à être mobilisés pour le jeu vidéo. Un effort est aussi réalisé dans les domaines de l’attractivité et du rayonnement international. L’annonce de la création de la marque Game France en octobre 2023 devrait permettre de construire une véritable politique d’attractivité et de rayonnement avec le secteur et l’ensemble des parties prenantes publiques. Elle pourra se traduire, selon la direction générale des entreprises (DGE), par un site internet, des actions de communication, l’identification du ou des guichets d’accompagnement des investisseurs et une politique de visas (à l’image de ce qui a été fait sur l’esport avec le passeport talent).

II.   Une pÉRENnisation du crÉdit d’impÔt est indispensable pour maintenir la compÉTITIVITÉ française À condition de LE faire Évoluer pour l’adapter aux nouvelles rÉALITÉs du secteur

La loi de finances pour 2023 ([10]) a procédé au « bornage » temporel du CIJV en limitant ce dernier aux dépenses engagées jusqu’au 31 décembre 2026, sans revenir sur les engagements déjà pris (les dépenses exposées postérieurement sont éligibles lorsque celles-ci se rapportent à des jeux vidéo pour lesquels l’agrément provisoire a été délivré avant cette date). Le rapporteur spécial rappelle qu’il ne s’agit en rien d’une date d’extinction différée du crédit d’impôt, mais davantage d’une obligation d’évaluation périodique des résultats du crédit d’impôt par rapport à ses objectifs initiaux.

Aussi, le rapporteur spécial estime que dans le cadre du projet de loi de finances 2025, le CIJV devra faire l’objet d’une prolongation ainsi que d’évolutions de son dispositif afin de l’adapter aux nouvelles réalités du secteur en matière de production de jeux vidéo.

A.   La PROLONGATION au-delÀ de 2026 du crÉdit d’impÔt est nÉcessaire pour permettre la consolidation d’une filiÈre française attractive

1.   La pérennisation du crédit d’impôt au-delà de 2026 doit permettre de poursuivre la consolidation d’une filière française d’excellence sans hausse de pression fiscale

Bien que l’impact structurel du CIJV depuis sa mise en place soit difficile à mesurer, il peut être objectivé à travers un faisceau d’indices depuis 2008 et la réforme importante de 2017, en observant une conjonction de facteurs dont le CIJV n’est pas l’unique cause, mais qu’il peut expliquer en partie : développement des studios et de l’emploi, émergence de studios de taille intermédiaire, développement en France de grands projets internationaux et reconnaissance du savoir-faire français à l’international.

Selon le SNJV et le SELL, le CIJV s’avère pertinent pour le développement économique de la filière pour plusieurs raisons : il résorbe l’écart de compétitivité des entreprises françaises sur un marché mondial ; il consolide l’appareil de production française, soutient le développement et l’implantation d’entreprises en France ; il représente un facteur d’attractivité pour les entreprises étrangères (éditeurs ou développeurs) ; il permet de réaffirmer la place de la France dans un paysage international très compétitif (guerre des talents, souveraineté culturelle et économique).

Au-delà de ces constats, le rapporteur spécial estime que l’effet structurant du CIJV sur le secteur du jeu vidéo se renforce année après année, faisant de la France un territoire d’excellence particulièrement attractif pour les investisseurs internationaux. Plusieurs études, réalisées par le secteur ou à la demande de l’administration, viennent conforter et objectiver cette analyse.

● L’étude PIPAME, publiée en 2021, conduite par la DGE, le CNC, le SELL et le SNJV, et portant sur le tissu économique et la compétitivité de l’industrie du jeu vidéo en France ([11]), a permis d’objectiver la trajectoire de croissance avec laquelle l’industrie a pu renouer sur une période de dix ans, de 2008 à 2018, correspondant à la mise en œuvre du dispositif.

Ainsi, selon les acteurs interrogés dans le cadre de l’étude, le CIJV joue un rôle essentiel dans le maintien de l’emploi en France en permettant de limiter la réorientation des projets vers des pays de production plus compétitifs. Selon eux, le CIJV et le FAJV ont amélioré la compétitivité et l’attractivité de la France et permis à l’industrie de recruter. Le CIJV permet aux studios français de proposer des coûts attractifs et d’être plus concurrentiels face au Canada ou aux autres industries européennes. La revalorisation du CIJV en 2017 aurait, selon le secteur, permis de relocaliser certaines productions de jeux dits « AAA » en France et d’attirer de nouveaux éditeurs sur le territoire (Tiny Built, Virtuos, Netflix, Tilting Point).

Au cours des dix années analysées, l’étude met en avant le fait que le poids de l’industrie a été multiplié par 2,5, correspondant à un taux de croissance annuelle moyen de 9 % (équivalent à la croissance du marché). Le nombre d’entreprises (studios et éditeurs) est passé de 224 en 2008 à 550 en 2018 (les studios de développement représentant 90 % des entreprises). En élargissant aux autres acteurs de la filière, ce sont près de 960 structures qui concourent au dynamisme de la filière en 2018 (parmi lesquels figurent les fournisseurs de technologie, les prestataires de service ou les écoles). Selon l’étude, l’industrie du jeu vidéo en France a connu une dynamique de création très forte avec 514 nouvelles entreprises de studios et d’éditeurs créées entre 2008 et 2018.

Par ailleurs, l’étude estime que le chiffre d’affaires de l’industrie (studios et éditeurs) est passé de 2,4 milliards en 2010 à 3,9 milliards d’euros en 2018 (830 millions d’euros pour les studios – soit un doublement en 10 ans – et 3,1 milliards d’euros pour les éditeurs – soit une hausse de moitié en 10 ans). Le paysage est toutefois fortement concentré parmi les studios et les éditeurs français, dans la mesure où les trois premières entreprises représentent 28 % du chiffre d’affaires total et les sept premières entreprises en représentent 48 %. Les performances en termes d’emplois sont encore plus importantes, la filière du jeu vidéo employant environ 11 900 personnes en 2018, dont près de 5 000 emplois directement liés à la production et environ 3 200 emplois chez les éditeurs. Les studios de développement ont connu la croissance la plus forte avec un nombre d’emplois multiplié par 2,5 entre 2010 et 2018.

● Selon une étude commandée par le CNC et publiée en juillet 2023 ([12]), le nombre d’emplois a poursuivi sa croissance, atteignant 10 068 équivalents temps plein (ETP), soit 13 800 effectifs salariés en 2021, et jusqu’à 35 400 emplois en incluant l’impact indirect et induit. La grande majorité des effectifs se situent en région Île-de-France (57,6 %), suivie par la région Auvergne-Rhône-Alpes tirée par la métropole lyonnaise (10,9 %), la Nouvelle Aquitaine avec Bordeaux et Angoulême (8 % des effectifs), l’Occitanie avec Montpellier (5,7 %) et les Hauts-de-France (4,8 %). Dans l’ensemble, il s’agit d’un secteur comprenant majoritairement des emplois qualifiés résidant principalement dans les grandes métropoles : près de 9 effectifs sur 10 du jeu vidéo se situent en métropole ou dans un territoire de plus de 200 000 habitants, et plus de la moitié sont dans les villes-centres.

Entre 2012 et 2021, plus de 5 600 ETP ont été créés dans le secteur du jeu vidéo, correspondant à plus de 7 000 effectifs. L’Auvergne-Rhône-Alpes a capté plus du quart de ces créations d’emplois dans les dix dernières années, et la Nouvelle-Aquitaine un emploi sur cinq. Ces chiffres confirment le dynamisme fort de nouveaux pôles territoriaux permettant de répartir l’impact de la filière sur l’ensemble du territoire national.

Le chiffre d’affaires du secteur du jeu vidéo a quant à lui connu une hausse de 23 % entre 2019 et 2021, avec un pic en 2020 (+ 26,5 % par rapport à 2019), porté par la croissance mondiale mais aussi par les investissements de gros studios dans leur filiale française, motivés par la revalorisation du CIJV mais aussi une saturation du marché canadien, et ceci malgré la crise sanitaire de 2019.

● En complément de ces études, le SNJV a pris l’initiative en 2023 de commander un rapport sur l’impact direct du CIJV sur l’emploi, confié au cabinet Analysis Group. La méthode économétrique employée est jugée robuste par l’administration et consiste à comparer l’emploi du secteur du jeu vidéo en France et dans d’autres pays qui n’ont pas mis en place de tels dispositifs fiscaux. En pratique, cette méthode doit permettre de mettre en évidence le lien de causalité entre la réforme du CIJV de 2017 et la hausse de l’emploi dans le secteur.

Les résultats de l’analyse mettent en avant le fait que la réforme du CIJV a permis de créer ou de sauvegarder environ 2 500 emplois en France, ce qui représente 32 % des emplois dans le secteur en 2020 (emploi total estimé à 8 000 en 2020 pour le secteur des jeux vidéo selon Eurostat, en hausse de 260 % depuis 2016 alors que, sur la même période, l’emploi dans le secteur a crû de 67 % en moyenne dans les autres pays européens). En d’autres termes, sans le renforcement du CIJV mis en œuvre en 2017, le secteur compterait 2 500 emplois en moins par rapport au niveau observé. La réforme du CIJV de 2017 aurait ainsi contribué à plus de la moitié des créations d’emploi du secteur en France depuis sa mise en œuvre. Ce chiffre est calculé en tenant compte d’une augmentation de l’emploi en France de 2 000 ETP à près de 6 200 ETP entre 2017 et aujourd’hui.

Ces créations d’emploi permises par la réforme du CIJV sont mises en regard du coût de la réforme pour apprécier l’efficacité économique du CIJV par rapport à d’autres dispositifs de soutien à l’emploi. L’étude évalue le coût par emploi créé ou sauvegardé grâce à la réforme du CIJV de 2017 à moins de 20 000 euros par an et par emploi. La réforme de 2017 du CIJV représente en effet un surcoût budgétaire de l’ordre de 45 millions d’euros par an à mettre en regard des 2 500 emplois créés. Le coût par emploi créé du CIJV s’établirait ainsi à un niveau très favorable par rapport à d’autres dispositifs fiscaux.

Enfin, l’étude estime que la réforme du CIJV de 2017 est autofinancée : les recettes supplémentaires par emploi créé (environ 60 000 euros par an) seraient supérieures au coût par emploi créé par le CIJV (moins de 20 000 euros par an). Ce surcroît de recettes tient compte de l’ensemble des prélèvements obligatoires (cotisations sociales, impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés et la production, contribution sociale généralisée, ou encore taxe sur la valeur ajoutée).

● Enfin, l’ensemble des personnes auditionnées par le rapporteur spécial au cours de la mission ont expliqué que ce dispositif leur a permis d’asseoir la stabilité financière de leur entreprise, et a de ce fait permis de conforter les décisions d’investissements à la fois d’éditeurs mais aussi d’investisseurs, voyant dans ce dispositif une ressource stabilisant la trésorerie de l’entreprise.

Illustrant cette forte attractivité, plusieurs opérations financières significatives d’acteurs financiers européens et non européens sont intervenues depuis 2021 sur des studios et éditeurs établis en France. Plusieurs studios indépendants créateurs de leurs propres propriétés intellectuelles ou intervenant sur des licences de renom ont été accompagnés sur des levées de fonds par des fonds d’investissement : Asobo (Plague Tale, Microsoft Flight Simulator) par le fonds français Sagard New Gen (20 millions d’euros d’investissement), Don’t Nod (Jusant, Banishers) par Tencent (Chine) en 2021 et 2023 pour 75 millions d’euros cumulés, et Shiro Games (Northgaard, Dune) par Cathay Capital (France) dans une opération valorisant le studio à 150 millions d’euros. Tous ces studios ont bénéficié du CIJV. De l’avis de l’ensemble de ces acteurs, l’existence du CIJV a joué un rôle majeur dans la réalisation de leurs levées de fonds, en renforçant nettement la structure financière de leur société.

Les performances des studios français leur ont également valu une attention soutenue d’investisseurs situés hors de l’Union européenne – et notamment venant de Chine – par deux très gros opérateurs : Tencent et Netease. Dans le cadre d’une politique d’investissements auprès des studios européens les plus en vue, ces deux sociétés ont pris des participations minoritaires dans plusieurs studios français (ShiroGames, Don’t Nod, Tactical Adventures, Wolcen, etc). Netease a même procédé au rachat total du studio emblématique Quantic Dreams. Le rapporteur spécial relève la participation croissante d’investisseurs situés hors de l’Union européenne, ainsi que les possibles conséquences de ces prises de participation parfois majoritaires pour la liberté de création artistique ainsi que pour la protection des droits d’auteur et des technologies développées. Il souligne qu’il s’agit d’un enjeu de souveraineté culturelle, artistique et industrielle fort dont la France et l’Union européenne doivent se saisir.

2.   La concurrence internationale reste particulièrement forte dans le secteur, justifiant le maintien du dispositif : les cas particuliers du Canada, du Royaume-Uni et de l’Allemagne

Le secteur du jeu vidéo présente la particularité d’être très fortement exposé à la concurrence internationale, avec des effets rapides de délocalisation des productions et d’expatriation des talents dans le cas où le territoire français perdrait en attractivité. Le SNJV partage ce constat en rappelant que « l’industrie du jeu vidéo présente certaines spécificités, en comparaison avec d’autres industries culturelles et créatives : production dématérialisée et marché mondial, ce qui incite donc les entreprises à produire ou faire produire les jeux vidéo dans les pays où la compétitivité est attractive ».

Ainsi, Ubisoft a progressivement rapatrié son activité en France, alors que l’entreprise n’y avait pas ouvert de nouveau studio depuis 21 ans. Ubisoft a inauguré un nouveau studio à Bordeaux en 2017 qui compte aujourd’hui plus de 420 employés. L’entreprise a également fusionné ses deux studios montpelliérains en un nouveau site de 4 500 m² inauguré en septembre 2019, qui accueille aujourd’hui presque 500 employés. De même, pour l’intégralité des studios auditionnés lors de la mission, le CIJV est indispensable afin de ne plus recourir à la sous-traitance étrangère et reste le moteur de l’attractivité économique de la France dans un contexte de très forte concurrence internationale.

Cette forte concurrence internationale peut être illustrée à travers l’examen de trois pays considérés comme les principaux concurrents de la France dans le secteur, du fait de leur proximité géographique et/ou d’un écosystème économique assez similaire : le Canada, le Royaume-Uni et l’Allemagne.

 Le Canada fait figure de pionnier en matière de soutien au jeu vidéo. Dès 1998, des dispositifs d’incitation fiscale ont été mis en place au niveau fédéral et provincial afin de soutenir la création d’emplois dans des secteurs d’avenir. L’industrie canadienne du jeu vidéo bénéficie depuis 20 ans d’un accompagnement très volontariste qui permet souvent de cumuler le crédit d’impôt recherche et développement fédéral (jusqu’à 35 % des dépenses de recherche et de développement) et un crédit d’impôt provincial ciblant les productions multimédias (Québec, Ontario, Nouvelle-Écosse, Manitoba, Colombie-Britannique).

La concurrence est particulièrement forte au Québec où le taux du crédit d’impôt pour des titres multimédias atteint 37,5 % des dépenses de main-d’œuvre pour une production disponible en version française, sans aucun plafond applicable sur le montant attribué. Il existe toutefois un plafond des rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d’impôt établi à 100 000 dollars par employé et par an. Les dépenses de fonctionnement ne sont en revanche pas éligibles. La procédure est particulièrement simple, car elle ne fait pas l’objet d’un examen préalable de la qualité artistique du jeu au titre d’un barème culturel et se limite à une instruction purement administrative. La mesure fiscale a coûté 409 millions d’euros à Québec en 2023, soit presque dix fois le coût du CIJV.

Le gouvernement québécois entend toutefois modifier substantiellement le dispositif d’ici 2028 en transformant une part de 10 points de crédit d’impôt en réduction d’impôt. Le Québec espère ainsi inciter les entreprises à localiser sur le territoire la commercialisation des propriétés intellectuelles et les centres de décision des activités commerciales afin de générer davantage de revenus imposables. Il propose aussi une modification de l’assiette, d’une part, en supprimant le plafond des rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d’impôt et, d’autre part, en instaurant une franchise de 18 056 dollars par emploi exclue de l’assiette du crédit d’impôt.

● Le Royaume-Uni a mis en place un crédit d’impôt dont l’accès est réservé aux jeux remplissant un barème culturel. Le fonctionnement du dispositif britannique est particulier, le montant de l’avantage fiscal dépendant de la situation d’imposition de l’entreprise :

– si la société est imposable (taux d’imposition sur les sociétés de 19 %), elle peut déduire de sa base d’imposition la somme la moins élevée entre 80 % de l’ensemble des dépenses de conception, de production et de test et 100 % des seules dépenses européennes de conception, de production et de test ;

– si l’activité de l’entreprise est non-imposable, elle peut solliciter un crédit d’impôt à hauteur de 25 % de la somme la moins élevée entre 80 % de l’ensemble des dépenses de conception, de production et de test et 100 % des seules dépenses européennes de conception, de production et de test.

En définitive, le crédit d’impôt britannique est optimisé lorsque l’entreprise ne génère pas de bénéfices imposables et qu’au moins 80 % des dépenses sont européennes. Dans ce cas, l’entreprise peut bénéficier d’un crédit d’impôt à hauteur de 20 % des dépenses éligibles. Si l’entreprise génère des bénéfices imposables, l’avantage fiscal peut atteindre 15,2 % des dépenses.

Le gouvernement britannique entend toutefois modifier substantiellement le dispositif entre 2025 et 2027, en remplaçant progressivement le « Games Tax Relief » par un « Video Games Expenditure Credit ». Le nouveau dispositif prendra la forme d’un crédit d’impôt à hauteur de 34 %, applicable sur la somme la moins élevée entre 80 % de l’ensemble des dépenses éligibles et 100 % des seules dépenses éligibles réalisées au Royaume-Uni. Le test culturel restera en vigueur, et au moins 10 % des dépenses devront être réalisée au Royaume-Uni. Aucun plafond en matière de sous-traitance n’est prévu dans le dispositif.

● L’Allemagne a instauré en 2020 un fonds fédéral de subvention qui permet de couvrir entre 25 % et 50 % des dépenses des prototypes ou de production de jeux vidéo.

Pour les prototypes et les productions à faible budget (moins de 2 millions d’euros), le taux de financement est de 50 % des coûts de développement. Au-delà, il est progressivement dégressif pour atteindre 25 % pour les jeux de plus de 8 millions d’euros. Au-delà de 40 millions d’euros de coût de développement, un soutien sur mesure est proposé en fonction du caractère innovant du jeu, de sa pertinence culturelle, de ses effets économiques et des ressources disponibles au sein du fonds (100 millions d’euros au total sur la période 2024-2026). Les jeux éligibles doivent être soumis comme en France à un test culturel, doivent contribuer à l’emploi et l’économie allemande, et doivent apporter la preuve d’un besoin avéré d’un financement public (absence d’alternative possible).

Comparaison synthÉtique des Dispositifs Étrangers de soutien
au secteur des jeux vidÉO

Pays

Éligibilité

Assiette

Taux

Plafond

France

 

Crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo

Conditions relatives à l’entreprise : établie en France.

 

Conditions relatives au jeu : coût > 100 k€, destiné à une commercialisation publique + nationalité des créateurs + barème culturel.

Ensemble des dépenses de personnel, de fonctionnement, de recherche.

 

Dépenses effectuées en France ou en Europe et exposées 3 ans avant l’agrément définitif.

30 %

6 par entreprise et par exercice

Canada – Québec

 

Crédit d’impôt pour des titres multimédias

Conditions relatives à l’entreprise : établie au Québec.

Dépenses de personnel (rémunérations pour la production du jeu plafonnées à 100 000 $ par employé et par an, sauf pour 20 % d’employés les mieux rémunérés).

– 37,5 % pour un jeu en français ;

– 30 % pour un jeu non disponible en français ;

– 26,25 % pour les autres jeux.

Aucun

Canada – Ontario

 

Crédit d’impôt de l’Ontario pour les produits multimédias interactifs numériques

 

Conditions relatives à l’entreprise : établie en Ontario.

 

- soit une société de jeux spécialisée (1 M$ par an de dépenses de développement ; 80 % des rémunérations versées par la société ou 90 % des recettes brutes annuelles attribuables au développement) ;

 

- soit une société de jeux admissible (1 M$ de dépenses de personnel attribuables au développement sur trois ans).

Dépenses de personnel directement attribuables au développement de jeux.

 

Pour les sociétés de jeux admissibles, dépenses de développement.

35 %

Aucun

Canada – Nouvelle-Écosse

 

Digital Media Tax Credit

 

Conditions relatives à l’entreprise : établie en Nouvelle-Écosse.

- Si le taux de 50 % est applicable : dépenses de main-d’œuvre ; dépenses de marketing dans la limite de 100 000 $ par jeu.

 

- Si le taux de 25 % est applicable : total des dépenses réalisées en Nouvelle-Écosse.

Le taux retenu est celui qui aboutit au montant de crédit d’impôt le moins élevé entre :

- 50 % des dépenses éligibles (ou 60 % pour les entreprises en dehors d’Halifax) ;

- 25 % des dépenses réalisées en Nouvelle-Écosse (ou 30 % pour les entreprises en dehors d’Halifax).

Aucun

Royaume-Uni

 

Video Games Expenditure Credit

Conditions relatives à l’entreprise : société de développement de jeu établie au RU + 10 % des dépenses réalisées au RU

 

Conditions relatives au jeu : destiné au grand public + barème culturel.

Montant le moins élevé entre 80 % de l’ensemble des dépenses éligibles et 100 % des seules dépenses éligibles réalisées au RU.

 

Prise en compte des dépenses de sous-traitance sans limite.

 

Dépenses de conception, de production et de test.

34 %

Aucun

Singapour

 

Production Assistance Fund

Conditions relatives à l’entreprise : société établie à Singapour.

Dépenses de personnel et de fonctionnement.

 

Dépenses contribuant de manière significative au développement de Singapour.

40 %

20 fois le capital libéré de l’entreprise (si subvention > 50 000 S$)

Italie

 

Tax credit video-giochi

Conditions relatives à l’entreprise : société spécialisée dans l’informatique établie en Italie dont le capital social est supérieur à 10 000 €

 

Conditions relatives au jeu : barème culturel.

Dépenses de personnel, de fonctionnement (matériel, logiciel) et frais généraux dans la limite de 7,5 % du coût de production.

25 %

1 par société et par an

Allemagne

 

Computerspiele

förderung des Bundes

 

Conditions relatives à l’entreprise : société établie en Allemagne

 

Conditions relatives au jeu : prototypes dont le coût est compris entre 30 000 € et 400 000 € ou production dont le coût est > 100 000 € + barème culturel + besoin de financement public avéré.

Coûts directement liés au projet.

 

Sous-traitance jusqu’à 50 % des frais de personnel.

– 50 % pour les prototypes et pour les productions dont le coût de développement est < 2 ;

– entre 25 % et 50 % si coût de développement compris entre 2 et 8 ;

– 25 % si coût de développement > 8.

Crédits disponibles (100 sur trois ans)

Source : CNC.

Aussi, au regard du contexte de très forte concurrence internationale ainsi que des effets positifs du dispositif fiscal pour l’économie et la création françaises, le rapporteur spécial estime qu’il est impératif de prolonger au-delà de 2026 le CIJV. Ce prolongement devra être suffisamment important pour donner de la visibilité aux investisseurs et aux entreprises de jeux vidéo. Comme le souligne le Syndicat des éditeurs de logiciel de loisir (SELL), l’industrie du jeu vidéo « est caractérisée par des cycles de production longs, requérant des besoins en capital importants : les entreprises concernées ont donc tout particulièrement besoin d’avoir de la visibilité et de la sécurité à long terme sur le crédit d’impôt dont elles pourront bénéficier ». Le rapporteur spécial préconise en conséquence de prolonger le crédit d’impôt jusqu’en 2031, date d’ici laquelle il pourra faire l’objet d’une nouvelle évaluation.

 

 

Recommandation  2 : Prolonger le crédit d’impôt jeux vidéo au-delà de 2026 au moins jusqu’en 2031. Cette extension substantielle fournirait une visibilité et une sécurité financières aux studios de jeux vidéo, essentiels pour cette industrie aux cycles de production longs et aux besoins en capital importants.

B.   La NÉCESSITÉ de faire Évoluer le crÉdit d’impÔt pour tenir compte des nouvelles rÉALITÉs de la crÉation et du dÉveloppement de jeux vidÉo

Le rapporteur spécial estime qu’une prolongation du CIJV au-delà de 2026 doit être accompagnée de la modification des critères de fonctionnement du crédit d’impôt, afin de prendre en compte les nouvelles réalités économiques en matière de création et de développement de jeux vidéo intervenues depuis 2017, date à laquelle ces critères ont été pour la dernière fois modifiés en loi de finances.

1.   Une évolution des modalités d’application du plafond et de la durée d’éligibilité sont nécessaires pour permettre aux entreprises de faire face à l’augmentation des coûts et de la durée de production

La compétitivité du crédit d’impôt français repose principalement sur le taux de 30 % applicable à l’ensemble des dépenses afférentes à la création du jeu, avec une définition de l’assiette large par rapport à la plupart de ses concurrents internationaux. En revanche, son plafonnement à 6 millions d’euros par exercice et par entreprise ne permet pas aujourd’hui d’accroître significativement les capacités de production des studios susceptibles de fabriquer les projets les plus ambitieux à forte retombée économique et concurrence internationale (jeux dits « AAA »). En outre, son mode d’attribution, qui bénéfice à un jeu agréé et non à une entreprise, sur la base d’un barème encadrant le caractère culturel du jeu vidéo, produit un effet filtrant en cohérence avec la vocation culturelle du dispositif mais en décalage avec d’autres dispositifs fiscaux qui, comme au Canada, n’ont pas la même sélectivité et poursuivent avant tout un objectif de développement industriel.

De plus, la durée de développement des jeux s’est considérablement allongée, en particulier pour les projets les plus ambitieux. Pour rappel, le CIJV est actuellement limité à une période de trente-six mois de manière générale à compter de la délivrance de l’agrément provisoire. En cas de dépassement du délai de trente-six mois pour l’obtention de l’agrément définitif pour les jeux dont le coût de développement est supérieur à 10 millions d’euros, le crédit d’impôt est calculé au titre des dépenses exposées antérieurement à la période de trente-six mois qui précède la date de délivrance de l’agrément définitif.

Dans ce contexte, le secteur demande unanimement que soit étudiée une modification des modalités de calcul et d’application du plafond et de la durée d’éligibilité du CIJV, afin de tenir compte de l’allongement des délais pour la réalisation d’un jeu vidéo, ainsi que de la hausse significative des coûts de développement pour les jeux dits « AAA » (fortement exposés à la concurrence internationale où aucun plafond n’est appliqué). Plusieurs pistes d’évolution ont ainsi été proposées par les différentes parties prenantes rencontrées :

– l’augmentation du plafond actuel du crédit d’impôt de 6 à 10 millions d’euros par entreprise et par exercice, afin de renforcer l’attractivité du territoire avec un plafond calibré sur les budgets des plus grandes productions internationales et d’encourager le passage à l’échelle supérieure de studios proches du plafond actuel par entité juridique. Le SELL estime en effet que « le plafond défini de 6 millions d’euros par entreprise et par exercice peut, par différents aspects, se révéler un frein aux ambitions premières du dispositif ». Les jeux développés « étant plus ambitieux, cela implique nécessairement des engagements financiers plus importants » et « travailler à des superproductions comme des jeux AAA implique des innovations technologiques poussées (…) ce qui engage des budgets importants, qui dépassent en moyenne 100 millions d’euros » ;

– la modification des modalités de calcul du plafond à 10 millions d’euros par jeu et par an ou 50 millions d’euros par jeu au cours d’une période de 5 ans et non plus par entreprise afin de garantir une neutralité du crédit d’impôt sur l’organisation de l’entreprise. Sur ce point, le SELL souligne que le système actuel n’est pas neutre en termes d’organisation de l’entreprise et ne facilite pas la structuration interne. Le cas d’Ubisoft est à ce titre révélateur : avec une dizaine de studios historiques sur le territoire national, chaque studio étant une entité juridique à part entière, le plafond du CIJV de 6 millions d’euros s’applique à chacun d’entre eux, ce qui rend le plafond actuel peu opérant et limite la croissance individuelle de chaque studio. Plus un studio grandit, renforce ses équipes et travaille au développement de jeux importants, plus il va rapidement approcher le plafond fixé par le CIJV. Le plafond limite ainsi la capacité de certains studios à attirer de nouveaux projets, voire les conduit à refuser certaines collaborations. Par ailleurs, le calcul par entreprise pèse sur le modèle collaboratif pour développer des univers de jeux les plus intégrés et complets possibles ;

– l’allongement de la durée d’éligibilité de 3 à 5 ans du fait de l’augmentation de la durée de développement des jeux vidéo. En effet, alors que le développement d’un jeu mobile peut aboutir en quelques mois seulement, celui de la plupart des jeux vidéo pour ordinateur ou consoles a une durée comprise entre trois et cinq ans en moyenne. La durée de développement est influencée par de nombreux facteurs, tels que la classe de jeu, l’échelle, la plate-forme de développement et la complexité du jeu. L’intégralité des acteurs rencontrés estime la durée actuelle du CIJV en déconnexion avec la réalité du temps de production dans l’industrie du jeu vidéo, conduisant les acteurs à se mettre en difficulté et à commercialiser parfois des jeux incomplets (mettant en risque leur crédibilité et la perception du jeu par les joueurs). Par ailleurs, la date de commercialisation d’un jeu ne reflète pas nécessairement la fin de son développement, avec un travail continu d’amélioration et de correction du jeu qui peut durer parfois plus d’un an (sans parler du développement des jeux games as a service).

Parmi ces propositions, le rapporteur spécial estime que :

– un allongement de la durée d’éligibilité de 3 à 5 ans constitue une priorité absolue afin de mettre en cohérence la réalité économique du temps de production dans l’industrie du jeu vidéo avec la durée du CIJV. Il s’agit ainsi de sécuriser rapidement les studios de développement de jeux vidéo dans un contexte global d’allongement de la durée de production des jeux vidéo. Cette mesure permettrait également de prendre en compte les périodes de prototypage et de postproduction ;

– un rehaussement du plafond de 6 à 10 millions d’euros aurait des conséquences limitées à ce jour sur le montant global du CIJV, dans la mesure où la plupart des entreprises sont aujourd’hui sous le plafond (ou s’organisent pour rester sous le plafond par entité juridique). Il permettrait en revanche de renforcer l’attractivité du territoire avec un plafond calibré sur les budgets des plus grandes productions internationales et d’encourager le passage à l’échelle supérieure de studios proches du plafond actuel par entité juridique ;

– une réforme des modalités de calcul du CIJV, qui serait appliqué par jeu et non plus par entreprise, s’inscrirait dans une logique économique évidente, mais serait plus difficile à mettre en œuvre à court terme dans la mesure où l’impôt sur les sociétés est calculé par entreprise. Une telle réforme devrait faire l’objet d’une analyse approfondie avec les services fiscaux quant à sa faisabilité.

Recommandation  3 : Élever le plafond actuel du crédit d’impôt de 6 à 10 millions d’euros par entreprise et par exercice pour attirer davantage de productions « AAA ». Il s’agit de renforcer l’attractivité du territoire avec un plafond calibré sur les budgets des plus grandes productions internationales et d’encourager le passage à l’échelle supérieure de studios proches du plafond actuel par entité juridique.

Recommandation n° 4 : Étendre la période du crédit d’impôt de 3 à 5 ans, le cas échéant uniquement pour les jeux dont les budgets sont supérieurs à 5 millions d’euros, reflétant ainsi la durée accrue du développement des jeux vidéo.

2.   La prise en compte de certaines dépenses de promotion, de prototypage et de l’émergence des games as a service pourraient également être envisagée

Le secteur du jeu vidéo évolue au rythme des innovations technologiques qui touchent très directement les processus créatifs ainsi que les modèles de commercialisation des jeux. Parmi l’ensemble des industries culturelles et créatives, le secteur du jeu vidéo est sans doute le plus innovant, tant la capacité d’anticiper ou de s’adapter aux évolutions stratégiques, d’usage ou de marché conditionne son existence même.

L’industrie du jeu vidéo est ainsi marquée depuis quelques années par le développement du « jeu vidéo en tant que service » (game as a service — GAAS). En effet, contrairement aux biens culturels classiques, les jeux vidéo continuent à se développer après leur date de sortie initiale (down loadable content, mise à jour, correctif, etc.). Ainsi, les jeux commercialisés sous le modèle GAAS reçoivent généralement un flux long ou indéfini de nouveaux contenus développés et monétisés au fil du temps pour encourager les joueurs à continuer de payer pour soutenir le développement du jeu. Les jeux qui fonctionnent sous un modèle GAAS changent continuellement avec ces mises à jour, et continuent de se développer jusqu’à parfois plusieurs mois après leur date de commercialisation initiale. Dans ce contexte, les entreprises auditionnées demandent en grande majorité à ce que les nouveaux contenus développés pour enrichir le jeu, immédiatement à la suite de son lancement, soient pris en compte dans les dépenses éligibles. Pour tenir compte de cette nouvelle réalité économique, le rapporteur spécial propose de permettre le dépôt d’une demande d’agrément complémentaire de 2 ans à l’issue de la période applicable à la demande initiale du crédit d’impôt. Cette demande ferait l’objet d’une instruction spécifique du CNC afin de s’assurer de la pertinence de celle-ci au regard du modèle économique du jeu, du développement effectif de contenu additionnel et du respect des barèmes applicables au CIJV.

Recommandation n° 5 : Permettre le dépôt d’une demande d’agrément complémentaire de 2 ans à l’issue de la période applicable à la demande initiale du crédit d’impôt. Cette demande ferait l’objet d’une instruction spécifique du CNC pour en assurer la pertinence en fonction du modèle économique du jeu, du développement de contenu additionnel et du respect des barèmes applicables. La mesure permettrait d’adapter le CIJV à la tendance du marché où la production d’un jeu peut se poursuivre après la date de commercialisation initiale.

De même, la question de l’intégration dans l’assiette du CIJV des dépenses de marketing d’un jeu est une demande récurrente du secteur dans la mesure où celles-ci font désormais partie intégrante du développement d’un jeu. Elles contribuent à donner de la visibilité à la sortie d’un jeu vidéo, dans un univers extrêmement concurrentiel où se démarquer devient difficile : en 2023, pas moins de 14 535 jeux ont vu le jour sur Steam, soit 2 000 jeux de plus qu’en 2022 et 5 000 jeux de plus qu’en 2020. Le rapporteur spécial n’est pas favorable à l’intégration des dépenses de marketing qui éloignerait le crédit d’impôt de sa dimension culturelle. Il souligne qu’une telle intégration aurait nécessairement des implications sur les autres crédits d’impôt culturels, dont les réalisations font aussi l’objet de campagnes de promotion.

Enfin, le secteur demande de manière unanime l’intégration des dépenses dites de prototypage dans l’assiette du CIJV, c’est-à-dire des dépenses intervenues en amont du développement du jeu et de la demande d’agrément provisoire auprès du CNC. Ces dépenses sont en effet nécessaires pour permettre à l’entreprise de définir le contenu du jeu et d’élaborer une première maquette de ce dernier, afin de présenter au CNC un dossier suffisamment solide en mesure de respecter les critères du barème culturel. En l’état, les entreprises du secteur doivent optimiser la date de dépôt de la demande d’agrément provisoire : un projet doit être suffisamment avancé pour présenter des éléments concrets et pouvoir être apprécié au regard de la grille de critères du barème culturel, mais l’absence de rétroactivité (prise en compte des dépenses à compter de la date du dépôt) peut inciter les entreprises à déposer trop rapidement leur dossier sur des projets non aboutis. Le rapporteur spécial estime que ces dépenses sont inhérentes au développement d’un jeu, et qu’il conviendrait de permettre à l’entreprise, sur option, de prendre en compte dans l’assiette du crédit d’impôt les six mois précédant le dépôt de la demande. Cela reviendrait ainsi à avancer de six mois le point de départ des dépenses éligibles.

Recommandation n° 6 : Permettre aux entreprises d’inclure, dans l’assiette du crédit d’impôt jeux vidéo, les dépenses de prototypage des six mois précédant la demande d’agrément provisoire. Ces coûts sont essentiels au développement du jeu et aident à présenter un dossier solide, respectant les critères culturels du CNC. Cela donnerait aux studios plus de flexibilité et de temps pour déposer des projets aboutis.

 


   Conclusion

À l’issue des travaux d’évaluation qu’il a conduits, le rapporteur spécial estime que le CIJV est indispensable au développement de la filière française de jeux vidéo, dans un contexte de très forte compétitivité internationale. Il a su montrer toute son efficacité en permettant la création et le maintien d’emplois en France, et en y favorisant la localisation de projet ambitieux. Le soutien apporté par le CIJV a en effet facilité la pérennisation des emplois (près de 2 500 depuis 2017 selon une étude portée par le secteur), permettant ainsi de conserver des talents fortement expérimentés et à haute compétence sur notre territoire.

Cette attractivité de la France pour le développement de projets à grande visibilité lui permet en outre de bénéficier d’un rayonnement culturel, créatif et technologique important sur la scène internationale. La multiplication des dispositifs de soutien en Europe depuis quelques années témoigne de la légitimité et des bénéfices concrets du CIJV quant au fait qu’il soit compétitif, et de l’enjeu pour lui de le rester. L’Italie a créé un dispositif calqué sur le modèle français en 2021, de même que l’Irlande en 2022. Les autres pays disposant déjà de mécanismes similaires, tels que le Royaume-Uni (crédit d’impôt) ou l’Allemagne (fonds de soutien), ont réalisé des aménagements destinés à rendre le soutien encore plus attractif, traduisant par là même une compétition intense au niveau européen. Au même moment, les récentes restrictions annoncées du crédit d’impôt canadien peuvent constituer une opportunité pour la France.

Depuis sa création en 2007, les modernisations successives du CIJV ont permis de le renforcer de façon évidente. Afin de faire face aux mutations en cours dans le développement de jeux vidéo, et pour permettre à la France de rester un champion européen voire mondial, le rapporteur spécial estime nécessaire de mener une prolongation du CIJV au-delà de 2026 pour cinq années supplémentaires, tout en apportant une nouvelle évolution des critères du crédit d’impôt : augmentation de la durée des dépenses éligibles à 5 ans et du plafond annuel du crédit d’impôt par entreprise à 10 millions d’euros, prise en compte des dépenses éligibles de la période de postproduction dans la limite de 2 ans et des dépenses de prototypage engagées au cours des 6 mois précédant le dépôt de la demande d’agrément provisoire.

 


   TRAVAUX DE LA COMMISSION

Lors de sa réunion de 21 heures, le mercredi 5 juin 2024, la commission des finances a entendu M. Denis Masseglia, rapporteur spécial des crédits Médias, livres et industries culturelles de la mission Médias, livres et industries culturelles, sur son rapport d’information sur le crédit d’impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo.

La commission a autorisé la publication du rapport d’information.

La vidéo de cette réunion est disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Le compte rendu sera prochainement consultable.

 

 

 

 


   Annexe N° 1 :
Liste des personnes auditionnÉes
par le Rapporteur spÉcial

 

Quantic dream :

– M. Guillaume de Fondaumière, CEO & Head of publishing

 

Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL) * :

– M. Nicolas Vignolles, délégué général

– M. Benjamin Niang, responsable affaires publiques et Europe

 

Syndicat national du jeu vidéo (SNJV) * :

– Mme Anne Dévouassoux, présidente

– M. Lévan Sardjevéladzé, 1er vice-président affaires publiques

– Mme Vanessa Kaplan, directrice des opérations

 

Ubisoft * :

– M. Emmanuel Martin, vice-président affaires corporatives

– Mme Marjorie Volland, responsable affaires corporatives

 

Dont Nod :

 M. Guilbert Oskar, directeur général

 

Tactical adventures :

– M. Mathieu Girard, président

 

Sloclap :

– M. Pierre de Margerie, président

 

Fabloo Games:

– M. Michael Sportouch, président

 

Pinpin team :

– M. Géraud Paillard-Brunet, président

 

Direction générale des entreprises (DGE) :

– M. Aurélien Palix, sous-directeur réseaux et usages numériques

– Mme Blandine Dusser, cheffe de projets « industries culturelles et créatives »

– Mme Marie-Pierre Bouvet, chargée de mission « industries culturelles et créatives »

 

Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) :

– M. Vincent Villette, directeur financier et juridique et directeur général délégué-adjoint

– Mme Pauline Augrain, directrice du numérique

– M. Olivier Fontenay, chef du service de la création numérique

– Mme Adèle Kersual-Lanoé, adjointe au chef du service des financements

 

Nacon :

– M. Alain FALC, président

 

Cabinet de la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, chargée du numérique :

– M. Colin DUCROTOY, Conseiller technologies numériques et financement de l’innovation

– Mme Léa PARENTI, Conseillère parlementaire et élus locaux

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

 


   ANNEXE N° 2 :
DÉPLACEMENT À BORDEAUX DU 16 MAI 2024
VISITE DES STUDIOS SHIRO GAMES ET ASOBO

10h00

10h45

Temps d’accueil et visite de Shiro Games

 

Mme Fanny DESGRANGES, Responsable Administrative et Financière

 

10h45

11h30

Échanges autour de la production de jeux vidéo à Shiro Games

 

M. Quentin LAPEYRE, Game Director

 

M. Arnaud RICHARD, Directeur Marketing

 

11h30

12h30

Échanges autour du crédit d’impôt jeux vidéo

 

M. Nicolas CANNASSE, Président

 

Mme Fanny DESGRANGES, Administrative & Finance Manager

 

M. Stéphane BONAZZA, SVP Business Development

 

15h00

16h00

Temps d’accueil et visite de Asobo Studio

 

Démonstrations de projets et échanges avec un ou plusieurs développeurs.

 

16h00

18h00

Échanges avec la direction de Asobo Studio

 

M. Sebastian WLOCH, co-gérant et Chief Executive Officer

 

M. David DEDEINE, co-gérant et Chief Creative Officer

 

M. Gregory CARREAU, Chief Operating Officer

 

M. Alain LOSFELD, Directeur des affaires financières

 

 


([1]) Loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, article 37.

([2]) Amendement n° 99 de MM. Frédéric Soulier et Patrick Ollier au projet de loi de modernisation de la diffusion audiovisuelle et télévision du futur, n° 3460, première lecture, Assemblée nationale.

([3]) Loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007, article 91.

([4]) Amendement n° 145 de MM. Valade, de Broissia et Dallier, Mme Dumas et les membres du Groupe Union pour un Mouvement Populaire au projet de loi de finances rectificative pour 2017, n° 119, première lecture, Sénat.

([5]) Commission européenne, Prolongation du régime d’aide C 47/2006 — Crédit d’impôt en faveur de la création de jeux vidéo, Aide d’État SA.33943 (2011/N) — France, C(2012) 2558 final, 25 avril 2012.

([6]) Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013, articles 27 et 28.

([7]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, articles 79 et 80.

([8]) Amendement n° II-346 de M. Beffara, M. Le Roux, M. Hammadi, M. Bréhier, M. Bloche, M. Premat, M. Pouzol, Mme Lepetit, Mme Martinel, M. Demarthe, Mme Langlade, M. Rogemont, M. William Dumas et M. Belot, au projet de loi de finances pour 2017, n° 4061, première lecture, Assemblée nationale, 3 novembre 2016.

([9]) Décret n° 2022-1392 du 19 octobre 2022 modifiant les dispositions du code du cinéma et de l’image animée relatives aux crédits d’impôt en faveur des créateurs de jeux vidéo.

([10]) Loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, article 55.

([11]) Les dossiers de la DGE, Étude sur l’industrie du jeu vidéo en France — Tissu économique et compétitivité, étude PIPAME, Études économiques, mars 2021.

([12]) Centre national du cinéma et de l’image animée, Étude de l’impact socio-économique du périmètre d’intervention du CNC de 2012 à 2021, rapport établi par EY Consulting, juillet 2023.